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23 mai 2025
L'AIDE OCCIDENTALE, UN CARCAN POUR L'AFRIQUE ?
Pour Célestin Monga, la suspension de l'aide américaine pourrait être un électrochoc salutaire. Il appelle les dirigeants africains à sortir de la "sémantique de l'illusion" et à construire un nouveau modèle économique basé sur l'industrialisation
(SenePlus) - L'économiste camerounais Célestin Monga dresse un réquisitoire cinglant contre le système d'aide internationale au développement, dans un entretien accordé au journal Le Monde. Pour ce professeur d'économie à Harvard, ancien vice-président de la Banque africaine de développement, la récente suspension de l'aide américaine pourrait paradoxalement constituer une opportunité pour le continent africain.
"Pleurnicher pour l'aide n'est pas une stratégie de développement", affirme sans détour l'économiste, qui relativise l'importance des flux financiers occidentaux. Selon lui, les 20 milliards de dollars versés par les États-Unis en 2023 et les 60 milliards provenant de l'ensemble des pays "donateurs" représentent des sommes "infimes" pour un continent de 1,4 milliard d'habitants.
Plus préoccupant à ses yeux : les 610 milliards de dollars de recettes d'exportation qui ne sont pas rapatriés, et les capitaux illicites qui quittent le continent chaque année, cinq fois supérieurs à l'aide américaine. "Il faut sortir de cette sémantique de l'illusion : personne n'aide personne", tranche-t-il.
L'économiste pointe également du doigt le rôle ambigu des institutions financières internationales. "Le FMI conditionne son appui à des critères budgétaires qui laissent peu de marge pour investir", explique-t-il, décrivant un système qui "promeut une industrie de la misère et de la charité". Il rappelle que le Ghana, considéré comme un élève modèle, a signé 17 accords avec le FMI avant de se retrouver en défaut de paiement fin 2022.
Pour Célestin Monga, la solution réside dans l'industrialisation du continent et l'accès aux marchés internationaux. "Les gouvernements africains devraient créer des zones économiques spéciales et y attirer des capitaux privés domestiques et extérieurs", suggère-t-il, estimant que le succès économique de pays comme le Sénégal, le Nigeria ou l'Éthiopie "créerait des millions d'emplois directs et indirects en Afrique, mais aussi en France, au Royaume-Uni et en Italie".
Face à la décision américaine, certains dirigeants africains comme William Ruto (Kenya), Paul Kagame (Rwanda) et Ousmane Sonko (Sénégal) "prennent acte et considèrent qu'il faut saisir ce moment pour commencer à s'affranchir de cette dépendance", rapporte l'économiste. Il appelle l'Union africaine à engager une réflexion sur "une stratégie pragmatique pour financer massivement des infrastructures productives".
L'urgence est d'autant plus grande que de nouveaux défis se profilent, comme l'expiration prochaine de l'African Growth and Opportunity Act (AGOA) ou le futur règlement européen contre la déforestation qui risque de "durement pénaliser le secteur du cacao en Côte d'Ivoire". Pour Célestin Monga, ces évolutions confirment la nécessité pour l'Afrique de repenser fondamentalement ses relations économiques avec le reste du monde.
LE SÉNÉGAL DES DEUX VITESSES
Alors que Dakar concentre l’essentiel des logements modernes et des équipements, les régions rurales peinent à bénéficier des mêmes avantages. Ces inégalités soulignent un défi majeur pour l’équité territoriale et le développement inclusif
Le dernier rapport de l’Agence nationale de la statistique et de la démographie (ANSD) met en lumière de profondes disparités dans l’accès aux infrastructures et aux services de base au Sénégal.
L’analyse de la distribution régionale des logements selon un rapport de l’ANSD exploité par EnQuête, fait apparaître une forte concentration dans la région de Dakar. La capitale regroupe 99,1% des appartements dans un immeuble, 78,1% des maisons à étages, 24,3% des baraques et 18,5% des maisons basses, tandis que les cases n’y représentent que 2,9%. L’analyse sur la possession de biens d’équipement révèle des disparités significatives tant au niveau régional que selon le milieu de résidence. La région de Dakar se distingue nettement avec les taux d’équipement les plus élevés dans toutes les catégories, reflétant son statut de capitale et son niveau de développement.
À l’échelle nationale, il a relevé une hiérarchie claire dans la possession des différents équipements. La télévision apparaît comme le bien le plus répandu, présent dans 65,4% des ménages sénégalais, suivie par la bonbonne de gaz (53,1%) et le réfrigérateur (39,8%).
Concernant le taux de pénétration du téléphone mobile, il est remarquablement élevé sur l’ensemble du territoire, atteignant 99,3% au niveau national. Cette couverture est quasi universelle avec très peu de variation entre les zones : 99,6% pour Dakar urbain et autre urbain, et 99,0% en milieu rural.
S’agissant du taux d’accès individuel au téléphone mobile (personnes de 12 ans et plus disposant d’un téléphone), des disparités plus marquées apparaissent. Au niveau national, 66,4% des individus disposent d’un téléphone portable, avec des écarts significatifs selon le milieu de résidence. Dakar urbain enregistre le taux le plus élevé avec 79,8%, suivi des autres zones urbaines avec 68,5%. Le milieu rural présente le taux le plus faible avec 58,4%.
Pour l’utilisation effective du téléphone portable, elle suit globalement la même tendance que l’accès, avec un taux national de 64,8%. Les écarts entre milieux de résidence et quintiles de richesse restent similaires, suggérant une forte corrélation entre la possession et l’utilisation du téléphone mobile.
Le téléphone fixe, quant à lui, connaît une très faible pénétration avec seulement 2,2% des ménages abonnés au niveau national. Son utilisation est principalement concentrée dans les zones urbaines, particulièrement à Dakar (5,8%), et quasi inexistante en milieu rural (0,2%). Cette fracture est encore plus marquée selon le niveau de vie, avec 6,3% d’abonnés dans le quintile le plus riche contre pratiquement 0% dans le quintile le plus pauvre.
Pour ce qui est de l’accès à internet au Sénégal, au niveau national, le taux d’accès à internet s’établit à 46,8%. Ce taux masque cependant des écarts considérables entre les différentes zones de résidence. Dakar urbain se distingue avec le taux d’accès le plus élevé, atteignant 71,0% des ménages. Les autres centres urbains enregistrent un taux nettement inférieur avec 52,8% des ménages. Le milieu rural accuse un retard significatif avec seulement 31,3% des ménages ayant accès à internet.
