JE NE VOIS PAS D'ÉLECTION SE TENIR SANS LA PRÉSIDENTIELLE DE SONKO
Juan Branco, l'avocat franco-espagnol du maire de Ziguinchor avertit l'État du Sénégal sur la gravité d'une éventuelle élimination de son client au scrutin du 25 février 2024
Invité de l'émission ‘’Grand jury’’ du dimanche de la RFM, l'avocat franco-espagnol de l'opposant Ousmane Sonko a averti l'État du Sénégal sur la gravité d'une éventuelle élimination de son client à la présidentielle du 25 février 2024. Il a informé que la Direction générale des Élections, qui refuse de donner des fiches de parrainage au mandataire de Sonko, n'a pas dit la vérité au peuple sénégalais.
L'opposant politique Ousmane Sonko a été radié du fichier électoral, le mercredi 16 août 2023. Mais le juge du tribunal de grande instance de Ziguinchor, Sabassy Faye, a ordonné sa réintégration dans ledit fichier. Invité à l'émission ‘’Grand Jury’’, hier, Me Juan Branco est revenu sur la décision du magistrat.
Selon l'avocat franco-espagnol de Sonko, ces dernières années, l'État du Sénégal a appris à mentir. Car, dit-il, ils ont, à de très nombreuses reprises, malheureusement, démenti de fausses communications officielles. Après avoir salué la décision ‘’courageuse’’ du tribunal de Ziguinchor de réintégrer Ousmane Sonko dans ses droits, l’avocat déclare : "N'importe quel juriste un minimum sérieux, et cela même l'ancien ministre de la Justice le sait, malgré tout ce qu'il a prétendu, sait que la condamnation dans l'affaire Sweet Beauté de M. Sonko pour corruption de la jeunesse a été anéantie, depuis son arrestation, car il était contumax. Ce sont des débats qui sont techniques et compliqués pour des personnes qui ne sont pas juristes."
‘’Il est malheureux, regrette-t-il, que le directeur général des Élections prétende que le recours contre la décision du tribunal de Ziguinchor, qui permet à M. Sonko de redevenir éligible, soit suspensif. Dans la loi organique portant sur la création de la Cour suprême du Sénégal, il y a cinq cas qui sont cités et aucun entre eux n'est d'application à la décision du tribunal de Ziguinchor’’. À cet effet explique-t-il, "là, on a une question qui se pose qui est très importante. Est-ce que le directeur général des Élections agit par lui-même ? Évidemment, ce n'est pas le cas. Il reçoit des instructions qui sont politiques. Ça veut dire que, aujourd'hui, au Sénégal, l'Administration n'applique plus le droit, n'applique plus la volonté du peuple sénégalais, mais des instructions qui sont données par le gouvernement qui est prêt à tout pour se maintenir au pouvoir".
"Il n'y a pas de plan B, il y a la nécessité de mettre fin à cette pantomime"
Dans la même veine, l'avocat de l'opposant Ousmane Sonko avertit l'État du Sénégal sur la gravité d'une éventuelle élimination de son client à la Présidentielle du 25 février 2024. "Je pense que c'est un jeu très dangereux auquel joue le pouvoir actuellement, en tentant d'éliminer politiquement M. Sonko. Je ne vois pas des élections se tenir normalement sans sa candidature en février. Je ne vois pas le peuple sénégalais participer massivement et donner une légitimité au pouvoir qui s'y présenterait en février 2024 sans la participation de M. Sonko", déclare la robe noire.
Ainsi, il estime qu'on ne doit pas jouer avec le feu. Selon Me Branco, le Sénégal a besoin de stabilité, de démocratie et d'un pouvoir qui soit soutenu par le peuple. "Il n'y a donc pas de plan B. Il y a la nécessité de mettre fin à cette pantomime qui est un jeu dangereux pour les gens qui l'alimentent. Je n'exagère pas’’, poursuit-il.
