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12 juillet 2025
par Abdoulaye Sène
LA PÊCHE ARTISANALE FACE AU MIRAGE PÉTROLIER SÉNÉGALAIS
EXCLUSIF SENEPLUS - GTA-Ahmeyim et Sangomar caractérisés par des études d'impact lacunaires. L’exploitation des hydrocarbures, présentée comme levier de croissance, reste une chimère pour les communautés locales, sans garanties pour la pêche
Pêche artisanale en mer, pétrole et gaz offshore au Sénégal : illusions et perspectives de développement
L’Afrique de l’Ouest est favorisée par des conditions climatiques et écologiques exceptionnelles dotée de zones marines et côtières les plus poissonneuses du monde. Les eaux maritimes y ont une grande productivité biologique du fait de phénomènes de remontée des eaux profondes riches en nutriments à la base de la chaîne alimentaire marine. L’abondance de ressources halieutiques est ainsi une des caractéristiques majeures de la région.
L’espace couvert par les sept (7) États membres de la Commission sous-régionale des pêches[1] (CSRP) est de 1,6 millions de km2 et le littoral s’étend sur près de 3500 kms. La population totale de ces États avoisine 32 millions d’habitants dont 70% vivent près de la côte. La pêche dans ces pays est un secteur de la plus grande importance, en constituant le quart de l’activité économique. Elle pourvoit à la création d’emplois, à l’alimentation et aux exportations des pays de la sous- région.
Selon l'ONU et la FAO, la plupart des grandes ressources halieutiques sont déjà largement surexploitées. Les spécialistes prédisent, qu’au rythme actuel, il n’y aura plus de poisson dans le monde en 2048. Il faut exercer la pleine souveraineté et prendre des initiatives hardies au niveau des Etats de la sous-région et dans les organisations régionales de gestion des pêches.
La situation de la pêche maritime artisanale
Un ensemble de pratiques de pêche remettent en cause la survie de la pêche maritime artisanale : chalutage, pêche des petits poissons pélagiques (pêche minotière), pêche INN et la surexploitation des ressources halieutiques démersales et hauturières.
Le poisson au Sénégal constitue plus de 70 % des apports en protéines animales. Cependant, la pêche artisanale, qui joue un rôle crucial dans la sécurité alimentaire du pays, est menacée par de multiples facteurs : les ressources sont mises à mal par la prolifération des pirogues, l’augmentation de l’effort de pêche et l’insuffisance des moyens de contrôle de l’État notamment l’installation croissante d’usines de fabrication de farines et d’huiles de poisson. Ce contexte met en péril les moyens de subsistance des communautés côtières. De Saint-Louis à Kafountine, en passant par Dakar et Kayar. De ce fait, les communautés locales se mobilisent.
A la faveur de l’industrie gazière et pétrolière, les pêcheurs artisanaux réclament l’érection d’une zone tampon transfrontalière avec la Mauritanie. Si les pêcheurs artisanaux à Sangomar et Jatara font des incursions dans les zones des plateformes pétrolière et gazière, ce n’est pas pour pêcher des petits poissons pélagiques.
La pêche INN
La pêche sénégalaise voit ses ressources halieutiques s’épuiser rapidement. Cette raréfaction s’explique par plusieurs facteurs : l’augmentation de la demande mondiale de poisson, des accords de pêche avec des pays tiers, une surexploitation et une pêche non réglementée (INN).
La pêche est en crise depuis 1990 dans la sous-région en raison de la surpêche, une exploitation abusive par les pêcheurs artisans, les pêcheurs industriels mais surtout la présence très inquiétante de la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (Pêche INN). « En Afrique de l’Ouest, la pratique de la pêche INN est désastreuse et destructive pour l’économie maritime et l’écosystème de la région. Il faut le voir pour le croire. Les bateaux restent en mer durant des années et ne vont jamais dans les ports de la sous-région. Ils effectuent des transbordements illégaux de leur pêche à d’autres bateaux, bénéficient de l’avitaillement et des rotations d’équipages en mer. (Tafsir Malick NDIAYE, 2010) ».
La pêche INN est très organisée et ne respecte aucune législation des Etats côtiers. Les bateaux pirates développent impunément leurs activités, ils échappent toujours au contrôle. Les Etats n’ont pas les moyens d’asseoir une véritable police des pêches et que les eaux sous leur juridiction ne sont pas surveillées.
« Les chalutiers attrapent tous les poissons disponibles sans considération d’espèces protégées ou de normes de sécurité. Ils détruisent les filets des pêcheurs artisans locaux, cassent leurs pirogues et mettent leur vie en danger. Ils détiennent des filets lourds qui vont draguer l’océan détruisant l’habitat marin mais surtout les nurseries pour les juvéniles ; ce qui empêche les poissons de se reproduire. (T. M. Ndiaye, 2010) »
En matière de la loi sénégalaise, les ressources halieutiques des eaux sous juridiction constituent un patrimoine national. Le droit de pêche dans les eaux maritimes sous juridiction sénégalaise appartient à l’Etat qui peut en autoriser l’exercice par des personnes physiques ou morales de nationalité sénégalaise ou étrangère. La gestion des ressources halieutiques est une prérogative de l’Etat.
L’obligation de débarquement s’avère être une arme redoutable dans la lutte contre la pêche illicite.
L’aquaculture et les usines de farine de poisson
Les petits poissons pélagiques qui constituent l’essentiel de l’alimentation des Sénégalais, sont massivement transformés en farine de poisson, ce qui aggrave la surexploitation des ressources. En effet, entre 3 et 5 kg de poisson produisent 1 kg de farine de poisson. Ainsi, les ressources halieutiques, au lieu d’être destinées à l’alimentation humaine locale, partent vers les élevages de poissons carnivores et d’autres animaux comme les volailles ou les porcs dans des fermes d’élevage à l’étranger. Il y a un véritable boom de l’aquaculture à l’échelle mondiale (Chine, Norvège et Turquie), qui entraîne une demande accrue de farines de poisson, issues principalement de petits poissons pélagiques comme les sardinelles.
L'aquaculture constitue une réponse aux besoins croissants de poisson et à la surpêche. En 2022, 94,4 millions de tonnes de poissons et animaux de mer sont issus de l'aquaculture, un chiffre en augmentation régulière alors que les chiffres de la pêche de capture restent globalement stables autour de 92 millions de tonnes. Les trois principaux exportateurs sont la Chine continentale (12 %), la Norvège (8 %) et le Vietnam (6 %)22.
L'aquaculture reste dépendante de la pêche dans la mesure où 11 % de la masse des poissons sauvages pêchés dans le monde servent de nourriture aux poissons d'élevage.
L'aquaculture est présentée comme une réponse aux besoins croissants de poisson et pour mettre fin à la surpêche. Le boom de l’aquaculture à l’échelle mondiale, notamment en Chine, en Norvège et en Turquie, entraîne une demande accrue de farines de poisson, issues principalement de petits poissons pélagiques comme les sardinelles.
En augmentation constante depuis le début des années 2000, la production aquacole a dépassé la production halieutique pour la première fois en 2022, représentant près de 51 % de la production totale de produits de la mer, selon les chiffres de l’agence des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) figurant dans le rapport sur la situation mondiale des pêches et de l’aquaculture (2024).
La part de l'aquaculture dans la production totale d'animaux aquatiques a augmenté de 4% en 1970 à 51% en 2022. L'Asie concentre 70% de la production en 2016. Un peu plus de la moitié (57,7 %) des fermes sont en eau douce et élèvent des carpes et des tilapias. L’aquaculture fait aussi de l’élevage marin (saumon, thon, daurade, mollusques et crevettes) et la production de plantes aquatiques.
