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26 juin 2025
L'EXPANSION EXPRESS DE DIAMNIADIO
Vingt ans auparavant, la localité était le chef-lieu de l’arrondissement portant son nom. Aujourd’hui, ce nouveau démembrement de l’État a tout pour se développer, avec notamment un riche tissu industriel, deux pôles urbains et des infrastructures
Maguette Ndong et Mbacké Ba |
Publication 23/10/2021
C’est à travers le nouveau découpage opéré dans la région de Dakar que Diamniadio, une ancienne localité flottante, est désormais érigée en arrondissement. Vingt ans auparavant, la localité était le chef-lieu de l’arrondissement portant son nom. Aujourd’hui, ce nouveau démembrement de l’État a tout pour se développer, avec notamment un riche tissu industriel, deux pôles urbains et des infrastructures de tout genre. Seulement, la question des limites des trois communes qui le composent (Yène, Sébikotane et Diamniadio) reste un sérieux problème auquel l’État doit faire face, de même que l’assainissement de certains quartiers.
Diamniadio, les vendeuses de fruits ont un nouveau voisin. Derrière les étals colorés et alléchants, un bâtiment flambant neuf de couleur grise attire les regards. Au-dessus flotte le drapeau du Sénégal. C’est le nouveau siège de la sous-préfecture de Diamniadio. Cette représentation de l’État est la nouveauté dans la contrée depuis que le gouvernement a décidé d’ériger Diamniadio en arrondissement. Cure-dent à la bouche, l’air jovial et détendu, Marième Faye, présidente des vendeuses de fruits de Diamniadio, est aux anges. « Maintenant, il faut juste traverser la route pour se rendre à la sous-préfecture. C’est une excellente chose pour nous qui avions beaucoup de peine à aller jusqu’à Rufisque ou Bambilor pour obtenir des documents administratifs », renseigne la commerçante.
En effet, le nouvel édifice se trouve en plein cœur de la ville, face à la mairie et à deux pas de la gare routière et du centre de santé. Il est donc accessible à tous les citoyens. « Cette sous-préfecture va régler beaucoup de choses ici à Diamniadio. Pendant longtemps, les populations des communes de Yène, de Sébikotane et de Diamniadio ont bravé chaleur, froid et pluie pour se rendre à Bambilor où se trouvait la sous-préfecture », explique Amadou Bayel Sow, directeur de la radio locale Tempo Fm. Des émissions sont même organisées pour sensibiliser les populations sur la présence de sous-préfecture dans la zone et son utilité, ajoute-t-il.
Actuellement, tous les symboles de l’État figurent au siège de la sous-préfecture, notamment avec la présence du nouveau Sous-préfet Oumar Dia, entouré des secrétaires, des agents administratifs et des éléments des Asp qui assurent la sécurité des lieux. L’État est plus que jamais présent à Diamniadio. Cette nouvelle donne fait la satisfaction des élus de la localité. Le Maire de Sébikotane, une des trois communes qui composent cet arrondissement, Abdoulaye Lô, se réjouit d’avoir maintenant « un interlocuteur » au niveau étatique. « Avant c’était Rufisque qui gérait tout, maintenant nous avons un interlocuteur. Les dossiers peuvent être gérés plus rapidement, sans compter les facilités de visite et d’entretien que nous pouvons avoir avec le sous-préfet », renseigne l’édile de Sébikotane, qui accueille positivement la réforme ayant créé ce nouvel arrondissement.
« Nous étions obligés de traverser cinq communes… »
S’exprimant sur la réforme, le Maire de Diamniadio, Mamadou Moulaye Guèye, estime que « cette décision est opportune, il faut reconnaître son importance ». Son homologue de Yène, Gorgui Ciss, assure que la présence d’une sous-préfecture va permettre à l’administration et aux collectivités territoriales d’être « plus performantes ». « Nous étions dans l’arrondissement de Bambilor, une commune très excentrée par rapport aux cinq autres communes que polarisait cet arrondissement. Pour répondre aux réunions de notre sous-préfet, nous étions obligés de traverser au moins cinq communes pour arriver à Bambilor et cela décourageait énormément les administrés », se souvient M. Ciss.
