Les Iles du Saloum, du fait de sa mangrove, attire un nombre important de touristes. Même des Sénégalais commencent à faire de cette partie du Sénégal, un lieu de visite. Le conservateur de l’Aire marine protégée (AMP) de Bamboung, commandant Lamine Kanté, compte profiter de cette activité touristique pour avoir des profits qui garantiront une gestion autonome de l’AMP.
L ’Aire marine protégée (AMP) de Bamboung, dans les îles du Saloum, est un havre de paix niché en plein Sine. A Toubacouta, une des destinations touristiques privilégiées dans cette partie du Sénégal, le réveil donne échos du climat et de la forte biodiversité. Le brouillard matinal crée une sorte de liaison entre l’espace et la terre. Il ne fait pas chaud en cette période l’année, le temps est clément. Le soir, c’est beau de voir les oiseaux, avec leurs cohortes interrompues, rejoindre leurs dortoirs. La balade à bord des pirogues est relaxante.
Prenant départ à partir d’un ponton d’un hôtel de la place, l’on arrive au premier site 30 min plus tard : Diorome Bu Makk, une habitation du passé qui a laissé des traces de son histoire. Selon les populations autochtones, ils sont des Mandingues ou Sérères qui vivaient de l’exploitation du coquillage, pour la voix beaucoup plus autorisé, «il fût anciennement occupé par des Africains fuyants la sécheresse. Le climat du Delta du Saloum offrant d’autres activités différentes de l’agriculture, ils se reconvertissent dans l’exploitation du coquillage», explique le colonel Mamadou Sidibé, directeur des Aires marines protégées (DAMP). Seulement, de cette communauté, il ne reste aucune descendance connue pouvant attester cette présence sur le site.
Une autre de version de l’histoire racontée, c’est aussi que les occupants de cette partie du Delta du fleuve Saloum, se déplaçaient beaucoup, fuyant la traite négrière. «Le lieu étant une zone de regroupement d’esclaves», rapporte-t-on. Et la preuve de cette présence humaine, c’est ce grand baobab qui fût le tombeau des griots qui, selon certaines croyances traditionnels, «sont indignes de partager les tombeaux avec l’autre partie de la population». Témoin de cette histoire qu’il ne peut point raconter, ce baobab comporte un large creux (au niveau du tronc de l’arbre) qui aiguise la curiosité. Un pan de l’histoire de Diorome Bu Makk, c’est également la présence confirmée de 128 tombeaux. «On a trouvé des personnes enterrées avec toute leur richesse, mais aussi de la poterie. La découverte est à l’Institut fondamentale d’Afrique noire (IFAN)», annonce le conservateur de l’Aire marine protégée du Bamboung, commandant Lamine Kanté.
L’objectif de l’équipe de conservation est de faire de cette attraction (amas coquilliers), une aire de repos, avec un musée où toute la découverte actuellement conservée à l’IFAN pourrait être visitée. Diorome Bu Makk est un site plein d’histoire. «L’amas coquilliers à une hauteur de 12 m et 400 mètres de diamètres» ; ceci reflète, selon le commandant Kanté, les nombreuses années d’occupation des lieux.
UNE SURVEILLANCE, AU PERIL DE LA VIE
Le mirador ou la zone de surveillance, se trouve à 15 km de Toubacouta. Il permet d’avoir une vue sur l’AMP. Les «boulongs» (rivière et bras de fleuve) de Bamboung, qui est le cœur de l’AMP, s’y trouvent. Les boulongs sont la zone fluviale de l’aire marine et occupent une superficie de 350 ha. L’aire marine étant une zone de reproduction de poisson, de ce fait, la pêche y est interdite. Les activités qui y sont possibles sont régulées et se tiennent à des périodes bien déterminées. La surveillance est assurée par des agents du ministère de l’Environnement, du Développement durable et de la Transition écologique, en plus des éco-gardes originaires des villages environnants. Ils assurent leur mission, à tout prix, et malgré les conditions de travail difficiles et précaires.
Koutouba Basse est un des éco-gardes originaires de la contrée. La corruption et d’autres difficultés il en a rencontrées. Il se rappelle de la vielle du combat Yekini/Balla, quand un visiteur inconnu de la zone, a manifesté le souhait d’introduire quelque chose dans l’eau, alors que l’accès est interdite. Son souvenir, c’est également sa garde à vue, suite à l’arraisonnement d’une pirogue dont le propriétaire avait fini par l’accuser de meurtre, en guise de représailles. Malgré toutes ces difficultés, il a fait 12 ans dans ce métier, sans être officiellement reconnu. Il ne gagnait que des pécules et sans contrat. Ce n’est qu’en août dernier qu’il a été recruté. Son statut de civil, fait qu’il n’est pas souvent respecté par la population
De 12 au départ, ils ne sont plus que 6 éco-gardes à officier sur place. Certains sont partis en Europe, d’autres ont déserté l’activité. Ils travaillent actuellement en binôme, pour assurer la surveillance de la vaste étendue que constitue l’AMP. En effet, cette Aire marine protégée s’étale sur 7000 ha dont les 3000 constituent la mangrove. L’eau occupe 80% de la superficie. Dans le Delta du fleuve Saloum, il y a 128 amas de coquillage qui ne sont plus occupés.
UN CAMPEMENT EN PLEINE FORET, POUR ACCUEILLIR LES TOURISTES
Le campement, situé à quelques encablures du village de Sipo, est une zone d’accueil. Il n’y a pas beaucoup de constructions en dur. Le bois et la paille étaient des moyens de constructions privilégiés. Cependant, le conservateur de l’AMP dit faire dans le changement, afin d’éviter les menaces environnementales et de mieux rationaliser les dépenses. Des constructions en dur sont prévues
Le campement communautaire ou encore «Keur Bamboung» est essentiellement géré par les communautés. Il a 9 cases, avec une capacité d’accueil de 40 personnes. «Il a été conçu pour appuyer la gestion de l’AMP. Les revenus tirés de ce campement permettent de payer le personnel, qui est de 25 personnes», indique le conservateur Lamine Kanté. Une partie des revenus sert à appuyer la surveillance de L’AMP et les frais de subsistance au niveau du mirador. Les activités qui y sont possibles sont une immersion dans la mangrove. En marée basse, il est possible de circuler et voir comment sont faits les palétuviers. Le campement a aussi un circuit d’environ 7 km où le touriste peut faire une promenade et voir la composition de l’écosystème et des espaces qui s’y trouvent. On y fait aussi du sport notamment la pratique de canoé-kayak.