Eau et l’assainissement
Au niveau national, en 2023, le robinet dans le logement (80,2%) constitue la principale source d’eau de boisson des ménages. La région de Dakar affiche la meilleure couverture avec plus de neuf ménages sur 10 (94,5%) qui utilisent l’eau de robinet dans le logement.
Les disparités urbaines-rurales persistent : 86,6% des ménages urbains ont accès au robinet dans le logement contre 69,1% en milieu rural. Les régions de Kolda (49,5%), Sédhiou (49,6%) et Tambacounda (21,8%) dépendent fortement des puits non protégés, tandis que la région de Kédougou se distingue par l’importance des puits à pompe/forages (32,9%). Au-delà des robinets, les autres sources alternatives d’eau de boisson intègrent les puits non protégés (7,4%), les puits protégés (5,1%) et les puits à pompe ou forage (2,8%).
L’analyse des installations sanitaires au Sénégal en 2023, révèle une situation contrastée. Au niveau national, la chasse avec fosse prédomine (44,8%), suivie de la chasse raccordée à l’égout (18,1%). Les zones urbaines bénéficient d’installations modernes avec 28,7% de raccordement à l’égout et 50,8% de chasses avec fosse, tandis que les zones rurales ne sont pas raccordées aux égouts et utilisent principalement la chasse avec fosse (34,5%) ou recourent à des latrines couvertes (21,7%).
S’agissant de l’évacuation des eaux usées au Sénégal, au niveau national, dans la rue/nature, elle domine (41,6%), suivie du réseau d’égout (19,2%) et des fosses/puisards (14,5%). L’analyse des modes d’évacuation des ordures ménagères au Sénégal révèle qu’au niveau national, le ramassage par camion (40,3%) et les dépôts sauvages (27,3%) sont prédominants. Dakar se distingue avec 86,6% de collecte par camion, illustrant une gestion plus formalisée. À l’opposé, les régions de Sédhiou (59,5%), Kédougou (56,3%) et Matam (53,1%) recourent majoritairement aux dépôts sauvages.
Selon le milieu de résidence, les zones urbaines ont plus accès au ramassage par camion (61,7%) tandis que les zones rurales utilisent principalement les dépôts sauvages (58%).
Sources d’énergie des ménages
Au niveau national, le gaz (45,2%) et le bois (38,4%) suivis du charbon (14,3%) sont les principaux combustibles utilisés par les ménages pour la cuisson. L’électricité (0,3%), la bouse de vache (1,1%) et les autres sources (0,6%) restent marginales.
Concernant le principal mode d’éclairage utilisé par les ménages au Sénégal, il est noté une prépondérance de l’électricité (74,4%) au niveau national, suivie de la lampe torche (12,4%) et du solaire (8,5%). Les disparités ‘’urbain-rural’’ sont remarquables : 94,1% des ménages urbains utilisent l’électricité comme principal mode d’éclairage, contre seulement 40,5% en milieu rural, où l’usage des lampes torches (29,1%) et du solaire (20,3%) est important.
Dakar affiche le meilleur taux d’électrification (98,7%) relié au réseau de la SENELEC, contrastant avec Kédougou (21,6%) où les ménages ont plus recours à l’énergie solaire (39,1%).
Les régions de Tambacounda, Kolda,Kaffrine et Kédougou présentent des proportions de ménages utilisant l’électricité comme principale source d’éclairage, inférieures à 40%, avec un recours important aux lampes torches (30-40%). L'énergie solaire émerge comme alternative dans certaines régions, notamment Kédougou (39,1%), Sédhiou (31,8%) et Kolda (21,7%).
Protection sociale
Les travailleurs sénégalais bénéficiant d’une sécurité sociale reçoivent des allocations en cas de survenance de certaines situations (maladie, maternité, accident, etc.). Cette édition de la Situation économique et sociale nationale s’intéresse aux allocations familiales gérées par la Caisse de Sécurité sociale (CSS) et qui couvrent les travailleurs non fonctionnaires. Il convient de préciser que les fonctionnaires bénéficient d’une sécurité sociale qui est du ressort de la Direction de la Solde.
Pour la CSS, le montant total des charges techniques des prestations familiales (PF) selon le rapport, s’élève à 15 105 925 904 F CFA en 2022. Cette somme est répartie entre plusieurs types de prestations.
Les allocations familiales représentent la part la plus importante des charges, avec 58,7% du total, soit 8 869 176 900 F CFA, ce qui montre leur prédominance dans les dépenses liées aux prestations sociales. Suivent les indemnités de congé de maternité, qui regroupent 34,6% des charges, avec 5 230 812 707 F CFA, soulignant l’importance du soutien aux mères pendant cette période. Les allocations de maternité s’élèvent à 696 796 200 F CFA (4,6%), représentant ainsi un poste non négligeable, tandis que les allocations prénatales couvrent 1,6% des dépenses, soit 243 835 450 F CFA, apportant un soutien aux femmes enceintes.
Les ristournes sur les allocations familiales ne représentent que 0,3% des charges, avec 37 486 767 F CFA, et les allocations de chômage sont quasi inexistantes avec seulement 150 800 F CFA.
Les allocations CAF (Caisse d’Allocations Familiales), bien qu’ayant un faible poids global (moins de 1%), incluent 27 237 330 F CFA pour les allocations familiales, 182 250 F CFA pour les allocations prénatales et 247 500 F CFA pour les allocations de maternité.
Par ailleurs, les rentes (84,3%) et les indemnités journalières (10,4%) ont constitué l’essentiel des prestations d'accidents de travail en 2022. Les indemnités journalières sont payées durant la période de traitement d’une blessure alors que les rentes prennent en charge une incapacité permanente.
Assistance sociale
En 2023, la répartition des interventions de la Brigade nationale des sapeurs-pompiers (BNSP), révèle des tendances marquantes par catégorie d’intervention. Les accidents restent majoritaires avec 24 322 sorties y afférant, soit 44,7% du total, bien que cette proportion soit en légère baisse par rapport à 2022 (47,4%). Les interventions pour cas de maladie ont notablement augmenté, atteignant 8 473 sorties, soit 15,6% des interventions, contre 13,8% en 2022. Par ailleurs, les interventions pour incendie sont également en hausse, avec 4 587 sorties (8,4% des interventions), contre 6,9% en 2022, soit une augmentation des incidents liés au feu ou une réponse accrue aux situations à risque. Les opérations diverses, avec 5 460 sorties (10,0%), restent presque stables par rapport à l’année précédente, attestant de la polyvalence des équipes de la BNSP face à des missions variées. Enfin, les activités diverses, représentant 11 597 sorties (21,3%) sont aussi restées presque constantes en poids (21,2% en 2022), illustrant le rôle élargi de la BNSP en prévention et soutien communautaire.