L'aquaculture, qui est préconisée par l’industrie et les pouvoirs publics, est une solution illusoire et une fausse promesse. D’abord, elle a besoin des ressources halieutiques comme aliment pour nourrir sa production, ensuite son coût économique, social et environnemental n’est pas viable pour se substituer à la pêche maritime artisanale. C’est une illusion de voir l’aquaculture nourrir les populations sénégalaises. C’est seulement un complément à la pêche maritime artisanale devant la surpêche et la surexploitation des ressources halieutiques. C’est la pleine souveraineté sur nos mers qui peut permettre à la pêche maritime nationale (artisanale et industrielle) de remplir sa fonction d’alimentation des populations sénégalaises.
Les qualités nutritionnelles du poisson d'élevage sont parfois inférieures à celles du poisson sauvage, comme c'est le cas du saumon d'élevage, qui contient souvent moins d'oméga-3 que le saumon sauvage.
L'aquaculture a contribué au développement ou à la circulation de maladies qui sont redoutées des aquaculteurs en raison des pertes qu'elles peuvent occasionner.
La pêche minotière
Il faut signaler la présence de la pêche minotière dans nos côtes ; la pêche minotière est une pêche industrielle et artisanale intensive destinée à alimenter les filières industrielles par des petits poissons pélagiques (alevins et juvéniles) de faible valeur commerciale, que l'on transformera en farines et huiles de poisson principalement pour l'aquaculture. La pêche minotière se pratique avec des filets à petites mailles qui capturent de grandes quantités de poissons, principalement de petits pélagiques ; elle n'est pas sélective. Sa zone de prédilection est le Chili, Pérou, Chine, Japon, États-Unis, Danemark. Elle compense l'effondrement des stocks de poissons sauvages d'intérêt commercial.
La pêche minotière, par opposition à la pêche alimentaire, est spécialisée dans la capture d’espèces transformées en farines, en huiles par les usines de réduction. On l’appelle aussi « pêche à finalité industrielle » (Carré, 2006). Elle est pratiquée artisanalement sous la forme de « pêche migrante » entre le Sénégal et la Mauritanie.
Cette « pêche migrante » est le fait de la pêche minotière artisanale et industrielle que les accords de pêche bilatérale entre le Sénégal et ses voisins favorisent. Après le chalutage qui a dévasté les habitats et les fonds marins, c’est autour de la demande minotière de ravager les petits poissons pélagiques. Ces espèces sont capturées par la senne tournante de la pêche migrante et de la pêche industrielle étrangère.
Il faut arriver à la réduction drastique de l’effort de pêche des sennes tournantes ; il faut réviser les accords de pêche Mauritanie-Sénégal jusqu’alors réservés exclusivement aux sennes tournantes.
Quant au Sénégal, les captures des petits pélagiques fluctuent selon les années et avoisinent les 300 000 tonnes en moyenne sur la période 2009 – 2018 avec une tendance linéaire à la hausse. La production la plus faible a été enregistrée en 2010 avec 266 900 tonnes alors que la plus élevée fut en 2016 avec 339 900 tonnes.
« Les gouvernements mauritanien, sénégalais et gambien doivent soutenir l’élimination de la capture de poissons sauvages à des fins d’alimentation aquacole et animale. Toute aquaculture dépendante de poisson sauvage ne devrait plus recevoir aucune subvention ou autre mesure de soutien gouvernementale » CCFD, Terre solidaire, 2024.
Les usines de farines de poisson menacent la sécurité alimentaire et mettent en danger la pêche maritime artisanale (pêcheurs, transformateurs-trices, mareyeurs). Elles sont une cinquantaine en Mauritanie et moins d’une dizaine au Sénégal.
La pêche minotière est une forme d’activité qui contribue au phénomène de surpêche. La lutte contre la surpêche et la pêche illicite vont à l’encontre du développement de l’aquaculture. Il faut comprendre que l’aquaculture est fortement dépendante de la surpêche, de la production de farine de poisson et de la pêche INN.
Au Sénégal, les organisations de la société civile (Adepa, Apapram, Conipas, etc.) autour de de la pêche artisanale luttent contre l'utilisation de poissons sauvages dans les chaines d'approvisionnement de l'aquaculture car les usines de farines de poisson menacent la sécurité alimentaire.
La pêche maritime artisanale est en danger face aux usines de farine de poisson mais également elle subit la menace née de l’exploitation des ressources pétrolières et gazières récemment découvertes au Sénégal et en Mauritanie.
Pétrole et gaz offshore
Au moment où le monde s’éloigne d’une économie à forte intensité de carbone, l’Afrique est en passe de devenir un géant des hydrocarbures.
Les transitions vers les énergies propres progressent et la structure de l’économie chinoise évolue, la croissance de la demande mondiale de pétrole ralentit.
C’est dans cette écorégion ouest-africaine que sont concentrées les flottilles de pêche industrielle qui défient au quotidien la pêche artisanale jusque dans ses derniers retranchements. Avec la poursuite de l’exploitation pétro-gazière, la survie de la pêche artisanale se pose à terme et les conflits iront crescendo. Il est inacceptable que la pêche artisanale soit délogée de nos mers puisque des communautés entières en vivent.
Depuis 2001, pratiquement toutes les zones côtières et marines, y compris des zones primordiales de biodiversité, des zones de pêche clés et des sites de tourisme importants ont été divisés en blocs ouverts aux activités d’exploration pétrolières et gazières.
La découverte au Sénégal du gisement pétrolier de Sangomar (ex SNE) en 2014 puis celui du gaz naturel de Grand Tortue/Ahmeyin (GTA) en 2016 suscite beaucoup d’intérêt et d’espoir certes, mais mérite d’attirer une attention particulière quant à sa mise en valeur.
Si les développements de Sangomar (pétrole) et de GTA-Ahmeyim (gaz) se poursuivent, les communautés locales et nationales ne recevront probablement pas les avantages économiques promis, mais devront subir les dommages environnementaux et économiques. L’exploitation des hydrocarbures, prétendument source de croissance et de développement pour les nations, ne sont que de fausses promesses d’amélioration économique pour les communautés locales et nationales si on ne tient pas compte des conditions d’exercice des activités de la pêche. Les communautés locales font beaucoup de sacrifices pour recevoir le développement pétro-gazier et doivent également faire face à la réparation des dommages causés aux écosystèmes et aux populations. Le développement pétrolier/gazier proposé ne produira pas les avantages économiques promis si nous n’exerçons pas la plénitude de notre souveraineté énergétique et maritime.
Le pétrole de Sangomar
Le pétrole de Sangomar est exploité dans une région maritime qui présente les caractéristiques suivantes: (i) la zone est écologiquement sensible du fait des caractéristiques de ses écosystèmes très riches en biodiversité ; (ii) la dépendance socioéconomique des populations par rapport au milieu naturel est très forte et (iii) les populations sont très inquiètes de l’exploitation pétrolière et gazière au vu de ses potentielles répercussions sur le milieu marin et les écosystèmes du delta de Saloum qui sont déjà très éprouvés du fait du changement climatique et de la pression anthropique. Zone érigée en site Ramsar, le delta du Saloum est une nurserie de classe exceptionnelle ; sa préservation est de mise.
C’est un projet national qui a un impact transfrontalier avec la Gambie et dont les répercussions s’étendent jusqu’en Guinée Bissau.
L’exploitation pétrolière en cours va naturellement avoir des conséquences négatives substantielles sur l'économie locale, l'environnement et qui sont de nature à menacer la cohésion et la stabilité sociale des communautés du delta du Saloum et au-delà.
