Parfois, les gens me demandent pourquoi j'ai choisi de jouer pour le Sénégal plutôt que pour la France. Pour moi, représenter le Sénégal a toujours été le plan de Dieu. Il y a quelque chose en moi depuis 2002 qui me pousse vers ce destin
D’ici la fin de cette histoire, je ferais de vous un supporter du Sénégal. Je vous le promets. Même si le Sénégal n’est pas votre équipe première à cette Coupe du Monde, nous sommes heureux d’être votre seconde. Nous vous adopterons, ce n’est pas un problème.
Pourquoi le Sénégal ? Commençons par la Coupe d’Afrique des Nations. (Le tournoi préféré de tous les entraîneurs européens.) C’est une histoire amusante, en fait. Je ne l’ai jamais dite auparavant, mais c’est la vérité… À la fin de la prolongation lors la finale contre l’Égypte, il y avait tellement de tension dans le stade au Cameroun que j’avais des flashbacks de lorsque j’avais 11 ans. Pour moi, dès que le coup de sifflet a retenti et que j’ai su que nous allions aux tirs au but, nous n’étions plus en 2022. Nous étions en 2002.
Quand on est footballeur, on est généralement "dans l'instant". On n’a pas le temps d’être nerveux. Mais c'était une chance en or pour le Sénégal de remporter son premier grand trophée. Nous savions que le pays tout entier nous regardait, et qu'il avait vu tant de crève-cœurs au fil des ans. Vous souvenez-vous que nous avons été éliminés lors de la Coupe du monde 2018 à la règle du Fair-Play ? Puis, nous avons perdu la finale de la CAN 2019 l’année suivante. C’était comme si l’histoire n’avais jamais aimé le Sénégal.
Même avant la finale, alors que nous avions déjà gagné notre match et que nous étions tous à l'hôtel en train de regarder l'Égypte gagner sa demi-finale aux tirs au but, nous regardions leur gardien et on se disait : "Mec, nous devons les battre en 90 minutes. Ce gars-là sauve tout".
Hahahah. Oui, c’est vrai. Je ne le dirais jamais à la presse, mais nous disions tous, "Peu importe ce qu'il en coûte, nous ne pouvons pas aller aux penalties !!!!".
Alors forcément, nous sommes allés aux tirs au but. Et lorsque nous nous sommes dirigés vers la ligne de touche pour discuter avec le coach de savoir qui seraient les tireurs, je n'ai pu m'empêcher d'avoir le même flash-back que des millions de Sénégalais ont eu en regardant la télévision. Au fond de mon esprit, je revoyais le but en or de la Turquie en quart de finale de la Coupe du monde 2002. Puis je revoyais les tirs au but contre le Cameroun en finale de la CAN 2002. Je regarde notre coach, Aliou Cissé, qui jouait ce jour-là, et je me dis : "Bon sang, même le grand patron a raté le penalty contre le Cameroun en 2002 ! Peut-être que nous sommes vraiment maudits !"
Mais ensuite, Aliou nous a tous rassemblés en cercle, et il a prononcé un magnifique discours qui a totalement renversé l'atmosphère. Il n'y a pas grand-chose que je puisse dire sur Aliou qui lui rende justice, car Aliou est le Sénégal. Enfants, nous l'avons tous vu donner sa vie pour le maillot. Il avait l’habitude de mettre sa tête là où d'autres osaient à peine mettre leur pied. Dans ce moment difficile, avant les penalties, il nous a dit de ne pas avoir peur. Il nous a dit d'y aller et de gagner pour notre pays, et pour les générations de joueurs qui se sont sacrifiés pour ce moment - de l'équipe de 2002 jusqu'à nous.
Nous pourrions être ceux qui réécrivent l'histoire. Nous avions le stylo entre les mains.
Après ce discours, toutes nos craintes se sont envolées. Je lui ai dit que je voulais passer en premier. En tant que capitaine, je veux toujours porter le fardeau sur mes épaules. Mais ce qui est incroyable, c'est qu'Aliou a regardé tout le monde et a dit : "OK, Kouli y va en premier. Mais toute la pression est sur moi, pas sur vous. C'est moi qui ai choisi. J’en répondrai. Vous les gars, allez-y et gagnez."
Alors, j'ai marché jusqu'au point de pénalty. Je me suis avancé vers le ballon. Ce n'était pas seulement un penalty. Ce n'était pas seulement une finale. Il y avait 20 ans d'histoire dans cette seule frappe.
Dans les quartiers d'immigrés en France, il y a vraiment deux coupes du monde qui se déroulent en même temps. Il y a la Coupe du monde à la télé, et puis il y a celle que tu joues dans la rue avec tes amis. Il y a l'équipe nationale du Sénégal à la télé - l'équipe turque, l'équipe tunisienne, l'équipe algérienne. Et puis il y a l'équipe sénégalaise du quartier, l'équipe tunisienne du quartier, et ainsi de suite. Lors d’un été classique, le quartier est un beau mélange de cultures, de langues et d'amitié. Si vous êtes le seul gars assez chanceux pour avoir une Playstation, elle devient la "Playstation du quartier". Si vous allez au parc et que toutes les mères sont assises sur l'herbe pour manger des glaces, vous n'allez pas embrasser uniquement la mère de votre ami. Vous allez "au bout de la rangée". Vous embrassez toutes les mères.
VIOLENCE COLONIALE DANS LES OTAGES, CONTRE-HISTOIRE D’UN BUTIN COLONIAL
Pour importante que soit la « restitution » d’œuvres culturelles à certains pays africains, elle n’en doit pas moins faire oublier la dure réalité silencieuse qui se cache derrière ces objets. L’histoire doit prendre tout son sens en servant de leçon
Contrairement à l’énorme battage médiatique ayant accompagné la « restitution » d’objets culturels - par l’ancienne puissance coloniale -, qui a commencé, en Afrique, par le Sénégal, avec le sabre douteusement attribué à El Hadj Oumar Tall, avant de se poursuivre avec le Bénin, avec des trésors du royaume d’Abomey – parmi lesquels les fameuses statues anthropomorphes, mi-homme mi-animal, des rois Ghézo, Gléglé et Béhanzin -, et prochainement avec la Côte-d’Ivoire, avec le Djidji Ayokwe (le tambour parleur des Ébriés), très peu a été dit sur la violence qui caractérisait le pillage de ces objets par les forces coloniales françaises. Aussi la lecture de l’œuvre de Taina Tervonen[1], Les otages, contre-histoire d’un butin colonial, offre-t-elle l’opportunité de prendre connaissance de l’une de ces histoires : la prise de Ségou par les troupes de Louis Archinard en avril 1890.
L’histoire d’Abdoulaye, celle de sa famille et de bien d’autres personnes évoquées dans le livre peuvent illustrer à merveille les humiliations et la violence physique, psychique, morale et matérielle que faisaient subir les colonisateurs aux ressortissants des pays conquis. Après la chute de Ségou, capitale de l’Empire toucouleur, occupée par les troupes de Louis Archinard, Abdoulaye, alors âgé d’une dizaine d’années, a été séparé de sa famille et expédié en France avec le butin de guerre : 96 bijoux en or et en argent, des ustensiles, 518 manuscrits…Les siens, quant à eux, furent dispersés, à l’exception de son père, Ahmadou Tall, fils d’El Hadji Oumar Tall, qui avait pu s’enfuir avec quelques-uns de ses soldats. Ainsi, dans un télégramme envoyé au gouverneur du Sénégal, le 23 juillet 1890, Louis Archinard expose la répartition des femmes du roi vaincu. Il comptait les offrir à d’autres chefs. Certaines parmi elles étaient accompagnées de leur mère ou de leurs enfants. Ce qui constituait un groupe de vingt-six personnes, qui furent toutes dispersées[2].
