L’absence de concertation entre le ministre de l’Enseignement supérieur et les acteurs privés est l’une des difficultés saillantes du secteur. Sans oublier la «concurrence déloyale du public» dans certains domaines d’enseignement. Des difficultés qui s’ajoutent à d’autres, telle la forte pression fiscale que subissent les acteurs du privé. Ces remarques viennent de l’étude commanditée par le Conseil national du patronat du Sénégal (Cnp), présentée ce 28 juin. Seulement, la rencontre qui a vu la présentation de ladite étude n’était pas qu’entre privés.
L’Etat y avait ses représentants. «Il y a des problèmes et nous les reconnaissons», a souligné Senghane Mbodj, directeur de l’Enseignement supérieur privé au ministère de l’Enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation. Et il a toutefois rappelé qu’il «n’y a pas de public et de privé», pour dire qu’au niveau du ministère qu’il représente, «on raisonne en termes d’enseignement supérieur», uniquement. Lorsqu’on parle de professionnalisation, a aussi rappelé Singane Mbodj, «il faut reconnaître que c’est le secteur privé qui en est le précurseur».
Pour ainsi dire que le public est au fait de l’apport et de l’importance du privé dans le domaine de l’enseignement. «L’orien¬tation de l’enseignement professionnel, comme ça a été porté par le privé, il faut quand même reconnaître que c’est ce dernier secteur qui l’a initiée», dit-il. C’est son cœur de métier, dira-t-il. Et c’est pourquoi ses acteurs y sont à l’aise. «Ils ont beaucoup aidé le pays à se développer, ainsi que notre économie. Car, s’il n’y avait pas les produits issus de ce secteur privé, on peinerait à trouver de travailleurs pour bon nombre de structures», enchaîne-t-il.
«Il faudrait que les jeunes soient disponibles et formés»
La saillance de ce fait a sûrement poussé la directrice de 3fpt à déclarer que l’enseignement professionnel n’est pas «une école de la seconde chance». Pour Sophie Diallo, «aujourd’hui, au Sénégal, il y a énormément de secteurs prioritaires sur lesquels on a des axes de développement. On parle de pétrole et de gaz, des Jeux Olympiques qui arrivent, et récemment, de l’usine de dessalement…».
Ainsi, «pour que nous soyons des acteurs de développement, il faudrait que des jeunes soient disponibles et formés». Justifiant la présence de la 3FPT, M. Diallo insiste sur le fait que l’aspect formation est dévolu aux structures aussi bien publiques que privées. Une harmonisation, cependant, des actions est primordiale. M. Mbodj n’a pas omis de le mentionner. Pour celui qui a rassuré quant à la volonté de son ministère d’accompagner le secteur privé de l’enseignement, l’un des problèmes majeurs de ce dernier est d’ordre organisationnel.
Pour le président du Pôle excellence, formation, enseignement et éducation du Conseil national du patronat, l’étude a comme objectif de «proposer des perspectives à l’Etat et aux différents acteurs sociaux». Une façon pour Pape Madické Diop et le Cnp d’apporter leur participation dans un contexte national où «les demandes en formation sont exponentielles». Et avec elles, les besoins des entreprises, et l’Etat qui a des problématiques nées avec et autour du plan Sénégal émergent. «Tout cela réuni fait que les acteurs réfléchissent à l’adéquation formation-emploi et à la réalité des compétences qui seront déployées dans nos économies demain», dit-il.
En l’état, des recommandations ont été formulées dans l’étude commanditée par le Cnp. Pour «les entrepreneurs académiques», des points revêtent une importance capitale. Parmi eux, «l’érection de la division de l’enseignement privé en direction nationale», la «révision des textes juridiques et réglementaires sur l’enseignement privé», ou encore, la reconnaissance et l’équivalence des diplômes entre le public et le privé. Qui dit entreprenariat dit fisc.
Ainsi, il a été suggéré d’en aller vers la «recherche d’un régime fiscal approprié à l’enseignement privé». Dans ce sens, le Cnp donne une piste qui consiste à réduire la Tva de 18 à 7%, à l’image des mesures prises au profit de secteur du tourisme.
UNE NOUVELLE GENERATION DE REALISATEURS ET PRODUCTEURS EMERGE DANS LE 7EME ART
Les 67 diplômés de la 5ème promotion du programme de formation «Up courts métrages», Cinekap session 2021-2022, ont reçu hier, à la place du Souvenir africain, leurs diplômes de formation
Les 67 diplômés de la 5ème promotion du programme de formation «Up courts métrages», Cinekap session 2021-2022, ont reçu hier, à la place du Souvenir africain, leurs diplômes de formation aux métiers de la réalisation et de la production de l’écriture audiovisuelle. Occasion également pour Oumar Sall, directeur de Cinekap, de lancer la prochaine session du programme 2022-2023.
La cérémonie a été empreinte de joie et de témoignages. L’occasion était donc assez exceptionnelle pour que les diplômés de la 5ème édition du programme de formation «Up courts métrages», session 2021-2022, reçoivent leurs attestations devant plusieurs personnalités de monde de la culture, leurs encadreurs, leurs familles et proches.
Après plusieurs mois de formation aux métiers de la réalisation et de la production de l’écriture audiovisuelle et à d’autres techniques cinématographiques, le rêve de ces 67 jeunes talents sénégalais et panafricains de produire et de réaliser des courts métrages est désormais une réalité.
Et si l’on en croit le directeur de Cinekap, Oumar Sall, cette nouvelle cuvée peut intégrer rapidement le monde du travail. Et pour preuve, dit-il, les six films de la session 2019-2020 ont généré 693 emplois directs et indirects et 500 autres emplois sont prévus pour les productions en cours. «Notre programme Up courts métrages est d’utilité publique. Il fait émerger dans le septième art, de nouvelles générations de réalisateurs et de producteurs. Il contribue également au développement des potentialités cinématographiques de l’Afrique en général et du Sénégal en particulier en donnant à ces jeunes cinéastes, en quête de formation, des opportunités d’expression à faire des films dans les standards du cinéma», a témoigné le producteur Oumar Sall devant Youma Fall, ministre-conseiller du président de la République, le représentant du ministère de la Culture et de la communication et l’artiste musicien, Abdou Guité Seck.
Aujourd’hui, selon Oumar Sall, le dispositif de formation des Up courts métrages a fait ses preuves et ambitionne de prévoir, d’étendre son impact en particulier à destination des jeunes néo-professionnels du cinéma et de l’audiovisuel de la sous-région, notamment les femmes et les hommes qui n’habitent pas souvent Dakar. «Si Up courts métrages est ouvert à l’international, Up courts métrages pôles régionaux aide à décentraliser la formation cinématographi¬que», a précisé Oumar Sall, qui ajoute que le cinéma sénégalais est un cinéma très urbain.
Le dispositif porté par Cinékap occupe une place centrale dans la chaîne de valeurs et fait partie des tendances qui façonnent l’industrie cinématographique et audiovisuelle africaine.
