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COLONISATION FRANÇAISE : "CE QUI A DOMINÉ DEPUIS 60 ANS, C'EST L'AMNÉSIE"

En qualifiant de "faute de la République" la colonisation française, Emmanuel Macron porte le premier coup au "tabou absolu" du pays des droits de l'Homme. Entretien avec Pascal Blanchard, historien et spécialiste du "fait colonial"

TV5 Monde  |   Séraphine Charpentier  |   Publication 23/12/2019

En 60 ans, jamais aucun président français n'avait osé aller jusque là. Samedi 21 décembre 2019 à Abidjan, Emmanuel Macron l'a fait. En qualifiant de "faute de la République" la colonisation française, il porte le premier coup au "tabou absolu" du pays des droits de l'Homme. Entretien avec Pascal Blanchard, historien et spécialiste du "fait colonial". 

Dans certains pays d'Afrique, un sentiment "anti-français" s'exprime, dénonçant l'ingérence de l'hexagone dans les politiques intérieures de ses ex-colonies, notamment en terme de lutte contre le terrorisme.

C'est dans ce contexte que le chef d'État français a entamé sa tournée en Côte d'Ivoire et au Niger. Il n'a pas hésité à mettre les mots sur la période sombre de l'Histoire de son pays. Dans son discours du 21 décembre à Abidjan, Emmanuel Macron a ainsi qualifié la colonisation française de "faute de la République". Une histoire, que la France n'a pas osé regarder en face depuis plusieurs décennies. 

Entretien avec Pascal Blanchard, historien, spécialiste du "fait colonial" et auteur de "La République coloniale" et de l'ouvrage à paraître le 14 janvier 2019, "Décolonisations françaises. La chute d'un Empire". 

TV5MONDE : Quel a été le mécanisme psychologique de la France depuis la fin de la colonisation ? 

Pascal Blanchard : Ce qui a dominé depuis 60 ans, c’est l’amnésie. C’est le sentiment de ne pas trancher, de ne pas regarder. La colonisation est le dernier grand sujet de notre Histoire contemporaine qui fait encore débat en France. Le meilleur exemple pour l’illustrer, ce sont les musées. Il y en a pour tous les sujets, sauf un : l’Histoire coloniale. En plusieurs décennies, nous n’avons même pas réussi à construire un récit commun à partager. Ça reste un des grands tabous de l’Histoire.

En quoi Emmanuel Macron est-il été radicalement différent de ses prédécesseurs sur la question coloniale ? 

Tous les chefs d’Etats français ayant précédé Emmanuel Macron n’ont jamais tranché sur cette question. Même pour la gauche, ce fut un tabou absolu. On pense à François Mitterrand, qui fut ministre des Colonies en 1950-1951 avant d’être ministre de l’Intérieur, puis de la Justice pendant la guerre d’Algérie. Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy n’ont pas bougé. François Hollande a tourné autour du pot sans jamais vraiment prendre de grande décision. 

À aucun moment ils n'ont affirmé très clairement que c’était une page sombre de notre Histoire, avec la même dynamique qu’Emmanuel Macron. C’est une grande nouveauté de dire que la « République » a été responsable de ce qu'il a qualifié, en 2017, de « crime contre l’humanité ». La décision d'un tel discours n’est pas mince. Le président sait qu'il va se heurter à la droite ou à l’extrême droite, à une opposition extrêmement vive des nostalgiques de ce passé. C’est donc une décision qui est mûrie, ce n’est pas juste un discours secondaire. Et il fallait passer par là pour commencer à construire une mémoire et une histoire partagées. La France est enfin prête à regarder son passé en face.

Pourquoi cette prise de conscience vient-elle seulement maintenant ?  

Cette prise de conscience vient maintenant, tout simplement parce qu’Emmanuel Macron est né après les indépendances. Il l'a dit dans son discours : "Je n'appartiens pas à une génération qui a connu le colonialisme. Beaucoup des jeunes qui me le reprochent ne l'ont pas connu davantage", dit-il. 

