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18 août 2025
NOTRE DÉFI EST QUE LA DANSE SOIT RESPECTÉE AU SÉNÉGAL
Dans le cadre de la célébration de ses 50 ans d’existence, la compagnie Bakalama du Sénégal célèbre à Dakar la 8e édition du Festival international de Thionck-Essyl du 27 au 30 décembre et du 4 au 8 janvier en Casamance. Malal Ndiaye explique ces origines
Dans le cadre de la célébration de ses 50 ans d’existence, la compagnie Bakalama du Sénégal célèbre à Dakar la 8e édition du Festival international de Thionck-Essyl du 27 au 30 décembre et du 4 au 8 janvier en Casamance. Dans cet entretien, Malal Ndiaye, directeur de ce Festival de Musique et danse revient sur les fondements et les perspectives.
Comment est née l’idée du Festival de Thionck-Essyl ?
Nous devrions être à notre 10ème édition, n’eût été le covid. Mais là nous sommes à notre 8e festival. Le festival est né d’une rencontre des fils de Thionck-Essyl, un certain Landing Mané et moi. On était partis en tournée en 2004, en France, et au retour, nous avions eu des partenaires qui nous ont offert des livres et d’autres présents. Nous nous sommes dit pourquoi ne pas organiser un week-end culturel à Thionck-Essyl. Avec notre compagnie « Bakalama » composée de filles et de fils de ladite commune, nous avons amené les livres pour les offrir à l’école. J’étais déjà dans le milieu et lui était chorégraphe. On s’est dit pourquoi ne pas faire de ces journées culturelles un festival.
Parlez-nous un peu de votre compagnie Bakalama et sa signification.
La création du ballet « Bakalama » remonte à 1972, année de naissance de l’association des ressortissants du village de Thionck-Essyl à Dakar. Bakalama signifie calebasse car sa forme représente le symbole de l’unité et de l’enracinement dans la culture Diola. Bakalama est un nom chargé d’histoire qui fait référence aux habitants de Thionck-Essyl. Il s’agit d’une plateforme de retrouvailles de toute une communauté originaire de Thionck-Essyl. Le ballet forme ses propres artistes ainsi que d’autres apprenants venus du monde entier.
Après 50 ans d’existence, quels sont les défis et les perspectives ?
Notre défi est que la danse soit respectée et comprise au Sénégal parce que c’est un métier noble. Mais aussi que le ministère de la Culture puisse vraiment doter la danse d’un fonds de développement. Et nous avons travaillé sur ça à Saly, il y a quelques mois. Ainsi, nous pouvons faire nos créations pour que les artistes puissent bouger un peu partout. Ça sera une manière d’organiser la danse au Sénégal. Une compagnie comme « Bakalama » qui a 50 ans, c’est l’âge d’or, un demi-siècle. Nous avons raflé énormément de prix en Afrique, en Europe, en Asie, au Sénégal, etc. Je pense que ne serait-ce que pour cela, le président de la République ou le ministère de la Culture devait nous recevoir. Il doit connaître la compagnie « Bakalama » avec tous ses prix à travers le monde. Il saura que la danse est représentée au Sénégal et un peu partout en Afrique, en Europe... Je reviens fraîchement de Paris à l’Unesco pour la Conférence internationale de danse (Cid). Je représente le Sénégal à cette institution.
Pouvez-vous revenir sur l’impact économique du Festival ?
Car cela fait 3 semaines que j’ai quitté Thionck-Essyl pour me réunir avec le comité d’organisation. Les artisans, les auberges, les Jakartamen, les boutiques, entre autres, vont y retrouver leur compte. Même au-delà de ça, sur le plan touristique, c’est important. On est en train de vendre la destination sénégal parce qu’au moins 35 artistes vont quitter les Etats-Unis, la Suisse, l’Espagne pour l’événement. Même le ministère du Tourisme à qui, on a écrit, n’a pas répondu. Ce n’est pas sérieux ! Le ministère de la Culture et le Centre culturel Blaise Senghor ont essayé de nous aider. Nous avons discuté aussi avec la Direction du patrimoine mais pour le ministère du Tourisme, la Ville de Dakar, on attend.
Est-ce à dire que le budget du festival n’est pas encore bouclé ?
En toute sincérité, on n’a pas encore eu la moitié du budget et c’est désolant parce que le festival se déroule sur plusieurs jours, du 27 au 30 décembre à Dakar, et du 4 au 8 janvier en Casamance. Ne serait-ce qu’un bus de transport pour amener tous les artistes, cela va coûter au minimum un million de FCfa. Or, quand on va aux Usa, en Europe ou ailleurs, on est des hôtes. Nous aussi nous souhaitons, quand des artistes viennent d’ailleurs, qu’on puisse leur montrer la Téranga sénégalaise.
Quel est le programme du festival ?
Il y aura des stages de danses, des workshops, du spectacle également. Thionck-Essyl est très riche. C’est une commune composée de quartiers et chacun est en pleine préparation. Il y aura d’autres troupes et des jeunes musiciens qui vont venir de Bignona, Kafountine et Ziguinchor. On aura l’occasion avec des musiciens comme Moh DeDiouf, Sam Paco, Ben Boy, Maodo Malick, entre autres, pour faire des échanges culturels avec les Espagnols avec la compagnie Muntu. Nous sommes aussi en train de discuter avec Didier Awadi.
par Ndukur Kacc NDAO
LA DÉMOCRATIE, LE FAKE NEW LE PLUS VENDU DE NOTRE SIÈCLE ?
Notre pays est en pleine effervescence électorale. Certains louent la vitrine démocratique du Sénégal. D’autres le brocardent. Plus globalement, une partie de l’Afrique de l’ouest est en pleine tourmente sur la question du troisième mandat.
Notre pays est en pleine effervescence électorale. Certains louent la vitrine démocratique du Sénégal. D’autres le brocardent. Plus globalement, une partie de l’Afrique de l’ouest est en pleine tourmente sur la question du troisième mandat. Macky, lui, décident de ne rien dire sous prétexte que cela mettrait le pays dans l’instabilité. Entre tripatouillage et forcing, les forces démocratiques se mobilisent pour faire face. Les USA voient leurs mythes démocratiques s’effondrer même si les accusations de fraude sont connues à chaque élection au pays de l’Oncle Sam. La Chine, quant à elle, était dans la tourmente du Coronavirus, et s’est placée dans une autre dynamique depuis quelques années. En effet, le Parlement chinois a juste décidé d’abolir la limitation des mandats présidentiels pour permettre à Xi Jinpinh de réaliser sa vision à long terme. 2958 voix pour, seulement 2 contre et 3 abstentions. Un vote "massif" qui confirme la mainmise du PCC sur le pays et une confiscation des libertés. De manière décalée j’ai pensé à la partie de l’argumentaire qui affirme que c’est pour réaliser la vision à long terme. C’est sûrement un "alibi" pour justifier la confiscation des libertés démocratiques.