S’agissant du Cinekap, il affirme qu’«il est le seul dispositif qui porte sur les métiers, les compétences du producteur, maillon essentiel et pivot pour le développement de l’industrie cinématographique et de son aspect créatif. Il est, de surcroît, le seul dispositif qui donne le statut de réalisateur et de producteur avec des films de sortie de promotion dans les standards du cinéma».
Up courts métrages, incubateur de talents, est un espace dédié aux auteurs nouveaux pour affiner leurs compétences, trouver leur style et dévoiler leur récit à travers le dynamisme et la recherche du court métrage. Un label qui permet de repérer en amont les nouveaux talents, auteurs de demain. «Nous allons même introduire une forme de production dont l’expertise va respecter les normes du développement durable», a-t-il promis.
Par ailleurs, le Cinekap, soumis à l’échelle de mesure des ambitions pour l’art et la culture de manière générale et du cinéma, en particulier, «nos succès sont encore mineurs au regard du chemin qui reste à parcourir pour le cinéma panafricain», a dit Oumar Sall.
Pour sa part, le directeur de la Cinématographie, Germain Coly, a magnifié cette initiative du chevronné producteur, Oumar Sall, qui, dit-il, est en train de faire un travail remarquable et remarqué. «Je salue votre talent, votre esprit d’entreprise mais aussi et surtout votre engagement. Et je vous réaffirme encore la volonté du ministère de la Culture et de la communication à pérenniser notre partenariat dans notre mission commune d’accompagner le perfectionnement des professionnels dans les métiers du septième art», s’est-il félicité.
Il a tenu à féliciter les récipiendaires et s’est réjoui de ce rituel qui permet, dit-il, de galvaniser les étudiants afin de susciter en eux, un esprit de saine émulation pétri dans les valeurs de travail acharné.
Pour rappel, la cérémonie de remise de diplômes de formation Up courts métrages et du lancement de la prochaine session du programme a été suivie d’une leçon inaugurale animée par le sociologue et philosophe, Djiby Diakhaté, sous le thème : «Identité culturelle et développement.»
«RAABI», LE DESTIN TRAGIQUE DE LA FEMME SENEGALAISE SUR LES PLANCHES DE SORANO
Le Théâtre national Daniel Sorano va abriter vendredi, à 20 heures, la grande première Raabi, une pièce dont l’ambition est de mettre en exergue «les drames silencieux» des femmes dans les maisons sénégalaises,
Le Théâtre national Daniel Sorano va abriter vendredi, à 20 heures, la grande première Raabi, une pièce dont l’ambition est de mettre en exergue «les drames silencieux» des femmes dans les maisons sénégalaises, a-t-on appris de son metteur en scène Mamadou Seyba Traoré.
«Raabi, c’est le destin de la femme qui est décrit. Elle n’est que l’instrument du destin», a-t-il dit au sujet de cette pièce de théâtre adaptée du roman La malédiction de Raabi (Nei-2011) du Colonel Momar Guè¬ye.
«Je soupçonne le Colonel de l’avoir choisi rien que pour livrer un message», a-t-il dit lundi lors d’une séance de répétition à laquelle plusieurs journalistes étaient conviés.
Le metteur en scène dit avoir misé sur des comédiens choisis pour leur «talent» pour jouer cette pièce à partir d’une représentation «beaucoup plus symbolique que réelle».
L’intrigue de cette pièce épouse les contours du roman avec les mêmes lieux : Niodior (dans les îles du Saloum), Saint-Louis (au Nord) et Dakar la capitale. Les patronymes des personnages du livre sont également reconduits. Selon le metteur en scène, l’histoire racontée par cette pièce a été séquencée en trois visions : la prédiction, les épreuves et la mort.
Le jeu d’acteur, qui se veut maîtrisé, porte toute l’émotion dramatique de la pièce en se basant sur «un décor symbolique» à partir des lieux multiples suggérés.
La pièce pointe du doigt tous les maux de la société à travers la trajectoire de Raabi, issue d’une famille polygame, violée dans son jeune âge par «un tonton flingueur, mariée de force à un cousin débile, seule la fuite lui permettait d’échapper à cette souffrance. Mais le pire adviendra».
«Raabi représente ces drames silencieux qui se passent dans les maisons et l’accumulation de tous les maux qui gangrènent la société depuis les tensions dans les foyers polygames. (…)», explique Mamadou Seyba Traoré.
Il s’indigne de l’attitude de la famille de Raabi, plus préoccupée par la volonté de préserver son «honneur» que de marquer sa solidarité à l’égard de la jeune fille abusée, violée.
«Ce qui importe, ce n’est pas sa fille qui a été violée, mais ce maquillage que nous avons l’habitude de faire dans nos relations entre nous, cacher cela sous le drap comme si l’honneur d’un violeur est plus important que le vie d’une jeune fille», dénonce Seyba Traoré.
Il considère que cette séquence est «la plus représentative» de la société sénégalaise, cette pièce décrivant, selon lui, une réalité quotidienne au Sénégal, «mais malheureusement souvent enveloppée dans le drap de la pudeur».
«C’est un électrochoc de la société sénégalaise, de toutes les sociétés», ajoute-t-il.
La pièce Raabi a l’avantage de compter sur des comédiens connus pour leur talent sur scène, dont Adjiara Fall et Ibrahima Mbaye Thié, des pensionnaires du Théâtre national Daniel Sorano.
Il y a aussi Yacine Sané et Anne Marie D’Olivera, des comédiennes venues de troupes privées, sans compter la participation d’élèves de l’Ecole nationale des arts.
L’auteur du roman, le Colonel Momar Guèye, estime que la quintessence du roman a été prise en compte dans la pièce, se disant satisfait de ce qui a été présenté lors de la séance de répétition. «Le souci était de mettre en évidence les erreurs et les abus gravissimes de notre société», dit-il.
Le roman préfacé par la célèbre écrivaine, Aminata Sow Fall, qui voit dans cette pièce un plaidoyer contre les mauvais traitements faits aux femmes. Elle rejoint en cela l’avis du critique Alioune Badara Diané, pour qui le roman du Colonel Guèye est «une radioscopie de la société sénégalaise».
Par Walmaakh NDIAYE,
«ELECTIONS INCLUSIVES» A-T-ON DIT ? QUI EST EXCLU ? QUI A EXCLU ?
La vérité, la bonne foi, le bon sens, la loyauté et la raison sont-ils devenus une denrée très rare au Sénégal ?
La vérité, la bonne foi, le bon sens, la loyauté et la raison sont-ils devenus une denrée très rare au Sénégal ? Eh oui, le débat en cours dans notre pays autour des élections législatives est vicié à souhait par certains acteurs de la société. Cependant il a l’avantage de faire tomber beaucoup de masques, notamment de voir comment notre société est minée non seulement par l’absence de repères, de références, mais surtout par la dégradation des valeurs et l’aliénation des hommes et structures.
