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21 juin 2025
LE JEU DE DUPES DE L'OPPOSITION
Alors qu’ils récusent le parrainage pour les législatives du 31 juillet 2022, certains responsables de partis de l’opposition en ont récupéré des fiches au niveau de la Direction générale des élections
«Ceux qui appellent à la suppression du parrainage, ils iront chercher des parrains (...) Vous verrez qu’ils iront tous sur le terrain chercher des parrainages pour les élections législatives.» L’ancien Premier ministre, Aminata Touré semble avoir vu juste. Malgré le rejet en masse de la loi sur le parrainage, des opposants se préparent à la collecte de parrains pour les élections législatives du 31 juillet 2022. Selon des informations de L’Obs, une trentaine de partis, coalitions de partis et entités indépendantes ont déjà retiré des copies de fiche de parrainage. La majeure partie a retiré le modèle de la fiche de collecte des parrainages, le vendredi 11 mars 2022. C’était à l’occasion de la séance d’information sur la collecte de parrainage organisée par la Direction générale des élections (Dge) avec les représentants des partis politiques et entités de personnes indépendantes désireux de se porter candidats aux élections législatives du 31 juillet 2022. Et, des responsables de grands partis membres des coalitions de l’opposition, telles que Yewwi Askan Wi, Wallu Sénégal, Gueum Sa Bop, République des Valeurs, entre autres, sont cités parmi ceux qui ont déjà retiré des exemplaires des fiches de parrainage.
Chargé des élections du parti Pastef/Les Patriotes, Aldiouma Sow aurait pris pour le nom de sa formation politique. Le Parti démocratique sénégalais (Pds) aurait mandaté son chargé des élections, Dr Cheikh Dieng, prendre la fiche de parrainage. Adama Faye, petit-frère de la Première Dame, Marème Faye Sall, aurait lui aussi envoyé un mandataire retirer une fiche de parrainage. Abdou Salam Bass, aussi, aurait retiré une copie de la fiche de parrainage au nom de la Convergence démocratique/Bokk Guis-Guis de l’ancien maire de Dakar, Pape Diop. Selon des sources de L’Obs, ce sont les mandataires qui sont venus individuellement récupérer la copie de la fiche de parrainage. Car, la Direction générale des élections (Dge) ne délivre les copies de fiche de parrainage qu’au détenteur d’un mandat de parti, de coalition de partis ou d’une entité indépendante. Mais, même s’ils ne viennent pas récupérer la fiche de parrainage au niveau de la Dge, les partis peuvent en disposer. Ce sont des copies qui sont remises aux mandataires. Pourquoi ces partis retirent-ils les fiches de parrainage, alors qu’ils réfutent ce moyen de filtre électoral ? Leur démarche n’est-elle pas paradoxale ? Joint au téléphone par L’Obs, Aldiouma Sow, chargé des élections de Pastef/Les Patriotes réfute : «Je ne peux pas répondre à cette question.» Quid de la récupération ou non de la fiche de parrainage pour le compte de son parti. Aldiouma Sow refuse catégoriquement de se prononcer sur le sujet.
«On est obligé de se préparer en conséquence»
Tout le contraire du mandataire de Gueum Sa Bop de Bougane Guèye Dany qui assume avoir retiré la fiche de parrainage. Au bout du fil, Kalidou Niass affirme : «Oui, nous avons retiré nos fiches de parrainage. On ne s’en cache pas. J’ai personnellement retiré pour le compte de la coalition Gueum Sa Bopp depuis le vendredi passé, cela fait plus d’une semaine. C’est individuellement que nous avons pris les fiches de parrainage.» C’est au niveau de leur directoire que les leaders de Gueum Sa Bop ont convenu d’adopter cette démarche consistant à récuser le parrainage, tout en se préparant à la collecte de parrains. C’est une démarche de républicain, selon Kalidou Niass qui rappelle que le parrainage demeure une loi en vigueur qui s’applique à tous. «Nous voulons que le parrainage soit abrogé, mais en attendant, c’est une loi votée. Nous sommes obligés de faire parallèlement pression pour rappeler à l’Etat ses obligations, mais en même temps, nous prenons les dispositions nécessaires pour avoir le nombre suffisant de parrains. Parce que si on ne le fait pas, on risque d’être sacrifié», explique-t-il. Gueum Sa Bop se prépare en conséquence pour ne pas avoir de surprises. Car, souligne son mandataire, «ce qu’ils veulent, c’est de nous pousser à ne pas se présenter. Nous avons alerté, écrit, dénoncé pour amener l’Etat à se conformer mais, on est obligé de se préparer à cette éventualité». A l’en croire, le gouvernement a l’habitude de faire le forcing mais, s’ils veulent apaiser le climat, ils sont obligés d’écouter la complainte de l’opposition qui s’est levée comme un seul homme pour demander l’abrogation de la loi sur le parrainage. «On fait le parrainage parce que nous avons dit depuis le début que nous n’avons pas un problème de parrains. Car, nous avons récolté un nombre de voix supérieur à ce qu’on demande pour le parrainage mais, c’est un débat de principe pour demander à l’Etat de se conformer à ses engagements internationaux», ajoute M. Niass.
DANS L'ENFER DU VEUVAGE
Déchirés par la douleur de la perte, certains veufs ou veuves vivent l’enfer à cause de cette douleur. A côté des crises d’insomnies, certains ont sombré dans l’alcoolisme, là où d’autres refusent de se remarier
Déchirés par la douleur de la perte, certains veufs ou veuves vivent l’enfer à cause de cette douleur. A côté des crises d’insomnies, certains ont sombré dans l’alcoolisme, là où d’autres refusent de se remarier. Incursion dans l’enfer des veufs/veuves.
Il se dégage de la chambre de Sophie* un sentiment de malaise qui vous oblige à rester en alerte sur vos mots, vos mouvements, vos regards. Le problème n’est pas le vaste lit en bois où une pile de linge attend d’être pliée. Ce n’est pas la grande armoire qui occupe tout un mur. Le problème, c’est que tous ces meubles semblent trop volumineux et nombreux pour une si petite chambre d’à peine 15m². Sophie qui vient juste de perdre son époux, se remet avec peine de sa douleur et de son nouveau statut de veuve. Une période de sa vie qu’elle pense avoir bien vécue. Pourtant, on sent encore le traumatisme dans la façon dont son esprit ne joue plus son rôle de filtre. Lorsqu’on lui pose la question sur les particularités de son veuvage, Sophie, la soixantaine, n’en finit plus de commenter et de se noyer dans son flot de paroles. La fonctionnaire à la retraite a besoin de se vider, de se soigner de son trauma. Après plus de 40 ans de vie commune, son mari l’a quittée pour son Créateur, au mois de décembre dernier. «C’était un moment très délicat à gérer. Il n’était pas malade et est parti subitement suite à un malaise», démarre Sophie. Chez la dame, la perte de cet être cher a entraîné l’effondrement des «allant de soi» de la vie quotidienne, fait vaciller le sentiment de sécurité et conduit à une insignifiance de l’existence, mais surtout à une grande solitude lors des repas, des prières et parfois devant le poste de télévision. «C’étaient là des moments forts de la vie conjugale.»
