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19 mai 2025
Par Mamadou Abdoulaye SOW
LE PROJET DE LOI DE FINANCES DE L’ANNEE 2025 ET L’ARTICLE 68 DE LA CONSTITUTION
Le dépôt tardif du projet de loi de finances 2025 soulève une question juridique complexe et inédite. Ni la Constitution ni la Loi Organique relative aux Lois de Finances (LOLF) ne prévoient explicitement cette situation exceptionnelle
L ’article 68 alinéa 2 de l’actuelle Constitution fixe le délai de dépôt du projet de loi de finances de l’année sur le bureau de l’Assemblée nationale : « Le projet de loi de finances de l'année qui comprend notamment le budget, est déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale, au plus tard le jour de l'ouverture de la session ordinaire unique ». Selon l’article 63 du texte constitutionnel, la session ordinaire commence dans la première quinzaine du mois d’octobre et prend fin dans la seconde quinzaine du mois de juin de l’année suivante1 .
Les documents soumis au délai de dépôt.
L’article 68 de la Constitution utilise l’expression « projet de loi de finances de l’année, qui comprend notamment le budget» alors que l’article 57 alinéa 1 de la LOLF) renvoie à la notion de «projet de loi de finances de l’année, y compris le rapport et les annexes explicatives (…)2». Le législateur organique donne une portée plus large aux documents à déposer sur le bureau de l’Assemblée nationale. Conformément à l’article 57 de la LOLF, le rapport définissant l’équilibre économique et financier et les annexes explicatives de l’année sont également soumis à la même date limite de dépôt du projet de loi de finances initiale.
Le délai de vote.
. En conformité avec le principe de l’annualité, l’article 68 alinéa 3 de la Constitution impose à l’Assemblée nationale un délai de soixante jours au maximum pour voter le projet de loi de finances de l’année. Le point de départ du délai de 60 jours. Le dépôt de l’ensemble des documents mentionnés cidessus fait courir le délai constitutionnel d’examen du projet de loi de finances de l’année. La question est posée de savoir si le délai de 60 jours est un délai franc ou pas et s’il est appliqué « la règle rigoureuse du die a quo (le jour à partir duquel) et du dies ad quem (le jour vers lequel) selon laquelle le premier et le dernier jour sont pris en considération3» .
La suspension du délai. Que se passerait-il pour la computation du délai constitutionnel s’il est fait application de l’article 86 de la Constitution (dépôt d’une motion de censure) ou de l’article 87 (dissolution de l’Assemblée nationale) ? S’il y a dépôt d’une motion de censure, le délai est normalement suspendu. En cas de mise en place d’une nouvelle législature par suite d’une dissolution de l’Assemblée nationale, le projet de loi de finances devrait être retransmis à la nouvelle Assemblée nationale, après son installation, ce qui a pour conséquence d’ouvrir un nouveau délai de 60 jours.
Les procédures exceptionnelles de l’article 68 de la Constitution en cas de retard dans le dépôt ou d’absence de mise en vigueur du projet de loi de finances avant le 1er janvier.
Si le dépôt est fait en temps utile, le délai de soixante jours au plus dont dispose l’Assemblée nationale permet une adoption du budget au plus tard le 15 décembre. Toutefois, ce délai peut ne pas être respecté s’il y a retard du Gouvernement dans la préparation de la loi de finances, en cas de carence de l’Assemblée nationale ou de crise affectant le fonctionnement des pouvoirs publics. Il peut également arriver que la loi de finances votée ne puisse être promulguée avant le 1er janvier parce que déclarée non conforme à la Constitution. Que le retard soit imputable au Gouvernement ou à l’Assemblée nationale, des procédures spéciales ont été prévues par le droit constitutionnel financier (art 68 Constitution et art 57 LOLF) afin d’éviter un vide budgétaire préjudiciable à la continuité des services publics.
La question principale qui est traitée dans la présente étude est la suivante : que se passerait-il en cas de dépôt très tardif du projet de loi de finances initiale c’est-à-dire bien au-delà de la première quinzaine du mois d’octobre comme c’est le cas avec le budget 2025 ? Ni la Constitution ni la LOLF ne répondent à cette interrogation. Autrement dit, « ni la Constitution ni la LOLF n’offrent de solutions immédiates. Il faudrait alors imaginer une solution ou un subterfuge, par une interprétation (constructive) de ces textes4».
Nous rappellerons dans une première partie les procédures spéciales prévues par le droit constitutionnel financier en vigueur. Dans une seconde partie, nous exposerons quelques procédures particulières pouvant s’appliquer au cas de figure du projet de loi de finances de 2025 déposé bien au-delà du délai légal.
I. Les procédures d’urgence applicables au cas où la loi de finances de l’année n’est pas votée dans le délai prescrit
Elles sont régies par l’article 68 de la Constitution et l’article 57 de la LOLF. A côté de ces procédures, il en existe d’autres qui ne seront pas étudiées ici : la procédure du vote bloqué (article 82 de la Constitution), la mise en jeu de la, responsabilité du Premier ministre sur le projet de loi de finances (article 86 alinéa 6 de la Constitution), la mise en vigueur de la loi de finances par ordonnance de l’article 77 de la Constitution ou par simple décision du Président de la République en cas d’application de l’article 52 de la Constitution
La Constitution fait la distinction entre l’hypothèse d’un retard dans le dépôt par suite d’un cas de force majeure (carence «involontaire» du pouvoir exécutif) et celle d’un retard imputable à la carence du pouvoir législatif.
