«ON NE PEUT PAS RÉGLER LES PROBLÈMES SÉCURITAIRES DANS NOS PAYS, S’IL N’Y A PAS DE DÉMOCRATIE CITOYENNE»
C’est la conviction de l’Historien par ailleurs consultant sur les questions de paix et de sécurité, Abdoulaye Bathily, qui prenait jeudi 1er septembre au webinaire organisé par le Forum Ouestaf

Le Forum Ouestaf a organisé, hier, un webinaire sur le thème : «Tensions sécuritaires en Afrique de l’ouest : quel impact sur la démocratie». Animant la rencontre, le Pr Abdoulaye Bathily a fustigé la non- implication des citoyens dans la recherche de solutions. Il trouve qu’on ne peut pas régler les problèmes sécuritaires dans nos différents pays, s’il n’y a pas de démocratie citoyenne.
L’implication des populations à la base dans la discussion est une condition sine qua non dans la lutte contre l’insécurité. C’est la conviction de l’Historien par ailleurs consultant sur les questions de paix et de sécurité, Pr Abdoulaye Bathily, qui prenait hier au webinaire organisé par le Forum Ouestaf.
En effet, l’ancien secrétaire général de la Ligue Démocratique (Ld) estime que la question d’insécurité dans la sous-région ne devrait pas être confiée seulement aux militaires, aux agents de police ou aux gendarmes. «Je pense que le fait de s'engager dans la voie militaire, celle qui considère qu’il faut plus d’avions ou plus de capacité militaire pour faire face à l’insécurité, c’est une grave erreur et nous risquons de payer très cher. A mon avis, on ne peut pas régler les problèmes sécuritaires dans nos différents pays, s’il n’y a pas plus de démocratie citoyenne, c’est-à-dire l’implication des populations à la base dans la discussion», indique le Pr Abdoulaye Bathily. Pour lui, la crise sécuritaire est le reflet d’une crise de la société, notamment du mode de gestion politique. Pour aller vers les perspectives de solutions, souligne l’ancien ministre de l’Environnement, il urge d’inclure les citoyens dans le choix des politiques qui les intéressent et surtout d’apporter des corrections sur le mode de gestion des politiques de développement. «Nous avons à faire à une crise dans la gestion de la diversité dans tous les pays. Et la plupart de ces régions qui sont concernées aujourd'hui par cette crise sécuritaire sont des régions marginalisées et sont des populations qui se considèrent de manière légitime comme marginalisées», déclare le paneliste. Par ailleurs, le célèbre historien exhorte les dirigeants à rompre d’avec le mode de gestion des terroirs des anciens colons qui avaient divisé nos territoires coloniaux en zone utile et en zone moins utile. «Aucun de nos Etats n’a rompu avec cette politique de marginalisation de certains individus au détriment d’autres. Et tous les investissements publics malheureusement ont suivi cette tendance ces dernières années. Il faut rompre avec cette pratique, parce que la diversité, c'est de tenir compte des modes de vie des populations. Ne pas considérer qu’un propriétaire de bétail est moins important qu’un producteur de coton ou d’arachide. Donc, il faut que ces deux types d'économie soient articulés. D’autant qu’ils ont, tous, leur importance dans l’économie nationale», ajoute le Pr Bathily.
Au-delà de l’implication des populations, le professeur d’histoire juge également nécessaire qu’il ait une intégration sous-régionale élargie dans la lutte contre l’insécurité. «Il y a des populations qui considèrent qu’elles ne sont pas citoyennes d’un seul pays, mais d’un groupe de pays. Par exemple, on parle de la zone des 3 frontières. Cela veut dire qu’il y a des citoyens dans ces zones dont le mode d'existence correspond à la nécessité d'une plus grande intégration politique. Donc l’implication de ces citoyens dans la définition des politiques nationales et des politiques régionales est nécessaire», indique le paneliste qui exhorte par conséquent les dirigeants africains à faire marche arrière en impliquant beaucoup plus les citoyens aussi en réformant les systèmes démocratiques sur le plan politique, social et économique. Cela doit se faire avec l'ensemble des citoyens et non pas en groupe de citoyens en armes. C’est pourquoi, je ne suis pas pour des Etats plus militarisés, car les Etats qui sont dirigés par les juntes n'ont pas cette capacité d’impliquer les citoyens dans un débat démocratique», affirme le Pr Abdoulaye Bathily.