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14 juillet 2025
Par GUEYE Mouhammad Al Amine et LAM Abdoulaye
APPROCHE ISLAMIQUE DE GESTION DE CRISE
La complexité de ce début de gouvernance rappelle, dans une certaine mesure, le règne du Khalif Omar Ibn Abdoul Aziz (717 à 720) communément appelé, à juste titre, le 5e Khalif.
Gueye Mouhammad Al Amine et Lal Abdoulaye |
Publication 25/02/2025
L’année 2024 a été un tournant majeur dans la vie politique au Sénégal. En effet, elle a été le point de départ d’un nouveau régime, «antisystème», incarné par sa jeunesse et son ambition de faire face à la corruption qui gangrène l’administration publique en particulier et la société sénégalaise en général.
Conformément à la loi n°2012-22 du 27 décembre 2012 portant Code de transparence dans la gestion des finances publiques, le gouvernement du Sénégal a transmis à la Cour des comptes, pour audit, le rapport sur la situation des finances publiques sur la période de 2019 au 31 mars 2024. Les résultats de cet audit ont confirmé une situation alarmante des finances publiques et de leur gestion sous l’ancien régime, d’où la nécessité de mesures correctives urgentes.
Parallèlement, le front social demeure une épine qui transcende tous les secteurs et toutes les sensibilités. Cette situation nécessite de fortes mesures, coordonnées, efficaces et à même de régler durablement les maux visés, sans impacter fondamentalement le vécu des citoyens. D’où la complexité de ce début de gouvernance qui rappelle, dans une certaine mesure, le règne du Khalif Omar Ibn Abdoul Aziz (717 à 720) communément appelé, à juste titre, le 5e Khalif.
En effet, bien que son règne ne durât que moins de trois ans, il est reconnu, à travers le monde, les réformes sociales, politiques et religieuses du Khalif qui ont impacté toute la nation islamique de l’époque.
Pour rappel, Omar Ibn Abdoul Aziz avait hérité d’un Etat représenté dans les différentes contrées par des gouverneurs corrompus qui en ont dilapidé les ressources publiques. Confronté à une forte demande sociale et à des caisses vides, le Khalif eut recours aux mesures citées ci-contre :
Réduction drastique du train de vie de l’Etat ;
Réduction des privilèges des dirigeants et des membres de sa famille dont son épouse Fatima (fille ou sœur de précédents khalifs) ;
Instauration d’un dispositif pour lever les injustices subies par les populations par le passé (diwânoul mazâlim) ;
Nomination de technocrates (savants de l’islam ouverts à la gestion publique) à de hauts postes de responsabilité.
Pour un Etat d’obédience islamique, les 5 objectifs fondamentaux de la Sharia ont été le soubassement de ses réformes. En effet, ces principes qui visent à assurer le bien-être et l’harmonie au sein de la société musulmane sont basés sur la protection de cinq éléments essentiels de la vie humaine, à savoir :
La protection de la religion (liberté de pratique de la foi islamique, protection de la croyance et des rites religieux, promotion de la foi…) ;
La protection de la vie (préservation de la vie humaine, sécurité des individus…) ;
La protection de la propriété (la protection des biens matériels et financiers des individus, incluant l’interdiction du vol, de la fraude et des injustices économiques…) ;
La protection de la descendance (préservation de la famille, des mœurs et des relations légales entre hommes et femmes, protection des héritages…) ;
La protection de l’intellect (la préservation de la santé mentale et physique, protection contre les substances nuisibles pouvant altérer la capacité de raisonnement et la vie sociale).
De façon générale, l’objectif de l’islam en matière de gouvernance publique reste la préservation de la religion et l’administration de la société (cf. Imam Ali Ibn Mouhammad Ibn Habib Al Mawardy). L’histoire plutôt récente de l’Arabie saoudite, pays intégrant les principes de l’islam dans sa gestion publique, montre que des suspicions de dévaluation du riyal saoudien ont souvent perturbé la marche normale de son économie nationale. Il s’agit notamment de la crise pétrolière de 1986, la crise financière asiatique de 1997-1998, la chute des prix du pétrole en 2014-2016, la pandémie du Covid-19 (2020).
Durant ces périodes, les diverses contributions des investisseurs locaux, qu’ils soient privés ou publics, ont été cruciaux dans la gestion de la stabilité économique du pays et dans la réaction des populations face aux crises.
En guise d’illustration, différentes formes de contribution ont été notées lors de ces perturbations, notamment des mesures comme :
Le soutien à la liquidité et à la stabilité financière : en soutenant la demande d’actifs financiers locaux, en investissant dans les obligations d’Etat et en participant activement à l’achat de bons du Trésor, les investisseurs nationaux ont fortement contribué à maintenir la liquidité sur les marchés financiers saoudiens pendant la crise pétrolière de 2014-2016. Ces actions ont ainsi permis de compenser la réduction de la confiance des investisseurs étrangers dans l’économie saoudienne pendant ces périodes de turbulences.
La contribution aux programmes de diversification économique : dans le cadre de la mise en œuvre de la «Vision 2030», les entreprises privées saoudiennes et les groupes familiaux ont été les leviers stratégiques pour le financement des projets d’infrastructures. Ils ont également soutenu l’émergence de nouveaux secteurs comme la technologie, le divertissement et les énergies renouvelables, en augmentant leurs investissements dans ces domaines. Ces actions ont ainsi permis aux investisseurs nationaux de jouer un rôle-clé en soutenant l’initiative de diversification économique.
Le rôle dans les ajustements fiscaux et monétaires : les investisseurs nationaux ont été confrontés à des ajustements fiscaux avec l’introduction, en 2018, de la Tva. Bien que appréhendées comme difficiles, ces mesures, qui visaient à assurer la viabilité à long terme des finances publiques et de l’économie nationale, ont été acceptées et soutenues par les investisseurs nationaux, en perspective des avantages à long terme que la mesure pourrait offrir en termes de diversification économique. D’ailleurs, c’est ce qui les a même amenés à investir dans des projets privés ou dans des partenariats public-privé créés pour réduire le fardeau budgétaire de l’Etat.
Le rôle capital du secteur privé saoudien a même été noté dans des situations telles que les tensions géopolitiques et économiques (lors de la guerre du Yémen ou lors de la crise diplomatique avec le Qatar) où ils ont joué un rôle de stabilisateur en renforçant leur engagement dans des secteurs-clés de l’économie, comme le secteur financier et l’immobilier, afin de maintenir une certaine confiance dans les marchés locaux et ainsi aider à limiter la fuite des capitaux et soutenir la valeur des actifs nationaux.
Il est aussi important de rappeler les multiples situations où le Prophète Mouhammad, Paix et Bénédictions d’Allah sur lui, a initié des campagnes de levée de fonds. Il s’agissait de moments où le Prophète a demandé à ses compagnons de contribuer financièrement pour principalement soutenir des causes religieuses, humanitaires et sociales. Nous pouvons en noter :
Le financement de la mosquée de Médine lorsqu’il (Psl) sollicita des dons de la part de ses compagnons. A cet effet, certains ont même sacrifié leurs biens pour permettre la construction de ce lieu de culte.
L’affranchissement d’esclaves par l’opportunité offerte à certains d’entre eux de racheter leur liberté en payant une somme d’argent, soutenue par les dons des musulmans.
La campagne de la bataille de Tabouk qui est l’un des exemples les plus connus où le Prophète Mouhammad (Psl) a sollicité des contributions financières. En effet, en l’an 630, l’armée musulmane se préparait à une expédition contre les Romains, une mission coûteuse en raison de la longue distance et des ressources nécessaires. Le Prophète demanda à ses compagnons de faire des dons et des personnalités comme Abou Bakr (Ra) et Oumar Ibn Al Khattab (Ra) ont généreusement contribué, ce qui a permis de financer l’expédition.
A la lumière de ces expériences et constatations, il convient de formuler des pistes de solutions pouvant permettre d’éradiquer les contraintes économiques et sociales auxquelles sont confrontés les Sénégalais et contenir le choc des éventuelles réformes. Dans ce cadre, il est attendu de :
L’Etat :
De faire preuve d’une bonne gouvernance dans toutes les situations, et en cas de manquement à ce principe, de se corriger immédiatement. Dans cette même dynamique, il est aussi attendu de l’Etat, de veiller à une bonne communication afin d’inculquer cette philosophie de bonne gouvernance dans toute la société ;
De réduire à son strict minimum le train de vie de l’Etat et les avantages non liés au travail des dirigeants et autres travailleurs de l’Administration ;
Maintenir la transparence dans la mobilisation et l’utilisation des deniers publics afin de garantir une confiance permanente des populations et autres partenaires socioéconomiques ;
Lever les injustices commises sur des personnes physiques et morales (arriérés de salaire non versés, services offerts et non rémunérés…) afin d’assurer les investisseurs sur les diligences quant au règlement d’éventuels litiges ;
Instaurer une stratégie de communication permettant à toutes les parties prenantes de comprendre aisément les réformes enclenchées et de contenir les éventuels chocs qui n’auraient pas pu être évités ;
Instaurer un système de «tawzif» en ciblant des personnalités fortunées et les amener à contribuer au financement de l’économie par diverses formes (mécénat, prise de parts sociales/actions, rachats…) ;
Mette en œuvre des campagnes de levée de fonds à visée sociale ou économique avec des contributions à la portée de tous les Sénégalais pour financer, entre autres, le social, le projet de réforme du transport, la relance des boutiques/magasins de référence… ;
Mettre en œuvre les initiatives ayant prouvé leur efficacité dans la prise en compte des besoins des populations et conformes aux valeurs et croyances islamiques (zakat, waqf, microfinance islamique, Sukuk…).
Les grandes entreprises privées, les groupes familiaux, les bienfaiteurs :
Soutenir les initiatives publiques visant à améliorer le bien-être collectif dans le moyen/long terme ;
Participer à la correction des initiatives ne contribuant pas, dans le moyen/long terme, au bien-être collectif ;
Promouvoir l’innovation technologique, la formalisation des initiatives économiques quelle que soit leur ampleur (micro, petite, moyenne, grande) ;
Privilégier l’investissement et éviter la thésaurisation. Les mécanismes proposés par la finance islamique sont à même de contribuer à accélérer les collaborations d’investissements privé-privé et privé-public.
Les populations prises individuellement :
Faire preuve de patience et de don de soi pour la Patrie et entretenir un esprit de succès collectif ;
Accepter un changement de comportement aussi bien en matière de consommation, d’épargne qu’en matière d’éthique, de relation et de savoir-être ;
Se réapproprier les valeurs islamiques qui ont, par le passé, été incarnées par nos prédécesseurs. Le Prophète Mouhammad n’a-t-il pas dit : «La religion, c’est la bonne conduite» (Rapporté par Al-Bukhari et Muslim).
Les indicateurs macroéconomiques ont certes leur importance, mais ils ne doivent pas guider notre gouvernance. Assurer une meilleure qualité de vie aux populations, garantir leur prospérité et plus subjectivement leur bonheur devraient guider la planification et la mise en œuvre des politiques publiques. L’islam, à travers l’histoire et le contexte, a su démontrer par des leaders bien avertis, que chaque crise, de quelque nature qu’elle soit, peut être contenue, résolue et dépassée, tout en gardant l’équilibre social sous-tendu par le bien-être des populations et la solidité de l’Etat dans tous ses déploiements.