Carence du pouvoir exécutif : l’hypothèse de la force majeure de l’article 68 alinéa 4 de la Constitution
En des termes laconiques, le quatrième alinéa de l’article 68 de la Constitution stipule : «Si, par suite d’un cas de force majeure, le Président de la République n’a pu déposer le projet de loi de finances de l’année en temps utile pour que l’Assemblée dispose, avant la fin de la session fixée, du délai prévu à l’alinéa précédent, la session est immédiatement et de plein droit prolongée jusqu’à l’adoption de la loi de finances ». Selon la procédure prévue par la disposition constitutionnelle précitée, un délai supplémentaire est accordé aux députés pour compléter le délai légal de 60 jours. L’hypothèse pour laquelle cet alinéa de l’article 68 est prévu n’existe plus depuis l’instauration de la session ordinaire unique qui ne peut faire l’objet d’une prolongation en vue de poursuivre la discussion budgétaire. C’est ce qui explique la non prise en considération de cette hypothèse par le législateur organique au niveau de l’article 57 de la LOLF de 2020. En réalité, cette hypothèse, qui ne prévoit aucune sanction, renvoie à l’hypothèse où le projet de budget serait voté dans le délai garanti par la Constitution mais seulement après le 1er janvier.
Carence du pouvoir législatif : les hypothèses des alinéas 5 et 6 de l’article 68 de la Constitution
Le retard est imputable à l’Assemblée nationale si le vote du budget n’est pas intervenu à l’expiration du délai de 60 jours alors que le Gouvernement l’a déposé en temps utile c’est à dire au plus tard le jour de l’ouverture de la session ordinaire unique.
Si l’Assemblée nationale n’a pas émis un vote jusqu’à l’expiration du délai légal, le Président de la République est habilité à mettre en vigueur par décret le projet de loi de finances de l’année Art. 68 alinéa 5 de la Constitution et Art. 57 alinéa 3 de la LOLF)
Comme l’a précisé J.L. Guièze, «(le Président de la République) ne peut notamment, prendre sous forme (de décret) n’importe quelle décision budgétaire aux lieu et place du Parlement mais seulement faire entrer en vigueur le projet même qui a été déposé, qui était examiné par (l’Assemblée)», modifié, le cas échéant, par des amendements adoptés par (l’Assemblée nationale), modifié, le cas échéant, par des amendements adoptés par elle)»5 et acceptés par le Président de la République. En un mot, le projet de budget mis en vigueur par décret est soit le projet initialement présenté par le Président de la République, soit ce même projet avec des amendements acceptés par le Président de la République. En résumé, si le Président de la République prend la décision de mettre en vigueur le projet de budget par décret cela ne signifie pas que la discussion budgétaire est obligatoirement arrêtée. Bien au contraire, elle se poursuit jusqu’au vote définitif dans le délai de 60 jours garanti par la Constitution. Ainsi, l’Assemblée nationale n’est pas complétement dessaisie.
Si la loi de finances n’a pu être mise en vigueur avant le début de l’année compte tenu de la procédure prévue à l’alinéa 5 de l’article 68 de la Constitution, la disposition de l’alinéa 6 du même article entre en application.
Cet alinéa énonce : « Si compte tenu de la procédure prévue ci-dessus, la loi de finances de l’année n’a pu être mise en vigueur avant le début de l’année financière, le Président de la République est autorisé à reconduire, par décret, les services votés».
La Constitution habilite le Président de la République à reconduire, par décret, les services votés mais ne l’habilite pas à continuer de percevoir les impôts existants. Comme dans l’hypothèse de l’alinéa 5, l’autorisation du Président de la République se substitue à l’autorisation parlementaire On est donc en face d’un décret mettant en vigueur les dispositions du projet de loi de finances sans avoir besoin d’une habilitation législative ; décret qu’on pourrait qualifier de décret «substitution». La disposition de l’alinéa 6 de l’article 68 de la Constitution est reprise en ces termes par l’article 57 alinéa 4 de la LOLF :« Si la loi de finances de l’année n’a pu être promulguée avant le début de l’année financière, le Président de la République est autorisé conformément aux dispositions de l’article 68 de la Constitution, à continuer de percevoir les impôts existants et à reconduire par décret les autorisations budgétaires»
Dans cette hypothèse, le législateur organique habilite le Président de la République :
- à continuer de percevoir les impôts existants conformément aux dispositions de l’article 68 de la Constitution (alors que ledit article est muet sur l’autorisation de continuer à percevoir les impôts existants) ;
- à reconduire, par décret, les autorisations budgétaires
L’article 57 de la LOLF ne précise pas la forme suivant laquelle est donnée l’autorisation de percevoir les impôts existants. S’il s’agit d’une loi spéciale, on peut se demander quelle est la valeur de cette loi et si elle constitue une autorisation provisoire qui devrait être ratifiée ultérieurement par le vote définitif de la loi de finances. Étant donné que les dispositions qu’elle contient sont celles qui peuvent être dans une loi de finances, cette loi spéciale provisoirement adoptée devrait avoir, en partie, le caractère de loi de finances, à l’instar des lois visées à l’article 5 de la LOLF 6 .
On a pu noter au passage un langage différent entre le pouvoir constituant et le législateur organique.
Tout d’abord, l’on remarque que la Constitution utilise les termes «mise en vigueur avant le début de l’année financière» tandis que la LOLF emploie les mots «promulguée avant le début de l’année». Nous croyons savoir que la mise en vigueur de la loi de finances par décret est différente de la promulgation de la loi de finances qui n’est pas présentée sous la forme d’un «décret de promulgation»
Ensuite, la Constitution maintient la notion de services votés7 alors que la LOLF de 2020 renvoie à la notion d’autorisations budgétaires comme technique à appliquer pour la préparation de la loi de finances de l’année. L’autorisation budgétaire, au sens du dernier alinéa de l’actuelle LOLF, représente «le volume de crédits nécessaires pour reconduire, à périmètre constant, les actions publiques dont les crédits ont fait l’objet de vote l’année précédente. L’expression «reconduction des autorisations budgétaires» employée par le législateur organique a-t-elle la même signification que celle «reconduction des services votés» utilisée par le Constituant? En troisième lieu, le législateur organique habilite le Président de la République à continuer de percevoir les impôts existants ce qui n’est pas prévu à l’article 68 de la Constitution.
Une harmonisation des dispositions de l’article 68 de la Constitution avec celles de l’article 57 de la LOLF s’impose.