En ce qui concerne la durée des interventions en 2023, des variations notables sont enregistrées par rapport à 2022. La majorité des interventions ont duré moins d’une heure, bien que ce chiffre soit en baisse, passant de 34 555 en 2022 à 29 147 en 2023, ce qui représente une diminution d’environ 15,6%. Cette baisse est compensée par une augmentation des interventions de durées plus longues, notamment celles comprises entre 1 et 6 heures, qui sont passées de 16 513 en 2022 à 21 627 en 2023, soit une augmentation de 30,9%. De même, les interventions d’une durée de 6 à 12 heures ont presque doublé, passant de 1 219 en 2022 à 2 182 en 2023. Pour les interventions durant entre 12 et 24 heures, une hausse est également observée, de 351 en 2022 à 621 en 2023, soit une augmentation de 76,9%. Les interventions de plus de 24 heures restent rares mais ont également augmenté, passant de 78 en 2022 à 111 en 2023, soit une hausse de 42,3%.
Au total, la BNSP a réalisé 54 439 interventions en 2023, ce qui représente une légère augmentation de 1,8% par rapport à 2022 (52 716 interventions). Les données indiquent une tendance vers des interventions plus longues, ce qui pourrait nécessiter des ajustements en termes de gestion de ressources humaines et matérielles pour répondre efficacement à des missions d’une durée plus étendue.
Par ailleurs, en 2023, la BNSP a enregistré une hausse de 16,6% de ses interventions relatives à l’assistance aux malades par rapport à 2022, atteignant 8 473 assistances. Bien que les cas de maladies non déterminées restent les plus fréquents, leur part a légèrement diminué (de 51,4% à 44,4%). Les interventions pour troubles mentaux ont fortement baissé en pourcentage, tandis que d’autres catégories, comme les crises d’épilepsie, les autres crises et les malaises, ont augmenté de manière significative.
CHEIKH OUMAR DIAGNE APPELLE À UNE RÉFORME MONÉTAIRE PLURALISTE EN AFRIQUE
Lors de la présentation de son ouvrage "Penser la monnaie au service du panafricanisme, sortir des monnaies uniques", il a mis en avant les dimensions économiques, géostratégiques et culturelles de la monnaie.
L’ancien directeur des moyens généraux à la présidence de la République, Cheikh Oumar Diagne, a présenté son dernier ouvrage intitulé « Penser la monnaie au service du panafricanisme, sortir des monnaies uniques ». Lors de cet échange avec le public, il a mis en avant l’importance de repenser la monnaie non seulement sous son prisme économique, mais aussi dans ses dimensions géostratégiques, sociologiques, anthropologiques et politiques.
Selon lui, la monnaie est un outil incontournable pour la mise en œuvre de véritables politiques de développement en Afrique. « Il est impératif, pour assurer la cohérence des stratégies économiques envisagées, de se doter d’une monnaie qui reflète nos réalités et nos ambitions », a-t-il souligné.
Cheikh Oumar Diagne prône une approche basée sur la diversité monétaire plutôt que sur un système unique imposé. Il rappelle qu’avant la colonisation, l’Afrique disposait d’une structure monétaire plurielle, adaptée aux réalités locales, mais que cette diversité a été balayée par le colonisateur.
L’auteur s’appuie également sur des références culturelles et religieuses, notamment l’islam, pour démontrer que la pluralité monétaire est une norme historique et légitime. Il s’étonne ainsi du paradoxe qui règne dans les modèles économiques actuels : « Ceux qui prônent le libéralisme et la libre concurrence dans tous les domaines refusent d’appliquer ce principe à la monnaie », déplore-t-il.
Avec cet ouvrage, Cheikh Oumar Diagne invite les intellectuels, les chercheurs et les décideurs africains à revisiter la question monétaire et à en redéfinir les missions. Pour lui, il est temps que la monnaie retrouve son rôle fondamental dans le développement économique du continent.
LE DJIBOUTIEN MAHMOUD ALI YOUSSOUF ÉLU PRÉSIDENT DE LA COMMISSION DE L’UA
Il va occuper la plus haute fonction de l'organisation continentale, avec le conflit dans l'est de la République démocratique du Congo (RDC) qui menace de déstabiliser toute la région, un Soudan en guerre et un nouveau président américain...
Peu de chefs de la diplomatie peuvent se prévaloir d'une telle longévité : le Djiboutien Mahmoud Ali Youssouf, ministre des Affaires étrangères depuis 2005, a été élu samedi à la tête de la Commission de l'Union africaine
Il va occuper la plus haute fonction de l'organisation continentale, avec le conflit dans l'est de la République démocratique du Congo (RDC) qui menace de déstabiliser toute la région, un Soudan en guerre et un nouveau président américain qui vient de sabrer dans l'aide internationale. L'homme de 59 ans, au front dégarni et aux fines lunettes, faisait figure d'outsider face à l'opposant historique kényan Raila Odinga, qui avait multiplié les déplacements et s'était affiché avec les chefs d'Etats du continent.
Mais beaucoup d'observateurs des arcanes de l'organisation panafricaine ont loué les "compétences" et la campagne à bas bruit de ce diplomate de carrière, francophone, arabophone et anglophone, très proche du président de Djibouti Ismaïl Omar Guelleh. Il succède au Tchadien Moussa Faki Mahamat, arrivé au terme de ses deux mandats. Le poste de président de la Commission, qui était cette fois réservé à un représentant de l'Afrique de l'Est, est stratégique puisqu'il est le chef exécutif de l'UA.
L'élection à vote secret s'est faite à la majorité des deux tiers des Etats membres ayant le droit de vote. Il entame ses fonctions au un moment où le conflit dans l'est de la République démocratique du Congo (RDC), avec le groupe armé M23 qui mène une offensive avec l'armée rwandaise, menace d'engendrer un conflit régional. Le diplomate vétéran, qui a notamment été ambassadeur en Egypte, devra également gérer la guerre qui ravage le Soudan depuis avril 2023.