Pour rappel, le mandataire de l'opposant Ousmane Sonko, Ayib Daffé, s'est rendu à deux reprises à la Direction générale des Élections pour récupérer les fiches de parrainage de son leader. Mais la DGE a refusé de les lui remettre. Dans un communiqué publié dans la soirée de vendredi dernier, elle a justifié ce refus par le fait que les avocats de l'État ont intenté un recours qui rend suspensive la réintégration de Sonko sur le fichier électoral. Le dernier mot reviendra à la Cour suprême.
ET SI SENGHOR AVAIT DÉSHÉRITÉ LE SÉNÉGAL ?
Si les négociations entre l’État du Sénégal et la commissaire-priseuse n’aboutissent pas, les biens de Senghor seront vendus aux enchères en décembre. Il s’agit là du respect de la volonté de l'ancien président et de ses ayants droit
Si les négociations entre l’État du Sénégal et la commissaire-priseuse n’aboutissent pas dans les jours à venir, les biens de Senghor seront vendus aux enchères au mois de décembre. Loin de la problématique de la restitution des biens culturels, il s’agit là du respect de la volonté de Senghor et de ses ayants droit qui n’ont pas œuvré pour le retour de ces biens au pays d’origine du président-poète.
L’annonce de la vente aux enchères d’objets ayant appartenu au président Léopold Sédar Senghor a suscité l’émoi en fin de la semaine dernière. Poussant l’État à prendre en main la question pour négocier une suspension de la procédure. Commissaire-priseur à l’hôtel des ventes de Caen, Mme Solène Lainé confirme à l’Agence française de presse : ‘’Nous avons été contactés par l'ambassadeur du Sénégal en France et le ministère des Affaires étrangères français pour nous présenter la demande de médiation de l'État sénégalais autour des lots issus de la succession de Léopold Sédar Senghor et de son épouse…’’
Selon la commissaire, cette collection appartient à une particulière et n’a rien à voir avec le fonds que les Senghor avaient légué à la mairie de Verson, comme certains pouvaient le penser. L’État du Sénégal, reconnait-elle, est en négociation pour acquérir la totalité de la collection.
Revenant sur les raisons de la suspension qui a fait suite aux protestations, elle déclare : ‘’Ma vendeuse et moi-même comprenons parfaitement l'émoi suscité par cette vente auprès des Sénégalais et des senghoristes. Nous avons donc décidé de sursoir à la vente dans un objectif de dialogue.’’
Avec cette suspension, le Sénégal se donne une chance d’acquérir ces biens culturels, mais il reste encore beaucoup à faire pour traduire cette volonté en réalité. De l’avis de la commissaire-priseuse, la négociation est une question de semaines. ‘’L’objectif de toutes les parties est de trouver un terrain d’entente. Si la négociation aboutit, cela signifierait l’annulation de la vente. En cas d’échec, les lots seront remis aux enchères en décembre’’, avertit Solène Lainé qui se dit toutefois optimiste.
Il convient de rappeler que ce n’est pas la première fois que des biens ayant appartenu au président Léopold Sédar Senghor ou à son épouse fassent l’objet de ventes aux enchères en France. Dans son communiqué rendu public en fin de semaine dernière, le ministère de la Culture rappelle que l’État avait déjà réagi pour empêcher la vente d’un véhicule de l’ancien président. ‘’Par devoir patriotique et pour préserver la mémoire et le patrimoine que constitue le président Léopold Sédar Senghor, le chef de l’État Macky Sall a demandé au ministre de la Culture et du Patrimoine historique, en relation avec l’ambassadeur du Sénégal à Paris, d’engager des discussions avec le commissaire-priseur, en vue de permettre l’acquisition, par l’État du Sénégal, des objets mis en vente’’, lit-on dans le communiqué qui rappelle que la même mesure a été prise par le chef de l’État, quand le véhicule de l’ancien président était sur le point d’être vendu.
Le tableau de Pierre Soulages a eu, en revanche, moins de chance. Il a été vendu à prix d’or : 1,5 million d’euros, soit près d’un milliard de francs CFA, en janvier 2021.