II. Quelles procédures spéciales pour le cas de figure du projet de loi de finances de 2025 déposé bien au-delà du délai légal ?
L’application de l’article 68 de la Constitution et de l’article 57 de la LOLF est subordonnée à une condition objective : l’absence de vote sur le projet de budget à l’expiration du délai de 60 jours. L’article 68 de la Constitution et l’article 57 de la LOLF sont donc inapplicables au budget de 2025. Se référant à la jurisprudence française, on peut retenir qu’« en l'absence de dispositions constitutionnelles ou organiques directement applicables, il appartient, de toute évidence, au Parlement et au Gouvernement, dans la sphère de leurs compétences respectives, de prendre toutes les mesures d'ordre financier nécessaires pour assurer la continuité de la vie nationale ; qu'ils doivent, pour ce faire, s'inspirer des règles prévues, en cas de dépôt tardif du projet de loi de finances, par la Constitution et par (la loi organique relative aux lois de finances), en ce qui concerne tant les ressources que la répartition des crédits et des autorisations relatifs aux services votés 9».
Dans l'attente de la promulgation de la loi de finances de 2025, deux procédures d’urgence pouvaient être envisagées :
1. Première procédure • Demander l’adoption uniquement de la première partie de la loi de finances
Le Gouvernement pouvait demander à l’Assemblée nationale d’adopter uniquement, en procédure d’urgence, bien avant le 31 décembre, l’ensemble de la première partie de la loi de finances.
Rappelons qu’en application de l’article 44 de la LOLF, la première partie prévoit et autorise les recettes budgétaires et les ressources de trésorerie de l’Etat, arrête les données générales de l’équilibre budgétaire et financier, approuve le tableau de financement. et arrête les données générales de l'équilibre économique et financier.
En votant la première partie de la loi de finances, l’Assemblée nationale habilite le Gouvernement à percevoir les impôts en 2025 conformément à l’article 9 de la LOLF qui précise que «l’autorisation de percevoir les impôts est annuelle». En effet, depuis la LOLF de 2001, l’autorisation de percevoir les impôts ne résulte plus de plein droit du vote de la loi qui en a fixé l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement10.
Il est étonnant de constater que dans la première partie du projet de loi de finances de 2025, comme dans celle des lois de finances de 2020 à 2023, l’autorisation annuelle de percevoir les impôts de l’Etat ne ressort pas de manière explicite. L’article 3 du projet de loi de finances de 2025 avec l’intitulé «Autorisation de perception des impôts et taxes affectés aux collectivités territoriales et aux organismes publics» est ainsi libellé :«La perception des impôts et taxes affectés aux Collectivités territoriales et aux organismes publics continue d’être effectuée pendant l’année 2025, conformément aux lois et règlements en vigueur».
Alors que sous l’empire de la LOLF de 2011, l’article 2 de la loi de finances de 2019 intitulé «Autorisation de perception et évaluation des ressources» était ainsi rédigé : « I – L’Etat, les collectivités territoriales et les divers organismes sont habilités, pendant l’année 2019, à percevoir les impôts, produits et revenus qui leur sont affectés, conformément aux lois et règlements en vigueur et aux dispositions de la présente loi de finances. (…..) »
• Ensuite, prendre les décrets portant répartition des crédits applicables aux seuls services votés
Après avoir obtenu le vote de la première partie du projet de loi de finances de l’année, le Président de la République est habilité à prendre les décrets portant répartition des crédits correspondant aux services votés11. «La publication de ces décrets, qui sont immédiatement exécutoires, n’interrompt pas la procédure de discussion de la loi de finances12».
2. Seconde procédure
La perception des impôts d’Etat en 2025 a besoin d’une autorisation de l’Assemblée nationale conformément à l’article 9 de la LOLF. Il s’agit ici de :
• Faire voter, avant le 31 décembre, une loi spéciale autorisant simplement le Gouvernement à continuer à percevoir les impôts existants jusqu’à la promulgation de la loi de finances de de 2025
Dans le cas où le vote de la première partie de la loi de finances ne peut intervenir avant le début de l’année, l’autorisation de continuer à percevoir les impôts existants pouvait être donnée au Président de la République en vertu d’une loi spéciale (à examiner en procédure d’urgence) jusqu’ à la promulgation de la loi de finances initiale de 2025.
Rappelons, à ce titre, que l’obligation d’avoir cette autorisation législative trouve sa source dans «la règle de l’annalité des rôles13». Le projet de loi spéciale en question comporterait un seul article ainsi rédigé : “Jusqu’à la promulgation de la loi de finances de l’année 2025, la perception des impôts et taxes affectés à l’Etat, aux collectivités territoriales et aux autres organismes publics continue d’être effectuée pendant l’année 2025, conformément aux lois et règlements en vigueur.”
• Ensuite, de signer les décrets portant répartition des crédits applicables aux seuls services votés
Selon nous, pour le législateur organique, les autorisations budgétaires réparties dans les décrets visés au dernier alinéa de l’article 57 de la LOLF peuvent être considérés comme des dotations ouvertes par la loi de finances c’est-à-dire la répartition, à titre provisoire, des dotations budgétaires correspondant aux autorisations budgétaires, tout en poursuivant normalement audelà du 31 décembre 2024 la procédure de vote du budget de 2025.
Pour conclure, ni la Constitution, ni la LOLF ne contiennent des dispositions juridiques directement applicables au projet de loi de finances déposé deux mois après la première quinzaine du mois d’octobre. Les procédures spéciales proposées ci-dessus, qui ne contournent pas l’autorisation parlementaire, s’inspirent des procédures d’urgence de l’article 68 de la Constitution et de l’article 57 de la LOLF. La mise en œuvre de ces procédures spéciales ne fait pas obstacle à l’ouverture des débats et à la poursuite de l’examen du projet de loi de finances de 2025 au-delà du 31 décembre 2024. Il n’y a donc aucune obligation légale de voter impérativement l’ensemble du projet de loi de finances de 2025 avant le 31 décembre 2024. Autrement dit, les députés de la nouvelle Assemblée ne devraient pas être pressés par le butoir du 31 décembre pour se donner le temps de discuter et de voter en toute connaissance de cause le projet de loi de finances de 2025 qui, faut-il le rappeler, est le premier budget de la nouvelle législature.
