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16 juin 2025
LOCALES 2022, DIETHIE FALL CRACHE SES VERITES A ANTOINE DIOUME
Au total, ce sont dix (10) pourvois en cassation que l’administration territoriale, par la voie de l’Agent judiciaire de l’Etat, a intenté dans la plus haute juridiction du pays. Ce qui a sorti le coordonnateur de Yewwi Askan Wi ( YAW), de ses gonds
Au total, ce sont dix (10) pourvois en cassation que l’administration territoriale, par la voie de l’Agent judiciaire de l’Etat, a intenté dans la plus haute juridiction du pays. Ce qui a sorti le coordonnateur de Yewwi Askan Wi ( YAW), principale coalition de l’opposition, Déthie Fall, DE ses gonds. Le député n’a pas été tendre avec le ministre de l’Intérieur.
Devant ses collègues, et sur un ton courroucé, Déthie Fall n’a pas mâché ses mots. : « Vous êtes le ministre de l’Intérieur le plus incompétent que ce département ait jamais connu. Vous êtes supposés être neutre. Mais vous êtes loin de l’être ». M. Fall de poursuivre son réquisitoire : « votre incompétence et votre manque de maturité politique maintiennent ce pays sous tension. Vous serez responsable de tout ce qui arrivera lors des élections et dans les prochains jours. Vous êtes en train de tout faire pour éliminer des listes de l’opposition. Nous avons établi des listes en bonne et due forme. Vous donnez des instructions aux préfets et sous-préfets pour qu’ils annulent ces listes de l’opposition. Nous avons été au niveau des Cours d’appels et nous avons récupéré 70% de nos listes. Et vous les demandez à nouveau de tout faire pour casser ces listes au niveau de la Cour suprême. Vous êtes supposés être un ministre neutre, mais vous êtes incapable de l’être. Et vous voulez que dans ces conditions que l’on aille à des élections en toute transparence et dans la paix ».
En conclusion de sa diatribe, il a mis en garde le ministre : « Prenez vos dispositions. Dans toutes les circonscriptions territoriales où les listes de la coalition YAW ne seront pas présentes, il n’y aura pas d’élection. Et nous vous tiendrons responsable de toutes les conséquences qui en découleront ».
La réplique d’Antoine Diome
Prenant la parole, Antoine Diome, revêtu de sa ‘’robe’’ de parquetier, a rappelé à l’ordre le Coordonnateur de YAW. Dans une allocution, aux allures de cours magistral, le ministre de l’Intérieur a invité Déthié Fall à revisiter le Code électoral qui donne plein pouvoir aux Préfets et sous-préfet de saisir la justice en l’espèce. « La loi électorale donne compétence aux différentes autorités administratives concernées que sont les préfets et sous-préfets, à la tête des commissions de recevoir des déclarations de candidatures. Une fois que ces déclarations sont enregistrées, il y a un délai pour déclarer leur régularité sous la forme de recevabilité », a-t-il rappelé.
Invoquant toujours le Code électoral, qui a été récemment voté par les députés, l’ancien Agent judiciaire de l’Etat a rappelé que l’administration territoriale tout comme les partis est libre de déposer des recours dans les juridictions de cassation. Ce que les préfets ont fait après les décisions rendues par les Cours d’appel. « Quand une déclaration de candidature est enregistrée, le Préfet ou le sous-préfet ne peut pas, parce que simplement, ça dépend de la coloration politique, la rejeter ou la déclarer irrecevable. Si également vous faites un recours, les Cours d’appels, dans leur formation d’Assemblée générale, peuvent statuer en toute indépendance. De la même manière également, que c’est prévu, aussi par le décret de 2015, portant organisation et composition des Cours d’appel, le code électoral, lui-même, et la loi organique portant sur la Cour suprême qu’il est parfaitement possible d’introduire des pourvois en Cassation. L’autorité administrative, qui reçoit les candidatures, a la possibilité de prendre une décision. Mais lorsque sa décision est annulée, l’administration a la possibilité d’introduire un pourvoi en cassation », a indiqué le ministre.
VIH/SIDA, UN SEUL APPAREIL POUR MESURER LA CHARGE VIRALE A KAFFRINE
La région de Kaffrine (centre) ne dispose que d’un seul appareil permettant de mesurer la charge virale chez les personnes vivant avec le SIDA, a révélé mardi, le point focal VIH de sa région médicale, Amadou Sougou.
Kaffrine, 7 déc (APS) - La région de Kaffrine (centre) ne dispose que d’un seul appareil permettant de mesurer la charge virale chez les personnes vivant avec le SIDA, a révélé mardi, le point focal VIH de sa région médicale, Amadou Sougou.
‘’Cet appareil logé au centre de santé de Kaffrine est le seul qui fait la manipulation de tous les échantillons de sang prélevés dans toutes les structures de la région’’, a-t-il expliqué.
Amadou Sougou s’exprimait lors de la célébration de la journée mondiale du SIDA, organisée à Kaffrine sept jours après la date officielle du 1er décembre.
C’est ‘’ très insuffisant‘’, a-t-il jugé au regard des besoins de la région, mais également de l’éloignement de certaines zones, comme Malem Hodar ou Koungheul, qui se trouvent à plus d’une centaine de kilomètres de la capitale régionale.
‘’A chaque fois qu’un patient se présente, le prélèvement se fait et doit être acheminé le plus tôt possible, sinon il est détérioré’’, a-t-il expliqué, en présence du gouverneur de la région, William Manel.