L’on ne le dira jamais assez, notre pays est malade, non pas de son système électoral très avancé démocratiquement, mais du comportement hypocrite, de la versatilité déroutante, de l’absence d’honnêteté intellectuelle et de loyauté d’une frange importante des parties prenantes à la ¬démocratie. Au Sénégal, malheureusement c’est cette floraison de «machins» ¬difficilement identifiables dans leur genre, qui grouillent autour de nobles concepts comme «droits humains» ou «Société civile» qu’il faut s’efforcer, à chaque fois que de besoin, d’éprouver les actes et paroles, à l’étymologie de ce dont ils se réclament, pour s’empêcher de brocarder l’histoire, la mémoire collective à la base de la création des idéaux qu’ils sont censés porter. Toute loi est créée par la communauté, pour la communauté et ¬s’applique à tous les membres de la communauté. Ensuite, celle-ci est organisée sur un modèle de vie sociale, autour d’une puissance publique librement acceptée et chargée de -l’application de cette loi. La République en est l’incarnation du prototype organisationnel parfait. Donc l’on n’attend pas plus des structures chargées de défense des droits humains ou de la Société civile qui reste le bras des communautés, d’être à côté du pouvoir ou de l’opposition, mais à califourchon sur la loi, sur ¬l’intérêt de la communauté, et non sur des intérêts d’individus ou de groupes.
Dans ce cadre et sur le débat en cours relatif aux Législatives, aussi bien l’attitude que le discours de beaucoup de responsables de la Société civile et d’organismes de défense des droits humains, ainsi que de beaucoup d’intellectuels et politiciens opportunistes, jurent d’avec le Droit, l’intégrité morale et intellectuelle, en demandant des élections inclusives qui n’existent dans aucun pays au monde et plus grave ¬encore, ils ne poussent pas la réflexion sur les fâcheuses conséquences ¬politiques, sociales, économiques qui en résulteraient.
Il s’y ajoute la légèreté et l’impertinence de l’argutie avancée selon laquelle des «pontes» politiques, incapables de se conformer à la loi, seraient écartés si les élections se tenaient. Et voilà qu’au même moment où l’on cherche à salir notre vieille et belle démocratie où chacun dit et fait ce qu’il veut, insulte, diffame, calomnie jusqu’à la plus haute Autorité, appelle à l’insurrection, sans coup férir, que l’on veuille nous fabriquer des ¬mandarins politiques qui, sans eux, la vie s’arrête. Mais bon sang ! Qui a exclu qui ? N’est-ce pas un mandataire qui s’est gouré deux fois malgré la -perche qui lui a été tendue par le Conseil constitutionnel une première fois. Non, que Yaw dise aux Sénégalais si sa liste «compétit» ou pas ? Ou bien n’a-t-elle-pas confiance à ses suppléants ? Auquel cas notre démocratie ne doit attendre rien de bon dans l’antre du «Monstre». Que la jeunesse fasse bien attention car dans la mare politique se cache bien un «yeew», un gros boa.
L’attitude responsable, ¬républicaine et patriotique de tout observateur neutre est de demander l’application stricte de la loi électorale, le respect du calendrier pour libérer le Peuple, la population active, pour qu’elle puisse vaquer à ses occupations. Dans ce cadre, il faut saluer cette fois-ci la ¬position courageuse, lucide et républicaine du Forum du justiciable. Ce qu’on demande à ces organisations n’est ni des ¬prédications funestes, ni le beau temps en hiver, mais l’équidistance, l’observation des règles de jeu et le respect de la loi par tous les acteurs.
Oui, le pays est malade de cette complaisance entre nous, cette «kersa» pour dire à l’autre la vérité, de cette compromission ou «massla» devant la loi, mais surtout de cette paranoïa ¬rampante née d’une stratégie -d’intimidation de tous ceux qui ne sont pas dans une pensée ou dynamique similaire. C’est là aussi un coin du voile levé pour se faire une idée de cette nouvelle démocratie de ceux qui pensent que notre démocratie recule.
Oui, le pays est gravement malade par son ¬secteur vital de la communication qui ne s’intéresse pas aux trains qui arrivent à l’heure, qui ravive polémiques et tensions, qui promeut et encense les médiocres, qui délaisse les faits et nourrit les commentaires.
Enfin, le mal du pays c’est aussi l’affaissement de l’autorité de l’Etat, trop absoute dans une quête quasi irrationnelle de préservation de l’image du pays, de notre démocratie, pendant que des dérives déconsolidantes se trament quotidiennement sous sa barbe. Il n’y a pas de démocratie sans respect de la loi.
Walmaakh NDIAYE
Observateur politique
Par Yoro DIA
DÉMOCRATIES D’AILLEURS ET LAÏCITÉS D’AILLEURS
La démocratie, c’est avant tout des batailles d’idées. Au Sénégal, on est passé du débat des Professeurs et des agrégés comme Senghor, Wade, Cheikh Anta, Abdoulaye Bathily aux rentiers de la tension et aux insulteurs
Si les règles de la democratie sont universelles, leur application est toujours locale. Dans son livre Démocraties d’ailleurs, Christophe Jaffrelot démontre que l’Inde est très démocratique avec ses castes, le Sénégal l’est aussi avec ses marabouts, de même que les Etats-Unis qui sont tellement démocratiques que l’on peut remporter le suffrage populaire et ne pas être élu comme ce fut le cas en 2000 et 2016. Si pour les démocraties d’ailleurs, Jaffrelot s’appuie souvent sur les Etats Unis, l’Inde et le Sénégal, pour les typologies de Laïcité, on donne les souvent les exemples des Etats-Unis, du Sénégal et de la France qui sont trois modèles de laïcité.
La laïcité française se veut freedom from religion, c’est-à-dire se libérer de la religion. La laïcité américaine se veut freedom of religion, c’est-à-dire liberté totale de religion comme vient de le rappeler la Cour suprême cette semaine, et le modèle sénégalais est une sorte de troisième voie entre les deux extrêmes des Etats-Unis et de la France. Le modèle français, qui est une sorte de laïcisme, s’explique par le long combat de l’Etat français pour se libérer de l’hégémonie et de l’emprise de l’Eglise. Le modèle américain se comprend par le fait que les premiers migrants des Etats-Unis ont quitté le vieux continent pour avoir plus de liberté religieuse qu’ils n’avaient en Angleterre. Le modèle sénégalais que nous devons au génie de Senghor s’explique par la hantise chez ce dernier d’éviter la querelle des allégeances entre le glaive de Christ et de César, c’est-à-dire la controverse sur le primat de l’Empereur ou du Pape et qui fit des millions de morts en Europe.
Les deux dernières décisions de la Cour suprême des Etats-Unis sur l’avortement, qui était légal depuis l’arrêt Roe versus Wade de 1973 et sur la prière en public, confirment le grand penseur Ralph Waldo Emerson qui disait que les «pensées gouvernent le monde». On devrait y ajouter, surtout dans une democratie. Aux Etats-Unis, la Gauche avait gagné le combat des idées progressistes dans les années 60 et 70 avec la fin de la guerre du Viet Nam, le politiquement correct, l’affirmative action. L’apogée des idées progressistes sera marquée par l’élection de Obama. La contre-offensive de la Droite conservatrice américaine sur le plan des idées, qui a commencé dès l’élection de Obama, a commencé à porter ses fruits avec le Tea party, l’élection Trump et la désignation de juges conservateurs à la Cour suprême, qui sont en train de déconstruire politiquement et légalement tout l’héritage progressiste des années 1960.