Mamadou Abdoulaye SOW
Inspecteur principal du Trésor à la retraite
1 L’alinéa premier de l’article 2 du Règlement intérieur de l’Assemblée nationale en vigueur dispose : « L’Assemblée nationale se réunit de plein droit en une session ordinaire unique. Celle-ci commence dans la première quinzaine du mois d’octobre et prend fin dans la seconde quinzaine du mois de juin de l’année suivante ».
2 La liste des annexes explicatives est donnée à l’article 45 de la LOLF.
3 Michel Paul, « Les finances de l’Etat », Economica, 1981, p.257.
5 J.L. Guièze, « Le partage des compétences entre la loi et le règlement en matière financière », LGDJ, 1974, p. 233.
6 En droit français, selon la décision n° 79-111 du 30 décembre 1979 du Conseil constitutionnel français, la loi en question est un « élément détachable, préalable et temporaire de la loi de finances ».
7 Au sens du dernier alinéa de l’article 57 de de la loi n° 2011-15 du 8 juillet 2011 portant loi organique relative aux lois de finances., on entendait par services votés « le volume de crédits nécessaires pour reconduire, à périmètre constant, les actions publiques qui 8 Le législateur organique sénégalais a repris ici la définition donnée dans le glossaire du Guide didactique de la Directive n°06/2009/CM/UEMOA du 26 juin 2009 portant lois de finances au sein de l’UEMOA (page 94).On s’étonne de retrouver une définition de la notion de services votés dans le Guide précité alors qu’à la page 53 du même Guide, il est précisé : « Concernant spécifiquement la partie dépense de la loi de finances, l’article 45 (de la Directive) procède : (…) à la suppression des notions de services votés et mesures /autorisations nouvelles en cohérence avec les nouveaux impératifs de budgétisation en base zéro (article 61 (de la Directive) ».
9 Considérant 2 de la Décision n° 79-111 DC du 30 décembre 1979 du Conseil constitutionnel français.
10 Voir art. 5 de la loi n° 75-64 du 28 juin 1975.
11 Rien ne s’oppose à ce que la procédure de l’article 61 de la LOLF s’applique au cas non explicitement prévu par le Constituant et le législateur organique.
12 P. Amselek, « Le budget de l’Etat sous la V République », LGDJ, 1966. p.519.
13 Comme l’a écrit M. Laferrière, « Puisque l’autorisation donnée à l’administration d’exercer sa compétence en vue du recouvrement de l’impôt ne lui est accordée que pour un an, cette compétence doit s’exercer dans la période pendant laquelle cette autorisation existe. L’impôt est autorisé pour une année seulement. Les opérations de mise en recouvrement de l’impôt doivent intervenir au cours de l’année pour laquelle seulement cette autorisation est valable. La mise en recouvrement devant s’entendre des opérations qui ont pour effet de créer à la charge du contribuable l’obligation de payer l’impôt, de rendre celui-ci exigible à son encontre, mais non des opérations ultérieures destinées à en opérer la perception. Ce qui fait naitre l’impôt à la charge du contribuable, c’est le rôle nominatif. Donc, comme l’impôt lui-même, le rôle est soumis à la règle de l’annalité. Les rôles sont annuels. Ils s’appliquent à une Annie déterminée et ne valent que pour elle.» M. Laferrière, « Cours de législation financière », rédigé d’après les notes et avec l’autorisation de M. Laferrière, Licence 3ème année 1945-1946, Les Cours de Droit, p. 243.
LA DECLARATION DE POLITIQUE GENERALE D’OUSMANE SONKO A LA UNE DE LA ¨RESSE DU WEEK-END
Les quotidiens dakarois parus ce samedi mettent en exergue la déclaration de politique générale (DPG), prononcée ce vendredi devant les députés par le Premier ministre Ousmane Sonko.
Les quotidiens dakarois parvenus ce samedi à l’Agence de Presse sénégalaise (APS) ont surtout mis en exergue la déclaration de politique générale (DPG), prononcée ce vendredi devant les députés par le Premier ministre Ousmane Sonko.
‘’Ousmane Sonko peint le Sénégal de demain’’, affiche en une le Soleil. Le quotidien national fait un large tour d’horizon de l’exposé du chef du gouvernement, qui a duré 2h15 mn. C’est une DPG qui ‘’acte le changement de voilure et fixe le cap’’, relève le Soleil.
Il met exergue les grandes lignes de cette DPG, informant par exemple que la loi d’amnistie votée en mars sera rapportée.
Le foncier, la réédition des comptes, l’agriculture, les phosphates, la fiscalité, etc., sont les grandes annonces du chef du gouvernement, relève le journal.
Sud Quotidien note que ‘’le grand oral plus ou moins réussi’’ du PM a été rythmé par des ‘’piques, répliques et déballages’’.
Selon le quotidien du groupe Sud Communication, ‘’le Premier ministre a profité, hier, vendredi 27 décembre, pour lancer des piques au régime sortant coupable à ses yeux, d’avoir mis le pays à genoux via un carnage organisé que la cour des comptes ne devrait plus tarder à confirmer dans son rapport tant attendu’’.
Walf Quotidien abonde dans le même sens que Sud quotidien. ‘’Grand oral réussi’’, s’enthousiasme le journal, citant les mesures fortes annoncées par Ousmane Sonko.
Passant en revue les grandes lignes de cette déclaration, le journal relève sa volonté de réinstaurer les taxes sur les appels entrants, la réciprocité du visa et le lancement de la traque aux délinquants à col blanc.