Au-delà du satisfecit exprimé ici et là, la création de ce nouvel arrondissement ressemble à un retour aux sources. « L’arrondissement existait à Diamniadio », renseigne Amadou Bayel Sow de la radio Tempo Fm. Gorgui Ciss livre les détails de ce passé perdu et retrouvé. « L’arrondissement existait de 1998 à 2002 alors qu’il n’y avait que deux communautés rurales, puisque les arrondissements étaient installés pour polariser un certain nombre de communauté rurales (Yène et Sangalkam à cette période), le siège était à Diamniadio. C’est en 2002, avec la création de la commune de Diamniadio où se trouvait le siège que l’autorité a décidé de délocaliser en créant l’arrondissement de Sangalkam », fait savoir le maire de Yène.
Une croissance fulgurante
Diamniadio, devenu aujourd’hui un arrondissement dans le département de Rufisque, n’était qu’un quartier anonyme il y a plusieurs années de cela. Le vieux Soulèye Sène, un des historiens de la localité, renseigne que l’endroit était surtout propice à l’agriculture et à l’élevage. Avec notamment des habitants de Rufisque, de Bargny et de Dougar qui venaient pour y pratiquer des activités agricoles. Selon lui, des vieux comme Mbissane Dione y avaient un commerce florissant et furent les premiers à habiter Diamniadio. « L’endroit était à la limite un quartier flottant, sans délégué ou responsable local », se souvient M. Sène. Il aura fallu, selon lui, attendre les années 1949-1950, avec les travaux de la route de Mbour, pour voir s’installer d’autres personnes comme Khoudia Guèye, une Kaolackoise qui préparait le repas pour les travailleurs du chantier de cette route, avant de s’établir, elle aussi, à Diamniadio. Pour ce qui est de l’origine du nom, Diamniadio serait une déformation d’un mot sérère « Dokhal Diam » (marcher pour la paix). « Ces Sérères du Sine, en quittant Rufisque et Bargny, faisaient souvent escale à Diamniadio pour se reposer », explique M. Sène. Ce lieu de repos et quartier flottant fait, aujourd’hui, partie des localités qui comptent au Sénégal. Son avenir porté par les autorités étatiques se présente sous de beaux auspices.
BIDEN DANS UN PARCOURS D'OBSTACLES
L'analyste politique, René Lake, évoque sur VOA, la marge de manoeuvre réduite du président américain face aux résistances soulevées par son gigantesque plan d'infrastructures y compris dans le camp démocrate
L'analyste politique, René Lake, évoque sur VOA, la marge de manoeuvre réduite du président américain face aux résistances soulevées par son gigantesque plan d'infrastructures y compris dans le camp démocrate.
Entretrien à suivre à partir de la 15e minute.
EDOUARD MENDY, GARDIEN ET AFRICAIN, LA DOUBLE PEINE
La prestation du gardien sénégalais de Chelsea samedi à Brentford a relancé la polémique autour de sa non-sélection dans la liste des 30 candidats au Ballon d’or de «France Football»
Le Temps Afrique |
Laurent Favre |
Publication 22/10/2021
La prestation du gardien sénégalais de Chelsea samedi à Brentford a relancé la polémique autour de sa non-sélection dans la liste des 30 candidats au Ballon d’or de «France Football». Un (double) ostracisme plutôt qu’un racisme
«Je n’ai fait que mon travail», a-t-il dit, peut-être pour calmer le jeu. Auteur de plusieurs arrêts décisifs, dont deux ou trois aux allures de miracles, lors de la victoire de Chelsea sur le terrain de Brentford (0-1), Edouard Mendy a remis les Blues en tête de la Premier League et ravivé une polémique qui enfle depuis dix jours. Le gardien de but sénégalais, désigné «homme du match» samedi et «meilleur gardien de la saison 2020-2021» en août par l’UEFA, ne figure pas dans la liste des 30 candidats au Ballon d'or, révélée le 8 octobre par son créateur, le (désormais) mensuel France Football.
Les Sénégalais ont été les premiers à s’offusquer de cet oubli, «inadmissible» pour l’attaquant de Liverpool Sadio Mané, «scandaleux» selon l’ancien joueur El-Hadji Diouf. Depuis samedi, des voix de Chelsea se sont ajoutées au concert d’incompréhension. «Il méritait d’être dans cette liste», a estimé son entraîneur Thomas Tuchel, tandis que le défenseur Antonio Rüdiger a demandé sur Twitter: «Que quelqu’un m’explique pourquoi il n’y est pas…» Même l’entraîneur de Brentford, Thomas Frank, y est allé de son couplet: «Si vous voulez gagner quelque chose en tant qu’équipe et en tant que club, vous devez avoir un grand gardien de but. Ils ont un très bon gardien, et sans lui, ils ne seraient pas en tête du championnat.» Ni champions d’Europe.
