LES “GP”, NOUVELLE LOGISTIQUE DES TRAFIQUANTS DE DROGUE
Le commissaire Mody Fall alerte sur l’usage détourné des Gratuités partielles (GP) par les trafiquants, pointant aussi l’essor des drogues de synthèse et les failles du cadre juridique sénégalais.

Le phénomène des Gratuités partielles communément appelées ‘’GP’’ dans les compagnies aériennes est en train de constituer de la logistique pour les trafiquants de drogues, a déclaré le commissaire Mody Fall de l’Office central de répression du trafic illicite des stupéfiants (Orctis).
”Avec l’impact de la Covid-19, les trafiquants de drogues se sont trouvés un moyen très efficace de commercer. Ce sont les plateformes qu’ils utilisent derrière lesquelles ils peuvent s’attacher, faire acheter leurs produits sans se faire prendre. Il y a également le phénomène des GP qui est une création purement sénégalaise qui est en train de constituer de la logistique pour les trafiquants de drogues”, a dit l’agent de l’Orctis.
Il prenait part, mardi, au panel de discussions sur les nouvelles drogues organisé par le Centre régional de recherche et de formation (Crcf) dans le cadre de la semaine de la 38-ème édition de la semaine nationale de sensibilisation et de la mobilisation contre les drogues.
”Il y a également le développement du commerce. Il n’est pas rare qu’un GP rentre au Sénégal avec des produits pharmaceutiques qu’il n’a pas le droit d’emmener au pays (…)”, a informé le commissaire Fall.
”Les trafiquants l’ont compris, ils utilisent souvent des cachettes et confient de la drogue à ces GP-là”, a-t-il ajouté.
L’autre difficulté, selon le commissaire de police, ‘’c’est que le cadre juridique national est dépassé, à l’image de pas mal de pays”, relevant que ”la vitesse de production des Nouveaux produits de synthèse (NPS) est plus rapide que le rythme de législation”.
”Les textes de modification sont dans les couloirs depuis dix ans”, a déploré Mody Fall qui dit avoir ”bon espoir” que bientôt le code des drogues va être révisé et mettre au centre la question des abus et la place également des toxicomanes dans le cadre législatif.
Il a souligné que ”les drogues de synthèse se manifestent par leur caractère artificiel”.
”C’est-à-dire qu’elles sont créées dans des laboratoires. Maintenant, par la notion de laboratoire, il ne faut pas voir un bâtiment. Mais avec deux bouteilles, vous pouvez faire un laboratoire. Vous prenez une boisson gazeuse, vous additionnez des comprimés, vous avez votre dose. Et malheureusement, c’est ce qu’on voit de plus en plus”, a t-il expliqué.
‘’C’est pourquoi on voit de plus en plus de comportements déviants dans les écoles, partout où vous allez. C’est parce qu’il y a cette mixture-là que les gens sont en train de créer. Et cela les expose à des dangers que personne véritablement ne comprend”, a ajouté le responsable de l’Orctis.
‘’L’Ecstasy ou volet ravit la vedette au cannabis’’
Mody Fall a indiqué que ”l’ecstasy, l’une des drogues les plus populaires, est en train de ravir la vedette même au chanvre indien. C’est une drogue qui est apparue vers 2019, qui coûtait entre 10 000 et 15 000. Maintenant, c’est entre 3 000 et 5 000 FCFA”.
Il y a aussi le Lean, un mélange de sirop et de comprimés que les jeunes utilisent, a t-il signalé.
Pour sa part, Jeffrey Bawa représentant de l’Onudc (Organisation des Nations unies contre la drogue et le crime) a alerté que ”le Sénégal fait face à une crise dévastatrice”. ”Elle est extrêmement dangereuse. Le Kuch est 500 plus dangereux que l’héroïne. Une petite substance peut être mortelle”, a t-il dit.
Dans le cadre de la prise en charge de cette problématique, il estime qu’il faut rompre avec l’approche nationale. ”Comprendre la composition du Kush devient une urgence, il faut des laboratoires pour savoir ce qui se trouve dans cette substance. Les composants peuvent changer d’un pays à un autre. D’où l’intérêt de bâtir une coopération régionale”, a-t-il conclu.