L’histoire de Youssouf (Paix et salut sur lui) est un exemple parfait de planification économique et sociale prenant en compte aussi bien le court terme que le long terme. L’expérience du Khalif Oumar Ibn Al Khattab (Ra), en matière de reddition des comptes, et le comportement de Abou Houreyra (Ra) dans cette épreuve sont aussi, de nos jours, de pertinentes sources d’inspiration. Les avancées notées pendant l’âge d’or de l’islam (du 6e au 12e siècle) illustrent parfaitement qu’avec le savoir, la droiture et l’unité autour d’un idéal, Allah accompagnera toujours ses serviteurs vers le succès.
Le Sénégal est à une trajectoire de l’histoire où se bousculent opportunités de développement et tensions (sociales, géopolitiques internes et externes). Conscient de cet enjeu, chacun devrait pouvoir y apporter sa contribution afin d’accompagner les dirigeants du pays, quelle que soit leur appartenance politique, à le mener vers le progrès. Toutefois, il ne saurait point négliger la dimension spirituelle que toutes les parties prenantes devront incarner sincèrement par les invocations de réussite (pour soi, son prochain et pour toute la communauté), la confiance au Tout-Puissant et le contrôle permanant du Tout-Sachant.
Par Moustapha FALL
LANTERNES SUR LA PROFONDEUR DE LA PSYCHE HUMAINE
Si les canons et fusils tuent, les violences verbales, les calomnies sont plus à même de tuer silencieusement de belles âmes que n’importe quelle autre arme blanche
La nouvelle de la mort subite du jeune étudiant, en l’occurrence Mactar Diagne, tombe comme un couperet, renvoyant des ondes de choc presque partout au Sénégal, et plongeant le monde universitaire sénégalais dans une profonde tristesse. Sa mort lève non seulement un coin du voile sur la problématique de l’accompagnement médical dans nos services médicaux universitaires, mais elle pose aussi de façon crue la question existentielle des sodalités humaines dans nos sociétés africaines. Le fameux proverbe africain, «il faut tout un village pour élever un enfant», n’est plus d’actualité au point de céder dangereusement la place au proverbe moderne du «village planétaire des réseaux sociaux» où se dé-font des modèles de solidarités humaines de façade. Alors que les enquêtes ne nous révèlent pas encore les circonstances dans lesquelles cet étudiant a rendu l’âme, force est de constater que l’œuvre posthume que Mactar lègue aux Sénégalais, s’il en est bien l’auteur principal, est une mine d’or psychologique et psychiatrique d’où il faut puiser pour mieux sensibiliser les Sénégalais sur les dangers des maladies mentales.
Cela dit, loin d’être un expert dans les domaines de la psychologie ou de la psychiatrie, cette contribution se fixe comme objectif principal le simple besoin de partager nos réflexions et lectures personnelles sur les dangers des maladies mentales qui, somme toute, peuvent être des handicaps majeurs dans le processus du développement personnel, de la réussite académique et professionnelle, et dans bien d’autres domaines touchant à la vie de l’être et de son épanouissement en société.
Il s’agit d’abord, dans cette contribution, d’éplucher les récentes études faites sur le sujet des maladies mentales pour dissiper les nuages mythiques qui planent sur elles, pour enfin analyser quelques extraits du texte posthume du disparu dans l’espoir d’en tirer des leçons utiles pour nous-même et pour nos autorités étatiques.
La dépression mentale : entre réalité et mythe
Les maladies mentales sont nombreuses et varient selon les contextes socio-culturels et en fonction des dispositions physiologiques et héréditaires. Parmi les maladies mentales, nous pouvons citer les troubles d’anxiété sociale généralisée, la bipolarité et autres formes de dépression chronique et saisonnière. En revanche, d’après les récentes études sur le sujet, la dépression mentale chronique semble bien être celle qui touche le plus d’individus et peut mener au suicide.
De l’australien Sigmund Freud (1856-1939), en passant par Joseph Breur (1842-1925), aux récentes études menées par Kassin et.al (2020) sur la psychologie sociale, les questions liées à la dépression mentale ne cessent d’être l’objet de débats houleux dans les milieux académiques. Nombreuses aussi sont les récentes productions scientifiques qui démontrent que les dépressions font partie des maladies mentales les plus répandues et les plus invalidantes dans le monde.
Dans son fameux livre publié en 2012 (la dépression : 100 questions pour comprendre et guérir), Dr Ferreri nous apprend aisément que la dépression mentale va devenir la deuxième pathologie la plus invalidante en 2020, après les troubles cardiaques, juste avant les accidents de la route. Dans le contexte français où sont inscrits ses travaux, près de 20% des Français de 15 à 75 ans, soit 9 millions de personnes, ont vécu et vivraient une dépression au cours de leur vie (Ferreri, 2012). Tel un caméléon qui prend les couleurs du paysage qu’il traverse, la dépression mentale est souvent comprise en fonction du contexte de son évolution et des dispositions physiologiques et héréditaires de la personne atteinte par cette maladie. En d’autres termes, la dépression revêt plusieurs formes suivant les contextes et les cultures, et se manifeste ainsi de plusieurs manières chez la personne dépressive. Or, l’une des plus grandes difficultés auxquelles et les psychologues et les psychiatres sont souvent confrontés, c’est la grille de lecture médicale qu’il faudra poser pour mieux diagnostiquer la personne dépressive. En sus, les formes d’émotions générales qui se manifestent chez l’individu, notamment «les coups de blues, de mou, de spleen ou de déprime», peuvent davantage en compliquer le diagnostic. Malgré tout, la littérature médicale produite sur ce sujet au cours des années a pu maintenir deux types de dépressions mentales principales. Une dépression de type saisonnier, temporaire, de courte durée, 6 mois, qui dépend des saisons, des évènements de vie secouée par les crises comme la perte d’un être cher, la séparation dans les relations d’amour, la maladie, etc. Il y a aussi la dépression de type chronique qui dure plusieurs années ou toute une vie. Cette dépression de type chronique est à chercher dans les évènements douloureux vécus dans l’enfance comme l’abandon parental (mère ou père), l’exclusion sociale, qui laissent des blessures psychiques profondes non-cicatrisées causant des signes extérieurs comme l’isolement, le souci d’être incomplet, le sentiment dérangeant et permanent d’être insignifiant ou pas assez bien, et le manque total de confiance en soi.
A ces signes extérieurs de la dépression mentale, s’y greffent également le manque de sommeil récurrent (ou trop de sommeil), des réveils nocturnes fréquents souvent rythmés par une incapacité de retrouver le sommeil la nuit, un désintérêt total aux choses de la vie souvent causé par le manque de sérotonine et autres substances chimiques neuronales dans le cerveau. Autres symptômes peuvent être des pensées noires et négatives sur soi qui sont subséquemment projetées sur les autres individus de la société, l’envie de mettre un terme à sa vie pour cause de souffrance psychique très profonde. Le désir ardent d’avoir du pouvoir et du contrôle sur autrui, qui est certainement révélateur d’une faiblesse intérieure déguisée en force. La personne dépressive pourrait aussi manifester une irritation spontanée d’humeur sombre fluctuant d’un instant à l’autre, un désir de blesser et d’être dans une logique de confrontation argumentaire tous azimuts. Bref, l’expression «Wounded Walking», que les psychiatres américains utilisent pour designer les personnes bien portantes mais souffrant profondément à l’intérieur, n’en est pas moins certainement le terme qu’il faut pour exprimer de façon laconique la profondeur du mal que constitue la dépression mentale.
A la lumière de tous ses succès académiques, tout porte à croire que le défunt, Mactar Diagne, se portait très bien, mais il fut un autre «Wounded Walking», une personne dépressive souffrante qui vécut dans le silence de son propre monde.
La dépression mentale dans la société sénégalaise : une maladie latente de tous les dangers
Le tabou qui entoure la maladie mentale dans la société sénégalaise continue d’entretenir le flou et le déni autour des maladies mentales en général. Pas mal de personnes atteintes par ces maladies sont souvent prises en charge à la dernière phase dans l’évolution de leur maladie, où elles perdent le contrôle de la réalité de leurs êtres. Tabou et/ou ignorance du fonctionnement du cerveau, me demanderais-je !
De toutes les façons, la prise en charge des maladies mentales demeure toujours le ventre mou de la médicine sénégalaise alors que les suicides, les meurtres vont crescendo dans la société sénégalaise. Il y a certes du tabou car dans l’univers mental de certains Sénégalais, la personne ayant une dépression mentale aiguë est simplement ce malade mental vêtu en haillons, déambulant dans les rues et ruelles, entretenant un discours décousu et perdant tout contact avec la réalité du moment.
Nonobstant ce tabou autour des maladies mentales, il faut remarquer qu’il y a aussi une forte dose d’ignorance sur le fonctionnement du cerveau humain. Les signes extérieurs d’une personne atteinte par la dépression mentale ne sont toujours pas visibles car la personne dépressive peut choisir de masquer sa souffrance par des rires. Et souvent ces rires, ce visage toujours souriant et radieux pourraient cacher les séquelles de blessures psychiques profondes qui se manifestent rarement en public mais surgissent par intermittence. Comme nous venons de l’indiquer ci-dessus, la manifestation extérieure corporelle de la souffrance mentale intérieure n’est pas toujours visible chez certaines personnes dépressives, mais une attention particulière à leurs comportements et leurs émotions fluctuantes peut révéler beaucoup de choses chez les personnes qui souffrent de dépression mentale.
De ce point de vue, en faisant référence à la personne atteinte par la dépression mentale, Eckhart Tolle identifie deux modes d’être : un être de souffrance latente et un être de souffrance active. Un être de souffrance latente peut être quatre-vingt-dix pour cent actif (Tolle, 2000). Autrement dit, une personne profondément malheureuse peut être active tout le temps. Ces personnes vivent presque entièrement de souffrance dans leur corps, tandis que d’autres personnes ne le ressentent même pas, sauf dans des situations où le corps de souffrance sort de son état latent par le simple fait d’une remarque déplacée, une pensée négative, bref un jugement quelconque sur leur personne. Ainsi, les propos du défunt Mactar sont-ils tout à fait en phase avec cette transition d’être de souffrance latente vers un être de souffrance active mettant fin à sa vie.
«[…] et ce qui est triste, c’est qu’il y a des personnes qui s’adonnent aux moqueries avec joie, sans mesurer les conséquences de leurs actes […]» (extrait de la lettre de Mactar Diagne, 11 février 2025).
Les propos ci-dessus de feu Mactar égrènent le chapelet de souffrances vécues, mais ils révèlent aussi sur le sujet qui crée lui-même le labyrinthe de son propre monde de réalité mentale dans lequel il a vécu seul, prisonnier et isolé du reste du monde, de la réalité des autres, traquant le moindre regard négatif de la société. Il est cependant plus facile de surveiller l’être de souffrance chez soi que chez les autres ; peut-être Mactar n’a-t-il pas pu apprendre cette leçon à temps.
