LES HERITIERS DE FEU ELIE KERKYRAS RECLAMENT 230 MILLIONS DE FRANCS A L’AGENCE HORTALA
L’Agence Hortala, aussi vénérable que discrète dans le paysage immobilier national, risque de se retrouver à son corps défendant sous les feux de la rampe.

L’Agence Hortala, aussi vénérable que discrète dans le paysage immobilier national, risque de se retrouver à son corps défendant sous les feux de la rampe. A cause d’un immeuble situé à la rue de Thiong et appartenant à un richissime commerçant grec décédé accidentellement en 1960. En effet, depuis la disparition de cet homme, il y a soixante ans, l’agence Hortala encaisse indument les loyers versés par les locataires. Durant ces six décennies, l’argent encaissé par l’agence est estimé à plus de 230 millions de nos francs. Finalement mis au courant de l’existence d’un bien immobilier laissé par leur défunt père au Sénégal, les héritiers de feu Elie Kerkyras ont porté plainte pour escroquerie et occupation illégale du bien d’autrui. Outre la restitution des fonds encaissés, les plaignants grecs réclament 100 millions de francs de dommages et intérêts. Contacté par « Le Témoin », le gérant de l’agence immobilière Hortala dit qu’il ne peut pas se prononcer sur une affaire pendante devant les tribunaux.
Le 29 août 1960, à l’aube de notre indépendance, le célèbre poète David Diop, connu pour son poème immortel « Afrique, mon Afrique », meurt dans le crash d’un avion d’Air France au large de Dakar. Parmi les 54 passagers victimes de ce terrible accident, outre le grand poète, figurait un grand commerçant grec établi à Dakar du nom d’Elie Kerkyras. Il était propriétaire d’un immeuble sis 10 rue de Thiong x Wagane Diouf à Dakar. De son vivant, il habitait dans cet immeuble tout en ayant donné en location le reste des appartements et magasins. Après sa mort et aucun héritier ou ayant droit ne s’étant manifesté, l’agence Hortala a réussi on ne sait comment à s’approprier l’immeuble du 10 rue de Thiong.
Après quoi, elle a sommé les locataires de venir désormais payer leurs loyers dans ses caisses. C’est ainsi que, depuis 60 ans — du moins selon les plaignants — l’agence Hortala « squattait » l’immeuble de feu Elie Kerkyras en percevant régulièrement mais indument les loyers. Il a fallu 60 ans pour que le pot aux roses soit découvert par les héritiers Kerkyras vivant en Grèce. D’où la plainte déposée par eux pour escroquerie et occupation illégale du domicile d’autrui à la Section de recherches de la gendarmerie de Colobane. Convoqués par les redoutables pandores, les responsables de l’agence Hortala n’auraient pas été en mesure de fournir le moindre droit de propriété encore moins un contrat de gérance les liant à la famille Kerkyras.
Coincés sous les « décombres », les Hortala s’étaient empressés de se débarrasser de l’immeuble incriminé. Ce qui laisse croire que pendant plusieurs années, ils s’occupaient de la gestion locative de cet immeuble sans droit ni titre. Aux yeux des héritiers grecs, cette affaire est un véritable scandale foncier et financier qui n’existe nulle part ailleurs qu’à Dakar. Et qui ne peut pas rester impuni ! En assignant l’agence Pierre Hortala devant les tribunaux, les héritiers disent avoir découvert récemment que leur défunt père, Elie Kerkyras, avait laissé entre autres biens à Dakar un immeuble dont ils sont aujourd’hui les propriétaires légitimes. Une légitimité dont atteste un état des droits réels en date du 24 avril 2020. Ces héritiers ne comprennent évidemment pas que, depuis le décès accidentel de leur père, l’agence Hortala ait encaissé frauduleusement les loyers dudit immeuble. A les en croire, les sommes indument récupérées sont estimées à plus de 230 millions CFA. Les fils Kerkyras demandent donc au tribunal d’ordonner la restitution des fonds et de condamner l’agence Hortala à leur payer la somme de 100 millions de francs à titre de dommages et intérêts.
M. Hortala, gérant : «Je n’en parle pas»
Pour la version de la partie incriminée, « Le Témoin » a réussi à joindre le gérant de l’agence Hortala. Confronté aux accusations, M. Hortala s’est montré évasif et nous a répondu en ces termes : « Monsieur (Ndlr : votre serviteur), vous dites que l’affaire est pendante devant les tribunaux, donc laissons la justice faire son travail ! Vraiment, je ne peux pas parler sur une affaire pendante devant les tribunaux… » a déclaré notre interlocuteur avant de raccrocher. L’affaire opposant les héritiers de feu Elie Kerkyras à l’agence Pierre Hortala a été évoquée le lundi 10 août dernier devant le tribunal de grande instance de Dakar statuant en matière civile et a fait l’objet de plusieurs renvois depuis lors.