Sophie vit recluse dans sa petite chambre à coucher qui semble si grande pour elle depuis la mort de son époux. Dans sa concession sise au quartier Keur Serigne Louga, sa tâche, comme presque tous les matins, consiste à s’occuper de sa chambre et de ses petits-enfants. Elle replace un mobilier, plie quelques habits, jette de temps en temps un coup d’œil à la télé accrochée au mur, tout en restant alerte sur le moindre bruit. «Depuis la mort de mon mari, chaque bruit me fait sursauter. A chaque fois que j’entends un bruit ou le cri des enfants, je rue dehors pensant qu’ils accueillent leur grand-père. Il avaient cette habitude.» C’est son quotidien. La nuit est une autre réalité. Ses nuits, rythmées par une insomnie chronique, sont devenues blanches et tellement longues. «J’ai du mal à oublier son visage souriant toujours dissimulé dans des lunettes. Il m’arrive très souvent de rester une nuit entière sans fermer l’œil. Dès que je commence à dormir, j’entends sa voix ou j’ai l’impression qu’il est dans la pièce, assis au coin du lit, sa main posée sur ma tête. J’ai vécu plus de 40 ans avec mon mari. 40 années où les seules fois où il couchait hors de la maison, c’était pour une mission. Nous étions très fusionnels. C’est pourquoi, j’ai encore du mal à me faire à son départ.» Sur recommandation de son aîné pourtant, l’aide d’un psychologue avait été sollicitée, mais soucieuse de garder ses souvenirs intacts, Sophie a décliné son appui, «par peur qu’il lui donne des médicaments qui lui fassent oublier son cher époux».
«Dès que je commence à dormir, j’ai l’impression qu’il est dans la pièce, assis au coin du lit, sa main posée sur ma tête»
Astou G* vit une situation quasi similaire. Cette jeune veuve d’une quarantaine d’années reste traumatisée par la mort de son mari, emporté par accident en 2019 sur la route de Saint-Louis. Trois longues années après cette perte cruelle qui a fait basculer sa vie, la jeune dame est toujours inconsolable. Dès qu’elle entend le nom de son défunt époux, elle entre dans un état second. «Je comprends pourquoi certaines femmes refusent de se remarier après la perte de leur mari. Pour dire vrai, je suis certes musulmane, mais si cela ne dépendait que de moi, je ne me marierai plus. Cependant, la religion a ses obligations. Des prétendants continuent de taper à ma porte, mais je les éconduis tous. Après mûre réflexion, j’ai décidé d’attendre la ménopause pour me remarier. Je ne veux pas d’un autre père pour mes enfants. Ma fille aînée me taquine souvent en me conseillant de refaire à nouveau ma vie. Je veux bien, mais il m’est impossible d’oublier mon mari. La nuit, il m’arrive de tapoter sa place dans le lit et de me rendre à l’évidence. Il est bien parti, je le réalise chaque jour un peu plus. Je suis en train de me battre. Pour le moment, je vis avec philosophie ma situation de veuve.»
«Dépressif, il s’est attaqué à une femme qu’il a confondue avec son épouse décédée»
Astou vit son veuvage comme une épreuve à surmonter, une situation nouvelle qu’il lui faut accepter et par rapport à laquelle, elle affirme sa volonté de reprendre le dessus. B. Cissé, lui s’est laissé aller à sa peine, incapable de relever ce double défi : trouver quoi faire de ses journées déstructurées par la disparition de sa femme et essayer de donner une nouvelle signification à son existence. Un désespoir qui l’a poussé à se consoler dans l’alcool et les bras d’une fille de joie qu’il a fini par violenter. Cette dernière l’a attrait à la barre pour vol et violence et voie de fait, parce qu’après avoir satisfait sa libido, B. Cissé lui aurait arraché ses 15 000 Fcfa, avant de la battre copieusement. Invité à s’expliquer, à la barre, sur les faits à lui reprochés, B. Cissé, visiblement dans ses petits souliers, a reconnu les faits. «Effectivement, je reconnais les faits qui me sont reprochés. C’est moi qui ai exercé une violence sur elle avant de prendre son argent. Seulement, je tiens à préciser que j’ai agi sous l’emprise de l’alcool. Cette nuit-là, j’avais beaucoup bu. Je n’étais pas maître des actes que je posais. J’ai sombré dans l’alcoolisme depuis le décès de ma femme. Depuis sa disparition, ma vie a commencé à basculer. J’ai presque tout perdu. J’ai même bradé ma maison à vil prix. Pourtant, je gagnais bien ma vie parce que j’étais entrepreneur de bâtiment. Je suis aujourd’hui devenu un vulgaire ivrogne sans domicile fixe et qui squatte les milieux interlopes des villes de Kébémer et Louga. D’ailleurs, mes enfants ont été récupérés par leur oncle. Je suis perdu sans elle.» Même si le tribunal est resté insensible face aux déclarations du prévenu qui n’avaient rien à voir avec le délit visé, une partie du public compatissait au sort du malheureux veuf. Cette pathétique histoire, confirmée par les proches de B. Cissé, est identique à celle d’un ressortissant guinéen qui vivait à Louga avec sa petite famille. Celui-ci, supportant mal le décès de sa femme était devenu presque dépressif. Il a commencé à poser des actes irréfléchis. Un jour, il est entré dans une maison et a violenté une dame qu’il avait confondue avec sa femme décédée et voulait à tout prix la contraindre à le suivre à la maison : «Je t’ai cherchée partout. Rentrons à la maison ou bien tu auras affaire à moi», menaçait-il. Maîtrisé par quelques gros bras, il a été livré à la police. Attrait devant la barre, il levait sans cesse sa main vers le ciel tout en criant sans cesse le nom de sa femme.
«Je suis devenu un autre homme …»
Ces deux jeunes hommes susnommés ne sont pas les seuls veufs traumatisés par la mort de leur épouse. M.G. un quingénaire domicilié à Guéoul dans le département de Kébémer, a lui aussi perdu le goût de la vie depuis le décès de sa femme en 2019. Trouvé dans un atelier de menuiserie, ce père de quatre enfants peine toujours à faire le deuil de sa défunte épouse. Il confie : «J’ai perdu un être cher. Rien n’est plus dur que la perte d’une épouse, surtout quand elle laisse derrière elle des enfants. On n’est jamais préparé à vivre un tel drame. C’est la raison pour laquelle je suis devenu un autre homme. On dirait que ma vie n’a plus de sens. Vraiment, n’eut été mes enfants, qui me tiennent compagnie, même la nuit, je serais devenu fou. Je pense toujours à ma défunte femme. Nous étions très liés, c’est pourquoi, je vis l’enfer. Il m’arrive souvent de me réveiller au milieu de la nuit pour prier pour elle. Mes frères me conseillent de me remarier afin de mener une nouvelle vie, mais je sais que ce sera très difficile pour moi. J’ai vraiment des scrupules à épouser à nouveau une femme. Ce serait une sorte de trahison à sa mémoire.»
«Je ne songe pas à me remarier»
Président de l’Association des militaires libérés du Sénégal, Cheikh Konaté, par ailleurs président du Club «Les Amazones de Louga» et conseiller municipal à la mairie de Sakal, continue lui aussi de pleurer la mort de sa femme survenue en 2020. Joint au téléphone ce veuf, qui a blanchi sous le harnais, se souvient toujours de sa défunte femme. Il raconte, la voix empreinte de chagrin : «J’avais une épouse modèle. Ses qualités faisaient l’unanimité au sein de ma famille. D’ailleurs, mon père l’a remerciée sur son lit d’hôpital avant de mourir. Sa mort m’a beaucoup affecté. Elle a laissé derrière elle un enfant malade, âgé de quatre ans. Pour le moment, seule l’éducation de notre garçon me préoccupe. C’est pourquoi je ne songe pas à me remarier. Je suis un musulman et j’accepte cette volonté de Dieu, mais je veux prendre du temps avant de nouer une quelconque relation avec une autre. Avant de mourir, elle m’avait confié ses dernières volontés. Je ne la trahirai jamais. Nous formions une seule et même personne. Je suis encore traumatisé par sa mort. Elle a tellement imprimé sa marque sur moi.» A tel point que la défunte continue par-delà la mort, à jouer un rôle de confirmation identitaire sur le survivant.
