982 CAS REPERTORIES SUR 1637 CAS DE VIOLENCES RECENSES PAR L’AJS
L’exploitation sexuelle semble avoir encore de beaux jours devant elle. En effet, en 2018, sur 1637 cas de violences recensés par l’Association des juristes sénégalaises (AJS), les 982 ont trait à l’exploitation sexuelle.

L’exploitation sexuelle semble avoir encore de beaux jours devant elle. En effet, en 2018, sur 1637 cas de violences recensés par l’Association des juristes sénégalaises (AJS), les 982 ont trait à l’exploitation sexuelle. A l’échelle mondiale, l’on enregistre 4 millions de nouvelles victimes de ce fléau chaque année, 500 mille femmes victimes de traite à fin de prostitution par an, avec un chiffre d’affaire estimé à 1000 milliards de dollars US. Suffisant pour qu’en cette édition 2019 de la Journée mondiale de lutte contre ce fléau célébrée hier, lundi 4 mars, les acteurs en appellent à la sensibilisation, l’information et la dénonciation pour cerner l’une des pires formes de violations des droits humains.
982 cas d’exploitation sexuelle enregistrés sur 1637 cas de violences recensés par l’Association des juristes sénégalaises (AJS), à travers ses boutiques de droit dans notre pays, rien qu’en 2018. C’est la chargée de communication de l’AJS, Amy Sakho, qui tire ainsi la sonnette d’alarme à l’occasion de la Journée mondiale de lutte contre l’exploitation sexuelle célébrée hier, lundi 4 mars. «Dans nos boutiques de droits qui sont dans 6 régions du Sénégal, on a enregistrés 1637 cas de violences. Et parmi ces 1637 cas, nous avons 60% qui représentent les violences liées à l’exploitation sexuelle; ce qui fait en chiffre 982 cas. Et ce sont les cas qui ont été portés à la justice, en tout cas qui ont connu une procédure judiciaire. Je ne parle pas des cas qui nous ont été signalés mais dont les victimes ne sont pas allées jusqu’au bout de la procédure», déplore Amy Sakho au micro de nos confrères de la radio Sud Fm.
La chargée de communication de l’AJS qui explique qu’il s’agit d’une atteinte à la dignité humaine, décline comment sa structure assiste les victimes. «L’exploitation sexuelle, c’est une forme de violence, c’est-à-dire une atteinte directe à la dignité et aux droits les plus fondamentaux de la personne. Ça peut arriver à un enfant, un adolescent, une femme ou un homme. Donc les deux sexes… Pour ces cas de violences, on fait une prise en charge holistique. On aide la personne à avoir un certificat médical, à porter plainte. Mais on lui donne un avocat pour toute la procédure judiciaire. Et, après la procédure, on assiste la personne pour le suivi psychologique parce que quand on est victime de violence, d’exploitation sexuelle, ça laisse des conséquences néfastes qui peuvent poursuivre la personne durant toute sa vie. Et puis (la prise en charge) c’est gratuit au niveau de ces boutiques de droit.»
L’EXPLOITATION SEXUELLE EST SOURNOISE, DIFFICILE A CERNER ET ENTOUREE DE SILENCE
De son côté Penda Seck Diouf, la présidente du Comité de lutte contre les violences faites aux femmes et aux enfants (CLVF), interpellée par iRadio, en appelle à la dénonciation, l’information et la sensibilisation pour contrer le mal. «Au CLVF, les rares cas qu’on nous soumet proviennent des zones minières ou des familles dont la fille a été victime de traite de personnes, qui a été déportée dans un autre pays et à qui on a fait miroiter un travail dans ce pays. Et, à l’arrivée, il se trouve qu’au lieu du travail promis, c’est plutôt l’esclavage sexuel ou la violence sexuelle. Donc, au CLVF, on ne reçoit pas de cas souvent. Qu’est-ce que nous faisons face à cette situation ? Nous dénonçons toute forme de violence. Nous ne cessons de dénoncer comme nous dénonçons les viols, etc. Il faut la dénonciation, l’information et la sensibilisation pour que les populations puissent discerner cette forme de violence sexuelle très sournoise et insidieuse.»
