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19 juin 2025
CES FAITS QUI ACHÈVENT L’ANNÉE
2021 a été marquée par une forte actualité judiciaire, la récurrente question des inondations, la grève des transporteurs et la perte de plusieurs personnalités. Rétrospective
L’actualité judiciaire a été très fournie en cette année 2021 qui s’achève. Il y a eu également le retour des inondations et la grève des transporteurs qui a vu Dakar et le reste du Sénégal rouler en Thiak-Thak, Taf-Taf et en charrettes pendant 72 heures. L’année a été aussi marquée par la disparition de certaines personnalités publiques.
L’année 2021 qui se termine a été marquée par une forte actualité judiciaire. A l’instar des années précédentes, l’éternel débat sur l’indépendance de la justice et la nécessite de réforme judiciaire, qui devrait voir l’exécutif, notamment le Chef de l’Etat (président) et le Garde des Sceaux ministres de la Justice (vice-président), ne plus présider le Conseil supérieur de magistrature (Csm), et le Statut des magistrats a longtemps occupé les devant de l’actualité. Pendant ce temps, le magistrat Souleymane Téliko, alors président de l’Union des magistrats sénégalais (Ums), suite à un différend avec la tutelle, a été attrait devant la Commission de discipline du Conseil supérieur de la magistrature (Csm). Il a écopé d’un blâme.
JUSTICE, MACKY REORGANISE TOUT
La décision de l’affecter à Tambacounda a été aussi prise par cette instance suprême de la magistrature. En effet, après deux années «blanches», le Conseil supérieur de la Magistrature, qui s’est réuni le lundi 22 novembre 2021, a décidé du redéploiement de l’ancien président de l’Ums à la Cour d’Appel de Tambacounda comme président de Chambre, donc en gardant son grade. Jusque-là présidence de Chambre à la Cour d’Appel de Thiès cette affectation a été perçu comme une sanction, pour certains, contre un «magistrat indépendant» et qui a toujours porté le combat pour une autre gestion de l’appareil judiciaire, l’indépendance de la Justice et de la carrière des magistrats. Pour d’autre, notamment la tutelle, cette mutation à pour but une mise sur les rails de cette juridiction du Tribunal de Tambacounda, nouvellement créée. Pour le Garde des Sceaux, ministre de la Justice, Malick Sall, ce Tribunal de grande instance (Tgi) a besoin de magistrats expérimentés pour parvenir aux résultats escomptés. L’actualité judiciaire est aussi marquée par le départ de Serigne Bassirou Gueye de la tête du Parquet du Tribunal de grande instance hors classe de Dakar après huit (8) années et huit (8) de service. Serigne Bassirou Gueye affecté au Palais de la République, comme conseiller juridique du Chef de l’Etat, Macky Sall, est remplacé par le juge Hamady Diouf. L’ancien doyen des juges, Samba Sall, au cœur de plusieurs dossiers dont celui du Sweet Beauty mettant en cause Ousmane Sonko Adji Sarr a été rappelé Dieu. Il est remplacé au dernier Conseil supérieur de la magistrature (Csm) par Oumar Maham Diallo.
PLUSIEURS VILLES PATAUGENT ENCORE, MALGRE LES ASSURANCES DU GOUVERNEMENT
En 2021, le Sénégal a encore replongé dans les inondations, malgré les assurances du gouvernement dont les plus en vue sont celles d’Oumar Gueye, ministre Collectivités territoriales, du Développement et de l’Aménagement des Territoires, qui vantait les mérites du dispositif mis en place pour prévenir ces inondations dans la banlieue dakaroise, notamment à Keur Massar. Les premières pluies ont replongé Keur Massar, nouvellement érigé en département, dans le spectre sinistre des inondations. Un plan national d’Organisation des secours (Orsec) est vite déclenché, le dimanche 22 août 2021, par le ministre de l’Intérieur, Antoine Félix Abdoulaye Diome, pour venir en aide à la localité mais également à d’autres zones qui ont été touchées comme ce fût le cas de la cité religieuse de Touba.
LE SENEGAL ROULE EN CHARRETTES, THIAK-THIAK... PENDANT 3 JOURS
La forte actualité de l’année 2021, sur le plan sociétal, c’est aussi la grève de 48h, devenue illimité parce que bien suivie, des syndicats des transports qui a paralysé le pays. Pendant trois (3) jours, Dakar et le reste du Sénégal, notamment les grandes villes, zones périurbaines et les agglomérations, ont roulé en Thiak-Thak, Taf-Taf, motostaxis Jakarta et en charrettes. Les quelques bus de la société de transport public Dakar Dem Dikk (DDD) et les rares particuliers qui en ont profité pour se faire de l’argent en se reconvertissant en «taxis-bokkoo», moyennant des tarifs élevés, n’y auront rien fait. Les populations ont galéré pendant 72 heures. Le Cadre unitaire des transporteurs routiers du Sénégal, regroupant 14 syndicats des transports a déposé un préavis avec une plateforme revendicative comportant 11 points dont les tracasseries routières, avant de décréter un mot d’ordre de grève de 48 heures, à compter du mercredi 1er décembre dernier. Mais ce mouvement d’humeur sera prorogé en illimite (le jeudi 2 décembre 2021), suite à l’échec des premières négociations avec le gouvernement qui, par la voix du ministre Infrastructures, des Transports terrestres et du désenclavement, Mansour Faye, a dénoncé le manque de volonté de négocier des syndicalistes. Ce n’est que tard dans la nuit, le lendemain vendredi 3 décembre, que les deux parties parviendront à un accord qui a résulté sur le retour à de meilleurs sentiments des transporteurs. Gora Khouma et compagnie ont enfin levé le mot d’ordre après d’après négociations avec les autorités.