UNE MALICIEUSE SAGESSE DE LA LIBERTÉ ET DU MOUVEMENT
Mohamed Mbougar Sarr, lauréat du prix Goncourt 2021, a relu pour «Libération», «l’Etrange destin de Wangrin », un roman d ‘Amadou Hampâté Bâ qui conte les aventures «authentiques et invraisemblables» d’un fonctionnaire malien de l’administration coloniale
Mohamed Mbougar Sarr, lauréat du prix Goncourt 2021, a relu pour «Libération», «l’Etrange destin de Wangrin », un roman d ‘Amadou Hampâté Bâ qui conte les aventures «authentiques et invraisemblables» d’un fonctionnaire malien de l’administration coloniale française. Un livre qui raconte l’Afrique.
Amadou Hampâté Bâ (1900-1991) a eu beau se défendre d’avoir voulu faire œuvre de fiction avec l’Etrange destin de Wangrin (1973), on ne sort de ce livre qu’à regret et en soufflant : quel merveilleux roman ! Que l’auteur ait rigoureusement recueilli, ordonné et rapporté, à partir de sources orales, les aventures authentiques et invraisemblables d’un de ses amis ; qu’il les ait inventées tout cela en assurant, dans un procédé classique de brouillage des pistes, les avoir seulement retranscrites ; qu’il ait encore mêlé les deux régimes du discours, l’historique et le fictionnel : au fond, tout cela importe peu. Ce qui importe, c’est qu’avec ce livre traversé par une énergie et une imagination si puissantes, seul demeure le plaisir de s’y laisser porter.
On suit Wangrin, un homme né à l’orée du XXe siècle en Afrique de l’Ouest, et dont le destin, étalé sur à peu près trente-cinq ans, se déploie dans un récit aux épisodes, directions, strates, et significations multiples. Au moment où l’on fait sa rencontre, Wangrin est un élève brillant à «l’Ecole des otages» (qui a réellement existé), dans laquelle l’administration coloniale s’assurait que les fils des notables de la brousse continueraient à coopérer. Notre protagoniste, issu d’une famille de l’aristocratie bambara, s’y fait remarquer : brillant, polyglotte, plein de ressources, il devient très vite l’interprète favori des différents commandants de cercle de la région. Cette position intermédiaire, un pied dans le secret des maîtres, l’autre dans celui des arcanes locaux, permet à Wangrin de jouer, c’est-à-dire de se jouer de tous les pouvoirs en place. A grand renfort d’audace et de ruse, le voici qui s’engage dans une fabuleuse épopée tragicomique aux retournements incessants. Il dupe les puissants de tous bords, les dépouille pour donner aux moins pourvus, ment pour s’enrichir, se fait des ennemis, s’allie aussitôt avec des forces occultes pour les neutraliser («Accepterais-tu de travailler pour garantir contre mes ennemis blancs-blancs, noirs-blancs et noirs, et pour combien ?») ; il se déguise, voyage, erre, perd sa fortune, la regagne, la rejoue, arnaque, corrompt, charme des femmes, engage des espions quand il ne s’agit d’hommes de main, paie des coups à des ivrognes fauchés, rit des autres mais, surtout, de lui-même, que la fortune lui sourit ou le fuie.
SUSPENSION DES SANCTIONS DE L'UEMOA CONTRE LE MALI
Face à un Assimi Goïta qui refuse de céder le pouvoir, les chefs d’État ouest-africains avaient pris des sanctions fortes contre Bamako le 9 janvier dernier. Celles-ci viennent d’être suspendues par la Cour de justice de l’Uemoa
Jeune Afrique |
Anna Sylvestre-Treiner et Fatoumata Diallo |
Publication 24/03/2022
Face à la volonté d’Assimi Goïta de se maintenir cinq années supplémentaires au pouvoir, les chefs d’État ouest-africains avaient décidé de mesures dures : le gel des avoirs du Mali à la banque centrale commune aux huit États membres de l’Uemoa, celui des entreprises publiques et des organismes parapublics maliens, la suspension du pays de toute assistance financière des institutions internationales…
Recours
Des sanctions contestées par l’État malien qui a diligenté un collectif d’avocats pour les faire annuler. Le 21 février dernier, ils ont déposé deux recours dénonçant leur « illégalité absolue ». Ils viennent donc d’obtenir gain de cause.
Dakar, 24 mars (APS) - La marche des opposants au "système" du parrainage au Sénégal est l’un des sujets les plus en vue dans l’édition de jeudi de la presse quotidienne.
Plusieurs journaux parvenus à l’APS se sont fait l’écho de cette marche à l’issue de laquelle des personnalités de l’opposition et de la société civile avaient été arrêtées avant d’être libérées tard dans la soirée de mercredi.
"Un désaccord sur l’itinéraire a conduit à l’avortement de la grande marche contre le parrainage initiée par" des organisations telles que Y’ en a marre, FRAPP (Front pour une révolution anti-impérialiste, populaire et panafricaine) et Africa First, explique Sud Quotidien.
Les protestataires avaient retenu un itinéraire devant les mener de la place de la Nation au siège du ministère de l’Intérieur. Ils "ont buté sur la décision du préfet qui leur a imposé de se limiter au rond-point de la RTS", la Radiotélévision sénégalaise, indique Sud Quotidien.
Le journal rapporte que qu’à l’heure du rendez-vous, "certains parmi eux, récusant l’arrêté du préfet, ont fait irruption au ministère de l’Intérieur où beaucoup ont été arrêtés"."La police dicte sa loi aux manifestants", affiche à ce sujet le quotidien L’As, selon lequel les forces de l’ordre ont arrêté "plusieurs manifestants qui comptaient coûte que coûte marcher devant le ministère de l’Intérieur (...)".
"Guy Marius Sagna, Dame Mbodj, Abdou Karim Guèye et plus de 15 autres activistes qui se sont transportés sur la Place Washington pour déposer un mémorandum contre le parrainage, n’ont pas franchi le portail d’Antoine Diome", le ministre de l’Intérieur, rapporte Source A. "Ça s’appelle flop", titre ce quotidien, au sujet de l’organisation de cette marche.
Enquête constate que "le parrainage cristallise les tensions" et fait du Sénégal une démocratie "sous tension", où différentes "controverses viennent polluer le débat démocratique, à la veille de chaque élection".
Le Témoin quotidien parle d’un "dialogue de sourds", Vox Populi donnant la parole à un responsable de l’opposition du parti PASTEF (Patriotes du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité), qui laisse entendre que le parrainage est "une fausse solution à un vrai problème", que constitue la "floraison" des partis au Sénégal.
L’Observateur pointe un "jeu de dupes de l’opposition", dont plusieurs partis (Pastef, PDS, Bokk Gis-Gis, Gueum Sa Bopp) "ont retiré leurs fiches, malgré leur appel à la suppression du parrainage".
En tous les cas, Cheikh Alioune Ndao de la République des valeurs (RV), cité par Vox Populi, promet "d’autres plans d’action" après la marche de mercredi. "On va mener ce combat-là jusqu’au bout, quel que soit le prix qu’on va payer", dit-il.
Ses propos, qui semblent pleins de détermination, font écho à ceux de Khalifa Sall, l’ancien maire de Dakar, dont les déclarations font la Une de Tribune. "On n’acceptera pas qu’un autre homme politique aille en prison pour des raisons politiques". Sous-entendu un opposant autre que lui qui a écopé d’une peine de prison de 5 ans en 2018, pour "escroquerie sur deniers publics".