A travers ces services offerts, les gestionnaires veulent avoir les ressources nécessaires pour mener leurs activités. «Notre objectif est d’aller à l’autofinancement de l’AMP. C’est pourquoi, on a entrepris la réhabilitation de la mangrove parce qu’auparavant les cases étaient faites avec le matériel local et une bonne partie des recettes étaient investies chaque année dans la réhabilitation. Dans nos projets, on va toujours utiliser le matériel local, mais on va faire ça de façon plus dure ; comme ça, les cases pourront résister 3 à 5 ans. En plus de ça, on a entrepris la mise en place d’activités génératrices de revenus durables», soutient commandant Lamine Kanté.
Dans les 13 villages environnant l’Amp, il est aussi prévu des activités, avec l’implication des populations qui sont des partenaires dans la conservation. «Nos projets, c’est d’initier des activités à travers la mise en place d’une politique d’énergie, le développement du maraichage, de l’apiculture, de l’aquaculture pour que, au moins, on puisse prendre une partie et la réinvestir dans la gestion de l’AMP. Pour l’instant, on ne peut pas affirmer qu’on est entrée dans l’autofinancement ; mais, c’est notre objectif», affirme Lamine Kanté, relevant que l’AMP tirait profit de sa gestion, mais la Covid-19 a ralenti les activités
SIPO, LES QUERELLES DE SUCCESSION DIVISE LA FAMILLE DE FATOU MANE
Sipo est le premier village, parmi la treizaine qui ceinture l’AMP. Le village est situé à 1,7 km du campement «Keur Bamboung». Il doit sa particularité à Fatou Mané, une reine qui y vivait. Fatou Mané est décédée à 107 ans pour certains et 109 pour d’autres. Issa Sané, son fils, raconte que sa mère a acquis sa royauté de manière fortuite. Fatou Mané, dont la visite était un passage obligé pour les visiteurs à Toubacouta, avait une réputation d’avoir des connaissances mystiques. Elle n’est plus là (décédée le 12 avril 2021), sa famille est actuellement divisée, à cause de sa succession
Issa Sané, née à Sipo en 1954 et fils de la défunte reine, assure déjà la «succession». Alors qu’il n’est pas encore officiellement installé, à cause d’une divergence familiale, il fait office de «roi» de la communauté. Les réticences ne sont pas fondées, à son avis, car il a la capacité de prendre le relais. L’héritier de la reine de Sipo devrait maitriser les connaissances occultes et être capable d’interpréter la nature. Issa Sané dit en être capable, au point de pouvoir déchiffrer les différents cris (hurlement, ricanement) d’une hyène. Toutefois, au sein de sa famille, il ne fait pas l’unanimité. Ses sœurs ainées qui souhaitent aussi prendre la place de leur mère, disent être beaucoup plus initiées que leur petit-frère. Issa Sané, par contre, estime avoir acquis de son père un savoir mystique supplémentaire ; suffisant donc, pour lui, pour être le garant du legs de sa mère.
C’est en 2002 qu’une délibération du Conseil rural de Toubacouta a fait du site une réserve naturelle communautaire. En 2004, elle est devenue Aire marine protégée (AMP), parmi les cinq (5) qui ont été mis en place par le decret n°2004-1408 portant création de 5 AMP. Bamboung est érigée en AMP grâce la richesse de son peuplement de poissons, au nombre de 78. Il y a aussi l’abondance de l’Epinephelus aeneus, une espèce de mérou emblématique au Sénégal. La forte pression de la pêche justifie aussi le choix de faire cette réserve naturelle une Aire marine protégée. Sa mangrove, relativement bien conservée, est riche en avifaune. La réserve a aussi une valeur esthétique qui attire
La richesse de l’AMP de Bamboung, c’est également une vingtaine d’amas coquilliers, 154 espèces végétales, 9 grands types d’habitats et de formation végétale. 220 espèces d’oiseaux y sont dénombrées, 16 espèces de reptiles. Parmi la population, on dénombre également 3 espèces d’amphibiens.
LE MANQUE DE MOYENS ET DE FORMATION DU PERSONNEL, DES ECUEILS A LA CONSERVATION
Le manque de formation des agents communautaires en service dans la réserve impacte sur la gestion de l’AMP, en plus du règlement intérieur dépassé par les enjeux. «En premier, on a la formation parce que pour bien gérer un campement, il faut une formation sur la gestion du matériel, l’accueil et la restauration. L’autre difficulté, c’est le règlement intérieur. On doit l’actualiser. Le règlement intérieur date de 2004. Avant cette date, il n’y avait pas l’exploitation du pétrole. Aussi, il n’y avait pas le besoin des communautés de bénéficier des coquillages. Il y a des données nouvelles, comme on est dans un processus de gestion dynamique, c’est mieux d’actualiser en prenant en compte ces spécificités», constate Lamine Kanté
Le travail de conservation est aussi plombé par un manque de moyens. «Pour la surveillance, on doit avoir des pirogues très rapides et légères. Certes, on a une dotation d’une pirogue, mais l’objectif est d’avoir deux (2) postes de gardes dans l’AMP. L’objectif est donc d’avoir au moins deux (2) pirogues supplémentaires, avec des moteurs, pour pouvoir mettre en place ce dispositif de surveillance», ajoute le conservateur. Les superviseurs locaux ont des emplois précaires. «Avec la pandémie, on a constaté que le personnel du campement avait des emplois très précaires. On n’avait pas cette vision d’anticiper. On doit trouver des activités alternatives pour le personnel pour que, en cas de catastrophe, ils puissent avoir des activités génératrices de revenus», déplore-t-il.
Néanoins, le conservateur Lamine Kanté signale que l’AMP s’est bonifiée ces derniers temps. «Avec le programme «Xëyu ndaw ñi» (un Programme d’urgence pour l’Emploi et l’Insertion des Jeunes, ndlr) on a 9 surveillants communautaires qui sont rémunérés, avec toujours l’objectif d’aller à l’autonomisation ; on a 23 nouveaux surveillants communautaires qui n’ont pas encore de statut ou une rémunération adéquate. On a commencé ça avec les surveillants. Avec la pandémie, on a 6 surveillants avec lesquels on a initié un projet d’aviculture locale pour que, lorsqu’ils ne travaillent pas, ils puissent avoir des activités complémentaires. Le personnel de l’AMP est composé de 9 éléments, hormis les civils», rappelle le commandant Kanté. La prédation foncière qui est constatée dans les autres AMP n’est pas très grande à Bamboung, mise à part la localité de Palemerin.