Exiler Abdoulaye comportait un double objectif : d’une part, éviter plus tard une possible tentative de vengeance d’un potentiel adversaire de la France, et d’autre part, créer un acculturé, qui pourrait être utilisé ultérieurement comme relai au niveau local contre ses propres frères. Cette stratégie pouvait être mise en œuvre en dernier ressort, si l’on pensait que l’École des fils de chefs, anciennement appelée École des otages, créée par Faidherbe en 1955, ne suffisait pas à transformer un « élève » récalcitrant en un soumis ou un futur allié. Ce fut le cas des deux fils de Mamadou Lamine, dont la tête a été tranchée par le colon. C'est ce qui ressort de cet extrait d’une lettre d’Archinard envoyée au gouverneur du Sénégal: « Il est fâcheux pour la tranquillité que ces enfants n’aient pas disparu dans la bagarre et qu’on ne les ait pas absolument dépaysés (…) Nous avons élevé deux petits serpents, qui sont intelligents, qui parlent français, l’écrivent de manière à pouvoir être compris (…) Pour mon compte personnel, je suis absolument persuadé que ces enfants que je connais depuis un an, avec l’entourage que je leur connais et les sentiments qu’on manifeste à leur égard, seront pour nous, un peu plus tard, des adversaires d’autant plus dangereux qu’ils auront vécu près de nous. Je ne vois qu’un moyen de nous débarrasser pour l’avenir de deux prêcheurs de la guerre sainte qui sans doute donneront de nouveaux soucis à quelques-uns de mes successeurs et nous imposeront quelques nouvelles insurrections à refréner, ce serait d’envoyer ces deux jeunes gens dans un lycée de Paris. Ils deviendront suffisamment français pour ne plus s’occuper de guerre sainte et pourront être des fonctionnaires précieux ; en tout cas, un séjour de quelques années au milieu de nous leur enlèvera tout prestige religieux aux yeux de leurs compatriotes.
J’ai l’honneur de vous prier, monsieur le Gouverneur, de vouloir bien transmettre cette lettre à Monsieur le Sous-secrétaire d’État des colonies. Je désire vivement qu’elle soit prise en considération. Je suis persuadé, si elle ne l’est pas, que l’avenir démontrera assez vite que je ne trompe pas aujourd’hui (…)[3]»
Les prières d’Archinard seront exaucées : ces deux jeunes hommes seront ultérieurement emmenés en France, d’après Taina Tervonen. Mais, contrairement à Abdoulaye, les archives qu’elle a visitées n’ont pas révélé ce qu’il était advenu d’eux.
L’objectif du colonisateur ayant toujours été de mettre entre lui et la population des pays conquis d’autres indigènes qu’il a formés, voire formatés, il était naturel chez lui de compter sur une élite locale. Des complices, des intermédiaires aliénés, que Jean-Paul Sartre, dans sa fameuse préface de Les Damnés de la terre de Frantz Fanon, qualifie d’êtres truqués, de mensonges vivants, qui, une fois retournés chez eux, ne parviennent plus à communiquer avec les leurs tant est devenu grand le fossé qui les sépare. Du coup, le séjour en métropole et le « lavage de cerveau » qui l’accompagnait faisaient partie de cette stratégie d’aliénation, et partant de domination. Ces objectifs n’ont toujours pas changé. Ils se sont juste modernisés, et ils s’actualisent, avec des moyens plus subtils et souvent très attractifs.
La violence coloniale ne se limitait pas seulement au niveau de la séparation des familles, comme du temps de l’esclavage, elle était aussi bien présente dans le vil prix que coûtait la tête d’un colonisé. Cette demande pour le moins cynique, méprisante et déshumanisante du Dr Hamy, directeur du musée d’Ethnographie du Trocadéro, en est la parfaite illustration : « Il reste beaucoup à faire sur ces populations à tous les points de vue. Leur anthropologie est à peine ébauchée, le Muséum de Paris (Jardin des plantes) n’a ni squelette ni crâne de Toucouleur, les Mandingues (Malinkés, Soninkés) n’y sont représentés que par une pièce, les Bambaras également. Rien du Bambouk, rien de la vallée du Niger ! Au musée d’Ethnographie, à part les pièces de Soleillet (…) et votre petite collecte, on n’a rien ou presque rien non plus[4]. Aussi pouvez-vous rendre de vrais services à ces deux établissements pour lesquels je prends la liberté de réclamer votre concours le plus actif...» Archinard fera exactement ce qu’on lui avait demandé, au nom de la science et des collections à compléter. En effet, en juin 1884, le directeur du muséum d’Histoire naturelle lui écrit et le remercie « pour le don (…) de deux crânes du Haut-Niger[5] »
Le mépris et le peu de valeur accordée aux vies des indigènes ne sont pas sans rappeler les enfumades du maréchal Bugeaud en Algérie, les propos sadiques du colonel de Montagnac, un autre parmi les conquérants d’Algérie: « Pour chasser les idées qui m’assiègent quelquefois, je fais couper des têtes, non pas des têtes d’artichauts, mais bien des têtes d’homme[6] » et ceux du compte d’Hérisson : « Il est vrai que nous rapportons un plein baril d’oreilles récoltés, paire à paire, sur les prisonniers, amis ou ennemis[7].» Ces monstruosités évoquées par Aimé Césaire dans le Discours sur le colonialisme ont fait dire à l’auteur du Cahier du retour au pays natal, à juste raison, que : « La colonisation travaille à déciviliser le colonisateur, à l’abrutir au sens propos du mot, à le dégrader, à le réveiller aux instincts enfouis, à la convoitise, à la violence, à la haine raciale, au relativisme moral[8]… » ;
« (…) La colonisation, je le répète, déshumanise l’homme même le plus civilisé; que l’action coloniale, fondée sur le mépris de l’homme indigène et justifiée par ce mépris, tend inévitablement à modifier celui qui l’entreprend : que le colonisateur, qui, pour se donner bonne conscience, s’habitue à voir dans l’autre la bête, s’entraîne à le traiter en bête… [9]»
Abdoulaye, Naba Kamara – une petite fille prise à la suite d’une guerre coloniale, puis emmenée en France et confiée à une sœur d’Archinard par ce dernier –, les deux fils de Mamadou Lamine, à l’instar de beaucoup d’autres résistants africains, tels que Cheikh Amala, Béhanzin, Samory Touré, Aline Sitoe Diatta, Cheikh Ahmadou Bamba, Messali Haj, Boumezrag Al-Mokrani déporté en Nouvelle Calédonie et bien d’autres, étaient victimes de séparation d’avec leurs parents et leur terre natale. Toutefois, la seule différence dans le cas d’Abdoulaye est qu’il était très jeune au moment de son départ pour comprendre la portée de celui-ci. Si bien que, en toute innocence, il a été victime du Syndrome de Stockholm, en montrant toute sa reconnaissance à la France, et surtout à son ravisseur Archinard, à qui il adressait des mots affectueux dans les lettres qu’il lui envoyait. Mieux, il le considérait comme son bienfaiteur. Mais le mauvais traitement qu’il subit lors d’un voyage dans son pays natal, où il a été traité de fils de vaincu par certains colons, lui a permis de prendre conscience qu’il n’était pas comme les autres. Il était âgé d’une vingtaine d’années lorsqu’il mourut de tuberculeuse, quelque temps après avoir intégré Saint-Cyr. Sa dépouille sera rapatriée au Sénégal en 1995, c’est-à-dire deux années après la visite d’une délégation en France conduite par le khalife Tierno Mountaga Tall qui l’avait réclamée pour éviter qu’elle ne fût exhumée et incinérée – cimetière du Montparnasse - comme c’est le cas des concessions arrivant à terme. Il avait même lancé cette phrase : « Cet homme n’est pas fait pour le feu.[10]»
En définitive, pour importante que soit la « restitution » d’œuvres culturelles à certains pays africains, elle n’en doit pas moins faire oublier la dure réalité silencieuse qui se cache derrière ces objets. D’autant que les groupes des Républicains n’ont accepté de voter le projet de loi sur la restitution du sabre au Sénégal et des œuvres du Bénin, présenté devant l’Assemblée nationale le 2 octobre 2020 qu’accompagné d’un amendement réaffirmant « le principe d’inaliénabilité des collections muséales françaises[11]. » De plus, elle ne doit pas non plus détourner l’attention des questions les plus urgentes et les plus essentielles, telles que : la présence des bases militaires françaises en Afrique, la question du franc CFA et l’ingérence de l’ancienne puissance dans les affaires internes de certains pays sur le continent. Car elles constituent des enjeux sécuritaires, économiques et politiques pour les pays concernés. D’où cet appel à la prudence de Nadia Yala Kisukidi : « Cet activisme mémoriel institutionnel s’accompagne d’un ensemble de lots symboliques qui visent, à travers des engagements culturels et mémoriels, à produire un nouveau récit françafricain, neutralisant ainsi les critiques qui mettent au jour sa mécanique depuis un demi-siècle. Le paradoxe de ces usages politiques de la mémoire, c’est qu’ils ne visent pas à rappeler ce qui a été mis sous silence, ou tenu caché ; ils ressuscitent le souvenir pour faciliter l’oubli. Mettre en lumière pour tenir dans l’obscurité, c’est-à-dire tourner la page du passé colonial. Mobiliser jusqu’à saturation la mémoire, pour que les esprits revêches, sur le continent africain comme dans la diaspora cesse de faire des histoires.[12] » D’aucuns pourraient parler de victimisation ou de ressentiment en lisant ces rappels historiques, et voudraient même que l’on mette une croix sur ce passé pour le moins dérangeant pour certains afin de mieux braquer les regards sur l’avenir, il faudra juste leur rappeler ces propos de George Santayana: « Ceux qui oublient le passé se condamnent à le revivre.» Rappel d’autant plus important que nombre des descendants de ces anciens colonisés, maltraités, assassinés, déportés sont encore victimes de mépris, de racisme dans les pays de ceux qui avaient fait subir ces atrocités à leurs ancêtres. Par conséquent, l’histoire doit prendre tout son sens en servant de leçon et de guide.