UN SENEGAL ENDEUILLE
Le Sénégal aura été très endeuillé durant l’année qui s’achève. Des autorités et personnalités ont perdu la vie durant l’année 2021. L’ancien président de l’IAAF, Lamine Diack est décédé au début de ce mois de décembre. L’artiste Thione Ballago Seck est rappelé à Dieu, le 14 mars. Le Khalife de la famille de Serigne Abass Sall, en l’occurrence Serigne Mansour Sall est a vécu en août. Le Khalife général des Layennes, Serigne Abdoulaye Thiaw Laye est lui aussi rappelé à Dieu en ce mois d’août 2021. Entre autres personnalités d’envergure !
VERS UNE PARALYSIE DE LA COLLECTE ET DU RAMASSAGE DES ORDURES MÉNAGÈRES
10 milliards de dette due par l’Ucg aux concessionnaires du nettoiement
Au moment où le président de la République ordonne la relance des activités du programmes des «Cleaning Days», reprise sous le vocable «Bësup Setal» dans tout le Sénégal, le Collectif des concessionnaires décident d’un arrêt de travail à partir du début du nouvel an, pour faute de carburants. A l’origine de cette situation, le non-respect, par les autorités étatiques de leur engagement de faire un acompte durant ce mois de décembre.
«Nous, les concessionnaires, tenons à informer l’opinion nationale que les activités de collecte et de ramassage des ordures ménagères seront paralysées à partir du 05 janvier 2022, pour faute de carburant». Ce sont les concessionnaires du secteur du nettoiement qui préviennent ainsi de perturbation dans le ramassage et la collecte des ordures ménagères notamment dans la capitale sénégalaise, Dakar et sa banlieue. En assemblée générale, le mardi 28 décembre dernier, pour statuer sur la situation financière de leurs entreprises, les concessionnaires du secteur du nettoiement ont révélé qu’ils croulent sous le poids de dette. Une importante somme d’argent que doit honorer l’Unité de coordination de la gestion des déchets solides (UCG).
A en croire Ndongo Fall, un des membres du collectif des concessionnaires, l’ardoise s’élève à 10 milliards FCFA. «Il a été relevé que la dette due par l’UCG à nos entreprises est évaluée à 10 milliards. Nous signalons qu’une lettre d’alerte a été adressé monsieur le ministre Abdoulaye Saydou Sow, depuis le 16 novembre 2021, à la suite d’une réunion avec les concessionnaires», a alerté ce dernier. Il poursuit : «Le ministre avait pris des engagements, séance tenante, pour donner une avance conséquente au courant du mois de décembre et jusque-là rien n’a été faite», renseigne Ndongo Fall qui dévoile la résolution des concessionnaires d’arrêter la collecte des ordures, «à partir du 05 janvier 2022, pour faute de carburant», indique ce membre du collectif qui estime que les fournisseurs qui accompagnaient les concessionnaires ont décidé de leur fermer les robinets, avant d’exiger le payement intégral des factures.
BALLA GAYE 2-BOMBARDIER, LA REVANCHE
Les adeptes de la lutte vont vivre de grands moments en ce nouvel An avec la grande affiche qui oppose ce samedi 1er janvier 2022 à l’arène nationale, Serigne Dia Bombardier à Balla Gaye 2
L’arène va renouer avec les grands évènements de lutte avec le combat vedette qui oppose, ce samedi 1er janvier 2022 à l’arène nationale, Balla Gaye 2 à Bombardier. Pour le Lion de Guédiawaye, l’heure de la revanche a sonné contre son adversaire. Le Géant de la Petite côte ne s’était pas seulement contenté de le battre mais il lui avait en même dépossédé de sa couronne de Roi des arènes qu’il avait conquis en 2014. Cette affiche qui ouvre le nouvel An est dotée du drapeau du grand communicateur El hadji Mansour Mbaye. C’est également une occasion pour le promoteur Gaston Mbengue de fêter ses 30 ans de présence dans l’arène.
Les adeptes de la lutte vont vivre de grands moments en ce nouvel An avec la grande affiche qui oppose ce samedi 1er janvier 2022 à l’arène nationale, Serigne Dia Bombardier à Balla Gaye 2. Pour marquer le 30e anniversaire de présence dans l’arène, Gaston Production a choisi le grand communicateur traditionnel El hadji Mansour Mbaye comme le parrain de cet événement phare de l’arène. Plusieurs fois reprogrammé à cause de la pandémie de la Covid 19, ce combat sera très attendu. Le verdict devra sans doute consacrer une nouvelle reconfiguration dans le cercle très fermé des ténors ou Vip. Balla Gaye 2 que l’on surnomme le Lion de Guédiawaye va toutefois se mettre dans la position de challenger pour ce second acte de son face à face avec le Mbourois.