Texte Collectif
APPEL POUR LA LIBÉRATION DE PAPE ALÉ NIANG
La situation que subit le journaliste est en contradiction avec la prise de position de la Commission africaine des droits de l'homme qui stipule « l'importance cruciale de la liberté d'expression et d'information en tant que droit humain individuel... »
Cela fait deux mois que le journaliste Pape Alé Niang est privé de liberté. Il est accusé de « divulgation d'informations non rendues publiques par l'autorité compétente de nature à nuire à la défense nationale », « recel de documents administratifs et militaires » et « diffusion de fausses nouvelles de nature à jeter le discrédit sur les institutions publiques ». Depuis le dimanche 6 novembre 2022 qu'il a été interpellé en pleine rue, sa vie se résume à des aller et retour entre les établissements pénitentiaires et les structures de soins de la région de Dakar.
La liberté provisoire qui lui a été accordée, il y a un mois, n'a duré que six jours. Sur requête du procureur de Dakar, sa mise sous contrôle judiciaire a été révoquée par le juge sur des bases très contestables. En protestation de ce qu'il considère comme une instrumentalisation de la justice pour l'empêcher d'exercer son métier de journaliste engagé au service de l'information des citoyens, Pape Alé Niang est en grève de la faim. Sa vie est menacée !
Depuis plus de vingt ans, Pape Alé Niang exerce le métier de journaliste. Ancien présentateur vedette à la télévision et à la radio, on lui doit de très nombreux reportages au Sénégal et dans les pays de la sous-région. Au cours de sa riche carrière, il a interviewé de hautes personnalités et des anonymes sans parti-pris et avec professionnalisme. Depuis quelques années, il dirige un site internet d'information, très apprécié des Sénégalais, spécialisé dans l'investigation journalistique. Son travail chevronné, bien documenté a permis d'informer les citoyens sur des faits que certains auraient aimé cacher.
L'arrestation de Pape Alé Niang survient dans un contexte sociopolitique marqué par de vives préoccupations sur le devenir de la démocratie sénégalaise. Des militants politiques, associatifs, des youtubeurs sont emprisonnés pour leurs opinions. Les manifestations de l'opposition sont interdites et réprimées parfois de manière tragique. La situation que subit Papé Alé Niang est en contradiction avec la prise de position de la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples qui stipule « l'importance cruciale de la liberté d'expression et d'information en tant que droit humain individuel, en tant que pierre angulaire de la démocratie et aussi en tant que moyen pour garantir le respect de tous les droits humains et libertés fondamentales de l'homme. » Il est enfin à noter que le Sénégal ne cesse de reculer dans le classement de la liberté de presse de Reporters sans frontière (RSF).
Nous demandons la libération immédiate de Pape Alé Niang et rappelons au président Macky Sall son engagement à ce qu'aucun journaliste ne soit emprisonné pour des délits de presse.
Signataires
1. Mamadou Lamine Thiam, Député-maire de Kébémer, Président du Groupe parlementaire Liberté, démocratie et changement, Sénégal
2. Michel Gbagbo, Député à l'Assemblée nationale de Côte d'Ivoire
3. Cheikh Abdou Mbacké, Député, Vice-président Groupe parlementaire Libertés, démocratie et changement, Sénégal
4.Walter Baier, Président du Parti de la gauche européenne (PGE)
5.Pierre Laurent, Sénateur de Paris, France
6. Marc Botenga, Député européen, Parti du travail de Belgique (PTB)
96. Daba Wagnane, Députée, Assemblée nationale, Sénégal
97. Maitre Abdoulaye Tall, Avocat au Barreau de Dakar, Sénégal
98. Me Amadou Diallo, Avocat au Barreau de Dakar, Président Amnesty International Sénégal
99. Alassane Seck, Président de la Ligue Sénégalaise des Droits de l'Homme, Sénégal
100. Sadikh NIASSE, Secrétaire général de la Rencontre Africain pour la Défense des droits de l'Homme (Raddho), Sénégal
101. Manu Pineda, Député européen, Gauche unie Espagne
102. Pierre Sané, Secrétaire national chargé des relations avec la gauche, PS, Sénégal
PAR Jean Pierre Corréa
MONSIEUR LE PRÉSIDENT, DES SANCTIONS PLUTÔT QUE DES CONDOLÉANCES
Les accidents de la route ne sont en rien une fatalité. Ils résultent de tares consubstantielles à notre culture rurbanisée et matérialiste. Plus nos infrastructures se modernisent, plus nos routes sont meurtrières
Pourquoi des condoléances de Macky Sall à la suite de l’accident de deux autobus qui a fait 39 morts, pour l’instant et 80 blessés ? C’est bien beau, c’est très poli, voire policé, même très politiquement correct, monsieur le président, mais vos condoléances auront c’est certain, un effet comparable à celui d’un emplâtre sur une jambe de bois. Elles nous vont droit au cœur, ces condoléances, mais nous nous en passerions volontiers, leur préférant avec frénésie d’implacables sanctions contre toutes les responsabilités partagées d’un tel fléau national qui s’est mué en triste banalité, et qui s’est greffé sur notre confortable et déresponsabilisante notion de fatalité.
Les accidents de la route, ne sont en rien une fatalité mais résultent d’un ensemble de tares consubstantielles à notre culture rurbanisée d’une part et matérialiste d’autre part.
C’est la première fois qu’une tragédie routière au Sénégal fait, par son ampleur, l’objet de reportages télévisés sur plusieurs télévisions européennes, et même nord-américaines. C’est dire le choc que cet accident a suscité comme émotion, mais aussi comme incompréhension et révolte citoyenne… Il y en a marre vraiment de ces atermoiements gouvernementaux face à l’urgence de trouver des remèdes à cette singularité sénégalaise qui veut que, plus nos infrastructures routières se développent, plus nos routes sont meurtrières.
La France a su en 15 ans passer de 15 000 morts sur les routes chaque année à un peu moins de 3 000 ces dernières années. Cela s’est fait dans la douleur de la contrainte. Peut-il y avoir de développement et même de démocratie sans contrainte ? Tous savent où réside le mal. Mais sénégalaisement, on regarde ailleurs, là où le consensus suinte d’hypocrisie coupable.
Un ndeup national plutôt qu’un deuil national
Le mal réside dans nos capacités à tourner les lois, à tordre les règles des contrôles techniques à coups de billets dans les enveloppes, dans notre regard complaisant sur les garages de mécanos où l’on vend officiellement des pièces de voitures fausses. Notre mal réside dans cette évidence qu’il est interdit de punir, dans ces curieuses scènes où un conducteur mettra sa ceinture de sécurité non pas pour se protéger d’un choc, mais du racket d’un policier.