La logique mercantiliste des ayants droit de Senghor
Ces ventes interviennent dans un contexte où la restitution des biens culturels est au cœur de la politique africaine de la France. Auteur d’un livre sur cette problématique de la restitution des biens, Fatoumata Sissi Ngom invite à faire la part entre ce noble combat et le cas d’espèce où l’ancien président lui-même ou ses ayants droit n’ont pas souhaité le retour de ces biens au pays d’origine.
‘’Au niveau personnel, l’annonce de la vente de ces objets n’a suscité en moi aucune émotion, positive ou négative. L’intention de l’État sénégalais est différente de celle de Senghor (avec son épouse, dans le cadre d’un testament par exemple) et de ses ayants droit qui, eux, n’ont pas œuvré à faire entrer ces reliques ou souvenirs dans le patrimoine du pays d’origine du président-poète. Mais il faut respecter les choix et la liberté de chaque partie’’, analyse-t-elle.
En l’espèce, la logique mercantiliste du marché semble prendre le dessus sur les autres considérations. Fatoumata Sissi : ‘’Nous sommes dans une économie de marché et non dans un contexte de drame culturel imaginaire. Si l’État du Sénégal peut faire une offre pour certains objets de cette vente qu’il le fasse. Nous ne sommes bien entendu pas dans un contexte de retour d’objets et encore moins de restitution, mais on entrevoit bien (à travers cette affaire) la grande complexité de ces discussions sur ce qu’on appelle le ‘patrimoine historique national’.’’
Pour rappel, une bonne partie du patrimoine de Senghor et de son épouse a été légué à la commune de Verson, à Caen. Dans ce patrimoine, il y a l’importante demeure où vivait l’ancien président et son épouse, mais également près de 2 000 biens mobiliers. Si l’on en croit la commissaire-priseuse, les biens dont la vente était projetée le samedi passé ne font pas partie de ce fonds légué à la commune normande. Nous sommes toujours sans réponse à propos de l’identité de la vendeuse.
Me Bara Diokhané et les violations sur le patrimoine de Senghor
Engagé dans le combat pour la préservation du patrimoine, en particulier le patrimoine bâti de Dakar-Plateau, Maitre Bara Diokhané a saisi cette opportunité pour réitérer son combat pour la préservation du patrimoine. L’avocat estime qu’il est ‘’paradoxal’’ que l’État déploie autant d’énergie et de ressources pour préserver la mémoire de Senghor ; ce qui est louable certes, mais qu’en même temps de rester passif face aux violations sur le patrimoine situé sur le territoire même. ‘’On est effectivement tenté de croire en une politique émotionnelle et opportuniste’’, peste le défenseur du patrimoine de Dakar-Plateau.
Du côté de l’État du Sénégal, on continue de manœuvrer ferme pour empêcher définitivement la vente des reliques de Senghor, préserver la mémoire du premier président du Sénégal. Dans ce cadre, une importante délégation a été dépêchée à Paris pour assister à une exposition sur l’ancien président au musée du Quai Branly. Mieux, l’État du Sénégal, à travers le ministre de la Culture, souhaiterait faire profiter les Sénégalais de cette belle exposition sur les présidents Senghor et Sall.
‘’Pour prolonger ce voyage immersif à travers le temps et l’espace, le Sénégal se propose d’abriter ces deux expositions à partir du mois de janvier 2024. Ces expositions offriront aux jeunes générations une opportunité d’apprendre de deux présidents ayant façonné le Sénégal, les incitant à la réflexion pour leur propre rôle dans l’avenir du pays’’, lit-on dans le communiqué.
QUAND LA PÊCHE NE NOURRIT PLUS SA POPULATION
Tableau de la situation vécue par les familles de pêcheurs locales au port de pêche de Rufisque. Dans ce contexte de précarité croissante, peu de perspectives s'offrent à la population
Brice Folarinwa de SenePlus |
Publication 23/10/2023
Dans son récent reportage réalisé dans le port de pêche de Rufisque, au sud de Dakar, le Temps Afrique dresse le sombre tableau de la situation vécue par les familles de pêcheurs locales.