[1] Journaliste, documentariste, Taina Tervonen est née et a grandi au Sénégal jusqu’à l’âge de 15 ans. Elle parle wolof, et c’est à l’école sénégalaise qu’elle a appris une autre version de l’histoire coloniale. Différente de celle enseignée dans les établissements Son œuvre est un véritable travail d’orfèvre, fruit de nombreuses recherches et enquêtes.
[2] Tania Tervonen, Les otages, contre-histoire d’un butin colonial, p.96
[10] Les otages, contre-histoire d’un butin colonial, Taina Tervonen, p.121
[11]Le piège africain de Macron, du continent à l’Hexagone, Antoine Glaser et Pascal Airault, p. 160
[12]Françafrique, mémoires vives, Nadia Yala Kisukidi, p.963, extrait de L’empire qui refuse de mourir, Une histoire de la françafrique,, sous la direction dfe Thomas Borrel, Amzat Boukari-Yabara, Benoît Collombat, Thomas Deltombe
par Babacar Fall
SÉNÉGAL, LAÏCITÉ ET SÉCULARISME
Le post sur Facebook de Mary Teuw Niane du 14 septembre 2022 : « la laïcité, un tabou étranger à notre culture » me donne l’occasion de revenir sur un sujet qui est un nœud gordien pour l’évolution de la République
Le post sur Facebook de Mary Teuw Niane du 14 septembre 2022 : « la laïcité, un tabou étranger à notre culture » me donne l’occasion de revenir sur un sujet qui est un nœud gordien pour l’évolution de la République. Qu’est-ce qu’un citoyen ? Quel sens donner au pacte social, ou pour reprendre la magnifique expression senghorienne, « notre commun vouloir de vie commune. »
Mais avant, il est nécessaire de clarifier le débat et cerner ses enjeux.
La laïcité à la française
La première définition formelle de la laïcité fut exprimée, en 1881, par Ferdinand Buisson, philosophe, homme politique et cofondateur de la ligue des droits de l’homme en 1898. Il considère la laïcité comme le résultat d’un processus historique au cours duquel la sphère publique s’est affranchie du pouvoir de la religion. Il en résulte l’État laïque, neutre à l'égard de tous les cultes, indépendant de tous les clergés, pour réaliser l’égalité de tous les citoyens devant la loi, avec des droits assurés en dehors de toute condition religieuse et la liberté de tous les cultes.
Cette spécificité française trouve sa traduction dans la loi dite de séparation de l’église et de l’Etat de 1905. Les historiens sont tous d’accord aujourd’hui pour démontrer qu’il y a plusieurs modèles qui se sont affrontés lors des débats parlementaires de l’époque. Cependant dans le cadre de cette analyse, je retiendrai le modèle majoritaire porté par Aristide Briand et Jean Jaurès. Jean Baubérot le définit ainsi : « La loi non seulement assure la liberté de conscience et le libre exercice des cultes (article 1) mais respecte l’organisation de chaque religion (article 4), même si aucune religion n’est désormais « reconnue » ni financée sur fonds publics (article 2).
La laïcité ainsi définie par la loi autour de la liberté de conscience, comporte une dimension qui déborde l’aspect strictement individuel. Avec l’instauration d’aumôneries sur fonds publics (fin de l’article 2), avec la dévolution gracieuse des édifices du culte, propriété publique, aux associations cultuelles et diocésaines (articles 7 à 17), avec la construction, dès les années 1920, de la Grande Mosquée de Paris, la loi de 1905 et son application ultérieure ont fait que, dans certains cas, l’exercice de la liberté de conscience comme « liberté de culte », garantie par l’article 1 de la loi de 1905, doit l’emporter sur l’absence de subvention. C’est la position constante du Conseil d’État en France, et d’associations comme la Ligue de l’enseignement ou la Ligue des droits de l’homme qui a aussi permis enfin, durant les années 2000 la construction de carrés musulmans dans beaucoup de cimetières et de centaines de mosquées dans plusieurs villes de France.
Pour les sociologues des religions, la laïcité française ne constitue pas une exception, mais s’inscrit dans la même dynamique historique que les différents sécularismes qui ont traversé l’histoire mondiale.
Enfin, Mary Teuw ne comprend pas le concordat en Alsace-Moselle : « en France même, le principe de la laïcité n’est pas universel. » En fait ce dont il s’agit, c’est du statut spécifique des trois départements d’Alsace-Moselle, qui n’étaient pas français de la fin de la guerre de 1870-1871 à 1919 (après la Première Guerre mondiale). Les lois de laïcisation de l’école publique et la loi de 1905 ne leur ont donc pas été appliquées quand elles ont été votées. Ces trois départements ont globalement, conservé le régime issu de la loi Falloux de 1850 (pour l’école publique) et le régime du Concordat et des Articles organiques (1802) qui induit un financement des « cultes reconnus » et le paiement de leur clergé sur fonds publics. Quand ces départements sont redevenus français leur régime spécifique a été maintenu « à titre provisoire ». Non seulement ce « provisoire » dure encore, mais le Conseil constitutionnel a rendu une décision selon laquelle un tel statut juridique est conforme à la laïcité de la République énoncée par la Constitution.
Définition et historique du concept de sécularisme
Le terme sécularisme est un anglicisme. Il s’agit d’une doctrine selon laquelle la religion ne doit pas avoir, ni chercher à avoir de pouvoir politique ou législatif.
Elle prône la séparation de l’Eglise et de l’Etat et affirme en corollaire que le pouvoir politique ne doit pas intervenir dans les affaires propres aux institutions religieuses.
Le sécularisme désigne une tendance objective et universelle à faire passer les valeurs sociales du domaine du sacré à celui du profane.
On peut le penser comme l’exigence de la séparation des institutions séculières du gouvernement et de la religion, mais il ne s’y réduit pas.