Il est évident que nombreux sont les «Mactar vivants» qui restent aliénés par le regard de l’autre, se créant la souffrance mentale de vouloir agir sous les attentes de l’autre. Quelle souffrance sisyphéenne de vouloir toujours faire l’impossible, pour plaire, vivre heureux et agir aux dépens des «qu’en-dira-t- on» de la société ! La peur obsessionnelle d’être jugé et jaugé par les parents, par les amis et collègues est le début de tout le mal être qui peut faire sombrer la personne dans une dépression mentale profonde, avec de sérieuses conséquences de santé physique. A cette peur obsessionnelle, peut aussi s’y greffer le souci de grandeur que l’ego alimente par le mental pour toujours créer une démarche boulimique de gratification de l’ego dont la conséquence est un désir ardent de vouloir combler un trou vide de sentiment. Nombreux sont les Sénégalais qui courent après les biens matériels, l’argent, le succès et le pouvoir, la reconnaissance, une relation sociale pour se sentir validés, pour être plus complets. A leur grande surprise, même lorsqu’ils ont tout eu, ils constatent amèrement que ce vide est toujours présent. Bref, derrière le confort matériel se cache une souffrance mentale profonde que l’humilité et la foi seules peuvent combler. Telle une bougie qui se consume par la flamme pour répandre sa lumière, l’humilité se consume par l’ego pour répandre ses lumières de bonté naturelle, de pardon, de tolérance et de respect de la dignité humaine.
Quelles leçons faut-il en tirer ?
La mort de Mactar Diagne est une triste nouvelle, mais elle n’a pas été vaine. Au contraire, sa mort nous renvoie le miroir d’une société sénégalaise qui subit de profondes métamorphoses internes avec son lot de meurtres, de suicides et d’autres formes de violence verbale qui participent de façon significative à renforcer négativement le dispositif psychologique dont on ne tient pas souvent compte dans nos rapports sociaux. Si les canons et fusils tuent, les violences verbales, les calomnies sont plus à même de tuer silencieusement de belles âmes que n’importe quelle autre arme blanche : «la douleur physique, ce n’est rien, celle du cœur est infernale» dixit feu Mactar (texte posthume de Mactar Diagne, 11 fevrier 2025).
Il est temps donc qu’on suspende nos jugements sur les êtres le temps d’une découverte et que le dispositif psychologique soit bien pris en compte dans nos hôpitaux et services médicaux. La toute dernière phrase que le défunt laisse aux Sénégalais résume le mal profond dans la non-prise en compte du dispositif psychologique chez les personnes dépressives : «Peut-être ma mort ouvrira les yeux à certains étudiants et certaines familles. N’isolez personne, n’ignorez personne, ne vous moquez de personne, ne fuyez personne.
Rapprochez-vous des personnes qui s’isolent, parlez-leur et essayez de les comprendre sans les juger.»
En somme, il y a donc l’urgence pour les autorités étatiques de bien vouloir lancer, vaille-que-vaille, des campagnes saines de sensibilisation sur les maladies mentales au sein de toutes les communautés et dans toutes les langues nationales, encourager des études sur les filières de la psychologie et de la psychiatrie, et mettre à la disposition des hôpitaux et centres régionaux, des psychiatres et psychologues bien formés qui comprennent bien la psyché humaine. On n’a pas besoin d’être médecin pour savoir que le bon accueil des malades est le premier élément sur la chaîne des soins médicaux et dans la prise en charge des maladies en tous genres, surtout dans un Sénégal qui s’occidentalise de plus en plus.
VERS UNE ADMINISTRATION PLUS PROCHE DE CITOYENS
Le gouvernement est dans une dynamique de rapprocher l’administration des citoyens, a indiqué, lundi, à Louga, Ibrahima Baldé, coordonnateur du Programme d’appui à la modernisation de l’administration (PAMA).
Le gouvernement est dans une dynamique de rapprocher l’administration des citoyens, a indiqué, lundi, à Louga, Ibrahima Baldé, coordonnateur du Programme d’appui à la modernisation de l’administration (PAMA).
”L’administration ne doit pas être une entité distante des citoyens, mais un service construit avec eux et pour eux’’, a t-il dit.
Selon lui, ”la nouvelle dynamique de nos autorités, c’est de parler avec les citoyens destinataires de ces services et de pouvoir recueillir les préconisations, leurs attentes et les recommandations de ces différents acteurs pour construire ensemble l’administration de demain’’.
Ibrahima Baldé s’adressait à des journalistes à l’issue des concertations régionales consacrées à la reforme du service public.
Représentant le ministre de la Fonction publique, Olivier Boucal, il a insisté sur ‘’la nécessité d’une réforme participative, ancrée dans les réalités locales’’.
“Longtemps, les changements administratifs ont été pensés par des experts, sans associer suffisamment ceux qui sont au cœur du système: les citoyens et les agents publics sur le terrain”, a-t-il expliqué.
Selon lui, cette nouvelle dynamique vise à “écouter les préoccupations locales et construire ensemble une administration plus efficace et adaptée aux réalités du pays”.
‘’Cette initiative marque une rupture avec les approches traditionnelles, en impliquant directement les citoyens et les acteurs locaux dans la réflexion sur l’amélioration des services administratifs’’, a-t-il ajouté.
Il ne s’agit pas seulement de décréter le changement mais, d’évaluer la situation réelle des services publics, d’identifier les difficultés et de construire ensemble des solutions adaptées”, a souligné M. Baldé.
Autour du gouverneur et des autorités locales, élus, chefs de service et représentants de la société civile ont échangé sur les défis à relever.
‘’Le premier pas vers une réforme réussie, c’est d’accepter de s’asseoir et de discuter”, a insisté M. Baldé, plaidant pour ‘’une approche fondée sur le dialogue et la co-construction’’.
Le ministre de la Fonction publique, a-t-il dit, présentera les conclusions de ces échanges au Premier ministre avec un double objectif, à savoir un diagnostic clair et des solutions formulées par les acteurs de terrain.
‘’Il ne suffit pas de décréter le changement, il faut le bâtir avec ceux qui le vivent au quotidien”, a conclu Ibrahima Baldé
LE PRESIDENT DE LA FEDE PRESSE DE VOIR «SENGHOR» ROUVRIR SES PORTES
L’ouverture du Stade Léopold Sédar Senghor c’est pour bientôt. Une bonne nouvelle pour le football sénégalais, mais aussi pour l’athlétisme en manque de pistes fonctionnelles. Le président de la Fédération, Sara Oualy, savoure déjà.
L’ouverture du Stade Léopold Sédar Senghor c’est pour bientôt. Une bonne nouvelle pour le football sénégalais, mais aussi pour l’athlétisme en manque de pistes fonctionnelles. Le président de la Fédération, Sara Oualy, savoure déjà.
Au-delà des problèmes financiers que vit l’athlétisme sénégalais, il y a surtout le manque de pistes fonctionnelles. Dans une de ses sorties dans la presse, le président de la Fédération sénégalaise d’athlétisme (Fsa), Sara Oualy, abordant l’absence d’infrastructures que connaît cette discipline olympique, déclarait avant la fermeture du Stade Léopold Sédar Senghor : «On ne peut s’adonner à la pratique de l’athlétisme sans infrastructures. On parle ici de pistes fonctionnelles. Au niveau de Dakar, nous avions deux pistes, au Stade Iba Mar Diop et à Léopold Sédar Senghor. Des pistes qui sont dans un état de délabrement très avancé. Le Stade Léopold Senghor est d’ailleurs fermé pour être réhabilité et bientôt s’en suivra le Stade Iba Mar Diop pour les besoins des Jeux Olympiques de la Jeunesse (Joj).»
On imagine les «dégâts» causés après la fermeture du complexe des Parcelles Assainies pour réhabilitation, en août 2022. «En effet, on a beaucoup souffert avec la fermeture du Stade Léopold Senghor. Et récemment, c’était tour de Stade Iba Mar Diop où nous avions notre siège fédéral, de fermer ses portes en vue d’une réhabilitation pour les besoins des Jeux Olympiques de la Jeunesse (Joj) Dakar 2026. Du coup, on est devenus de vrais «Sdf». Vous imaginez donc toute cette galère qu’on a vécue», explique le patron de l’athlétisme sénégalais.
Des problèmes avec la Sogip pour la piste de l’annexe Abdoulaye Wade
Comme alternative, il y a la piste annexe du Stade Abdoulaye Wade de Diamniadio. Mais là aussi, il y a problème, selon le président Sara Oualy. «C’est une bonne piste. Mais souvent on a des problèmes avec la Sogip, et son Dg Dame Mbodji qui nous exige des sommes importantes pour l’organisation des compétitions de Ligue. D’ailleurs, il y a deux semaines, on a voulu y organiser une compétition, mais finalement ce n’était pas possible faute de moyens pour payer la location.»
Avec toutes ces difficultés liées à la pratique de l’athlétisme au Sénégal, on devine le soulagement de ses dirigeants suite à l’annonce de l’ouverture du Stade des Parcelles Assainies pour bientôt. «Ah c’est sûr, c’est une très bonne nouvelle, surtout avec les problèmes que rencontrent nos athlètes. Là nous aurons une piste de dernière génération, de 9 couloirs. D’ailleurs, le directeur du stade m’a invité à venir visiter la piste. Nous espérons aussi qu’après avoir perdu notre siège au Stade Iba Mar Diop, on va nous y allouer un espace pour notre Fédération.»
L’accessibilité du Stade Senghor, l’autre avantage
L’autre avantage, c’est l’accessibilité du Stade Léopold Senghor, selon notre interlocuteur. «Vous savez qu’il n’est pas facile d’aller à l’annexe du Stade Abdoulaye Wade, à Diamniadio. Et avec le Stade Léopold Senghor, ce problème ne va plus se poser. Donc vraiment on est pressés de voir le Stade Senghor rouvrir ses portes.» Pour rappel, lors de sa dernière visite de chantier, en octobre dernier, la ministre en charge des Sports, Khady Diène Gaye, avait exprimé sa satisfaction quant à l’avancement des travaux, confirmant dans la même foulée que la livraison du stade, réhabilité par les Chinois, est prévue «pour avril 2025».
Par Mohamed GUEYE
VIVEMENT L’ÈRE DES AFFAIRISMES PATRIOTIQUES !
Dans leur nouvelle croisade contre l’affairisme d’Etat, le Premier ministre et son gouvernement n’hésitent pas à priver des entreprises sénégalaises de marchés acquis bien avant le changement intervenu dans le pays le 2 avril 2024
Il y a une dizaine de jours, le Premier ministre, ouvrant le Forum des Pme, affirmait haut et fort que «l’affairisme d’Etat, c’est terminé» ! M. Ousmane Sonko a déclaré vouloir combattre les «pratiques qui ont longtemps eu cours dans ce pays, où une partie du secteur privé s’est enrichie grâce à des surfacturations sur des marchés attribués sans transparence, en entretenant des relations privilégiées avec les pouvoirs publics».