WalfQuotidien relève aussi la réaction de la députée de l’opposition, Aissata Tall Sall, pour qui la DPG ‘’c’est tout simplement du populisme’’.
‘’DPG du PM Ousmane Sonko : des hauts et débats’’, titre pour sa part L’Observateur, mettant en relief les grandes lignes de l’action gouvernementale pour un Sénégal nouveau.
Parlant de l’exercice auquel s’est livré le chef du gouvernement, le Quotidien évoque une ‘’déclamation de politique générale’’, notant qu’Ousmane Sonko solde ses comptes avec le régime de Macky Sall.
Le journal insiste sur le ‘’chapelet d’annonces sur des réformes’’, égrené par le PM devant les députés.
Il relaie ce propos de la députée de l’opposition Aissata Tall Sall, qui déclare : ‘’Si vous voulez abroger la loi, abrogez-la… et vous ferez face aux conséquences.’’
Le journal Vox Populi, l’As et Libération mettent l’accent sur les ruptures annoncées par le Premier ministre Ousmane Sonko.
‘’Cap sur 2025-2029, Sonko entre ruptures majeures et réformes de fond’’, lance Vox Populi, tandis que l’As met l’accent sur les ‘’sept ruptures pour transformer le Sénégal’’.
Le journal revient sur les mesures annoncées par Ousmane Sonko, notamment les trois d’entre elles visant à »endiguer le fléau de l’émigration irrégulière’’ et ‘’la gouvernance vertueuse version Sonko’’.
Par Malick CISS
REVEILLER NOTRE POTENTIEL ET OSER
Le régime du président Bassirou Diomaye Faye a présenté, ses ambitions pour faire du Sénégal un pays prospère. Y parvenir exige d’abord et surtout de compter sur nos propres ressorts qui devront nous porter vers le développement
Porté au pouvoir sur la base d’un mécontentement populaire dont les soubassements sont éminemment d’ordre socioéconomique, le régime du président Bassirou Diomaye Faye a présenté, hier, par la voix du chef du gouvernement, Ousmane Sonko, ses ambitions pour faire du Sénégal un pays prospère. Y parvenir exige d’abord et surtout de compter sur nos propres ressorts qui devront nous porter vers le développement.
C’est là tout le défi que se sont lancé Ousmane Sonko et son gouvernement. Et pour cause. Le drame de l’Afrique, c’est d’être le seul continent au monde à concevoir ses propres stratégies de développement en faisant du « copier-coller » d’autres modèles, sans prendre en considération ses propres singularités, ses forces à capitaliser et ses faiblesses à gommer pour aller de l’avant. Au vu des résultats après plus de 60 ans d’indépendance, force est d’en conclure que rompre avec cette manie de confier aux autres notre destin, notre sort, est devenu une urgence vitale. « Nous sommes capables de nous développer, et nous ne le ferons que par nous-mêmes », dit Ousmane Sonko, constant dans sa ligne souverainiste. Le seul préalable, c’est être conscient du potentiel qui sommeille en chacun de nous. Mais faudrait-il que nous acceptions de nous regarder dans le miroir pour croire en nous-mêmes. Le combat contre nos (pseudo) limites exige de nous départir du « complexe du colonisé », mais aussi de gommer toutes ces aspérités comportementales qui font le lit de la corruption, de la prévarication, de la prédation, aux antipodes de nos valeurs ancestrales de « Jub » (probité). Le Sénégal sera ce que les Sénégalais en feront. Les stratégies court-termistes, au-delà de nous rassurer (parfois faussement) face à la gravité de l’heure, doivent céder la place à ce que Ousmane Sonko appelle « une logique de vision et de planification à long terme » menant vers des résultats palpables et durables.
Le fétichisme autour des chiffres d’une croissance proche des deux chiffres a tellement laissé en rade des cohortes de Sénégalaises et de Sénégalais à cause du caractère extraverti de notre économie qu’à la fin, le commun des citoyens se demande bien à qui profitent ces performances. Certes, tout n’est pas négatif, mais le défi, c’est l’inclusivité pour le bien d’un peuple très éprouvé ces dernières années. C’est heureux que le Premier ministre ait donné, dans son discours, une place importante à l’équité sociale, « préoccupation prioritaire pour le gouvernement ».
Le défi, c’est aussi bâtir une paix sociale, qui est le socle de nos ambitions pour atteindre les objectifs d’émergence de la Vision « Sénégal 2050 », bâtie sur une justice non pas tyrannique, mais qui met le faible et le fort sur le même pied. L’abrogation en vue de la loi d’amnistie concourt à renouer avec ce principe qui donne à la justice tout son sens. Valoriser l’humain par une formation adéquate, mettre les ressources naturelles au profit du peuple sans oublier les générations à venir, faire renaître l’espoir chez les jeunes, sacraliser le bien public, parler d’égal à égal avec le reste du monde, tel est le pari du chef du gouvernement. Et comme le dit Baden Powell, « l’optimiste est une forme de courage qui donne confiance aux autres et mène au succès ». L’histoire a montré que l’optimisme et le courage réalisent des rêves.
VERS UNE NOUVELLE POLITIQUE FISCALE AU SENEGAL
le Premier ministre Ousmane Sonko a, lors de sa Déclaration de politique générale, annoncé une nouvelle vision pour la politique fiscale du pays, visant à améliorer l’efficacité de la collecte des recettes fiscales tout en renforçant la justice sociale
Dans un contexte économique marqué par des défis de développement et de réformes structurelles, le Premier ministre Ousmane Sonko a, lors de sa Déclaration de politique générale, annoncé une nouvelle vision pour la politique fiscale du pays, visant à améliorer l’efficacité de la collecte des recettes fiscales tout en renforçant la justice sociale. Cette politique repose sur plusieurs axes majeurs, destinés à augmenter la pression fiscale, rationaliser les dépenses fiscales et mieux cibler les exonérations, a-t-il dit.