Aujourd’hui, aux portes du CETUD où se déroulent les contrôles techniques de nos véhicules, fleurit un juteux trafic de triangles de stationnement et d’extincteurs de voitures, qui vous sont tout simplement loués, oui, vous avez bien lu, loués, que vous présentez aux agents qui valident la conformité de votre véhicule, et que vous restituez à la sortie du Centre de Contrôle…
De quoi parle-t-on encore sous le coup d’une émotion, de sanctions, de sincères et humides condoléances ? Je crois savoir que pour 2 000 personnes sacrifiées sur l’autel de la "Sainte Triche Sénégalaise", en les ayant fait couler en mer avec le Joola, pas une sanction n’a été prise, et les responsables de cette catastrophe font encore ripaille dans les allées du pouvoir. On sanctionnerait pour 39 ? On souhaite le croire...
Il faut autre chose que des condoléances pour redresser ces faits tordus qui amochent notre quotidien et le pare de tant de bêtises. Il faut de la poigne et pour cela il faudrait que les corps qui sont chargés de faire respecter nos lois soient eux-mêmes respectables.
Ce ne sont pas des condoléances, monsieur le président, dont nous voulons recevoir, même si c’est très gentil de votre part. Nous voulons un grand coup de balai. Et tout le monde sait bien que pour bien nettoyer un escalier, il faut aller de haut en bas
Les cadavres s’amoncellent sur nos routes mortifères, des vies sont définitivement brisées, et pourtant les accidents de la route continuent d’ensanglanter les pages de nos journaux. Passées les émotions, les discours incantatoires sur la discipline routière, et parfois les condoléances télévisées du chef de l’Etat aux parents des victimes, quand vraiment là, y’a trop de morts, et que ça fait voyant, le Sénégal retombe dans la chronique quotidienne des accidents de la route mortels. Mais puisque nos vies ne valent pas tripette, les autorités de notre pays refusent de regarder les choses en face et d’évoquer puis de prendre en charge les véritables questions auxquelles il convient d’urgence d’apporter des réponses fermes à une coupable faiblesse.
Les autorités concernées par ce drame national, réajustent chaque jour leurs œillères afin de ne pas regarder dans quelles directions il est impératif de sévir.
Responsable numéro 1 : la corruption
Naguère, un Directeur du CETUD, monsieur Cheikh Oumar Gaye en l’occurrence, déclara tranquillement un jour que « plus de 90 pour cent des accidents incriminent le facteur humain la fatigue, l’indiscipline. C’est pourquoi l’Etat a mis en œuvre des projets dont le permis à points ». Sur ce point précis, il fait remarquer que beaucoup de documents de transport circulent au Sénégal. Par exemple il y a officiellement 996 000 permis de conduire qui ont été délivrés régulièrement par l’administration des transports routier alors qu’il y a plus de trois millions de permis qui circulent dans le réseau. Ce qui fait qu’il y a près de deux millions de faux permis qui circulent au Sénégal… Cela fait sourire. Mais avec plus de 2 000 000 de faux conducteurs, on s’étonne encore de convoquer le facteur humain. Mais la réponse est dans la question. Comment, par quel circuit de corruption adossé à un réseau d’influences, autant de faux documents ont-ils été délivrés ?
Autre cécité de nos autorités, qui est à la base même du problème, c’est le contrôle technique. Tâchons d’évacuer la question avec une métaphore : s’il était fait dans les règles de l’art et sans pression de quelconque lobby, nos villes seraient-elles embouteillées ? Encore une fois, la réponse est dans la question.
Prenons nos cars rapides. Ils sont souvent immatriculés « DKA », ce qui date leur existence aux années 70. Refaits, soudés de partout, soudures qui en fait provoquent plus de dégâts que le choc lui-même, il était convenu de renouveler ce parc antique par de nouveaux véhicules de transports en commun. C’était plus qu’un projet, c’est un programme, financé, piloté dans la douleur par le CETUD, mais qu’il est impossible de dérouler, parce que des lobbies veulent continuer à prospérer tranquillement dans le désordre actuel. L‘ordre empêche les Sénégalais de prospérer, et cela n’arrange pas de réorganiser ce secteur aux milliers d’emplois informels… Mais silence… Ils peuvent continuer à tuer.
Du Savon de Marseille pile en guise de liquide frein
Sur tous les trottoirs de Dakar, nous côtoyons l’indicible légèreté qui coûte la vie à de simples citoyens qui ne souhaitaient qu’aller tranquillement d’un point A à un point B, mais qui subissent la désinvolture et l’irresponsabilité de ceux qui ont décidé que, par pur sens de l’économie, ils pouvaient tout se permettre.
Ils achètent des bidons de liquide-freins, dont ils savent que ces bidons ne contiennent que du « Savon de Marseille » pilé, et alors ? Ils disent à haute voix « Bissimillah » avant de démarrer, ils ont convoqué par là-même Dieu, leur plus efficace, selon eux, « Garçon Commissionnaire », ils ont en réassurance absolue, collée sur le pare-brise, la photo de leurs marabouts, si par extraordinaire ils devaient commettre un accident mortel, c’est que vraiment Dieu n’est pas dans un bon jour !
Mais rien ne sera possible sans la lucidité nécessaire pour le pouvoir, de devoir s’attaquer au tréfonds de notre ADN et de nos habitudes qui a pour nom : corruption.
Le permis à points est la dernière histoire drôle. Comment ôter des points sur un faux permis ? Pliés en quatre de rire, nous attendons la réponse.
LE DEPUTE GUY MARIUS SAGNA PREVOIT UNE MARCHE NATIONALE
Le député Guy Marius Sagna s’est rendu hier, à Kandam, dans la commune de Diass pour s’enquérir et partager les préoccupations des populations de cette localité décriant la gestion foncière et la spoliation de leurs terres
Le député Guy Marius Sagna s’est rendu hier, à Kandam, dans la commune de Diass pour s’enquérir et partager les préoccupations des populations de cette localité décriant la gestion foncière et la spoliation de leurs terres.
A l’absence de réactions des autorités de tutelle pour arrêter les travaux sur le site dit ‘’Gros porteurs’’ et restituer aux habitants leurs terres, le parlementaire promet l’organisation d’une marche nationale regroupant l’ensemble des collectifs pour la défense des terroirs et des victimes de la boulimie foncière.