De l’autre côté, le chef du gouvernement a annoncé préparer un projet de loi sur le patriotisme économique, qui vise à protéger et promouvoir les entreprises nationales, «en garantissant les conditions équitables pour leur développement».
Quand on voit la situation générale des entreprises nationales de ce pays, on peut être assez surpris d’entendre un discours pareil sortir de la bouche de l’autorité la plus autorisée du pays. Rien que de par ses fonctions antérieures, Ousmane Sonko peut se prévaloir de bien connaître les entreprises de ce pays, ainsi que leur mode de fonctionnent. On se rappelle qu’étant encore fonctionnaire de la Direction générale des Impôts et domaines (Dgid), il s’est taillé une réputation de justicier de nos finances publiques en dénonçant les entreprises qui ne s’acquittaient pas de leur devoir civique de contribuables, ou qui trouvaient le moyen d’y échapper. Cela avait même fini par le faire radier de la Fonction publique.
Sur ce point-là, on peut donc se féliciter de l’entendre faire sa déclamation. On a plusieurs fois eu l’occasion de se rendre compte de l’effet néfaste de la corruption dans les marchés publics. Beaucoup de Sénégalais ont eu à déplorer l’état de certaines routes qui, à peine livrées, présentent des crevasses avant même les premières pluies. Plein de chefs d’entreprise ont vu des marchés leur passer sous le nez pour n’avoir pas su trouver la bonne combinaison afin d’ouvrir les portes d’accès auxdits marchés.
Néanmoins, si une loi destinée à la promotion du patriotisme économique peut s’avérer nécessaire, elle ne pourrait être efficiente que par la volonté de personnes chargées de sa mise en œuvre. Si des personnes couvertes du manteau élimé «d’hommes d’affaires» ont pu prospérer dans ce pays, en gagnant des marchés de tous ordres, on a par contre plus souvent noté les revendications d’entrepreneurs sénégalais qui ne comprenaient pas pourquoi ils n’étaient même pas reconnus lors d’appels d’offres sur certains marchés. A plusieurs reprises, le président du Cnp, Baïdy Agne, s’est plaint que l’Etat ne songe à son secteur privé que dans des secteurs où il y a plus de coups à prendre, pour l’oublier au profit de l’étranger quand il s’agit de marchés juteux. La preuve, au moment où on se félicite de l’exploitation du pétrole et du gaz, combien de sociétés sénégalaises ont-elles été agréées par les compagnies exploitant ces hydrocarbures, dans le cadre de leur «Local content» ? Pourtant, on se vante que la loi sur le Contenu local du Sénégal est l’une des plus élaborées. Que fait l’Etat pour veiller à son application réelle ?
Dans leur nouvelle croisade contre l’affairisme d’Etat, le Premier ministre et son gouvernement n’hésitent pas à priver des entreprises sénégalaises de marchés acquis bien avant le changement intervenu dans le pays le 2 avril 2024. On a le sentiment à les voir faire, que le postulat est que tout ce qui a pu prospérer avant l’arrivée au pouvoir du «Projet» ne pourrait qu’être malhonnête. Pourtant, quand Sonko a été radié de la Dgid, il a monté un cabinet d’affaires, qui a pu prospérer dans les conditions de l’époque, en dépit de sa casquette politique. Aurait-il été le seul Sénégalais honnête dans son domaine ?
Cela est d’autant plus difficile à croire quand on voit les personnalités qui gravitent autour de nos nouveaux dirigeants, dont certains ont été des piliers économiques des régimes passés. Tout le monde a entendu Pierre Goudiaby Atepa se féliciter d’avoir présenté en Chine, Aliou Sall, frère de Macky, à Franck Timis, qui cherchait alors un Sénégalais capable de représenter ses intérêts au Sénégal. A l’époque, Macky Sall n’était déjà plus au pouvoir, soit dit en passant.
L’architecte-ingénieur Atepa, Conseiller du président Wade, nous a « offert » le Monument de la Renaissance, qui a eu pour conséquence une dation en paiement de 50 milliards de Cfa, et le morcellement des terres de l’aéroport Léopold Sedar Senghor. Dans des conditions non encore vraiment élucidées à ce jour…
Le même Atepa est aujourd’hui un des plus proches membres de la sphère au pouvoir. Que ne lui-a-t-on pourtant pas reproché en ce qui concerne ses méthodes en affaires, de l’époque de Abdou Diouf jusqu’à Wade ?
De l’autre côté, dans la suspicion d’affairisme - surtout d’Etat -, des Sénégalais sont intimés de justifier leur patrimoine illico presto. Personne ne devrait trouver à redire à cela, si tout le monde était convaincu d’être logé à la même enseigne. Cela ne semble malheureusement pas encore le cas. Et surtout, au moment où le pays devrait bruire de projets d’investissements et de création d’emplois à la suite de l’exploitation de nos hydrocarbures, on a le sentiment de retomber aux pires périodes des programmes d’ajustement structurel chers à Abdou Diouf
La raison en est qu’au lieu d’envoyer un message rassurant et de permettre aux entrepreneurs de prendre des risques et d’investir, on donne l’impression de vouloir les brimer et les contraindre à aller chercher fortune ailleurs, ou à mettre leurs billets de banque dans des matelas. Le but est-il d’écarter ceux qui étaient là afin de faire de la place à des «investisseurs patriotes» ? Il n’y aurait rien de mal à cela, si ces gens permettaient réellement à l’économie de redémarrer et au pays de reprendre sa vitesse de croisière.
La police et gendarmerie interpellent 1 238 individus
La police et la gendarmerie patrouillent ensemble dans le cadre de la lutte contre la délinquance. L’opération conjointe du week-end a permis d’interpeller 1 238 individus. Les forces de défense et de sécurité ont mis la main sur 527 personnes dans la nuit du vendredi 21 au samedi 22 février 2025 et 711 autres interpellations dans la nuit du samedi 22 au dimanche 23 février 2025. Elles ont saisi également de la drogue et des pièces de véhicules et motos. Adama Fall en prison Le procureur de la République a finalement scellé hier le sort du militant de l’Alliance pour la République (Apr). Après avoir passé le week-end en garde à vue, Adama Fall a été déféré hier au parquet pour diffusion de fausses nouvelles. Il a été envoyé en prison. Adama Fall sera jugé le mercredi 26 février en flagrants délits. Seulement le ministre du Travail, de l'Emploi et des Relations avec les Institutions, Abass Fall a corsé son dossier. Il a déposé hier, une plainte contre Adama Fall pour diffusion de fausses nouvelles.
Le procès de Macky Amar et Cie renvoyé au 3 mars
L'affaire Macky Amar et ses coprévenus a été appelée hier, devant la barre des flagrants délits de Dakar. Le dossier n'a pas été débattu dans le fond. L'audience a été renvoyée au 3 mars prochain. Pour cause, Macky Amar qui a bénéficié d’une mise en liberté provisoire est souffrant. L'annonce a été faite par son avocat Me Souleymane Soumaré qui a tenté de justifier l’absence de son client en brandissant un certificat médical. Pour rappel, Macky Amar est poursuivi pour détention et usage de chanvre indien. Il est reproché à sa copine, Aminata Seck qui est sous mandat de dépôt, des faits de facilitation. Quant à son ami Mamadou Lamine Diédhiou qui est aussi en détention, il est poursuivi pour offre et cession de drogue.
44 Directeurs d'établissements de santé en conclave à Thiès
44 directeurs d'établissements publics de santé du Sénégal ont bouclé une rencontre de 5 jours à Thiès. C'était pour passer en revue l'ensemble des problèmes de gouvernance de ces structures, notamment la prise en charge, la gestion des prises en charge, l'amélioration de la qualité des soins. Des difficultés ont été relevées dans la prise en charge de la santé de la mère et de l'enfant, consécutivement à l'insuffisance du nombre de lits. Selon Dr Fatou Mbaye Sylla, Directrice générale des établissements publics de santé, dans les 44 établissements, il n'y a qu'un peu plus de 4 000 lits installés. Il s'y ajoute que les ratios en matière de lits d'urgence sont aussi très faibles. La même situation est notée au niveau de la réanimation, du nombre de couveuses. Donc pour elle, il urge de renforcer les équipements, surtout au niveau des zones les plus périphériques. En ce qui concerne la transplantation, elle affirme qu'elle a démarré avec l'hôpital militaire de Ouakam, qui a fait un exploit. Il s'agit maintenant d'être dans la dynamique de continuité, c'est ainsi que certaines structures sont dans la préparation, notamment l'hôpital Cheikhoul Khadim de Touba, l'hôpital Dalal Jamm et dès le mois d'octobre, l'hôpital Idrissa Pouye réalisera sa première transplantation.
Foire de l'elevage à Mekhe
Membre de Pastef/ Les Patriotes et responsable du parti à Mékhé, Dr Yoro Diagne est récemment promu Directeur de l'hôpital Mame Abdoul Aziz Sy Dabakh de Tivaouane. Il porte l'ambition de relever les défis, dans une structure hospitalière marquée ces dernières années par de tristes faits divers, il s'agit notamment de l'incendie qui avait emporté 9 nouveau-nés, mais aussi de la marche des populations pour dénoncer la négligence dans la prise en charge d'un accidenté qui avait finalement rendu l'âme. Dr Yoro Diagne a consacré sa première sortie publique à sa ville de Mékhé où il était ce week-end, le parrain de la foire des éleveurs. Selon lui, cette activité est en parfaite adéquation avec son ambition d'accompagner la vision du président de la République Bassirou Diomaye Faye et de son Premier Ministre Ousmane Sonko, allant dans le sens du développement des territoires qui, à ses yeux, ne doit pas être uniquement l'affaire de l'État, mais requiert la contribution de tout le monde. C'est pourquoi, même avant qu'il ne soit nommé à ce poste, Dr Yoro Diagne était très connu à travers des actions sociales à Mékhé et environs.
Deux artisans au chevet de l’hôpital de Saint-Louis
A l’hôpital régional de SaintLouis, les patients et leurs accompagnateurs avaient de sérieux problèmes pour avoir où s’asseoir. Les chaises sont défectueuses. Ainsi, un soudeur mis au courant de cette situation a pris la décision de les réparer. Il s’est rendu au sein de l’institution sanitaire pour les réparer au grand bonheur de la direction et des populations. Ce geste de solidarité et d’engagement citoyen de Mamadou Ndiaye et Assane Sèye, deux soudeurs métalliques de SaintLouis, a été rétribué. Le directeur de l’hôpital a salué cette initiative citoyenne qui illustre parfaitement l’esprit de solidarité et de service à la communauté. Il a remis aux soudeurs une lettre de remerciement officielle et a souligné l’importance de telles actions pour le bon fonctionnement des structures publiques. En guise de récompense pour leur générosité, la mutuelle sociale nationale des artisans du Sénégal qui ne veut pas être en reste, a décidé d’enrôler les deux soudeurs ainsi que leurs familles pour une prise en charge sanitaire d’une année complète.