Augmenter la pression fiscale à 20 %
Actuellement inférieure à 18 %, le taux de pression fiscale pourrait augmenter à 20 % selon les projections du chef du gouvernement. Cette mesure vise à renforcer les recettes fiscales de l’État, permettant ainsi une meilleure allocation des ressources pour les investissements dans les infrastructures, la santé et l’éducation.
Cette augmentation devra toutefois être accompagnée de réformes profondes pour éviter une pression trop forte sur les secteurs économiques vulnérables et garantir une collecte plus juste des impôts, a-t-il fait savoir.
L’un des éléments clés de cette nouvelle politique consiste à rationaliser les dépenses fiscales en réduisant les exonérations fiscales. Entre 2019 et 2022, les exonérations ont coûté au trésor public 2232 milliards de FCFA, un montant colossal qui aurait pu être utilisé pour financer des projets de développement. L’objectif est de mieux cibler ces exonérations afin de réduire leur impact budgétaire tout en augmentant les marges budgétaires disponibles pour d’autres investissements prioritaires.
Révision des exonérations fiscales
Face aux députés, ce vendredi, le Premier ministre a également annoncé qu’une évaluation approfondie de l’impact économique et social des avantages fiscaux sera réalisée. L’objectif est de mesurer leur efficacité et de vérifier si les exonérations accordées à certains secteurs ou entreprises ont réellement conduit à des résultats positifs pour l’économie nationale. Il s’agira de s’assurer que les avantages fiscaux contribuent réellement à la croissance économique et à la création d’emplois, et non à des dérives qui pourraient profiter à des secteurs privilégiés au détriment du bien-être collectif.
Le Premier ministre a également proposé la réalisation d’un audit exhaustif des mesures fiscales en place, dans le but de dresser une nouvelle matrice des mesures dérogatoires d’ici décembre 2025. Cet audit permettra de dresser un état des lieux précis de la situation fiscale du pays et de faire un état des lieux sur les mesures fiscales existantes, afin d’identifier celles qui nécessitent des ajustements.
Le chef du gouvernement a enfin fait savoir que ertaines exonérations, notamment celles concernant l’impôt sur les sociétés de cimenterie, l’impôt sur le revenu et la tranche sociale des livraisons d’eau et d’électricité, seront révisées. Le but, selon lui, est de rationaliser ces exonérations et de cibler davantage les ménages défavorisés qui en ont besoin, tout en limitant les effets de ces exonérations sur les finances publiques.
REINSTAURATION DE LA TAXATION DES APPELS ENTRANTS
Cette taxation sur les appels entrants devrait permettre à l’État d’engranger des recettes parafiscales de l’ordre de 50 milliards de FCfa par année
Par Aliou DIOUF, Demba DIENG, Makhfousse NGOM et Ndèye Seyni SAMB |
Publication 28/12/2024
Toujours dans l’ambition de mobiliser plus de recettes, le gouvernement du Sénégal va procéder à la réinstauration du dispositif de contrôle et de taxations des appels entrants supprimé en 2012. Cette taxation sur les appels entrants devrait permettre à l’État d’engranger des recettes parafiscales de l’ordre de 50 milliards de FCfa par année. « Ce cadeau fiscal bien généreux ne se fondait sur aucun argument techniquement documenté et économiquement justifié, si ce n’est le respect d’engagements de campagne auprès du patronat étranger du secteur des télécommunications », a déploré Ousmane Sonko au cours de la Déclaration de politique générale, vendredi.
À côté, promet-il, il sera procédé à une vaste réforme du Code général des Impôts en agissant inversement sur les taux et l’assiette d’imposition. « Pour nous, élargir l’assiette fiscale, tout en abaissant graduellement les taux d’imposition moyens, est la stratégie appropriée pour parvenir à une fiscalité efficace et équitable. Pour ce qui est de l’assiette, par exemple, la correcte fiscalisation de secteurs à fort potentiel tels l’immobilier, le foncier et l’informel est un impératif budgétaire prioritaire », a ajouté M. Sonko.
Le gouvernement, dans le cadre de la politique fiscale, compte lutter contre les pratiques permissives, corruptrices et dommageables à l’intérêt national telles que celles consistant en des manipulations du Code général des impôts pour y introduire des dispositions comme les remises gracieuses aux entreprises, ou la procédure de l’arbitrage fiscal permettant au ministre chargé des Finances, de renoncer à des recettes fiscales votées par l’Assemblée nationale au nom du peuple sénégalais.
S’agissant de la Douane, l’État juge nécessaire de procéder à la révision du Code des douanes pour intégrer la possibilité légale et d’adopter une liste limitative de produits considérés comme essentiels (fixée annuellement par arrêté du ministre en charge du Budget). Pour ce qui est du Programme de modernisation de l’administration des douanes (Promad), le gouvernement compte miser davantage sur la modernisation des systèmes grâce à la digitalisation.
LE CHEMIN VERS UNE CROISSANCE ENDOGENE
Une tâche ardue tant les indicateurs macroéconomiques se sont dégradés ces derniers mois avec un déficit budgétaire atteignant 11,6% du Pib (Lfr 2024) et une dette publique représentant 76,3% du Pib.
L’exercice était très attendu. Lors de sa Déclaration de politique générale, vendredi, devant les députés, le Premier ministre Ousmane Sonko a fixé le cap pour redresser une économie malade. Une tâche ardue tant les indicateurs macroéconomiques se sont dégradés ces derniers mois avec un déficit budgétaire atteignant 11,6% du Pib (Lfr 2024) et une dette publique représentant 76,3% du Pib.
Malgré cette situation « catastrophique », le chef du gouvernement ambitionne d’assainir les finances publiques et de « hisser le Sénégal parmi les économies les plus compétitives d’Afrique ». L’objectif est de passer d’une économie de type colonial peu compétitive (une croissance annuelle moyenne de 3,1% entre 1960 et 2023) à une croissance endogène et durable. Ce qui requiert la participation de tous. Oui, les Sénégalais devront consentir des sacrifices pour espérer récolter demain les fruits. À commencer par le civisme fiscal. C’est ce qu’il faut entendre par la réforme fiscale annoncée par le Premier ministre.