"Aujourd'hui, les sorties en mer rapportent quatre à cinq fois moins qu'autrefois", déplore Elhadji Malick Lô, 46 ans, interrogé sur place. Comme lui, les pêcheurs sont unanimes: les prises diminuent dramatiquement "de jour en jour", ne permettant plus de subvenir aux besoins des foyers.
Selon les explications recueillies, "c'est depuis que le gouvernement a vendu des licences de pêche aux gros bateaux" que la situation a décliné. Kondjira, jeune pêcheur, témoigne avec colère: "C'est une génération de pêcheurs traditionnels que vous êtes en train de tuer".
Ces "gros bateaux", ce sont des chalutiers industriels étrangers qui "prélèvent des tonnes de poissons, transformés au large, sans jamais accoster", observe le journal. Résultat, "les ressources halieutiques sont épuisées sans créer aucun emploi pour les Sénégalais".
Dans ce contexte de précarité croissante, peu de perspectives s'offrent à la population. Le scénariste Kondjira, dont le script sur "un pêcheur qui embarque sur une pirogue dans les ténèbres pour retrouver au large une lueur d'espoir" n'a trouvé aucun écho, envisage désormais de tenter sa chance par la mer. "Comment j’explique à ma mère, à mon père, à ma femme, à mes enfants que je ne rapporte rien à manger?", lance-t-il, désespéré.
Ainsi, malgré les risques de naufrage évalués à 30%, les départs clandestins par bateau augmentent chaque mois au départ du Sénégal, sans que les autorités ne parviennent à enrayer le phénomène.
PRISON DE ZIGUINCHOR, LES GRÉVISTES GAGNENT UNE MANCHE DE LA BATAILLE
Les 182 détenus à la prison de Ziguinchor qui observaient une diète depuis lundi, ont levé leur mot d’ordre de grève suite à des négociations avec les autorités pénitentiaires et des des représentants du ministre de la justice selon un communiqué du Frapp
Les 182 détenus à la prison de Ziguinchor, qui observaient une diète depuis lundi, ont levé leur mot d’ordre de grève, suite à des négociations. Au terme des pourparlers, lit-on dans un communiqué du Frapp, les autorités pénitentiaires et des représentants du ministre de la Justice ont pris des engagements pour la satisfaction de leurs doléances. Il s’agit, «de la réduction du coût de la minute d’appel téléphonique de 50 à 25 francs Cfa, de l’engagement du directeur des prisons à passer à la prison de Ziguinchor la semaine prochaine, etc.».
Selon le document transmis, le directeur de la prison a promis de dire au juge d’instruction d’augmenter le nombre de détenus à entendre dans le fond. «Les grévistes ont décidé de mettre fin à la grève jusqu’au 15 novembre 2023. Si rien n’est fait à cette date, ils vont reprendre la résistance», met en garde Frapp dans son communiqué.
ON NE FAIT PLUS CONFIANCE A LA DGE
L’ancien Premier ministr de Macky Sall qui a fait face ce dimanche à la presse n’a pas raté la Direction générale des élections (DGE). Aminata Touré a dénoncé le refus de l’octroi de fiches de parrainage au mandataire du candidat Ousmane Sonko
L’ancien Premier ministr de Macky SALL qui a fait face ce dimanche à la presse n’a pas raté la Direction générale des élections (DGE). Aminata TOURE a dénoncé le refus de l’octroi de fiches de parrainage au mandataire du candidat Ousmane SONKO. « J’accuse le président de la République et son candidat par procuration, Amadou BA, de ne pas respecter les décisions de justice. La décision du juge FAYE doit être respectée par la DGE qui n’a pas le droit de ne pas respecter les décisions de justice. C’est inacceptable et injuste. On ne fait plus confiance à la DGE », tance l’ancienne Première ministre.