Lors de leur première confrontation en 2014 au stade Demba Diop, le B52 ne s’était pas limité à terrasser son adversaire mais il avait, on le rappelle, réussi à détrôner le fils de l’ancien champion Double Less de sa couronne qu’il avait décroché deux ans plutôt de haute lutte face à Yakhya Diop Yékini. Une perte amère que Balla Gaye 2 et son camp avaient tout bonnement mis sur le compte d’une méforme et sans être mauvais perdant mis sur le compte d’une atteinte mystique. Quoiqu’il en soit, Balla Gaye 2 a aujourd’hui la ferme volonté de prendre sa revanche et remettre les pendules à l’heure. Sur cette lancée, la dernière sortie faite lors de son dernier open presse et tenue dans un stade Amadou Barry archi plein, donne déjà une idée sur la détermination du lutteur de Guédiawaye. « Je viendrai pour prendre ma revanche. S’il vient pour la lutte, je le battrais. Et s’il opte pour la bagarre, je le corrigerais. Je ne suis pas parti deux fois en France pour rien. Le Balla Gaye 2 qu’il a affronté en 2014 est différent de celui-ci. J’ai grandi en expérience et j’ai un meilleur encadrement. Je vais diriger le combat, puisque je ferai le nécessaire pour le battre», a-t-il confie. Ce combat sera un test majeur pour le Lion de Guédiawaye. Ce combat lui ouvre la voie à une autre revanche à mener contre sa «bête noire» Eumeu Sène qui lui a infligé deux de ses quatre défaites. Reste à savoir s’il va réussir à traduire en acte cette déclaration qui, on sait, est typique à beaucoup de lutteurs. Surtout si l’on tient compte de l’envergure de son adversaire qui n’est sans doute pas n’importe qui dans le milieu de la lutte.
Doté d’une bonne expérience doublée d’une puissance athlétique hors du commun, et animé d’une grande confiance, le mbourois n’est pas une proie facile. Il fait partie de ces lutteurs qui ne doute pas ou qui ne recule quel que soit l’adversaire. Autrement, Bombardier n’a rien perdu de son style de combat porté vers l’offensive. Huit ans après son succès contre Balla Gaye 2, il a besoin de rééditer son coup et donné en même temps un coup de fouet à sa carrière assombrie par une dernière défaite contre Eumeu Séne en juillet 2019. Mais également par ce cinglant revers par KO essuyé contre le polonais Mariusz Pudzianowski en octobre dernier dans la catégorie MMA.
1000 POLICIERS DÉPLOYÉS POUR LA SÉCURITÉ
Pour les besoins de cette grande affiche entre Balla Gaye 2 et Bombardier à l’Arène nationale, la structure Gaston Production a pris les devants en prévoyant un important dispositif pour assurer la sécurité de son évènement. Elle a informé qu’au minimum 1000 policiers va être déployé sur les lieux. Un contingent de gendarmes se déplacera également avec leurs chevaux et les chiens de garde pour jalonner les artères menant à l’arène. Les deux lutteurs seront également accueillis par la gendarmerie.
UN CENTRE POUR L'AUTONOMISATION DES FEMMES DANS LE DOMAINE DE L'ÉNERGIE SOLAIRE
Le Centre de formation Barefoot College International de Toubab Dialao fonctionnel depuis juillet, sera inauguré le 2 janvier 2022. Son objectif est d'outiller les femmes contre la précarité grâce aux ressources énergétiques solaires - COMMUNIQUÉ
SenePlus publie ci-dessous, le communiqué de l’ONG Barefoot annonçant l’inauguration, le 2 janvier 2022, du Centre dédié à la formation des femmes dans le domaine de l’énergie solaire en milieu rural, à Toubab Dialao.
« DP WORLD et l’ONG Barefoot College International procèderont le dimanche 2 janvier 2022 dans l’après-midi à l’inauguration du Centre de formation Barefoot College International de Toubab Dialao mis en place pour la formation dans le domaine de l’énergie solaire des femmes rurales dans les pays en développement.
Ce Centre financé à hauteur de 250 millions de FCfa, une subvention de DP WORLD, en partenariat avec Barefoot, existe depuis juillet 2021 ; il permet d’assurer la formation des femmes en milieu rural en Afrique de l’Ouest dans le domaine de l’énergie solaire ; elles pourront ainsi devenir elles-mêmes formatrices et micro-entrepreneures.
Le nouveau Centre de Toubab dialao est déjà fonctionnel et des formations s’y déroulent actuellement, menées par des femmes d’un certain âge qui sont restées au village et qui ont été initiées à la fabrication de panneaux solaires. Elles sont appelées « Solar Mamas ».
Cette formation innovante préconise des méthodes d’enseignement alternatives, adaptées pour les femmes ayant peu ou pas de formation académique. Ainsi elles seront en mesure d’installer, d’entretenir et de réparer des infrastructures solaires dans leurs communautés locales ; elles seront à même de créer des micro-entreprises rentables et de former d’autres femmes de la communauté.
Une communauté qui dispose d’énergie solaire peut elle-même devenir l’actrice principale de son émergence. En effet, cela facilitera l’accès à l’éducation, à des revenus additionnels et va contribuer à une amélioration économique durable à long terme pour tous.
Les résultats attendus de cette initiative sont l’atteinte aux objectifs de développement durable tels que : l’éradication de la pauvreté, l’égalité de genre, l’accès facile aux énergies renouvelables et l’indépendance financière des femmes. »
par Ibrahima Thiam,
LE TER DAKAR-DIAMNIADIO, LE POTEMKINE DE MACKY SALL
Le tracé de ce train express régional traversent les banlieues défavorises de Dakar, où fleurissent les taudis et les bidonvilles
Au Sénégal, en cette fin d’année, on ne parle que du petit train (TER) que le chef de l’État, Macky Sall vient de s’offrir en guise de jouet de Noël.
Cela dit, le cadeau est plutôt couteux, il n’a pas regardé la dépense le papa Noël de Dakar : pas moins de 780 milliards de Francs CFA !
Pour ce prix-là, il pouvait bien l’inaugurer en grande pompe, lundi dernier. Il en a profité pour demander à ses compatriotes d’en prendre soin et de veiller à sa propreté. Hors de question, comme dans les autres trains, de transporter dans les wagons du TER flambant neuf des moutons lors de la fête de Tabaski. Et pourquoi pas y faire un méchoui, pendant qu’on y est.
