Évitons d’étouffer davantage nos entreprises qui sont déjà à bout de souffle, en ne leur imposant surtout pas des conditions d’accès au crédit plus drastiques ; ce serait comme ouvrir une plaie qui ne se refermera pas rapidement
Dans son discours du 16 Septembre, le PR Macky Sall rappelait que l’Etat a mobilisé 620 milliards de FCFA pour soutenir les ménages, dont 120 milliards de revalorisation de salaires et 43 milliards sous forme de transferts d’argent. S’y ajoutent les 300 milliards de subventions à l’énergie et les 157 milliards de renonciation à des recettes fiscales. Donc il y a une injection de liquidités dans l’économie.
Le problème c’est qu’au même moment la BCEAO cherche à les réduire en relevant ses taux directeurs de 25 points de base (0,25%) en septembre, après une hausse similaire en juin. En théorie, cela permet d’assurer la stabilité monétaire par la lutte contre l’inflation en défendant la valeur de la monnaie, rattachée à l’euro par une parité fixe.
Pour faire simple, la BCEAO est comme un grossiste, les banques secondaires, des détaillants. Le relèvement des taux directeurs va rendre les emprunts plus chers pour les particuliers et les entreprises parce que les banques répercutent cette hausse sur les taux d’intérêt comme le ferait un détaillant pour qui le prix d’acquisition de la marchandise chez le grossiste augmente. Les dépenses de consommation baissent, de même que les investissements puisque les agents économiques sont moins enclins à emprunter pour financer leurs activités.
Dans la situation actuelle, on a plus affaire à une inflation importée puisque l’euro auquel est arrimé le Franc CFA est faible face au dollar et nous importons l’essentiel de ce que nous consommons qui est facturé en dollar. Il y a toutefois une part d’inflation par les coûts car les travailleurs demandent des salaires élevés pour faire face au coût de la vie, l’énergie coûte cher pour les entreprises, les intrants viennent souvent de l’extérieur.
L’Etat et la BCEAO ont certainement les mêmes objectifs mais ne semblent pas regarder dans la même direction puisque l’un favorise la circulation de l’argent, l’autre le décourage, au nom de la lutte contre l’inflation et la défense de la parité fixe avec l’euro. Que veut-on finalement ?
C’est très bien de soutenir la demande mais puisque dans notre cas, cette demande est surtout satisfaite par des importations, on doit aussi soutenir l’offre domestique. Pour cela, au lieu de serrer la vis pour les crédits, il faut plutôt les desserrer (BCEAO). De même, au lieu de s’en tenir à renoncer à des impôts et de payer des arriérés à des entreprises, il faut créer les conditions de développement d’un tissu industriel solide qui ne va pas tanguer à la moindre brise de mer venant de l’océan atlantique ou de la Méditerranée.
Dans la logique de la suspension du pacte de convergence de l’UEMOA pour permettre aux Etats de s’endetter et de dépasser le seuil d’inflation de 3%, on doit se débrouiller pour injecter plus de liquidités dans l’économie sachant que la situation actuelle va s’estomper même sans aucune intervention de notre part. En effet, il suffit que Vladimir Poutine décide d’arrêter sa guerre contre l’Ukraine et que l’euro remonte face au dollar pour que les problèmes soient oubliés. Toutes ces deux conditions ne dépendent pas de nous ; donc évitons d’étouffer davantage nos entreprises qui sont déjà à bout de souffle, en ne leur imposant surtout pas des conditions d’accès au crédit plus drastiques ; ce serait comme ouvrir une plaie qui ne se refermera pas rapidement.
Espérons que les 15 mesures qui viennent d’être annoncées par le gouvernement lors des concertations engagées avec les acteurs économiques aboutissent à du concret. Les 1000 volontaires qui doivent contrôler les prix doivent être bien payés ; comprenne qui pourra.
Abou Kane est Professeur Titulaire, Agrégé d’économie,FASEG/Université Cheikh Anta Diop de Dakar.