Même si la Cour suprême va aujourd’hui à contre-courant de l’évolution de la société, de la politique et de l’histoire, personne ne va accuser les juges d’écrire sous la dictée l’Exécutif, de l’opinion ou des lobbys, parce qu’au fond, le Droit est avant tout un «conflit d’interprétations» comme le fameux titre d’un livre de Paul Ricoeur. C’est la même Cour suprême qui avait légalisé l’avortement qui aujourd’hui le révoque parce que les juges conservateurs y sont majoritaires. C’est ça la democratie, c’est avant tout des batailles d’idées qu’on applique dès qu’on a la légitimité que confère l’élection. Une bataille d’idées que cette même Droite est en train de gagner en France avec la normalisation et la banalisation des idées d’extrême droite depuis que Marine le Pen a eu la bonne idée de changer l’emballage du Front national.
Au Sénégal dans notre vieille démocratie, point de bataille d’idées. C’est pourquoi on est passé du débat des Professeurs et des agrégés comme Senghor, Me Abdoulaye Wade, Cheikh Anta Diop, Abdoulaye Bathily aux activistes, aux rentiers de la tension et aux insulteurs. Le débat politique a quitté les marbres du Sénat pour la poussière du Colisée, avec ses gladiateurs.
AMADOU ALI MBAYE BARRICADE L’UNIVERSITÉ
Bisbilles entre le recteur et le Sudes/ Esr, Décidément, la tension entre le recteur de l’Ucad, Amadou Ali Mbaye et les enseignants de l’Institut de Français pour les Etudiants Etrangers (Ifee) n’est pas près de s’atténuer.
Les portes de l’Ucad ont été fermées hier à la presse venue massivement couvrir le sit-in du Sudes/Esr devant le rectorat. Une situation qui a soulevé l’ire du Sg Oumar Dia et Cie. Les syndicalistes ont finalement tenu la manifestation devant les barricades de la sécurité. Ils ont dénoncé la rétention des salaires de deux enseignants de l’Ifee…
Décidément, la tension entre le recteur de l’Ucad, Amadou Ali Mbaye et les enseignants de l’Institut de Français pour les Etudiants Etrangers (Ifee) n’est pas près de s’atténuer. Pis, le recteur utilise des agents de sécurité de l’Ucad pour interdire à la presse l’accès aux manifestations du Syndicat Unitaire et Démocratique des Enseignants du Sénégal/Enseignement Supérieur et Recherche (Sudes/Esr).
Hier, c’est une scène inédite qui a eu lieu à l’entrée de l’Ucad donnant sur la corniche Ouest qui jouxte le rectorat. Les agents de sécurité de l’université ont refusé l’accès du rectorat à la presse. Venus intercéder en leur faveur, le Sg du Sudes, Oumar Dia et ces collègues, ont failli en venir aux mains avec les vigiles qui ont catégoriquement refusé de lever les barrières à la presse. C’est finalement devant l’entrée que la manifestation s’est tenue.
Prenant la parole, la Sg adjointe du Sudes/Esr, Dr Ndiabou Séga Touré, a dénoncé avec la dernière énergie les agissements du recteur avant d’exiger le rétablissement de leurs salaires, lui et son collègue Thierno Ly, retenus depuis le mois d’octobre. « Je suis avec mes collègues de l’Ucad pour un sit-in qui avait été prévu à l’entrée du rectorat mais qui est déplacé à la porte de l’université, sur le chantier. Ce, parce que des agents de sécurité de cette université ont reçu l’ordre de ne pas laisser entrer la presse. Ce qui est une violation au droit à l’information.
Le second point, c’est que nous avons entendu dire que cette université maintenant, il paraît qu’elle est privée. Nous dénonçons ce qui s’est passé et qui nous a obligés à déplacer ce sitin qui se voulait pacifique à la porte du rectorat et non dans la rue », peste l’enseignante.
Poursuivant, elle semble ne pas en croire ses yeux, cette scène d’interdiction de l’accès à l’université à un professeur gradé. «Non seulement les journalistes avaient été empêchés d’entrer, mais un professeur, François Joseph Cabral, qui était dans sa voiture avec son macaron de l’université, vêtu de sa toge, a aussi été empêché d’accéder à son lieu de travail». Ce qui, dit-elle, est un acte «inqualifiable et grave. Nous prendrons nos responsabilités par rapport à cela», assure la syndicaliste d’un ton ferme.
Dans la foulée, elle aborde la raison du sit-in. «Cela fait 05 mois que mon collègue Thierno Ly et moi (Ndiabou Séga Touré) sommes privés de salaire. Suite à ce qu’il est convenu d’appeler maintenant la crise à l’Ifee, il ne s’agit pas d’une coupure de salaire pace que ce n’est pas administratif. C’est une privation de salaire. Le recteur a bloqué nos salaires parce que nous avons osé contester un acte administratif illégal qu’il a pris l’année dernière. » Une situation qui a soulevé l’ire des syndicalistes qui entendent mener le combat afin que leurs collègues recouvrent leurs salaires. «C’est le règne de l’arbitraire qui est maintenant à l’université et que nous combattons avec ce recteur. Il a installé l’illégalité ; ce sont toutes sortes de lois relatives aux franchises universitaires, aux libertés académiques voire les libertés individuelles qui sont violées régulièrement par le recteur. Nous voulons qu’il rétablisse nos salaires qu’il a bloqués sans procédure administrative. Nous n’avons jamais été notifiés de cette coupure de salaire. On n’a jamais reçu de courrier relatif à cela. Et nous n’avons jamais été notifiés d’une procédure à notre encontre», déplore-t-elle et de poursuivre droit dans ses bottes : «Nous ne demandons aucun avantage. Mais que ce recteur respecte la loi, les enseignants de cette université et l’université elle-même. Il n’a montré aucun respect pour l’établissement qu’il est censé diriger et dont il est garant du fonctionnement et du respect de la loi», laisse-t-elle entendre. Interpellé sur les actions qu’ils ont entreprises afin de régler cette situation, elle rétorque : «Nous avons toujours été dans une démarche de sortie de crise. Mais toutes les médiations qui ont été mises en œuvre se sont heurtées à un mur du côté du recteur. Et si cette suspension des salaires persiste, il n’est pas exclu que l’on arrive à la rétention des notes», avise la secrétaire adjointe du Sudes/Esr.
L'AFRIQUE DE L'OUEST ET DU CENTRE, PLATEFORME TOURNANTE DU TRAFIC ET DE LA CONSOMMATION DE LA DROGUE
Longtemps considérée comme une simple zone de transit, l’Afrique de l’Ouest et du Centre est aussi devenue une région de forte consommation de drogues, selon l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC)
Longtemps considérée comme une simple zone de transit, l’Afrique de l’Ouest et du Centre est aussi devenue une région de forte consommation de drogues, selon l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC).
A l’occasion du lancement de son rapport mondial sur les drogues, lundi à Abidjan, l’ONUDC souligne que dans cette région, «9,7% de la population âgée de 15 à 64 ans a consommé du cannabis en 2020 et 2,4% des opioïdes pharmaceutiques à des fins non-médicales». C’est plus que «les estimations au niveau mondial qui s’élèvent respectivement à 3,8% et 1,2%», selon l’ONUDC.