La nomination de Me Sidiki KABA au ministère de l’Intérieur indispose également l’ex-cheffe du gouvernement et ancienne ministre de la justice qui suspecte un coup fourré et pire un hold-up électoral. « Je considère la nomination de Sidiki KABA comme suspecte. Le logiciel du parrainage doit être audité par les candidats pour déceler et éliminer les pièges placées pour filtrer les candidats », souligne Mimi TOURE.
JE NE SUIS PAS UN FRUSTRÉ
Mouhammad Boun Abdallah Dionne évoque sur sa décision de passer outre le choix de BBY pour la présidentielle. À l'en croire, l'élection présidentielle est une affaire personnelle. Il relève par ailleurs les insuffisances du PSE
Amadou Ba & Mamadou Mbakhé Ndiaye |
Publication 23/10/2023
L’annonce de sa candidature a surpris plus d’un tant l’ancien Premier ministre Mouhammad Boun Abdallah Dionne qui a dirigé le gouvernement du Sénégal de 2014 à 2019 était l’homme de
confiance du président Macky Sall. Mais dans cet entretien spécial accordé au groupe L’AS, l’ingénieur informatique est revenu sur sa décision de se présenter en passant outre le choix de BBY. Pour lui, une élection présidentielle est une affaire personnelle. Sans langue de bois, l’ex-chef du gouvernement se permet même de relever les insuffisances du PSE. De l’avis de celui qui refuse d’être taxé de «frustré», il faut passer d’un Sénégal des projets à un Sénégal des réformes.
Depuis quand l’idée de devenir président de la République a commencé à vous tarauder l’esprit ?
Je vais être très modeste par rapport à cette question. Notre ambition a été de servir notre pays et j’ai toujours servi mon pays depuis que j’ai terminé mes études à 23 ans comme ingénieur. J’ai eu à occuper différentes fonctions dans le secteur privé, dans le secteur public, dans la fonction publique internationale, à la BCEAO, à l’ONUDI et dans le gouvernement du Sénégal. C’est la réalité qui gouverne les comportements et c’est en forgeant qu’on devient forgeron. J’ai été Premier ministre du Sénégal pendant 5 ans et je pense avoir donné le maximum que je pouvais sous l’autorité du président de la République Macky Sall. Aujourd’hui, le contexte m’a amené à engager une réflexion de fond et c’est cette réflexion de fond qui, à la fin, m’a amené à présenter ma candidature à ce grand rendez-vous avec le peuple sénégalais le 25 février 2024.
D’aucuns disent que vous n’aviez pas d’ambition présidentielle et que c’est le Président Macky Sall qui vous a demandé et ajouté votre nom sur la liste des candidats de BBY. est-ce que c’est vrai ?
Le président de la République, une fois qu’il avait exprimé au peuple sénégalais son souhait de ne pas se présenter, il a au niveau de la coalition présidentielle identifié quelques personnalités et j’en faisais partie. Ces personnalités devaient participer à des entretiens et c’est à la suite de ces entretiens qu’on devait effectivement sélectionner le candidat de la majorité présidentielle. Mais on n’a pas besoin de permission pour être candidat à la présidence de la République. C’est une affaire personnelle entre quelqu’un et son peuple. Et c’est au nom de cette responsabilité individuelle que j’ai finalement pris la décision de me présenter. Et ce n’est pas la première fois que j’ai eu à conduire des listes nationales et j’ai conduit le gouvernement pendant plusieurs années. C’est au nom de cette expérience et au nom également de l’ambition et de la grande considération que nous avons pour le Sénégal que finalement je me présente. J’aurais pu prendre de nouvelles fonctions comme d’autres en ont décidé, je les respecte. Mais j’ai préféré l’intérêt général, j’ai préféré faire le choix du peuple.