Cette condamnation, faisant suite à son placement en détention depuis mars 2017, visait à l’empêcher de concourir à la présidentielle, selon les contempteurs du pouvoir.
Le Soleil, comme Walfquotidien, reviennent sur l’annonce portant sur la création d’une Autorité de régulation de la commande publique (ARCOP) dont les compétences seront "plus larges que celles de l’ARMP", l’Autorité de régulation des marchés publiques, précise le premier journal cité.
Walfquotidien voit l’ARMP se muer "en super gendarme". "Certainement un pas de plus dans la transparence dans l’attribution des marchés publics", estime le même journal, selon lequel les compétences de la nouvelle entité "intègrent les marchés publics, les délégations de service public et les contrats de partenariat".
Par Mamadou Moustapha MBAYE
EAU, PAIX ET SÉCURITÉ ALIMENTAIRE AU SÉNÉGAL ET EN AFRIQUE
Il est une évidence qu’il n’est point de développent sans paix et sécurité. Ainsi, la sécurité alimentaire, ou même la souveraineté alimentaire au mieux, ne pourront être réalisées que dans la paix et la disponibilité en eau
A l’occasion de l’avènement du 9eme Forum mondial de l’EAU organisé cette année au Sénégal, l’idée m’est venue de produire cette humble contribution, pour servir de brique à l’édification du grand mur de la construction des solutions concernant la problématique de l’eau dans le monde. Le présent document est une simple réflexion sur le triptyque : « Eau, paix et Sécurité alimentaire au Sénégal et en Afrique ».
Il est une évidence qu’il n’est point de développent sans paix et sécurité. Ainsi, la sécurité alimentaire, ou même la souveraineté alimentaire au mieux, ne pourront être réalisées que dans la paix et la disponibilité en eau aussi bien pour la consommation humaine et animale, que pour l’agriculture, l’industrie, l’énergie et les autres utilisations du liquide précieux. C’est là qu’il convient de mettre en évidence l’importance de l’eau pour l’homme et l’intérêt de la création du Conseil mondial de l’eau dont on célèbre en ce moment au Sénégal, la 9eme édition de son forum de l’eau sur le thème « Sécurité de l’eau pour la paix et le Développement ».
Au demeurant la disponibilité de l’eau en quantité et en qualité, ainsi que sa gestion équitable tant à l’intérieur des pays qu’entre ceux-ci, pour tous les emplois, sont une condition siné quanon pour la paix et la souveraineté alimentaire. C’est dire que l’existence des bases productives pour une production agricole suffisante, durable, et de qualité est incontournable. Je veux citer ici : les terres de culture convenables, un climat stable et adéquat, des ressources en eau suffisantes et enfin un capital Humain compètent et efficace.
Concernant le sol sa raréfaction et sa dégradation posent problème dans le monde entier : Selon la FAO près d’un milliard d’habitants sont touchés dans le monde par la salinisation, soient 8.7% des sols de la planète, étendue à la quelle, il faut ajouter toutes les superficies dégradées par des facteurs tels que : l’érosion hydrique, et éolienne, l’effet des changements climatiques ainsi que les diverses actions anthropiques, (telle que l’urbanisation sauvage) (Source : Afrique Agriculture supplément n°446 – janvier – février 2022).
Au Sénégal le phénomène de la dégradation des terres de culture à réduit depuis de longues années le potentiel foncier évalué aujourd’hui à 3 805 000 hectare , or il se chiffrait en 1951 à 6 745 300 hectare ( selon Pélissier dans les paysans du Sénégal), Cité par l’ingénieur agronome Mamadou Faye dans une contribution publiée en 2015 : Rétrospective sur l’agriculture sénégalaise . A propos des changements climatiques qui sont un phénomène mondial, le Sénégal les subit de façon significative à l’instar de ses pairs africains et sahéliens. Et ce phénomène est davantage aggravé au Sénégal par la démolition des dunes et des Filaos plantés le long du littoral, sans oublier l’ampleur de la déforestation, les mauvaises pratiques agricoles, et enfin l’exploitation excessive des nappes d’eaux souterraines par les différentes industries notamment dans la région de Thies.
J’en viens à la problématique de l’eau au Sénégal, analysée de façon globale et satisfaisante par la Direction de la Gestion et de la Planification des Ressources en eau dans son ouvrage : « Atlas de l’eau du Sénégal », à quatre niveaux à savoir : Les différentes ressources en eau ; La qualité de l’eau ; L’usage des ressources en eau ; Le cadre institutionnel et la gouvernance de l’eau. J’insisterai essentiellement dans cette partie de mon propos sur la problématique de l’eau d’irrigation, autrement dit, de la maitrise de l’eau pour la promotion de l’Agriculture irriguée.
A ce propos, je considère que dans le cadre de la visite des champs des priorités pour les pays africains et notamment pour le Sénégal comme le suggère le Chercheur Docteur Pape Abdoulaye Seck dans sa contribution intitulée : « la revanche du secteur agricole africain : quelques préalables pour une souveraineté alimentaire durable », l’agriculture est devenue aujourd’hui en Afrique une sur priorité, c’està-dire la première des priorités. Ce faisant, il s’agira de se pencher à nouveau sur une politique hardie de maitrise de l’eau, pour aller de façon accéléré, au-delà des 5 à 6 % des terres irrigués sur notre potentiel foncier en augment la cadence des aménagements dans la vallée du Fleuve Sénégal , ainsi que dans les autres bassins de nos nombreux cours d’eau. L’objectif vise’ sera d’exploiter les différentes sources d’eau fluviale, de surface, et souterraine pour le développent de l’irrigation dans toutes les zones convenables pour sa mise en œuvre.
Les productions issues de l’ensemble des périmètres irrigués, ajoutées à celles provenant des cultures pluviales, permettraient d’anticiper sur l’augmentation des besoins alimentaires découlant d’une démographie toujours accrue ainsi que de la rareté des produits alimentaires habituellement importés sur les marchés agricoles mondiaux. La situation crée par la guerre russoukrainienne illustre à merveille la nécessité d’une quête permanente de la souveraineté alimentaire à tous les prix. Je ne saurais ne pas évoquer, ici, les regrets de feu l’Agronome Amadou ndao Bourtanda dans ses mémoires, à propos de l’abandon du programme des vallées fossiles qui devait permettre d’alimenter en eau de consommation pour les Hommes et le bétail ainsi que l’irrigation de plus d’un million hectares dans le Ferlo, notamment dans les régions de Matam et de Louga.
Aujourd’hui, l’idéal serait de procéder à une étude judicieuse de façon à faire du canal du Cayor et de celui du Baol prenant leur source au niveau du Lac de Guiers, une réalité’ pour les terroirs de ces dites régions.et particulièrement pour la ville de Touba ou la disponibilité ’de l’eau pose problème surtout pendant la période du Grand Magal. C’est le lieu de noter avec force qu’au total, une exploitation minutieuse de nos différents potentiels foncier, hydrique, solaire, forestier, halieutique et humain, devrait nous écarter de façon durable de la faim, de la pauvreté ainsi que de l’insécurité alimentaire.