Le député de l’opposition Guy Marius Sagna, a rendu visite hier aux populations de Kandam (commune de Diass) pour déplorer avec eux l’occupation des terres prévues pour l’extension de leur village par des particuliers. Il a déclaré devant la presse :’’Dans l’unité, nous gagnerons. Ceux qui volent les terres des populations, ceux-là mettent leurs forces ensemble. Ceux-là sont unis pour l’accaparement des terres. Les bandits fonciers sont unis entre-eux. Nous, victimes de spoliation foncière, nous devons être unis pour faire face à la mafia foncière.
Selon lui, il est temps d’établir un pont entre toutes les victimes de Kandam, et celles de Boukhou (Diass), de Toglou, de Daga, de Kholpa. L’idée avancée est le premier jalon de l’organisation d’une marche nationale à démarrer dans le département de Mbour. Le député a invité toutes les victimes à faire un bloc pour une solidarité active et agissante pour la préservation, la conservation et la protection de leurs terres. Des manifestations dans les communes et arrondissements mais aussi dans le département de Mbour restent la seule riposte pour informer l’opinion et pousser les « mafiosi fonciers » à reculer. En outre, Guy Marius Sagna a cautionné l’arrêt des travaux démarrés sur le site et le bornage du site par les habitants de Kandam.
Aye Bobo Seydou Sow, porte-parole du jour des habitants de Kandam est revenue pour sa part sur les mobiles profonds de leurs réactions. Selon elle, entre leurs premiers agissements pour dénoncer les premières occasions du site et hier, les choses sont allées vite. D’une part, un espace vaste de plusieurs hectares a été clôturé en dur et d’autre part, des villageois sont venus borner le reste du site de Kandam ’’Gros porteurs’’. Aye Bobo Seydou Sow a fait un appel aux autorités pour permettre aux Kandamois de pouvoir disposer d’espaces pour la construction d’un poste de sécurité de proximité de gendarmerie, d’infrastructures socioéducatives, d’un dispensaire, d’un marché, d’une caserne des sapeurs-pompiers et permettre l’extension de ce village.
KHALIFA SALL, CANDIDAT DES FEMMES DE TAXAWU SENEGAL
Présidentielle 2024, Le Mouvement des Femmes de Taxawu Sénégal emboite le pas à leur leader.
Le Mouvement des Femmes de Taxawu Sénégal emboite le pas à leur leader.
Quelques jours après la sortie de Khalifa Ababacar Sall sur les colonnes de Sud Quotidien et sur les ondes de Sud FM, lors de l’émission Grand Format, affirmant avec conviction que rien ne peut empêcher sa candidature en 2024, les femmes de Taxawu Sénégal ont tenu le samedi 7 janvier une Assemblée générale à l’issue de laquelle, elles ont officiellement investi l’ancien maire de Dakar candidat à la présidentielle de février 2024.
Dans un communiqué rendu public, ces femmes qui s’engagent «résolument à élire le Président Khalifa Ababacar Sall, Président dès le premier tour en 2024», annoncent vouloir «propulser et imposer partout au Sénégal : des villes aux villages, des communes, aux quartiers et concessions… l’élection du Président Khalifa Ababacar Sall au soir du 25 Février 2024».
SONKO REPORTE LA LEVEE DE FONDS DU NEMMEEKU TOUR ET INTERPELLE L’ETAT
Dans un message partagé sur sa page Facebook, le maire de Ziguinchor et leader du parti Pastef/Les Patriotes, a annoncé le report jusqu’à une date ultérieure du programme de levée de fonds du Nemmeeku Tour qui était prévu hier, dimanche 8 janvier
Le bilan très lourd de l’accident survenu dans la nuit du samedi au dimanche sur la route de Kaffrine impliquant deux autobus n’a pas laissé indifférent des acteurs politiques sénégalais. En effet, au-delà du chef de l’Etat qui a annoncé via un message partagé sur son compte twitter un deuil national à compter de ce jour et un Conseil interministériel pour la prise des «mesures fermes sur la sécurité routière le transport public des voyageurs», plusieurs acteurs politiques dont Ousmane Sonko qui, après avoir annoncé le report du lancement de la campagne de levée de fonds du Nemmeeku Tour qui était prévu hier, dimanche 8 janvier, n’a pas manqué d’interpeler les autorités publiques dans l’application stricte des normes de contrôle...
Dans un message partagé sur sa page Facebook, le maire de Ziguinchor et leader du parti Pastef/Les Patriotes, a annoncé le report jusqu’à une date ultérieure du programme de levée de fonds du Nemmeeku Tour qui était prévu hier, dimanche 8 janvier.
Par ailleurs, Ousmane Sonko qui dit être «réveillé meurtri par la triste nouvelle de cet accident de la circulation», a appelé les autorités en place «à accorder une attention prioritaire à ce fléau aux conséquences humaines, sociales et économiques désastreuses pour le pays».
En effet, selon lui, des sources officielles datant de 2020, font état de plus de 4 000 accidents de la circulation qui occasionnent plus de 600 morts et des dégâts matériels estimés à 74 milliards de FCFA enregistrés chaque année au Sénégal. Et ces statistiques poursuit-il, «ne tiennent pas compte des accidents de motocycles et autres moyens informels de transport».
Poursuivant, le leader de Pastef qui cite toujours ses sources a indiqué que les «principales causes de ce drame sans fin sont : des chauffards ne disposant pas de permis de conduire ou en état d’ébriété, le défaut de contrôle technique, les dépassements dangereux, les stationnements irréguliers, le non-respect des règles de priorité, l’état défectueux des routes, le manque de tableau de signalisation, le manque de ralentisseurs dans les zones fréquentées par les piétons, la vétusté des véhicules, la proximité des maisons qui jalonnent certaines routes et l’absence d’aires de repos».
Sous ce rapport, fait-il remarquer. «Toutes ces causes relèvent avant tout de la responsabilité principale des autorités publiques dans l’application stricte des normes de contrôle, de sanction et d’aménagement des infrastructures routières».
CHEIK ALIOU NDAO HONORE MERCREDI
Le collectif "Fonk Sunuy Làmmiñ" annonce qu'il rendra un hommage à l'écrivain et militant des langues et cultures africaines Cheik Aliou Ndao, mercredi 18 janvier prochain, à la Maison de la culture Douta-Seck, à Dakar.
Dakar, 9 jan (APS) - Le collectif "Fonk Sunuy Làmmiñ" annonce qu'il rendra un hommage à l'écrivain et militant des langues et cultures africaines Cheik Aliou Ndao, mercredi 18 janvier prochain, à la Maison de la culture Douta-Seck, à Dakar.