Ce n’est pas parce que vous n’avez pas été choisi…
Ça ne me ressemble même pas. Vous savez, l’ambition c’est une bonne chose mais ce qui est important, ce n’est pas l’ambition. Ce qui est important, c’est la volonté qu’on a de servir. J’ai cette volonté, j’ai également tenu compte du contexte très criso-gène dans la sous-région, qui est aussi un contexte très menaçant au plan international, de l’expérience pour pouvoir conduire les destinées de notre peuple. Il y a eu beaucoup de défections après l’annonce du choix de Macky Sall. Mais là, votre candidature a surpris plus compte tenu de votre proximité avec le chef de l’État….
Mais pourquoi surprendre ?
Le Président, c’est le Président. Moi je m’appelle Mouhammad Boun Abdallah Dionne. Le président a décidé de ne pas être candidat. On lui a donné un mandat pour faire un choix, il a fait son choix.
Est-ce que tout le monde doit être d’accord avec ce choix ?
Moi je ne suis pas d’accord avec ce choix et je l’ai exprimé. Il parait qu’à quelques heures du choix, le Président vous avait donné des assurances par rapport à votre désignation.
Qu’en est-il ?
Jamais ! Le peuple sénégalais est souverain, c’est lui qui choisit le président de la République lors d’une élection. Je ne pense pas qu’une personnalité de ce niveau-là va engager des discussions de cette nature. Moi non plus je ne me vois pas en train de faire des deals. On ne m’a pas dit que j’allais être le futur candidat. Et comme le disait Abdoulaye Wade, le destin d’un dauphin, c’est d’échouer à la plage. Je m’en tiens là.
Vous auriez voulu être ce dauphin-là ?
Non, pas forcément. Qui vous le dit ? On m’a sélectionné. Si j’avais fini ma réflexion en ce temps-là, je me serais adressé au peuple sénégalais. C’est une affaire personnelle la présidence de la République. Ce n’est pas quelque chose qu’on négocie. C’est le seul poste auquel on n’accède pas par décret.
Êtes-vous en pourparlers avec d’autres «frustrés» de la mouvance présidentielle ?
Il faut qu’on se mette d’accord. Il n’y a pas de frustrés. Je ne suis pas un frustré, Aly Ngouille Ndiaye non plus, Mame Boye Diao n’est pas un frustré encore moins Abdoulaye Daouda Diallo. Nous sommes tous des amis y compris avec le Premier ministre actuel. On a partage les mêmes gouvernements. On a juste des problèmes de fond sur la conduite des affaires publiques. Moi en ce qui me concerne j’ai pris la décision d’y aller, d’autres aussi ont décidé d’y aller. Maintenant à la fin de la journée, comment les choses vont se déterminer ? tout dépendra de la réalité. Pour l’instant, nous sommes tous engages autour du parrainage. Ce que je leur souhaite, c’est qu’ils passent l’étape du parrainage. Là aussi, j’ai été clair pour dire que nous n’accepterons pas «Coumba Am Ndèye ak Coumba amoul Ndèye». Nous exigeons la transparence dans ce processus des parrainages. Et à la fin de la journée, si nous sommes tous candidats, nous pouvons bien entamer des négociations. Il y a des partis qui présentent cinq candidats à la candidature.
Au Sénégal pour gagner, il faut un appareil. est-ce que vous en avez un ?
Un appareil, oui. Mais la santé de l’appareil compte. Si vous avez un appareil qui est malade, vous ne pouvez pas gagner. Et bien sûr j’ai un appareil. Il y a quelques jours un chef de parti qui est dans la coalition « Dekal Diam » pour un Sénégal juste a été démis pour des raisons politiques. Il y a des sous coalitions y compris de BBY qui sont avec moi, il y a des partis politiques qui sont avec moi, il y a des mouvements nationaux qui sont avec moi. Il y a aussi des anciens ministres, des maires, des députés qui sont avec moi et c’est tout cet ensemble qui forme cette coalition.
Pourquoi concrètement vous n’avez pas soutenu le choix de BBY ?