Il renvoie à la désacralisation de l’organisation sociale perçue non pas comme une donnée naturelle exigeant l'adhésion automatique aux valeurs établies, mais plutôt comme un produit de l’histoire des politiques humaines.
Sécularisme et sécularisation en Europe
Le processus historique de sécularisation est d’abord apparu sous la chrétienté médiévale ou dans les empires islamiques et sans aucun doute dans d'autres sociétés également.
L’art, le droit, ou la politique conquièrent au fil du temps leur autonomie à l’égard d’une pensée religieuse qui les avait d’abord fondés.
La séparation est acquise entre les différents segments de la vie sociale. La religion n’est plus que l’un d’entre eux et non celui qui donnait sens à tous. Elle se manifeste dans l'émergence d'aspirations, d'attitudes et de comportements nouveaux.
Dans beaucoup de pays de culture catholique la logique fut celle de la laïcisation. La religion s’est trouvée reléguée dans la sphère privée.
En pays protestant, l’émancipation de la religion s’est opérée selon une logique de sécularisation, moins conflictuelle. Dans ce cadre, les activités publiques exercées par des groupes religieux sont reconnues juridiquement, y compris leur contribution à l'éducation citoyenne (par des cours de religion dans les écoles publiques, par exemple).
La construction européenne favorise également la diffusion du principe de la dissociation croissante de la confession religieuse du domaine public et son intégration croissante dans la sphère privée.
Et la Convention Européenne des Droits de l’Homme de novembre 1950 (article 9) a consacré les principes de tolérance et de liberté religieuse.
Sécularisme dans le reste du monde
Dans certaines sociétés de culture musulmane contemporaine, la séparation entre le processus de sécularisation et celui de laïcisation est mieux affirmée, et cela pour deux raisons.
La première est que le combat pour la modernité fut essentiellement un combat contre la domination coloniale et non contre un ennemi intérieur (le clergé catholique en France par exemple).
L’aspiration à l’émancipation du joug colonial imposait la nécessité de maintenir des contradictions provoquées par le processus de modernisation sociale. La religion en sortit à la fois renforcée et rénovée par l'addition d'une dimension identitaire.
La seconde est que l'appel aux réformes et à la modernisation est venu, souvent, des élites religieuses, qui sont les alliées privilégiées des acteurs politiques majeurs. Ces derniers comptent sur elles non seulement pour neutraliser les courants conservateurs religieux (sous le masque du réformisme souvent et contre les confréries), mais également pour ses politiques. Les relations entre Léopold Sédar Senghor, ses compagnons et les différentes personnalités religieuses dans les périodes pré et post indépendance s’inscrivent dans ce contexte.
On peut parler d’un « islam républicain » en écoutant cette vidéo témoignage avec cet interview à la télévision française de Serigne Fallou Mbacké sur ses rapports avec le président Senghor.
La description que donne Serigne Fallou Mbacké de ces relations, correspond exactement à ce que l’on désigne sous le concept de sécularisme. La religion ne doit pas s’occuper de politique et la politique ne doit pas s’occuper de religion.
Dans le cas de la fin de l’empire ottoman et de la proclamation de la République turque, Jean François Bayart, politologue (in Islam républicain. Fayard) montre que l’islam est le « fil caché » qui relie les deux systèmes. Contrairement à l’idée reçue selon laquelle Mustafa Kemal Atatürk a cherché à dépecer les institutions de leur manteau islamique, les « Jeunes Ottomans » se sont en fait inscrits dans une longue durée où l’islam a servi de fondement – certes pas le seul – pour bâtir la République turque. Les musulmans ont fini par endosser la République et les sécularistes se sont faits à son visage islamique
On le voit donc, l’histoire mondiale est traversée par ces deux processus, le sécularisme et la laïcité qui indiquent deux conceptions du rapport entre le religieux et le politique.
En Occident, le processus de séparation entre les deux sphères s’inscrit sur la longue durée, sur les autres continents le phénomène est moins visible et prend d’autres formes qui épousent l’histoire sociale de chaque pays.
En Inde par exemple où le sécularisme s’est le mieux épanoui, toutes les religions sont présentes dans la sphère publique. Le résultat est le même qu’en Occident dans la mesure où les croyances se valaient toutes du point de vue de l’Etat indien, encore récemment jusqu’à l’arrivée au pouvoir de l’extrême droite hindoue avec le BJP de Narendra Modi.
Le sécularisme indien s’inscrivait dans une longue tradition de multiculturalisme et de tolérance religieuse qui commence avec l’empereur bouddhiste Ashoka, qui a régné au IIIe siècle avant notre ère.
Mais ce passé seul, ne suffit pas pour maintenir cette tradition de tolérance, car sans les hommes comme Gandhi et Nehru pour le traduire en termes politiques et institutionnels, il n’y aurait pas de sécularisme à l’indienne aujourd’hui. Gandhi se battait pour la reconnaissance du religieux sur un mode collectif dans l’Inde nouvelle alors que, pour Nehru l’appartenance religieuse devait finir par passer au second plan, sinon s’effacer derrière des identités individuelles.
A l’exemple de l’Inde, le sécularisme a été un formidable facteur de cohésion sociale dans beaucoup d’Etats, de pays de culture musulmane dans le monde. Il a permis de transcender les clivages confessionnels. On était citoyen d’abord, locuteur de telle ou telle langue, et puis éventuellement animiste, hindou, musulman, bouddhiste ou chrétien. Le sécularisme a permis sinon de gommer totalement, au moins d’amoindrir les différences liées à l’appartenance religieuse des citoyens.
La laïcité comme concept constitutionnel au Sénégal
Mary Teuw Niane expose un peu plus clairement, pour une fois, une opinion jusque-là dominante, y compris au début de notre Etat-nation, chez les « réformateurs musulmans » (critiques des rapports confréries et autorités publiques, souvent issus des mouvances wahabites) dans les années pré et post indépendance.
Cette conception repose sur le refus de la séparation de la religion et de l’Etat ou plutôt de sa neutralité face aux confréries et au clergé catholique et prône la contribution des religions à l’éducation des enfants (enseignement public des religions et financements des écoles coraniques). C’est ce que propose Mary Teuw Niang dans cette critique de la laïcité au Sénégal : « L’inscription du principe de la laïcité dans la Constitution de notre pays est … surtout le moyen invisible de couper le cordon ombilical des religions avec notre société. Ceci malgré le fait que la religion joue un rôle fondamental dans la formation de notre jeunesse et la construction de sa personnalité. »
Au-delà de l’éducation, on comprend que ce qui est en jeu c’est la question des sources (religieuses ou profanes) de notre Droit et de la Constitution, comme Loi Suprême.
Dans sa comparaison avec les pays européens il cite : « sur les vingt-sept (27) pays de l’Union européenne (UE), la France est le seul pays qui a inscrit le principe de la laïcité dans sa constitution. Le principe de la séparation des Églises et de l’État n’est inscrit que dans la constitution de huit (8) pays au niveau de l’Union Européenne : Hongrie, Lettonie, Portugal, Tchéquie, Slovaquie, Slovénie, Suède et France. »
Mary Teuw montre une incompréhension de l’historicité des rapports entre autorités ecclésiastiques et Etats dans les exemples européens cités. La tradition gallicane de certains Etats européens a toujours reposé sur l’ambition de garder la haute main sur les églises, avec une volonté farouche de les maintenir à l’écart du pouvoir du Pape. Cette tradition qui a commencé en France et a abouti à la séparation par la loi de 1905, a concerné toute l’Europe. En Grande Bretagne, ce processus, après la rupture de l’église catholique d’Angleterre avec Rome consacre l’église anglicane sous l’autorité de la royauté.