Vive altercation à Mbeubeuss
La journée a été mouvementée, hier à la décharge d'ordures de Mbeubeuss. En effet, des heurts se sont produits entre forces policières et certains jeunes récupérateurs opposés à leurs déguerpissements. Ce qui a causé de sérieux préjudices aux riverains du lac Mbeubeuss qui vit sous la pollution avec le rejet de gaz toxique. Nonobstant cette opposition brutale, les récupérateurs qui en veulent au régime promettent de continuer la résistance populaire jusqu’à l'obtention d’un gain de cause. Ils réclament le maintien de leurs acquis.
Franc et Ama Baldé suspendus par le CNG
Le CNG a tranché dans l’affaire de la bagarre entre Ama Baldé et Franc, lors de la signature du contrat à la 2Stv. Convoqué vendredi dernier pour audition après leur combat du 16 février, Franc avait répondu à la convocation en compagnie de son manager. Ama Baldé était absent mais son manager Abdou Bakhoum y était. Ainsi, ce lundi, la Commission règlement et discipline du CNG a rendu son verdict sur cette affaire. Le lutteur des Parcelles assainies François Emile Gomis dit Franc a écopé d’une suspension de trois mois dont un mois ferme, alors que le fils de Falaye est suspendu jusqu’à comparution avec confiscation de son reliquat.
Découverte macabre
Un corps sans vie. Il s’agit de celui de D. Diouf. Le gendarme qui habitait Dalifort a été retrouvé hier mort dans sa chambre. Alertés, les sapeurs-pompiers informés se sont déplacés sur les lieux pour les besoins de l'autopsie. Pour cet effet, le corps du défunt a été évacué dans un hôpital de la place. Selon nos sources, une enquête a été ouverte suite à une réquisition du Commissariat d'arrondissement de Pikine.
Trafic de chanvre indien et d'ecstacy
Récupérateur d'ordures, I. Sall est actuellement dans les liens de la détention. Le quidam a été arrêté au niveau du stade Léopold Sédar Senghor avec une vingtaine de cornets de chanvre indien et d'ecstasy par les hommes du Commissaire Abdou Sarr dont ceux de la Brigade de recherches en patrouille dans le secteur. Le quidam récidiviste, une fois déféré pour détention de chanvre indien, a été finalement renvoyé à la citadelle du silence au terme de sa garde à vue pour détention et trafic de chanvre indien et d'ecstasy.
Détention et usage de chanvre
Vigile de son état et adepte du chanvre indien, B Camara âgé de 57 ans a eu la malchance de tomber sur une patrouille policière au moment où il était venu se ravitailler à la Cité Damel au niveau d'un site dénommé Kamb bi. Il a été retrouvé par devers lui un cornet de chanvre indien. Ce qui va motiver sa conduite en garde à vue et son défèrement au parquet pour détention de chanvre indien aux fins d'usage.
Fuite de gaz au GTA
C’est une information que nous avons appris du côté de nos confrères mauritaniens du Journal Le Quotidien de Nouakchott. Une fuite de gaz a été détectée, le mercredi 19 février 2025, selon eux, sur le puits A02 du projet Grand Tortue Ahmeyim (GTA). Une information confirmée à nos confrères par la Directrice de la Communication de BP, Rachel Kelly. Cette fuite demeure limitée et sans impact immédiat sur les activités en cours du projet. La BP assure que la situation est sous contrôle et que la sécurité des travailleurs ainsi que la protection de l’environnement restent une priorité absolue. L’impact environnemental est jugé négligeable. D’ailleurs, l’analyse technique en cours indique que le taux d’émission de gaz est faible et que la composition du gaz et des condensats ne présente pas de risque significatif pour l’environnement. Une surveillance continue est mise en place pour suivre l’évolution de la situation.
Un «coxeur» chute mortellement d’un bus à Kolda
Un « coxeur», nom communément donné aux rabatteurs qui dirigent les clients vers les cars ou les taxis, a chuté mortellement d’un bus, tôt lundi matin, à la sortie de la ville de Kolda, a appris l’Aps de source sécuritaire. Le chauffeur du bus avait démarré en trombe afin d’éviter de payer une commission au rabatteur âgé d’une trentaine d’années, a expliqué la même source. Ce dernier, originaire du quartier Bouna Kane de Kolda, s’est alors lancé à la poursuite du véhicule. Après l’avoir retrouvé à la sortie de la ville, il est monté à son bord pour réclamer son dû. C’est en descendant du bus qu’il est tombé, alors que celui-ci roulait à vive allure, explique la même source. Le drame est survenu entre 4h et 5h du matin. Le corps de la victime a été acheminé au centre hospitalier régional de Kolda par des sapeurs-pompiers, en présence d’agents de la police. Le chauffeur a été arrêté pour homicide involontaire et sera déféré au parquet, dans les prochaines heures.
Les 20 membres du conseil du «new deal technologique»
Le ministère de la Communication a mis en place une équipe pour le conseil national du «New Deal». Il s’agit de Moustapha Cissé, spécialiste en intelligence artificielle, Oumar Cissé, Directeur général de InTouch, Hamidou Dia, Vice-président de Solution Ingénieur cloud, Ibrahima Nour Eddine Diagne, administrateur général de Gaïndé 2000, Nafy Diagne, Directrice de la stratégie et de la transformation chez Yas Sénégal, Momar Diop, président de Sens start up, Sidy Diop, associé chez Deloitte, Isidor Diouf, directeur général de Sénégal numérique Sa, Assane Guèye, spécialiste en Cyber sécurité, Ndèye Absa Gningue, responsable de l’innovation numérique à la banque de développement (Bad), Fatou Sow Kane, Directrice générale Expresso Sénégal, Mouhamed Mbengue, associé et Pdg de Grant Thornton Technologies, Aminata Ndiaye Niang, directrice générale adjointe de la Sonatel, Basile Niane, directeur général de Social net link, Antoine Ngom, président de l’organisation des professionnels des TIC, Mame Mame Fatou Wone, ingénieure en question et système d’information, Coura Tine, directrice régionale Wave, Dahirou Thiam, directeur général de l’Artp et Meïssa Tall, directeur général KPMG Afrique chez KPMG, Baïdy Sy, spécialiste transformation numérique à la Banque mondiale.
LE TANDEM MAROC-SÉNÉGAL RÉVOLUTIONNE LE SEPTIÈME ART AFRICAIN
L'avenir du cinéma africain se dessine peut-être entre Casablanca et Dakar. La récente moisson de prix internationaux récoltée par des films issus de cette collaboration révèle l'émergence d'une puissance créative insoupçonnée
(SenePlus) - La collaboration cinématographique entre le Maroc et le Sénégal s'affirme comme une alliance particulièrement fructueuse, donnant naissance à des œuvres remarquées et saluées lors de festivals internationaux prestigieux. Cette coopération, initiée aux Ateliers de l'Atlas du Festival International du Film de Marrakech, illustre selon Le Desk, la une nouvelle dynamique du cinéma africain contemporain.
Deux films issus de cette collaboration maroco-sénégalaise ont récemment été distingués dans des festivals majeurs. "Ne réveillez pas l'enfant qui dort" de Kevin Aubert a été "récompensé par le Prix spécial du jury international du meilleur court-métrage dans la section Generation 14plus à la 75e édition du Festival international du film de Berlin". Ce premier film du réalisateur, produit par Chloé Ortolé de Tangerine Production et co-produit par La Luna Productions et les Free Monkeyz de Casablanca, impressionne par sa maîtrise formelle.
Le Desk souligne la "rigueur chirurgicale" de la mise en scène d'Aubert, "où chaque mouvement de caméra semble pensé pour traduire l'enfermement intérieur de Diamant, son héroïne". Le film raconte l'histoire de cette adolescente dakaroise de 15 ans qui "aspire à devenir cinéaste" mais qui, "confrontée aux attentes familiales qui divergent de ses ambitions, [...] choisit une forme de résistance silencieuse en plongeant dans un sommeil profond et inexplicable".
Parallèlement, le journal met en avant "Wamè", réalisé par Joseph Gai Ramaka et produit par Yanis Gaye de Gorée Cinéma, qui a remporté le Prix étudiant au Festival international du court-métrage de Clermont-Ferrand. Décrit comme "une œuvre hypnotique en noir et blanc qui plonge dans les profondeurs de la mémoire collective africaine", ce film "impose son univers sensoriel" dès les premières images, avec "des silhouettes d'hommes ramant jusqu'à l'épuisement, des visages marqués par l'effort et le sel, un océan tour à tour protecteur et menaçant".
Le journal précise que Ramaka "s'inspire des mythes lébous pour inscrire son film dans une temporalité suspendue, entre la tragédie du passé et l'urgence du présent", avec en arrière-plan "la mémoire du massacre de Thiaroye en 1944 [qui] plane sur le récit, comme un spectre silencieux dont la résonance tragique habite chaque plan".
Un élément déterminant de cette collaboration réside dans la post-production des deux films, réalisée à Casablanca au sein de Free Monkeyz, structure dirigée par Julien Fouré et Youssef Barrada. Selon Le Desk, "les réalisateurs et leurs équipes ont passé plusieurs semaines au Maroc, collaborant étroitement avec des professionnels locaux pour peaufiner le montage, le son et l'étalonnage de leurs œuvres".
Julien Fouré souligne l'importance stratégique de cette démarche : "Il est crucial de développer les compétences locales pour que le Maroc devienne un acteur incontournable dans la région. Le Maroc dispose d'infrastructures compétitives et peut offrir des conditions attractives pour les productions du continent. Si nous renforçons notre coopération avec d'autres pays africains, nous pourrons créer un réseau solide pour la post-production".
Cette approche vise notamment à "fournir des services de post-production compétitifs en Afrique, afin de retenir les talents et les financements sur le continent, et d'éviter que les subventions allouées ne soient dépensées à l'étranger", explique la publication.
Ces succès s'inscrivent dans une dynamique plus large portée par le collectif Yetu (Un)Limited, une plateforme fondée en 2024 par des producteurs africains, dont Yanis Gaye et Chloé Ortolé, les producteurs des deux films primés. D'après Le Desk, ce collectif "vise à promouvoir une narration authentique et diversifiée du continent, en mutualisant les ressources et en partageant les expériences pour développer des projets ambitieux".
Le journal souligne que "Yetu se distingue par son modèle d'entreprise durable et ses processus créatifs endogènes, répondant aux besoins d'un public africain, diasporique et international en quête de récits cinématographiques authentiques".
Les distinctions obtenues par ces deux films dans des festivals internationaux majeurs "soulignent l'efficacité et la pertinence de la co-production entre le Maroc et le Sénégal", conclut Le Desk. Ces succès démontrent que "l'alliance entre les talents africains et des structures collaboratives comme le collectif Yetu peut ouvrir de nouvelles perspectives pour le rayonnement du cinéma africain sur la scène mondiale".
À travers cette collaboration exemplaire, conclut l'article, "cette génération de cinéastes et de producteurs construit un cinéma où la mémoire et le présent dialoguent, où l'expérimentation formelle devient un moyen d'explorer des réalités complexes, et où le Maroc et le Sénégal continuent de tisser, ensemble, des liens cinématographiques riches et durables."