M. Sougou a également déploré les nombreuses pannes de l’appareil qui entrainent un ralentissement du rythme de travail.
‘’Sur les quatre modules, il n’y a que deux qui fonctionnent, ce qui ralentit le rythme le travail, et le rendu du résultat est retardé. Concernant les enfants, pour savoir la conduite à tenir, il faut impérativement connaître les résultats de ces prélèvements’’, a relevé le point focal.
Le taux de prévalence du SIDA au sein de la population de la région de Kaffrine est de 0,9%, précise Amadou Sougou, qui révèle que 1.120 personnes séropostives sont actuellement suivies dont 45 enfants.
Le point focal espère toutefois que les promesses des autorités sanitaires de doter le district de Koungheul d’un appareil vont se concrétiser dans les prochains jours.
La mesure de la charge virale dans le sang permet de vérifier l’efficacité des traitements antirétroviraux chez les personnes séropositives.
LE CICR VA POURSUIVRE SON ACTION HUMANITAIRE EN CASAMANCE
Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) va poursuivre son ‘’travail humanitaire’’ en Casamance, dans le sud du Sénégal, en venant en aide aux populations et en les sensibilisant à la question des mines antipersonnel
Dakar, 7 déc (APS) - Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) va poursuivre son ‘’travail humanitaire’’ en Casamance, dans le sud du Sénégal, en venant en aide aux populations et en les sensibilisant à la question des mines antipersonnel, a assuré la cheffe de sa délégation régionale à Dakar, Valentina Bernasconi.
Outre les mines, le CICR entend ‘’assister les communautés’’ dans les domaines de l’eau et de l’assainissement, dans les projets à caractère économique et social aussi, selon Mme Bernasconi.
L’organisation humanitaire va également fournir de l’aide aux ‘’familles des migrants portés disparus’’, a-t-elle promis en s’entretenant avec des journalistes en marge d’une visite à Dakar de Peter Maurer, le président du CICR.
Maurer a pris part à la 7e édition du Forum international de Dakar sur la paix et la sécurité (6-7 décembre).
Valentina Bernasconi assure que l’organisation humanitaire internationale va poursuivre son partenariat avec la Croix-Rouge sénégalaise.
Le CICR va s’impliquer dans la lutte contre le changement climatique, qui exige ‘’une décision politique forte’’ des Etats et de leurs dirigeants, selon Bernasconi.
‘’On va devoir avoir un engagement plus conséquent de ce qu’on a eu jusqu’à présent parce que, malheureusement, s’il n’y a pas une décision politique forte des pays, on n’arrivera pas à les contenir’’, a-t-elle prévenu.
Selon un document de presse du CICR, l’organisation humanitaire est présente au Sénégal depuis 1991, à travers une délégation régionale qui couvre aussi le Cap-Vert, la Gambie et la Guinée-Bissau.
‘’Outre la diplomatie humanitaire, qui est une composante essentielle de son identité, la délégation régionale du CICR déroule un certain nombre d’activités et de programmes pour répondre aux défis humanitaires de la région en s’appuyant sur un [groupe] d’experts engagés dans des thématiques identifiées comme étant d’intérêt pour les opérations de l’institution’’, ajoute la même source.
5 ANS DE RÉCLUSION CRIMINELLE POUR UN GUÉRISSEUR ACCUSÉ DE VIOL A DIOURBEL
La chambre criminelle du tribunal de grande instance (TGI) de Diourbel a condamné mardi le guérisseur Ousmane Sarr à cinq ans de réclusion criminelle pour le viol d’une femme mariée
Diourbel, 7 déc (APS) - La chambre criminelle du tribunal de grande instance (TGI) de Diourbel a condamné mardi le guérisseur Ousmane Sarr à cinq ans de réclusion criminelle pour le viol d’une femme mariée, a constaté l’APS.
L’accusé devra en outre payer la somme de deux millions de francs CFA à la victime à titre de dommages et intérêts. En revanche, le président de la chambre, Pathé Diéna, a prononcé son acquittement pour le chef de charlatanisme.
Dans son réquisitoire, le substitut du procureur, Farba Ngom, avait requis une ‘’réclusion criminelle de 10 ans’’. Il a rappelé que, par le passé, Ousmane Sarr avait eu à s’adonner à ces pratiques’’. Il a expliqué que c’est ‘’l’enquête environnementale’’ qui a permis d’avoir toutes ces informations’’ sur l’accusé.
L’affaire commence le 12 février 2020, quand la victime saisit la brigade de gendarmerie de Bambey, d’une plainte dirigée contre Ousmane Sarr pour des faits de viol.
Entendue par les enquêteurs, elle a expliqué que souffrant de maux de ventre depuis son mariage, elle s’en était ouverte à sa grand-mère. Celle-ci avait proposé de la conduire auprès d’un guérisseur nommé Ousmane Sarr et habitant à Dangalma. Selon sa grand-mère, celui-ci traitait ce genre de maladie.
C’est ainsi qu’elles se sont rendues chez le guérisseur. A leur arrivée, Sarr aurait demandé à la grand-mère de le laisser seul avec sa petite-fille.
Il aurait révélé à cette dernière qu’on lui avait jeté un sort, puis aurait récité quelques incantations, après lui avoir demandé de tendre la paume de ses mains.
Après cela, il l’aurait, déclare la victime, conduite dans les toilettes se trouvant derrière la salle de consultation. Une fois sur place, elle lui aurait, dit-elle, demandé de se déshabiller complètement.
La victime indique qu’elle obéissait à tous ses ordres. Il lui aurait, ajoute-t-elle, demandé de se coucher par terre avant de la forcer à entretenir un rapport sexuel avec lui.
A la barre, Ousmane Sarr a nié avoir entretenu un rapport sexuel avec la victime. Il soutient que lors de la consultation, avoir relevé que la patiente avait des amants, à cause de l’éloignement de son mari.