Une autre tradition européenne est incarnée par les Etats du Nord de l’Europe, scandinaves et anglosaxons protestants pour qui les principes de laïcité et de séparation de l'Eglise et de l'Etat sont constitutifs du fonctionnement de l’Etat. Car le protestantisme est avant tout un système de conduite autonome de la personne. Dieu et le monde sont dans des galaxies séparées et entre les deux, le fidèle organise lui-même une relation de compromis. C’est ne rien comprendre à l’éthique protestante pour reprendre l’expression de Max Weber, que d’assimiler ces situations léguées par l’histoire de chacune de ces nations.
Les bâtisseurs de la République, de Senghor à Mamadou Dia tous profondément croyants, au moment de poser les fondements d’un Etat moderne, n’ont pas regardé du côté des Etats dont l’inspiration constitutionnelle était les textes sacrés comme certaines républiques ou monarchies islamiques en Afrique et au Moyen Orient, mais plutôt des Etats séculiers modernes en Europe, en Asie et en Amérique.
L’histoire leur a donné raison au regard de l’évolution de ces Etats durant les périodes pré et post indépendance par rapport à ceux qui n’ont pas opté très clairement pour une séparation entre la religion et la gestion des affaires publiques. Les guerres civiles, les conflits de nationalité, les poussées des hordes de fanatiques djihadistes actuelles témoignent du danger de l’ambigüité ou de l’absence de choix clairs sur le modèle de l’Etat.
J’ai toujours pensé que la laïcité de l’Etat au Sénégal, constituait un impensé chez les pères fondateurs de notre République.
Ce parti pris, que je soupçonne, délibéré de leur part, résulte pour moi, de l’appréhension de l’ampleur du combat pour la dissolution du système colonial raciste et de l’indigénat. Et par ailleurs, du temps qu’il leur fallait pour construire et mettre en œuvre les concepts de citoyenneté sénégalaise et africaine.
Il n’est que de lire les débats qui, à partir de 1948, traversent les rangs des bâtisseurs de l’Etat-nation à travers les journaux « Condition Humaine » et « l’Unité » ensuite organe du BDS et du BPS sur la fin de l’empire colonial français et l’AOF pour le mesurer.
Comment rompre avec cet oxymore du projet colonial de la constitution française de 1958 d’assimilation/égalité ?
Avec le recul historique on peut se représenter ces hommes et femmes d’Etat, face à cette question existentielle de fonder un Etat moderne, sur un territoire dont l’Etat français depuis deux siècles s’est évertué à éradiquer toutes les représentations institutionnelles précoloniales.
Mais les formations sociales sur le territoire du nouvel Etat gardent néanmoins la mémoire et les traditions de système d’inégalité et de domination et de système d’ordre, pour reprendre les concepts de A. Bara Diop dans son anthropologie de la société wolof.
Comment assurer l’unité politique des diverses formations sociales et populations vivant sur ce territoire par un Etat dont les structures intrinsèques résultent d’un héritage de domination de deux siècles et par exemple quel rôle pour les autorités coutumières, chefs de canton, chefs de village, cadis ?
Le projet politique que portent ces bâtisseurs et fondateurs (de Blaise Diagne à Galandou Diouf, en passant par Lamine Guèye, Mamadou Dia, et tous leurs compagnons militants, syndicalistes), depuis toujours est de construire un Etat républicain pour fonder une nation de citoyens sénégalais.
Mary Teuw Niane dans son post polémique dit : « Dans nos tropiques africains francophones, la laïcité est la plus grande arnaque politique, sociale et culturelle que les pères fondateurs de notre constitution nous ont léguée. »
C’est faire injure à ces pères fondateurs qui auront arpenté, visité chaque ville, village, canton du Sénégal, discuté avec les autorités coutumières, confrériques de ne pas avoir réfléchi sur ce qui devait définir les citoyens de ce pays. Et surtout de ne pas avoir une idée précise sur la nature de la nation qu’ils avaient l’ambition de construire, malgré des appartenances religieuses, confrériques, linguistiques différentes, des modes de vie, d’habiter, des systèmes fonciers et de modes de production extrêmement variés.
Je relisais récemment la belle biographie d’Ibrahima Seydou Ndaw, parue chez l’harmatan en 2013, et l’autobiographie de Assane Seck « Sénégal, émergence d’une démocratie moderne » pour soupeser le degré de tension intellectuelle, les débats et le combat politique dans lesquels ils étaient tous plongés à cette époque.
Le concept de laïcité pour définir la nature de la république tranche, pour moi, le clivage interne au sein des fondateurs à propos de la notion de liberté comme principe fondateur de ce qu’est un citoyen sénégalais. La mention « démocratique et sociale » résulte d’un compromis entre les différents courants.
Senghor et ses compagnons distinguaient parfaitement ce que les historiens actuels nomment les sécularismes, pour distinguer entre la laïcité à la française et les autres formes, mais qui reposent tous sur la liberté de conscience, la citoyenneté sans fondement religieux et la séparation de l’État et de la religion.
Application du principe laïque au Sénégal ou le sécularisme sénégalais
La constitution de 2001 révisée en 2016, mentionne dans son préambule: la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, les accords et règlements des nations unies et de l’union africaine (Déclaration Universelle des Droits de l’Homme du 10 décembre 1948, la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes du 18 décembre 1979, la Convention relative aux Droits de l’Enfant du 20 novembre 1989 et la Charte africaine des Droits de l’Homme et des Peuples du 27 juin 1981. )
L’article 1, alinéa premier de la constitution de la République proclame : « la République du Sénégal est laïque, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens, sans distinction d’origine, de race, de sexe, de religion. Elle respecte toutes les croyances.
Dans un article, paru dans Ethiopiques n°22-1980, le recteur Seydou Madani Sy dit de la constitution de 1963 révisée (dernière révision lors de la rédaction de cette analyse le 24 avril 1981) : « l’idéologie laïque qui sous-tend la Constitution du Sénégal n’est pas une idéologie de combat, puisqu’il n’y a pas, comme en France à l’origine par exemple, une hostilité aux Eglises et à l’Islam. La laïcité mise en œuvre se rattache à l’idéologie laïque qui déclare l’incompétence de l’Etat à l’égard de ce qui excède le gouvernement du temporel, impliquant le refus de proposer, ou même de cautionner une explication de l’homme et du monde. Mais c’est un Etat qui, à l’égard de toutes les options, professe a priori la même attitude d’impartialité. »
On peut définir la laïcité sénégalaise comme une laïcité compréhensive.
Mieux, contrairement à ce que laisse entendre Mary Teuw Niane, dans la nouvelle constitution de 2001, révisée par référendum en mars 2016, plusieurs articles s’inscrivent dans cette logique de laïcité positive et compréhensive à rebours de la conception française.
L’article 4 qui traite des partis politiques, interdit l’identification à une race, à une ethnie, à un sexe, à une religion, à une secte, à une langue ou à une partie du territoire.
L’Article 5 interdit tout acte de discrimination raciale, ethnique ou religieuse.
L’article 8 proclame que la république du Sénégal garantit à tous les citoyens les libertés individuelles fondamentales… dont les libertés religieuses.
Les articles 20 et 22 qui consacrent le droit à l’éducation de tous les enfants et le devoir des parents, demandent que l’Etat veille à l’exercice de ce droit. Et plus encore, et à croire que Mary Teuw tout ministre qu’il fut, n’a pas lu la Constitution, l’Etat sénégalais reconnaît la contribution des institutions religieuses à l’éducation des enfants. Les institutions et les communautés religieuses ou non religieuses sont également reconnues comme moyens d’éducation.