De surcroît, le delta du Saloum subissait déjà une dégradation sensible, liée aux actions de l’homme, qui impactent la mangrove, la pêche et leurs activités connexes, ressenties par les communautés locales.
L’exploitation pétrolière est source de dégradation des écosystèmes du delta du Saloum. Elle entraîne aussi la détérioration de l’environnement marin par les pollutions dues au trafic des navires, des rejets d’hydrocarbure etc., qui impliquent la baisse de la production halieutique. Les conséquences seront constatées non seulement sur les activités socio-économiques et les activités connexes mais également sur la dégradation de la santé des populations et la valeur monétaire de perte de la biodiversité et des habitats naturels.
L’exploitation du champ Sangomar offshore se fait à près de 90 km des côtes sénégalaises. Cette localisation du site dans la zone économique exclusive du Sénégal peut amener à présager que l’impact le plus probable s’avère être une pollution localisée en haute mer, suite à un déversement de pétrole en tête de puits. En réalité, une opération de production pétrolière implique un processus long et complexe susceptible de générer de la pollution à chaque étape.
C’est le trafic maritime qui est la principale cause de pollution liée au pétrole au niveau mondial (413.100 tonnes). La deuxième source la plus polluante est constituée des activités terrestres (140.000 tonnes) et c'est la production offshore qui représente la plus petite source de pollution.
L’exploitation des hydrocarbures comporte des risques sécuritaires énormes et une série de coûts sociaux et environnementaux présents et futurs, directs et indirects, qui doivent être comparés aux bénéfices qu'ils apportent. Le risque le plus redouté dans l’industrie pétrolière est la marée noire du fait de son ampleur et de ses conséquences socio-économiques et environnementales.
En cas de pollution suite à un incident ou accident d’exploitation, les écosystèmes aquatiques et terrestres pourraient être affectés, ce qui causerait des dommages sur les espèces. Les coûts liés aux marées noires pourraient être bien pires que les attentes actuelles et les messages de l’industrie. L’émission des gaz à effet de serre, méthane (gaz très dangereux) et gaz carbonique, peut survenir à tout moment (éruption de puits, explosion de plateforme, déchets des eaux de production).
L'exploitation pétrolière offshore du champ de Sangomar pose un risque significatif pour la pêche artisanale.
Le gaz GTA-Ahmeyim
Projet transfrontalier, GTA-Ahmeyim se situe sur une zone de pêche Jatara ; elle est un récif corallien traditionnellement fréquenté par les pêcheurs de Saint Louis. C’est un projet d’intégration économique entre la Mauritanie et le Sénégal. Jatara fait partie d’une dizaine de sites de pêche qui a survécu à la dévastation du chalutage de fonds marins par la pêche industrielle.
Le champ gazier qui présente des réserves estimées à 450 milliards de m³ est situé dans des formations rocheuses sous le fond marin situé à 125 km des côtes et couvre une surface totale réputée égale à 9 463 km².
Elle abrite une installation flottante appelée FPSO (unité flottante de production, de stockage et de déchargement) et une plateforme à environ 35-40 km de la côte pour le prétraitement du gaz et l’élimination des liquides du gaz.
Le risque de collision entre les pirogues des pêcheurs et les navires de soutien qui sortent des zones d'exclusion de sécurité est présent en permanence. Il y a aussi l’impact qui porte sur la perte d’équipement de pêche pour les pêcheurs artisanaux et l’interférence entre les mouvements des navires avec les filets de pêche artisanale.
La superposition des zones de pêche et des sites d’exploitation gazière met en relief les menaces qui pèsent sur l’activité de pêche. Les zones de pêches sont occupées par l’industrie gazière avec l’érection d’une zone d’exclusion de 500 m de rayon. La perte des pêcheries au profit du développement des activités d’exploitation gazière accompagne les conflits d’usage de l’espace et des ressources halieutiques.
Il faut également noter le rétrécissement de la zone de pêche ; ce qui ne préserve pas l’Aire Marine Protégée (AMP) du fait des incursions fréquentes des pêcheurs.
La perturbation de l’environnement marin et côtier, l’altération des écosystèmes marins et côtiers et la perte de la biodiversité marine constituent des impacts négatifs.
Le gaz et le pétrole constituent un facteur d’insécurité maritime.
Expériences négatives d’ailleurs et faiblesses dans la gestion environnementale et sociale
La littérature foisonne d'exemples malheureux des dégâts causés par l'industrie pétro-gazière en Afrique et dans le monde développé : États-Unis, Gabon, Ouganda, Nigéria, etc. La promesse de bénéfices économiques est une fausse promesse : les arguments de l’industrie et de ses partisans que l’exploration et le développement des hydrocarbures sont porteurs d’amélioration en apportant plus d’emplois et de revenus plus élevés pour les populations, des investissements dans les soins de santé, les écoles et autres services sociaux et publics ; elle est chimérique.
Les bénéfices du développement pétrolier/gazier proposé iront aux riches (au Sénégal mais principalement dans d’autres pays), laissant les membres des communautés locales, et en particulier les pauvres, faire face aux dégâts laissés derrière eux.
La littérature mentionne que l’exploitation des hydrocarbures génère une série de coûts économiques, sociaux, environnementaux et culturels présents et futurs, directs et indirects, négatifs qui doivent être comparés aux bénéfices qu'ils apportent.
Dans la sous-région, le Nigeria, premier producteur de pétrole africain, est aussi le pire pays en termes de pollution pétrolière. La région la plus touchée est le delta du Niger.
Après plus d’une décennie de mise en valeur de Gadiaga (Forteza Corporation), le constat laisse penser que les ressources naturelles qui devaient être exploitées pour l’amélioration des conditions de vie des populations dont elles appartiennent selon la constitution du Sénégal, sont devenues source d'aggravation de leur précarité.
Les études d’impact réalisées pour GTA-Ahmeyim et Sangomar comportent des insuffisances notoires au plan de gestion environnemental et social ; il faut déplorer l’absence d’études des coûts environnementaux, sociaux, économiques et culturels dans les études de faisabilité.
Compte tenu de ces manquements, il est diligent d’empécher la poursuite de l’exploitation du pétrole sur les autres sites pressentis dans l’écorégion ouest-africaine tant que les effets environnementaux ne soient pas bien circonscrits et maitrisés dans une optique de la préservation des intérêts des communautés des pêcheurs.
Au demeurant, il n'est pas trop tard pour prendre les devants en renforçant la résilience des populations face aux effets du changement climatique et en favorisant une gestion plus durable des écosystèmes et de la biodiversité du delta du Saloum.
La demande mondiale de pétrole ralentit. La pollution climatique a des impacts négatifs partout dans le monde, en particulier dans les pays tropicaux, sur le PIB, les revenus et l’emploi. Ces impacts négatifs s’intensifient avec la poursuite des émissions de gaz à effet de serre. Quels que soient les impacts immédiats et directs du développement pétro-gazier sur les travailleurs, les entreprises et l’économie du pays, les impacts négatifs des changements climatiques les annuleront.
Le coût des énergies renouvelables, y compris l’énergie solaire, a chuté si rapidement qu’elles constituent déjà aujourd’hui la forme d’énergie la moins chère. Cette tendance ne fera que consolider la transition vers l’abandon des combustibles fossiles au cours de la prochaine décennie. Il n’existe aucun argument économique valable contre le passage rapide des combustibles fossiles polluants à des sources d’énergie plus propres.
L'exploitation pétrolière, tout en étant potentiellement lucrative, peut avoir des conséquences négatives substantielles sur l'économie locale, l'environnement, et la société. Il comporte également des risques budgétaires.