Concernant le capital humain qui est un axe majeur du Plan Sénégal Emergent ( PSE) , il faudrait, par-delà les efforts louable fournis par les pouvoirs publics pour soutenir le système éducatif national, surtout dans le domaine de la formation professionnelle et technique, toujours de plus en plus adaptée aux besoins de la société et de l’écosystème économique, la prise en compte de la capacitation et de l’appui multiforme aux différents acteurs économiques constitue aujourd’hui une réalité incontestable . Cependant, au regard de l’évolution des technologies dans tous les domaines, dans le monde, des efforts soutenus d’adaptation devront être développés à tous les niveaux afin d’éviter le dépassement de nos systèmes de formation et de production par la science, la technique et la technologie.
Dans cette perspective, le développement du numérique, de l’intelligence artificielle et du digital est devenu un aspect majeur des transformations de nos systèmes de formation et de production. Pour conclure, j’emprunterai simplement en partie à Monsieur le Président Macky Sall et à Monsieur le président du groupe de la Banque Mondiale Monsieur David Malpass, les constats majeurs mis en évidence dans leur contribution en prélude à l’ouverture du forum mondial de l’eau : repenser la gestion de l’eau pour en garantir l’accès à tous.
Les constats évoqués ci- dessus conduisent aux recommandations suffisantes : Améliorer la qualité de l’eau de consommation pour soustraire les populations africaines du cercle vicieux des nombreuses maladies découlant à hauteur de 70 à 80% de la mauvaise qualité de celleci ; Faire de l’agriculture une sur priorité’ notamment sur le plan de la maitrise de l’eau et de l’irrigation ; Mettre œuvre une diplomatie appropriée de l’eau, afin d’éviter les nombreux conflits découlant de la gestion non concertée et non équitable des bassins frontaliers. Placer le développement du capital humain au centre de toutes les initiatives et des politiques de développement ; Et infiné, encourager le relèvement des budgets attribués au secteur de l’eau, afin de tendre avec la cadence qui sied, vers l’atteinte des besoins en investissements de 20 milliards de dollars par an à l’échelle de l’Afrique, au lieu des 0.5% du PIB que chaque pays accorde à son secteur de l’eau.
Toutefois, ces recommandations ne serviraient à rien, si elles ne sont pas soutenues par une volonté politique effective, l’élévation du travail et de la justice au rang de cultes.
Mamadou Moustapha MBAYE
Ingénieur Agronome principal de classe exceptionnelle (ER), Directeur Général du cabinet Polyconsult International.
LA FONCTION PUBLIQUE, UNE TUMEUR DU COEUR POUR LES ETATS AFRICAINS
Le drame en Afrique est que la colonisation, après avoir déconstruit les types d’Etat traditionnels et provinciaux, bourgeois ou théocratiques, n’a développé que des « celluloses administratives » de l’Etat colonial dans les colonies
L’Etat, forme d’organisation ultime de la Communauté ou de communautés humaines, pour le plein épanouissement de tous, est trop sérieux, et ne saurait se réduire à un legs transmis comme un bâton-témoin de relais de génération en génération. D’ailleurs une des divergences fondamentales de la vison prométhéenne de l’homme sur terre, cristallisée entre les deux idéologies transcendantales, capitaliste d’une part et socialiste d’autre part, repose sur la perception, l’organisation et le rôle de l’Etat. L’on observera cependant que dans les deux cas (Etat capitaliste libéral, Etat socialiste/communiste), l’emprise de l’Etat sur les structures, l’activité de Développement et les Acteurs est très circonscrite, quasi nulle dans le premier et déléguée pour une transition ultérieure, dans le second cas. Ces deux approches différentes de l’Etat qui ont servi de modèles de gouvernance à travers le monde, par imposition ou assimilation volontariste, ont cependant des points communs dont la notion « d’Ordre » et de « puissance publique » sans lesquels il ne peut y avoir ni vie commune, ni développement. Cette puissance publique et cet ordre se manifestent à travers des leviers regroupés dans un cadre dénommé « fonction publique »
Le drame en Afrique est que la colonisation, après avoir déconstruit les types d’Etat traditionnels et provinciaux, bourgeois ou théocratiques, n’a développé que des « celluloses administratives » de l’Etat colonial dans les colonies, et à l’heure des indépendances Africaines, a légué une administration exportée aux cadres Africains formatés pour la continuité, installant ainsi la grande confusion réduisant l’Etat post colonial, indépendant, à son administration. Ainsi n’importe quel agent de l’administration à l’aube des indépendances était le symbole, l’incarnation même de l’Etat. Ce faisant, il n’y a eu en amont comme en aval de l’Etat anciennement colonisé, aucune réflexion préalable sur l’essence et la forme de l’Etat et c’est ainsi que dans la mémoire collective des peuples colonisés, l’Etat se résume à son Administration pour ne pas dire à sa « Fonction publique »
Dès lors il est aisé de noter partout en Afrique, la césure entre l’Etat et les masses, la persistance de cette perception d’un corps étranger (l’administration et ses règles, venue d’ailleurs) dans une Société méfiante et larguée à l’expectative. D’où l’idée, l’Etat c’est l’autre, c’est à lui de tout faire, de tout donner, et à contrario, il a l’exclusivité du blâme.
Une administration devenue pléthorique, budgétivore, inefficiente
Alors comme conséquence de cet Etat providence, une expansion tentaculaire de ses responsabilités et de ses services, de son Administration, de sa fonction publique qui devient alors pléthorique, budgétivore, inefficiente. Une autre conséquence est la réduction du potentiel de ressources dédiées aux investissements structurants seuls capables de toucher le maximum de cibles avec effet multiplicateur mais aussi de régénérer de nouvelles ressources. Ce détournement d’objectif de Développement global est souvent rendu possible par le simple fait que par leur nombre démesuré, ces Agents de l’Administration publique en position de conception ou d’exécution, finissent par prendre l’Etat en otage, se faisant toujours l’illusion que l’Etat se réduit à eux seuls et que la grosse part du budget national leur revient de droit.
Les antagonismes de classes (pouvoir employeur et administrés), les querelles de chapelle, les surenchères catégorielles, commencent à naître au sein même de l’appareil d’Etat, de son administration. Ce qui se passe au Sénégal depuis bientôt plus de deux décennies, ces mouvements d’humeurs intempestifs, ces chantages interminables, ces Arrêts de travail répétitifs, cycliques, aux allures politiciennes sournoises et attentatoires à la paix et à la stabilité, et qui impactent négativement sur les perspectives de développement, en sont une parfaite illustration. Pourtant dans certains secteurs, ossature même des Fonctions publiques (Education, Santé, culture, sports, Sécurité) qui grèvent les Budgets nationaux, seule une portion congrue de leurs Budgets (entre 10 à 15%), va à l’investissement. En outre à eux seuls ces secteurs réunis engrangent entre 70 à 80% des budgets nationaux au détriment du Secteur primaire qui reste le fondement de toute économie, de tout Développement, étant le secteur sur lequel doivent s’articuler les autres secteurs pour leur viabilité et leur compétitivité.
In fine l’Etat africain, devenu par paternalisme exagéré Etat providence, principal pourvoyeur d’emplois ou de filets sociaux, macrocéphale, se voit contraint à une intendance de masse salariale allant crescendo, se privant d’opportunités et de moyens énormes d’investissements structurants, se voit aussi obligé pour faire face aux enjeux de développement, de passer par l’aide publique extérieure et la dette publique sous des conditions asphyxiantes. Qu’on arrête donc de soliloquer, sur le poids de cette dette ou sur les priorités qui restent interdépendantes du reste, mais qu’on réfléchisse plutôt sur les raisons et les mesures alternatives internes.