L’idée est d’élargir l’assiette fiscale, tout en abaissant graduellement les taux d’imposition moyens. Autrement dit, « faire payer moins à tous les Sénégalais, mais faire payer à tous les Sénégalais ». Toutefois, il convient de trouver le juste équilibre pour éviter d’étouffer les Pme. En annonçant une « rationalisation des subventions à l’énergie pour qu’elles bénéficient essentiellement aux ménages pauvres », le gouvernement accède à une vieille demande du Fmi qui a toujours dénoncé ces mesures non ciblées. La rationalisation des dépenses fiscales trop coûteuses (2,232 milliards de FCfa entre 2019-2022) s’inscrit dans ce même souci de créer des marges de manœuvre budgétaires dans un contexte de raréfaction des ressources.
Pour maintenir une viabilité de la dette compatible avec une croissance durable, il sera crucial d’accélérer les réformes budgétaires visant à ramener le déficit sous le seuil de 3%, tout en augmentant l’accès aux financements concessionnels et la mobilisation des ressources domestiques. D’où le recours aux obligations dites « Patriotes bonds », les « Diaspora bonds » et autres Fonds d’investissement alternatifs (Fia). Une des règles de base en économie est qu’aucun pays ne peut se développer sans compter d’abord sur ses propres ressources domestiques et l’épargne longue. Or, les Sénégalais n’ont pas la culture d’épargne. Un changement de paradigme est attendu sur ce point. Au total, il faut saluer la volonté de transparence et de lutte contre la corruption.
En revanche, quoique se justifiant du point de vue de la souveraineté, la réciprocité pour la délivrance de visa d’entrée pourrait porter un rude coup à un secteur (le tourisme) qui se relève difficilement de la Covid-19. Gageons que le gouvernement a tiré les leçons de la précédente expérience qui n’avait pas produit les résultats escomptés.
TOUT SAVOIR SUR LA RÉCIPROCITÉ DES VISAS
Dans sa déclaration de politique générale devant l’Assemblée nationale, le Premier ministre Ousmane Sonko a affirmé la volonté de son gouvernement d’instaurer une politique de « réciprocité » envers les pays imposant des visas aux citoyens sénégalais
Dans sa déclaration de politique générale devant l’Assemblée nationale ce vendredi, le Premier ministre Ousmane Sonko a affirmé la volonté de son gouvernement d’instaurer une politique de « réciprocité » envers les pays imposant des visas aux citoyens sénégalais. Retour sur une mesure souverainiste fréquemment évoquée au Sénégal.
Ousmane Sonko a pris position sur une question de plus en plus centrale dans les relations internationales :la réciprocité en matière de visas. S’adressant aux parlementaires ce vendredi, dans le cadre de sa déclaration de politique générale, il a exposé les grands projets nationaux en cours et à venir. Parmi ceux-ci, il a insisté sur la mise en place de mesures de réciprocité envers les pays qui imposent des visas aux Sénégalais.
Il a souligné la nécessité pour le Sénégal de mieux encadrer les flux migratoires tout en garantissant à un traitement équitable des citoyens sénégalais à l’étranger.
Les modalités envisagées
« Nous devons appliquer la réciprocité », a-t-il déclaré, sans nommer de pays précis, tout en indiquant que le gouvernement surveillera désormais de plus près les mouvements de personnes aux frontières.
« La suppression des visas biométriques payants est entrée en vigueur, mais les textes législatifs et réglementaires les régissant n’ont pas été abrogés. Tenant compte de l’expérience passée, il sera essentiel d’en analyser les failles avant toute décision », a-t-il précisé.
Il a également affirmé : « Nous engagerons des discussions avec les pays des catégories A et B pour exiger la gratuité des visas pour leurs ressortissants, dans le cadre de cette réciprocité, et pour traiter les procédures portant préjudice à nos compatriotes (vérifications d’authenticité, tarifications, etc.) ».
Vers une obligation de visa pour certains pays ?
Des pays comme la France, les États-Unis, et plus d’une trentaine d’autres pourraient-ils bientôt être soumis à l’obligation de visa pour entrer au Sénégal ? Pour l’instant, aucune décision officielle n’a été prise. Cependant, cette annonce fait écho aux déclarations récentes de la ministre des Affaires étrangères, Yacine Fall, qui, en septembre dernier, avait évoqué l’étude d’une telle politique de réciprocité.
« Nous examinons actuellement la loi sur la réciprocité des visas avec certains pays », avait assuré la ministre lors de l’examen du projet de loi autorisant le président de la République à ratifier la Convention de l’Union africaine sur la coopération transfrontalière (Convention de Niamey), adoptée à Malabo le 27 juin 2014. L’objectif affiché est d’imposer un visa, ou des frais de visa, aux ressortissants des pays imposant des visas aux Sénégalais.
Pays hors Cedeao exemptés de visas
Cette décision s’inscrit dans un contexte où de nombreux pays, comme la Namibie récemment, cherchent à équilibrer leurs relations diplomatiques en adoptant des mesures similaires.
Le Sénégal accorde actuellement une exemption de visa à des ressortissants de nombreux pays, y compris ceux qui exigent un visa pour les citoyens sénégalais. D’après le site spécialisé visasnews.com, cette exemption concerne notamment tous les pays européens, ainsi que le Brésil, le Canada, la Chine, le Congo, la Corée du Sud, Djibouti, les Émirats arabes unis, les États-Unis, l’Île Maurice, l’Inde et le Japon.
Ces nations pourraient ainsi être directement impactées par une éventuelle réintroduction de l’obligation de visa pour entrer au Sénégal.
Un retour à une mesure déjà envisagée
Ce n’est pas la première fois qu’une telle initiative est évoquée au Sénégal. Un an après son accession au pouvoir, le gouvernement de Macky Sall avait mis en place cette mesure controversée. Cependant, elle avait été abandonnée dès le 1er mai 2013, après une évaluation des pertes économiques et sous la pression du secteur touristique.