Nous ne sommes pas de la même école de pensée. Il y a aussi une différence de comportements par rapport à la chose publique. Si j’accède à la magistrature suprême, je mettrai en urgence un gouvernement d’urgences nationales. Ces urgences, c’est d’abord l’emploi des jeunes. L’emploi des jeunes importe et urge. On doit pouvoir naître au Sénégal, grandir au Sénégal et avoir un métier et ne pas avoir comme unique porte de sortie les bateaux de la mort.
Pourtant, c’était au cœur de votre Plan Sénégal Emergent (PSE). Qu’est-ce qui n’a pas marché ?
Je vais revenir sur ça. Mais je disais que la première urgence, c’est l’emploi des jeunes. Et cet emploi des jeunes on l’aura lorsque les jeunes auront du métier. Qu’est-ce qui fait l’emploi dans ce pays, l’agriculture, la pêche, l’élevage, le commerce et l’artisanat. C’est pourquoi je dis que notre pays doit passer d’un Sénégal des projets à un Sénégal des réformes. Jusqu’à présent et c’est l’autre école, c’est la coopération internationale, c’est les projets. Chaque premier ministre qui passe va à Saint-Louis ou à Dagana pour en parler. C’est de petits projets. Certes les petits matins font les grands soirs comme disait Mao mais on doit dépasser ce Sénégal des projets et de la coopération internationale. Le PSE originel, c’était des projets phares et des réformes phares.
En tout cas, la phase de démarrage que j’ai eu à piloter de 2014 à 2019, l’accent était mis sur le rattrapage infrastructurel, c’est-à-dire les projets et ces projets ont été effectués avec grande satisfaction. Le gouvernement que je pilotais a mis en place le TER, le BRT. L’enjeu de la phase 2, c’était l’homme et tout l’homme et ça, c’étaient les centres de formation professionnelle qu’on devait construire. Ce programme, je l’ai écrit : il s’appelle « Ligueeyal Euleuk». Si on l’avait mis en application on ne parlerait plus de métier.
Vous avez été au cœur de la République en tant que Premier ministre. Pourquoi vous n’aviez pas appliqué tout ce que vous êtes en train de dire ?
Moi je l’ai mis en application. Moi j’ai fait le Job que je devais faire. Ça va être très difficile pour vous de vous départir du passif du PSe… Le PSE, c’est une philosophie, c’est une vision. C’est des principes de base et ces principes ont été déclinés, c’est la transformation structurelle de l’économie et on a dit qu’on veut cette fois-ci une croissance inclusive et solidaire. Et troisièmement, on a dit : dans un Etat de droit ; donc ce trépied, c’est le trépied de base pour développer le pays et on le croit. Mais est-ce que ça été fait dans la réalité. Pour la transformation structurelle, j’y ai mis l’accent pendant mes 5 ans en tant que Premier ministre. Mais l’impact social, ça reste. L’impact socioéconomique des politiques publiques sur le secteur privé national est à améliorer. Moi depuis trois ans je suis au balcon, je ne suis pas dans le gouvernement. C’est pourquoi j’ai dit : pas de continuité qui amène à figer les choses, qui amène à l’immobilisme. J’ai dit : il faut une progression qualitative et quantitative sur les politiques publiques.
Et pourtant vous incarnez plus la continuité que même l’actuel Premier ministre…
Moi je ne suis pas pour la continuité. Je veux des réformes. Moi je dis qu’il faut qu’on passe d’un Sénégal des projets à un Sénégal des réformes. Les réformes c’est du qualitatif, les projets c’est du quantitatif. Faire de l’assainissement, donner des bourses sociales, c’est bien. Donner du travail, c’est mieux.
Cette élection va se tenir dans un contexte de production des premiers barils du pétrole et du gaz. Avez-vous une vision claire par rapport à tous ces changements de paradigmes ?