UNE CROISSANCE MOYENNE DE L’ORDRE 5% ATTENDUE DANS L’UEMOA POUR LES DEUX DERNIERS TRIMESTRES DE 2022
Les pays membres de l’Union économique et monétaire ouest africaine (UEMOA) tablent sur des prévisions de croissance de 5,2% et 5,6% aux troisième et quatrième trimestres de 2002
Dakar, 30 sept (APS) - Les pays membres de l’Union économique et monétaire ouest africaine (UEMOA) tablent sur des prévisions de croissance de 5,2% et 5,6% aux troisième et quatrième trimestres de 2002, a annoncé, vendredi, à Dakar, le président de son conseil des ministres, le Togolais Sani Yaya.
Ces prévisions montrent que les pays membres de l’UEMOA restent globalement résilientes, en dépit d’un contexte international peu favorable marqué par la poursuite de la guerre en Ukraine et les effets de la crise sanitaire, a indiqué Sani Yaya, ministre togolais des Finances.
"Face à la flambée des prix, les Banques centrales ont dans leur ensemble procédé à un resserrement de leurs politiques monétaires respectives, ce qui rend de plus en plus onéreux les financements sur les marchés financiers internationaux", a-t-il souligné lors d’une session ordinaire du conseil des ministres de l’Economie et des Finances de l’UEMOA.
Il reste que malgré ces bonnes perspectives, "les économies des Etats membres de l’Union restent également confrontées aux difficultés d’approvisionnement notamment en produits alimentaires et en intrants agricoles", les deux protagonistes de la guerre en Ukraine étant les principaux fournisseurs des pays membres de l’UEMOA pour ces catégories de produits, a-t-il relevé.
Le président du conseil des ministres de l’UEMOA note que les difficultés d’approvisionnement en produits alimentaires et des campagnes agricoles passées, ajoutées à la hausse des prix des produits pétroliers, "induisent de fortes tendances inflationnistes dans les Etats membres de l’Union avec un taux d’inflation en moyenne annuelle (…) de 5,9% au mois de juillet 2022".
Il rappelle que pour mieux faire face à la "flambée des prix des céréales et des engrais, la plupart des Etats ont pris des mesures essentiellement budgétaires en recourant à des subventions, au contrôle des prix, à une meilleure surveillance des mouvements des produits, au soutien direct aux producteurs, à des exonérations de taxe et à des aides et transferts monétaires ciblés aux ménages".
Selon Sani Yaya, "ces interventions ont dans l’ensemble fragilisé la situation budgétaire des Etats membres, rendant difficiles les perspectives d’une consolidation budgétaire rapide"
S’y ajoutent dit-il "les incertitudes liées à la crise sécuritaire persistante" dans la sous-région ouest africaine, "avec ses conséquences au plan économique et social".
Aussi a-t-il insisté sur "les efforts importants que ne cessent de consentir les Etats membres pour atténuer les souffrances des populations face à la flambée des prix".
"C’est le lieu de rappeler les orientations de politique économique issues de la réunion du conseil des ministres de juin 2022, qui mettent l’accent sur la nécessité de renforcer ces mesures d’urgence qui visent la préservation du pouvoir d’achat des populations en particulier les plus vulnérables et à protéger les consommateurs tout en maitrisant le déficit budgétaire", a-t-il ajouté.
Cela implique que les pays membres de l’UEMOA sont appelés à "mener des actions structurantes devant permettre d’améliorer sensiblement l’offre de produits agricoles et leur transformation au sein de l’Union".
La mise en œuvre de ces orientations devrait contribuer à améliorer la situation et à préparer les économies de l’UEMOA à faire face à de tels chocs dans l’avenir, selon Sali Yaya.
Il estime que la résilience des économies de l’UEMOA contribue à maintenir une croissance soutenue dans les pays concernés, dans un contexte international difficile.