GRÈVE DE LA FAIM : IMPLICATIONS JURIDIQUES ET MEDICALES D’UNE FORME DE LUTTE EXTREME
Politiques, syndicalistes, journalistes, activistes et autres acteurs ont recours, de plus en plus, à cette forme de lutte pour la satisfaction de leurs doléances/revendications, le respect de leurs droits,...

Depuis des années, la grève de la faim est devenue un moyen de lutte très prisé. Politiques, syndicalistes, journalistes, activistes et autres acteurs ont recours, de plus en plus, à cette forme de lutte pour la satisfaction de leurs doléances/revendications, le respect de leurs droits, des engagements et autres accords notamment avec les autorités, etc. C’est le cas, ces derniers temps, avec des «détenus politiques» et «d’opinion», qui ont choisi «l’arme» de la grève de la faim pour défendre leur cause et attirer l’attention sur leur situation, en vue de leur remise en liberté. Quelles sont les implications juridiques d’une telle diète en milieu carcéral ?
A l’image d’autres leaders politiques, activistes ou célébrités, le leader de Pastef/ les Patriotes, Ousmane Sonko, placé sous mandat de dépôt pour «appel à l’insurrection…», a entamé une diète volontaire. Cependant, à l’issue de près d’une vingtaine de jours de grève de la faim, qui a nécessité son internement, jusque-là, au Pavillon spécial de l’hôpital Principal de Dakar, Sonko est admis aux réanimations.
Quoique la grève de la faim reste très usitée en milieu carcéral, le droit n’aborde pas directement la pratique, selon des juristes. En ce sens qu’il estime que chacun a le droit de disposer de son corps comme bon lui semble. La grève de la faim est ainsi vue comme une décision personnelle et politique, plutôt que comme un sujet de droit. Toutefois, des spécialistes de la santé sont formels. «Lorsqu’elle nécessite l’usage de la force, elle constitue un acte inhumain». Dans tous les cas, l’alimentation forcée d’une personne capable de discernement, engagée dans un jeûne de protestation, et qui a pris cette décision librement, «est contraire à la déontologie médicale».
Dès lors se pose la question de savoir comment les médecins travaillant dans les structures sanitaires liées au milieu pénitentiaire, comme le Pavillon spécial de l’hôpital Principal de Dakar, peuvent-ils faire face à des situations de diète volontaire de détenus et d’en circonscrire leur marge d’intervention ? Confrontés qu’ils sont à un dilemme éthique : celui du respect de la décision de la personne gréviste, principe d’autonomie de décision, contre la nécessité d’assurer des soins. En effet, la grève de la faim est une démarche volontaire d’une personne qui, forte d’une revendication individuelle ou collective, refuse de s’alimenter, au prix de sa santé ou même de sa vie. Les personnes qui entament cette forme de lutte la font souvent pour des raisons personnelles ou diverses, liées à la procédure judiciaire ou administrative. Seulement, précisent des spécialises en santé, le refus de s’alimenter expose, dans un délai de l’ordre de deux mois, la vie de la personne, mettant en jeu plus prématurément ses fonctions essentielles de manière irréversible, telles que les reins. Associé à une grève de la soif, elle devient beaucoup plus rapidement fatale. Ce fut le cas de Bobby Sands qui, en 1981, a succombé au bout de 66 jours de grève de faim.