Il nous faut commencer donc par interroger « les manettes » de l’Etat que constituent les Agents de l’Etat, toutes catégories et toutes stations confondues et regroupées dans la fonction publique. Si pendant soixante ans d’indépendance, l’on peine encore à faire décoller nos pays, certainement certaines sont grippées, d’autres ankylosées par la routine. Faut-il le rappeler, le rôle de l’Etat n’est pas de tout faire ou de tout donner, mais de faciliter, de créer les cadres, l’environnement, propices et d’organiser et d’encadrer les communautés, tout en assurant à tous la paix et la sécurité. Dans cette perspective les opposants qui ergotent sur les politiques de d’Education et de santé, sans prendre la précaution de voir l’immensité des besoins et les sommes englouties, doivent savoir que même si les Etats ont la Responsabilité du Développement de ces secteurs cruciaux, ils ne doivent pas en avoir le monopole et il serait suicidaire (faillite) de vouloir seul tout faire ; pour l’Education le retour d’investissement est sur deux générations au moins.
Cette Fonction publique hyper centralisée, qui étend comme une hydre ses tentacules asphyxiantes d’année en Année, à l’image d’une tumeur cancéreuse sur un corps, exige une thérapie chirurgicale et pour ce faire doit être repensée en taille et en mission, et réorganisée dans l’espace. Dans ce cadre le recours au faire-faire encadré, les délégations de missions de service public, une meilleure prise de conscience et d’implication du Privé dans tous les secteurs, qui ne remettent pas en cause la mission régalienne de l’Etat, une plus grande responsabilité sociétale des Acteurs dans leurs missions respectives, un plus solide ancrage de tous aux valeurs du civisme et du patriotisme, comme en fait preuve présentement le peuple Ukrainien et comme nous avons su en faire lors du sacre des Lions, constituent la voie royale de l’émergence de l’ Etat et du progrès social. Dans notre pays, l’heure de vérité, celle des réformes a sonné pour beaucoup de secteurs ou ça passe ou ça casse !
LES ENSEIGNANTS APPROUVENT L’AUDIT MAIS DÉNONCENT LES CONDITIONS «HUMILIANTES» DE SON EXÉCUTION
Dans le cadre de l’audit du personnel enseignant, beaucoup en service dans le Sénégal des profondeurs se plaignent d’être obligés de parcourir des kilomètres pour une présence physique obligatoire au niveau de leur chef-lieu de département
Dans le cadre de l’audit du personnel enseignant engagé par le ministère de l’Education nationale, beaucoup d’enseignants en service dans le Sénégal des profondeurs se plaignent d’être obligés de parcourir des kilomètres pour une présence physique obligatoire au niveau de leur chef-lieu de département. Pis, ils passent souvent de longues heures d’attente dans les cours des écoles ciblées. Ils dénoncent ces conditions et demandent plus de considération, de respect et la préservation de leur dignité.
Le ministère de l’Education nationale a démarré un recensement physique des enseignants depuis lundi dernier. Ce, pour s’assurer de la disponibilité de tous les enseignants en service dans les différents établissements scolaires que compte le pays. Mais aussi, et surtout, s’assurer de la véracité des informations remontées au ministère à partir des services déconcentrés à savoir les Inspections d’académie (Ia) et celles en charge de l’Education et de la Formation (Ief). L’objectif, c’est de voir si effectivement les agents existants sur le fichier sont ceux officiant sur le terrain. Et, ainsi, pouvoir détecter les cas de fraudes mais aussi et surtout maîtriser la masse salariale de ce secteur. L’audit s’inscrit donc dans l’ordre normal des missions de l’Administration.
Les enseignants se félicitent d’ailleurs de ce recensement d’autant que, disent-ils, beaucoup d’agents abandonnent leurs postes de travail pour voyager à l’extérieur sans le signaler et continuant à percevoir leurs salaires. D’autres prennent service pour ensuite disparaitre avec la complicité de leurs supérieurs hiérarchiques sans compter les décès non déclarés alors que les salaires des défunts continuent d’être virés. Il y aurait même parfois des postes fictifs. Autant de magouilles qui justifieraient un tel audit. Les enseignants ne sont donc pas contre l’idée de les «entendre physiquement, et avec des papiers justificatifs». Mais ce qu’ils dénoncent, ce sont les conditions dans lesquelles ils sont audités. D’après leurs dires, il n’est pas rare que les membres de la mission qui les convoquent à 8 heures, viennent trois heures après, c’est-à-dire à 11 heures.
Les enquêteurs les regroupent ainsi de 8 heures jusqu’à des heures tardives pour les besoins de cet audit. Un recensement qui fait perdre aux élèves et enseignants deux à trois jours de cours. D’où ce sentiment d’amertume affiché par Momath Sarr. «Dans certains départements comme Médina Yoro Foulah, des enseignants parcourent plus de 40 kilomètres pour se faire auditer. Ensuite, ils viennent s’entasser dans les cours des écoles cibles, debout sous le chaud soleil de 8 heures à 13h heures pour un soi-disant audit. C’est un manque de respect notoire à notre égard ! Nous ne refusons pas cet audit qui est tout à fait légitime car entrant dans l’ordre normal des choses, mais qu’on le fasse aussi avec élégance et dans le respect de la dignité de notre corps. Si l’Etat décide d’auditer le corps enseignant, il doit aussi être en mesure de le faire dans chaque école», s’est-il indigné.
L’indignation est presque collective !
D’après les explications de Saliou Mbaye, coordonnateur de l’Unité syndicale d’établissement (Use) du lycée Brave Hyppolyte de Mont Rolland, par ailleurs secrétaire administratif adjoint départemental du Saemss (Syndicat autonome des enseignants du moyen et secondaire du Sénégal) de Tivaouane, «le recensement des personnels enseignants rentre dans le cadre normal de la gestion des ressources humaines relevant du ministère de l’Education nationale. Cependant, cet audit révèle des failles et défaillances de tout un système administratif, surtout après les mises en place des plateformes comme Mirador, Simen, Palnète, E-Solde...
Aussi, ce recensement démontre-t-il encore une fois un manque de coordination entre les services déconcentrés (Ief et Ia) et le niveau central (ministère) si l’on sait que tous les ordres de services et attestations de prise de services des enseignants émanent de ces structures administratives. Donc, si des surnombres ou déficits d’enseignants sont notés et constatés dans les écoles, c’est que forcément le travail de contrôle et de vérification n’est pas très bien effectué par les services déconcentrés et le central. Et puis, au nom de quoi les enseignants devraient-ils parcourir des dizaines de kilomètres et passer de longues heures d’attente pour se faire auditer ? Au nom de quoi les enseignants devraient-ils se rassembler dans les Ief pour percevoir les indemnités du Cfee, du Bfem... ? Au nom de quoi les enseignants devraient-ils se regrouper dans les Ia pour percevoir les avances pour l’examen du baccalauréat ?
Recenser (auditer) les agents de la Fonction publique est certes une mission assignée aux services étatiques mais elle ne devrait pas être un supplice pour les enseignants. L’Etat en général, et le ministère en particulier, devraient donc revoir leurs manières de procéder pour bien mener ces audits afin d’assurer la sécurité des enseignants mais surtout d’éviter de grever davantage le quantum horaire déjà malmené par les grèves « estime Saliou Mbaye.