Mahmoud Ali Youssouf est originaire de l'un des pays les moins peuplés du continent, avec seulement un million d'habitants. Ce qui n'empêche pas Djibouti, petit pays de la Corne de l'Afrique, d'occuper une position stratégique face au détroit de Bab-el-Mandeb, par où transite une grande partie du commerce et des approvisionnements énergétiques mondiaux. La France, ancienne puissance coloniale et qui est de plus en plus contestée sur le continent, ainsi que les Etats-Unis et la Chine, y disposent de bases militaires. Lors d'un entretien avec l'AFP en décembre, Mahmoud Ali Youssouf avait déclaré qu'il y a un "problème de gouvernance" dans certains pays africains, évoquant notamment ceux qui ont été secoués ces dernières années par des coups d'Etat.
Parmi ceux-ci, le Gabon, le Mali, le Niger ou le Burkina, sont toujours suspendus par l'organisation continentale. Il avait alors décrit un continent en proie à "beaucoup de difficultés en ce moment avec des changements anticonstitutionnels, des crises politiques (...) dans certains pays, des conflits ouverts comme au Soudan, des tensions entre un certain nombre d'États". Pour permettre le développement économique, et notamment pour la mise en place d'une zone de libre-échange à l'échelle continentale, la nouvelle Commission devra "commencer par la paix et la sécurité", anticipait-il également, citant la lutte contre les mouvements djihadistes au Sahel et dans la Corne de l'Afrique.
PAR EL HADJI GORGUI WADE NDOYE
NOTRE SOCIÉTÉ A PEUR DE SE REGARDER DANS LE MIROIR
Nous parlons Teranga, mais avons organisé notre douce jungle ! Dans ce pays, il y a aujourd’hui peu de discours, peu de dialogues, peu de bienveillance. Dire devient impossible, nommer diabolique
El Hadji Gorgui Wade Ndoye |
Publication 15/02/2025
Rien que le mois de février 2022, le Sénégal a recensé 11 morts par suicide (Enquête Plus). L’année 2021, le pays a enregistré 100 morts par suicide. Entre juin et août 2020, il y a eu 10 morts par suicide (PressAfrik). Le Sénégal occupait le 62ème rang mondial des morts par suicide, il y a une vingtaine d’années, selon une étude du Pan African Medical Journal (Pamj), sur une période de 10 ans (janvier 1996-décembre 2005). Les Nations unies comptent 194 Etats-membres ! En 2024, l’organisation mondiale de la santé (Oms) a recensé près de 720 000 personnes qui se suicident chaque année. Le suicide est la troisième cause de mortalité chez les 15-29 ans.
L’étude démontrait qu’à Dakar, les morts par suicide restent peu fréquentes au regard de la mortalité générale. Les hommes se suicident deux fois plus que les femmes, et le suicide reste l’apanage de l’adulte jeune dont l’âge se situe entre 21 et 30 ans. «Les suicidés résident le plus souvent en zone périurbaine et ils commettent cet acte dans la majorité des cas en période de froid (pendant les mois de janvier, février et mars), plus avant midi et en soirée qu’en après-midi», soulignait l’étude. Aussi 97.2% des suicidés ont utilisé un seul moyen pour se suicider, et le suicide complexe (utilisation de plusieurs moyens) a concerné seulement un cas dans l’étude. La pendaison reste le mode le plus utilisé.
Teranga versus bête intérieure
Le Sénégal est devenu une société indifférente aux multiples drames individuels qui finissent par devenir une vraie tragédie nationale. Il y a quelques années, c’est devant le Palais présidentiel que des Sénégalais se sont immolés par le feu, puis la longue série des jeunes qui meurent sur le chemin de Barsa ou Barsakh devant l’indifférence générale, constate mon ami Adama Aly Pam sur le fil de nos discussions dans notre plateforme du Rasa. Les suicides au quotidien ne sont traités que comme faits divers, à se demander s’il y a une stratégie nationale de prise en charge des maladies psychiatriques ?
Nous parlons Teranga, mais avons organisé notre douce jungle ! Dans ce pays, il y a aujourd’hui peu de discours, peu de dialogues, peu de bienveillance. Nous nous complaisons à nous tenir les uns les autres dans ce que les uns et les autres peuvent ou pourraient dire et qui puissent nuire les uns ou les autres. L’absence de plus en plus de cours dans les maisons, participe à chauffer les esprits qui grondent dans les chambres, et dans cette intimité, souvent d’ailleurs, jaillissent les premières flammes de l’incendie qui mettra le logis en cendres !
La compassion, l’élégante solidarité, la fraternité naturelle s’en vont sous nos regards.
Préjugés, jugements, jalousie, méchanceté, l’attente qu’autrui se brûle les ailes pour dire «Niaaw»… sont devenus des marqueurs ! Beaucoup préfèrent ainsi ruminer leur mal-être, taire leur désarroi, trouver les anticorps personnels dans le huis clos de leur être pour se soigner … loin des regards ! Jusqu’à l’abîme ! La mort devient ainsi une délivrance pour le laissé-pour-compte et un festin d’ego pour les survivants… en attendant leur tour !
Les discours nimbés de sagesse sont décrétés brodés d’hypocrisie et d’esprit partisan.
Même dans les monologues de quelques esprits pourtant brillants suinte parfois une violence comme si chacun essayait de se faire peur de faire peur à autrui. Dire devient impossible, nommer diabolique !
Notre société, oui, veut le Bien mais promeut peu les volontaristes pour le Bien. Notre société actuelle est comme tétanisée de devoir dire «Waw Goor» «Waw Kumba», pourtant de magnifiques expressions, pour encourager ses semblables femmes ou hommes, inscrites dans son Adn.
De plus en plus des familles se disloquent à cause de l’héritage matériel, des gens de même sang concèdent à s’hiérarchiser selon qui a le plus de «Blé» et de «Ndombal Tank» !
Le fonctionnaire qui fait correctement son job est estampillé zélé, le Gorgorlu qui essaie de suivre les règles est traité de «naïf». Les «trois normaux» et les «bol dof» devenus rares à cause de la crise économique, ne sont plus avec les «bancs jaxle», des moments de défoulement, de confessions, de régulation, de cogitations pour trouver des solutions ou de transfert du réel si lourd parfois à porter tout seul !
On regarde les gens s’enfoncer… On les pleure à leur mort le temps d’envoyer un selfie ou la photo du gars dans le trou qui lui servira de lit éternel !
Il y a une sorte de mal qui est en nous, une bête sauvage qu’on refuse de voir !