À l’époque, cette mesure s’appliquait exclusivement aux ressortissants des pays situés en dehors des zones Cedeao et Uemoa, conformément aux principes de libre circulation établis au sein de ces communautés.
Elle imposait notamment des visas aux citoyens français, belges, américains et d’autres nationalités.
Octobre 2019, les autorités sénégalaises annoncent le retour de la mesure « Pour des raisons de sécurité, nous avons besoin de contrôler qui entre et sort du pays », avait détaillé Aly Ngouille Ndiaye, alors ministre de l’intérieur, qui avait souligné la nécessité pour le Sénégal de mieux protéger ses frontières.
« Nous allons réintroduire le visa pour que toute personne pénétrant sur le territoire puisse être identifiée », avait-il ajouté, évoquant également un « dossier très avancé », qui pourrait être mis en œuvre dès la « fin de l’année 2019 ».
Elle concernerait uniquement les citoyens résidant en dehors de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) et de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa), soumises à la libre circulation des biens et des personnes.
Aujourd’hui, le débat est relancé, et le gouvernement semble prêt à réintroduire cette politique, mais avec plus de précaution et une attention particulière à ses impacts économiques et diplomatiques.
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LA SAR DÉVOILE SA STRATÉGIE POUR TRIPLER SON CHIFFRE D’AFFAIRES
Avec le Plan Sar 2.0, la Société africaine de raffinage ambitionne de répondre pleinement à la demande nationale en produits pétroliers tout en s’ouvrant au marché international. Son directeur général détaille les perspectives de diversification.
Avec l’exploitation du pétrole et du gaz au Sénégal, la Société africaine de raffinage (Sar) devrait occuper une place centrale. Dans cet entretien, son directeur général, Mamadou Diop, dévoile les grands axes de cette nouvelle stratégie et les objectifs dans les court et moyen termes.
Pour la relance de la Société africaine de raffinage, vous avez misé sur le Plan Sar 2.0. En quoi consiste-t-il ?
À la Sar, nous avons ce qu’on appelle l’activité industrielle : le raffinage et l’import. L’activité industrielle représente à peu près 50 % par rapport à la demande nationale. Le reste, nous le couvrons par l’importation ; ce qui nous permet de couvrir à peu près 80 %. Donc, vous voyez qu’il y a une marge en termes de couverture. L’objectif, c’est d’aller au-delà de notre capacité de raffinage, voire dépasser les besoins nationaux. L’idée, c’est même d’aller vers un deuxième site de raffinage qui ferait à peu près quatre millions de tonnes par an. Aujourd’hui, sur le site actuel, nous sommes à 1,5 million de tonnes. Donc, le tout fera 5,5 millions de tonnes par an pour une demande nationale qui est autour de 3 millions de tonnes. Cela va nous ouvrir le marché de l’export.
Quid de la souveraineté énergétique ? Et est-ce qu’elle est dans vos cordes ?
Nous ne pouvons pas parler de souveraineté énergétique si nous n’arrive pas à couvrir toute la demande nationale en termes de produits pétroliers. On ne peut pas, en effet, comprendre que le Sénégal commence à exploiter son pétrole et qu’il continue à importer. Cela dépasse l’entendement. Je salue la vision du président de la République et du Premier ministre. À ce propos, il faut d’ailleurs préciser que le Projet Sar 2.0 est même inscrit dans la « Vision Sénégal 2050 ». C’est pour dire que nous avons le soutien de l’État. C’est pourquoi nous comptons aller au-delà de la sphère raffinage en diversifiant nos activités. Il y a énormément de filières que l’on peut créer avec le pétrole et le gaz.
Est-ce que ce ne sont pas des niches que le secteur privé national pourrait explorer ?
Absolument ! Quand je parle de dérivés, il y a la production d’urée, d’engrais, de butines, de granulés de plastique… J’ai d’ailleurs échangé avec le patronat national. En effet, ils importent tout ce qui est granulés de plastique et à un coût assez élevé. Demain, le Sénégal peut en exporter et à des prix compétitifs. Sur ces aspects, nous pourrons aider nos capitaines d’industrie à être plus compétitifs. D’ailleurs, c’est cela le sens du patriotisme économique.
Le document de programmation pluriannuelle budgétaire fait état d’importantes perspectives pour la Sar. Quels sont les objectifs en termes de chiffre d’affaires sur la période 2025-2027 ?
Cette année, nous étions dans un contexte assez difficile, assez complexe. Nous savons tous que le secteur des Btp connaît un certain nombre de difficultés. Et qui dit difficultés dans ce secteur, dit consommation moindre en carbone. Mais, on verra que nous avons atténué cette tendance baissière en faisant de l’optimisation des coûts. Dès ma prise de fonction, j’ai inculqué la culture d’amélioration. Nous avons fait énormément d’économies sur nos charges fixes, mais aussi en matière d’approvisionnement. Nous avons optimisé tout ce qui est approvisionnement ; ce qui nous permettra d’espérer de très belles perspectives. Nous allons continuer dans cette dynamique d’amélioration continue, d’optimisation des coûts.
Nous allons également améliorer les processus. Là, nous venons de finir un audit organisationnel, plus l’audit financier qui est en cours. Aujourd’hui, nous avons une dizaine d’investisseurs prêts à financer le projet. Le retour sur investissement est hyper intéressant. Je ne peux pas aller en détail parce que nous avons la priorité sur le marché national en termes d’activité industrielle. Cela veut dire que ce cap que nous allons couvrir, c’est forcément des bénéfices qui seront générés. C’est pour cela qu’il y a énormément d’investisseurs intéressés. L’objectif, c’est de tripler le chiffre d’affaires. Aujourd’hui, on parle de 1.000 milliards de FCfa. L’objectif, c’est d’aller jusqu’à 3.000 milliards de FCfa en termes de chiffre d’affaires avec la pétrochimie et avec le deuxième site.