Se pose la question de fond. Comment aujourd’hui en 2022, un pays peut avoir et mettre en oeuvre une vision à 15 -20 ans et en même temps avoir un rythme électoral infernal quand même ! D’un côté on a cette tension permanente entre des gens qui, à peine élus par le processus "démocratique" (on le concède), sont obnubilés par les prochaines élections (c’est leur long terme, 5 à 7 ans au max). De l’autre un champ démocratique en constante ébullition qui t’accorde une période de grâce (de 100 jours symboliques) et qui s’évertue (avec les groupes d’intérêt, les réseaux sociaux, etc. ), à détruire et dégager celui qui est en place. Le seul consensus national porte sur des questions très graves de sécurité nationale ou sur les sujets tabous (comme certains groupes "intouchables").
Alors les seuls "leaders" sont soit des autocrates ou des dictateurs qui confisquent les libertés. Xi, Poutine, Salam, Ergodan, Ben Zayed aux Émirats. Pendant ce temps les "démocraties" imposent un "turn over" du personnel politique qui ne peut être efficaces que si les socles institutionnels sont très forts pour permettre de garder le cap malgré les "alternances". Hollande, Macron, Obama, Trump, Merkel en constante négociation avec les autres forces ou des leaders populistes sortis des urnes. Sinon le modèle africain avec ses deux faces de la même monnaie. Des élections régulières sans vrai alternance dans un cas et des présidents à vie. Mais ils sont tous incapables de réaliser ce qui fait un pays fort. Un passé, une ambition et une vision. En Chine Xi dit que 5 -10 ans ce n’est pas assez. Entre ça et faire sauter la clause limitative il y a du surréaliste. La clé c’est de bâtir des institutions fortes et résilientes face aux "aléas démocratiques ". Aux USA, le président a parfois deux ans sur 4 pour mettre en oeuvre sa politique. Car la première année, il apprend le job et la dernière année il prépare la réélection. Chez nous il a 5 ou 7 ans pour ...confisquer le pouvoir à jamais si possible !
Aujourd’hui, le Maroc est en train littéralement de bouffer l’Afrique subsaharienne. Comment ce pays, ce royaume parvient à cela ? Le roi est adossé à un pouvoir séculier qui lui offre la possibilité de se projeter et s’appuyer sur un socle tentaculaire au niveau national. Il peut imprimer une vision très nationaliste et à long terme. Mais le pays utilise les outils du management moderne. Beaucoup de ministères au Maroc ont recours aux meilleurs cabinets internationaux pour dresser leur tableau de bord et mettre en place des formes de reddition de comptes. Le roi n’hésite pas à sanctionner et même à bannir des ministres indélicats. Mais quand il voyage en Afrique, il débarque toujours avec une "cargaison " d’hommes d’affaires...marocains. Il leur offre l’environnement propice pour se déployer. Quand Erdorgan arrive à Dakar, il vient avec dans ses valises les businessmen turcs qui arrivent à introduire pour gagner des marchés. Macron le fait avec les entreprises françaises en Afrique. Et nos dirigeants alors ? Ils tuent les entreprises et les entrepreneurs nationaux (non affiliés à eux) et ils les mettent à la merci de la concurrence déloyale des firmes étrangères et on leur demande d’être compétitifs.
Revenons à la Chine. La Belt and Road Initiative est très ambitieuse certes, mais elle ne peut justifier une confiscation du processus démocratique. En même temps au-delà de cela il y a une réflexion à faire sur la manière de concilier les exigences de développement sur le long terme et le "cycle démocratique". Ce dernier n’a pas pour finalité de changer le leadership ou le faire alterner pour cliquer sur la case "élections organisées : Oui) mais bien de développer de manière durable et inclusive le pays. Il faut "requalifier" l’essence de la démocratie plutôt que sa forme. Quelqu’un disait qu’il faut désacraliser les élections en Afrique. Paul Collier en parle largement dans un de ses livres : "Wars, guns, and votes : Democracy in Dangerous Places". C’est un amplificateur de risques de violence dans beaucoup de pays. Mais une des pistes qui ressort de toutes ces études c’est qu’il faut se battre pour consolider les contre-pouvoirs. L’érosion des contre-pouvoirs est la mère de toutes les dérives. Et paradoxalement tout le monde se bat pour le pouvoir et très peu pour ériger et préserver les contre-pouvoirs.
Qui se bat au Sénégal pour rendre la représentation parlementaire plus exigeante et moins lucrative ? Moins de députés et moins d’avantages ? Si les députés devaient recevoir juste des indemnités de session on verra moins de bataille. Pour rester en chômage payé pendant une législature. Si on leur assigne une prime de performance, nombre d’initiatives parlementaires seraient abouties, par exemple. Ils dormiraient moins à l’Assemblée. Idem pour la séparation des pouvoirs, la limitation du nombre de partis, la régulation des médias de propagande publique, la démocratisation du droit de vote. Préserver la fonction publique des injonctions et du chantage politiques. Soumettre à la compétition tous les postes de direction et de chef d’agences. Réduire les mécanismes de distribution de carottes politiques que l’État utilise à des fins partisanes. Voilà ce qui pourrait constituer les bases d’un programme politique alternatif.
Les acteurs de tous bords sont obnubilés par les ’formes" de la démocratie. Alors qu’il faut vider la démocratie de ses formes ! Pour bâtir une "substance". Autrement cela devient un leurre avec ce cycle infernal. Surenchère pré-électorale, transhumance préventive -élections chaotiques-désillusions et déceptions post électorales- transhumance post traumatique - recomposition politique - contestation - surenchère à nouveau. Cette bande est usée. Elle se défile sous nos yeux depuis trop longtemps. La seule variante ce sont les formes de répression et la violence qui font des intrusions dans ce cycle.
LE FESTIVAL XEEMAN JOONG FA FAAJUL A NOUVEAU RELANCE A JOAL FADIOUTH
La commune de Joal-Fadiouth a relancé vendredi les activités du festival "Xeeman jööng fa Faajul", après une pause de deux ans liée à la pandémie à Corona virus
Joal-Fadiouth, 30 déc (APS) - La commune de Joal-Fadiouth a relancé vendredi les activités du festival "Xeeman jööng fa Faajul", après une pause de deux ans liée à la pandémie à Corona virus, a constaté l'APS.
Ce festival qui en est à sa 3ème édition ‘’essaie de mettre en évidence toutes les valeurs du terroir sérère", a déclaré Babacar Diouf, président du comité d'organisation.
‘’A chaque fois que le festival est organisé, nous essayons, pendant deux ou trois jours, de voir les différentes branches de la culture sérère pour les mettre en évidence", a expliqué M. Diouf.
Ce festival, ajoute t-il, est organisé pour ‘’redorer le blason'' de Joal-Fadiouth dont le nom a été porté hors des frontières par le président Senghor.
Après un satisfecit noté dans plusieurs secteurs d'activités, "on a décidé d'organiser de nouveau ce festival pour porter Joal à la dimension où Senghor l'avait emmené", a indiqué le premier adjoint au maire de Joal-fadiouh, Omar Ba.
L'évènement a été marqué par un panel axé sur le thème : "Fadiouth, ile memoire, creuset et carrefour de peuples et de cultures", animé par l'enseignant à la retraite, Maurice Ngom.
