LE BUSINESS FLORISSANT DANS LES PRISONS
Interdiction de faire entrer les repas, du sucre dans une tasse de thé à 125 FCFA, communication téléphonique à 60 FCFA la minute

Il est fréquent d’entendre d’ex-détenus dénoncer les mauvaises conditions d’incarcération dans les prisons. Ce que l’on ne savait pas, c’est qu’un business florissant est entretenu dans les prisons sur le dos des détenus. Cette situation a été éventée hier par le coordonnateur du mouvement Frapp France Dégage, Guy Marius Sagna qui, en compagnie des familles des détenus de Kaolack, animait un point de presse.
«Il y a quelque chose d’inacceptable qui se produit dans les prisons. Jusqu'à présent, les prisonniers du Camp pénal sont interdits de recevoir les repas de leurs familles sous le prétexte fallacieux du coronavirus, alors que les gens s’entassent dans les stades pour suivre des matches ou des concerts», s’insurge Guy Marius Sagna qui informe qu’un business florissant est entretenu au Camp pénal sur le dos des détenus. «A l’intérieur de la prison, il y a trois tangana qui vendent et versent, chacun, 5 000 FCFA par jour à l’administration pénitentiaire. Cela fait près de 500 000 FCFA le mois. Où va cet argent ? Mystère et boule de gomme», a indiqué le coordonnateur du mouvement Frapp France Dégage, lors du point de presse qu’il animait hier. Pour que les tangana marchent, affirme monsieur Sagna, il faut empêcher que les repas des familles entrent dans les prisons. «En plus, les boutiques sont interdites de vendre des œufs. Tout cela pour pousser les prisonniers à aller acheter des œufs au niveau des tangana. Nous exigeons que le petit-déjeuner, le déjeuner ou le dîner que les familles veulent donner à leurs parents détenus puissent entrer au Camp pénal. Ce qui se passe au Camp pénal est de la prison business»
PLUS DE 20 DÉTENUS SONT SORTIS DU CAMP PÉNAL ET TRANSFÉRÉS À LA PRISON DE KAOLACK
Le deuxième point abordé par Guy Marius Sagna est relatif à la situation des détenus de Kaolack. «Plus de 20 détenus dont les parents se trouvent tous à Dakar ont été amenés à Kaolack, il y a un mois. L’administration pénitentiaire a ce droit. Il est important que l’Etat, dans les décisions qu’il prend et exécute, y mette une forte dose de social. Ces familles n’ont pas les moyens d’apporter tous les jours à manger à leurs enfants à Kaolack», souligne-t-il avant de révéler que les prisonniers de Kaolack achètent du sucre dans un verre de thé à 125 FCFA. «C’est scandaleux de profiter des prisonniers en vendant à des prix inacceptables. A la prison de Kaolack, il n’y a qu’un seul robinet pour plus de 250 détenus. Dans les chambres, il n’y a pas d’eau. Et les toitures des cellules sont en zinc. Les 10 secondes de communication téléphoniques sont facturées à 60 FCFA. C’est du business fait sur le dos des prisonniers», s’offusque Guy Marius Sagna.
A l’en croire, proposition avait été faite aux autorités d’auditer les 37 prisons du Sénégal. «Depuis 5 jours, certains prisonniers sont en cellule d’isolement, parce qu’ils protestaient contre certaines pratiques dont ils font l’objet.»
Par ailleurs, le leader de Frapp est très sensible au sort des agents pénitentiaires qu’il juge profondément injuste. Il estime que ces derniers font partie des agents de défense et de sécurité les plus mal payés. «Ils sont mal payés en termes de salaire, d’avantages, de primes et d’indemnités. Mais quelle que soit leur situation, ces agents pénitentiaires que nous défendons ne doivent pas s’acharner sur des détenus ou profiter d’eux pour arrondir leurs fins de mois», assène monsieur Sagna qui craint qu’il éclate, un jour, une mutinerie dans les prisons. «Nous tirons la sonnette d’alarme. Après, nous allons nous concerter pour voir ce que nous pouvons faire d’autre. Dans les jours à venir, nous allons parler d’un plan d’actions que nous allons dérouler», indique-t-il. Faisant partie des parents de détenus, Thierno Aliou Bâ demande aux autorités, notamment au ministre de la Justice et à la Direction de l’administration pénitentiaire (Dap) de leur ramener leurs enfants à Dakar.
En pleurs, Salimata Ndiaye veut plus de compassion pour les détenus, notamment ceux qui sont à Kaolack. «Nous voulons qu’ils respectent leurs droits, car ils sont des humains et non des animaux», tranche-t-elle.