Par Babacar FALL
UNE CÉLÉBRATION SOUS LE SIGNE DE LA SOUVERAINETÉ ALIMENTAIRE
Mardi 25 février 2025, le ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation et l’Institut d’Enseignement supérieur Professionnel (ISEP) de Thiès célèbrent le Professeur Abdoulaye Ly, parrain de la première génération d’institutions
Mardi 25 février 2025, le Ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation et l’Institut d’Enseignement supérieur Professionnel (ISEP) de Thiès célèbrent le Professeur Abdoulaye Ly, parrain de la première génération d’institutions publiques initiées en 2013 pour contribuer à la diversification de l’offre de formation supérieure professionnelle. Signe des temps ou coincidence, c’est cette même année que Abdoulaye Ly nous a quitté pour rejoindre le Créateur, Tout Puissant ! C’était le 31 mai 2013. Il avait alors 94 ans. C’était au terme d’une vie bien remplie et toute entière consacrée au Sénégal, à l’Afrique et à la communauté scientifique. C’est 11 ans après sa disparution que les autorités du pays l’ont choisi pour être le parrain de l‘ISEP de Thiès. A l’occasion de son 106e anniversaire, le Ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation effectue le déplacement à Thies pour présider la première cérémonie d’hommage au Professeur Abdoulaye Ly et ainsi marquer la sollennité de la reconnaissance que le Président Bassirou Diomaye Diakhar Faye et le Premier Ministre Ousmane Sonko tiennent à exprimer au parrain de l’Institut Supérieur d’Enseignement Professionnel de Thiès. C’est là un signe important de la volonté des nouvelles autorités du pays de porter très haut les valeurs de patriotisme, de compétence, d’engagement au Sénégal, et à l’Afrique qu’a incarnées le Professeur Abdoulaye Ly, historien, leader politique panafricaniste.
En rapport avec la forte volonté des nouvelles autorités du Sénégal de jetter les bases d’une politique de souveraineté alimentaire, l’ISEP Abdoulaye Ly de Thiès a choisi de convier des experts pour animer la conférence sur le thème: “Abdoulaye LY : Eclairage sur la paysannerie - Enjeu de la souveraineté alimentaire au Sénégal.” L’objectif est de faire ressortir les leçons majeures à tirer des réflexions de Abdoulaye Ly et des expériences des politiques de développement rural au Sénégal et ailleurs en Afrique et dans le Monde pour offrir un socle à l’ambition affichée de réaliser la souveraineté alimentaire à l’horizon 20250. Dans le sillage de cet hommage, il apparait important de partager avec le lectorat le parcours de cet intellectuel engagé, de ce leader panafricaniste radical et de ce penseur de la dissidence longtemps confiné dans la pénombre.
PARCOURS DE RÉSILIENT
Né le 25 février 1919 à Saint-Louis du Sénégal, Abdoulaye Ly a fait ses études coraniques, primaires et secondaires dans sa ville natale et à Dakar, alors capitale de l’Afrique occidentale française. Il a fréquenté les Cours secondaires de Dakar. Après l’obtention du baccalauréat, en 1938, il poursuivit ses études supérieures en histoire à l’Université de Montpellier, en France. Avec l’éclatement de la Deuxième Guerre mondiale, en 1939, et en sa qualité de citoyen français, il fut appelé sous les drapeaux et a vécu l’expérience de la guerre. Après cet épisode, le Sergent Abdoulaye Ly a fait partie des troupes envoyées au Maroc où il resta deux années. Cette mobilisation lui a valu quatre années d’interruption de ses études
Démobilisé en 1943, Abdoulaye Ly reprend ses études d’histoire. Il obtient la licence d’enseignement à l’Université de Montpellier avant de s’inscrire à l’Université de la Sorbonne pour y préparer le diplôme d’études supérieures d’histoire. En février 1946, il fait accepter le sujet « La Compagnie du Sénégal de 1673 à 1696 » dans le cadre de la préparation de sa thèse de doctorat d’État ès Lettres. Dès lors, il partage sa vie entre l’action militante et la recherche académique, parcourant les services d’archives des villes portuaires de France (Marseille, Bordeaux, La Rochelle, Nantes, Saint-Malo, Le Havre, Rouen, Dunkerque, Dieppe), et de l’océan Indien (Port Louis) pour collecter les matériaux sur la traite négrière et rédiger sa thèse.
En 1951, il fut recruté par l’Institut Français d’Afrique Noire (IFAN). Il commence alors une brillante carrière de chercheur doublée de celle d’un homme politique de gauche. Fondateur et conservateur du Musée Historique de l’Afrique occidentale française (AOF) à Gorée, avant celui de la place Sowéto, il fut en 1955 Directeur adjoint de l’IFAN depuis 1955. C’est en 1977 qu’il a pris sa retraite en 1977. Sa présence à l’IFAN n’a été interrompue que par l’exercice des fonctions ministérielles entre 1957 et 1958 comme ministre de la Production et entre 1966 et 1970 au titre de ministre de la Santé et de l’Action sociale.
HISTORIEN DE LA TRAITE NÉGRIÈRE
En 1955, Abdoulaye Ly soutient sa thèse « La Compagnie du Sénégal ». Il est alors le premier sénégalais titulaire d’un doctorat d’État en histoire. Sa thèse étudie l’évolution du commerce de la Sénégambie du XVIIe au XVIIIe siècles. Il y met en évidence le rôle privilégié joué par la Compagnie du Sénégal dans la traite négrière et les formes de connexion entre l’histoire mondiale et l’histoire africaine. Il s’est attelé à déconstruire les codes multiséculaires du trafic atlantique de sucre et d’esclaves noirs qui caractérise la connexion des continents au profit de l’Europe mercantiliste. Son ouvrage magistral s’inscrit dans la même dynamique que les travaux de l’école de la dépendance et explique, en partie, les maux dont souffre le continent noir. Il préfigure les études sur l’histoire globale du continent africain.
C’est Abdoulaye Ly qui déblaie le terrain aux travaux de Samir Amin sur les relations entre Centre et Périphérie et de Walter Rodney sur « How Europe Underdeveloped Africa » (1972). Ses publications ont également servi de balises aux travaux des historiens Boubacar Barry, auteur de Le royaume du Waalo Le Sénégal avant la conquête (1972) et Abdoulaye Bathily, auteur du livre intitulé Les Portes de l’or Le royaume de Galam (Sénégal), de l’ère musulmane au temps des négriers (VIIIeXVIIIe s.) » (1985), qui ont porté sur l’importance de l’histoire de l’Atlantique dans l’évolution de l’Afrique et, en particulier, de la Sénégambie, à partir du XVe siècle et les conséquences sur les sociétés sénégambiennes de la domination progressive de l’Europe dans le cadre de la Traite Négrière et de la Colonisation. Tous ces travaux ont mis en évidence les origines historiques de la dépendance en Afrique qui continue, jusqu’à nos jours, de plomber les efforts de développement endogène et autocentré de tout un continent.
HOMME POLITIQUE ET PENSEUR PANAFRICANISTE RADICAL
En 1951, Abdoulaye Ly et ses compagnons Amadou Mahtar Mbow, Cheikh Fal, Abdoul Aziz Wane, Diaraf Diouf, Fadilou Diop et Solange Faladé, entre autres, mettent sur pied le GAREP (Groupement Africain de Recherches Économiques et Politiques), organisation anti-impérialiste conçue comme une structure d’orientation et d’animation de la FEANF (Fédération des Étudiants d’Afrique Noire en France). Abdoulaye Ly est le rédacteur du Manifeste. Il y joua un rôle central dans le processus d’unification des jeunes étudiants d’Afrique noire évoluant en France. C’est en 1952 qu’il rentre définitivement au Sénégal. En 1955, avec ses amis du GAREP, Abdoulaye Ly rejoint le BDS (Bloc Démocratique Sénégalais) de Léopold Sédar Senghor et il devient ministre de la production en 1957 sous le gouvernement de la Loi-cadre. Mais, sa fidélité à l’Indépendance l’amène, avec Amadou Mahtar Mbow, Assane Seck, Abdoulaye Guèye Cabri, Me Fadilou Diop et Thierno Ba, entre autres, à créer, en 1958, le Parti pour le Regroupement Africain (PRA)- Section Sénégal. Secrétaire général du PRA-Sénégal, Abdoulaye Ly s’oppose au présidentialisme néo-colonial. Il en paie le prix fort avec une détention politique entre 1963 et 1965. En 1966, le PRA-Sénégal intègre l’UPS (Union progressiste sénégalaise) de Léopold Sédar Senghor sur la base d’un accord politique précis. Il entre dans le Gouvernement et assure, entre 1966 et 1970, les fonctions de ministre de la Santé et de l’Action Sociale. Avec l’amorce de la relève de la classe politique qu’entreprend Léopold Sédar Senghor en 1970, en nommant Abdou Diouf au poste de Premier ministre, Abdoulaye Ly et ses amis de l’ex-PRA Sénégal quittent l’attelage gouvernemental et parlementaire avec le sentiment que leur génération avait rempli sa mission en jouant les premiers rôles. Dès lors, il consacré toute son énergie à accompagner les jeunes générations dans leurs expériences politiques. Abdoulaye Ly et ses amis politiques font le choix de cheminer entre 1982 et 1992 avec le Parti And Jëf, regroupant « une fraction de la jeunesse militante qui, avec constance et abnégation, a essayé de faire son chemin ».
Pour Abdoulaye Ly, cette expérience formelle avec les jeunes ainsi que les contacts et échanges variés et multiformes avec les divers segments de la société sont la condition d’éviter d’avoir une pensée morte. Aussi, Abdoulaye Ly est-il resté dans une quête permanente du savoir et dans la posture de servir les jeunes générations. Au regard de l’orientation des travaux de l’historien Abdoulaye Ly, on comprend le lien étroit entre sa production intellectuelle et son engagement politique pour l’émancipation des peuples africains. Toutes ses publications, depuis « Les Masses Africaines et l’Actuelle Condition Humaine » (1956), en passant par « POUR UNE POLITIQUE NOVATRICE DE GAUCHE EN AFRIQUE : Réflexion d’un vieux militant sur les conditions de cohérence et de tolérance » (2008), reflètent les préoccupations majeures de l’homme politique engagé dans l’action jusqu’à son dernier souffle. Il déconstruit le présidentialisme néocolonial et jette les bases de la construction d’un État démocratique restituant l’initiative au génie créateur des peuples africains. Prototype de l’intellectuel dissident, il publie en 1992, Les regroupements politiques au Sénégal (1956- 1970), un ouvrage considéré comme une autobiographie politique.
Ce livre a été complété par Dialogue avec Abdoulaye Ly. Historien et homme politique sénégalais, publié en 2001. Ces deux ouvrages offrent des repères pour comprendre l’évolution politique et intellectuelle du Sénégal contemporain. Son expérience de ministre l’amène à découvrir et analyser un système politique post-indépendance moulé dans le présidentialisme néocolonial qui est une négation de la démocratie réelle et citoyenne.