Ce thème retrace l'origine des habitants de l'île de Fadiouth qui ont aidé la figure Mansa Waly dans sa longue traversée.
"Le peuplement de Fadiouth est né essentiellement de la migration des guéléwars dirigée par Mansa Waly qui a fait cette longue traversée jusqu'à Sakmath-Mbissel", a expliqué le panéliste.
Pour remercier ces ‘’grands artistes'', Mansa Waly leur a trouvé un endroit paisible, a t-il dit.
Selon l'adjoint du maire, il fallait revisiter "cette épopée et l'immigration de ceux qui sont venus du Gabou en traversant la Guinée Bissau, la Gambie avant l'arrivée à Mbissel".
Cette thématique réfléchit sur la manière de reconstituer les valeurs et la culture de Fadiouth, a t-il indiqué.
C'est dans ce sens que la commune envisage la construction d'un musée de la culture sérère, a annoncé l'autorité municipale.
En 2018, les panelistes avaient planché sur "la musique traditionnelle sérère de la petite côte".
La deuxième édition avait pour thème :"Joal-Fadiouth ville verte, sportive, créative et numérique".
CES MOMENTS MARQUANTS DE L'ANNEE CULTURELLE 2022
L’année 2022 a été marquée par des évènements culturels phares dont la 14ème Biennale de l’art africain contemporain de Dakar dénommé ‘’Dak’art’’, l'ouverture de salles de cinéma dans la capitale, la disparition de grandes figures de la scène culturelle.
Dakar, 30 déc (APS) – L’année 2022 a été marquée par des évènements culturels phares dont la 14ème Biennale de l’art africain contemporain de Dakar dénommé ‘’Dak’art’’, l'ouverture de salles de cinéma dans la capitale, la disparition de grandes figures de la scène culturelle.
Le Dak’art, la plus importante manifestation du genre sur le continent, reportée en 2020 à cause de la pandémie liée au Covid-19, a démarré le 19 mai au Grand théâtre national Doudou Ndiaye Coumba Rose en présence du chef de l’Etat Macky Sall qui avait mis l'accent sur la formation des artistes.
‘’La formation devient impérative pour accompagner et stimuler l’essor de l’art contemporain africain (…). Le talent seul ne suffit pas, il faut créer un environnement stimulant qui intègre méthodiquement la formation pour soutenir la montée en puissance de l’art contemporain africain’’, avait-il dit en réitérant son vœu de construire une Ecole nationale des arts et métiers de la culture (ENAMC) dans la nouvelle ville de Diamniadio.
Cette 14e Dak’art dont le thème était ‘’Ĩ Ndaffa#’’ (ou Forger/Out of the fire) avait accueilli pour l’exposition ‘’IN’’ 59 artistes visuels, venus de 28 pays, dont 16 Africains et près de 430 sites d’expositions "OFF". Elle avait aussi connu ’’une forte affluence’’ avec 440 mille visiteurs, soit le double de l’édition de 2018, plus de 80 sponsors, selon les organisateurs.
D’autres régions du Sénégal, notamment la Petite côte, Saint-Louis, Tambacounda, Kédougou et les centres régionaux ont organisé un réseau biennal. Pour la première fois des expositions avaient été organisées dans la diaspora en Italie, en France, en Hollande, en Martinique, à Mayotte, en C ôte d’Ivoire et au Togo.
L’Etat du Sénégal, bailleur de l’évènement, y avait contribué à hauteur de 75 % du budget soit 1,5 milliards de francs Cfa.
Le président du comité d’orientation, Me Moustapha Ndiaye avait exhorté l’Etat à ‘’ne pas se désengager’’ du Dak’art qui avait généré en 2018 plus de 8 milliards de Francs CFA en transactions d’œuvres d’art.
Retour de Pablo Picasso à Dakar 50 ans après
L’année 2022 a été aussi marquée le 1er avril par le retour de ‘’Picasso à Dakar’’ cinquante ans après l’exposition organisée en 1972 au musée dynamique devenu aujourd’hui le siège de la Cour Suprême.
Le Musée des civilisations noires a accueilli pendant un mois les œuvres du grand peintre espagnol Pablo Picasso, une initiative du musée Picasso-Paris et du Quai-Branly ainsi que des musée des civilisations noires et Théodore-Monod.
Dix salles de cinéma ouvertes à Dakar
L’année 2022 a vu l’ouverture de dix salles de cinéma à Dakar. Sept ont démarré le 6 octobre dans le nouveau multiplexe ‘’Cinéma Pathé Dakar’’ appartenant au groupe français ‘’Pathé’’ situé dans le quartier de Mermoz.
Le groupe Teyliom, dirigé par l’opérateur économique sénégalais Yérim Sow, a aussi ouvert ‘’Seanema’’ un multiplexe de trois salles dans l’enceinte du centre commercial du Sea Plaza sur la corniche ouest de Dakar.
A ces dix salles viennent s’ajouter quatre autres déjà existantes, notamment la salle de ‘’Canal Olympia téranga’’ du groupe français ‘’Vivendi’’ inaugurée en 2017 et le complexe Sembène Ousmane du Majic Land ouvert un an après.
Elles marquent le retour des salles de cinéma dans le paysage cinématographique sénégalais, après l’alimentation du Fonds de promotion de l’industrie cinématographique et audiovisuel (FOPICA) par le chef de l’Etat en 2014 à hauteur de 1 puis aujourd’hui 2 milliards de FCFA.
Toujours dans le domaine du cinéma, le Sénégal a renouvelé avec la France les accords de co-production cinématographique le 30 mai au siège du ministère français de la Culture deux jours après la 75ème édition du festival de Cannes.
Lors de cette édition, le film ‘’Tirailleurs’’ produit par le Français d’origine sénégalaise Oumar Sy et financé en partie par le Sénégal a été projeté en ouverture dans la section ‘’Un certain regard’’.
Le ministre de la Culture et de la Communication d'alors Abdoulaye Diop avait paraphé avec son homologue française, Rima Abdul Malak le texte liant les deux pays après de longues négociations sur les barèmes passés de 90 % pour la partie française à 10 % du budget pour celle sénégalaise.
Ces accords de coproduction entre le Sénégal et la France dataient de 1992 avant leur renouvellement en 2022. Pour Abdoulaye Diop ‘’cela constitue un nouveau départ dans la redynamisation de la coopération cinématographique entre les deux pays’’, car désormais ‘’les langues nationales sénégalaises sont assimilées au français et donc les projets sont éligibles aux différents guichets de financement''.
Le 7e art a été distingué avec le Tanit de bronze remporté par le film ‘’Astel’’ de Rama Toulay Sy à la 33ème édition des Journées cinématographiques de Carthage en novembre. Le prix de l’interprétation féminine a été remporté par Guissaly Barry héroïne du film ‘’Xalé’’ de Moussa Sène Absa choisi pour représenter le Sénégal aux OSCARS.
La musique a été aussi marquée avec le prix d'Excellence de la CEDEAO remis au chanteur Oumar Pène qui célèbre ses 50 ans de carrière et la reprise du grand bal de Bercy à Paris du lead vocal de Youssou Ndour.