A l’origine, l’idée était de désengorger la capitale et de mettre fin aux bouchons monstrueux de Dakar. Et surtout de relier la ville nouvelle de Diamniadio, distante de 35 kilomètres, le plus vite possible. Résultat, le trajet par le rail s’effectue en vingt minutes. Le tout nouveau TER pourra ainsi transporter chaque jour quelques cent quinze mille passagers de cinq heures du matin à vingt-deux heures, grâce à quinze rames de quatre voitures chacune. Au passage, merci au constructeur français Alstom qui les a construites.
Déjà, quelques esprits grincheux se sont fait entendre pour faire remarquer que comparativement à d’autres lignes comparables dans d’autres pays, celle-ci présente un coût démesurément élevé. Les mêmes affirment aussi qu’en fait d’Express, le nouveau joujou est plutôt lent, atteignant que sur de rares tronçons la vitesse de 160 km/h. Mais on ne va pas briser les rêves de ce président amoureux des trains, qui en avait fait l’un des projets phares de son Plan Sénégal Emergent (PSE).
Mais quand même, à y regarder de plus près, qu’aperçoit-ton ? Que le tracé de ce train express régional traversent les banlieues défavorises de Dakar, où fleurissent les taudis et les bidonvilles, Et surtout que de nombreux particuliers dont on a exproprié le terrain, ou la maison, n’ont toujours pas été indemnisés, ou le cas échéant, mal. Tel cet habitant qui se plaint de n’avoir reçu que deux millions pour une maison de 160 mètres carrés, de huit pièces habitables. D’autres qui s’estiment lésés, proclament que cette réalisation « pharaonique » les laisse sans « toit, sans terres et sans travail ». Tel est l’envers du décor, façon village Pontemkine.
Mais lundi dernier, lors de l’inauguration, Macky Sall, n’en avait cure, on n’allait pas lui gâcher la fête pour si peu. Il n’avait d’yeux que pour la jeune et jolie conductrice du TER, qui à défaut de l’emmener au 7ème ciel, allait le conduire, lui et sa délégation de personnalités, à Diamniadio.
Il sera toujours temps, plus tard, de faire les comptes. Et aux contribuables sénégalais de payer cette petite folie. Après tout, depuis quand un président n’aurait-il pas le droit d’entretenir une danseuse ?
Ibrahima Thiam est président du mouvement « Un Autre Avenir ».
par l'éditorialiste de seneplus, pierre sané
DESMOND TUTU, LE DERNIER DES GRANDS S’EN EST ALLÉ
EXCLUSIF SENEPLUS - Chacun de ses prêches était une explication de texte sur l’injuste. À chacune de nos rencontres, j’en tirais des leçons de la nécessité de fonder ses convictions sur les principes universels des droits humains
Lors de l’Assemblée Générale d’Amnesty International de 1999 tenue à Cape Town, l’Archibishop Desmond Tutu à introduit son adresse aux congressistes par une blague :
« Un conducteur à la suite d’une maladresse fait un accident, se trouve éjecté de l’automobile et par miracle réussit à s’accrocher à une branche d’arbre contemplant le ravin qui risque de devenir sa tombe. Il lève les yeux vers le ciel et implore Dieu de lui sauver la vie.
À sa grande surprise, il entend une voix tonitruante lui répondre : « lâche la branche et viens vers moi. Fais moi confiance . » Notre conducteur pas rassuré du tout, tourne son regard vers une autre partie du ciel et plein d’espoir dit : « Y a-t-il quelqu’un d’autre là haut ? »
Pendant des années nous avons essayé de décrypter le message et la leçon à en tirer.
L’Archibichop Desmond Tutu était un grand éducateur. Chacun de ses prêches était une explication de texte sur l’injuste. À chacune de nos rencontres en Afrique du Sud ou ailleurs, j’en tirais des leçons d’humanisme, d’humilité et de la nécessité de fonder ses convictions sur les principes universels des droits humains.
Desmond Tutu fait partie de ces grands hommes qui ont marqué l’imaginaire des peuples du monde. Les 3 autres sont Nelson Mandela, Martin Luther King et Malcom X.
Peu étonnant qu’ils aient émergé de la communauté noire. Communauté qui continue à souffrir du racisme et des injustices économiques et sociales. Après des siècles d’esclavage de colonialisme et maintenant de néocolonialisme et de racisme institutionnalisé. C’est l’injustice qui a fait émerger ces grands Hommes et leur rectitude morale a fait le reste. En retour, ils ont mobilisé des millions dans le combat pour la révolution des droits humains.
Desmond Tutu sera rassuré de constater que la lutte continue.
Nous sommes tous interpellés.
Joyeuse année.
par l'éditorialiste de seneplus, tidiane sow
ET SI 2022 ÉTAIT LA PLUS DOUCE DES ANNÉES
EXCLUSIF SENEPLUS - La vidéo des gamins de l’école Afia de Kolda apprenant par terre fait désordre à l’heure du TER. 4,6 milliards dérobés au Trésor et il nous faut juste comprendre que ce sont les risques du métier. On croit rêver !
Sans rien y laisser paraitre, la société sénégalaise est indéniablement une société de connivences et de privilèges. Il y a une ligne de démarcation bien nette entre les uns et les autres. Les uns représentent une caste de bien-pensants et de nantis, et les autres le peuple, plus communément : le Sénégal d’en bas. L’entrée de nouveaux venus dans la caste du haut est toujours triomphante. Djibril et Fatoumata n’ont pas dérogé à la règle. Ils se délectent dans la collusion des privilèges comme ceux qu’ils y ont trouvés, ils s’y ont fait de nouveaux amis, tancent vertement ceux qu’ils ont laissés à l’orée des délices et les traitent de jaloux, d‘envieux. Ils sont dans le Sénégal d’en haut. Demain, quand ils auront maitrisé les règles de la courtisanerie, ils intègreront le clan des fortunes immobilières, poussés qu’ils seront par leurs nouveaux mentors. Telle serait la récompense de la fourberie, de la félonie. Le modèle régalien de la réussite ne serait plus l’éducation (au sens anglo-saxon du terme) mais l’adhésion à un parti politique, surtout celui au pouvoir. Senghor, dont on célèbre les vingt ans de la disparition, doit se retourner dans sa tombe.