Pour lui, il est temps de changer la manière d’appréhender ce passé. Et c’est un changement fondamental dans notre manière de penser notre Histoire, nos relations avec l’Afrique, avec les diasporas africaines mais aussi antillaises, moyen-orientales et asiatiques qui vivent en France.

Pourquoi est-il toujours si difficile pour la France de reconnaître la colonisation et ses ravages ? Quel est le vrai tabou ? 

Le tabou, c’est la République. Comment la République, pays des droits de l’Homme, pays de l’égalité républicaine, a pu mettre en place un système d'inégalité raciale, de domination sur les hommes, au nom de la couleur de leur peau ? C’est simple, la colonisation est une contradiction absolue avec les valeurs de la République française, avec les valeurs de la révolution française, avec les principes d’égalité et je dirais même de liberté, de solidarité et de fraternité, qui fondent les principes de la République.

L’histoire coloniale est le dernier grand tabou, puisqu’il est en antinomie avec ce qu’est la substance même de la France. Comment expliquer à quelqu’un que la France, pays des droits de l’Homme, a mis en place un système qui justement était l’antithèse des droits de l’Homme ? 

La violence des conquêtes coloniales et l’Histoire des décolonisations expliquent aussi qu'il est si dur de reconnaître le mal perpétré ... 

Oui. De 1943 jusqu’aux années 67-68, ce sont 25 années de violence, une jeunesse sacrifiée et dans tous ces pays, une violence absolue pour s’opposer aux indépendances. Ces histoires-là marquent notre récit avec une autre ambiguïté absolue, celle des rapatriés.

Enfin, au cœur de tous ces traumatismes de la société française, il y a un dernier paradoxe. Ceux qui hier avaient eu des grands-parents colonisés ont migré et sont venus dans le pays qui avait colonisé par le passé le pays de leurs parents ou de leurs arrières grands-parents. Quand vous mettez tout ça bout à bout, vous avez affaire à un des sujets majeurs et des plus sensibles, qui traverse aujourd’hui en terme identitaire, mémoriel, historique mais aussi en terme de relation diplomatique, la société française du XXIe siècle.

Pourquoi "reconnaître" l'Histoire coloniale et ne pas s'en excuser ? 

Emmanuel Macron a reconnu. Il ne s’est pas excusé et ce n’est, en effet, pas la même chose. Ma logique sur la question est la suivante : ce n'est pas un petit blanc n'ayant pas connu la colonisation, qui est responsable de ce qu'il s'est passé en colonie. Par contre, je pense que ce qu'il faut faire pour que la société et la République aillent mieux, c'est pacifier, écouter les mémoires de tous et comprendre le fait qu’il reste quelques vieux reliquats dans la tête de certains blancs dans ce pays.

Quelle est la relation qui unit la France à l'Afrique aujourd'hui ? 

Par rapport à ses relations anciennes, la France a réussi un tour de force :  celui de ne pas être un pays qui serve de balise à l'Afrique, à travers un certain nombre de questions. La France n’a même pas été intelligente dans l’héritage de ce passé, tout simplement parce qu’elle n’a pas été capable de le digérer. Pourtant, nous sommes tous lucides sur ce qu’a fait l’Amérique avec les noirs, par exemple. 

Il va être temps d'ouvrir les yeux, parce que les jeunes d’aujourd’hui ont bien compris ce qu’était cette Histoire, des deux côtés de la barrière. Ils sont beaucoup moins dans l’ambigüité que leurs aînés. Ceux qui ont été les petits-enfants des colonisés, savent très bien ce qu’ont vécu leurs grands-pères et leurs grands-mères. 

Si la République ne regarde pas cela en face, nous allons nous heurter à une vraie violence identitaire. Tant que la société française est incapable d’accepter ce qu’elle a fait, elle continuera d'avoir un regard colonial, d'une certaine manière. C’est dévastateur pour notre société, pour nos relations avec les pays africains - et pas seulement africains, les Antilles, la Guadeloupe, la Martinique, la Nouvelle-Calédonie - et c’est dévastateur sur notre capacité de savoir que la République est capable de dépasser ces questions, pour arriver à se rebâtir sur autre chose.