Il a aussi démenti avoir accompagné la dame dans les toilettes pour son bain mystique.
Ces dénégations n’ont, visiblement, pas convaincu que la chambre criminelle, qui l’a condamné à cinq ans de réclusion criminelle et à payer deux millions de francs CFA à la victime à titre de dommages et intérêts.
MALI, AÏSSATA TALL SALL APPELLE À UN RETOUR RAPIDE À L’ORDRE CONSTITUTIONNEL
La ministre des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’extérieur, Aïssata Tall Sall, a appelé mardi à un retour rapide à l’ordre constitutionnel au Mali, en vue du règlement de la question sécuritaire dans ce pays.
Diamniadio, 7 déc (APS) - La ministre des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’extérieur, Aïssata Tall Sall, a appelé mardi à un retour rapide à l’ordre constitutionnel au Mali, en vue du règlement de la question sécuritaire dans ce pays.
‘’Il faut que ceux qui sont au pouvoir au Mali travaillent avec la CEDEAO (Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest) et l’ensemble des dirigeants de la sous-région. Nous devons tout faire pour que la légitimité soit conférée aux autorités politiques. En clair, que l’ordre constitutionnel revienne, comme ça la question sécuritaire pourra être cernée et réglée plus rapidement’’, a-t- elle dit.
Aïssata Tall Sall s’exprimait lors d’une conférence de presse donnée à la clôture de la 7e édition du Forum international de Dakar sur la paix et la sécurité en Afrique.
Elle affirme que la communauté internationale ne peut accepter les coups d’Etat.
‘’Ce que nous souhaitons au même titre que les Maliens, c’est que la paix et la sécurité reviennent au Mali, et que les militaires reviennent à un ordre constitutionnel’’, a poursuivi Mme Sall.
Elle dit souhaiter que les autorités maliennes fixent la date des prochaines élections, pour que le pays puisse désigner de nouveaux dirigeants.
Lors d’un sommet organisé le 16 septembre à Accra, la CEDEAO avait exigé des militaires maliens le ‘’respect strict du calendrier de la transition’’ vers le rétablissement d’un pouvoir civil.
Après le putsch qui a renversé le président Ibrahim Boubacar Keïta, le 18 août 2020, l’armée malienne s’était engagée à organiser des élections législatives et présidentielle, le 27 février 2022.
Mais la CEDEAO déclare que ‘’le Mali a officiellement écrit’’ à son président en exercice, Nana Akufo-Addo, pour lui signifier qu’il n’était pas possible de tenir les élections à la date prévue.
En mai dernier, le colonel Assimi Goïta, investi président de la transition en juin, a dissous le gouvernement du Premier ministre Moctar Ouane et a destitué le chef de l’Etat par intérim, Bah N’Daw.
COOPERATION, LE SENEGAL SIGNE POUR 65 MILLIARDS POUR DYNAMISER L'ENTREPRENARIAT
Dakar,7 déc (APS) - Le ministre de l’économie, du plan et de la coopération, Amadou Hott, et le directeur Adjoint de l’Agence française pour le Développement (AFD), Bertrand Walckenaer, ont procédé mardi à la signature d’un protocole d’accord
Dakar,7 déc (APS) - Le ministre de l’économie, du plan et de la coopération, Amadou Hott, et le directeur Adjoint de l’Agence française pour le Développement (AFD), Bertrand Walckenaer, ont procédé mardi à la signature d’un protocole d’accord d’un montant de 65 milliards de FCFA pour le renforcement de la dynamique entrepreneuriale au Sénégal, a constaté l’APS.
‘’Ce protocole d’accord vise à renforcer, à travers l’ensemble de la gamme d’outils dont dispose l’Agence Français de Développement (AFD), la dynamique entrepreneuriale au Sénégal’’, a notamment dit le ministre de l’Economie, du plan et de la Coopération.
Amadou Hott intervenait lors de la signature de ce protocole d’accord en présence Philipe Lalliot, ambassadeur de France au Sénégal, et du directeur de business expertise France, Jérémie Pellet.
De même l’administrateur général du FONGIP, Thérése Faye Diouf, le directeur de la coopération économique et financière, Mamour Ousmane Ba, et le secrétaire général de la Délégation à l’entreprenariat Rapide des jeunes et des femmes (DER-FJ) ont pris part à la signature de ce protocole d’accord.
Le protocole vise également à mettre à la disposition Sénégal des outils d’assistance technique et de financements par une ligne pouvant aller jusqu’à 100 millions d’Euros, soit 65 milliards de FCFA pour trois ans, sous forme de prêts souverains ou de prêts de politiques publiques qui seront rétrocédés aux entités concernées.
Selon M. Hott, ce protocole d’accord permettra d’accompagner la réflexion en cours et de soutenir les réformes entreprises par le Gouvernement en vue de maximiser le potentiel de dynamique de supports à l’entreprenariat, notamment en direction des très petites et moyennes entreprises.
Le ministre a aussi magnifié l’accompagnement de l’AFD permettant le lancement d’une étude de diagnostic sur les institutions financières actives dans le financement des très petites entreprises ainsi que sur la faisabilité technique de la réforme.
Amadou Hott a appelé à l’engagement de toutes les parties pour une mise en œuvre effective de ce protocole, ‘’qui permettra à notre dispositif d’accord de faire un saut qualitatif pour booster le développement du secteur privé’’.
Pour l’ambassadeur de la France au Sénégal, Philipe Lalliot, l’enjeu de ce protocole d’accord est de soutenir tout l’écosystème des entreprises sénégalaises en termes de croissance, d’innovation et de créations d’emplois.