En effet, opérer une exploitation de gisements d’hydrocarbures ou d’autres ressources minérales qui soit économiquement rentable, socialement équitable et écologiquement tolérable est quasi impossible. De ce fait, les pouvoirs publics, quand ils décident de valoriser ces ressources, doivent renforcer leur vigilance dans la gestion environnementale et réviser leurs modes de gouvernance de manière à garantir aux populations une vie décente dans un environnement sain, pour éviter les tensions sociales.
Les pêcheurs artisans constituent la force des communautés côtières et l’aquaculture artisanale (même industrielle) ne saurait tenir lieu et place des pêcheurs artisans. La défense de la pêche maritime artisanale est un impératif pour sauvegarder les droits humains, sociaux et culturels, environnementaux et économiques des communautés locales et nationales. L’aquaculture une illusoire promesse de reconversion des pêcheurs artisans. Il faut doter les pêcheurs d’un armement moderne pour éviter les conflits avec l’industrie pétrolière, stopper l’émigration clandestine, la perte de la biodiversité, l’insécurité et la piraterie.
Toute catastrophe, qui découlerait de la production du gaz ou du pétrole, aura ainsi un impact transfrontalier considérable sur les écosystèmes et les communautés dans cette région. Aucune plateforme pétrolière n’est à l’abri de marée noire causant des dégâts environnementaux, économiques et sociaux considérables.
Il faut renforcer le cadre de gestion de l’exploitation pétrolière et gazière en impliquant davantage les populations et en leur tenant un langage de vérité.
C’est la pleine souveraineté sur nos mers qui peut permettre à la pêche maritime nationale (artisanale et industrielle) de remplir sa fonction d’alimentation des populations sénégalaises.
La renégociation des contrats d’hydrocarbures est souhaitable pour notre souveraineté énergétique et l’exigence d’une pêche maritime durable pour défendre les communautés côtières, les pêcheurs artisanaux et l’environnement.
El hadj Bara Deme et Pierre Failler, « La pêche migrante au Sénégal, en Mauritanie et Gambie : un mécanisme d’approvisionnement des industries de farine de poisson », VertigO - la revue électronique en sciences de l'environnement [En ligne], 23-1 | Avril 2023, mis en ligne le 03 avril 2023, consulté le 31 décembre 2024.
Tafsir Malick Ndiaye (2010), la pêche illicite non déclarée et non réglementée en Afrique de l’Ouest
[1] Il s’agit du Cap Vert, la Gambie, la Guinée, la Guinée-Bissau, la Mauritanie, le Sénégal et la Sierra Leone. La CSRP est une organisation intergouvernementale ayant pour mandat la règlementation des Pêches des États membres.
Par Aliou Gabou Cissé, Ma Serigne Dièye & El Hadji Farba Diop
HABITER ET PANSER LE SINE
Il faut s’inspirer d’un New Deal Citoyen où le Sine sera au carrefour d’initiatives audacieuses et porteuses de progrès, avec un accent mis sur le savoir, le savoir-faire et le savoir-être ; un retour à la source par l’appropriation culturelle
Aliou Gabou Cissé, Ma Serigne Dièye & El Hadji Farba Diop |
Publication 13/02/2025
« La conscience de soi est en soi et pour soi quand et parce qu’elle est en soi ; c’est-à-dire qu’elle n’est qu’en tant qu’être reconnu. » - Hegel, Phénoménologie de l’esprit, 1941.
Le développement ne se rêve pas, il se crée ! Cette assertion devrait être inscrite au fronton de toutes les villes sénégalaises, comme pour rappeler aux citoyens, leur rôle fondamental dans le progrès du Sénégal. Cette compréhension des enjeux de l’heure conforte l’idée d’une dynamique sociopolitique qui devra être centrée sur la conscientisation, la formation, l’éducation et la résilience de la jeunesse sénégalaise.
Le véritable défi politique qui a parfois résisté à l’ambition ferme des différents régimes qui se sont succédé à la tête du pays, a été de résorber la lancinante question du chômage chronique des jeunes, de leur formation et de susciter l’espoir en eux. Dès lors, cette bombe sociale inquiète de plus en plus malgré les alternances consommées, s'appuyant sur les idées et réformes brandies lors les professions de foi, puis consumées, au temps des joutes électorales. La cadence des actions politiques s’est vue freinée par la célérité du progrès démographique qui place le Sénégal parmi les pays ayant une forte population juvénile avec 75% de citoyens âgés de moins de 35 ans, soit un âge médian de 19 ans. De telles statistiques peuvent être perçues autant, comme une opportunité qu’un obstacle, surtout quand on mesure la position socio-économique du pays, qui nous confine parmi les moins avancés avec des indices de développement humain encore très faibles. Ce fait a résisté aux efforts des gouvernements et à la dynamique populaire d’où les tares notées dans la territorialisation des politiques publiques qui devaient servir à polariser des actions de développement appréciables en termes d’impacts socio-économiques, de lutte contre la pauvreté endémique, d’amortissement de la régression de l’économie rurale, et enfin, d’autonomisation des secteurs porteurs de croissance.
Aujourd’hui, pratiquement toutes les villes du Sénégal en pâtissent et tentent de subsister face à la ségrégation spatiale qui privilégie la région de Dakar au détriment de l’interland sénégalais. Ainsi, des zones comme Fatick, longtemps soumis à une léthargie soutenue sur tous les plans malgré le choix populaire fait en 2012, sur l’un de ses illustres fils, Macky Sall, ancien Premier ministre, devenu président de la République du Sénégal. Cette haute distinction n’a pas servi à assouvir la soif d’espérance nourrie par les fatickois en voyant leur édile porté au pinacle de la gouvernance suprême de la République.
Dès lors, après 12 ans de magistère, à la chute de l’ancien régime du fils du terroir, on assiste à une grande désillusion. Celle d’une ville toujours en manque d’infrastructures aux normes, d’une économie chancelante, d’une municipalité aux moyens résolument limités et symptomatique d’un déficit de schéma de gouvernance efficace. S’y ajoutent à cela, les relents de la pression sociale que subit la jeunesse locale, souvent en proie aux débits de boissons alcoolisées florissants, à la drogue circulante, aux infections sexuellement transmissibles (IST) drainées par la prostitution déguisée, et à l’insécurité grandissante. Tout récemment, un rapport du ministère de l’Éducation nationale fait état de plusieurs cas de grossesses précoces notées dans les écoles…
Cependant, ce cocktail nocif dans le Sine cohabite paradoxalement avec un éveil citoyen, un renouvellement de la classe politique et une floraison d’organisations de jeunesses enclines à contribuer à l’effort de développement local dans le continuum des ambitions ratées par les anciens barons locaux sous Macky Sall. Faut-il croire à une réappropriation de l’espace sociopolitique fatickois par la jeunesse intellectuelle ?
« Dis-moi quelle jeunesse tu as, je te dirais quel pays tu auras », ces propos attribués le plus souvent au président Abdoulaye Wade, consacrent une vision claire du rôle fondamental des jeunes dans la construction d’un pays surtout, quand ces derniers sont bien formés et ivres des valeurs de Jom, de Ngor, de Fula et de Fayda.