L’arrivée du nouveau ministre Aliou Sow
L'année 2022 a connu un changement à la tête du ministère de la Culture avec l’arrivée le samedi 17 septembre du professeur Aliou Sow nommé ministre de la Culture et Patrimoine Historique dans le gouvernement du Premier Ministre Amadou Ba en remplacement de Abdoulaye Diop.
La Culture, séparée de la Communication, devient un département plein.
Une année endeuillée
L’année 2022 a été endeuillé par la disparition de nombreux artistes dans plusieurs disciplines. On peut citer les comédiens Bass Diakhaté et Charles Foster, le musicien Pape Fall et l’artiste visuel Issa Khone Diop, le dramaturge sénégalais d'origine haitienne Gérard Chenet, le photographe et cinéaste Abdou Fary Faye.
Elle a aussi été marquée par la disparition en mars du journaliste culturel, El Hadji Ndatté Diop président de l’Association de la presse culturelle sénégalaise.
LE SENEGAL ENREGISTRE UN PIB DE 6,5%
Le taux de croissance du produit intérieur brut du Sénégal est ressorti en hausse de 6, 5 % en 2021, dans sillage de la reprise de l’activité économique qui avait été ralentie l’année précédente par les répercussions de la pandémie de Covid-19
‘’L’économie sénégalaise a enregistré un taux croissance de 6,5% en 2021 contre 1,3% en 2020. Cette situation est consécutive à la reprise de l’activité économique après les répercussions de la pandémie à coronavirus (coivd-19) sur l’économie sénégalaise en 2020’’, a souligné la structure dans un rapport rendu public le même jour.
Le document consacré aux comptes nationaux semi-définitifs de 2021 et définitifs de 2020 fait dans le même temps état d’une hausse du niveau général des prix en 2021
L’étude montre une progression, en volume, de 4, 8 % des dépenses de consommation, en 2021, après avoir été de l’ordre de 2, 1 % en 2020.
‘’Cette hausse est en relation avec l’évolution des dépenses de consommation publique qui ont enregistré une hausse de 13 % en 2021, après 1, 6% en 2020 et de la consommation des ménages qui s’est accrue de 3 % en 2021, après 2,2% en 2020’’, souligne le rapport consulté par l’APS.
Par ailleurs, la Formation brute de capital fixe (FBCF) s’est rehaussée, en volume, de 16,5% en 2021 contre 7,2% en 2020, sous l’effet du fort dynamisme de sa composante privée (19,7% en 2021 contre 5,4% en 2020), mentionne le rapport.
Il fait savoir que les exportations des biens et services s’étaient bonifiées de 22,6% en 2021, après un repli de 13,2% en 2020, tandis qu’en parallèle, les importations de biens et services s’étaient accrues de 15,5% en 2021, après une augmentation de 6,8% l’année précédente.
Pour sa part, le taux d’épargne nationale s’est amélioré de 1,8 point pour s’établir à 26,5% du PIB en 2021 contre 24,7% en 2020, assure l’ANSD.
L’ŒUVRE DE SAFI FAYE ET KHADY SYLLA, PAR rama salla dieng
MULTIPLE PHOTOS
FAD’JAL DE SAFI FAYE, UNE ETHNOGRAPHIE DU VIVRE EN COMMUN EN TERRE SEREER
EXCLUSIF SENEPLUS - Le film est un dialogue intergénérationnel en plusieurs parties, abordant des questions centrales comme l’histoire de Fad’jal, le rôle du travail dans la définition d’une identité personnelle et collective, la naissance et la mort...
Série de revues sur l’oeuvre des réalisatrices Safi Faye et Khady Sylla
Co-éditrices de la série : Tabara Korka Ndiaye et Rama Salla Dieng
Khady Sylla et Safi Faye, des noms qui devraient résonner dans notre imaginaire collectif tant elles ont été pionnières, dans leur art et dans leur vie parce que pour elles, l’art, c’est la vie. Leur vie et leur œuvre nous ont particulièrement ému. Pourtant, elles semblent porter en elles, la marque de celles vouées à être des égéries en avance sur leur temps ! Le tribut en est lourd. Si lourd! Et si dramatique. On demeure sur sa faim. Sur la promesse d’un potentiel. On reste sur le regret de ce qu’elles auraient pu être, auraient dû être, si célébrées comme le monstrueusement gigantesque Sembène. On reste sur les si…sur la fleur de toute l’œuvre dont elles étaient fécondes.
Safi Faye a en tout réalisé treize films : La Passante (1972), Revanche (1973), Kaddu Beykat (Lettre paysanne) (1975), Fad’jal Goob na nu (La Récolte est finie) (1979), Man Sa Yay (1980), Les Âmes au soleil (1981), Selbé et tant d’autres (1982), 3 ans 5 mois (1983), Ambassades Nourricières (1984), Racines noires (1985), Tesito (1989), Tournage Mossane (1990) et Mossane (1996).
Elle s’est surtout intéressée au monde rural, à l’émancipation de la femme comme à l’indépendance économique et au poids des traditions, le tout en pays Sereer.
Khady Sylla pour sa part, a été une férue de l’auto-exploration, pour théoriser depuis l’expérience propre. D’abord celle des marginalisés de la société avec Les bijoux (1998), Colobane Express (1999) qui capturent l’expérience du transport urbain avec un chauffeur de car rapide et son apprenti, puis la sienne avec Une fenêtre ouverte (2005) dans lequel elle parle de la santé mentale et enfin Le monologue de la muette (2008) qui parle des conditions de travail des ‘bonnes’. Auparavant, en 1992, Khady Sylla a publié chez L’Harmattan un superbe roman : le jeu de la mer. Les mots, Khady les jongle comme elle s’y accroche car ils la maintiennent en vie. Ainsi qu’elle le reconnaît dans Une fenêtre ouverte : ‘on peut guérir en marchant’.
Dans cette série, nous vous proposons nos regards croisés sur l’oeuvre de Safi Faye et de Khady Sylla, ceux d’une curatrice, créative et chercheuse Tabara Korka Ndiaye dont le projet s’intitule ‘Sulli Ndaanaan’ et celle d’une auteure, créative et universitaire, Rama Salla Dieng, passionnée de documenter la vie et l’oeuvre des oublié.e.s, marginalisée.e.s et silencié.e.s, toutes les deux férues de film, de musique et de littérature.
Fad’jal de Safi Faye, une ethnographie du vivre en commun en terre Sereer
Autrice : Rama Salla Dieng
Une cloche résonne alors que la bâtisse de l’église se dessine sous des chants chrétiens qui recouvrent les voix des écoliers dans une classe fermée.
Ces enfants récitent inlassablement la leçon du jour :
‘Louis 14 est le plus grand roi de France
On l’appelait Roi-soleil
Sous son règne fleurirent les lettres et les arts’
À leur sortie de l’école française, les jeunes écoliers, dans un contraste saisissant d’avec la retenue de leur tenue en classe, sont libres de redevenir eux-mêmes : des enfants, mais plus important encore, des enfants Sereer.