‘’Ce protocole on l’attendait avec impatience pour mettre à sa disposition l’ensemble des outils de l’AFD pour son accompagnement’’, a-t-il déclaré.
‘’Le sujet qui nous réunit aujourd’hui est très important’’, a pour sa part constaté le directeur Adjoint de l’Agence française de Développement, Bertrand Walckenaer.
Il a salué l’énergie, l’enthousiasme et la volonté des entrepreneurs hommes et femmes qui, selon lui, sont disposés à résoudre les difficultés et problèmes auxquels ils sont confrontés quotidiennement et au service du développement de leur pays.
M. Walckenaer s’est réjoui ‘’de formaliser ce projet pour travailler avec les entreprises, les structures intermédiaires (DER-FJ, etc.) et le Sénégal, pour la mise en place d’un cadre d’initiatives et de dispositifs qui vont permettre aux entreprises de se développer’’.
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AU SAHEL, UN SENTIMENT ANTIFRANÇAIS EXACERBÉ
Les soldats de l’opération « Barkhane » sont l’objet d’une défiance grandissante au sein d’une partie de la jeunesse sahélienne
Fin novembre, le ressentiment des populations s’est cristallisé sur le passage d’un convoi militaire de ravitaillement à destination de Gao, au Mali.
Les soldats de l’opération « Barkhane » sont l’objet d’une défiance grandissante au sein d’une partie de la jeunesse sahélienne. Entre le 19 et le 27 novembre, à Kaya, dans le centre du Burkina Faso, puis à Téra, dans l’ouest du Niger, des manifestants ont bloqué un convoi militaire et caillassé les véhicules escortés par des forces de sécurité locales. A Téra, au moins trois personnes sont mortes, sans que l’on sache aujourd’hui si elles ont été tuées par des soldats français ou des forces de sécurité nigériennes.
« La population n’arrive pas à comprendre que le terrorisme puisse gagner du terrain alors que les soldats français sont là », fait valoir auprès de l’AFP un diplomate français sous le couvert de l’anonymat. « Les populations se retournent contre ceux qui sont en première ligne », abonde une source proche de l’exécutif français, évoquant une « situation inquiétante ». Alors que Mohamed Bazoum, le président du Niger, exprimait sa « reconnaissance » envers la France dont il saluait « les sacrifices », le premier ministre malien Choguel Maïga n’hésite pas à accuser la France de former des groupes djihadistes. « Jusque-là, ce type de propos émanait de réseaux pas très crédibles, de cercles complotistes, mais que cela émane d’une autorité aussi haute que le premier ministre y donne du crédit », estime Boubacar Haidara, chercheur malien.
par Jean-Claude Djéréké
LEUR ARROGANCE RISQUE DE LEUR FAIRE PERDRE L’AFRIQUE
EXCLUSIF SENEPLUS - Face aux rodomontades de Paris, Bangui et Bamako nous font comprendre qu’arrive un moment où la détermination dans la lutte est la seule façon de montrer qu’il n’existe pas de peuple inférieur à un autre
L’arrogant peut se définir comme “celui qui s’attribue spontanément la supériorité, ne pensant pas même qu’elle puisse lui être contestée, tant il est sûr de lui-même et de son droit”. Le Dr Félix-André Poujoul poursuit : “il veut en outre que les autres reconnaissent hautement ce qui lui paraît si évident et, de là, ses prétentions à leurs hommages. Aussi le reconnaît-on facilement à ses manières hautaines, à ses prétentions hardies, à sa fierté, à son orgueil, à sa présomption, à sa morgue car il réunit le plus souvent quelques-uns de ces vices et quelquefois tous”. Pourquoi l’arrogance est-elle détestable ? Parce qu’elle “excite plus d’irritation que la hauteur [qui] se renferme souvent dans le silence ou ne s’exprime que par le regard [alors que l’arrogance] demande de la soumission ; il faut qu'on se découvre et qu’on plie le genou devant elle” (cf. ‘Dictionnaire des facultés intellectuelles et affectives de l’âme’, Paris, J. P. Migne éditeur, 1857). Le philosophe Michaël Fœssel n’est pas d’un avis contraire quand il écrit : “L’arrogance, c’est le vice de celui qui croit que les autres ne sont rien”.
Fin septembre 2003, deux journalistes français, Romain Gubert et Emmanuel Saint-Martin, faisaient paraître un ouvrage fort documenté sur “l’arrogance française”. Selon eux, cette arrogance, qui est surtout le fait des élites intellectuelles et politiques souvent coulées dans le même moule, consiste à croire que la France a pour mission de “civiliser” et de “sauver” les peuples plongés dans l’obscurité et dans la barbarie en leur offrant la Démocratie, le Droit et la Liberté. Après avoir présenté le comportement des élites françaises, les auteurs préconisent que leur pays devienne plus humble, c’est-à-dire qu’il apprenne à apprendre des autres pays (peu importe le poids économique, politique et culturel de ces pays), à les écouter et à respecter aussi bien leur vision du monde que leurs choix au lieu de leur dire ce qu’il faut faire ou ne pas faire. La leçon fut-elle comprise et apprise par ceux qui dirigent la France ? Il semble que non au regard des propos tenus par les présidents français entre 2003 et 2021. Nous nous appuierons sur quelques événements pour en faire la démonstration.