Longtemps, les gardiens furent les favoris des médias, car les plus faciles à magnifier pour les radio-reporters et les plus proches à saisir en pleine action pour les photographes. Mais depuis la création du Ballon d'or en 1956 par France Football, seul le Soviétique Lev Yachine en 1963 a remporté cet équivalent footballistique de l’oscar du meilleur acteur. Cinq autres gardiens – Dino Zoff, Ivo Viktor, Oliver Kahn (deux fois), Gianluigi Buffon et Manuel Neuer – sont montés sur le podium, et seul Kahn en 2002 fut proche (à une erreur de main près, en finale de la Coupe du monde) de l’emporter.
Les statistiques au secours des gardiens
La télévision a progressivement mis l’accent sur les exploits des buteurs et les erreurs des gardiens. Un combat perdu d’avance pour ces derniers. D’autant que l’évolution des tactiques fait de plus en plus appel à des aspects peu visibles de leur jeu (l’anticipation, le placement, la rapidité de la prise de décision, le jeu court au pied). Les actions spectaculaires ne sont souvent que la conséquence d’erreurs que les grandes équipes commettent rarement. «Je préfère quand mon gardien n’est pas le héros du match», a rappelé Thomas Tuchel samedi.
LE SORT DES DÉPUTÉS CITÉS DANS L'AFFAIRE DES PASSEPORTS DIPLOMATIQUES AUX MAINS D'UNE COMMISSION SPÉCIALE
L'Assemblée nationale a mis en place vendredi une commission ad hoc qui va statuer sur la levée de l'immunité parlementaire des deux parlementaires membres du parti présidentiel, soupçonnés d'implication dans ce trafic
L'Assemblée nationale du Sénégal a mis en place vendredi une commission ad hoc qui va statuer sur la levée de l'immunité parlementaire de deux députés membres du parti présidentiel, soupçonnés d'implication dans un trafic de passeports diplomatiques, a-t-on appris de sources parlementaires.
Les députés présents lors d'une séance plénière ont voté à l'unanimité pour la mise en place de cette commission, ont indiqué à l'AFP les députés Djibril War (majorité) et Mame Diarra Fame (opposition), sans préciser le nombre des présents. La commission est composée de 11 députés, dont huit de la majorité, deux de l'opposition et un député non affilié à un groupe, conformément aux textes. "La première réunion de la commission ad hoc est fixée à mardi. Nous allons prendre connaissance du fond du dossier, adopter un calendrier de travail, auditionner les deux collègues députés et, s'il y a lieu, en auditionner d'autres", a déclaré Dieh Mandiaye Ba, membre de la commission ad hoc, également présidente de la commission des lois.
Les résultats seront ensuite livrés à l'Assemblée réunie en plénière, à une date non précisée. Si la procédure va à son terme, c'est à cette plénière qu'il appartiendra de se prononcer sur une déchéance ou non de l'immunité des deux députés, déchéance demandée par le juge en charge du dossier.
Les deux députés sont soupçonnés d'avoir monnayé leurs services pour permettre à des individus d'obtenir des passeports diplomatiques. Selon des éléments de l'enquête publiés dans la presse, ils sont soupçonnés d'avoir joué les époux ou les pères grâce à des pièces d'état civil frauduleuses, permettant à leurs conjointes ou leurs enfants fictifs d'obtenir eux aussi un passeport.
Un commerçant présenté comme le cerveau présumé de ce réseau est en prison depuis le 13 septembre. Au moins cinq chefs d'inculpation pèsent contre lui: "association de malfaiteurs, escroquerie, blanchiment de capitaux, faux et usage de faux sur des documents administratifs, faux en écritures publiques authentifiées".