Mais dans tout cela, il y a fort heureusement, une Noblesse d’âme, une grandeur sublime chez certains qui, malgré le brouhaha, autorisent encore de pouvoir entendre un discours, d’être dans le dialogue… d’espérer ! Il est grand temps plus que jamais de repenser notre Vivre-Ensemble, de nous Aimer, de faire Nation en commençant à l’intérieur de nos maisons, nos quartiers, nos villes, villages, nos lieux d’éducation, de formation, de travail, etc. Nous en avons le génie et le devoir de ne laisser personne errer tout seul sur des chemins sinueux ! Tenons-nous les mains les uns les autres, nous en avons le devoir et les capacités car oui nous sommes le Sénégal éternel.
Mes prières aux morts, mes pensées à nos malades, mes encouragements à celles et à ceux qui luttent. Paix et progrès dans le Sénégal et dans un monde paisible et de justice
«Ya Rabbi Ihdinaa Siraatakal Moustakhiim siraatal laziina an amta alayhim ». Amiin Amiin Amiin. «Walaa ad daalin». Amiin
El Hadji Gorgui Wade Ndoye (Egwn) est journaliste sénégalais à Genève, initiateur du Gingembre Littéraire du Sénégal sur Le Vivre Ensemble.
DES QUESTIONS ECONOMIQUES ET SOCIALES AU MENU DES QUOTIDIENS DU WEEK-END
Les parutions de ce samedi continuent de commenter le dernier rapport de la Cour des comptes, tout en s’intéressant également à des questions sociales.
Les quotidiens parvenus ce samedi à l’Agence de presse sénégalaise continuent de commenter le dernier rapport de la Cour des comptes, tout en s’intéressant également à des questions sociales.
Sud-Quotidien donne le ton, en titrant « le parti PASTEF (au pouvoir) exige la traduction des brigands devant les juridictions ».
Selon le journal, en conférence de presse la veille, le bureau politique de PASTEF appelle « la justice à faire son travail après la publication du rapport de la Cour des comptes, sur la gestion des finances publiques ».
S’exprimant dans le même journal, le ministre de l’Environnement et de la Transition écologique également membre du mouvement des cadres de PASTEF, Daouda Ngom note que le rapport a fait état d’un « carnage financier sans précédent dans l’histoire politique du Sénégal. Le contexte est effarant. Les faits extrêmement graves, pour ne pas dire criminels ».
Le Soleil s’est aussi intéressé à ce sujet en faisant savoir que les cadres de PASTEF appellent à « sévir contre les brigands financiers ».
WalfQuotidien part du prétexte du rapport pour lever le voile sur les douze ans de règne du régime sortant.
« Ces scandales des années Macky », titre à sa Une WalfQuotidien, en citant notamment les affaires Petro-TIM, fonds force Covid, 94 milliards; cartes d’identités biométrique, la réfection du building administratif
« A côté de son bilan matériel jugé bon, les douze ans de Macky Sall et son régime ont été marqués par des scandales », indique-t-il
« Le rapport de la Cour des comptes, au-delà des anomalies relevées sur la gestion de l’ancien régime, met le Sénégal dans une situation inconfortable avec des risques de perte de confiance sur le marché financier, la fuite des investisseurs », croit-il savoir.
Le même journal donne la parole à un spécialiste, Mamadou Samba Han, qui indique que « les indicateurs confirmés par la Cour des comptes montrent que le Sénégal est dans une situation économique compliquée. Les notes du Sénégal qui n’étaient pas favorables ne vont pas encore s’élever ».
Le journal EnQuête s’est intéressé à la question de la surpopulation carcérale au Sénégal, en parlant d’une « bomme à retardement »
Selon le journal, « plus de 14 milles détenus entassés dans des prisons conçus pour 4 milles ».
Trois millions de Sénégalais sans données électorales
L’EnQuête a aussi exploité le rapport spécial de l’ONU qui dénonce des « conditions indignes et inhumaines (…) un système judiciaire surchargé et des réformes pénales en attente ».
« La surpopulation que j’ai vu dans les prisons est dramatique et inhumaine », a dit dans le même journal, Alice J. Edward rapporteuse spéciale des Nations unies sur la torture
Dans le cadre de son séjour au Sénégal, cette dernière s’est aussi prononcée sur la loi d’amnistie.
« Je demande instamment au Sénégal d’abroger la loi d’amnistie qui accorde une immunité de poursuite aux personnes qui auraient été impliquées dans le recours à une force excessive et dans d’autres violations des droits de l’homme commises lors des manifestations entre mars 2021 et février 2024”.
Les journaux font également écho de la dernière sortie des centrales syndicales de même que celle du directeur général des Elections qui déplore dans Sud quotidien le fait que 3 millions de citoyens seraient sans données électorales sur leurs cartes d’identités biométriques CEDEAO
« La coalition des confédérations syndicales du Sénégal annonce un préavis de grève générale au sortir d’une assemblée générale pour dénoncer les nombreux cas de licenciements abusifs, de fermetures d’entreprises, de violations des droits des travailleurs entre autres maux », peut-on lire dans L’AS quotidien.
Le quotidien Quotidien évoque une « Grève générale en vue ».
Il renseigne que les syndicalistes déplorent « l’absence de dialogue avec l’Etat ».
Le secrétaire général de la Confédération nationales des travailleurs du Sénégal (CNTS) « exige la tenue d’un dialogue entre le gouvernement et les travailleurs. Si le dialogue ne suit pas, nous allons déposer un préavis de grève générale », dit-il dans le Quotidien.
GRÈVE GÉNÉRALE EN VUE
Une grève générale ! C’est ce qu’envisagent les syndicalistes du Sénégal, qui l’ont dit hier, lors du grand rassemblement des forces syndicales à la Bourse du travail de la Cnts. Les syndicats souhaitent dialoguer avec les autorités
Une grève générale ! C’est ce qu’envisagent les syndicalistes du Sénégal, qui l’ont dit hier, lors du grand rassemblement des forces syndicales à la Bourse du travail de la Cnts. Les syndicats souhaitent dialoguer avec les autorités.
Le front social est sur le point d’entrer en ébullition. La faute aux nouvelles autorités qui sont restées aphones face aux souffrances des travailleurs, en plus d’afficher leur «arrogance» dans les médias. «Si le gouvernement ne nous écoute pas et qu’il n’est pas dans la logique de satisfaire nos revendications, nous allons en grève générale», a informé Elimane Diouf, le Secrétaire général de la Confédération des syndicats autonomes du Sénégal (Csas), hier, lors du lancement du grand rassemblement des forces syndicales à la Bourse du travail Keur Madia.