Le Sénégal du pétrole et du gaz oui, mais combien on gagne dedans ? C’est à la hauteur de notre participation. C’est pourquoi j’ai toujours dit qu’il y a une mauvaise dette, c’est celle que l’on consomme. A côté de cette mauvaise dette, il existe de la bonne dette, c’est celle que l’on investit. Pas de manière brusque et désordonnée mais si je suis élu Président, je négocierai avec les entreprises d’exploitation qui existent dans la gestion des ressources naturelles. Nous devons discuter avec ces entreprises d’exploitation pour aller lever des ressources massivement et positionner le Sénégal comme des partenaires financiers. C’est comme ça que nous allons devenir un pays comme la Norvège qui est propriétaire de 60% de son gaz et de son pétrole. Et c’est au nom de cela qu’ils ont pu définir une répartition des revenus qui a réglé le problème de la fracture sociale. Par ailleurs, les jeunes sont majoritaires dans le pays.
Comment vous allez faire pour résoudre le chômage ?
Aujourd’hui, le monde est devenu global. Tout le monde connaît l’exigence que nous avons pour nous nourrir nous-mêmes. La covid-19 et la crise ukrainienne ont remis au goût du jour l’exigence de la souveraineté alimentaire. Mais cette souveraineté alimentaire, on ne va pas l’avoir avec 100 milliards sur un budget de 7000 milliards. Donc mettons les priorités là où elles doivent être. Diminuons le train de vie de l’Etat, c’est comme ça qu’on aura le Sénégal inclusif et solidaire. Le Sénégal des réformes à la place du Sénégal des projets.
Pourquoi vous voulez remettre en question les modes de coopération du Sénégal avec les institutions internationales et les autres partenaires ?
Je ne remets pas en cause la coopération, je veux qu’on aille en coopération avec les intérêts du Sénégal en bandoulière mais pas avec les intérêts de ceux qui en profitent. Il faut qu’on ait une coopération mais qui s’insère dans un Sénégal des réformes et non l’inverse.
Vous allez parler aussi avec une jeunesse sénégalaise qui a montré toute son aversion vis-à-vis des pays occidentaux et qui exige beaucoup plus de souveraineté. est-ce que vous avez pris cela en compte ?
Cette génération parle au Sénégal, elle ne parle pas à l’étranger. Il faut réconcilier la République avec sa jeunesse. Quand je dis «Daal Diam», c’est la paix mais pour avoir la paix, il faut un Sénégal juste. Je vais faire des réformes qui vont permettre à cette jeunesse d’être partie prenante du développement qui est en train d’être mis en place et qui va en bénéficier esse. Il faut un Sénégal juste où la fracture sociétale diminue, pas un Sénégal dont la richesse est captée par quelques milliardaires privés et publics.
Comment avez-vous vécu les dernières émeutes ?
Difficilement. Et moi je travaillerai pour que ces genres de situation ne puissent même pas arriver. Mais ça demande des efforts de la part de tout le monde. La justice aussi a été décriée ces dernières années.
Êtes-vous d’accord avec ces critiques et quelles sont les réformes que vous allez apporter ?
La première réforme, ce sont les procédures. Comment quelqu’un peut être en prison plusieurs années sans être jugé ? Les mandats de dépôt doivent être une exception. L’homme, sa place n’est pas en prison. Il faut une justice juste ; en toute chose, il faut de l’équilibre. et la politisation de la justice… Moi je n’irais pas jusque-là. Je respecte l’Etat. Je respecte la fonction publique de mon pays. Je respecte les institutions. La justice sénégalaise, je pense, travaille bien avec des moyens qu’il faut renforcer, avec des mécanismes de dialogue qu’il faut mettre davantage en place.
Faites-vous un clin d’œil à l’opposition ?
Moi je parle au peuple sénégalais. Je parle au peuple sénégalais qui comprend qu’il nous faut régler quelques grandes urgences nationales.
Est-ce que le peuple est content quand on se réveille le matin et qu’en écoutant les informations, on voit une dame qui accouche en mer ?
Est-ce que nous sommes fiers de ça. Moi je ne suis pas fier de ça. Il est temps de prendre en charge les urgences nationales.