L’ascension sociale, par les partis politiques, est si fulgurante, que l’on se bouscule pour emprunter le raccourci de « l’ascenseur politique » à la place des « escaliers éducation ». Chacun veut, à n’importe quel prix, atteindre au plus vite les cimes enivrantes de la réussite sociale. Comme le décrivait Günter Anders*, le système a triomphé depuis longtemps, sous nos cieux, en instaurant la peur de ne pouvoir accéder aux conditions matérielles nécessaires au bonheur. Ceux qui sont dans le cercle n’osent rien entreprendre de peur de perdre leurs privilèges. Cela tombe bien car la plupart d’entre eux n’ont jamais rien entrepris. Ils n’ont d’avis que celui de leur chef. Il demeure l’unique référence. Quelles que furent les stations auxquelles le président les affecta, ils continuaient de souffrir de la peine des gens médiocres, belliqueux, susceptibles arborant des langages orduriers à la bouche dès qu’on pointait du doigt leurs limites. Et là était bien le problème et les philippiques de plus en plus fréquentes du président à leur endroit montraient bien la justesse de ce que pensait le peuple : le président est mal entouré. Telle était aussi la rengaine brandie par les premiers cercles qui s’érigeaient en boucliers du président, oubliant que la responsabilité de bien s’entourer lui incombait en premier chef. Nul autre que lui n’était responsable du choix de ses collaborateurs.
Naguère les dames (surtout les moins belles) tenaient toujours des singes en laisse lors de leurs promenades, pour paraitre plus belles car l’esprit humain est toujours tourné vers la comparaison. Le président souffrirait-il du syndrome de la « compagnie du singe » ? Qui dans son entourage a pris cette photo avec le renégat Djibril dans son bureau présidentiel ? Qui l’a publié ? On a du mal à y croire. J’ai dû me frotter les yeux et cru a un montage jusqu’ à ce que, tout le monde convienne que c’est bien ce qui s’est passé. Où sont passés ceux qui veulent apaiser les violences qui traversent le pays ? Y a t-il pire violence que cette photo ? Y a t-il pire violence que les propos de ceux qui travestissent le soir ce qu’ils avaient affirmé le matin ? Nos médias ne dénoncent pas ces pratiques. Or ne pas dénoncer, c’est approuver, c’est baisser la tête, c’est choisir le déshonneur. Dès lors, comment ne comprendrait-on pas que certains opposants, dont Sonko, Thierno Alassane et quelques autres, refusent de signer la charte de non violence que leur proposent Jammi Rewmi et le cadre unitaire de l’islam ? Y aurait-il un degré ou une différence dans les violences ? A ne considérer comme violences que celles liées aux élections, on accepterait les trahisons, les voltes faces, et autres partis pris qui pourtant, telle une gangue, portent en eux les germes des pires violences dans le pays.
Les évènements de mars 2021 attestent de cette négligence. Rien n’est pire que le sentiment d’injustice. Quand on a l’impression qu’il y a un Sénégal d’en haut et un Sénégal d’en bas, et quand surtout on pense que ceux d’en haut ne valent pas mieux que soi, alors les ressentiments s’accumulent et les sédiments de frustrations seront les catalyseurs de la violence de demain. C’est ce sentiment d’injustice qui flotte dans le pays. Chacun veut passer de l’ombre à la lumière et le seul moyen pour y parvenir demeure d’investir le champ politique. Les détournements de biens publics de ces derniers jours par des agents de l’État, pour graves qu’ils soient, ne suscitent guère l’hystérie collective, qu’on serait en droit d’attendre, dans de pareilles circonstances, au sein de la majorité. La déclaration du directeur général de la comptabilité publique à ce propos est juste hallucinante : 4,6 milliards dérobés par ses agents, il nous faut juste comprendre qu’il y a des dysfonctionnements dans l’administration, que ce sont des risques du métier, mais que l’institution reste solide, debout et gagnante. Voila ce qu’il nous sert sur le casse du siècle. On croit rêver. Voila comment un scandale sans précédent est tourné en un banal fait divers. Circulez, il n’y a rien à voir. En attendant de situer les responsabilités et de prendre les sanctions, le directeur devrait démissionner de son poste. C’est comme cela que devrait fonctionner un État de droit, c’est comme cela qu’on délivre un signal fort, qui rassure les citoyens d’une part, et prévient que de pareils faits ne se reproduisent plus d’autre part. Combien de scandales récents, la Poste, la Lonase, le Trésor, les passeports diplomatiques et j’en passe, aurait–on évité si, par exemple, on avait sévit au Coud ? L’exemple de la sanction a des vertus.