Ce grand rassemblement inédit des centrales et fédérations syndicales se veut l’unique interlocuteur du patronat et du gouvernement pour la défense des intérêts des travailleurs. «Tout le monde connaît les difficultés du secteur des Btp. A côté des chantiers à l’arrêt, il y a la dette que l’Etat doit aux entreprises. Quand on veut développer un pays, on n’efface pas tout. Il faut que les autorités reviennent à la raison en parlant avec les acteurs. Quand on vient au pouvoir, on hérite du passif comme de l’actif. Il faut redresser sans bloquer le pays», a déclaré Elimane Diouf. Pour lui, les travailleurs, tous secteurs confondus, souffrent de la cherté de la vie. Il a demandé à l’Etat de baisser le prix des denrées de première nécessité ou de revoir à la baisse la fiscalité, notamment l’impôt sur le revenu, et d’augmenter les salaires. «Les industries alimentaires souffrent parce que tous les produits sont surtaxés. Beaucoup d’entreprises sont en train de se deporter en Côte d’Ivoire, en Guinée, etc. Nous devons les retenir», a-t-il ajouté, avant de demander au gouvernement de revoir sa politique fiscale au moment où la Dgid explore de nouvelles niches pour réunir les 3000 milliards Cfa assignés par les nouvelles autorités. «Si ce gouvernement n’est pas dans une logique de satisfaire nos revendications, nous allons vers une grève générale. Ce gouvernement pense que nous ne représentons rien», s’est désolé Elimane Diouf pour dénoncer le mutisme des nouvelles autorités.
Une chose que Mody Guiro ne comprend pas. Le Secrétaire général de la Confédération nationale des travailleurs du Sénégal (Cnts) a expliqué que le duo Diomaye-Sonko devrait être en mesure de les comprendre car ayant dirigé le Syndicat des Impôts et domaines. «Ils nous ont rencontrés à leur demande. Nous avons accepté d’aider le gouvernement, de travailler sur leurs demandes. C’est ce que nous avons fait jusqu’à présent», a indiqué Mody Guiro. Il a affirmé que les centrales syndicales ont accepté de taire leurs revendications pour contribuer à l’apaisement du climat social. «Nous sommes témoins des violations des droits des travailleurs. Les autorités se permettent de licencier des personnes qui ont des Cdi. Le Jub-Jubal-Jubanti doit être respecté par tout le monde. On ne peut pas demander aux Sénégalais de le respecter mais que des autorités le foulent aux pieds. Il suffit de regarder les médias pour percevoir leur arrogance. «J’ai des objectifs à remplir», c’est ce qu’ils disent. Et au même moment, ils recrutent. La situation est difficile et l’heure est grave. Nous ne sommes pas en grève ni en guerre. On se prépare au pire. Nous pouvons lutter, et nous pouvons le faire très bien. On ne peut pas créer des emplois et licencier à tour de bras.»
Mody Guiro exige la tenue d’un dialogue entre le gouvernement et les travailleurs. Sans donner de délai, le patron de la Cnts menace : «Si le dialogue ne suit pas, nous allons déposer un préavis de grève générale.»
Par Bachir FOFANA
CIRCULEZ, IL N’Y A RIEN A VOIR !
Ce qui a été présenté dans le rapport de la Cour des comptes comme une vente des immeubles appartenant à l’Etat, n’est en réalité qu’une banale opération de transfert de propriété et de gestion entre les Domaines et la Sogepa
Le 26 septembre 2024, le Premier ministre Ousmane Sonko, accompagné des ministres de l’Economie, de la Justice et du Secrétaire général du gouvernement, et en l’absence fort remarquée du ministre des Finances et du budget, s’était présenté en conférence de presse pour dresser un tableau sombre de la situation des finances publiques. Laquelle situation se résumait à un réquisitoire accablant contre le pouvoir sortant : six cent cinq (605) milliards de francs Cfa utilisés par anticipation, trois cents (300) milliards de francs Cfa dépensés mais introuvables, mille huit cents (1800) milliards de francs Cfa empruntés sans jamais les déclarer, la dette publique est de l’ordre de seize mille deux cents (16 200) milliards de francs Cfa, soit 87% du Pib. Tout ceci est adossé à une vaste opération de misreporting (transmission de fausses informations aux partenaires techniques et financiers, le Fonds monétaire international principalement). En somme, «le régime du président Macky Sall a menti au peuple, a menti aux partenaires, a tripatouillé les chiffres pour donner une image économique, financière et budgétaire qui n’avait rien à voir avec la réalité», dira le chef du gouvernement.