L’organisme de l’ONU précise que «la consommation de drogue en Afrique touche principalement les jeunes hommes de moins de 35 ans» et que «93% des personnes traitées pour des troubles liés à la consommation de drogues en Afrique sont des hommes» dont «l’âge moyen est d’environ 30 ans».
L’ONUDC souligne en outre que «les atteintes à l’État de droit générées par les conflits et les tensions politiques offrent un environnement propice à la production et au trafic de drogues, générant des revenus aux groupes armés qui, à leur tour, alimentent les conflits».
LE NOUVEAU PLAN DES URGENCES HOSPITALIÈRES LANCÉ
La ministre de la Santé et de l’Action sociale, Marie Khémess Ngom Ndiaye, a procédé, hier, au lancement officiel du plan stratégique national d’amélioration de la prise en charge des urgences au Sénégal (2022-2026)
La ministre de la Santé et de l’Action sociale, Marie Khémess Ngom Ndiaye, a procédé, hier, au lancement officiel du plan stratégique national d’amélioration de la prise en charge des urgences au Sénégal (2022-2026). Un plan quinquennal pour répondre à la «nécessité de rendre performante la gestion de ces urgences pour un meilleur accès et une prise en charge de qualité».
Lors des assises de septembre 2019, l’ex- ministre de la santé, Abdoulaye Diouf Sarr, avait préconisé «un diagnostic profond du service des urgences dans les hôpitaux». Un an plus tard, -exactement le 02 janvier 2020-, l’ancien ministre avait sorti une note circulaire demandant aux directeurs d’hôpitaux d’assurer et de veiller à ce que «tout patient qui arrive à l’hôpital en situation d’urgence puisse être pris en charge en priorité».
Sinon, dit-il, «organiser sa référence vers une structure secondaire en collaboration avec la structure accueillante ou avec le Samu sur validation de la décision par le médecin, responsable de garde. Diouf Sarr disait à l’époque que, «aucun patient ne doit être référé vers une autre structure sans que la régulation ne soit faite au préalable». En d’autres termes, la prise en charge à l’arrivée du patient doit toujours être organisée à partir de la structure qui a décidé de référer le patient. Que cela doit aussi se passer dans des conditions optimales et d’aisance. «Aucun patient ne doit être évacué à bord d’un véhicule autre qu’une ambulance», pouvaiton lire dans le document. Deux années se sont écoulées, les manquements persistent surtout par rapport au service d’accueil et d’urgence. En dépit des efforts consentis et des actions menées, les urgences pré hospitalières et hospitalières demeurent préoccupantes par rapport à l’offre et l’accueil. Ce qui, selon l’actuelle ministre de la Santé et de l’Action sociale, demande une amélioration afin de garantir des soins de qualité et des soins équitables aux usagers de l’hôpital.
Des efforts consentis pour une amélioration
Mme Marie Khémess Ngom Ndiaye reconnait tout de même les efforts consentis. «Depuis ces assises, de nombreuses actions ont été menées, des mesures prises et d’énormes efforts consentis pour améliorer la gestion des urgences. Des améliorations assez substantielles ont été enregistrées. Hélas, elles ne sont pas suffisantes.
En conséquence, les urgences pré hospitalières et hospitalières continuent encore de nous préoccuper. Presque quotidiennement, c’est la source d’interpellation des usagers du service public de santé. Il ne se passe pas un seul jour sans que le ministre ne soit alerté sur une situation relative aux urgences. De pareilles situations traduisent-elles des dysfonctionnements dans la gestion des urgences au Sénégal? Nous pouvons trouver la réponse dans le diagnostic posé à travers le document stratégique soumis à notre validation aujourd’hui», a-telle dit au cours de la cérémonie de lancement du plan stratégique quinquennal portant amélioration de la prise en charge des urgences sanitaires au Sénégal.
Dr Ngom insiste pour dire que «la situation des urgences dans notre pays y est présentée avec des acquis certains, mais aussi et surtout avec des insuffisances notoires et des défis à relever» pour une prise en charge optimale des urgences médicales au Sénégal où leur gestion présente de réels gaps. D’après ses explications, la vision stratégique proposée dans ce plan répond de la «nécessité de rendre performante la gestion de ces urgences conformément à la volonté du chef de l’Etat Macky Sall qui, en me nommant à la tête du département, m’a donné une feuille de route claire qui interpelle les problématiques liées aux urgences sanitaires. J’ai pu mesurer son engagement et sa détermination à améliorer de manière durable la gestion des urgences sanitaires qui constituent un des marqueurs, essentiel de la bonne marche de notre système de santé et d’action sociale. Je me suis engagée à faire de cet objectif avec vous et tous et toutes celles qui comptent apporter leur pierre à l’édifice». Elle dit être consciente du travail colossal qui l’attend par rapport à la gestion des urgences. Qui reste «un vaste chantier auquel nous devons porter attention ensemble en nous interrogeant sur les causes profondes des dysfonctionnements et en imaginant des solutions durables qui puissent garantir un meilleur accès aux services d’urgences et une prise en charge de qualité».
Sur ce, le tout nouveau Chef du département de la Santé dit compter sur la première ressource, à savoir les professionnels et les autres collaborateurs éparpillés un peu partout au niveau des services des structures chargées des urgences. «Nous devons-nous mobiliser davantage autour de ce vaste chantier pour l’amélioration des urgences sanitaires. J’insiste particulièrement sur l’accueil qui doit être mieux organisé face aux exigences de nos compatriotes devenues de plus en plus fortes. Mais aussi sur la nécessaire collaboration entre les services de mon département et les sapeurs-pompiers ou les structures privées, entre autres», a-t-elle exhorté.
MANIFESTATION DE YAW, LES COMMERÇANTS PLAIGNENT LEURS CAS
Les commerçants établis aux Allées du centenaire ne souhaitent pas que la marche de Yewwi Askan wi se fasse. Parce qu’à chaque occasion, ils sont victimes de vols à l’arraché ou d’agression.
Les commerçants établis aux Allées du centenaire ne souhaitent pas que la marche de Yewwi Askan wi se fasse. Parce qu’à chaque occasion, ils sont victimes de vols à l’arraché ou d’agression. Ils ont face à la presse hier pour implorer le report de la marche de l’opposition jusqu’après les fêtes de tabaski.
C’est sous ce rapport qu’Aissatou Sarr déclare : nous ne voulons que la paix. Les partis politiques et leurs militants ont leur carte d’électeur ils n’ont qu’à sanctionner le pouvoir en place s’ils le souhaitent. Parce que pour nous les politiciens ne sont là que pour leurs intérêts opposition comme pouvoir ».
Meurtrie par cette situation qui ne demeure pas sans conséquence, la commerçante revient sur sa mésaventure conséquence de la dernière manifestation. Elle confie : « lors de la dernière manifestation, j’ai été victime de vol à l’arraché. C’est l’argent qui devait servir à acheter de la marchandise qui m’a été volé par une bande d’agresseurs me l’ont arraché ». Parce ce qu’il faut savoir : « à chaque fois qu’il y a manifestation, il y a des agresseurs et des voleurs qui infiltrent les rangs afin de commettre leurs forfaits », a t-elle défendu.