D’ailleurs, ce mindset (état d’esprit), sine qua non au progrès personnel et collectif, rappelle éloquemment le discours du président Américain John F. Kennedy qui affirmait par excellence : « Ne demander pas ce que votre pays peut faire pour vous, mais préoccupez-vous de ce que vous pouvez apporter à votre Nation ». Fort de cette idée, et conscient de la réalité tangible à Fatick, l’intellectuel Sine-Sine se doit d’être un citoyen engagé par et pour le changement, à travers la proposition de plans de ruptures et de réformes systémiques. Il ne doit ni prêcher la résignation, ni l’abandon de l’espoir ardent, encore moins adopter une politique de l’autruche face à ses responsabilités. Il doit plutôt pousser à la réflexion, à l’action, à la prospective. La véritable rupture serait donc de poser les jalons à l’aune d’une citoyenneté proactive soucieuse de l’éducation, de l’économie numérique, de l’environnement, de la salubrité publique, de l’entrepreneuriat, du chômage des jeunes, de la sécurité des personnes et des biens, des problèmes de mœurs, etc. C’est clairement une invite à créer les conditions d’un espace scientifique et intellectuel de qualité.
Dans un contexte mondial ponctué de guerres technologiques et /ou politiques, de repli économique et commercial, conjugué à un inconfort au plan national, dû à des marges de manœuvres budgétaires et financières limitées - sous asphyxie des institutions de domination néolibérale - il faut s’inspirer d’un New Deal Citoyen (NDC) où le Sine sera au carrefour d’initiatives audacieuses et porteuses de progrès. Ce sera un progrès endogène avec un accent mis sur le savoir, le savoir-faire et le savoir-être ; un retour à la source par l’appropriation culturelle et historique, et des actions d’envergure économiques, sociales et citoyennes. Cela consiste à convier les acteurs autour du New deal citoyen pour résorber les velléités sociopolitiques et bouter définitivement les raisons majeures du retard ou du moins, de l’appauvrissement de la ville. En effet, les tensions sociales et les blocages politiques souvent observés dans les villes en difficultés sont les reflets d'un manque de dialogue et de coordination entre les différents acteurs (citoyens, élus, entreprises, associations, etc.). Il s’agit donc d’une approche inclusive et participative, en plus d’une invite à la résolution des problèmes structurels qui freinent le développement de Fatick. Les préceptes hérités de la culture africaine particulièrement chez les sérères dont la fonction du Ngel ou Pènc (Agora) en wolof, prédisposent au dialogue, à la concertation sur les choses hautement importantes pour le devenir de la société. Joseph Kizerbo, en brillant historien, affirme à ce propos : « A tous les niveaux, l’Africain était avant tout un être social. Toutes les étapes de la vie étaient marquées par des réunions. C’est pour cela qu’on a parlé du débat permanent africain qui était instauré sous les arbres – la palabre – où chacun avait non seulement la liberté d’expression, mais l’obligation de s’exprimer. »
Ce réflexe culturel s’accommode de l’appel vers un N.D.C permettant d’identifier les priorités et de coconstruire des solutions adaptées aux réalités locales. Qu’en sera-t-il de ce Pèncoo citoyen ?
Allons vers des fora citoyens, des ateliers de réflexion ou les plateformes numériques pourraient servir de tribune d’expression des idées ! Pourquoi ne pas instaurer les Assises du Sine ?
Autant d’approches systémiques qui convoquent une volonté collective forte et un engagement citoyen dont l’objectif serait de bâtir une ville plus juste, prospère et plus résiliente.
Des jalons importants sont posés à travers des initiatives portées par une bonne partie de la jeunesse fatickoise qui œuvre incessamment et de façon désintéressée à la promotion, à la réhabilitation et à la vivification des valeurs citoyennes. La formation, le culte de l'excellence, la solidarité, la promotion du vécu associatif sont les principaux objectifs pour lesquels ils s'investissent. Les actions menées par la plateforme Sine Du Futur ou l'association I'm Talibé sont édifiantes à ce sujet. Elles sont avant-gardistes et agissent pour le futur. L'exaucement de leurs vœux, se reflètera d'ici quelques années, par une jeunesse bien formée, consciente des défis et enjeux de leur époque, redevable à leur terroir et capable de décider pour eux, notamment de choisir - surtout de bien le faire pour ne pas le regretter - leurs dirigeants.
Vivement pour un New Deal Citoyen au Sine !
par Arame Gueye Sène
AIDE AU DÉVELOPPEMENT, LEVIER OU ILLUSION ?
Entre volonté de transformation, dynamiques de dépendance et jeux de pouvoir, la question reste entière : comment construire un modèle où les acteurs locaux ne subissent plus, mais définissent eux-mêmes leur trajectoire de développement ?
À la fin de mes études en économie et sociologie du développement, avec une spécialisation sur les enjeux et pratiques du développement dans les pays du Sud, je ne voulais plus travailler dans ce domaine. Trop de contradictions, trop d’enjeux géopolitiques dissimulés derrière des discours altruistes. Je voyais un écosystème dominé par des logiques d’assistance plutôt que de transformation structurelle, avec des interventions souvent déconnectées des réalités locales et des projets qui disparaissent une fois les financements épuisés.
Je constatais aussi un déséquilibre profond dans la prise de décision : les priorités du développement étaient souvent définies à l’extérieur, par des bailleurs dont les intérêts ne coïncidaient pas toujours avec ceux des populations locales. Loin d’être un levier d’autonomisation, l’aide publique au développement semblait parfois entretenir une forme de dépendance, freinant l’émergence de solutions locales et le renforcement des institutions nationales.
J’étais convaincue que les pays du Sud ne se développeraient pas grâce à l’aide publique au développement, mais plutôt en misant sur leurs propres ressources, en définissant leurs propres stratégies et en repensant leurs modèles de gouvernance.
Pourtant, plus de 10 ans plus tard, j’évolue toujours dans cet univers, au plus près des réalités du terrain. J’ai commencé comme bénévole dans des initiatives locales et des associations, avant de co-fonder Social Change Factory, une organisation engagée pour une jeunesse actrice du changement. Entre-temps, j’ai également travaillé au sein d’ONG internationales et d’agences des Nations unies sur les migrations mixtes et la redevabilité humanitaire découvrant différentes approches et logiques d’intervention.
Et une chose est claire : ce n’est ni blanc ni noir. Et il est impossible de nier que l'aide apporte des solutions. Il est impossible de nier ce que cette aide a permis en terme de vies qui ont été sauvées, d'emplois et d'opportunités qui ont été créés, d'infrastructures permettant un accès à l’eau potable et aux sources d’énergie qui ont été construites et de nouvelles technologies qui ont pu être partagées.
Le développement est une mécanique complexe, où se mêlent besoins réels, stratégies politiques et intérêts parfois contradictoires – qu’ils soient institutionnels ou personnels. Entre volonté de transformation, dynamiques de dépendance et jeux de pouvoir, la question reste entière : comment construire un modèle où les acteurs locaux ne subissent plus, mais définissent eux-mêmes leur trajectoire de développement ?
Quand nous disions récemment dans une tribune collective publiée par Le Monde : « Ne coupez pas l’aide publique au développement, repensez-la » nous ne nous doutions pas que quelques mois plus tard, le gouvernement américain allait décider de suspendre USAID.
Tout cela pose une question essentielle : qui définit les priorités du développement, et dans quel intérêt ? Car, comme le Général De Gaulle le rappelait : "Les États n’ont pas d’amis, ils n’ont que des intérêts."
Alors, quels devraient être ceux des Africains et Africaines ?
LE SÉNÉGAL RENFORCE SA STRATÉGIE ÉCONOMIQUE AVEC LA CRÉATION DU BIPE
Lors du Conseil des ministres, le gouvernement a adopté un décret créant le Bureau d’Intelligence et de Prospective Économique. Sa mission sera d’analyser les tendances économiques, d’évaluer les performances des secteurs clés...
Lors du Conseil des ministres, le gouvernement a examiné et adopté le projet de décret portant création et fixant les règles d’organisation et de fonctionnement du Bureau d’Intelligence et de Prospective Économique (BIPE).