La manière de faire l’audit dénoncée
Confirmation de son collègue Souleymane Agne selon qui les enseignants ne critiquent pas le fond du projet d’audit mais plutôt la forme et les conditions «humiliantes» dans lesquelles il se ferait. Des conditions jugées «désastreuses et «indignes» pour les enseignants. Ce qui, selon secrétaire général national de l’Alliance pour la défense de l’école publique et des Travailleurs (Adept), «peut entraver les droits des enseignants garantis par les lois et les textes règlementaires qui régissent le cadre de l’éducation, notamment sur la question des horaires et sur les conditions de travail».M. Cheikh G. Diop indique à cet effet avoir été contacté par des enseignants en service dans l’Ief de Tivaouane. Lesquels, convoqués à 8 heures à l’école élémentaire Mamadou Mansour Sy — du moins bon nombre parmi eux —, sont restés jusqu’après 18 heures sans être reçus par la mission d’audit. «Etre obligé de poireauter dans une école élémentaire de 8 heures à 18 heures 30, voire jusqu’à 21 heures, juste pour être recensé, ressemble fort à une volonté manifeste de maltraiter et d’humilier d’honnêtes travailleurs » martèle-t-il tout en condamnant «fermement» ce qu’il qualifie de «mauvaise organisation, par endroits, des missions de recensement du ministère qui nous livrent à nousmêmes dans des écoles sans le minimum de commodités et au-delà des heures de travail réglementaires». Toutes choses qui poussent M. Cheikh G. Diop à inviter le ministère de l’Education nationale à mieux améliorer la planification et l’organisation de l’audit du personnel enseignant « dans le respect des droits et de la dignité de l’enseignant ».
De l’avis de M. Diop, une bonne planification des convocations permettrait de réduire les délais d’attente, et ainsi de respecter les droits et préserver la dignité de ses collègues. Le secrétaire général de l’Adept, M. Agne pense de son côté qu’il y a d’autres formes de recensement plus appropriées pour le corps enseignants. Par ailleurs, il estime que c’est en de pareilles situations qu’ils ont le plus besoin de voir leurs leaders syndicaux sur le terrain «pour dire non ou alerter».
Par Mbagnick Diop
LA CASAMANCE VEUT GARDER SON ÂME
Le MFDC était l’œuvre d’hommes politiques au discours et à la méthode bien structurés, une attitude totalement différente des actions d’éclat mal inspirées que mènent depuis lors les animateurs du mouvement
Décembre 1982, au jour de Noël, Ziguinchor, capitale de la région de Casamance de l’époque, s’est réveillée avec une gueule de bois. Des individus instrumentalisés par Abbé Augustin Diamacoune Senghor avaient mis la ville sens dessus-dessous pour une cause indépendantiste mal fondée. Le Mouvement des forces démocratiques de Casamance (Mfdc), dont ils ont usurpé le nom, était l’œuvre d’hommes politiques au discours et à la méthode bien structurés, une attitude totalement différente des actions d’éclat mal inspirées que mènent depuis lors les animateurs du mouvement.
En effet, les émeutiers de 1982 ont péché dans l’énoncé de leur motif axé sur les disparités économiques et des abus de pouvoirs dont seraient coupables les agents de l’administration affectés dans la région. Un alibi d’autant plus simpliste que bien d’autres terroirs, notamment le Sénégal-Oriental et la région naturelle du Fouta, ont enduré le poids des disparités dans des proportions plus pénibles. La seule différence étant le caractère discontinu de la géographie du Sénégal dans sa partie Sud, un fait colonial issu du tracé des frontières de la Gambie.
Théories délirantes de Diamacoune…
Au lendemain des émeutes, les responsables politiques de la Casamance ont organisé un grand rassemblement à la place de Gao, pour tempérer les révoltés et recoller les morceaux d’une cassure dont ils redoutaient l’exacerbation. Hélas ! Ils ont eu beau haranguer la foule et organiser des entrevues secrètes le mal a persisté. Dans la tête des révoltés, l’idée d’une indépendance de la Casamance s’était amplifiée avec les théories délirantes de l’Abbé Diamacoune qui dispensait des leçons d’histoire, en éludant toutes les vérités susceptibles de démotiver ses ouailles. D’où la radicalisation d’un groupe de meneurs sous le commandement de Sidy Badji et Léopold Sagna qui s’étaient déjà illustrés par leurs états de service dans l’armée. Ainsi est née la branche armée du Mfdc avec des éléments qui se sont implantés successivement dans le Banjal (arrondissement de Nyassia), le Balantacounda (arrondissement de Niaguiss), le Fogny (département de Bignona) et dans le parc national de Basse-Casamance (département d’Oussouye) notamment à Youtou, Djirack, Boukoutingo…
Les affrontements avec les forces de défense et de sécurité avaient atteint leur point culminant pendant les années 90 ; il est malsain d’en établir le bilan car la plaie est toujours béante malgré les multiples séances de médiations et négociations. Les accords préliminaires de Toubacouta en mars 1992 et les protocoles de Bissau, Cacheu, Banjul et Foundiougne démontrent à suffisance que l’Etat a fait montre de souplesse et d’une bonne disponibilité pour que la paix et la concorde règnent en Casamance comme partout ailleurs au Sénégal. Il s’y ajoute que, sur le plan économique, la Casamance est positionnée au titre des programmes spéciaux pour des investissements de taille se chiffrant à des centaines de milliards de francs au cours des quarante dernières années, afin d’impulser une dynamique de développement avec bien entendu l’engagement soutenu des populations. Les réalisations en cours participent d’un certain nombre de recommandations qui figuraient, en 1993, dans le plan d’action de l’honorable Marcel Basséne (Paix à son âme) alors chargé de la Mission de pacification. Evidemment, l’on nous objectera que le staccato des armes est loin d’être estompé et les populations en accusent les dommages collatéraux au point d’aller se réfugier encore en territoire gambien.
L’assassinat de Léopold Sagna pour la gloire de Salif Sadio
Pour une bonne compréhension des choses, il sied de rappeler que les maquisards, autoproclamés branche armée du Mfdc, ont perdu la raison depuis février 1994 du fait d’une conspiration qui a bouleversé leur commandement. Sidy Badji en était le chef incontesté, solidement épaulé par Léopold Sagna dont l’expérience, acquise au bataillon des commandos de l’Armée nationale, constituait naturellement un atout dans le déroulement des opérations. La place et le rôle qui lui étaient dévolus ont vexé Salif Sadio qui a toujours aspiré à disposer d’une faction autonome pour n’en faire qu’à sa tête. Son heure de gloire a sonné le jour où, avec l’autorisation de Diamacoune, Léopold s’est fait conduire à Dakar pour une entrevue avec l’État-major particulier du Président Abdou Diouf. Cette mission facilitée par Moussa Diouf promoteur touristique à Jiromaït, a sonné le glas de Léopold ; dès son retour dans le maquis il été mis aux arrêts et plongé dans une fosse sur ordre de Salif Sadio qui lui a infligé un traitement cruel, sans aucune chance de survie. L’hebdomadaire « Le Témoin » d’alors avait prévenu du péril que Salif Sadio provoquerait en prenant le commandement du maquis. Après Léopold, il a éliminé tous les autres chefs de faction qui n’approuvaient pas ses méthodes. Dès lors que l’Etat est défié voire acculé, malgré toutes les concessions faites pour tendre la perche à Salif Sadio et les scélérats de son acabit, il ne saurait être question de cautionner des manœuvres tendant à divertir les forces de défense et sécurité. Les opérations en cours doivent se traduire, pour de bon, par la libération de la moindre portion du territoire avec des moyens continuellement consolidés pour assurer la sûreté nationale et la sécurité des personnes et des biens.