Et enfin l’article 24 consacre la place de la religion dans l’espace public comme jamais : « la liberté de conscience, les libertés et les pratiques religieuses ou cultuelles, la profession d’éducateur religieux sont garanties à tous, sous réserve de l’ordre public. Les institutions et les communautés religieuses ont le droit de se développer sans entrave. Elles sont dégagées de la tutelle de l’Etat. Elles règlent et administrent leurs affaires d’une manière autonome. »
Je partage cet avis du recteur Thierno Madany Sy dans son analyse de l’application du concept de laïcité au Sénégal : « la neutralité religieuse de l’Etat s’interprète comme donnant libre cours au développement sans entraves des Institutions et Communautés religieuses. »
En effet, à l’analyse, on distingue très clairement les différences majeures entre la laïcité à la française et la version du principe laïque choisie dans notre pays. Non seulement l’Etat sénégalais n’ignore pas les religions, mais entretient des relations normales et très étroites avec les Confréries musulmanes et le clergé catholique, y compris à travers le programme d’investissements annuel dans les cités religieuses et inscrits dans la programmation budgétaire annuelle de l’Etat.
Et en fonctionnement, les subventions aux écoles privées catholiques constituent une part importante des financements de l’éducation. Les écoles privées catholiques, comme les autres, non confessionnelles, sont considérées comme membres à part entière du service public de l’Education.
Il faudrait être sourd et aveugle, pour ne pas saisir la part extrêmement importante que prennent, dans les programmes des radios et télévisions, les cérémonies et autres manifestations religieuses.
Et lors des différentes commémorations religieuses (confrériques et catholique) l’Etat en grand apparat et de façon solennelle est présent.
En conclusion, il me semble que la question qui est au cœur des agitations et des polémiques sur la laïcité au Sénégal, est celle de la nature de notre Etat-nation, celle que ses bâtisseurs nous ont léguée. C’est celle de notre récit national. Quelle narration notre nation renvoie-t-elle aux citoyens que nous sommes ? Quelles sont ses valeurs essentielles à transmettre ?
En 1959, Senghor (Nation et voie africaine du socialisme. Présence africaine) en donnait un aperçu : « la Patrie, c’est le pays sérère, le pays malinké, le pays sonrhaï, le mossi, le baoulé, le fon. [...] Loin de renier les réalités de la patrie, la Nation s’y appuiera, plus précisément elle s’appuiera sur leurs vertus, leur caractère de réalités, partant sur leur force émotionnelle. […] Au terme de sa réalisation, la Nation fait, de provinces différentes, un ensemble harmonieux. […] Nous prendrons garde à ne pas tomber dans l’une des tentations de l’État-nation, qui est l’uniformisation des personnes à travers les patries »
Je pense que la laïcité ou le sécularisme de la République permet le déploiement d’une histoire nationale pleinement africaine qui s’appuie sur la diversité de notre peuple, de ses terroirs, de ses langues et des valeurs qu’elles véhiculent. En somme, accepter de continuer à s’enrichir de « l’humanisme soudanais » pour reprendre l’expression de l’historien Sékéné Mody Sissokho.
LA POLICE BURKINABÈ DISPERSE UNE MANIFESTATION ANTI-FRANCE À OUAGADOUGOU
D’abord mobilisés au rond-point des Nations-unies, au cœur de la capitale, les manifestants se sont rendus devant l’ambassade de France, où un important dispositif sécuritaire avait été déployé
Les forces de l'ordre burkinabè ont dispersé vendredi, à Ouagadougou, une manifestation de plusieurs centaines de personnes protestant contre la présence de la France dans ce pays sahélien miné depuis plusieurs années par des violences jihadistes, a constaté un journaliste de l'AFP.
D’abord mobilisés au rond-point des Nations-unies, au cœur de la capitale, les manifestants se sont rendus devant l’ambassade de France, où un important dispositif sécuritaire avait été déployé. Certains d'entre eux brandissaient des drapeaux de la Russie, pays avec lequel ils ont dit vouloir que leurs dirigeants intensifient les relations.
"Après une première lettre demandant le départ de la France, nous avons à nouveau remis une deuxième lettre aujourd’hui. Une troisième lettre sera transmise aux autorités pour demander purement et simplement le départ de la France", a déclaré Cheik Mahamoudou, un des leaders de la manifestation.
Le 28 octobre, plusieurs centaines de personnes avaient déjà manifesté pour exiger le "départ dans un délai de 72h" de la France au Burkina Faso. La France est présente militairement au Burkina Faso avec la force Sabre, un contingent de forces spéciales basé à Kamboinsin, en périphérie de la capitale.
Devant l'ambassade, ils ont bloqué l'accès à la représentation diplomatique pendant plusieurs minutes, avant d’être dispersés à coup de gaz lacrymogène. Une partie d'entre eux s'est ensuite dirigée à moto vers la base de Kamboinsin, pour continuer la manifestation.
"Nous ne voulons plus de la France aujourd'hui et nous n’en voudrons pas demain. Notre pays est régulièrement attaqué par des terroristes. Si leur présence ne donne pas de résultats, qu’ils laissent la place à d’autres partenaires", a lancé Salif Belem, un manifestant agitant un drapeau russe.
Des intérêts de la France au Burkina, dont l'ambassade et deux Instituts français, avaient été pris à partie par des manifestants à l'occasion du coup d'Etat du 30 septembre qui a porté au pouvoir un jeune capitaine de 34 ans, Ibrahim Traoré, investi depuis président de la transition.
Dans plusieurs pays d'Afrique francophone, Moscou jouit d'un soutien populaire grandissant quand la France, ex-puissance coloniale, y est de plus en plus vilipendée, en particulier au Mali, pays voisin du Burkina également dirigé par des militaires putschistes depuis 2020.
Au Burkina, la junte au pouvoir n'a pas fermé la porte à un rapprochement avec la Russie mais n'a pas montré d'hostilité à la France qui continue d'appuyer l'armée burkinabè dans sa lutte anti-jihadiste.
Les attaques régulières de groupes armés affiliés à Al-Qaïda et au groupe Etat islamique (EI) ont fait des milliers de morts et provoqué le déplacement de quelque deux millions de personnes depuis 2015.
par Damel Mor Macoumba Seck
LA QUADRATURE COMMUNISTE DU BLOCAGE DES PRIX
Il faut laisser les prix libres chez les commerçants propriétaires de leurs propres échoppes. Puis, créer des magasins étatiques de référence avec des prix bas homologués et où on trouverait les denrées de première nécessité subventionnées
L’Etat du Sénégal, devant la flambée des prix des denrées de première nécessité née de la crise urkraino-russe et du blocage de l’export du blé et autres céréales, a pris comme première mesure en juin dernier d’augmenter de 100 FCFA le prix de l’essence super. Sans toucher au prix du gazoil. C’est là une mesure structurelle et structurante qu’il faut saluer, qui épargne les bourses des ménages les moins nantis et protège le transport en commun de personnes et de marchandises, qui est une donnée essentielle pour maintenir droite la colonne vertébrale de l’économie nationale.
La crise des prix persistant, le gouvernement sénégalais a jugé bon de fixer des prix bloqués pour un certain nombre de denrées et de baisser d’autorité aussi les prix des loyers (jusqu’à 20% de baisse pour les loyers en dessous de 300 000 FCFA mensuels). Alors que tout le monde s’accorde à dire que la baisse obligatoire des loyers en 2014 a été de nul effet, cette fois, le gouvernement se faire fort de la rendre efficace et pérenne, notamment par la mise en place d’une commission de régulation qui entendra des litiges plutôt que le tribunal et conduira les conciliations. Pour être sûr d’être obéi, il faut ordonner le possible…
Car, dès l’entrée en vigueur de ces prix bloqués, on constate que les commerçants rechignent à les appliquer. D’où rafles de marchandises par la gendarmerie. Mazette ! Eh bien, je pense que les prix des commerçants devraient être libres. Il faut leur laisser la latitude de faire de leur prix éventuellement bas et de leurs ventes en soldes un argument commercial et non une obligation administrative. Au Sénégal, nous sommes dans une économie libérale et dans un pays membre de l’OMC. La liberté des prix se doit d’être la règle. On vend bien une bouteille de soda cola à 200 frs à la boutique du Diallo de quartier, à 600 frs au resto-chawarma du coin, à 1000 frs dans les bars maquisards et à 5 000 frs au comptoir du Dizzie Bar du King Fahd Palace. Ça n’en reste pas moins la même bouteille de boisson cola.