Massamba Ndiaye, porte-parole du jour s’inscrivant sur cette même lancée soutient : « chaque citoyen a le droit de faire une marche mais nous estimons que ce n’est pas le bon moment. Nous qui sommes à Colobane et à centenaire, nous sommes les plus impactés de ces manifestations. Et nous n’avons que notre commerce pour soutenir notre famille. Malheureusement nous ne pouvons que donner notre point de vue et partager notre position. A chaque fois qu’il y a manifestation, nous sommes incapables de travailler. Parce qu’on sait quand est ce que la manifestation va commencer mais où ce qu’elle va prendre fin nous l’ignorons ».
Assez d’éléments qui ont poussé Poulo Ba pour plaider le report des manifestations . « Nous souhaitons que la marche soit reportée jusqu’après les fêtes. Parce que nous n’avons que les fêtes pour faire de bonnes affaires. Les ventes marchent en cette période que ce soit les commerçants de tissus, d’articles de femmes que ceux qui vendent les moutons ».
«MACKY EST EN TRAIN D’ÉCRIRE LES PAGES LES PLUS SOMBRES DE NOTRE DÉMOCRATIE»
Bougane Gueye Dani, leader coalition Gëm Sa Bopp, est un homme très révolté de la gestion politique du pays par l'actuel président de la République
Bougane Guèye Dani est un homme très révolté de la gestion politique du pays par le président Macky Sall. Le leader de « Geum Sa Bopp » durcit le ton. Il indique que le chef de l’Etat met en place une stratégie de répression jamais vue dans l’histoire politique du Sénégal rien que pour brimer des opposants. L’administration sénégalaise et les institutions de la République sont partisanes et gèrent uniquement les intérêts de la coalition présidentielle. Pour le patron de D-Média, Macky Sall agit en tyran, c’est un despote éclairé qui doit pousser toute l’opposition à une synergie d’actions pour engager la bataille de la restauration de la démocratie sénégalaise qui vit les pages les plus sombres de son existence depuis les indépendances. Selon le leader de Guem Sa Bopp, le Sénégal est devenu de la vitrine démocratique de l’Afrique à la risée du monde par la seule responsabilité de Macky Sall. Et de personne d’autre ! « De Yonou Yakaar, on est arrivé à Yonou Yakkuté. Il nous avait promis l’espoir, le yakaar, l’espoir, aujourd’hui, c’est le yakkuté » s’étrangle Bougane Gueye Dani sur un ton dur et déterminé. Entretien…
Le Témoin : Le Sénégal est secoué par une crise politique inquiétante. Quelle lecture faites-vous de cette situation politique ?
Bougane Gueye Dani : La situation politique actuelle est un coup dur pour la démocratie sénégalaise. Nous avons toujours été une étoile en matière de démocratie en Afrique. Le Sénégal a été toujours côté comme étant un bon élève en la matière. En débarquant en Afrique, beaucoup d’autorités de pays occidentaux choisissent le Sénégal parce qu’on est un modèle de démocratie exemplaire. Aujourd’hui, le Ghana, le Kenya, le Botswana et j’en passe nous ravissent la vedette. Ce qui est vient se passer, des manifestations réprimées dans le sang, le concert de casseroles, ternissent l’image du Sénégal et dégradent la signature de notre pays. Si des pays comme le Niger sont obligés de nous donner des leçons de démocratie, il y a de quoi revoir notre copie. Il faut oser le dire que celui qui en charge de préserver cette image de la démocratie sénégalaise, c’est le président Macky Sall qui malheureusement est en train d’écrire des pages sombres de notre histoire politique. Comment pouvez-vous comprendre qu’on soit à un recul démocratique à telle enseigne qu’on interdise des manifestations sachant que le Sénégal est soumis à un régime déclaratif ? Si le gouvernement est obligé de mobiliser 6000 agents des forces de l’ordre pour interdire une manifestation, alors qu’il en faut moins de 100 pour pouvoir l’encadrer après une déclaration. Je crois que le seul et unique responsable de cette barbarie, de cette tuerie, de ces martyrs, c’est encore une fois le président Macky Sall. Pourtant, il pouvait avoir de la hauteur et permettre à l’opposition d’organiser ses manifestations, ses contestations. Et je crois qu’aujourd’hui, si nous sommes arrivés à un concert de casseroles, c’est parce que tout simplement l’opposition veut se faire entendre. C’est le moment de rappeler à tout le monde que ce pays nous appartient, chacun doit faire de son mieux pour renforcer les institutions. Au premier chef, cette mission incombe au président de la République. Ce qui est clair également, c’est que personne n’a intérêt à ce que nos institutions soient atteintes. Opposants que nous sommes, nous sommes appelés demain à diriger cette charmante et belle République. L’Etat, certes doit rester fort, mais cela ne sert à rien d’être dans une logique de bras de fer là où il est bien possible d’autoriser des manifestations et de permettre à des Sénégalais qui ont pignon sur rue, qui ont une adresse et qui ont envie d’exprimer une liberté garantie par notre Constitution.
La situation de chaos engendrant mort d’hommes n’est-il pas un très mauvais signal que le Sénégal envoie au monde…
Au-delà de l’aspect politique et démocratique, venons-en d’abord à la question de l’environnement économique. Je suis un entrepreneur qui estime que pour que les investisseurs locaux fassent leur travail, il faut qu’il ait climat politique et social apaisé. Cela encore une fois incombe au président de la République. Si aujourd’hui il y a une tension politique au Sénégal, nos investisseurs locaux auront assez d’arguments pour ne pas investir. Il en est de même pour les investisseurs étrangers. Le président de la République n’a aucun intérêt à placer le pays dans une situation délicate telle que nous la vivons actuellement. Les yeux et les caméras du monde sont braqués sur le Sénégal qui a toujours été un pays modèle en matière de démocratie. Ce qui me désole dans la stratégie de Macky Sall, c’est cette tyrannie de la peur. Cette stratégie pour apeurer les Sénégalais. On nous parle d’infiltration, de tentative de sabotage, de rébellion, d’actes de sabotage etc... Des choses et autres éléments de langage qui consistent à apeurer les populations. Pour le peu qu’on sait, les tyrans utilisaient souvent ces pratiques.
Pour vous Macky Sall est un tyran…
Mais à la limite, c’est un despote éclairé. L’autre jour, je disais à quelqu’un que l’Armée est en train d’être équipée avec du matériel de maintien de l’ordre. Je lui disais 62 ans après notre indépendance, c’est la première fois que notre Armée soit équipée pour aller maintenir l’ordre public, cela veut dire que nous avons un problème. Jamais, l’Armée n’a été appelée en renfort dans des situations électorales ou pré-électorales. C’est vraiment je ne m’en rappelle pas peutêtre j’étais encore très jeune. 62 ans après notre accession à la souveraineté internationale, c’est la première que l’intendance des Armées soit dotée du matériel de répression ou de maintien de l’ordre. C’est une indication extrêmement dangereuse. Je voudrais attirer l’attention de tous les acteurs. Attention au chaos !