Ses ouvrages sur le système politique déconstruisent le mécanisme de gestion personnalisée du pouvoir mis en place dans la plupart des pays africains indépendants. La force d’Abdoulaye Ly a été d’avoir associé intimement sa réflexion intellectuelle hétérodoxe, originale et prodigieuse et son action politique pour baliser ses choix. C’est ce qui explique, malgré le poids de l’âge, sa capacité à dialoguer constamment avec toutes les générations qu’il a continué à inspirer tant au niveau politique que dans le domaine de la réflexion intellectuelle.
Doté d’un esprit scientifique aiguisé, il a produit une quinzaine d’ouvrages réflexifs entre 1955 et 2008 sur l’histoire politique, économique et sociale du Sénégal, les conditions de l’unité africaine et les tâches de l’élite. Son œuvre panafricaniste, son engagement politique et son sens du devoir accompli dans la dynamique du réarmement moral de la jeunesse du continent caractérisent, en partie, l’identité de ce grand patriote africain Le philosophe sénégalais Djibril Samb, ancien Directeur de l’IFAN Cheikh Anta Diop, a porté sur lui ce témoignage : « Abdoulaye Ly est un homme libre. Il y a chez lui comme un effort permanent de conciliation entre les exigences du statut d’historien, formé au culte de l’établissement minutieux des faits, et celles liées à la qualité de citoyen, imbu de valeurs traditionnelles, comprenant la gravité de la parole proférée, par essence immarcescible, surtout lorsqu’elle est infamante ».
Au double plan scientifique et politique, le combat du Professeur Abdoulaye Ly pour la restauration de la dignité humaine bafouée constitue un précieux lègue à exhumer au bénéfice de notre jeune génération soucieuse de relever les défis du développement d’une Afrique qui reste à libérer de la pauvreté, de la maladie pour l’épanouissement de tout le potentiel du continent. C’est ce penseur dissident, fécond et profond que la communauté scientifique africaine doit s’assigner de sortir de l’ombre ou de l’oubli et que la nation sénégalaise doit reconnaitre et honorer.
Réfléchissons sur les propos du Professeur Djibril Samb qui a ainsi qualifié la portée du modèle qu’a incarné l’historien et l’homme politique : « La constance de la vie et de l’œuvre de Abdoulaye Ly constitue certainement un modèle à méditer. Il nous enseigne que, dans la compétition des nations, l’Afrique doit non seulement faire entendre sa voix celle qui porte l’espoir mais aussi sillonner sa propre voie celle du développement global des humains ».
Pour matérialiser un voeu très cher à Abdoulaye Ly, sa famille a remis le 06 juillet 2022 à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar les ouvrages, manuscrits et documents d’archives que l’historien et homme politique sénégalais a laissés aux générations actuelles et futures. C’est une bibliothèque de 1571 ouvrages de diverses disciplines et un fonds 258 dossiers dont 152 dossiers manuscrits numérisés constitués de papiers rédigés par Abdoulaye Ly ou collectés par lui pour les besoins de ses activités de chercheur et d’homme politique. Il s’agit d’une véritable mine d’or pour les chercheurs en sciences sociales, économiques et politiques classée et appelée Fonds Abdoulaye Ly conservé à l’IFAN Ch. A. Diop.
La disponibilité de ces ressources documentaires et archivistiques est une belle opportunité qui élargit le champ des recherches amorcées par Abdoulaye Ly. Elle permet aussi de sortir de la pénombre ce vieux combattant très apprécié pour son double visage d’historien et d’homme politique qui, par la profondeur de sa production théorique et la constance de son engagement politique, est l’un des penseurs ayant le plus influencé l’histoire intellectuelle de l’Afrique de l’Ouest francophone.
Assurément, les différentes promotions d’étudiant(e)s de l’ISEP Abdoulaye Ly de Thiès pourront puiser dans le parcours et les valeurs incarnées par leur parrain pour se former et s’engager à servir avec compétence leur pays
UN RISQUE POUR LA VIABILITÉ DE LA CEDEAO
La décision unilatérale du Mali, du Burkina Faso et du Niger de se retirer de la Cedeao dans un contexte sous régional marqué par la présence du terrorisme et de l’insécurité constitue un risque même sur la viabilité de l’institution
Dans le cadre des célébrations du cinquantième anniversaire de la Communauté Économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), Afrikajom Center a organisé hier, lundi 24 février une conférence préparatoire à la conférence régionale. Cet événement qui constitue une étape cruciale dans l’élaboration d’une vision prospective pour l’avenir de l’organisation régionale porte sur le thème évocateur : "La CEDEAO, 50 ans après : changer ou périr". Présidant la cérémonie d’ouverture de cette rencontre de deux jours, le représentant du ministre des affaires étrangères Mamadou Moustapha Seck a relevé que la décision du Mali, du Burkina Faso et du Niger de se retirer de la Cdeao constitue une risque sur la viabilité de l’institution.
La décision unilatérale du Mali, du Burkina Faso et du Niger de se retirer de la Cedeao dans un contexte sous régional marqué par la présence du terrorisme et de l’insécurité constitue un risque même sur la viabilité de l’institution surtout après l’intention affichée par le Togo de rejoindre l’AES. C’est l’avis de Mamadou Moustapha Seck qui représentait le ministre de l’Intégration africaine et des affaires étrangères à la cérémonie d’ouverture de la conférence préparatoire qui s’est ouverte hier lundi 24 février à Dakar, en prélude du cinquantième anniversaire de la Cedeao. Cet événement initié par Afrikajom Center pour sur le thème : "La CEDEAO, 50 ans après : changer ou périr". « Aujourd’hui nous assistons à un risque d’éclatement de l’institution avec le départ du Mali, du Burkina Faso et du Niger. Après le relatif échec de la vision 20-20 de la CEDEAO, les chefs d’Etats et de gouvernements ont adopté aujourd’hui la vision 20-50 qui promeut une CEDEAO des peuples bâtie sur la paix et la prospérité . Le début de cette vision a coïncidé avec la recrudescence des coups d’Etat, les difficultés de trésoreries qui s’aggravent également et la mise en œuvre de grands projets qui connait aujourd’hui beaucoup de lenteurs. C’est pourquoi la célébration du cinquantenaire de la Cedeao doit être une occasion d’examiner profondément certaines questions », soutient-il.
Selon lui, cette décision de se retirer est d’autant plus problématique qu’elle a été prise par des régimes militaires qui en principe sont provisoires. Cependant, il a souligné que les défections de ces pays posent un réel problème de diplomatie préventive, d’alerte précoce et de riposte appropriée, mais également elle soulève les questions de la mise en œuvre par la Cedeao de ses propres instruments juridiques notamment le protocole de 2001 sur la démocratie et la bonne gouvernance, le mécanisme de 1999 et les cadres de prévention de conflits de 2008. « L’opinion publique Ouest Africaine ne semble plus accepter les deux poids deux mesures consistant à fermer les sur les coups d’Etats civiques, les coups d’Etats électoraux et militaires », déplore-til. Par ailleurs, M. Seck recommande à la Cedeao de procéder à l’occasion de la célébration du jubile d’or à un exercice d’autocritique sans complaisance. Selon lui, cet exercice ne devrait pas occulter des questions essentielles comme la nécessité par exemple de recentrer la Cedeao autour de ces objectifs initiaux à savoir l’intégration économique d’abord, l’urgence de réexaminer cette architecture institutionnelle de la Cedeao, une relecture voire un audit des textes de la Cedeao qui chevauchent, l’implication des organisations de la société civile et l’adoption d’une démarche visant à renforcer l’engagement des Etats membres dont certains ont le sentiment d’être marginalisés.
MAUVAISE APPLICATION DES TEXTES, INERTIE DE LA CEDEAO FACE A CERTAINES CRISES, GESTION DES COUPS D’ETAT : Ces échecs majeurs de la CEDEAO
Depuis quelques années la Cedeao fait face à quelques défis graves. L’institution sous régionale est aujourd’hui confrontée à un certain nombre de difficultés. C’est du moins le constat qui a été fait par Mathias Hounkpe, directeur régional de la fondation internationale pour les systèmes électoraux du Gabon. Il présentait une communication sur les échecs de la Cedeao lors d’un panel organisé hier, lundi 24 février dans le cadre de la conférence préparatoire en prélude de la célébration des 50 ans de la Cedeao. Parmi ces difficultés, il a cité l’application des textes et l’utilisation des instruments que la Cedeao a apporté. « Malheureusement ces textes ne sont pas appliqués. Prenez par exemple le mécanisme sur l’alerte précoce, par rapport aux autres régions d’Afrique, la Cedeao a le mécanisme le plus structuré. Mais on s’arrête à la collecte des informations. La plupart du temps, il y a des difficultés qui sont perçues durant des mois ou des années à l’avance à travers ce mécanisme d’observation. Mais, il n’y a pas de décisions, ni d’actions. Donc, les mécanismes existent mais ne sont pas utilisés », dénonce-t-il. Selon lui, il faut un mécanisme de suivi et d’évaluation de la mise en œuvre de ces textes pour qu’on soit en mesure dire ce qui marche ou ne marche pas. Le problème majeur auquel la sous-région est confrontée depuis quelques années est relatif au sentiment que la Cedeao est impuissante. « On assiste au déclin de la démocratie dans beaucoup de pays. Mais on n’a pas le sentiment que c’est une préoccupation de la Cedeao. Je prends par exemple les coups d’Etats constitutionnels, le fait que l’on manipule les constitutions pour se maintenir au pouvoir. Nous connaissons le cas du Togo, de la Cote d’Ivoire de la Guinée. C’est comme si la Cedeao était incapable de réagir face à ces situations. La Cedeao n’a pas pu prévenir pour les empêcher », se désole –t-il. Pour lui, cela a créé des frustrations chez les citoyens. Parce que, souligne-t-il, au niveau de la Cedeao, près de 80% des citoyens sont pour la limitation des mandats. « Lorsque les citoyens dans leur grande majorité sont pour la limitation des mandats et que les chefs d’Etats échappent à cette limitation sans réaction visible de la Cedeao, cela crée de la frustration et augmente la distance entre les citoyens et la Cedeao », a-t-il laissé entendre. La troisième catégorie de difficultés, c’est la gestion des coups d’Etats. « La moyenne de la durée de la transition aujourd’hui c’est 38 mois. Le Mali a déjà fait 54 mois, le Burkina 37 mois et le Niger 19 mois. C’est comme si la Cedeao n’a pas suivi l’évolution de l’environnement régional et s’est comporté de la même manière il y a 12 ans, 15 ans alors que l’environnement a changé », soutient-il.
IBRAHIMA KANE, PRESIDENT DU COMITE SCIENTIFIQUE D’AFRIKAJOM CENTER : « L’institution régionale n’a jamais connu une stabilité »
« Même si la Cedeao a adopté aujourd’hui une vision 20- 50 qui veut que la Cedeao soit désormais une communauté d’un peuple pleinement intégré dans une région paisible, prospère avec des institutions fortes respectueuses des libertés , les conditions de la réalisation de cette vision ne sont pas réunies. Les peuples sont les plus absents. L’institution régionale n’a jamais connu une stabilité. On est dans un contexte où la région manque de leadership. La situation économique de la Région est en train de prendre un tournant qui, si rien est fait, risque de plonger tous les Etats dans une situation de crise. La situation politique n’est pas des meilleures, parce que la démocratie qu’on a voulu à partir des années 90 imposer n’est pas encore quelque chose de partagée dans la région. Il y a un certain nombre d’Etats qui font des efforts et d’autres qui travaillent d’arrachepied à détruire le système».