La solution n’est pas dans la glaciation des prix par oukaze gouvernemental chez ceux qui exercent une profession libérale, les commerçants. C’est aussi une mesure socialement inéquitable, car elle met les marchandises au même prix pour les riches et les pauvres, qui déjà payent le même taux de TVA dessus, 18%.
La cherté du coût de la vie donc ? Oui, bien sûr, il faudrait agir contre elle. Mais non, pas ainsi. Ce qu’il faudrait faire, c’est d’un côté : laisser les prix libres chez les commerçants propriétaires de leurs propres échoppes. Puis, créer des magasins étatiques de référence avec des prix bas homologués et où on trouverait les denrées de première nécessité à prix bas car subventionnés, et où accèderaient les personnes détentrices de cartes officielles attestant de leurs bas revenus. Comme les magasins SONADIS du temps du régime Diouf commençant, au début des années 80, qui ont hélas périclité pour mauvaise gestion. De ce point de vue, les cash tranfers que sont les bourses familiales de 25 000 frs par trimestre qui touchent 316 000 ménages sénégalais pauvres depuis 2014, sont, à cet égard, une bonne mesure, en direction de qui doit en bénéficier et non de tout le monde, sans distinction de revenus. Car, non, nous ne sommes pas à Cuba ou dans un autre pays communiste abusivement dit « République (populaire) », il faut aussi arrêter de fantasmer sur le retour de bataillons de contrôleurs des prix qui sillonneraient les marchés, et qui ne seront jamais assez nombreux et dont les armées hypothétique constitueraient une bureaucratie aussi budgétivore que les prix hauts dénoncés pour les denrées. Les dangers ultimes du blocage des prix, c’est la chasse aux sorcières contre les commerçants, le refus de vente, le marché noir, la rétention des stocks…
TEODORO OBIANG NGUEMA, UN RECORD MONDIAL DE LONGÉVITÉ AU POUVOIR
Le président de la Guinée équatoriale, Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, brigue un 6e mandat dimanche dans ce petit Etat pétrolier d'Afrique centrale au régime parmi les plus fermés et autoritaires au monde
Avec plus de 43 années, il détient le record mondial de longévité au pouvoir pour un chef d'Etat encore vivant, hors monarchies.Le président de la Guinée équatoriale, Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, brigue un 6e mandat dimanche dans ce petit Etat pétrolier d'Afrique centrale au régime parmi les plus fermés et autoritaires au monde.
Réélu en 2016 avec 93,7% des suffrages, il semblait pourtant préparer ces dernières années un dauphin, l'un de ses fils, le vice-président Teodoro Nguema Obiang Mangue, surnommé Teodorin, jet-setteur invétéré connu pour son train de vie luxueux et condamné en France dans l'affaire des "biens mal acquis".
Le chef de l'Etat limitait depuis deux ans ses apparitions publiques quand Teodorin prenait de plus en plus la lumière à mesure que s'effaçait le patriarche.Le tout-puissant et redouté vice-président Teodorin, chargé de la Défense, ne renonçait pas toutefois à s'afficher sur les réseaux sociaux entourés de naïades ou au volant de voitures de courses aussi rares que chères.
Mi-décembre 2021, tout le monde s'attendait à ce que le parti au pouvoir le désigne candidat à la place de son père.
Mais les caciques de ce pouvoir clanique ainsi que la garde rapprochée de Teodoro Obiang jugeaient qu'il était trop tôt et trop provocateur de le propulser officiellement successeur au moment où la chute des revenus des hydrocarbures depuis 2014 et la pandémie de Covid-19 rendaient son pays encore plus dépendant de l'aide et des financements extérieurs.
Le Parti démocratique de Guinée équatoriale (PDGE) avait alors décidé, contre toute attente, de ne nommer personne encore et ce n'est que deux mois avant le scrutin que le vieux chef de l'Etat a rempilé, à 80 ans.
"Cela fait trop longtemps que je suis au pouvoir mais le peuple veut encore que je sois son président.C'est la dernière fois que je me présente", avait-il pourtant confié à l'hebdomadaire Jeune Afrique juste avant sa réélection en 2016. Alors titillé sur la succession préparée pour Teodorin, il avait rétorqué: "La Guinée équatoriale n'est pas une monarchie, (...) mais je n'y peux rien s'il a du talent"...
Le très austère Teodoro Obiang --l'opposé de son fils-- est réputé mener une vie d'ascète, d'avoir une bonne hygiène de vie et de pratiquer du sport quotidiennement.
- Hantise du coup d'Etat -
Le 3 août 1979, c'est par les armes, avec des officiers, qu'il renverse son oncle, le sanguinaire dictateur Francisco Macias Nguema, fusillé deux mois plus tard.
Il en a gardé la hantise du coup d'Etat.Sa garde prétorienne est composée de militaires de son clan réputés fidèles mais --on n'est jamais trop prudent-- ses gardes du corps les plus proches sont israéliens et la sécurité du palais est en partie confiée à des Zimbabwéens et des Ougandais.
Depuis son accession au pouvoir, il affirme avoir déjoué au moins dix tentatives de coup d'Etat ou d'assassinat et, à chacune, Malabo a répondu par une répression accrue, accusant pêle-mêle l'opposition en exil et "des puissances étrangères".
Teodoro Obiang, d'abord chef d'un pays sans grandes ressources et traité avec suffisance par les autres présidents africains, a bénéficié de la découverte de pétrole dans les eaux territoriales au début des années 1990.
Les cartes sont rebattues, le pays s'enrichit.En 2021 ce pays, très peu peuplé, est le 3ème le plus riche d'Afrique en PIB par habitant, selon la Banque mondiale, mais la richesse est concentrée dans les mains de quelques familles, une très grande majorité du 1,4 million d'habitants vivant sous le seuil de pauvreté.
- Prince Teodorin -
La Guinée équatoriale est régulièrement citée par les ONG comme l'un des pays où la corruption est la plus élevée.
Teodorin Obiang a ainsi été définitivement condamné à trois ans de prison avec sursis et 30 millions d'euros d'amende dans une affaire de "biens mal acquis" en juillet en France, ses avoirs sont gelés et il est interdit de séjour au Royaume-Uni depuis 2021 pour "corruption" et "détournement de fonds publics" dans son pays et a dû renoncer à 26 millions de dollars d'avoirs aux Etats-Unis pour mettre fin à des poursuites pour corruption la même année.
Seule une opposition de façade est tolérée dans le pays.Jusqu'en 1991, le PDGE était parti unique, avant que le pouvoir ne tolère des petits mouvements satellites ou "d'opposition", que M. Obiang fait supprimer lorsqu'ils deviennent trop menaçants.
Dans ce petit pays volontiers surnommée par les détracteurs des Obiang la "Corée du Nord d'Afrique", les arrestations ou disparitions d'opposants sont fréquentes, et beaucoup d'entre eux ont trouvé refuge à l'étranger, notamment en Espagne, ancienne puissance coloniale.
AU COEUR DES DAHIRA D'ÉTUDIANTS
A quoi ressemble le campus social de l'Ucad les soirées de jeudi et vendredi ? Pour un habitué des lieux, la réponse coule de source : un espace vibrant au rythme des chants religieux, à l’initiative d'associations musulmanes d’étudiants
A quoi ressemble le campus social de l'Université Cheikh Anta Diop de Dakar les soirées de jeudi et vendredi ? Pour un habitué des lieux, la réponse coule de source : un espace qui vibre au rythme des chants religieux et autres zikrs, à l’initiative des associations musulmanes d’étudiants, lesquelles, au-delà d’un simple effet de mode, sursaut de foi ou soif de religion, demeurent aussi des cadres d’épanouissement social et pédagogique pour leurs membres.