Et Mme Diouf de relever que «l’exploitation sexuelle est difficile à cerner du fait de la caractéristique des violences sexuelles, de manière générale. Dans la loi 99-05 du 29 janvier 1999, qui a apporté une modification au Code pénal, en introduisant de nouvelles formes de violences, l’exploitation sexuelle n’est pas expressément citée. Mais, comme toute forme de violence sexuelle, nous la dénonçons. Et, si le cas est soumis au CLVF, automatiquement le comité prend en charge et, avec la victime, voit quels sont les voies et moyens pour porter plainte, etc. Du fait de sa caractéristique de violence sexuelle, l’exploitation sexuelle est entourée de silence. On en fait très rarement cas. Elle est difficile à cerner. Les victimes ne savent pas exactement qu’elles en sont victimes, etc.», souligne-t-elle.
EXPLOITATION SEXUELLE ET PROSTITUTION EN QUELQUES CHIFFRES, PAR AN, DANS LE MONDE : 4 millions de victimes, 500 mille femmes prostituées de force, 1000 milliards de dollars US de CA
Instituée en 2009, la Journée mondiale de lutte contre l’exploitation sexuelle a été célébrée hier, lundi 4 mars. Dix ans après le succès des femmes à travers l’adoption de cette journée dédiée au combat contre ce fléau, le mal est toujours profond. En effet, l’on enregistre 4 millions de victimes d’exploitation sexuelle chaque année dans le monde, 500.000 femmes victimes de traite à fin de prostitution par an. Le chiffre d’affaires (CA) estimé de la prostitution est de 1000 milliards de dollars US.
L’exploitation sexuelle, une des pires formes de négation des droits fondamentaux de la personne, réduit l’être humain à une simple marchandise. Achetées, vendues, menacées, isolées, violées, battues, surveillées, enfermées, torturées, les victimes deviennent des objets de consommation. La Journée mondiale de lutte contre l’exploitation sexuelle a été créée (2009) à l’initiative de l’ONG GIPF (Groupe International de Paroles de Femmes) pour sensibiliser la population au fléau (de l’exploitation sexuelle). Et il est hautement symbolique que ce soient des femmes qui se mobilisent les premières pour lutter contre l’exploitation sexuelle et la pornographie...
CODE PENAL SENEGALAIS : Les peines prévues à l’encontre des auteurs
Les peines encourues par les auteurs d’exploitation sexuelle varient suivant les cas et même l’âge de la victime. Pr Amsatou Sow Sidibé, interrogée par Sud Fm Sen Radio, revient en détail sur ces sanctions prévues par la loi au Sénégal. «Les peines sont variables. On n’a pas une même catégorie de peines. Par exemple, le proxénète peut être poursuivi par le Code pénal d’une peine qui peut aller de 1 an à 3 ans et d’une amande de 250 mille à 2 millions 500 mille F Cfa, quand la victime n’est pas mineure. Mais, quand la victime est un mineur, les peines sont doublées, je veux dire aggravées: 2 ans à 5 ans de prison par exemple. Et l’amende est augmentée: 300 mille à 4 millions de F Cfa. Sauf que s’il s’agit d’activité pornographique, pousser une fille à la pornographie, il faut distinguer selon que la fille est un mineur de moins de 16 ans ou un mineur de moins de 13 ans. Quand la fille mineure est âgée de moins de 16 ans, la peine que peut subir l’auteur de l’activité pornographique peut aller de 1 an à 5 ans d’emprisonnement et 3 ans à 7 ans si le mineur est âgé de 13 ans», explique le Professeur de droit à l’Université Cheikh Anta Diop (UCAD) de Dakar.
D’ailleurs, Pr Amsatou Sow Sidibé donne la définition de du concept d’exploitation sexuelle. «C’est le fait de considérer la femme ou la fille comme une marchandise sexuelle. Donc pousser la femme ou la fille à avoir des attitudes sexuelles permettant de rapporter de l’argent à quelqu’un. C’est important à préciser. Il y a plusieurs cas d’exploitation sexuelle. Le proxénétisme, c’est de l’exploitation sexuelle…, la pornographie qui permet à la personne qui organise ça d’avoir de l’argent. C’est le cas aussi de la prostitution des filles ou des femmes organisée par ces proxénètes-là». Bref, l’exploitation sexuelle est une forme de violence sexuelle. Mais, ce qu’il faut remarquer, c’est que c’est l’une des pires formes de violations des droits fondamentaux de la personne. En ce sens qu’elle met la personne dans une situation de marchandise qu’on peut acheter, qu’on peut céder, vendre et même échanger. Souvent, elle est liée à la pornographie ou à la prostitution… et est faite sur des enfants ou sur des femmes en situation de vulnérabilité ou d’extrême vulnérabilité. Ce sont ces cibles-là, qui en sont les principales victimes.