CEDEAO, CHANGER OU PÉRIR
Entre crises politiques, montée du terrorisme, criminalité transfrontalière, entre autres, la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) est aujourd’hui confrontée à plusieurs défis.
Entre crises politiques, montée du terrorisme, criminalité transfrontalière, entre autres, la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) est aujourd’hui confrontée à plusieurs défis. Ce, malgré ses succès reconnus en matière d’intégration africaine, de paix et de sécurité, de libre circulation des personnes et des biens mais également de bonne gouvernance. Toutefois, elle doit surtout faire face au départ du Mali, du Burkina Faso et du Niger. Le retrait de ces pays qui viennent de créer l’Alliance des Etats du Sahel (AES), met en lumière des fractures profondes au sein de la région. Le constat a été fait hier, lundi, 24 février, lors de l’ouverture de la Conférence préparatoire au Colloque marquant le cinquantenaire de la CEDEAO sur le thème « la CEDEAO, 50 après : changer ou périr »
L ’inquiétude grandit après le retrait du Mali, du Burkina Faso et du Niger de la CEDEAO. Pour cause, le divorce entre l’organisme régional et ces pays considérés comme des membres stratégiques pourrait remettre en question la sécurité, la stabilité et la libre circulation des personnes et des biens dans la région ouest-africaine. Réunis hier, lundi 24 février, à l’occasion de l’ouverture de la conférence préparatoire au Colloque marquant le cinquantenaire de la CEDEAO sur le thème « la CEDEAO, 50 après : changer ou périr », des membres du Comité scientifique d'Africajom Center, des diplomates, des experts de la sousrégion, des universitaires, des femmes et des jeunes ont listé les défis auxquels fait actuellement face l’organisme régional. « Le premier grand défi de la CEDEAO, c'est le départ des trois pays. Ce n'est pas n'importe quels pays. C'est pratiquement le cœur vibrant du Sahel : le Mali, le Burkina Faso et le Niger. Je pense que ces défis étaient déjà inscrits dans ce qu'on a construit comme le G7 Sahel », a déclaré d’emblée le fondateur de Afrikajom Center, Alioune Tine. En effet, le départ de ces pays constitue une crise politique et économique sans précédent dans la région ouest africaine. C’est pourquoi, dans sa communication, le coordonnateur du mouvement citoyen « Tournons la page » au Togo, David Dosseh indique « qu’il est clair que notre institution commune traverse une grande zone de turbulence avec le départ des trois pays de l'AES ». « Ce départ constitue à mon sens une évolution presque logique compte tenu des contradictions internes à l'organisation, au manque de leadership et compte tenu surtout de la position hégémonique de la conférence des Chefs d'États et de Gouvernements qui imprime un fonctionnement rigide et peu démocratique de l'institution », a fait savoir David Dosseh. A l’en croire, la CEDEAO a été incapable de mettre en place une série de réformes indispensables à son renouveau. « Elle a été incapable du coup de procéder à cette mutation vers la CEDEAO des peuples qui aurait pourtant accru son aura, qui lui aurait davantage conféré de crédibilité et qui lui aurait permis d'obtenir et d'avoir le soutien indispensable des peuples », a-t-il souligné.
Prenant la parole, le représentant de la CEDEAO, Constant Gnacaja a abondé dans le même sens. Il s’est interrogé sur ce qui fait qu’aujourd’hui, la CEDEAO n'est pas la communauté des peuples. « Les défis, nous les connaissons tous. Quand ça arrange les Etats, ils font appel à la CEDEAO. Quand ça ne les arrange pas, ils montrent leur souveraineté. C'est de ce seul mal que nous souffrons », at-il dit. En effet, la multiplication des crises politiques est réelle en Afrique de l’Ouest. « La région est confrontée à une montée du terrorisme, des coups d'État récurrents au Mali, au Niger, au Burkina. On sait qu'il y a la Guinée et il y a une espèce d'impuissance à la fois, et de l'organisation régionale et de l'organisation multinationale, les Nations Unies, à se dresser face à ce qui se passe en Guinée-Conakry », déplore Alioune Tine. A ces pays qui préoccupent la CEDEAO, s’ajoute le Togo où « il n’y a jamais eu d’alternance au Togo et il y a des formes de contournement de l’alternance et de pérennisation de régime », précise le fondateur du think tank Africajom Center
Parmi les défis auxquels fait face la CEDEAO, il y a aussi la criminalité transnationale, le trafic de drogue et d'êtres humains ainsi que l'exploitation illégale des ressources naturelles, qui menacent la sécurité régionale et affaiblissent les Etats membres
Le CEDEAO est également confrontée à une faiblesse institutionnelle. Selon Alioune Tine, « les capacités institutionnelles réduites et limitées de la CEDEAO entravent son efficacité dans la prévention et la résolution des conflits ». Le fondateur de Afrikajom Center pointe aussi du doigt l’absence d’attractivité de la jeunesse auprès de la CEDEAO. « Contrairement à ce qui se passait pour la génération des années 90, qui se bat pour les droits humains, pour la démocratie, nous avons une jeunesse qui soutient des dictateurs », regrette Alioune Tine. Ces défis économiques, politiques et géopolitiques remettent donc au goût du jour l’urgence d’une solution à la hauteur pour la CEDEAO..
REINVENTION DE LA CEDEAO : LA RECETTE DE ALIOUNE TINE
Face aux crises qui secouent la région ouest-africaine, la CEDEAO est sommée de hâter le pas pour retrouver sa place d’antan. De l’avis du fondateur de Afrikajom Center, il faut « réinventer, refonder, réformer, réparer et soigner les institutions malades de la CEDEAO ». « Il n'y a pas d'autres alternatives pour sauver la CEDEAO », précise Alioune Tine. Il propose également de « renforcer le dialogue avec les États sortants, c’est-à-dire les États de l'AES, d’engager toutes les initiatives diplomatiques si nécessaires, en vue de réconcilier la CEDEAO avec les États membres et les citoyens de la CEDEAO notamment en ciblant particulièrement les jeunes et les femmes, d’intégrer le développement politique, économique et social dans les réponses sécuritaires ». Le fondateur d’Afrikajom Center recommande « d’engager une réflexion pointue sur le partenariat sécuritaire international », « d’élaborer une géopolitique », de « renforcer la coordination entre les États et les organisations de la société civile » entre autres.
CONSTANT GNACAJA, REPRESENTANT DE LA CEDEAO : « IL FAUDRAIT QU’ON S’ADAPTE AUX DEFIS ET QU’ON TRAVAILLE A TROUVER DES SOLUTIONS »
« Les 50 ans de vie d’une institution, ce n’est pas une mince affaire. 50 ans de vie pour une personne, ce n’est pas non plus une mince affaire. Il y a des hauts et des bas. Si nous avons des problèmes, reconnaissons qu’il y a des problèmes et dialoguons autour de ces problèmes pour pouvoir trouver des solutions. Nous sommes dans une époque différente de 1975, l’année de naissance de la CEDEAO. Si 50 après, il y a de nouveaux défis, je pense qu’il faudrait qu’on s’adapte aux défis et travailler à trouver de solutions. Nous travaillons pour cela. La CEDEAO est ici représentée parce qu’elle croit à cette initiative de Afrikajom Center. Nous sommes en train de travail pour mettre en place le conseil économique, social et culturel de la CEDEAO pour renaitre les organisations de la société parce que quand nous parlons de la CEDEAO des peuples, il faudrait que ça soit une masse critique de citoyens qui puissent porter la vision de la CEDEAO, parler de ses réalisations et qu’on ne puisse plus laisser place aux fakenews ».
ALPHA OUMAR BA, REPRESENTANT DE LA DELEGATION GUINEENNE AU NOM DU FRONT REPUBLICAIN POUR DES ACTIONS PATRIOTIQUES, (FRAP) : «Nous sommes préoccupés du fait que la CEDEAO n'a pas assez de pouvoir pour obliger la Guinée à respecter les droits de l'homme»
«En tant que Guinéens, nous sommes préoccupés dans la mesure où la Guinée et la CEDEAO, il y a un an, avaient signé une date limite pour la transition. C’était le 31 décembre 2024. Aujourd'hui, on n'a pas respecté cela. Vous savez qu'il y a un problème de crédibilité de la CEDEAO à ce niveau. La Guinée a failli basculer à l'AES. S’il y avait ce respect de la bonne gouvernance et de la démocratie, je pense que notre pays ne serait pas à ce niveau-là. Donc, nous n'avons pas de solutions miracles en ce moment. Nous sommes plutôt préoccupés du fait que la CEDEAO n'a pas assez de pouvoir, n'a pas assez de force pour obliger la Guinée à respecter les droits de l'homme, à respecter un engagement signé par le Chef de l'État, luimême, qui était là, le colonel Doumbouya, la junte militaire, qui s'était engagé solennellement et aujourd'hui, rien n’est respecté ».
LIBRE CIRCULATION DES PERSONNES ET BIENS, MECANISMES DE LUTTE CONTRE LA CORRUPTION, PARLEMENT CEDEAO… Babacar Carlos Mbaye liste les réussites et succès de la CEDEAO
De la libre circulation des personnes et des biens dans l’espace communautaire, en passant par le droit de résidence et d'établissements jusqu’à la mise en place des mécanismes de prise en charge des questions de droits de l'homme, de lutte contre la corruption, le consultant indépendant en Relations internationales, Intégration régionale et Gouvernance politique, Babacar Carlos Mbaye a cité des progrès accomplis par la CEDEAO au cours de ces 50 ans d’existence. Traitant le thème « les réussites et les succès de la CEDEAO », il a aussi magnifié la politique régionale de l'eau, la politique industrielle et commune de l'Afrique de l'Ouest, la politique de l'emploi, la politique de santé à travers l'organisation ouest-africaine de la santé. Par les réalisations de la CEDEAO, Babacar Carlos Mbaye cite aussi la création d'un cadre juridique favorable au renforcement de la démocratie, l’établissement d’un réseau d’institutions nationales des droits de l’homme en Afrique de l’Ouest. Selon le consultant indépendant en Relations internationales, Intégration régionale et Gouvernance politique, il existe un Parlement et une Cour de justice de la CEDEAO qui a un mandat de tribunal des droits de l'homme. « Elle devrait être suivie par le Conseil économique et social qui tardera à être mise en place, mais je pense que ça va se faire très prochainement », a-t-il dit. Aux réussites de la CEDEAO, s’ajoutent la prise d’instruments d'autonomisation comme l'adoption d'une convention sur la circulation des armes légères et mécaniques, la mise en place d'un système régional d'alerte précoce, l’interconnexion des réseaux électriques et l’appui aux systèmes de production de l’électricité de l’espace CEDEAO, la mise en place d’une agence consacrée à la sécurité alimentaire.