Par Serigne Saliou Guèye
LES CLEANING DAY, UN SERPENT DE MER
Personne ne peut comprendre que l’Onas, une structure de l’Etat société nationale, ne puisse pas assurer régulièrement l’assainissement de Dakar
Le 2 avril 2019, lors de sa prestation de serment à Diameniadio après sa réélection, le Président Macky Sall déclare sans ambiguïté, qu’« il y a urgence à mettre fin à l’encombrement urbain, à l’insalubrité, aux occupations illégales de l’espace public et aux constructions anarchiques ». Dans la foulée, il appelle à une mobilisation générale pour un « Sénégal plus propre, un Sénégal zéro déchet ». Le jeudi 08 août 2019, au Centre de conférences international Abdou Diouf (CICAD) de Diamniadio, il procède au lancement de la Campagne Nationale de Promotion de la Propreté (CNPP) dont le démarrage effectif, a-t-il précisé, aurait lieu tout juste après la fête de la Tabaski célébrée quatre jours plus tard. « Il faut engager tous les moyens qu’il faut pour qu’après la Tabaski, on puisse libérer la voie publique. Nous allons démarrer la mise en œuvre en mode fast track du programme zéro déchet », martèle-t-il. Mais il a fallu attendre cinq mois plus tard pour voir cet engagement se matérialiser.
Ainsi, le 4 janvier 2020, le chef de l’Etat a enfin donné le premier coup de balai près de chez lui, de l’opération « Cleaning day » en référence à l’Umuganda du Rwanda qui fait de la participation au travail communautaire de propreté une obligation pour toute personne, homme ou femme, considérée comme apte et ayant entre 18 et 60 ans. L’Umuganda est organisé le dernier samedi de chaque mois, de 8 heures à 11 heures et chaque Rwandais doit participer obligatoirement à ce travail communautaire afin de servir la collectivité. Le « Cleaning day » du président Macky Sall, lui, était programmé pour le premier samedi de chaque mois. Deux mois plus tard, l’apparition du Covid dans notre pays est venue compromettre le projet présidentiel poussant à suspendre le « cleaning day ». Ce au moment où les partisans du président de la République avaient déjà commencé à organiser leurs « cleaning days » sur fond de politisation et à grand renfort de folklore !
Ainsi, chaque politicien remettait des T-Shirts à son exactement comme Mame Boye Diao fait actuellement avec les cahiers d’écoliers ! pour délivrer un message de campagne pour les locales. Et, accessoirement, faire un clin d’œil au président ! En réalité, en dehors du prétexte du Covid, voilà pourquoi le « cleaning day » initié par Macky Sall a fait pschitt. Car, au contraire, le Covid devait être une opportunité pour lutter efficacement contre l’insalubrité et les déchets. Mais avec un manque de vision combiné à une absence de volonté et à l’effet de relâchement, le projet de propreté du Président ne pouvait que faire long feu. Surtout que, chassez le naturel du manque d’hygiène de nos compatriotes et il revient forcément au galop !
Echec du Président dans la gestion des déchets et ordures !
Ce qui devait arriver est arrivé. Lors de l’ouverture de l’Expo Dubaï 2020, séduit par la propreté de la ville hôte, le Président Macky Sall a étalé ses préoccupations en matière de propreté. A cet effet, il a fustigé l’incivisme des Sénégalais qui fait que le pays ne peut pas se défaire des rets qui l’enserrent irrémédiablement dans l’étau de la saleté et de l’insalubrité. « Je demande aux Sénégalais d’être plus exigeants en matière de propreté. Nous allons reprendre les opérations de salubrité mais aussi de désencombrement des rues. On ne doit pas occuper la voie publique sous prétexte que l’on doit travailler pour gagner sa vie. On va y remédier avec l’aide des maires, pour que ceux qui y viennent aient envie de rester ou de revenir », a-t-il pesté devant la délégation hétéroclite qui l’accompagnait à Dubaï. Le problème c’est que lesdits maires, fort préoccupés par leur réélection au cours du scrutin qui aura lieu dans trois mois, n’ont évidemment pas la tête à se lancer dans des opérations Augias ! Ce discours redondant est un aveu de l’échec du président Sall dans la gestion des déchets et ordures. Car si aujourd’hui des lieux comme Sandaga et Petersen, entre autres, sont devenus des jungles implantées au cœur de Dakar, c’est parce que l’Etat a failli au point que l’informel a fini par prendre pied là où il ne devrait pas. Pour mettre fin à cet incivisme, il faut revoir l’architecture de certaines zones de la capitale.
La délocalisation de Sandaga et de Petersen hors de Dakar est devenue un impératif vital. Avec les ressources prochaines du pétrole et du gaz, il faut mettre en place un programme de destruction-reconstruction de ces lieux de commerce qui asphyxient et défigurent Dakar tout en y provoquant des embouteillages monstres. Au 19e siècle, Napoléon III et le préfet Eugène Haussmann n’avaient-ils pas eu le courage de détruire 40 mille immeubles pour reconstruire Paris et en faire la plus belle ville d’Europe ? Ce n’était pas évident et pourtant, les oppositions tenaces et les railleries n’avaient pas résisté à la volonté du duo Napoléon-Haussmann de matérialiser leur projet de reconstruction de la capitale française.