Le 6 novembre 2004, l’armée française tire à balles réelles sur des jeunes manifestant pacifiquement devant l’hôtel Ivoire d’Abidjan. On dénombre une soixantaine de morts et des centaines de blessés. Un pays sérieux et désireux de connaître la vérité sur cette fusillade que rien ne justifiait et dont l’armée française se serait passée sur le sol français aurait exigé immédiatement une enquête. Le lendemain de la fusillade, non seulement Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre de Jacques Chirac, qui intervenait sur France 2, opposa une fin de non-recevoir à la demande d’enquête du président Gbagbo mais il déclara : “On ne tue pas des soldats français sans que la riposte soit immédiate. (…) On ne tue pas des soldats français impunément.” On eût aimé que les parents de Raffarin disent la même chose aux Nazis qui avaient occupé et humilié son pays pendant la Seconde Guerre mondiale.
Nicolas Sarkozy, pour qui “l’homme africain n’est pas assez entré dans l’Histoire” (discours prononcé le 26 juillet 2007 à l’université Cheikh Anta Diop de Dakar), participe à la rencontre du conseil européen de Bruxelles du 17 décembre 2010. Dans une conférence de presse, il affirme que Laurent Gbagbo a soixante-douze heures pour quitter le pouvoir. 4 ans plus tard, il avouera avoir sorti Gbagbo et installé Ouattara (cf. Nathalie Schuck et Frédéric Gerschel, ‘Ça reste entre nous, hein ? Deux ans de confidences de Nicolas Sarkozy’, Paris, Flammarion, 2014).
Le candidat Emmanuel Macron surprit agréablement nombre d’Africains en qualifiant la colonisation de “crime contre l’humanité et de vraie barbarie”. Quand il arriva au pouvoir en 2017, beaucoup pensaient que son jeune âge (il est né en 1977) lui permettrait d’avoir un comportement différent de celui des Chirac et Sarkozy. Mais c’était oublier que l’arrogance est inscrite dans l’ADN de la classe politique française et qu’on a beau chasser le naturel, il revient au galop. Les premiers à l’avoir appris à leurs dépens sont les Algériens. C’était le 30 septembre 2021 au cours d’une rencontre à l’Élysée avec un groupe de descendants d’acteurs du conflit algérien lorsque Macron parla du régime algérien comme d’un “système politico-militaire qui s’est construit sur la rente mémorielle qui dit : tout le problème, c’est la France”, ce qui évidemment provoqua l’ire du gouvernement algérien.
Le même jour, en réponse à Choguel Maïga qui avait accusé la France d’avoir “abandonné le Mali en plein vol”, le président français avait dit : “C’est une honte. Et ça déshonore ce qui n’est même pas un gouvernement. Je rappelle que le Premier ministre malien est l’enfant de deux coups d’État, si je puis dire. Puisqu’il y a eu un coup d’État en août 2020 et un coup d’État dans le coup d’État. Donc, la légitimité du gouvernement actuel est démocratiquement nulle.”
Le président français avait-il réagi de la sorte parce que le chef du gouvernement malien avait appuyé là où ça fait mal ? Difficile de le savoir. Ce qui est certain, c’est que 3 mois plus tôt, il avait tenu des propos peu amènes sur les autorités maliennes dans le ‘Journal du dimanche’ comme on peut le voir dans l’extrait suivant : “Ceux-là mêmes qui nous demandent d’intervenir militairement n’assument pas le discours sur leur besoin de France. Parce qu’ils se sont habitués à dire que leurs problèmes d’aujourd’hui sont dus aux vieux colons d’hier. Certes, la colonisation a laissé une forte empreinte. Mais j’ai dit aussi aux jeunes de Ouagadougou que leurs problèmes d’aujourd’hui ne sont pas liés au colonialisme, ils sont davantage causés par la mauvaise gouvernance des uns et la corruption des autres.”
Si on voulait continuer, on trouverait d’autres exemples pour illustrer l’arrogance française. Mais il nous faut conclure cet article. Et nous aimerions le faire en posant deux questions et en montrant comment les Africains devraient se comporter face aux arrogants. Voici les questions : Peut-on donner des leçons de démocratie et de respect des droits humains quand soi-même on a des liens étroits avec le Qatar et l’Arabie Saoudite qui financeraient le terrorisme au Sahel, quand on a des atomes crochus avec la sanguinaire junte militaire égyptienne dirigée par Abdel Fattah al-Sisi, quand on a justifié le coup d’État au Tchad et le 3e mandat anticonstitutionnel en Côte d’Ivoire, quand on a soutenu pendant 30 ou 40 ans des satrapes violents et incompétents ? Choguel Kokalla Maïga aurait-il été autorisé à prendre la parole devant la 76e Assemblée générale des Nations Unies (21-27 septembre 2021) s’il était un hors-la-loi ?
S’agissant de comment l’Afrique devrait réagir à l’arrogance française, nous ne voyons pas de meilleure attitude que celle des autorités centrafricaines et maliennes qui, malgré les cris d’orfraie et menaces à peine voilées de Jean-Yves Le Drian et Florence Parly, avancent progressivement sur le difficile chemin de la liberté et de la souveraineté. Bangui et Bamako, qui ont décidé de s’assumer plutôt que de compter indéfiniment sur un faux ami, nous font ainsi comprendre qu’arrive un moment où des hommes et des femmes réalisent que la détermination dans la lutte est la seule façon de montrer qu’il n’existe pas de peuple inférieur à un autre peuple. Quant à la France, il est trop tôt pour savoir si les expériences centrafricaine et malienne la conduiront à prendre conscience que l’arrogance a des limites et qu’elle finit par perdre ceux qui en abusent.
par l'éditorialiste de seneplus, Benoit Ngom
LE SÉNÉGAL, BIDEN ET LE SOMMET POUR LA DÉMOCRATIE
EXCLUSIF SENEPLUS - Que de bavures attribuées à des hommes en tenue contre des citoyens sénégalais dans l'exercice de leurs droits, ont été constatées sans qu'aucune sanction n'ait frappé leurs auteurs
Le président des États-Unis d’Amérique Joe Biden, en costume de « leader du monde libre », envisage l’organisation du 9 au 10 décembre prochain d’un « Sommet pour la démocratie » dont les thèmes seront : « Lutter contre l’autoritarisme, combattre la corruption et promouvoir le respect des droits humains ». Ce devrait être l’occasion pour les États-Unis, suite aux manifestations du mouvement « Black Lives Matter » après le meurtre en direct de George Floyd et l’accession au pouvoir du nouveau président démocrate , de monter au monde ce qui a changé dans ce pays et qu’est-ce que pays peut et veut faire pour le triomphe mondial des idées républicaines et démocratiques.