Les écoliers se dépêchent d’aller rejoindre les anciens sur la place du village sous deux arbres symboliques : le baobab et le kapok. Ils interrogent leur grand-père sur l’histoire (cosaan) de Fad’jal. C’est ainsi que commence Fad’jal, long métrage de 108 minutes réalisé par Safi Faye et paru en cinéma en 1979. Comme une célébration du syncrétisme culturel et cultuel, à moins d’être une critique du colonialisme, le reste du film s’évertue à déconstruire la leçon d’histoire qui se racontait en classe sous le regard bienveillant du maître d’école. Tout au long du film, l’église et la salle de classe seront les seuls espaces fermés, contrastant d’avec l’ouverture des autres lieux de vie et de communion à ciel ouvert (concessions et dans la nature). Le film chronique le quotidien des habitants du village en combinant savamment des séquences documentaires avec du matériel de fiction, symbole d’une technique ethnographique distinctive et alors nouvelle qui exerce encore une certaine influence.
Le titre français de ce film ‘Grand-père raconte’ nous renseigne alors mieux sur le sens de la citation d’Amadou Hampâté Bâ écrit en gros caractères au début du film : ‘En Afrique un vieillard qui meurt est une bibliothèque qui brûle’ qui fait écho au proverbe Wolof: ‘mag mat na bayi cim reew. De la citation de Amadou Hampâté Bâ, le philosophe Souleymane Bachir Diagne dira qu’il y a quelque chose de paradoxal dans l’affirmation qu’il faut vite transcrire et archiver l’oralité avant qu’elle ne meurt avec les vieillards. Pour lui, ‘on admet qu'elle est de toute façon déjà morte comme oralité et que la transcription se fait dans la tristesse des adieux et de la lecture des testaments : post mortem’. Le défunt Amady Aly Dieng est moins philosophe lorsqu’il rétorque à Amadou Hampâté Bâ : ‘Il faut voir de quelle catégorie de vieillards. Est-ce le bon vieillard ou le mauvais vieillard ?’ (L'entretien, 2Stv).
Quoiqu’il en soit de ce débat, la mise en scène reflète bien la volonté de Safi Faye de retracer et raconter l’histoire de son village natal Fad’jal tout en honorant la tradition orale et la parole des ancien.ne.s. Le film est en fait un dialogue intergénérationnel en plusieurs parties, sous l’arbre à palabres, abordant des questions centrales comme l’histoire de Fad’jal, le rôle du travail dans la définition d’une identité personnelle et collective, la naissance et la mort, les rites, l’héritage, de même que la transmission selon que l’on suit la lignée maternelle ou paternelle. En terre Sereer, les lignages matrilinéaires prédominent malgré l'évolution du système de parenté : ‘C'est un bâton maternel qui a tracé le Sine’ ainsi que l’explique le Professeur Pathé Diagne.
L’on apprend que le village de Fad’jal a été fondé par une femme : Mbang Fad’jal. Par la voix du griot, l’on découvre que sa petite fille Moussou s’était mariée à Kessine Jogoye, un chasseur d’éléphants. À L’origine, le village était formé d’une constellation d’habitations avec sept places publiques (penc) dont Ngakaane constituait la plus grande place. Le village n’avait ni roi ni reine. Toute son économie prospère reposait alors sur la production et le troc du mil, du riz, et du bétail. La nature généreuse offrait ses ressources aux villageois.e.s : la mer pour pêcher et les forêts pour chasser.
L’histoire de Fad’jal est aussi inextricablement liée à celle du buur Sin (Roi du Sine), Latsouk Fagnam. Ce roi jaloux savait qu’il ne manquait rien à Fad’jal qui était un village autonome et cela lui déplaisait. Il prit donc la ferme décision de détruire Fad’jal sans coup de fusil. Il voyage à Fad’jal avec toute sa suite dans chacune des sept places du village pour se faire célébrer et entretenir. Ce faisant, il épuise les réserves de Fad’jal en se faisant accueillir en grandes pompes. Les habitant.e.s de Fad’jal contraint.e.s à migrer par vagues successives furent appauvri.e.s par les sécheresses et le changement climatique.
Quelques années plus tard, deux jumeaux Ngo décidèrent d’aider les villageois à retourner sur les terres de leurs ancêtres cependant ce fut une tâche ardue qui ne put se faire qu’après moults péripéties dont les jeunes se rappellent aujourd’hui avec humour.
L’on apprend aussi du grand-père que ‘Fad’jal’ veut littéralement dire ‘travail’ montrant toute l’éthique conférée à cet aspect de la vie sociale selon le proverbe Sereer :
'Qui travaille, rit et sera heureux, qui ne travaille pas, on rira de lui.’
Pour le professeur Madior Diouf, sept cadres éducatifs définissent la culture Sereer : la case, la maison, l’arbre à palabres ou place publique, le troupeau, l’enclos d’initiation, les jeux de lutte et l’association villageoise. Le colonel Mamadou Lamine Sarr y ajoute d’autres chantiers-écoles : la construction de grandes pirogues, la navigation sur l’océan avec la capacité de s’orienter de jour comme de nuit, dans son ouvrage sur L’éducation du jeune Sereer Ñominka.
Dans Fad’jal, Safi Faye choisit de s’appesantir sur trois aspects fondamentaux : un jeune Sereer doit savoir travailler, danser et lutter. Le travail est d’abord organisé autour d’une division sociale nette comme Safi Faye nous le montre dans Kaddu Beykat, paru quatre ans plus tôt. L’on montre les femmes chantant pendant qu’elles cultivent l’arachide. L’histoire racontée dans le chant est une recommandation à la femme enceinte de se faire aider d’une jeune femme jusqu’à ce que son bébé soit assez solide pour qu’elle retourne à son travail aux champs. La danse et la lutte, sport traditionnel important, occupent aussi une place de choix dans la vie sociale à Fad’jal. La lutte est un jeu d’adresse, d’habileté et d’intelligence plus qu’elle n’est un jeu de rivalité ou de force. Les rituels et invocations aux aïeux occupent aussi une place considérable dans ce sport. Sous le battement des tambours rythmé au gré des chants et des applaudissements des femmes et des jeunes filles, des personnes âgées nostalgiques de leur vigueur et de leur habileté d’antan initient les plus jeunes à la lutte à la fin des récoltes.
La question des acquisitions de terres est abordée. Le patriarche explique que jadis celles-ci se faisaient de manière consensuelle avec le Jaraaf jouant un rôle clé. Cependant, avec la loi sur le domaine national entrée en vigueur en 1964, l'État gère les terres au nom des populations. Les populations de Fad’jal semblent dubitatives : ‘Maintenant, on dit que toutes terres appartiennent à l’Etat depuis la loi sur le domaine national de 1964.’ D’aucuns témoignent : ‘Cette terre qui appartenait à ma famille depuis quatorze générations, j’en ai hérité de mon aïeul qui l’a reçu du roi en contrepartie d’un sabre en argent que ce dernier lui a offert.’ Les terres de Fad’jal sont alors menacées par un nouveau projet de développement touristique qui verrait les populations recevoir 6000 francs de compensation contre la construction d’une case. Cette situation crée une tension intergénérationnelle avec d’un côté les vieux qui refusent de céder et de l’autre, les jeunes qui leur répondent : ‘allez-vous-en ! Votre temps est révolu !’