D’ailleurs, cela avait fait l’objet d’une chronique dans laquelle nous disions qu’avec de tels propos, il va de soi que «Sonko n’aime pas le Sénégal» (Cf, chronique du 28 septembre 2024). Nous disions que la conférence de presse du Premier ministre «n’avait qu’un objectif : jeter le discrédit sur le Sénégal. En effet, si Sonko pensait ternir l’image de ses prédécesseurs et adversaires politiques en présentant les chiffres truqués, il ne s’en prenait pas uniquement aux anciens ministres des Finances (Amadou Ba, Abdoulaye Daouda Diallo, Mamadou Moustapha Ba qui ont d’ailleurs l’obligation de répondre à ces graves accusations), mais également au Fmi qui supervise l’exécution budgétaire trimestriellement, ainsi qu’à la Cour des comptes qui élabore la loi de règlement censée constater les résultats financiers de chaque année civile et approuver les différences entre les résultats et les prévisions de la loi de finances de l’année, complétée, le cas échéant, par des lois rectificatives de finances»
Conformité sur les chiffres des finances publiques
Après avoir rappelé tous les fonctionnaires impliqués dans la production des chiffres sur les statistiques et les finances publiques, nous ajoutions qu’ils «doivent être très heureux que le chef du gouvernement, dans sa démarche de négation du Sénégal, les traite de flibustiers des temps modernes. Et il faudra virer et poursuivre toute l’administration financière, la mafia des Finances, parce qu’ils ont participé à accompagner les différents ministres à transmettre des chiffres erronés aux Ptf, qui ont été complices par leur passivité ou inaction. Si le budget manque de sincérité, si les chiffres sont falsifiés, ces fonctionnaires sont tout aussi responsables que les dirigeants de l’ancien régime». Six (6) mois après, le rapport tant attendu de la Cour des comptes sur l’état de nos finances publiques est rendu public. C’est un exercice à saluer et qui aurait dû être fait en 2019, conformément au point 1.7 de l’annexe de la loi n°2012-22 du 27 décembre 2012 portant Code de transparence dans la gestion des finances publiques. «Dans les trois mois suivant chaque nouveau mandat présidentiel, la situation globale des finances publiques, et en particulier la situation du budget de l’Etat et de son endettement, fait l’objet d’un rapport préparé par le gouvernement. Ce rapport, audité par la Cour des comptes, est publié dans les trois mois suivants.» Oui, Macky Sall a failli sur ce point, tout comme la Cour des comptes qui attend 2025 pour nous dire que «cet audit est le premier du genre étant donné qu’en 2019, le gouvernement n’avait pas établi de rapport sur la situation des finances publiques»
Si nous nous basons sur ce que nous avait dit le Premier ministre lors de sa conférence de presse du 26 septembre 2024, il va de soi qu’il y a deux choses que nous nous attendions à voir, et que nous n’avons pas vues dans le rapport. Le Premier ministre nous avait parlé de falsification et de maquillage des chiffres. Or, sur la situation des finances publiques, les auditeurs de la Cour des comptes ont conclu à une conformité entre chiffres fournis par le gouvernement de Sonko et «ceux arrêtés par les lois de règlement sur la même période 2019-2023». «L’analyse des recettes fait ressortir une concordance entre les données sur les recettes retracées dans le rapport [du gouvernement] et les lois de règlement/projet de loi de règlement 2023. En effet, les montants globaux des recettes de 2019 à 2023 (…) sur la situation des finances publiques sont conformes à ceux arrêtés par les lois de règlement sur la même période.» L’on nous parlait de falsification.
Là où Sonko parle d’un «surfinancement d’un montant de 604, 7 milliards de francs Cfa à intégrer dans les moyens de couverture du besoin de financement de 2024», la Cour rétorque qu’une «une partie est consommée sur autorisation du ministre des Finances et du budget, pour un montant de 326, 43 milliards de francs Cfa destiné à des dépenses relatives au remboursement de dettes bancaires, au secteur de l’énergie et au soutien à la consommation».
La dette est soutenable
Sur l’encours de la dette, le chiffre du nouveau gouvernement est balayé d’un revers de main par la Cour des comptes qui parle d’écarts. «L’encours de 13 773 milliards de F Cfa de la dette de l’Administration centrale au 31 décembre 2023 présenté dans le rapport du gouvernement est différent de celui de 13 854 milliards de FCfa retracé dans le Plr 2023, soit un écart de 81 milliards de F Cfa.» Des écarts attribués par la Cour à des dysfonctionnements dans les comptabilités de la Direction de la dette publique, de la Dodp et du Trésorier général. Ecart n’est pas falsification, ni tripatouillage. Même le président de la République, dans le communiqué du Conseil des ministres, parle d’écarts. C’est heureux que la Cour n’ait pas considéré l’année 2024 dans le calcul de l’endettement. En effet, sur 2024, le gouvernement a déjà emprunté 4500 milliards et compte emprunter le même montant cette année, soit un total de 9000 milliards sur deux ans. Et c’est heureux que le ministre de l’Economie Abdourahmane Sarr annonce une bonne nouvelle : la dette du Sénégal est soutenable. «L’analyse faite par mon département révèle que la dette du Sénégal est toujours soutenable», dit Sarr, qui ajoute : «Il est également important de relever que nous avons une bonne structure de la dette.»
Cependant, la Cour des comptes constate que «l’encours total de la dette de l’Administration centrale budgétaire s’élève à 18 558, 91 milliards de F Cfa au 31 décembre 2023 et représente 99, 67% du Pib». Pour arriver à cette somme, les vérificateurs ont suivi la logique du gouvernement en incluant dans la dette, ce qui a été contracté par le secteur parapublic. S’il est vrai que l’Etat ne sert que de garantie à des sociétés nationales dans leur levée de fonds, est-ce raisonnable de retracer une dette qui ne passe pas au Trésor ? Effectivement, les entreprises publiques cumulent à 1517 milliards de francs Cfa. Petrosen (590 milliards), Sogepa (315 milliards), Senelec (147 milliards) et Air Sénégal (104 milliards) sont parmi les entreprises parapubliques les plus endettées. Arrivent ensuite le Port autonome de Dakar (50 milliards F Cfa), la Société africaine de raffinage (Sar, 45, 7 milliards F Cfa), la Caisse des dépôts et consignations (Cdc, 40, 9 milliards F Cfa), le Fonds d’entretien routier autonome (Fera, 25, 4 milliards F Cfa), l’Aéroport international Blaise Diagne (Aibd, 17, 4 milliards F Cfa) et le Fonds pour l’habitat social (Fhs, 11 milliards F Cfa).
Pas de quoi fouetter un chat
Enfin, ce qui a été présenté dans le rapport de la Cour des comptes comme une vente des immeubles appartenant à l’Etat, n’est en réalité qu’une banale opération de transfert de propriété et de gestion entre les Domaines et la Sogepa. Ces biens ont été cédés à la Sogepa pour servir de garantie dans une opération de levée de 330 milliards de francs Cfa à travers des obligations islamiques (Sukuk).
Là où le gouvernement annonce que les disponibilités bancaires de l’Etat sont de 173, 6 milliards, la Cour des comptes dit que celles-ci ont été sous-évaluées. En effet, après vérification auprès du Trésor et des banques, il ressort que l’Etat dispose de 263, 9 milliards. Soit un écart de 104, 87 milliards de F Cfa.