Quand vous dites « tous les acteurs », vous faites aussi référence à l’opposition ou à la mouvance présidentielle ?
J’ai bien dit tous les acteurs. Si on est dans une logique de combat et en un moment on se retrouve face à un concert de casseroles pour se faire entendre, cela veut dire tout simplement qu’on devrait se tourner autour de l’écoute. Mais cette écoute attentive doit provenir du président de la République. Quand je dis attention aux acteurs et au chaos. Si notre Armée est dotée de matériels pour faire des missions de maintien de l’ordre, 62 ans après notre indépendance, cela pousse à réfléchir. Personne n’a intérêt à ce que les choses s’enveniment. Il faut beaucoup plus de recul et d’analyse par rapport à cette situation. Mais je dis et répète que le seul et unique responsable, celui qui peut décanter la situation tout de suite, c’est le chef de l’Etat, le président Macky Sall. Et c’est le lieu de l’interpeller pour lui dire que le Sénégal mérite beaucoup plus que ça. Le président Macky Sall ne doit pas faire moins que ces prédécesseurs en matière de préservation de nos acquis démocratiques.
Les institutions judiciaires notamment la Cour Suprême, le Conseil Constitutionnel sont pointées du doigt sur leurs rôles dans cette crise. Elles ont sanctionné votre coalition Geum sa Bopp. Elles ont été accusées d’être partisanes. Ces accusations sont-elles fondées ?
A travers ces décisions rendues par des institutions judiciaires, tous les acteurs et Sénégalais sont interpellés. Il nous faut aller vers une refonte de l’Etat au Sénégal. Nous avons une administration couchée, partisane, à la solde des tenants du pouvoir. L’Etat, c’est nous tous, mais ceux qui incarnent le pouvoir aujourd’hui, c’est Macky Sall et sa coalition. Il est important que l’Administration comprenne qu’elle soit équidistante de tous les états-majors politiques. C’est exactement le contraire de ce qui est en train de se passer, les dysfonctionnements notés sur les listes des coalitions de l’opposition qui les ont découverts, c’est l’administration. Et pourtant BBY dans ses listes avait les mêmes impairs. Mais on a laissé passer. C’est le mandataire de Yewwi qui a découvert les incongruités dans les listes de BBY. Cela veut dire que l’Administration a passé les impairs de BBY sous pertes et profits. C’est extrêmement dangereux. L’administration doit jouer le rôle de soupape pour garantir la stabilité dans notre pays. Je suis pour une refonte totale de l’administration sénégalaise. Depuis une trentaine d’années, nous avons des autorités administratives politiciennes. La preuve, dans plusieurs corps de l’Etat, il faut faire la politique pour gravir les échelons. Ce n’est plus le mérite qui paie, non c’est l’accointance, c’est la couleur de la casquette que tu arbores qui te permet de gravir les échelons. Regardez ce qui s’est passé au niveau du Conseil constitutionnel et de la Cour suprême. Tout le monde sait que les juridictions régionales et internationales ont un poids supra sur l’Etat du Sénégal. J’ai été stupéfait le 23 juin dernier avec la Cour suprême quand le président de la Chambre administrative faisait sa délibération, il n’osait même pas citer l’arrêté de la Cour de justice de la Cedeao sur l’élimination du parrainage parce que tout simplement il sait de manière incontestable qu’il ne peut pas dire aux Sénégalais que la Cour de justice de la Cedeao ne peut pas donner des injonctions à l’Etat du Sénégal. Si l’Etat du Sénégal a ratifié des conventions, il se doit de les respecter. Malheureusement on a une justice aujourd’hui au service du président de la République parce que tout simplement c’est le chef de l’Etat qui dirige le Conseil supérieur de la Magistrature. La carrière de ces magistrats sont entre les mains du président de la République et de son bon vouloir. Il faut mettre un terme à cela et c’est exactement ce qu’il y a dans le programme de Geum Sa Bopp.
Justement pourquoi continuez-vous de dénoncer la mise à l’écart de Geum Sa Bopp qui n’aurait pas respecté les critères de la loi du parrainage…
C’est parce que Macky Sall a plusieurs cordes à son arc. Geum sa Bopp, c’est le parrainage, une autre coalition, c’est la parité, une autre c’est peut-être les erreurs de confection des listes ou des histoires de caution. Alors qu’en réalité, une élection, l’administration et les institutions judiciaires doivent être dans une logique d’encadrement et non dans un postulat d’élimination des candidats qui postulent. Je disais tout de suite que Macky Sall est un tyran et un despote qui fait tout en s’adossant sur un levier juridique. C’est pourquoi d’ailleurs ces différentes marches que l’opposition a initiées, il a la police, la gendarmerie, la justice, il suffit qu’il interdise ou qu’il demande au Préfet d’interdire la manifestation. Si vous bravez cette interdiction, vous tombez sous le cout de la loi et du désordre. Il ne faut pas qu’on permette à Macky Sall de mater et d’utiliser la justice contre nous qui sommes des opposants et qui avons envie de changer les choses. Pour éliminer ses adversaires juridiques, Macky Sall active le levier juridique. L’apartheid, c’était une loi, même si cette dernière était illégitime, c’était une loi. Malheureusement nous avons en face de nous quelqu’un qui n’a pas de scrupules, qui est prêt à marcher sur des cadavres pour se maintenir au pouvoir. Souvent d’ailleurs, et c’est le moment de pointer du doigt la classe politique, on nous dit que Macky Sall ne doit être dans une logique de choisir ses candidats, mais il n’a pas été le seul. Rappelezvous le président Abdoulaye Wade a éliminé des candidats sur la base de ce système de parrainage réservé aux candidats indépendants. Ce système de filtre a été élargi. C’est cela qui nous a couté notre participation aux législatives. Nous continuons à nous battre parce que nous avons une correspondance à la Cena avec les copies des cartes d’identités de parrains rejetés par la Dge en disant qu’ils ne sont pas électeurs, alors qu’ils sont bel et bien des électeurs, un numéro, un bureau et un lieu de vote. La Cena nous a écrit en nous demandant de lui renvoyer les documents qui ont été transmis à la Dge. Ce qui fut fait. Au moment où je vous parle, et cela depuis deux semaines, nous n’avons aucun document de la Cena. Pourquoi ? Parce que tout simplement la Cena ne peut pas dire que ces parrains ne sont pas des électeurs. Une fois qu’on aura l’information comme quoi ils sont des électeurs, cela veut dire que tout simplement qu’il y a un fait nouveau et que le Conseil constitutionnel devrait valider la candidature de Geum Sa Bopp. Nous avons fait la même procédure pour le ministère de l’Intérieur qui a reçu les copies des pièces d’identité de parrains qui ont été rejetés disant qu’ils ne sont pas des électeurs. Au moment où je vous parle, cela fait 20 jours, nous n’avons même pas d’accusé de réception du ministre de l’Intérieur. Cela montre qu’ils avaient planifié l’élimination de Geum Sa Bopp. Mais qu’ils se le tiennent pour dit, notre coalition n’est pas obnubilée par une représentation à l’Assemblée nationale. C’est pourquoi nous avons continué le combat pour la préservation des acquis démocratiques au Sénégal.
