LES CHINOIS NOUS ONT PLANTÉS
Alioune Ndoye parle du retrait de l’entreprise chinoise chargée des travaux de dragage de la brèche de Saint-Louis

Le retrait de l’entreprise chinoise chargée des travaux de dragage de la brèche de Saint-Louis avait suscité de nombreuses réactions ces dernières semaines. Certains reprochaient même au ministre des Pêches et de l’Economie maritime de «précipitation» dans ses décisions. Invité hier de l’émission «Grand Jury» de la RFM, ce dernier a tenu à apporter quelques éclairages. Alioune Ndoye a déploré l’attitude des Chinois, tout en soulignant le préjudice causé par ce retrait.
L’entreprise chinoise chargée des travaux du dragage de la brèche de Saint-Louis s’est retirée et il y a plusieurs versions. Qu’en est-il vraiment ?
Vous me permettez quand même de clarifier la situation. J’ai lu des choses qui, à mon avis, sont très éloignées de la réalité. Certains journaux ont même parlé de marchés signés précipitamment. Ce marché, c’est un marché qui découle d’un appel d’offres international auquel tous les grands du secteur avaient répondu. C’était d’ailleurs le deuxième appel d’offres que je venais de lancer. J’avais eu à lancer un premier qui était trop cher et je n’avais pas le budget. On l’a déclaré infructueux et on avait relancé le marché. Un marché, ce n’est pas du gré à gré. C’est-à-dire qu’une entreprise ne peut pas démarrer un marché tel quel, signé l’ordre de service du démarrage des travaux sans aucune réserve et au bout de quelques mois et trois mises en demeure, écrire pour dire qu’elle ne peut pas faire ce marché-là à ce prix et dans ce délai. Quand une entreprise dit ça, elle renonce elle-même au marché. C’est ce qui m’a emmené à demander la résiliation. Ce ne sont pas des décisions autoritaires. Le marché, il faut qu’il passe à la DCMP. Et pour le résilier aussi, il faut que ça passe à la DCMP. Résilier le marché et l’arrêté de résiliation, ce n’est même pas le ministère des Pêches qui le fait. Mais c’est le ministère des Finances qui le fait, car c’est un marché d’Etat.
Et comment avez-vous accueilli la nouvelle du retrait des Chinois ?
Quand c’est arrivé, ce fut une douche froide pour nous. Ces gens nous ont emmenés à lancer les travaux à Saint-Louis, à même faire recevoir les acteurs par le président de la République ce jour-là, avec l’entreprise. Donc, nous étions heureux de cette solution. Ils nous ont plantés, si vous m’excusez du terme. Ils nous ont royalement plantés. Et ce qui est gênant, car récemment, j’ai eu la visite d’une autre entreprise qui m’a dit en réalité qu’elle devait être sous-traitante de ces gens. C’est-à-dire qu’ils n’avaient même pas l’intention de faire les travaux eux-mêmes. Et si vous regardez le planning pour emmener le matériel qu’ils nous avaient donné…, la drague principale qui devait faire les travaux n’est jamais arrivée au Sénégal. Voilà ce que nous avons subi en termes de préjudice. Vous savez, ces gens sont même allés au tribunal pour essayer de contester cette décision. Alors que moi, j’estime que l’Etat du Sénégal, le peuple sénégalais a subi énormément de préjudices.
Au plan judiciaire, qu’est-ce que vous envisagez de faire ?
Le dossier est entre les mains de l’agent judiciaire de l’Etat. Et il va défendre les intérêts de l’Etat. Vous comprendrez que j’ai fait appeler certaines de leurs cautions, telle que la caution de bonne exécution. Qui connaît les marchés publics sait quand même que ce sont des pratiques normales. Donc, je ne vais pas au-delà de ça, car c’est entre les mains de l’agent judiciaire de l’Etat.
Peut-on s’attendre à ce que le marché soit attribué à d’autres entreprises et quelle sera la démarche ?
J’avais eu espoir avec une autre entreprise, notamment en lien avec ce qui se fait au large de nos côtes pour le pétrole. Malheureusement, ça n’a pas abouti pour l’instant. Donc, je vais certainement être obligé. J’ai aujourd’hui l’aval de discuter quasiment avec ceux qui étaient dans le marché. J’avais déjà l’avis favorable de la DCMP pour discuter directement, car il y a un problème d’urgence aujourd’hui. Donc, je vais essayer de finaliser avec ceux qui avaient répondu, voir comment discuter avec eux pour aller rapidement vers la contractualisation avec une entreprise de ce secteur.
Il paraît que l’entreprise chinoise avait trouvé dérisoire la somme proposée pour les travaux à Saint-Louis?
Imaginez que cette entreprise chinoise n’était pas la moins chère. Quand elle dit que 7 milliards sont insuffisants, elle n’était pas la moins chère. Une entreprise de renommée internationale était moins chère, mais elle n’avait pas respecté le délai qui était dans les termes du contrat. Et ce critère l’a éliminée.
Est-ce à dire que vous avez des regrets aujourd’hui ?
Dès le début, j’avais eu à demander à la commission des marchés s’il n’y avait pas moyen de donner au moins dix ans (sic). Ils m’ont dit que pour la moindre réclamation, il faut annuler, car c’est un critère qui élimine. Bon, je me plie à la décision de la commission des marchés. Mais aujourd’hui, on a dépassé ce délai. On aurait donné à cette entreprise, on aurait fait dans ce délai. Imaginez que cette entreprise chinoise devait me livrer le chantier le 6 mars dernier. Donc, qu’on ne dise pas qu’il y a précipitation, comme j’ai eu à l’entendre quelque part.
Il paraît que le président de la république n’est pas content de vous ?
Ça, c’est vous qui me l’apprenez. Moi, je ne fais rien dans le dos du président de la République. Tout ce que je fais, c’est lui qui le valide. Donc, vous me l’apprenez