Toutefois, la Cour des comptes a décelé des entorses, anomalies, irrégularités sur plusieurs opérations. Des «tirages sur ressources extérieures supérieurs à ceux affichés dans le rapport du gouvernement» à l’«encours de la dette bancaire hors cadrage supérieur au montant affiché dans le rapport du gouvernement», en passant par «un déficit budgétaire supérieur», un «service de la dette bancaire hors cadrage non retracé», etc. Cependant, les auditeurs de la Cour des comptes n’ont fait aucune recommandation allant dans le sens de l’ouverture d’une information judiciaire. Ni décelé aucune situation susceptible d’être considérée comme du détournement de deniers publics. Ils n’ont pas non plus demandé la traduction d’un quelconque agent devant la Chambre de discipline financière. Dès lors, par quelle gymnastique, Ousmane Diagne, le ministre de la Justice, est-il arrivé à définir des catégories d’infractions et des personnes qui devront répondre devant les juridictions compétentes, en l’occurrence la Haute cour de Justice et le Parquet financier ? N’était-il pas plus judicieux de s’inscrire, comme le ministre des Finances Cheikh Diba, dans une dynamique de correction ? «Nous nous engageons dès aujourd’hui à mettre en œuvre des réformes structurelles ambitieuses pour garantir la soutenabilité budgétaire et la prospérité de notre Nation», dit ce dernier
En somme, si le rapport devait être résumé, il faudrait juste dire : «circulez, il n’y a rien à voir» ou «il n’y a pas de quoi fouetter un chat». En effet, tout ce qui a été dit, en grande partie, a été dit dans les précédents rapports de la Cour des comptes, particulièrement les lois de règlement et le rapport sur la dette. Ce rapport a plus mis à nu les dysfonctionnements du ministère des Finances que de supposées falsifications et maquillages de chiffres. Est-ce la raison pour laquelle ce n’est pas le Premier ministre qui s’est présenté pour commenter les résultats ? Ce rapport va enfoncer davantage le Sénégal. Et l’opération de décrédibiliser le Sénégal se poursuit. D’ailleurs, les euro-obligations souveraines du Sénégal ont chuté après la publication du rapport. Le fort des populistes au pouvoir, c’est de peindre finalement la normalité en scandale.
MAMADOU NDOYE RAPPELLE POURQUOI IL A CRÉÉ LE CORPS DES VOLONTAIRES DE L’EDUCATION
‘’En 1995, on m’a demandé de prendre l’enseignement primaire. J’ai regardé son évolution et je me suis rendu compte qu’on était en train de perdre au moins 1 point de scolarisation par an. Généralement, cela n’arrive que dans des pays en conflit’’
L’ancien ministre de l’Éducation de base et des Langues nationales, Mamadou Ndoye, est revenu, avec l’APS, sur les origines et les objectifs du corps des volontaires de l’éducation qu’il a créé en 1995, une initiative qui a contribué, selon lui, à augmenter le taux de scolarisation de 2 à 3 % par an, sans altérer la qualité des enseignements
‘’En 1995, on m’a demandé de prendre l’enseignement primaire. J’ai regardé son évolution et je me suis rendu compte qu’on était en train de perdre au moins 1 point de scolarisation par an. Généralement, cela n’arrive que dans des pays en conflit’’, a rappelé M. Ndoye dans une interview à paraître dans le prochain numéro de Vitrine, le mensuel de l’APS. ‘’Je m’étais dit que c’était inacceptable. Or, le problème venait du blocage du recrutement des enseignants. À l’époque, avec les ressources financières disponibles, nous ne pouvions recruter que 560 enseignants par an’’, a-t-il dit, se souvenant avoir été critiqué pour cette innovation.
Trois cents des 560 enseignants dont le pays avait besoin devaient être remplacés, certains étant décédés, d’autres ayant pris leur retraite, selon l’ancien ministre. ‘’Il restait donc 260 nouveaux enseignants qui ne pouvaient pas couvrir le taux de croissance démographique de la scolarisation, lequel était de 3 % par an sur la population scolarisable. C’est à cause de cela qu’on perdait 1 point par an.’’
‘’J’ai donc décidé de lancer un service civique national dénommé ‘les volontaires de l’éducation’. Il s’agissait de demander aux jeunes d’aider leur pays à redresser la scolarisation, en contrepartie d’une bourse mensuelle de 50.000 francs CFA. C’est comme cela qu’on appelait cette contrepartie’’, s’est souvenu Mamadou Ndoye.
« PÉPITES JAUNES » : POUR ECLAIRER LES ESPRITS
La maison d'édition Riveneuve lance sa nouvelle collection de poche, "Pépites Jaunes », dirigée par le journaliste, écrivain et sociologue sénégalais Elgas.
La maison d'édition Riveneuve lance sa nouvelle collection de poche, "Pépites Jaunes », dirigée par le journaliste, écrivain et sociologue sénégalais Elgas. Cette initiative vise à rendre plus accessible des textes engagés, des essais et des réflexions profondes sur les dynamiques contemporaines.
Pensée comme une passerelle entre la littérature et le grand public, « Pépites Jaunes » se veut une collection de livres de poche à prix abordable, destinée à démocratiser l'accès à des œuvres marquantes. Elle s'inscrit dans la continuité de la collection « Pépites » de Riveneuve, qui met en avant des Africains du continent et des Diasporas, mais avec un format plus compact, facilitant sa diffusion et sa lecture. En rendant la pensée critique plus accessible, Elgas et les Éditions Riveneuve font de "Pépites Jaunes" un espace éditorial où la réflexion, le dialogue, la remise en question des idées reçues trouvent un terrain fertile. Une initiative dans un monde où la compréhension des héritages culturels historiques est plus essentielle que jamais.
Parmi les premiers titres à paraitre, « Enterrer Sankara. Essai sur les économies africaines » de Joel Té-Léssia Assoko, journaliste spécialisé en économie et finance. L’ouvrage est préfacé par Pierre Haski, également journaliste, et chroniqueur français reconnu pour son expertise en géopolitique et relations internationales. Ancien correspondant en Chine pour Libération, co-fondateur de Rue89 il s’intéresse aux enjeux diplomatiques et aux mutations des médias. Cette publication sera disponible à partir du 27 mars 2025.
Le deuxième livre préfacé par Sophie Bessis et qui sera disponible en librairie le 5 juin 2025 est écrit par Ousmane Ndiaye. Son titre : « L’Afrique contre la démocratie. Mythes, déni et péril ». Sophie Bessis est une historienne, journaliste et essayiste, spécialiste des relations Nord-Sud, du monde arabe et des questions de développement.
En mettant ces œuvres à portée de main, "Pépites Jaunes" s'adresse aux étudiants, aux chercheurs, aux curieux et à tous ceux qui veulent mieux comprendre le monde à travers des écrits éclairants. Une ambition : rendre la connaissance plus accessible et stimuler l'esprit critique, dans un format pratique et percutant. La collection Pépites Jaunes pourrait ainsi devenir une référence pour celles et ceux en quête de lectures stimulantes et éclairantes, au croisement de la littérature, de la pensée critique et de l'histoire contemporaine.