"(…) C'est la grande personnalité de l'éducation et de la culture, le pédagogue et l'écrivain, le défenseur et le militant des langues et cultures africaines qu'est Cheik Aliou Ndao, que le collectif veut célébrer pour lui rendre hommage et le remercier pour toute son action", explique ce collectif dans une note transmise à l'APS.
Le collectif "Fonk Sunuy Làmmiñ" souligne que Cheik Aliou Ndao a su allier "une riche carrière professionnelle et une impressionnante production littéraire".
"Après des années d'expériences dans l'enseignement, il a intégré la haute administration en ayant servi au ministère des Affaires culturelles avant d'être nommé au poste de conseiller technique à la Primature d'abord, et à la présidence de la République ensuite", indique-t-il dans cette note signée de Ndèye Codou Fall, directrice de "Ejo", une maison d'édition en langues nationales.
M. Ndao, a rappelé Ndèye Codou Fall, a "la particularité d'avoir proposé une littérature d'une égale consistance en français et en wolof". Dans chacune de ces deux langues, dit-elle, il s'est illustré par une production touchant à tous les genres : poésie, roman, nouvelle, théâtre, essai.
"Une personnalité de cette envergure mérite l'hommage de ses disciples, de ses pairs, de ses lecteurs, tout simplement de ses compatriotes en cette année de son 90e anniversaire", explique la directrice de la maison d'édition "EJO".
Le jour même de cet hommage, les initiateurs prévoient d'organiser une table-ronde sur la production de l'auteur du livre "L'exil d'Alboury", à partir de 9 heures.
Ils annoncent aussi une exposition d'ouvrages en langues nationales, dont les publications de Cheik Aliou Ndao, et la diffusion d'un documentaire-portrait de l'auteur.
La direction du livre et de la lecture, de son côté, procédera au lancement d'un livret qu'elle a consacré à Cheik Aliou Ndao et à son œuvre.
Cheik Aliou Ndao, de son vrai nom Sidi Ahmed Alioune, est né en 1933 à Bignona, dans la région de Ziguinchor.
Il a été professeur d'anglais et a publié de nombreux ouvrages en français, dont "L'Exil d'Alboury" (1985), "Buur Tilleen, Roi de la Médina" (1972), "Excellence, vos épouses !" (1993), "Mbaam Hakimoo" (1997) et "Un bouquet d'épines pour Elle".
Lauréat du Grand-Prix du président de la République pour les lettres, en 2012, Cheik Aliou Ndao a aussi notamment publié "Singali" (2013), un roman écrit en wolof.
Le collectif "Fonk Sunuy Làmmiñ" avait rendu hommage à l'auteur sénégalais Mame Younouss Dieng, le 17 novembre 2021.
"Fonk Sunuy Làmmiñ" est un groupe engagé dans la promotion des langues nationales. Il regroupe des associations et des institutions dont sont membres des écrivains, enseignants et des journalistes.
Par Abdoulaye THIAM
PERMIS DE TUER !
La mort de 39 Sénégalais dans un grave accident de circulation à hauteur de Kaffrine a créé l’émoi et la consternation sur l’étendue du territoire. Comme d’habitude, à chaque fois qu’un malheur frappe notre pays, une émotion primitive envahit les médias
La mort de 39 Sénégalais dans un grave accident de circulation à hauteur de Kaffrine a créé l’émoi et la consternation sur l’étendue du territoire. Comme d’habitude, à chaque fois qu’un malheur frappe notre pays, une émotion primitive envahit les médias. La classe politique affiche sa scolarité et sa compassion aux victimes et à leur famille. Les médias se rivalisent d’éditions spéciales. Les antennes radios s’ouvrent à cœur joie.
Mais le temps d’une rose, on oublie rapidement nos morts, pour la plupart des jeunes, partis à la fleur de l’âge, à jamais à cause d’une irresponsabilité, de l’indiscipline d’un chauffeur et/ou chauffard, de sa cupidité. Tout ça, parce que nous refusons de prendre notre responsabilité pour sanctionner les coupables afin de freiner l’hémorragie. La première responsabilité est étatique. Le président Abdou Diouf n’avait-il pas pris un décret interdisant aux apprentis de se mettre debout sur les marche-pieds des véhicules de transports en commun. On connaît la suite.
Après le naufrage du bateau Le Joola, la plus grande catastrophe maritime au monde, avec 1853 victimes devant même le Titanic, le président Abdoulaye Wade avait demandé qu’on fasse notre propre introspection. On a alors assisté à quelques changements de comportements qui auraient dû être la norme: faire la queue avant de monter dans un bus, éviter les surcharges, respecter les heures de départ et ne s’arrêter qu’au niveau des arrêts, etc.
Mais regardons le spectacle qui s’offre sous nos yeux avec la complicité inouïe de nos forces de sécurité. Taxis «Clandos», charrettes, certaines voitures aux allures de cercueils roulants transportent nos concitoyens qui n’ont souvent pas le choix vers les cimetières.
Alors que nous peinons à faire notre deuil près de 21 ans après ce drame survenu le 26 septembre 2001, nous avons repris nos vieilles et mauvaises habitudes. Ce qui a conduit à ce drame produit à Bettenty avec la mort par noyade de 21 femmes dans le chavirement d’une pirogue dépourvue de gilets de sauvetage. La liste est loin d’être exhaustive. Malheureusement, elle risque de s’allonger davantage parce que c’est nous-mêmes qui délivrons le permis de tuer.
Par Vieux SAVANÉ
DE LA POLITIQUE AUTREMENT
Consolider la démocratie sénégalaise, c’est sortir de la pulsion « dégagiste ». Il est plutôt question de redéfinir l’échelle des valeurs afin de remplacer l’immoralité par la moralité, la malhonnêteté par l’intégrité, la traîtrise par le patriotisme
Ce n’est ni une question de droit ni une question éthique, c’est de la politique dit-on communément pour justifier des décisions problématiques. Désarçonnante affirmation puisqu’elle sous-entend que la politique est le lieu de toutes les extravagances, du basculement de toute règle vu que tous les coups sont permis, des plus tordus aux plus sordides. Encastrée dans un espace clos, dans son monde propre, comment alors s’étonner qu’elle soit si mal perçue ?