Un vieux leur intime de se taire et répond cyniquement : ‘Si l’État dit que la terre lui appartient et que nous aussi nous disons la même chose, notre terre, personne ne le volera, personne ne s’en appropriera tant que nous l’occuperons ! Ce clin d'œil fait sûrement référence au concept flou ‘mise en valeur’ de la terre pour éviter d’en être expulsé sans que pour autant les contours du concept ne soient juridiquement clarifiés par le législateur.
Lapidaire et ironique alors que l’interjection d’un villageois : ‘Mais que faisait cette loi quand nos aïeuls cherchaient à sécuriser leurs terres ? Cette loi n’a-t-elle pas de proches de qui hériter ?’
Dès le lendemain, un après-midi d’octobre 1977, des lotisseurs viennent mais font face à la résistance paysanne.
Ethnologue de formation, Safi Faye s’applique à documenter tous les aspects de la vie sociale de Fad’jal y compris et surtout des histoires de vie personnelles. Ce qui se passe à l’intérieur des cases, autre espace d’éducation et de vie, est montré : des scènes de vie ordinaires, la naissance, le décès. Ainsi donc, la caméra de Safi Faye lève le voile sur un autre aspect peu souvent montré dans les films africains : l’accouchement.
Dans une case donc, une femme : Coumba, se fait aider de deux matrones. L’attente de cette naissance imminente est longue et douloureuse pour celle qui va donner la vie et qui reste d’un calme étonnant. Coumba va et vient, s’accroche au toit de la case. Le silence troublé par ses gémissements lors des contractions et ses lamentations. Elle est maintenant assise, ses deux aides ajustant le pagne qui enserre savamment son ventre pour aider la descente du bébé.
D’un coup, la délivrance, lorsque le moment venu les deux matrones tirent sur les jambes du bébé qui hurle. Elles la font s’asseoir sur ce qui ressemble à du mil pour l’aider à faire descendre le reste de sang et lui remettent son bébé dans le bras.
Cette délivrance heureuse sonne le coup d’envoi des préparatifs pour la fête ! Une chèvre est égorgée pour l’occasion, les griottes chantent Coumba, la nouvelle maman tandis que les griots congratulent Ndick le nouveau père en louant sa lignée. Rien n’est occulté des rituels qui suivent la naissance : du premier port du bébé à sa première sortie et au plantage d’arbuste en l’honneur du bébé.
Fad’jal montre aussi les rituels d’enterrement et de deuil. Parallèlement, c’est aussi dans une case qu’une veuve en noir se retire après la perte de son époux, le vieux Waly. Tout comme la nouvelle maman, elle n’est jamais seule, mais est accompagnée d’autres femmes. Même dans le silence du deuil, les femmes sont en communauté.
Sous un baobab, un homme d’âge mûr rend hommage à son ami décédé. Détenteur du bâton symbolique du pouvoir dans la culture Sereer, il fait aussi un témoignage sur la qualité du travail de ce dernier, son amour pour les champs, pour les animaux et enfin pour sa famille tout en martelant le sol du bâton pour appuyer son propos. Enfin, il prononce des prières à l’endroit du défunt alors qu’au loin les cris des pleureuses se font entendre. Les chants résonnent :
‘Un bout de bois ne souffre pas, souffrir reste propre à l’homme’
Une pause puis ils reprennent de plus belle :
‘Chef de famille, tu es mort, à qui as-tu confié tes enfants ?
Chef de famille, oh toi qui as quitté les tiens, à qui as-tu confié tes orphelins ?’
L’on sacrifie un bœuf devant les proches qui témoignent sous les regards perdus et attristés des autres proches. Une autre ‘vache de dette’ est remise à la famille du défunt Waly en reconnaissance du geste que ce dernier avait fait pour cette famille. Le partage de la viande et du mil se fait sous le regard et les délibérations de tous et de toutes. Mais à Fad’jal, comme dans d’autres cultures ouest-africaines (comme au Ghana), la mort n’est pas un épisode triste, mais une occasion de célébrer la personne défunte. L’on danse, rit, boit de l’alcool en psalmodiant des prières et en partageant des souvenirs de la personne disparue. Les femmes de la classe d’âge du défunt Waly surtout, chantent et dansent en son honneur : ‘la saveur du mil que tu cultivais nous manquera.’
Dans les dernières scènes, des enfants sont les porteurs des paroles de sagesse Sereer, symbole d’une écoute attentive de leur grand-père et d’une transmission fructueuse et réussie.
La scène finale montre le détenteur du bâton invoquant la pluie pour une bonne récolte auprès des Pangool sous le kapok, symbole du syncrétisme spirituel dans le Sine-Saloum et mieux encore, au Sénégal.
Une trentaine d’années plus tard, comme en écho à Safi Faye, une autre écrivaine, d’origine Sereer et citoyenne du monde dira : ‘Je viens d 'une civilisation où les hommes se transmettent leur histoire familiale, leurs traditions, leur culture, simplement en se les racontant, de génération en génération’ (Kétala, 2006). Elle s’appelle Fatou Diome.
MANIFESTATION À DAKAR CONTRE LES IRRÉGULARITÉS DE GESTION DES FONDS ANTI-COVID
Sous les cris de "Aux voleurs !" et "Vous n'allez pas digérer nos milliards!", la foule s'est rassemblée place de la Nation à l'appel d'une douzaine d'organisations de la société civile
Des centaines de Sénégalais ont manifesté vendredi à Dakar pour réclamer des poursuites judiciaires après les nombreuses irrégularités relevées dans un rapport de la Cour des comptes sur la gestion des fonds anti-Covid, a constaté un journaliste de l'AFP.
Sous les cris de "Aux voleurs !" et "Vous n'allez pas digérer nos milliards!", la foule s'est rassemblée place de la Nation à Dakar à l'appel d'une douzaine d'organisations de la société civile. Un important dispositif policier était déployé autour de la place pour encadrer ce rassemblement autorisé par le préfet, et soutenu par l'opposition, qui n'a eu de cesse ces derniers jours de dénoncer "le vol" des autorités.
Mi-décembre, un audit de la Cour des comptes du Sénégal sur le "Fonds de riposte contre les effets du Covid-19" d'un montant de plus de 740 milliards de FCFA (plus de 1,1 milliard d'euros), financé par des bailleurs et l'Etat en 2020 et 2021, a pointé des "manquements", des "surfacturations" ou encore des "absences de justificatifs" des dépenses. La société civile exige la démission de toutes les personnes mises en cause et le remboursement des détournements présumés. Le gouvernement s'est défendu en soulignant que les manquements relatés portent sur moins d'un pour cent du montant total du fonds et a promis de suivre les recommandations de la Cour des comptes.