Mbagnick Diop est un ancien journaliste du Témoin à la retraite, spécialiste de la Casamance
Par Serigne Saliou Gueye
LES RAISONS D’UN DIALOGUE DE SOURDS ENTRE L’OPPOSITION ET LA MAJORITÉ
Le prétexte de la pléthore de listes ou de candidats aux différentes élections pour instituer le parrainage sous cette forme ne résiste pas à l’analyse de la réalité
Quand le projet de loi 14-2018 relatif au parrainage intégral avait été introduit à l’Assemblée nationale, le 19 avril 2018, c’était la bronca partout dans le pays. La majeure partie de nos compatriotes estimait que c’était une loi scélérate pour se débarrasser d’une bonne partie des candidats à la présidentielle de 2019. Le jour du vote de ladite loi, tout Dakar et certaines grandes villes étaient quadrillés par des forces de l’ordre. Dans la capitale, toutes les rues débouchant sur l’Assemblée nationale avaient été barrées par les policiers du GMI. Ce jour-là, plusieurs leaders de l’opposition et de Yen a marre, qui avaient tenté de marcher, avaient été arrêtés et gardés à vue dans les différents commissariats de Dakar plateau et de la Médina. Sans surprise, la loi avait été votée par la majorité mécanique de Benno Bokk Yaakar (BBY) et contre l’assentiment des Sénégalais.
En sus de la guillotine judiciaire, Macky Sall dispose désormais d’un autre moyen politicolégal pour choisir ses adversaires dans l’arène politique. Et, plus précisément, dans les confrontations électorales. Avant l’élection présidentielle, Maitre Abdoulaye Tine, leader de l’Union sociale libérale, avait introduit en décembre 2018 un recours devant la Cour de Justice de la Cedeao. L’avocat était soutenu dans cette initiative par plusieurs partis politiques, syndicats et mouvements citoyens. Il s’agit de ACT, ADES, Adk and dolel Khalifa, AGIR, Alliance démocratique des enseignants du Sénégal / Cdts, And-Jefe / Pads, And saxal liggey, Apdr, Bokk gis gis, Claire vision / Guindi askan wi, Citoyen Mamadou Lamine Dianté, Citoyenne Maïmouna Bousso, Convergence des travailleurs de l’automobile, Cnts / Fc authentique, CREDI, Eps, Fsd-Bj, Front national, Geum sa rew, Grand cadre des syndicats d’enseignants, Grand Parti, Grand rassemblement pour la vérité, Ld-Debout, Mps / Sellal, Msu France, Nadem. Auparavant, des députés membres de l’opposition avaient saisi le Conseil constitutionnel qui, finalement et sans surprise, s’était déclaré incompétent le 9 mai 2018.
Toutefois, contrairement à ce que soutenait son opposition, pour le président Macky Sall, l’objectif poursuivi par le gouvernement à travers le parrainage était de faire progresser la démocratie en évitant les candidatures fantaisistes à l’élection présidentielle. « On a 300 partis politiques aujourd’hui, et il y en a encore une vingtaine en dépôt, on pourrait aller à 500 voire 600. Si l’on ne rationalise pas les candidatures, il arrivera un moment où nous serons bloqués dans l’élection. Nous devons anticiper cela. Nous devons faire un filtre citoyen. Chaque citoyen est libre de parrainer. On avait dit 1 %, on a finalement baissé à 0,8 %», avait expliqué Macky Sall lors de sa visite à Paris, le 20 avril 2018. C’était au micro de France 24. Si les tenants du pouvoir avancent la thèse selon laquelle le parrainage existe depuis 1963 sous Senghor, cela ne cautionne pas leur forfaiture. Le parrainage de 1963 était une loi d’éviction pour tout politique qui ne partageait pas la monocratie senghorienne.
Après avoir embastillé Mamadou Dia, l’alors président du Conseil de gouvernement, pour imposer le parti unique, il fallait au poète-président se renforcer par une loi politique qui lui conférerait tous les pouvoirs. A propos du parrainage institué par le président Senghor, l’article 24, alinéa 2 de la Constitution de 1963 stipulait que « toute candidature, pour être recevable, doit être présentée par un parti politique légalement constitué ou être accompagnée de la signature d’électeurs représentant au moins dix mille inscrits domiciliés dans six régions à raison de cinq cents au moins par région ».
Si le seul parti politique qui existait à l’époque était l’UPS, si les seuls députés appartenaient à cette formation, il était certain que Senghor et son parti entendaient régner sans partage. C’est ce désir rémanent d’être dans le champ politique sans adversaires coriaces qui a conduit les députés de Macky Sall à voter en avril 2018 la loi très controversée sur le parrainage. Aujourd’hui l’arrêté du ministre de l’Intérieur n°004071 du 03 mars 2022 qui fixe le nombre de parrains requis pour le scrutin du 31 juillet 2022 est rejeté en bloc par l’opposition et tous les mouvements citoyens épris de légalité et de justice. Le prétexte de la pléthore de listes ou de candidats aux différentes élections pour instituer le parrainage sous cette forme ne résiste pas à l’analyse de la réalité. Certes, dans la base de données du ministère de l’intérieur, il y a plus de 300 partis politiques. Mais il est avéré qu’au Sénégal le nombre de partis existants puis 1960 jusqu’à aujourd’hui et actifs sur le champ politique ne dépasse pas une dizaine.
En France, selon la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP), il y a plus de 500 formations mais seuls quelques partis de gauche, de droite, d’extrême gauche, d’extrême droite, du centre, des écologistes participent usuellement aux différentes élections. Et le parrainage citoyen n’empêche pas aux élus d’accorder leur signature aux candidats qui sont de la même obédience politique. En vérité, la floraison de listes aux législatives de 2017 (47) au Sénégal n’était qu’une roublardise du pouvoir pour instituer un tamisage à la présidentielle de 2019. Plusieurs de ces listes étaient commanditées par le pouvoir dans le seul but de mettre en place ce système de parrainage éliminatoire.
Sur une trentaine de candidatures lors de la présidentielle de 2019, seules cinq ont été retenues. 27 listes ont été disqualifiées pour des raisons non convaincantes. Les citoyens qui ont parrainé plus d’un candidat n’ont jamais été sanctionnés même si l’article L88 punit tout citoyen qui se serait adonné à un double parrainage. Aujourd’hui, le contrôle se fait au niveau du ministère de l’Intérieur dont le locataire actuel, Félix Antoine Diome est le ministre de l’Intérieur le plus controversé de l’histoire politique du Sénégal. Le sale rôle qu’il a joué en étant respectivement substitut du Procureur de la Crei et agent judiciaire de l’Etat dans les affaires Karim Wade et Khalifa Sall incite les opposants à couvrir d’un voile de soupçon toute idée de parrainage. Aujourd’hui que les révisions des listes électorales sont ouvertes, Yewwi askan wi, Wallu, et Gëm sa Bopp, les autres forces de l’opposition, les mouvements citoyens comme Frapp et Y en a marre excluent toute idée de parrainage comme base de participation aux législatives après que la Cour de justice de la Cedeao a rejeté le parrainage sous sa forme actuelle.
Selon les magistrats de la Cour communautaire, « cette loi viole le secret du vote en obligeant les électeurs à déclarer à l’avance à quel candidat ils ont l’intention d’accorder leur suffrage puisqu’un électeur ne peut parrainer qu’une seule candidature », surtout que « la liste des électeurs ayant parrainé le candidat doit être jointe à la déclaration de candidature ».
La coalition présidentielle Bennoo Bokk Yaakaar a, quant à elle, déjà lancé sa campagne de recherche de parrains au moment où l’opposition, dans sa globalité, rechigne à respecter l’arrêté du ministère de l’Intérieur n°004071 du 03 mars 2022. Un dialogue de sourds s’est donc instauré entre les deux camps. Si chaque partie tire sur la corde déjà ténue, il appert qu’on risque d’aller vers une confrontation inévitable hélas.