Le TER, belle ouvrage. Des discours éloquents, dithyrambiques pour saluer cette merveille posée sur un Sénégal antique, parcouru la plupart du temps par des guimbardes cahoteuses, des vélomoteurs bruyants et de charrettes tirées à hue et à dia. Il faut remercier la France. Sans elle on ne serait rien, le président l’a dit lui même. Aussitôt élu en 2012, il s’y était rendu et la France, malgré sa période de transition pourtant prompte au statut quo – Hollande ayant battu Sarkozy –, nous avait assisté avec des espèces sonnantes. [Wade avait « cramé » la caisse comme dirait Pécresse]. Les Tirailleurs sénégalais ne bénéficiaient-ils pas d’un régime spécial ? La douceur du dessert, en ces temps de guerre leur était réservée. Alors pourquoi pinailler qu’on leur achète, certes cher, des trains pour sauver Alstom ? Serait-on devenu des ingrats ? La France a besoin d’exister pour qu’on existe. Une sorte d’ubuntu lie nos nations.
Tenez l’année 2021 se termine, mon voeux le plus cher ? Que le président, dans son allocution du 31 décembre, réponde à une demande forte des Sénégalais : la transparence. Oui la transparence dans ses intentions. Imaginez qu’il nous dise simplement qu’il ne sera pas candidat en 2024. Il sera surpris de la ferveur des youyous et du vacarme des feux d’artifice. L’année 2022 sera alors la plus douce des années.
Dr Tidiane Sow est coach en Communication Politique
Gunter Anders : L’obsolescence de l’homme
FRANÇOIS BOB, LA RIGUEUR PERSONNIFIÉE
Ancien ministre de la Jeunesse et des Sports, il a servi l’Etat avec loyauté et objectivité. Le passage de cet énarque dans différents départements étatiques a été remarquable
En mars 1978, au sortir de l’élection présidentielle, le président Senghor nomme un jeune cadre au poste de Secrétaire d’Etat auprès du Premier ministre, chargé de la Jeunesse et des Sports. Les Sénégalais découvrent pour la première fois François Bob, un natif de Fadiouth (département de Mbour). Cet ancien administrateur civil breveté de l’Ecole nationale d’administration (Ena) en 1970 fut l’un des plus brillants cadres du pays. Il est à offrir en modèle à la jeunesse sénégalaise pour avoir servi loyalement son pays. D’abord enseignant, il fut un grand militant des mouvements de jeunesse notamment les Cœurs vaillants – âmes vaillantes (Cv-Av). Ainsi, pendant sept années, François Bob dirigea le département de la Jeunesse et des Sports d’abord comme Secrétaire d’Etat auprès du Premier ministre puis Ministre jusqu’à son départ en 1985 pour raisons de santé. Il s’était établi à Paris comme consultant dans un cabinet financier avant de s’éteindre en 1991. C’est avec lui que le Sénégal a connu de grands chantiers sportifs avec notamment la réalisation de nombreuses infrastructures, la régionalisation puis la décentralisation des semaines de la jeunesse et de la culture. La négociation du stade de l’Amitié devenu Léopold Sédar Senghor avec la Chine est aussi à son actif. Il fut un homme rigoureux mais surtout un grand manager qui fit ses preuves au Secrétariat général de la Présidence de la République au poste d’adjoint et au Ministère des Affaires étrangères, en qualité de Secrétaire général avec rang d’Ambassadeur.
Passage exemplaire au département des Sports
Parmi ceux qui ont côtoyé l’ancien locataire du département à l’ex-avenue Barachois devenue Abdoulaye Fadiga (ancien siège du Ministère de la Jeunesse et des Sports), il y a Majib Sène, son conseiller de presse, auteur du livre « Notre ami François Bob 1939-1991 ». L’ancien journaliste de Radio Sénégal salue la mémoire « d’un homme multidimensionnel qui a consacré toute sa vie au service de la communauté nationale ». « J’ai voulu l’offrir en exemple à la jeunesse sénégalaise qui a un rôle important à jouer dans le devenir de notre pays », ajoute M. Sène. Selon l’ancien conseiller de presse, partout où il est passé, le défunt François Bob avait su créer chez ses collaborateurs une mentalité nouvelle, une conscience, un esprit critique, une volonté de participer positivement à l’œuvre d’éducation commune de transformation de la société.
Parmi les anciens collaborateurs de François Bob, le premier Sénégalais Directeur de l’Institut national du sport et de l’éducation populaire (Inseps), Gérard Diamé, témoignait qu’il fut un ministre exigeant, très attentif à l’efficacité. « Rien d’approximatif ne devait lui être soumis, lui qui lisait minutieusement tout et ne laissait aucun dossier en souffrance. Tout travail présenté à M. Bob vous revenait sans délai, immanquablement annoté voire corrigé par endroits, avec des directives claires », révèle M. Diamé dans le livre de Majib Sène. Il ajoute qu’il était un pédagogue pointilleux, qui avait l’art de formuler des instructions avec précision. S’il prenait une décision ou une idée, explique M. Diamé, c’était tout réfléchi et il ne servait à rien de tenter de le dissuader de la mettre en application.
Fonctionnaire rigoureux
En service à la présidence de la République, l’ancien Secrétaire général adjoint y apporta une touche particulière en disant que chacun devait faire l’effort de mériter son salaire. Il y introduit le système de l’émargement de tous les agents. Tout retard constaté est déduit à la fin du mois sur les émoluments. Une décision jugée impopulaire par certains. Une secrétaire habitant la banlieue subit ce sort et alla se plaindre auprès de lui. « Vous êtes un homme sans cœur. Depuis cette mesure, je ne perçois plus de salaire en raison de mes nombreux retards. J’habite en banlieue, je conduis mes enfants à l’école avant de prendre le bus pour la ville. Pendant ce temps, votre chauffeur s’occupe de toutes ses tâches avant de vous conduire au travail. Vous n’avez pas essayé de comprendre pourquoi je suis constamment en retard. Je tenais à vous dire le mal dont je souffre ». C’est dans l’après-midi que François recevra à nouveau la dame pour lui exprimer ses regrets avant de lui rappeler que les raisons avancées sont sans valeur devant le règlement qui régit les travailleurs. De sa poche, il lui remboursa les retenues antérieures et lui donna 45 minutes de battement sur l’horaire officiel.