"Que justice soit faite. Qu'ils soient camarades de parti ou beaux-frères du président, tous ceux qui ont détourné les fonds doivent être jugés au plus vite", a clamé à la tribune Alioune Tine, fondateur d'Afrikajom center et figure de la société civile. "Je suis là pour dénoncer l'impunité et l'impartialité de la justice. Je suis outré de voir que nos dirigeants ont détourné nos milliards alors qu'on était entre la vie et la mort", s'est insurgé Papis Diatta, un manifestant de 35 ans. Le slogan "Non au 3e mandat" figuraient sur plusieurs pancartes, en raison du doute qui persiste sur la décision du président Macky Sall, élu en 2012 pour sept ans et réélu en 2019 pour cinq ans, de se représenter à la présidentielle de 2024. Les manifestants ont également scandé le nom et appelé à la libération de Pape Alé Niang, un journaliste détenu plus d'un mois pour "divulgation d'informations de nature à nuire à la Défense nationale", libéré, puis renvoyé en détention le 20 décembre.
LE PRÉSIDENT ALGÉRIEN ÉGRATIGNE LE POUVOIR DE BAMAKO
L'argent investi par la junte au Mali pour s'offrir les services des mercenaires du groupe russe Wagner serait "plus utile" s'il était investi dans des projets économiques, a estimé Abdelmajid Tebboune
"L'argent que coûte cette présence serait mieux placé et plus utile s'il allait dans le développement au Sahel", a-t-il déclaré dans un entretien avec le quotidien Le Figaro, dans son édition de vendredi.
Le Mali a été le théâtre de deux coups d'Etat militaires en août 2020 et en mai 2021. Quoiqu'elle ne l'ait jamais admis, la junte a fait appel à Wagner tout en poussant au départ la force militaire française Barkhane, après neuf de lutte antijihadiste. "Le terrorisme n'est pas ce qui me préoccupe le plus, nous pouvons le vaincre. Je suis beaucoup plus inquiet pour le fait que le Sahel s'enfonce dans la misère. Là bas, la solution est à 80% économique et à 20% sécuritaire".
Les tensions politiques au Mali vont de pair avec une grave crise sécuritaire en cours depuis le déclenchement, en 2012, d'insurrections indépendantiste et jihadiste dans le nord du pays. La quasi-totalité des groupes armés maliens signataires de l'accord de paix dit d'Alger en 2015, dont l'ex-rébellion touareg, la Coordination des Mouvements de l'Azawad (CMA), ont suspendu la semaine dernière leur participation, arguant de "l'absence persistante de volonté politique" de la junte de Bamako de le maintenir. L'ex-rébellion avait cessé ses combats avec cet accord de paix. Les jihadistes continuent, eux, de combattre l'armée malienne et leurs violences se sont propagées au centre du Mali, ainsi qu'au Burkina Faso et au Niger voisins. Les combattants liés au groupe Etat islamique et à Al-Qaïda poursuivent même leur progression vers le Golfe de Guinée.
"Le règlement de la situation sur place passe évidemment par l'Algérie. Si on nous avait aidés dans l'application de l'accord d'Alger, en 2015, pour la pacification de cette zone, on n'en serait pas là", a martelé le président Tebboune, reprenant une constante de la diplomatie algérienne. "Pour ramener la paix, il faut intégrer les gens du nord du mali dans les institutions" maliennes.
par Momar Dieng
CES LARCINS À GRANDE ÉCHELLE QUI N'ÉMEUVENT PLUS LE GOUVERNEMNT
Minimiser le saccage démentiel de fonds publics anti-Covid dont une bonne partie a profité à des intérêts privés de manière scandaleuse est une faute politique qui hantera durablement le gouvernement
La communication lancée par le Gouvernement pour tourner en dérision la gravité des constats faits par la Cour des comptes sur l’ampleur et la gravité de la prédation des ressources opérée par des autorités d’Etat sur les fonds de la Force Covid-19 a ses limites. Deux « soldats » ont été envoyés au front pour soliloquer : le ministre des Finances et du Budget (MFB) Mamadou Moustapha Bâ et son collègue du Commerce Abdou Karim Fofana, porte-parole du Gouvernement. A tout hasard, rappeler que tous deux ont été épinglés sur le sujet par la Cour des comptes dans leurs fonctions antérieures.
Le discours technocratique du MFB a globalement consisté à se satisfaire que les malversations dénichées n’aient concerné que « 0,7% seulement » des fonds mobilisés pour la riposte anti-Covid. « Seulement » moins de 7 milliards de nos pauvres FCFA ont été joyeusement dilapidés entre les poches de hauts fonctionnaires couverts par des ministres, et d’un cartel d’hommes/femmes d’affaires qui avaient déjà une fine connaissance des coins, recoins, couloirs et bureaux des ministères pour savoir à quelles portes frapper pour capturer des marchés.
Mais toutes choses étant égales par ailleurs – heureusement d’ailleurs ! - cette posture politique des deux ministres renseigne à 100% sur les liens que nos autorités entretiennent avec les deniers publics.
Porteur de la « riposte » gouvernementale au Rapport définitif de la Cour des comptes et quasiment célébré dans une bonne partie de la presse, le technocrate MFB, flanqué du porte-parole du Gouvernement, s’est extirpé du scandale du carnage des fonds Covid-19 pour se payer à moindre frais un long monologue sur les bienfaits du Programme de résilience économique et sociale (PRES) lancé par l’Etat pour amoindrir les effets de la pandémie à coronavirus. Au passage, il a quand même pris l’engagement que des suites seront données à l’affaire.
Le ministre porteur de la riposte épinglé par la Cour des comptes
Or, le PRES en tant que tel n’était pas l’objet de la mission de la Cour des comptes. « L’audit a pour objectif général de vérifier si les ressources mobilisées dans le cadre de la riposte contre la Covid-19 ont été utilisées conformément à la réglementation en vigueur et aux principes de bonne gestion », lit-on à la page 10 du Rapport. Et les objectifs spécifiques cités par la suite confirment cette direction des enquêtes.
Alors qu’il était Directeur général du Budget, Mamadou Moustapha Bâ avait été interpellé sur l’existence d’un écart de 8,182 milliards FCFA entre les transferts annoncés par le MFB au profit du ministère de la Santé et le montant qui figure dans le relevé du compte de dépôt du ministère des Finances. Sa réponse n’a pas convaincu la Cour des comptes qui a maintenu son audit sur ce point précis. Ceci n’est-il pas un camouflet qui poursuit le DG du Budget devenu ministre des Finances et du Budget en septembre dernier ?
A côté de l’ex DG du Budget ainsi épinglé par l’audit, la Cour des comptes signale aussi que « le ministère de la Santé et de l’Action sociale n’a pas répondu aux observations et projets de recommandation contenus dans le chapitre portant sur le pilotage stratégique de la pandémie. » Cette double défiance à l’endroit d’un organe de contrôle d’Etat n’explique-t-elle pas en partie cette opiniâtre entreprise de carnage des ressources financières publiques ?
« 0,7% seulement…»
« Seulement » 239 millions 733 mille FCFA ont été engloutis par le ministère de l’Urbanisme, de l’Habitat et de l’Hygiène publique pour « production de bacs à fleurs et travaux d’aménagement et de sécurisation ». Une folie qui n’a rien à voir avec la lutte contre la Covid-19, note la Cour des comptes. Des broutilles, peste le ministre des Finances et du Budget, qui avait à ses côtés son collègue alors à la tête de ce ministère, Abdou Karim Fofana !