L’opposition incarnée par Yewwi pointe du doigt l’autre opposition incarnée par vous entre autres comme quoi votre engagement pour la préservation des acquis démocratiques reste encore faible. Ces accusations sont-elles fondées ?
J’ai toujours défendu et crié sur tous les toits que chaque chef de parti, nous autres mouvements citoyens, chacun peut avoir ses ambitions, mais il y a des luttes qui doivent être communes. La dernière manifestation autorisée de Yewwi Askan wi, notre délégation a participé. D’ailleurs, c’est le moment de décrier, de dénoncer l’arrestation arbitraire, la prise d’otage de Déthié Fall, de Mame Diarra Fam, de Ahmed Aïdara, de Guy Marius Sagna et de tous ces prisonniers qui sont des prisonniers politiques. Je rappelle qu’on a des sympathisants de Geum Sa Bopp arrêtés lors de ces manifestations. Cela veut dire tout simplement que nous sommes dans une logique de combats pour la préservation des acquis démocratiques. Nous avons été les premiers à dénoncer cette histoire de parrainage. Nous avons été les premiers à être éliminés par le parrainage. Il y a d’autres qui ont été éliminés suivant d’autres manipulations et pièges tendus par l’Administration qui est à la solde du président de la République. Tout cela doit s’arrêter, c’est pourquoi je demande la création d’une plateforme unique de lutte de toutes les forces vives de la Nation pour la défense des acquis démocratiques, en un mot pour la défense du peuple sénégalais qui est aujourd’hui détenteur d’une démocratie légendaire, acquise après des dizaines d’années d’âpres luttes. Des martyrs. Plusieurs personnes ont laissé leur sang. On se rappelle de l’épisode des 15 morts dont Mamadou Diop, mais rappelez-vous qui a payé les avocats du Commissaire Arona Sy alors que les organisations de droits de l’homme avaient esté en justice contre ce commissaire dont les frais d’avocat ont été payés par Macky Sall. Alors que ces jeunes sont morts pour permettre à Macky Sall d’accéder au pouvoir.
La posture de Macky Sall était-elle une trahison ?
Vous savez s’il y avait un mot plus lourd, je l’aurai utilisé. Macky Sall a tué l’espoir des Sénégalais. Le Yaakarr qu’’il nous a vendu est devenu désillusion. Je vous renvoie dans les premières déclarations de Macky Sall où il disait je le cite « Je ne suis pas là pour construire des routes, pour faire de grandes infrastructures, mais je suis là pour restaurer l’Etat de droit ». La démocratie n’est pas que politique, ni électorale, elle est sanitaire, économique, culturelle, religieuse. Aujourd’hui force est de reconnaitre que sur le plan économique, nous avons un Etat qui surfe sur des chiffres. Le vécu du Sénégalais lambda ne les intéresse pas. Comment vous pouvez comprendre qu’on est 529.000 familles dans la famine qu’on leur distribue 43 milliards à raison de 80.000 frs par famille et au même moment on prend 18 milliards de frs pour l’embellissement de la Corniche Ouest de Dakar, que le centre de santé de Diakhaye n’est toujours pas terminé et cela fait 11 ans que ce centre de santé est en construction. Et que vous savez que le bloc opératoire de l’hôpital Dalal Jamm n’est toujours pas opérationnel, à Diamnadio vous avez des abris provisoires, à Diakhaye 12 B à la cité Gendarmerie, ce sont des gens qui n’ont pas d’eau potable. Voilà le tableau de Macky Sall. On a l’impression que c’est quelqu’un qui assouvit ses rêves de jeunesse, dans la folie de grandeur, de faire du show off, mais comment faire pour bâtir l’homo-senegalensis, ce n’est pas son affaire. Vous allez les entendre dire qu’on a construit X hôpitaux de niveau 2, ou 3, et combien on devait en avoir. Le problème, ce n’est pas d’être dans une logique d’énumération, mais dans une logique de performance. Combien il en a fait et combien on devrait y en avoir ? Aujourd’hui, il a fait le voyage pour aller en Ukraine commander du blé comme si on n’est pas capable nous autres Africains de produire du blé. L’autre aberration. J’ai entendu le Mali autoriser 5500 moutons pour le Sénégal et 5500 pour la Côte d’Ivoire, c’est insulter le Sénégal. Nous avons une verdure, un fleuve, de l’eau, ce qu’il faut. Depuis 1960, le Sénégal est incapable de reconstituer le cheptel, cela veut dire tout simplement que ces autorités que nous avons devant nous, ce qui les intéresse, ce n’est pas le vécu du Sénégalais lambda, mais leur propre confort visuel. Si Macky Sall se permet de mettre 18 milliards de frs pour embellir le passage qu’il emprunte chaque jour, cela veut dire tout simplement que c’est cela qui l’intéresse. La maternité de Teumbe Mbaye dans la commune de Kabb Gaye qui n’a même pas de lits, à Samé Kanta dans la région de Kolda, ils ont un poste de santé terminé depuis 3 ans, il n’y a pas de personnel de santé. Voilà le Sénégal. Si Macky Sall se permet de doter nos forces de défense du matériel de maintien de l’ordre, cela veut dire tout simplement ce qui l’intéresse, c’est de voir comment réprimer, mais pas comment encadrer les populations pour leur permettre de voir le bout du tunnel sur le plan économique. Et surtout d’avoir de l’espoir pour des lendemains meilleurs. Ce n’est pas ce qui l’intéresse. Je ne suis pas nihiliste, certes, il a eu à faire, mais ce qu’il a fait par rapport à ce qu’il devait faire, c’est trop minime et ce n’est pas là qu’on l’attendait. Une question de priorités. J’ai dit dans une interview qu’il faut les états-généraux des priorités au Sénégal et celles-ci doivent être ciblées sur chaque secteur. Chaque année prendre deux à trois priorités, il ne faut pas en avoir 100 vous serez éparpillés. Par exemple sur le plan de l’éducation nationale, l’environnement académique, éradiquer problème des abris provisoires. Un programme a été lancé depuis trois ans, cela n’a rien donné parce que tout simplement les gens sont dans du faux. Une salle de classe est construite à 5 millions de frs, donc il faut alors 30 milliards de frs pour régler définitivement la question des abris provisoires. Les table-bancs, le contenu. Ils ont dégagé 10 milliards de frs pour les blouses. Si on parvient à mettre ces 10 milliards de frs en 2500 lots, dans chaque commune du Sénégal, 8 tailleurs seront capables de confectionner les blouses. Mais quand vous prenez ces 10 milliards de frs que vous remettez à un investisseur étranger, vous donnez un coup de pouce à un entrepreneur étranger au même moment vos entrepreneurs ici sont en train de chercher le diable pour lui tirer la queue. C’est dommage, c’est cela la recette Macky Sall. De Yonou Yakaar, on est arrivé à Yonou Yakkuté. Il nous avait promis l’espoir, le yakaar, l’espoir, aujourd’hui, c’est le yakkuté.