LE PROCUREUR REQUIERT L’APAISEMENT
Arrêtés le 23 décembre dernier lors de violentes manifestations des pêcheurs contre l’érection d’un nouveau quai de pêche à Mbour, les 14 jeunes ont comparu hier devant le tribunal

Arrêtés le 23 décembre dernier lors de violentes manifestations des pêcheurs contre l’érection d’un nouveau quai de pêche à Mbour, les 14 jeunes ont comparu hier devant le tribunal. Ils seront fixés sur leur sort mardi prochain. En attendant, le procureur a requis à leur encontre la peine d’un an avec sursis dont un mois d’emprisonnement.
Les 14 personnes arrêtées dans le cadre de la manifestation contre la construction d’un second quai de pêche sur le site du parc piroguier ont été jugées hier par le Tribunal de Grande Instance (Tgi) de Mbour.
Poursuivis pour coups et blessures volontaires (Cbv) à l’endroit d’agents dans l’exercice de leurs fonctions, dommages à la propriété immobilière d’autrui et troubles à l’ordre public, Djibril Boye, Djiby Seck, Déthié Faye, Mama Diamanka, Abdoulaye Ndiaye, Moussa Dieng, Cheikh Seck, Souleymane Faye, Lamine Ndiaye, Ibrahima Ndiaye, Sidy Mokhtar Dieng, Matar Guèye, El hadji Dieng et Abdou Diop ont comparu devant la barre. Ils ont été reconnus coupables de ces chefs d’inculpation par le procureur.
Selon Mamadou Sokhna Thiam, les faits reprochés aux prévenus sont constants. C’est pourquoi il a invité le juge à les condamner à 2 ans avec sursis dont un mois de prison ferme. Dans la journée du 23 décembre dernier, les pêcheurs se sont levés comme un seul homme pour s’opposer à l’érection d’un second quai de pêche sur le site de leur parc piroguier. Ils ont déclenché une véritable intifada dans le quartier Téfess.
Des centaines de manifestants avaient pris d’assaut les lieux où était déployé un impressionnant dispositif sécuritaire. Attaqués par des manifestants en furie, les éléments du GMI avaient fini par battre en retraite pour éviter un bain de sang. N’empêche, certains policiers se sont retrouvés avec des blessures. Devant la barre, le policier Jean Michel Ndecky, chef de l’unité, a indiqué qu’il ne reconnaissait qu’un seul homme parmi les détenus. «Ce jour-là, cet homme (Ndlr : il pointe du doigt Ibrahima Ndiaye) avait voulu emprunter la route, je lui ai dit que le passage était interdit. Il m’a demandé les raisons de cette décision et je lui ai répondu que je n’en savais rien et que je ne faisais qu’exécuter des ordres. Il a rebroussé chemin en rouspétant», a-t-il soutenu.
Comme lui, les 13 autres éléments du GMI n’ont reconnu aucun manifestant. Les 14 mis en cause (composés de 2 pêcheurs, 2 mareyeurs, 4 chauffeurs, 2 laveurs de voitures et 4 commerçants) ont tous nié les faits qui leur sont reprochés. Malgré leurs dénégations aussi bien dans le procès-verbal d’enquête que devant la barre, ils ont été complètement chargés par le procureur. «C’est le renversement des rôles. On avait l’habitude d’entendre que la police a brimé, tabassé, violenté ou brutalisé quelqu’un et non pas qu’elle a subi la furie d’une population déchaînée. Ces manifestants ont tous été arrêtés sur le théâtre des opérations. Donc, on n’a pas besoin de les reconnaître pour prouver leur culpabilité», clame le procureur Mamadou Sokhna Thiam.
HOMMAGE AUX FORCES L’ORDRE
Les avocats des parties civiles ont rendu un vibrant hommage aux policiers dont le devoir exige parfois le sacrifice suprême. Embouchant la même trompette, les conseils de la défense Mes Kane, Fall et Ndior ont magnifié la loyauté des limiers devant la barre. «Une fois de plus, ces gens ont honoré leur tenue. Alors qu’ils ont subi les assauts des manifestants, ils avouent devant la barre qu’ils ne reconnaissent aucun des détenus. Ce sont de braves hommes qui ont choisi un métier difficile en viellant sur notre sécurité nuit et jour au risque de leur vie», a soutenu Me Fall.
Son confrère Me Ndior a accusé l’Etat d’être à l’origine des évènements du 23 décembre. «L’Etat dépense des milliards pour des futilités alors qu’il est incapable d’assurer la protection de ses éléments qui constituent la quintessence de la République car assurant la sécurité. Ce jour là, la République a tremblé au plus haut niveau, car l’autorité a négligé les menaces qui pesaient. On devait commencer par une campagne de sensibilisation et des discussions pour éviter ce problème. Hélas ! Nos clients ont été détenus alors qu’ils n’étaient même pas sur le théâtre des opérations. Certains d’entre eux ont été arrêtés au commissariat alors qu’ils étaient venus s’enquérir de l’arrestation de leurs proches», affirme Me Ndior. Le verdict sera prononcé le 14 janvier prochain.