Dans une autre anecdote, alors Ministre, un de ses proches membres du cabinet arriva en retard à une réunion, un vendredi après-midi, sous le regard d’une salle pleine. Et chacun se demandait ce qui devrait lui arriver, tellement qu’ils étaient liés. François Bob l’interpella sèchement et ce dernier lui expliqua qu’il était à la prière du vendredi. M. Bob présenta ses excuses à tous ceux qui ont raté la prière en raison de l’horaire retenu pour la rencontre.
Le refus de confirmer Mawade Wade
L’un des faits les plus marquants sous le magistère de François Bob, c’est lorsque les entraîneurs avaient proposé la nomination du défunt Mawade Wade, expert de la Fifa, au poste d’entraîneur national. Malgré tout le bruit sur cette proposition, il n’accepta pas, indiquant que Mawade ne remplissait pas les critères objectifs définis pour tout candidat au poste. Lorsque Majib Sène, son conseiller, lui posa la question de savoir ce qu’il ferait si le Chef de l’Etat, compte tenu de la volonté populaire, lui donnait l’ordre de nommer Mawade. Il répondit : « Je le nomme et dans le même temps, je remets ma démission au Président. Pour moi, être Ministre aujourd’hui et me trouver le lendemain sous-préfet de Nguékokh, c’est la même chose ». Quelle humilité !
Valeurs judéo-chrétiennes
Entré au Gouvernement en même temps que François Bob en mars 1978, le Ministre d’Etat Robert Sagna, dans un document publié, note qu’il fait partie de cette catégorie d’hommes pour qui la vie n’a de sens qu’au service d’autrui. « Il était d’une grande disponibilité et d’une gentillesse sans limites. Attaché aux valeurs judéo-chrétiennes qui ont forgé son éducation, sa vie et sa manière d’être se ressentent par l’exemple », avait écrit l’ancien Ministre d’Etat. Et de rappeler ceci : « Rentré au Sénégal comme ingénieur agronome du génie rural, mon insertion dans la Fonction publique classe A posa problème : seuls les diplômés des écoles françaises avaient accès au grade A. Un conseiller français chargé d’établir les équivalences s’était opposé farouchement. Irrité par cette injustice, il (François Bob) s’était engagé à lever cet écart pour me rétablir dans mes droits ; il a convaincu le Président Senghor de la justesse de mes revendications ». Selon lui, l’Union européenne avait menacé de suspendre l’octroi de bourses à notre pays pour cette école belge si l’équivalence du diplôme délivré n’était pas acquise et la discrimination « coloniale » éliminée.
« Un modèle achevé de simplicité »
Dans un témoignage sur son ancien Ministre, le Président Abdou Diouf écrit : « J’exprime du fond du cœur ma reconnaissance et ma fierté à l’endroit de François Bob, éducateur émérite, grand parmi les grands serviteurs de l’Etat du Sénégal qu’il aimait passionnément et qu’il a, du reste, servi dignement et loyalement. Le Ministre François Bob a mérité de la Nation ». Et d’ajouter : « En effet, il fut un modèle achevé de simplicité et d’humilité ; un exemple de générosité et d’efficacité, d’engagement et de dépassement dans l’action ». Selon l’ancien Chef de l’Etat, par son style franc et direct ; par son sens de l’Etat qui n’altéra en rien son sens de l’amitié, par son attachement viscéral aux principes et par ses réalisations significatives qui couronnèrent son action frappée du sceau du pragmatisme, il a positivement marqué le Ministère de la Jeunesse et des Sports. Enfin, conclut Abdou Diouf, ses grandes qualités morales et humaines, les vertus qu’il incarnait si profondément, constituent pour la jeunesse une source inépuisable d’enseignement et d’enrichissement.
par l'éditorialiste de seneplus, Jean-Claude Djéréké
MARCEL AMONDJI ÉTAIT VIVANT ET ACTIF QUOIQUE DISCRET
EXCLUSIF SENEPLUS - Je puis comprendre que Bédié et le PDCI aient ignoré le farouche opposant à Houphouët qu’il fut mais n’avait-il pas sa place à l’ASCAD ? Ne méritait-il pas au moins qu’un colloque lui soit consacré ?
Jean-Claude Djéréké de SenePlus |
Publication 30/12/2021
“On peut respirer encore et être déjà mort. On peut être discret et être terriblement vivant”, écrit la jeune dramaturge française Mariette Navarro. Marcel Amondji, qui s’est éteint le 18 décembre 2021 à 87 ans et dont on ne pourra même pas voir la tombe puisqu’il a demandé à être incinéré, était terriblement vivant et actif, quoique discret. Il était comme la vigie en haut du mât, une sorte de sentinelle dont la mission est d’empêcher les combattants et résistants de se laisser distraire par de faux débats et combats, de s’assoupir ou de baisser la garde. Il avait quitté le pays depuis de nombreuses années à bord d’un navire français qui s’appelait “l’Aventure” en même temps que les Memel Fotê, Samba Diarra, Yangni Angaté, Auguste Daubrey, Abdoulaye Sawadogo, Abdoulaye Fadiga, Seydou Diarra mais n’avait pas rompu avec lui. Auguste Daubrey et Bernard Dadié faisaient partie des rares personnes qui lui donnaient de temps en temps des nouvelles de l’Eburnie comme il me l’avait avoué un jour.