Ce devrait être une grande opportunité pour certains États africains qui sont invités de montrer que dans ce combat, ils ne sont pas en reste. Dans cet esprit, nous saluons cette initiative, qui se déroulera dans un mois béni que le calendrier international à consacrer à la protection des droits humains. Ainsi, le 2 de ce mois est consacré à l’abolition de l’esclavage et le 10 à l’anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme.
Ce rendez-vous nous offre l’occasion de parler du Sénégal, démocratie confirmée qui, grâce à une justice parfois chahutée mais toujours debout, cherche à améliorer son système de protection des droits de l’homme.
Toutefois, nous avons bien à l’esprit que les droits de l’homme ne peuvent pas être réduits à la seule mobilisation pour la libération de prisonniers politiques ou en faveur de personnes subissant la détention arbitraire. Le non-respect des droits de l’homme se déclinent en beaucoup de situations qui sont souvent imputables à des actes posés, en toute illégalité, par des personnes revêtues de l’autorité publique.
C’est le cas du chauffeur qui gare sa voiture suite à l’injonction de l’homme de tenue, alors qu’il est conscient de n’avoir commis aucun délit. À titre d‘exemple, c’est le cas de ce citoyen qui a investi toutes ses économies pour construire une maison qu’un jour les bulldozers viennent casser parce l’Administration , qui l’avait vu la construire sans rien dire, a décidé d’appliquer brutalement une disposition légale restée longtemps enfouie dans les archives de l’État, c’est le cas enfin de ces citoyens qui, convaincus que leur constitution garantit la liberté d’expression, de marche et de réunion, se retrouvent embastillés parce que l’Administration leur a opposé son interprétation arbitraire de la loi fondamentale.
En Afrique, il convient de le souligner, malgré les efforts de certains démocrates, l’arbitraire est à tous les coins de rue du fait de la culture de l’autoritarisme fondamentalement encrée dans le mental des populations qui s’en accommodent, pendant que leurs gouvernants l’exercent par l’intermédiaire des hommes en tenue.
Suprémacisme de la tenue ou l’usage abusif de la force publique
Souvent des hommes qui se croient tout permis au nom d’un certain « supremacisme » de la tenue, agissent comme une meute et posent des actes que leur hiérarchie n'a jamais commandités, mais qu'elle croit devoir couvrir en cas de fait accompli. Dans ces situations, le comportement républicain devrait plutôt inciter les autorités concernées à renverser les mécanismes de solidarité, qui doivent privilégier les exigences du corps social sur les réflexes d'autodéfense du corps en arme. La tenue devrait être le signe de ralliement des protecteurs de la République mais pas d'un groupe d'hommes armés pensant agir au nom d'un gouvernement.
Ainsi, même dans un pays comme Sénégal, ou des pas de géant ont été posés depuis le début de l'indépendance pour asseoir l'État de droit, consolider la démocratie et sacraliser la protection des droits de l’homme, que de bavures attribuées à des hommes en tenue, contre des citoyens sénégalais dans l'exercice normal de leurs droits de citoyens, ont été constatées et décriées sans qu'aucune sanction n'ait frappé leurs auteurs qui semblent toujours bénéficié d'une garantie totale d'immunité.
À cet égard, on peut citer, à titre d‘exemple, de nombreux cas de maltraitance injustifiée de citoyens parmi lesquels ceux concernant la journaliste camerawoman de Dakaractu Adja Ndiaye dont les images sur son lit d’hôpital avaient ravivé les souvenirs de Fallou Sène, Elimane Touré, Abdoulaye Timéra, El Hadji Thiam et autres blessés ou tués dont les agresseurs n’ont toujours pas été sanctionnés.
En détention préventive, jugés et condamnés ou ayant perdu la vie juste après l’interpellation des forces de l’ordre, ils sont nombreux à mourir de manière brutale sans que les causes de leurs décès ne soient connues. La déclaration qui suit ces genres d’incidents indique toujours qu’« une enquête est ouverte». Contre ces pratiques, il est souhaitable que l’État républicain réagisse.
Renforcer la primaute du droit et lutter contre l’impunité
Le sentiment que les auteurs de ces actes répréhensibles bénéficient toujours de l’impunité est une grave menace pour la stabilité de la République. La République pour être une et indivisible doit être impartiale et éditer des normes de comportement générales et impersonnelles. Les dirigeants, d'une République doivent veiller à ce que la justice ne soit pas estampillée par une partie du peuple comme partiale et inique.
Le Sénégal à cet égard, malgré les atermoiements qui ont pu être constatés, essaye de veiller au respect de la dignité humaine et au renforcement permanent de la justice dans sa lutte contre l’impunité des hommes en tenue. Nous citerons, à cet égard, trois exemples récents qui nous paraissent aller dans ce sens.
D’abord, la décision de la Chambre criminelle de Diourbel qui a jugé les quatre policiers accusés de meurtre avec barbarie et acte de torture sur la personne du jeune apprenti chauffeur Ibrahima Samb, en 2013. Ces policiers reconnus coupables de violence suivie de mort sans intention de la donner ont écopé de la même peine de 10 ans de travaux forcés et l’Etat du Sénégal, reconnu civilement responsable, a été condamné à payer des dommages et intérêts à la partie civile.
