LA SOCIETE EIFFAGE ACCUSEE D’ETRE A L’ORIGINE DE LA MORT TRAGIQUE DU JEUNE SALIOU FAYE
Le jeune homme de 16 ans et candidat au Bfem s’est noyé dans un « bassin de rétention »

Pour drainer les eaux hivernales et lutter contre les inondations qui noyaient les quartiers de la Banlieue, l’ancien régime avait décidé de construire des bassins de rétention. Plutôt que de stagner dans les quartiers, les eaux de pluies étaient donc dirigées vers ces bassins de rétention dont la plupart n’étaient pas clôturées au début et ne disposaient pas de grilles de protection. Conséquence : beaucoup d’enfants s’y sont noyés. Au village de Keur Daouda Sarr, situé près de l’autoroute à péage et à 3 km de la ville de Rufisque, un adolescent de 16 ans, candidat au Bfem (Brevet de fin d4études moyennes) n’a hélas pas eu la chance de passer son examen. Pape Saliou Faye s’est noyé dans un bassin de rétention qui est en fait un chantier que la société française, Eiffage, avait laissé sans aucune protection. Les eaux de pluie ont fini par remplir ce vaste trou, le transformant en étang dans lequel les enfants de la localité, en cette période de forte canicule et d’interdiction des plages, viennent se baigner. En dépit de l’interpellation des populations, la société Eiffage n’avait pas jugé utile de fermer l’excavation où s’est produit le drame. La famille Faye accuse la société française d’avoir ôté la vie à son jeune garçon de 16 ans, ce lundi 17 août 2020.
Au village de Keur Daouda Sarr, la tristesse est immense. Tristesse d’avoir perdu un fils parti à la fleur de l’âge. La mort tragique du jeune Pape Saliou Faye, âgé de 16 ans, hante le sommeil des villageois. Keur Daouda Sarr, c’est un village niché au niveau de l’autoroute à péage. A 3 km de la vieille ville de Rufisque, au-dessous du pont qui sépare l’ancienne commune française et le village de Keur Daouda Sarr, plus précisément au lieudit Thiargua montagne, la célèbre société française Eiffage dispose d’un chantier.
Les montagnes de béton et la présence des camions ne font qu’accentuer l’inquiétude des villageois. Le chantier terminé, les camions de ladite société avaient laissé un immense trou argileux sans aucune protection. Et en cette période d’hivernage, les eaux ont fini de remplir cette excavation qui s’est transformée par la suite en un immense bassin de rétention malheureusement sans aucune disposition sécuritaire. C’est ainsi que le jeune Papa Saliou Faye s’y est noyé. Le bassin en question se trouve à quelques mètres du terrain de football de la localité. De ce fait, naturellement, les enfants ont souvent le mauvaise reflexe de s’y baigner en toute insouciance. Quand votre serviteur prenait la photo du bassin, un vigile s’est approché pour nous notifier que la société Eiffage « interdit » que l’on filme ou prenne des photos du lieu du drame.
Tristesse et désolation chez la famille Faye
Chez la famille Faye Chez la famille Faye du village de Keur Daouda Sarr, la cour de la maison est remplie de monde. La tristesse et le désespoir se lisent sur les visages. Les femmes sont assises sur des nattes tandis que d’autres occupent les chaises en plastique.
A l’intérieur de la maison, précisément dans le salon de cette vaste demeure, le père du défunt, Diapaly Faye, est assis dans un fauteuil en face de la porte centrale. Les voisins et les amis de la famille éplorée font d’incessants va-et-vient. Certains sont venus présenter leurs condoléances. Les mots sortent difficilement de la bouche des voisins. « Mon fils était un enfant très attachant. Le jour de sa disparition, il m’a aidé le matin à transporter des briques car la maison est en chantier. Il est né en 2004, avait juste 16 ans et préparait sérieusement son BFEM. Mon fils sortait rarement, il n’avait jamais mis les pieds dans ce bassin de rétention. C’était un enfant qui était bien parti dans la mesure où il était dans un centre de formation en football à Rufisque. Vous imaginez un enfant de 16 ans qui perd la vie dans un bassin de rétention ?
Si seulement cette société française avait mis des barbelés pour sécuriser le lieu cela n’arriverait point. Dans ce pays, les gens sont corrompus. Le procureur, le sous- préfet et le maire étaient au courant du danger car la population avait manifesté contre l’attitude de la société Eiffage. Mais rien n’a été fait. La société Eiffage a tué mon fils et je vais porter plainte » s’indigne Monsieur Faye qui est en train de consulter ses avocats.
A en croire les habitants, la société Eiffage n’a jamais voulu répondre à leurs différentes interpellations sur le danger permanant qui guettait les jeunes de la localité. Pour eux, malheureusement, ladite société n’a pas assumé les impacts environnementaux de ses actions. La maman du jeune disparu, Mamie Dieng, qui a versé toutes les l’armes de son corps, ne peut guère comprendre le malheur qui s’abat sur sa famille. « Nous n’avons cessé de les avertir du danger. Mais hélas, aujourd’hui, ces eaux du bassin m’ont arraché mon jeune garçon. Les derniers instants de mon fils hantent toutes mes nuits. Il m’avait demandé 2000 FCFA car il devait de l’argent à un de ses amis. Heureusement, je lui ai donné l’argent et il a quitté la maison en souriant et je ne l’ai plus revu qu’à la morgue » dit la mère retenant difficilement ses larmes.
L’association des jeunes de la ville de Rufisque entre en jeu dans le combat
Le collectif des jeunes qui défend les intérêts des habitants de la localité s’est engagé afin que la société eiffage puisse pleinement assumer sa faute. Car depuis 2011, les jeunes de la localité avaient rédigé une lettre adressée à la société eiffage pour attirer son attention sur le danger permanant qui guette les enfants de la localité. Mais eiffage a poursuivi ses travaux jusqu’à ce que l’irréparable se produise. « nous avons fait des barrages pour dévier l’eau. Par la suite, la société est venue enlever tous ce que nous avons mis. Nous avons manifesté et aussi avisé toutes les autorités. Le préfet s’est distingué par son absence, le maire de rufisque-nord était présent et un responsable de ladite société. Ce dernier nous a clairement dit que la société n’accepte pas ce barrage dans la mesure où cela met en péril leur chantier. Nous allons porter plainte contre eiffage, car la mort du jeune adolescent doit avoir des poursuites judiciaires » fustige papa traoré, le président du collectif. Selon notre interlocuteur, la société française doit œuvrer pour la protection des enfants en sécurisant d’abord le lieu afin d’éviter les noyades. Ces jeunes avaient averti les différentes autorités sur le danger qu’ils encourent du fait de ce chantier, mais personne ne prenait au sérieux leurs revendications. Mais peut-être qu’avec le drame du lundi 17 août dernier, leurs cris seront peut-être enfin entendus !