En dehors comme au sein du campus, véritable reflet de la société sénégalaise, ces associations communément appelées ‘’Dahira’’ restent des espaces de solidarité et d’encadrement, de renforcement mutuel des connaissances et de capacitation pour leurs membres sur les questions religieuses. Mais à Cheikh Anta Diop, le ‘’Dahira'' permet aussi à ses adhérents de prolonger les cours après les Amphis.
Pour dérouler ses activités, un ‘’dahira’’ peut disposer de plusieurs commissions dont une chargée des questions pédagogiques, quoi de plus normal, dirait-on, dans un milieu universitaire.
Pour Dahirou Guèye, étudiant en licence 3 au département arabe et président de la commission culturelle de la Dahira des étudiants tidianes (DET) de l’UCAD, ‘’il faut juste une bonne organisation pour allier les études et les activités’’ de l’association.
Guèye confie qu’il se réveille tous les jours vers 4 heures du matin afin d’accomplir ses obligations dans la tariqa tidianya, la voix mystique suivie par les disciples de cheikh Ahmed Tidiane chérif.
’’L’âme est comparable à un bébé. Tant qu’il n’est pas sevré, il continuera toujours à vouloir téter’’, prêche-t-il, habillé d’une chemise blanche assortie d’un pantalon super cent noir, le chapelet roulé sur le poignet de main.
Selon lui, la commission culturelle de leur association, ’’organise régulièrement des séances de capacitation pour les étudiants membres de la Dahira’’.
‘’Parmi les membres de la Dahira, il y a des doctorants, des maitrisards et même des enseignants. Ce qui constitue un véritable atout pédagogique’’, soutient-il.
Trouvé dans le hall du pavillon Ibrahima Diallo et quelques membres de son Dahira s’apprêtent à aller au restaurant central. Ils venaient juste de terminer leur séance de récital appelée wazifa qui se fait après la prière de timis (crépuscule).
Pour Diallo, président de la Dahira des étudiants Tidianes de Baye Niasse, la pratique religieuse ‘’n’entrave en rien’’ les études.
Vêtu d’un boubou traditionnel de couleur jaune, il affirme : ‘’Chaque chose en son temps. Notre pratique religieuse n’entrave en rien la bonne marche de nos études, au contraire’’.
Cet étudiant au département de lettres modernes assimile le Dahira à ‘’une école de formation. ‘’Il y a des choses qu’on n’apprend pas dans les amphis ; du coup la Dahira constitue une chance de se rattraper grâce à nos échanges’’, insiste Ibrahima.
Sur la question des rapports entre les différentes Dahiras au sein du campus social, Sémou Dabo, actuel ‘’’dieuwrigne’’ (responsable) du ‘’Daara sant sérigne Saliou bou wa keur Cheikh Béthio’’ rassure : ’’Nous entretenons de bonnes relations avec les autres Dahiras. Lorsque nous organisons nos activités, toutes les autres Dahiras sont représentées.’’
’’Pour nous, de la même manière que les études sont une obligation, la pratique religieuse aussi doit avoir sa part dans notre quotidien’’, soutient le trentenaire trouvé assis sur une natte non loin du Pavillon B.
Égrenant son chapelet, l’ancien étudiant au département de Droit estime que les Dahiras s’inscrivent dans le principe constitutionnel de la liberté de culte.
LE DÉFI DE RIGOBERT SONG AU QATAR
Celui que l’on considérait comme un « guerrier » sur le terrain lors de sa carrière de joueur saura-t-il faire oublier le fiasco du Mondial 2014 au Brésil pour les Lions indomptables ?
Rigobert Song sera sur le banc camerounais, au Qatar. Celui que l’on considérait comme un « guerrier » sur le terrain lors de sa carrière de joueur saura-t-il faire oublier le fiasco du Mondial 2014 au Brésil pour les Lions indomptables ? Un défi de taille pour l'ancien défenseur aux 137 sélections avec le Cameroun.
La vie de Rigobert Song est un roman. Son histoire : celle d’un gamin qui n’a pas connu son père et qui dès le plus jeune âge s’est épris pour le ballon rond. Il termine major de la première promotion de la célèbre école de football des Brasseries du Cameroun.
Adolescent, Rigobert Song signe en 2e division au Red Star Bangou, gagne un peu d’argent pour mettre du beurre dans les épinards et soutenir sa mère qui l’élève seule. À 16 ans, le jeune homme rejoint le Tonnerre de Yaoundé, un des plus grands clubs du pays. Il découvre la sélection dans la foulée, et joue sa première la Coupe du monde en 1994 aux États-Unis, à seulement 17 ans.
« Au Cameroun, les gens l’aiment pour son charisme et sa détermination »
Pendant presque deux décennies, Rigobert Song a porté le maillot des Lions indomptables. Il reste à l’heure actuelle le recordman des sélections avec les Lions indomptables (137). Rigobert Song est également le seul joueur à avoir disputé huit Coupes d'Afrique (avec deux victoires en 2000 et 2002) et personne sur le continent africain n'a joué autant de matchs de CAN que lui (36). « Il a été un très grand défenseur qui a évolué dans des grands clubs comme Liverpool. Il a toujours été un leader sur le terrain. Pour l’Afrique, c’est une icône », témoigne pour RFI Benjamin Moukandjo, capitaine des Lions lors de la victoire au Gabon lors de la CAN 2017.
Défenseur puissant et agressif, Rigobert Song est exclu à deux reprises en Coupe du monde avec après avoir vu rouge contre le Brésil à 17 ans, en 1994, pour son deuxième match, il écope de deux jaunes contre le Chili en 1998. Avec ses coéquipiers Samuel Eto'o (devenu son président, à la tête de la Fédération camerounaise) et Jacques Songo'o, il participe quatre fois au rendez-vous du Mondial (1994, 1998, 2002 et 2010).
DECES DE YOUSSOUF DIAGNE, ANCIEN PRÉSIDENT DE L’ASSEMBLÉE
Youssou Diagne, ancien président de l'Assemblée nationale, est décédé vendredi à l'âge de 84 ans. Youssou Diagne fut le septième président de l'Assemblée nationale. Il a succédé à Abdoul Khadre Cissokho au perchoir après la victoire des libéraux en 2001
Dakar, 18 nov (APS) - Youssou Diagne, ancien président de l'Assemblée nationale, est décédé vendredi à l'âge de 84 ans, a-t-on appris de plusieurs médias sénégalais.
Youssou Diagne fut le septième président de l'Assemblée nationale. Il a succédé à Abdoul Khadre Cissokho au perchoir après la victoire des libéraux aux législatives de 2001.
Ces derniers, avec leurs alliés, avaient auparavant accédé au pouvoir avec l'avènement de Me Abdoulaye Wade à la présidence de la République en mars 2000.
Son mandat a cependant été de courte durée et il va démissionner de son poste après des revers électoraux dans son fief de Ngaparou, dans le département de Mbour.
Il a débuté sa carrière professionnelle comme instituteur. Il s'est ensuite formé en gestion et en finance avant d'entamer une carrière au sein de la compagnie aérienne Air Afrique.
Après son départ de la présidence de l'Assemblée nationale, il est nommé ambassadeur en République de Chine (Taïwan), avant d'assumer, à son retour au bercail, la présidence du conseil d'administration de l'APIX, l'agence nationale chargée de la promotion des investissements et des grands travaux.
Le chef de l'Etat, Macky Sall, a réagi à sa disparition dans un message publié sur son comte twitter. Il a rendu "hommage à un homme disponible, généreux et d’une exquise courtoisie'', avant de présenter ses "condoléances émues à sa famille et à l’Assemblée nationale".
Selon des médias, le président de l’Assemblée nationale, Amadou Mame Diop, a fait observer une minute de silence en sa mémoire, en procédant vendredi à l’ouverture des débats pour le vote du budget du ministère de l'Urbanisme, du Logement et de l’Hygiène publique.