Notre gestion de l'Histoire est-elle responsable de la violence présente chez certaines jeunes générations ? 

On a voulu fuir cette histoire, on a voulu l’enterrer  et on a cru qu’en l’enterrant ça se passerait bien. Et bien pas du tout. Cela a créé chez la jeune génération encore plus de violence que leurs parents où leurs grands-parents qui sont venus vivre en France. Il faut rendre hommage et faire Histoire, c’est-à-dire transmettre aux jeunes générations, au-delà des mythes et des manipulations. Sinon, d’autres vont s’emparer de ces questions, à tous les extrêmes. Notamment le Rassemblement National qui rejoue, à chaque génération, la guerre contre les noirs et les arabes. Il y a une vraie dimension politique derrière cela et le Rassemblement National joue sur ces questions-là depuis 45 ans. Nous savons les fractures que ça fabrique.

De l’autre côté, vous avez des jeunes racisés dans les quartiers populaires, qui adoptent un discours extrêmement violent parce qu’ils pensent que les blancs ne seront jamais capables de regarder en face cette Histoire. Nous devons être très vigilants car il y a un vrai danger identitariste dans le présent. La question coloniale permet, d’un côté aux ultra-racisés et de l’autre, au Rassemblement National, de nous faire une vraie guerre identitaire. 

Les jeunes de France seront-ils ceux qui apporteront le changement ? 

Cette jeune génération qui vit aujourd’hui en France a fait des études et elle est très lucide. Elle souhaite être le bras mémoriel de ce que leurs grands-parents et leurs parents ont pu connaître, en remettant l’Histoire à l’endroit.

De l’autre côté, les enfants de France sur dix, quinze, vingt générations se demandent comment leurs aînés ont pu faire ça, comment ceux qui se prétendent républicains ont pu accepter ça. Eux aussi ont appris à l’école, eux aussi ont regardé des films. Ils ont vu "Indigènes", des documentaires, ils se sont informés sur les réseaux sociaux, ils ont des amis de ces ex-territoires coloniaux.

Nous vivons aujourd'hui dans une société métisse. Nous devenons donc sensibles à l’histoire de l’autre, qui jusqu’alors n’était portée que par ceux qui avaient subi les affres de l’Histoire.

Au bout de combien de générations un peuple peut-il guérir d'un tel traumatisme ? 

Un peuple peut guérir en quatre générations si nous faisons ce qu’il faut. La première génération subit, la deuxième se tait, la troisième est acteur de son histoire et de la mémoire. Mais si, par exemple, le discours d’Emmanuel Macron ne restait qu’un discours, alors il n'y aurait pas de vraie guérison possible. Nous avons affaire à des transferts générationnels. Si vous prenez l’Allemagne, la troisième génération est celle qui a fait le plus gros travail sur l’Histoire de la Shoah et du nazisme. Et elle ne l’a pas connu pourtant. 

Que reste-t-il à faire à Emmanuel Macron et à la France ?  

C’est d’abord un problème franco-français. Je considère que les Africains ont beaucoup mieux digéré cette histoire qu’on ne l’imagine. La France l'a fait sur la période de Vichy et sur la Seconde Guerre mondiale, on est donc tout à fait capable de le faire ici. 

Nous avons réussi à faire un manuel scolaire franco-allemand. Il est temps d’écrire un manuel scolaire entre les pays africains et les pays européens, qui serait capable d’écrire les cinq derniers siècles en commun. 

Il faut aussi des politiques publiques, savoir enseigner cette histoire à l’école. Il faut créer des grands musées qui parlent de cette question, il faut l’aborder avec des grands documentaires. Il y a aussi eu, dans l'Histoire de la République, des gens qui se sont opposés à la colonisation. Il est temps de raconter tout cela.

Nous avons cette aptitude à pouvoir remettre l’Histoire à l’endroit, à rendre hommage à ceux qui ont pu subir à l’époque les discriminations, la violence coloniale et la douleur d’être dominés. Emmanuel Macron est dans un mouvement du temps. Les choses changent, parce que la dernière génération n’a pas vécu ces événements. Et qu’elle veut comprendre. 

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