Récemment, dans la même logique de protection du citoyen contre l’arbitraire des forces publiques, le tribunal de grande instance de Fatick a infligé aux cinq policiers qui sont accusés d’avoir tué Mamadou Lamine Koita, un jeune conducteur de moto-Jakarta, décédé suite à son interpellation par les agents du Commissariat de police, la peine de 2 ans de prison dont 6 mois ferme, assortie d’une condamnation à payer à la famille de la victime une très lourde amende.
Dans le même esprit, l’annonce il y a quelques mois, lors d’une conférence annuelle des chefs de Parquet, par le ministre de la Justice Malick Sall relative à la nécessité de remettre en question l’usage abusif des mandats de dépôt peut constituer, si c’est appliqué, la fin d’une certaine banalisation de la privation des libertés individuelles. En effet, le peu de cas que certains magistrats ont pu faire de l’importance primordiale de la protection des libertés a entrainé souvent l’aggravation des situations dégradantes dans lesquelles des détenus ont pu se retrouver dans des prisons encombrées.
Sénégal, rassembler les poussins à l’abri des milans
Le Sénégal doit aspirer à être la patrie des droits de l’homme pour ses citoyens et pour tous les frères africains qui, pour longtemps encore, vont devoir vivre en passant sous les fourches caudines des régimes dictatoriaux. En effet, le grand dessein du Sénégal, selon son hymne national est de « rassembler les poussins à l’abri des milans ».
Dans son aspiration à être un pays leader, le Sénégal doit miser sur l’éducation de ses citoyens qui doivent apprendre à se respecter et à respecter tout ce qui participe de la défense du bien commun et de l’intérêt général.
En effet, le respect des droits de l'homme ne saurait être, seulement un discours mais il doit être la résultante d'un comportement conscient qui découle de l’éducation. Les citoyens sénégalais doivent être éduqués à se respecter davantage entre eux, à respecter les forces de sécurité, gendarmes et policiers, sans le dévouement desquels nul d’entre nous ne pourrait dormir ou se promener en toute quiétude.
A contrario, l’État ne doit pas donner l’impression de favoriser l’impunité en ne sanctionnant jamais la partie gangrenée ou accidentellement fautive de la gendarmerie ou de la police dont l'immense majorité des membres, depuis l’accession de notre pays à l’indépendance, montre au quotidien son attachement aux valeurs de la république.
Des citoyens bien éduqués qui s’inspirent des valeurs fondamentales de leurs civilisations seraient prémunis contre toute tentative d’invectiver ou d‘agresser arbitrairement des personnes revêtues de l’autorité publique.
De même des agents de police ou de gendarmerie, bien formés aux valeurs républicaines de respect des droits civiques et de l’intégrité physique de leurs concitoyens et bénéficiant d’une protection sociale adéquate de la part de l’État, seraient moins enclins à user abusivement de la force contre leurs compatriotes.
Les pouvoirs publics doivent constamment rechercher un état d’équilibre entre l’usage proportionné de la force légitime par les hommes en tenue, la nécessité de protéger la force publique contre les agressions malveillantes et l’impératif catégorique de préserver l’exercice régulier des libertés publiques.
En effet, tous les observateurs avertis ont compris que le déséquilibre international auquel nous assistons actuellement dans de nombreux pays africains a essentiellement pour cause, la révolte contre l’injustice exercée par une partie du peuple sur l’autre, grâce au détournement de la fonction républicaine des forces armées ou de la police, dont certains membres sont transformés en sicaires d'une bourgeoisie cupide et peu patriote.
Le Sénégal, nous semble-t-il, une exception démocratique en Afrique, dans le sillage de son évolution historique pourra valablement donner sa mesure lors du Sommet de Joe Biden.
À la morgue, tout le monde n’est pas logé à la même enseigne. Certains cadavres sont dans l’infortune de l’anonymat, dans l’ombre des tiroirs frigorifiques. On les appelle les corps inconnus jusqu’à ce qu’ils soient identifiés. Ou peut-être même jamais
À la morgue, tout le monde n’est pas logé à la même enseigne. Certains cadavres sont dans l’infortune de l’anonymat, dans « l’ombre » des tiroirs frigorifiques. On les appelle les « corps inconnus » jusqu’à ce qu’ils soient identifiés. Ou peut-être jamais ! Ce sont des accidentés de la route, des malades mentaux, des nouveau-nés, des sans domicile fixe…Et bien d’autres individus qui ont probablement perdu leurs attaches.
Ils sont les « inconnus de la morgue » ; des corps inertes comme d’autres. Ou presque ! Ces « inconnus » sont des accidentés de la route, du travail ou encore des sans domicile fixe, des « âmes » errantes de leur vivant. Les morgues en reçoivent souvent, les nécropoles aussi.
Ibrahima Diassy, gestionnaire du cimetière musulman de Yoff, a blanchi sous le harnais. Cet univers macabre, il l’explore depuis des lustres. Il en dit ceci : « On appelle ces corps des « inconnus » bien que certains finissent par être identifiés ». Assis à son bureau, teint noir, cheveux bien peignés, M. Diassy souligne que ce sont souvent des accidentés de la route, des malades mentaux dont on n’arrive pas à retrouver les proches. « Quand il y a un cas, en général ce sont les sapeurs-pompiers qui les acheminent vers les morgues des hôpitaux où chaque établissement dispose d’un délai de conservation avant leur inhumation», ajoute-t-il.