« Seulement » 24 millions 588 mille FCFA ont été piqués des fonds Covid-19 attribués au ministère de la Fonction publique et dépensés sans liens avec la pandémie au titre de « la ligne matériels et produits d’entretien ». Encore des broutilles chez la plus inamovible des ministres depuis 2012, Mariama Sarr !
« Seulement » 141 millions 980 mille FCFA ont servi à organiser des « séminaires de formation et de renforcement des capacités et frais et de réception et de tenue de CRD » au ministère du Commerce et des Petites et Moyennes Entreprises sous Aminata Assome Diatta. Evidemment, tout était lié à la Covid-19 !
« Seulement » 49 millions 587 mille FCFA ont été vendangés par le ministère de la Microfinance dirigé par Zahra Iyane Thiam entre « perdiems et autres frais de communication, location, entretien et réparation de véhicules, location d’avions, frais d’hébergement…»
« Seulement » 800 millions 461 mille FCFA. Le ministère des Mines et de la Géologie du Docteur en informatique Oumar Sarr a trouvé ici l’aubaine de se servir des fonds Covid-19 en s’équipant de logiciels et de matériels techniques divers !
« Seulement » 140 millions FCFA comme « écart entre les montants reversés par la FSB (Fédération sénégalaise de basket-ball) et le total des décharges produites par le DAGE » Mamadou Niang Ngom sous le regard de son patron, l’ex ministre des Sports Matar Bâ. Encore que ledit DAGE a humblement fait son mea culpa quand il est épinglé pour le paiement en espèces de 190 millions FCFA comme subventions à des « associations légalement constituées » : « (…) Nous sollicitons votre tolérance administrative par rapport à la violation des dispositions de l’article 104 du RGCP…»
Au total, c’est « seulement » 20 milliards FCFA environ qui ont été dépensés sans lien avec la Covid-19, dans des conditions générales de non transparence « révélateur d’une absence de rationalisation des dépenses », relève la Cour des comptes.
« Cette situation découle des insuffisances notées dans le pilotage stratégique de la lutte contre la pandémie, particulièrement de l’inexistence d’un cadre de dialogue de gestion efficace entre le MFB et les ministères dépensiers qui ne se sont pas dotés de plans de résilience sectoriels pertinents pour une gestion efficiente des ressources dédiées à la riposte. »
Un régime dérogatoire au Code des marchés publics a été institué par le décret n°2020-781 du 18 mars 2020 afin d’accélérer la passation et l’exécution des marchés. Cette décision présidentielle a-t-elle ouvert la boîte de pandores en libérant les malversations et les cupidités de toutes sortes ?
Les enquêteurs de la Cour des comptes ne sont pas des illuminés. Ils jugent « compréhensible » l’institution de ce régime dérogatoire pour une « exécution diligente des dépenses » et une réduction des « délais d’acquisition des biens et services. » Néanmoins, cette dérogation devient vite « problématique » en l’absence d’un encadrement strict des procédures et de la bonne foi des acteurs. Deux cas concrets, entre autres, concernent le ministère de la Santé et de l’Action sociale.
En privilégiant ses propres fournisseurs au détriment de la Pharmacie nationale d’approvisionnement (PNA) « pour les mêmes types d’équipement et la même quantité », ce ministère alors dirigé par Abdoulaye Diouf Sarr a infligé à l’Etat un manque à gagner estimé à 983 millions 450 mille FCFA, note la Cour des comptes.
Pour la construction d’un CTE (Centre de traitement épidémiologique) anti-Covid-19 à l’hôpital Dalal Jamm de Guédiawaye, le marché est attribué à l’entreprise SONABI pour un montant de 1 milliard 614 millions 616 mille FCFA. Mais alors qu’aucun contrat n’est encore signé, le ministère de la Santé verse quand même à l’entreprise une avance de démarrage de 726 millions 577 mille 200 FCFA (45% du montant) en deux tranches : 315 millions 682 FCFA payée le 27 mars 2020, puis 410 millions 894 payée le 30 juin 2020.
Le contrat sera signé a posteriori en date du 13 juillet 2020 « soit quatre mois après le versement de la première tranche de l’avance de démarrage. »
Entre amis affairistes, on se rend services comme on peut, là où on est ! De telles histoires méritent que le Premier ministre Amadou Bâ vienne à son tour éclairer la lanterne des Sénégalais devant l'Assemblée nationale. A moins qu'il préfère continuer à s'en laver les mains !
PAR Charles Faye
PELÉ
Pelé n’est pas mort Edson si. Beaucoup ne connaitront pas l’éternité de Pelé, tant ils seront tristement passés à côté de leur sphère, laissant pour seule trace une épitaphe illisble sur une dalle érodée.
Pour une trajectoire mal ajustée, des principes tombant telles des feuilles mortes, des ambitions s’écrasant sur des montants, ils auront raté les multiples occasions d’écrire leur histoire dans les lucanes béantes.
Comment ne pas voir comment Pelé a construit sa légende pour ne pas s’en inspirer et ne pas se retrouver dans le cercle des grands, des plus grands ?
Savoir s’arreter, pour que s’installe le mythe. S’en aller sans jamais partir.
Le monde pleure. Le football est en deuil. Son roi est mort. Quelle vie ! Quelle fin !
De quoi nous interroger en cette fin d’année tristounette, marquée par des histoires d’hormones débridées, de détournements de deniers publics, d’inélégance, d’arrogance.
2022 se meurt, dans la tourmente, sans gloire, sans promesses sinon annonciatrice d’une année encore plus sombre, porteuse de craintes de lendemains incertains, de films aux séquences X à faire tomber, de germes de la division.
La gloire n’est pas partout, pas chez nous en tout cas en ce 2022 à l’agonie, avec ses casseroles. Excit l’année, vive 2023, qui ne nous demandera pas du reste notre avis.
Aussi sûre que l’incertain, elle arrive avec son lot de surprises et d’incertitudes, dans notre rectangle de vie sec et chaud. A nous de faire en sorte qu’elle ne nous tombe pas dessus, qu’elle ne nous aspire pas dans ses angles morts, pour s’offrir, à nos dépens, des coups francs imparables.
C’est en ce sens que les arabesques de l’enfant Dico devenu Pelé, doivent nous livrer leurs secrets, pour dribbler les plans des infortunes se dessinant sous nos yeux.
Ces hasards subséquents, devant lesquels devront s’affirmer et s’assumer des responsabilités individuelles et collectives, afin que le Sénégal ne sombre pas dans la genèse d’un autre monde, auquel le renvoie quasiment son anagramme.
Entouré par une ceinture de feu djihadiste, convoité par la nouvelle géopolitique mondiale, éprouvé par le radicalisme et le populisme, aveuglé par le communautarisme et l’obscurantisme, traversé par l’onde de choc jeunesse, mis à rude épreuve par l’extrémisme politique, le Sénégal peine à se rassurer et assurer une bonne nouvelle année.
Pelé nous dira qu’on ne récolte que ce que l’on a semé, encore que les Lions nous ont donné de grandes joies en 2022.
Mais là n’est pas la question. C’est le mythe Sénégal qui s’effrite et ça, ce n’est pas possible.