Il n’était certes pas dans la rue en 1990, en 1992, en 2004 ou en 2010 mais le sort de la Côte d’Ivoire ne le laissa jamais indifférent. L’homme avait un autre type d’engagement, une autre façon d’exprimer son attachement à la patrie qui, d’après lui, aurait connu un meilleur destin si elle n’avait pas été prise en otage par ce qu’il appelait le “système houphouéto-foccartien”. Même s’il ne milita jamais dans un syndicat, ni dans un parti politique, il apporta beaucoup à notre pays car “l’histoire des nations n’est pas faite que de batailles, de bruit et de fureur. Et il se peut que tel qui l’a traversée sans qu’on le remarque vraiment, ne l’a pas moins dignement marquée que cet autre qui déplaçait sur son passage les nuages d’une gloire douteuse” comme il le dira lui-même dans un hommage à Auguste Denise. Non seulement Amondji vécut utile mais il laisse une magnifique trace de son passage sur terre. Je puis comprendre que Konan Bédié et le PDCI aient ignoré le farouche opposant à Houphouët qu’il fut mais n’avait-il pas sa place à l’ASCAD ? Ne méritait-il pas au moins qu’un colloque lui soit consacré ? Le FPI, quand il était au pouvoir, songea-t-il un instant à honorer ce grand combattant de la liberté ?
C’est en échangeant avec lui que je sus qu’un certain Laurent N’Guessan Zoukou enseigna à Labé (Guinée) avant d’être enlevé et ramené en Côte d’Ivoire pour être enfermé à Assabou, la prison privée d’Houphouët, que lui-même Amondji fut livré en juillet 1961 à Houphouët par les autorités françaises, qu’il passa plus de 20 ans en Algérie avant de s’installer en France, le pays de son épouse Michèle, que le sénateur Victor Biaka-Boda fut assassiné le 28 janvier 1950 parce que, contrairement à d’autres, il avait refusé de s’incliner devant la France, parce qu’il était contre la fausse indépendance que de Gaulle s’apprêtait à octroyer aux Africains.
Amondji écrivait juste et bien. La langue de Molière n’avait aucun secret pour lui mais il connaissait aussi l’importance de la nuance car on peut avoir un esprit critique sans tomber dans l’outrance, sans s’écarter de l’objectivité. Je ne me lasse point de relire sa belle préface à “Abattre la Françafrique ou périr”, l’ouvrage que je publiai en 2014. En voici un extrait : “Le drame que nous vivons en Côte d’Ivoire depuis 1999, nous l’appelons « crise ivoirienne », alors qu’il serait certainement plus conforme à la vérité de l’appeler « crise des relations franco-ivoiriennes ». Car, en vérité, notre patrie n’est jamais sortie de son statut de colonie depuis que son territoire fut conquis par la France. C’est le paradoxe ivoirien : le pays qui a produit le mouvement anticolonialiste le plus puissant et le plus authentiquement populaire de toute l’Afrique intertropicale, est aussi celui où le colonialisme n’a jamais été réellement aboli ! Mais, au moins, jusqu’au 11 avril 2011, la mémoire de la puissance de ce mouvement et la crainte que son réveil n’était pas impossible imposaient aux dominateurs un certain respect vis-à-vis des dominés, même si ce n’était que de façade… Depuis le 11 avril, ce rempart moral est tombé, et nous voici revenus aux temps où des Kouassi Ngo, des Bani Bro et autres « naçarafôtigui » aidaient les Angoulvant à nous imposer le joug.”
Son dernier opus, paru en avril 2021, est “La Côte d’Ivoire & la France, telles Sisyphe & son rocher”. Il y prend ses distances avec les Ivoiriens qui attendent l’homme providentiel. Pour lui, seul le peuple ivoirien peut mettre fin à sa dépendance vis-à-vis des Français qui, comme colonisateurs, “ne sont ni pires ni meilleurs que les autres mais ne savent pas s’arrêter”. Comment parviendra-t-il à briser le joug qui pèse sur lui depuis 1960 ? Voici la réponse d’Amondji : “Ne nous berçons pas d’illusions : aucun compromis ne nous délivrera de cette dépendance ; elle ne finira que du jour où nous serons en mesure de prendre nous-mêmes notre destin en main sans attendre la permission de quiconque, sans marchandages, et sans faux « facilitateur » cachant dans son dos la « cinquième colonne » de nos opiniâtres prédateurs.”
En 2019, le FPI-USA devait organiser une manifestation et j’avais suggéré à quelques camarades d’inviter Marcel Amondji. L’objectif était de nous enrichir de sa grande connaissance de l’histoire politique de notre pays mais aussi de le célébrer de son vivant. L’accord du FPI obtenu, j’envoyai un mail au doyen Amondji mais l’âge ne lui permettait plus d’entreprendre ce genre de voyages. “Hélas ! Cher Jean-Claude, me répondit-il, le 10 mai 2019. Je suis certes en aussi bonne santé qu'il est possible de l'être à mon âge mais j'ai aussi largement dépassé le seuil où le cumul des ans est en soi une maladie. Rappelez-vous ce que j'ai écrit la première fois à Pascal Kokora... Depuis plusieurs années déjà, je ne quitte mon domicile que pour des raisons familiales incontournables. Je dois donc décliner votre invitation, et croyez bien que je le regrette. Je vous remercie pour votre confiance. Bien à vous. M. Anoma”.
Doyen, tu pars sans avoir vu la nouvelle Côte d’Ivoire pour laquelle tu t’es battu avec acharnement et sans répit ; tu pars sans que nous ayons pu nous voir à Perpignan en chair et en os. Je tâcherai néanmoins de faire ce que tu m’as demandé : lire l'ouvrage d'Aristide Zolberg : “One Party Government in the Ivory Coast” (Princeton University Press, 1964).