Ce nouvel organe est conçu pour renforcer l’anticipation et la planification stratégique des politiques économiques du Sénégal. Le BIPE aura pour mission principale d’analyser les tendances économiques nationales et internationales, d’évaluer les performances des secteurs clés et d’orienter les prises de décision du gouvernement sur la base de données fiables et de projections précises.
Dans un contexte de mutations économiques rapides, le BIPE jouera un rôle crucial dans : La collecte et l’analyse de données économiques et financières pour éclairer les décisions politiques et stratégiques ; l’élaboration de scénarios prospectifs permettant d’anticiper les évolutions des marchés et des secteurs stratégiques ; l’appui aux réformes économiques en proposant des recommandations fondées sur des études approfondies ; le suivi et l’évaluation des politiques publiques, en s’assurant de leur efficacité et de leur impact sur le développement du pays.
Le décret adopté fixe les règles d’organisation et de fonctionnement du BIPE, en définissant ses missions, sa gouvernance et ses moyens d’action. Placé sous la tutelle de la Primature, il collaborera étroitement avec les ministères sectoriels, les institutions de recherche, les partenaires au développement et le secteur privé pour assurer une veille économique efficace et proposer des stratégies adaptées aux réalités nationales et internationales.
Avec la création du Bureau d’Intelligence et de Prospective Économique, le gouvernement marque une nouvelle étape dans la modernisation de la gestion économique du pays. En dotant le Sénégal d’un outil d’analyse avancé et de veille stratégique, les autorités entendent renforcer la compétitivité du pays, anticiper les défis économiques et maximiser les opportunités de croissance.
REPENSER L’ÉDUCATION POUR UN MEILLEUR ACCÈS À L’INFORMATION
L’accès à l’information exige une refonte des approches éducatives en Afrique, selon Tchanlandjou Kpare. Il cite une étude du Bureau international du travail indiquant que seulement 30 % des jeunes ont des informations claires sur leurs opportunités.
Dakar, 12 fév (APS) – Le secrétaire général de la Conférence des ministres de l’Éducation des États et gouvernements de la Francophonie (CONFEMEN), Abdel Rahamane Baba Moussa, a insisté mercredi sur la nécessité de réformer les systèmes éducatifs africains pour mieux répondre aux défis de l’employabilité des jeunes.
‘’Nos systèmes éducatifs doivent impérativement relever les défis de l’employabilité. Il est essentiel de repenser l’éducation et la formation pour offrir aux jeunes des compétences adaptées aux mutations du monde du travail ‘’, a-t-il déclaré.
Il s’exprimait à l’occasion du Sommet des acteurs du changement, placé sous le thème co-créer des solutions innovantes, systémiques et durables sur les questions d’éducation, de formation et d’employabilité organisé par Ashoka-Sahel au Sénégal.
Soulignant l’urgence d’adapter l’éducation aux mutations du marché du travail, il a insisté sur la nécessité de solutions innovantes, systémiques et durables.
‘’En 2004, 21,2 % des jeunes Africains étaient inactifs, tandis que 5 % des 15 à 35 ans étaient au chômage. Si rien n’est fait, cette situation pourrait s’aggraver de manière exponentielle ‘’, a-t-il averti, citant des données de l’Agence de développement de l’Union africaine.
Il a rappelé que la 60e session ministérielle de la CONFEMEN, tenue en avril dernier, a formulé plusieurs recommandations, parmi lesquelles l’adoption de financements innovants pour la formation technique et professionnelle, le renforcement des filières scientifiques et technologiques et l’intégration de l’entrepreneuriat dans les cursus scolaires.
Le Pr Moussa a également plaidé pour une meilleure interaction entre les secteurs de l’éducation et de l’emploi afin de bâtir un écosystème éducatif performant.
‘’Il est temps de dépasser le modèle où l’école formait sans se soucier de l’adéquation avec le marché du travail ‘’, a-t-il conclu, saluant l’initiative d’Ashoka-Sahel pour avoir réuni divers acteurs engagés dans cette transformation.
Dans ce même sillage , le directeur régional d’Ashoka Sahel, Tchanlandjou Kpare, a souligné l’importance d’une éducation innovante et adaptée aux réalités du marché du travail.
Selon lui, environ 60 % des jeunes Sénégalais âgés de 15 à 24 ans sont sans emploi, un chiffre aggravé par un manque d’accès à des informations fiables sur les opportunités de formation et d’emploi.
‘’Le défi de l’accès à l’information doit nous amener à repenser notre approche éducative ‘’, a-t-il insisté, en citant une étude du Bureau international du travail révélant que seulement 30 % des jeunes disposent d’informations précises sur ces opportunités.
M.Kpare a également appelé à une meilleure intégration des technologies de l’information et de la communication dans l’enseignement, ainsi qu’à une approche plus interactive de l’apprentissage. ‘’L’éducation ne peut plus se limiter à la transmission de savoirs académiques. Elle doit former des citoyens critiques, créatifs et acteurs du changement ‘’, a-t-il affirmé.
Toutefois, il a estimé que les efforts des Etats africains doivent être renforcés par des politiques plus inclusives et une coopération accrue entre le secteur public, le privé et la société civile.
‘’L’innovation sociale doit être reconnue comme un levier essentiel de transformation’’, a conclu Tchanlandjou Kpare, appelant à une action collective pour bâtir un avenir plus inclusif et équitable pour les jeunes du continent.
BARGNY FACE À LA COUR SUPRÊME, UN PROCÈS DÉCISIF CONTRE LA CENTRALE À CHARBON
Les organisations locales et internationales réclament son démantèlement, invoquant des violations du code de l’environnement et des engagements du Sénégal en matière de protection écologique.
La Cour suprême du Sénégal va se prononcer, ce 13 février, sur la demande d'arrêter les activités de la centrale à charbon de Bargny. Un combat mené par les populations et les environnementalistes.
Un procès historique aura lieu ce jeudi. Un procès aux enjeux cruciaux d’ordre environnemental, foncier, socio-économique et sanitaire. En effet, la Cour suprême du Sénégal statuera, ce jeudi, sur la requête "pour excès de pouvoir face au rejet implicite’’ du ministère de l’Environnement portant sur la demande de cessation des activités de la centrale à charbon installée à Bargny. "Celle-ci se situe à moins de 500 mètres des écoles et des habitations, ce qui constitue une violation flagrante des dispositions pertinentes du code l'environnement", estime le Réseau des associations pour la protection de l'environnement et de la nature (Rapen) dans une note.
"Depuis près de 10 ans, poursuit-on, plus de 70 000 habitants souffrent de la dégradation du bassin atmosphérique de Bargny et de perturbations sonores continuelles". Les défenseurs de l’environnement ajoutent que la présence des installations classées "incommodes, insalubres et dangereuses" augmente le niveau de la pollution et affecte la santé des populations surtout avec les poussières de charbon qui s’échappent de l’usine sous l’effet des vents. Ils s’insurgent aussi contre sa proximité avec le site de transformation de Khelcom occupé par des milliers de femmes.
Toujours, dénoncent ces associations locales de défense de l’environnement regroupées au sein du Rapen, la présence d’hydrocarbures constatée sur les produits halieutiques ainsi que les particules de cendres demeurent un problème délicat. Devant cette situation, elles ont engagé, depuis des années, le combat pour le démantèlement de l’Unité avec l’appui de Natural Justice. "La vie de toute une communauté est menacée avec cette centrale à charbon installée au cœur de Bargny et qui constitue un coup dur pour les populations pratiquant l’agriculture et l’élevage. Les communautés se sont toujours opposées à la centrale qui occupe 29 hectares des terres qui étaient destinées aux victimes de l’érosion côtière", fulmine Rapen.