Il suffit d’ailleurs de jeter un regard rétrospectif sur le processus de consolidation de la démocratie au Sénégal, pour constater avec tristesse que l’avènement de la première alternance politique démocratique en 2000, après 40 ans de pouvoir socialiste, a été loin d’avoir tenu toutes ses promesses. Qu’en dépit des longues années d’opposition ponctuées par des séjours en prison, diverses vexations, privations et humiliations, en lieu et place d’une rupture salvatrice, il a fallu en effet très vite désespérer du chef de l’opposition d’alors. Son accession à la magistrature suprême ayant été vécue à l’image du couronnement d’un cheminement personnel, l’argent public s’est transformé en cagnotte privée au service d’une générosité suspecte, ouverte à toutes les audaces de captation et de prédation.
Une posture aux antipodes de celles adoptées sous d’autres latitudes, à l’instar de Singapour, où le premier Premier ministre de la République, feu Lee Kuan Yew, avait eu conscience de devoir faire le choix « entre deux chemins à suivre ». Aussi, les deux termes de l’alternative étaient-ils ainsi posés : « le premier : voler l’argent de l’Etat, enrichir mes amis et mes parents, appauvrir mon pays, et en conséquence mettre mon peuple dans la misère. Le deuxième : Servir mon peuple et faire rentrer mon pays dans le rang des 10 meilleures nations du monde ». Le résultat n’aura pas tardé puisqu’en moins d’une génération, Singapour est passé du statut de pays sous-développé et corrompu à celui de géant économique.
Au Sénégal, loin d’un telle alternative, la politique se donne au contraire de plus en plus comme le chemin le plus court et le plus sûr pour s ‘enrichir rapidement. Aussi est-il de moins en moins question de programme pour les centaines de partis recensés, encore moins de vision mais d’ épouser plutôt des postures déclamatoires et de se positionner dans l’accès aux ressources. Si prompts à dénoncer l’hyper-présidentialisme, la mal gouvernance, l’absence d’éthique, de redevabilité, le clientélisme et le népotisme, les prétendants à la magistrature suprême sont comme visités par une amnésie soudaine dès qu’ils sont élus. Aussi, au delà du débat sur un deuxième, troisième, quatrième mandat se pose un impératif qui s’affiche sous la forme d’un choix entre les « deux chemins » auxquels faisait référence Lee Kuan Yew. Une direction qu’on est toutefois loin d’emprunter tant les scènes qui se sont déroulées à l’Assemblée nationale, la lutte des places qui n’épargne aucun camp, n’augurent pas de lendemains qui chantent.
S’y ajoute l’avertissement de feu Ousmane Tanor Dieng, ancien ministre des Services et Affaires présidentiels et ancien homme fort de l’ancien président Abdou Diouf . Ainsi relevait-il : « On a observé depuis le défunt président Senghor une hypertrophie du pouvoir présidentiel, tout est entre les mains du chef de l’Etat. C’est lui qui initie, décide et exécute. Tout part de lui, tout revient à lui. Donc la première chose à remarquer, c’est cette espèce de culture de l’Exécutif ou culture du bonapartisme ou du césarisme. Tout est entre les mains du président de la République qui a des pouvoirs quasi illimités » ( in Le populaire du 8 mars 2005). Avec une gravité qui sonne encore comme une autocritique doublée d’un appel au sursaut, cet homme qui savait de quoi il parlait affirmait : « Les institutions sénégalaises étaient dangereuses avec nous et sont encore plus dangereuses aujourd’hui avec le régime de l’alternance ». Ou tout simplement entre des mains inexpertes et ne remettant pas en cause l’hyper-présidentialisme.
LE DEGAGISME N’EST PAS UNE PANACEE
Après deux alternances politiques démocratiques voilà que les dernières élections locales et législatives viennent consacrer s’il en était besoin, l’idée selon laquelle la carte d’électeur est utile. Et c’est justement cela qui participe à sédimenter une institution, à la rendre crédible et incontestable, la soustrayant ainsi au bon vouloir de telle ou telle personne. Parce que la vigilance devrait s’exercer à ce niveau, le nouveau palier à franchir est d’arriver à ce que le vote se détache de sa dimension protestataire voire référendaire pour épouser enfin la dimension d’adhésion et de conviction à travers un choix pluriel.
Ce que 2024, s’il n’est pas pollué par le débat sur un second quinquennat ou un 3e mandat, est censé nous offrir en nous mettant en face de deux, trois voire quatre primos candidat(e)s à la magistrature suprême. En 2000 en effet, tout comme en 2012, nombre d’observateurs s’étaient accordé sur le fait qu’on a voté contre le locataire qui était à Roume et qu’il fallait déloger coûte que coûte. Tout comme ces dernières législatives qui avaient l’allure d’un référendum.
A l’évidence, consolider la démocratie sénégalaise, c’est sortir de la pulsion « dégagiste » de ce stade protestataire. Ce qui suppose que les locataires du palais, le citoyen-électeur dont la maturité arrive pour l’essentiel à se jouer du « ndigel »religieux et de l’achat de conscience , l’opposition, jouent le jeu à en respectant les règles et en apportant de façon consensuelle les correctifs sur les manquements dénoncés. Reste donc à traquer les dysfonctionnements de nos institutions, pour les renforcer, les sécuriser et les crédibiliser, afin que le système puisse obliger tout un chacun à suivre les règles qui s’imposent à tout le monde.
Reste surtout à sacraliser une parole univoque ou « oui veut dire oui », et « non veut dire non ». Il est important en effet pour imprimer un véritable leadership dans le corps social que revienne comme un impératif cette alternative du premier Premier ministre Singapourien. A défaut on l’aura compris , le Sénégal continuera de s’éloigner de ce goût de l’avenir qui lui fait tant défaut.
Toute cette séquence de notre histoire devrait par contre nous amener à comprendre que le renouvellement de la classe politique auquel nombre de citoyens ont appelé de leurs vœux ne saurait se réduire à une affaire de naissance, avant ou après les indépendances. Encore moins à idolâtrer les jeunes et à jeter les vieux aux orties ou vice versa. Il est plutôt question de redéfinir l’échelle des valeurs afin de remplacer l’immoralité par la moralité, la malhonnêteté par l’intégrité, la traîtrise par le patriotisme. Il importe par conséquent de déconstruire cette manière de percevoir la politique comme ce lieu du tout permis, en s’érigeant en hommes et femmes de causes qui les transcendent. A défaut, à un an de la prochaine élection présidentielle, le Sénégal court le risque de reconnaître le bonheur perdu au bruit furieux qu’il ferait en partant, assommé par les cocktails molotov, les pneus brûlés, les balles réelles qui tonnent, les grenades assourdissantes.