Sous l’ombre d’un arbre devant la morgue en réfection, le gestionnaire Sana Bodian révèle que les inconnus « bébés » sont les cas les plus fréquents qu’il rencontre. « Je vois souvent des mort-nés abandonnés, des bébés issus de grossesses non désirées. Mais il y a également d’autres plus âgés », déclare l’homme en service depuis deux ans à l’hôpital Abass Ndao. Dans son uniforme bleu foncé, Bodian dit n’avoir pas oublié le jour où il a reçu « un corps sans vie ». Il s’agissait d’un homme âgé d’une quarantaine d’années, un inconnu. « C’était une matinée, des hommes du marché Sahm l’ont acheminé vers notre morgue. Venu retirer de l’argent à la banque, il a piqué une crise avant de rendre l’âme. Je n’ai toujours pas vu ses proches. Ces cas sont classés dans le registre des inconnus ».
État de décomposition
Il est fréquent de voir des insertions dans la presse y ayant trait, comme celle datant de juillet 2012 faite par l’hôpital Principal de Dakar : « Un homme âgé de 20 ans environ, de teint un peu clair, de grande taille et de forte corpulence a été admis au service des urgences de l’hôpital Principal de Dakar […]. Toute personne pouvant aider à retrouver ses parents est priée de prendre contact avec l’hôpital […] ». Récemment, dans les colonnes du quotidien « Enquête » du 25 février 2021, une annonce immortalisait le visage d’un défunt suivi de ces mots : « La personne est décédée à l’hôpital de Fann le mercredi 24 février 2021 à 14h30mn. Elle s’était présentée le même jour. L’homme est âgé de 70 ans. Prendre contact avec la morgue de l’hôpital ».
Mais l’identification de ces inconnus n’est pas toujours évidente. En 2011, le journal « Le Quotidien » écrivait qu’« un jour, à la suite d’un communiqué paru dans la presse, des parents se sont manifestés et sont venus jusqu’à la morgue pour identifier le corps. Mais une fois sur place, ils étaient moins sûrs. Le frère était incapablede le reconnaître car cela faisait longtemps qu’il ne l’avait pas vu. Charge-t-il ainsi son oncle de venir l’identifier. Mais, ils ne sont jamais revenus ». Selon le docteur Mouhamed Chérif Dial, médecin pathologiste à l’Hôpital général Idrissa Pouye (Hogip), certains « inconnus » peuvent se présenter dans un état de dégradation ou de décomposition avancée, ou déchiquetés parfois par un long passage dans l’eau. S’ouvre ainsi le cycle de l’anonymat post mortem.
Des cadavres identifiés après l’enterrement
Au Sénégal, la durée de dépôt légal d’un corps dans une morgue d’hôpital est de 45 jours. Passé ce délai, l’hôpital entame une procédure d’inhumation de ces « corps inconnus ». Le permis d’inhumation est nécessaire pour enterrer un corps au Sénégal. Dans les termes de l’article 74 du Code de la famille, il est stipulé : « Dans les communes et les chefs-lieux d’arrondissement, aucune inhumation n’est faite sans un permis d’inhumer délivré sur papier libre et sans frais par l’officier de l’état civil. Celui-ci ne peut le délivrer que sur production d’un certificat médical constatant le décès ou après s’être transporté auprès du défunt pour s’assurer du décès ». Une fois le permis d’inhumation délivré, les morgues des hôpitaux préparent les corps des « inconnus » et les acheminent vers les cimetières. Celui de Yoff en reçoit souvent, selon le gestionnaire des lieux. « Quand on m’amène un corps accompagné d’un permis d’inhumation du procureur ou d’un officier, j’autorise son enterrement. Nous représentons un des principaux lieux d’inhumation de ces types de corps (les inconnus). Parfois, c’est après l’enterrement que l’identification de l’inconnu se fait », précise Ibrahima Diassy, en service au cimetière de Yoff depuis 2003.
Au cimetière catholique de Saint-Lazard, le gestionnaire Habib Sagna en dit ceci : « Bien qu’il soit inconnu, on l’enterre sur la présentation d’un permis d’inhumer en bonne et due forme ». Les cimetières catholiques de Saint-Lazard et musulman de Yoff accueillent des corps inconnus provenant des hôpitaux de Dakar. En service depuis 2013, M. Sagna renseigne qu’« il y a six mois, on y a amené deux corps, un Nigérian et un Ghanéen. On ne connaissait pas leurs proches avant mais ceux qui les ont acheminés ont présenté leurs permis pour que l’enterrement soit possible. Heureusement, quelques mois après, ils ont pu être identifiés ».
Des fosses communes aux espaces dédiés
S’agissant de l’enterrement de ces « inconnus », Ibrahima Diassy, gestionnaire du cimetière de Yoff, indique qu’« au début, on les enterrait dans des fosses communes. Leur enterrement n’était pas aussi organisé qu’aujourd’hui ». Les épitaphes de ces inconnus portent parfois leurs noms, délivrés par la morgue de l’hôpital. Certains n’ont que des numéros en attendant qu’ils soient identifiés par les proches. Au cimetière de Yoff, un espace leur est dédié.
1101 corps d’inconnus enterrés depuis 2012 entre Dakar, Thiès et Diourbel
Des volontaires s’activent pour l’inhumation des « inconnus ». C’est le cas de l’Association pour la perfection et la miséricorde (Apm) qui s’en occupe depuis 2012. Lamine Mandiang en est le secrétaire général. Il révèle que dans les régions de Dakar, de Thiès et de Diourbel, 1101 corps inconnus ont été inhumés et enterrés par l’association musulmane depuis 2012. M. Mandiang estime que « nous avons tous droit à une sépulture honorable ».