L’organisation fait remarquer qu'aujourd'hui, Bargny vit sous la crainte d’une disparition au regard des effets environnementaux cumulatifs engendrés par les industries polluantes.
Les impacts qui pèsent sur les communautés
À côté des communautés depuis plusieurs années, l’organisation Natural Justice "trouve inadmissible que la population de Bargny subisse un préjudice environnemental, social et économique sous l’indifférence totale des autorités sénégalaises". En effet, elle souligne que le Sénégal a consacré le droit à un environnement sain dans sa Constitution de 2001 révisée, droit universellement reconnu par la résolution du 26 juillet 2022 de l’ONU portant sur le droit à un environnement sain, propre et durable. Ainsi, il est demandé au ministre de l’Environnement et de la Transition Écologique de faire respecter la réglementation nationale et de mettre entre œuvre les engagements environnementaux internationaux du Sénégal.
"La présence de cette centrale aggrave la survie des communautés qui sont grandement impactées par l’érosion côtière. En effet, des terres initialement destinées à l’agriculture, à l’habitat et à l’élevage ont été affectées au site industriel", s’insurgent encore ces associations. Qui s’appuient sur les résultats de l’étude sur les impacts cumulatifs des installations industrielles à Bargny, menée en 2022 par Natural Justice, pour mener son combat judiciaire.
Lesdits résultats, en effet, font ressortir les impacts qui pèsent sur les communautés. Il s'agit notamment de : la pollution thermique, l’altération de la qualité de l’air et la destruction de l'écosystème marin ; la contamination de l'eau et du sol qui menace la disponibilité de l’eau potable et la dégradation du couvert végétal ; les impacts sur les moyens de subsistance notamment les terres cultivables, la pêche et activités connexes. Quant aux impacts sociaux, ils sont liés à la culture, la sécurité, et l’habitat.
LES 8 POINTS ESSENTIELS DU CONSEIL DES MINISTRES
Leprésident Faye a annoncé une série de réformes immédiates visant à assainir les finances publiques. Il a insisté sur la transparence dans la gestion des comptes spéciaux du Trésor et le suivi rigoureux de l’endettement de l’État.
L’habituel Conseil des ministres a eu lieu ce mercredi 12 février. Le Président de la République a évoqué 8 dossiers cruciaux.
1- Magal de Darou Mouhty
A l’entame de son discours, le Président de la République a présenté ses condoléances à la communauté mouride suite au décès de de Serigne Bassirou Mbacké Anta NIANG, Khalife de Darou Mouhty, le 8 février dernier. Bassirou Diomaye Faye a ensuite enjoint le gouvernement de prendre toutes les dispositions nécessaires pour la tenue du Magal de Darou Mouhty qui aura lieu ce vendredi 14 février.
2-Rapport Cour des comptes
Le fait saillant de ce jour dans l’actualité sénégalaise a été la publication du rapport de la Cour des Comptes. Il a notamment révélé des dettes bancaires de près de 2500 milliards non tracés dans les comptes de l’Etat, ainsi qu’une « progression incontrôlée de la masse salariale ». Il y a notamment « le déficit budgétaire, déjà préoccupant, qui a atteint des niveaux critiques au cours des dernières années. Il est passé de 9,85% en 2019 à 9,17% en 2020, 11,47% en 2021, 12,65% en 2022, et 12,30% en 2023 »
3-Mise en place de mesures immédiates de correction
Pour régler ces problèmes, le Président de la République demande une réforme de la gestion des comptes spéciaux du trésor public. Ce pour « garantir que les transferts budgétaires soient effectués de manière conforme et transparente ». De ce fait, « il est essentiel de revoir la politique d’endettement de l’État afin d’éviter toute dette contractée en excès et de mieux gérer le sur- financement », renseigne Bassirou Diomaye Faye, qui poursuit : « Un suivi rigoureux des emprunts devra être mis en place pour s’assurer que les fonds sont utilisés conformément aux besoins budgétaires réels. Enfin, il est impératif de produire et publier les rapports sur les dépenses fiscales dans les délais légaux. Ces rapports doivent permettre une gestion transparente et rigoureuse des exonérations fiscales conformément aux directives de l’UEMOA. Ces réformes visent à renforcer la confiance dans la gestion des finances publiques et à garantir une meilleure transparence au profit de la nation ».
Ainsi, selon le Chef de l’Etat, il doit y avoir « la mise en place de mesures immédiates de correction, notamment la comptabilisation transparente des recettes et des dépenses, un audit global pour rétablir les chiffres de la dette extérieure et plus globalement un changement de paradigme dans la politique d’endettement de l’Etat. Ces réformes sont indispensables pour rétablir la confiance garantir la transparence et assurer la stabilité économique ». Bassirou Diomaye Faye demande d’ailleurs au Premier ministre de veiller personnellement à la mise en œuvre de tout ça.
4-Sécurité routière
Depuis plusieurs jours, les accidents de la route font des ravages un peu partout au Sénégal. Le Président de la République a présenté ses condoléances aux familles des victimes. Il a ensuite demandé le renforcement des contrôles sur les routes, une formation plus exigeante des chauffeurs, une réorganisation des gares routières et l’accélération du renouvellement des véhicules de transport.
En outre, concernant le développement des infrastructures routières, le Président de la République rappelle que c’est une priorité nationale. Il exige donc une évaluation des projets en cours avant fin mars 2025 pour aller vers un nouveau programme national de développement des routes et autoroutes. Par ailleurs, il a demandé une meilleure gestion du patrimoine routier et autoroutier et appelle à une réforme du modèle de financement et d’entretien des routes.
5-Elevage : meilleure application stricte du code pastoral
Concernant l’élevage, le Chef de l’Etat souhaite une application stricte du code pastoral et un soutien accru aux éleveurs. Parmi les objectifs dans ce secteur, il y a l’augmentation de la production locale de lait et de viande, la lutte contre le vol de bétail, la modernisation des abattoirs… Dans ce sens, Bassirou Diomaye Faye présidera la Journée nationale de l’élevage prévu le 22 février.
6-Gestion des agences d’exécution
Face au constat d’une prolifération démesurée des agences d’exécution lpors des dernières années, le président de la République entend rationaliser leur fonctionnement et réduire les dépenses publiques. Ainsi, il y aura une commission d’évaluation des agences d’exécution qui est relancée à la demande du premier ministre.
7-Améliorer la qualité et la préparation des projets de loi
En ce qui concerne l’agenda législatif, dans le cadre des réformes de l’agenda Sénégal 2050, le Président demande au gouvernement d’améliorer la qualité et la préparation des projets de loi avant de les transmettre au secrétariat général du gouvernement.
8-Blocages freinant la livraison du port minéralier et vraquier de Bargny
Enfin, les blocages de la livraison du port minéralier et vraquier de bargny préoccupent Bassirou Diomaye Faye, surtout en ce qui concerne les retards administratifs et les décisions en attente. Il demande donc aux ministres d’agir pour « lever ces obstacles et respecter les délais de livraison ».
PAPA MALICK NDOUR APPELLE À UNE LECTURE OBJECTIVE DU RAPPORT DE LA COUR DES COMPTES
L’ancien ministre de la Jeunesse souligne la gravité des conclusions et invite à une analyse critique. Il met en garde contre toute manipulation des données et promet d’apporter des clarifications sur les points controversés.
L’ancien ministre de la Jeunesse sous le régime de Macky Sall, Papa Malick Ndour, s’est exprimé sur la publication du rapport de la Cour des comptes. Citant un passage du Livre de Jérémie – « La moisson est passée, l’été est fini, et nous ne sommes pas sauvés » – il souligne la gravité des conclusions du document.