Parce qu’il mérite mieux que cette catastrophe annoncée grosse de tous les dangers, en clin d’oeil à Albert Camus, ce beau pays qui est le nôtre nous somme de procéder à « une révolution » voire de « remplacer la politique par la morale ». Hors de tout dégagisme, l’urgence est assurément de rendre le choix possible et de faire en sorte que le Sénégal ne se défasse.
VERS LA SUPPRESSION DES SUBVENTIONS DE L'ELECTRICITE ET DU SUPERCARBURANT
Le gouvernement sénégalais s’est engagé à supprimer d’ici à 2025 les subventions de l’électricité, du supercarburant et du gasoil en mettant en œuvre une stratégie comprenant six étapes
Dakar, 9 jan (APS) – Le gouvernement sénégalais s’est engagé à supprimer d’ici à 2025 les subventions de l’électricité, du supercarburant et du gasoil en mettant en œuvre une stratégie comprenant six étapes, a appris l’APS de source officielle.
‘’Notre objectif est de limiter les subventions dans l’enveloppe budgétaire 2023 à 2,7 % du produit intérieur brut. Cela implique de réduire le coût des subventions de 258,1 milliards en 2023’’, explique une note d’information parvenue à l’APS.
S’agissant de l’électricité, le gouvernement a décidé d’augmenter les tarifs de 18,97 francs CFA par kilowattheure, pour la basse tension (segment représentant 99,8 % de l’effectif de la SENELEC), de 22,79 francs par kilowattheure pour les clients de la moyenne tension (essentiellement des entreprises) et de 14,31 francs par kilowattheure pour la haute tension (neuf entreprises industrielles et le Train express régional).
Ce réajustement tarifaire devrait entrainer une économie de 99,7 milliards de francs CFA pour le budget de l’Etat, indique la même source. Elle signale qu’un ‘’tarif social’’ sera appliqué aux clients consommant habituellement moins de 150 kilowattheures par mois (1.159.146 clients de la SENELEC, soit 47,8 % de l’effectif total), afin de préserver les ménages vulnérables.
Une baisse de 158,5 milliards de francs de la subvention en 2023
Le gouvernement a aussi fait part de sa volonté d’ouvrir des négociations pour arriver à des mesures d’accompagnement permettant d’atténuer les effets de la hausse des tarifs de l’électricité sur la compétitivité de certaines entreprises.
Les prix du supercarburant et du gasoil ont ainsi été augmentés dans les proportions suivantes : une hausse de 100 francs sur le prix du litre de gasoil, qui passe de 655 à 755 francs, soit le même niveau d’augmentation que le litre de supercarburant, qui passe de 890 à 990 francs CFA.
La note d’information souligne que ces mesures permettront de diminuer de 158,5 milliards de francs CFA la subvention dont bénéficie le secteur énergétique. Des mesures d’accompagnement sont également envisagées pour le secteur des transports publics, annonce-t-elle.
‘’Le gouvernement versera des subventions aux transporteurs pour limiter les effets de la hausse, pour éviter qu’elle ne se répercute sur les voyageurs, autrement dit les ménages les plus vulnérables’’, informe la même source.
Elle explique que pour prévenir les risques de fraude, les transporteurs devraient accepter de faire implanter dans leurs véhicules, par les services de l’Etat, un dispositif technologique permettant de retracer au kilomètre près les moindres déplacements.
La note d’information signale que les taxis urbains, des ‘’moyens de déplacement des classes favorisées’’, sont exclus de cette subvention.
Augmentation de 35 à 50 milliards francs CFA de l’enveloppe réservée aux bourses de sécurité familiale
Le gouvernement va poursuivre en même temps les transferts monétaires dont bénéficient les ménages les plus pauvres, avec une augmentation de 35 à 50 milliards de francs CFA du budget alloué aux bourses de sécurité familiale, dès 2023.
Il s’engage à revoir la formule permettant de déterminer les prix du carburant.
Le gouvernement affirme que son objectif est d’assurer que les prix à la pompe tiennent davantage compte des marchés internationaux, tout en menant une étude destinée à réviser la structure des tarifs de l’électricité.
La troisième phase de la stratégie va porter sur le renforcement du dispositif des transferts monétaires, dans le but de déployer rapidement les compensations aux ménages vulnérables en cas de chocs sur les prix des produits pétroliers, mentionne la même source.
Elle précise que la quatrième étape s’articulera autour d’une campagne de communication destinée à accroître la compréhension de ces mesures pour le public. ‘’Cette campagne informera le public des inconvénients des subventions existantes et des avantages de la réforme.’’
Le gouvernement a décidé, dans une cinquième phase, de réduire l’enveloppe des subventions à 1 % du produit intérieur brut au plus en 2024. Celles-ci sont évaluées à 2,7 % du produit intérieur brut dans l’exercice budgétaire 2023.
Ces mesures sont en définitive destinées à supprimer définitivement, dans la phase suivante, les subventions en 2025.
Les subventions sur l’électricité seront supprimées à cette date, tandis que les ménages vulnérables seront protégés à l’aide de transferts monétaires ou de financements croisés par les autres consommateurs, ajoute la même source.
Sept cent cinquante milliards de francs CFA pour les subventions de l’électricité et des produits pétroliers en 2022
S’agissant du supercarburant et du gasoil, les mécanismes d’ajustement des prix s’appliqueront pleinement et favoriseront la cohérence des coûts, avec l’évolution des prix internationaux.
Le gouvernement rappelle qu’actuellement les subventions de l’électricité, des produits pétroliers (essence, supercarburant et gasoil) et du gaz butane représentent 4 % du produit intérieur brut du pays.
Selon lui, la subvention de l’électricité prend la forme d’une compensation tarifaire à verser à la SENELEC. ‘’Dans les conditions économiques actuelles, cette subvention devrait coûter 279,8 milliards de francs CFA à l’Etat en 2023’’, estime-t-il.
La subvention des produits pétroliers et du gaz, basée sur le remboursement des pertes commerciales supportées par les compagnies obligées de vendre à des prix inférieurs au prix du marché, pourrait atteindre 524,7 milliards de francs CFA en 2023, si aucune mesure n’est prise pour la contenir, avertissent les autorités.
Elles précisent qu’au total, les subventions des produits pétroliers et du gaz franchiront la barre des 800 milliards de francs CFA en 2023, après avoir coûté 750 milliards en 2022, si aucune stratégie n’est mise en place.
‘’Ces subventions sont fortement régressives et limitent les marges de manœuvre budgétaires pour des dépenses sociales (santé, éducation) et les infrastructures prioritaires’’, soutient le gouvernement.