Dans une analyse critique, il invite à comparer ce rapport avec celui sur la dette publique de 2022, bien que ce dernier ne soit plus accessible au téléchargement depuis midi. « Volontairement ou involontairement ? » s’interroge-t-il.
Papa Malick Ndour appelle à une lecture attentive et objective du rapport afin d’éviter toute manipulation. Il met notamment en garde contre l’utilisation de certains tableaux pour véhiculer des idées erronées, citant en exemple la polémique autour du bâtiment administratif. Selon lui, le rapport explique en détail le bien-fondé des opérations de transfert de patrimoine entre l’État et la SOGEPA, une entité détenue exclusivement par l’État.
L’ancien ministre promet de revenir point par point sur les différents aspects du document afin d’apporter des clarifications.
LA GENDARMERIE NATIONALE INTERPELLE 16 CANDIDATS À L’ÉMIGRATION
L’opération a également permis la saisie d’un GPS et de 13 bidons de 60 litres de carburant hors-bord, destinés à l’expédition clandestine.
Dans le cadre de la lutte contre l’émigration irrégulière, la Gendarmerie nationale a mené une nouvelle opération le mardi 11 février 2025 sur l’île de Sangomar.
Selon le communiqué de la gendarmerie, cette intervention a mobilisé la brigade territoriale de Fimela, la brigade de proximité de Niodior et l’Escadron de Surveillance et d’Intervention (ESI) de Sokone.
Les forces de sécurité ont interpellé seize (16) candidats à l’émigration, parmi lesquels six (06) femmes et deux (02) enfants. Les individus arrêtés sont de nationalité sénégalaise (08) et guinéenne (08).
L’opération a également permis la saisie d’un GPS et de 13 bidons de 60 litres de carburant hors-bord, destinés à l’expédition clandestine.
FINANCES PUBLIQUES, DES DÉCAISSEMENTS IRRÉGULIERS ET DES AFFECTATIONS HORS PROCÉDURE ÉPINGLÉS
La Cour des comptes a relevé une irrégularité majeure dans la gestion des finances publiques : le directeur général du budget a ordonné des décaissements sur le compte CAP/Gouvernement, alors qu’il n’en est pas le gestionnaire.
Le directeur général du budget, bien que n’étant pas gestionnaire du compte de dépôt CAP/Gouvernement destiné à la mise en œuvre des projets et programmes de l’État, a donné l’ordre au Trésorier général d’y effectuer des décaissements, l’une des « anomalies » relevées par la Cour des comptes dans son « Audit du rapport sur la situation des finances publiques – Gestions de 2019 au 31 mars 2024 ».
« Des décaissements sont effectués en 2022 par le Trésorier général sur ordre du directeur général du budget, qui n’est pas le gestionnaire du compte », observe la mission d’audit de la Cour des comptes.
Elle rappelle que le compte de dépôt CAP/Gouvernement a été créé le 25 juin 2012 au profit de la Cellule d’appui à la mise en œuvre des projets et programmes.
Ce compte a été créé dans le but de « contribuer à l’amélioration du niveau et de la qualité d’exécution des projets et programmes ».
Il a été ouvert dans les livres de la Trésorerie générale et devait être « mouvementé » par le directeur de l’ordonnancement des dépenses publiques.
Par la suite, « d’importantes ressources d’un montant de 1.343,5 milliards de francs CFA sont décaissées à travers ce compte », constate la Cour des comptes.
Les décaissements effectués en 2022 par le Trésorier général sur ordre du directeur général du budget, « qui n’est pas le gestionnaire du compte », comprennent un paiement de 6.481.740.000 au profit d’Envol Partenariat S.A, au titre du loyer de la Maison des Nations unies à Diamniadio (ouest), et un autre de 1.205.237.681, au titre du complément de l’achat des 30 % d’actions de DP World pour le compte de l’État du Sénégal.
Un autre paiement de 4 milliards de francs CFA a été effectué au profit de la compagnie Air Sénégal, selon le rapport d’audit de la Cour des comptes.
« Sur cette question, le ministère des Finances et du Budget », interrogé par les auditeurs, « précise dans sa réponse que le directeur général du budget, qui n’est pas le gestionnaire du compte, ne peut donner d’ordre au Trésorier général de payer une dépense ».
« Par ailleurs, le compte de dépôt enregistre, en 2023, le remboursement d’une dette bancaire d’un montant de 305.943.167.977 francs CFA sans lien établi avec l’objet pour lequel il a été créé », relève la Cour des comptes, ajoutant : « Il s’y ajoute que les remboursements sont effectués en dehors des procédures normales prévues par la règlementation en matière de gestion de la dette publique. »
Elle constate aussi que « les comptes de dépôt CAP/Gouvernement et Programme de défense des intérêts économiques et sécuritaires du Sénégal (PDIES) reçoivent des affectations de trésorerie sur autorisation du ministre chargé des Finances ».
« C’est le cas de l’autorisation accordée en 2023 d’imputer les ressources mobilisées auprès de l’investisseur CGL dans les comptes de dépôt CAP Gouvernement et PDIES, pour des montants respectifs de 125.000.000.000 de francs CFA et 4.022.122.869 francs. Ces affectations sont effectuées en dehors des procédures de la loi de finances », révèle le rapport d’audit.
Les fonctionnaires chargés de l’audit déclarent que « des prélèvements d’un montant de 407.550.717.701 francs CFA sont opérés sur des soldes créditeurs des comptes de dépôt pour être affectés à d’autres comptes sur autorisation du ministre chargé des Finances », à la fin de l’année 2023.
Or, « ces prélèvements/affectations contreviennent aux dispositions de l’arrêté n° 21136 du 21 novembre 2017, modifié, qui prévoient, pour les soldes créditeurs de ces comptes de dépôt, le report ou la comptabilisation en recettes exceptionnelles », soutiennent les auditeurs de la Cour des comptes.
Ils tiennent à rappeler que « le ministre chargé des Finances ne doit pas affecter le produit des emprunts à des comptes de dépôt pour y exécuter des opérations non autorisées par la loi de finances ».
Le rapport d’audit signale, par ailleurs, que « les services non personnalisés de l’État », les SNPE, « entités dépourvues de personnalité juridique », ont bénéficié de transferts de crédits, sur la base de procédures qui « échappent totalement aux contrôles de régularité préalables nécessaires à la préservation des deniers publics ».
« Les transferts au profit des SNPE suscite quelques observations […] L’État ne prévoit de transferts qu’au profit des entités dotées de la personnalité juridique », ce qui n’est pas le cas des services non personnalisés de l’État, constate la Cour des comptes.
« Contrairement à la procédure normale », les opérations effectuées au profit des SNPE « échappent totalement aux contrôles de régularité préalables nécessaires à la préservation des deniers publics », soutient la mission d’audit.
La Cour des comptes signale que « les faits relatés dans le présent rapport, présumés constitutifs de fautes de gestion, de gestions de fait ou d’infractions à caractère pénal, feront l’objet, le cas échéant, de déférés, de référés ou de déclarations provisoires de gestion de fait ».
L’audit a été fait à la demande des nouvelles autorités sénégalaises, à la suite de l’élection présidentielle de mars 2024.
Il a été conduit après que le ministre des Finances et du Budget a transmis à la Cour des comptes un rapport sur la situation des finances publiques couvrant la période allant de 2019 au 31 mars 2024.
« L’objectif général de l’audit est de s’assurer que le rapport produit par le gouvernement rend compte fidèlement de la situation budgétaire et financière de l’État, de 2019 au 31 mars 2024 », rappellent les fonctionnaires auteurs de l’audit.