Au Sénégal, c’est la volonté politique et le courage qui manquent le plus !
La volonté politique, c’est mettre en place toutes les infrastructures nécessaires et les lois afférentes pour une bonne gestion des ordures et des déchets. Personne ne peut comprendre que l’Onas, qui est une structure de l’Etat société nationale, ne puisse pas assurer régulièrement l’assainissement de Dakar. Combien de fois l’eau des égouts ne déborde-t-elle pas des canaux d’évacuation pour aller inonder pendant plusieurs jours des quartiers qui se trouvent un peu en contrebas par rapport à d’autres ? On ne peut pas demander aux Dakarois d’être propres si les infrastructures et structures d’assainissement de l’Etat sont défaillantes. Le courage, c’est de s’armer des lois et de procéder aux sanctions à l’encontre de quiconque ne respecterait pas les mesures d’hygiène et de protection de l’environnement édictées par les autorités. Au Rwanda, l’Umuganda est inscrit dans la Constitution et toute absence non justifiée à ces travaux communautaires est sanctionnée par une amende pécuniaire. De plus, moralement, le contrevenant peut être considéré comme un lâche qui refuse de servir sa société. Procéder au désencombrement de tous les coins de Dakar, c’est d’abord repenser la stratégie à mettre en place pour que les déguerpis ne reprennent plus leurs places d’antan ou exercer un suivi permanent qui empêchera tout retour en zones des déplacés. Ce qui se passe au cœur de la capitale est inamissible. Les routes, les trottoirs sont colonisés par un essaim de marchands ambulants insouciants des problèmes environnementaux et de mobilité qu’ils causent.
Mais si le chef de l’Etat veut que Dakar soit une ville à l’image de Kigali, Rabat, Nairobi, Abidjan, Dar-es-Salam, Addis-Abeba, il faut s’adosser sur les codes de l’environnement, de l’hygiène et appliquer avec courage, rigueur et sans discrimination la loi sur tout contrevenant. Mais auparavant, il faut que l’Etat songe à mettre ces Sénégalais dans le besoin dans de dignes conditions d’exercice de leur métier. Là où l’on classe les villes précitées comme étant les plus propres et les plus écolos, Dakar, elle, occupe le rang peu enviable de 2e ville la plus polluée après New Delhi en plus d’être la ville la plus chère après Berlin. Jadis du Cap-Vert, la région de la capitale est devenue « Cap-depierres » à cause de l’élimination sauvage et criminelle des arbres en faveur de l’érection tous azimuts de blocs de pierre appelés indécemment immeubles. Les constructions anarchiques dans la capitale ne respectent aucune norme environnementale. On construit au gré de ses desiderata sans aucun souci de préservation de l’écologie. Si aujourd’hui, on ne peut plus respirer un air pur dans Dakar pourtant presque entourée d’eau, c’est à cause des tonnes de CO2 que déversent dans l’air les vieilles guimbardes qui y circulent. Les particules que libèrent les cars rapides, clandos et autres voitures du même acabit ont franchi le seuil du tolérable.
Dans ces conditions, il ne faut pas s’étonner qu’au ministère de la Santé, pour des raisons que nul n’ignore, on n’ose pas sortir les chiffres relatifs au nombre de Sénégalais qui meurent par an à cause de la pollution de l’air. Beaucoup de ceux qui souffrent de maladies pulmonaires le sont à cause de l’air de la capitale devenu irrespirable. La pollution industrielle n’est pas en reste. Les usines implantées dans la zone industrielle de Hann déversent des quantités importantes de gaz carbonique dans Dakar et en même temps rejettent leurs déchets solides et liquides sur les rivages de la Baie de Hann. Les populations riveraines ne sont pas en reste dans cette pollution outrancière de la baie de Hann. Ce même si des travaux ont été entrepris depuis des mois pour dépolluer cette baie qui devrait être l’une des plus belles du monde. Les plages qui permettaient aux Dakarois de profiter de la fraicheur et de la pureté de l’air marin sont devenues la propriété illégale des gens du pouvoir (actuel comme ancien) et d’affairistes qui y développent une industrie hôtelière ou médicale fructueuse. Tout cela pour dire que le mal de notre pays en matière de salubrité est plus profond que ne le pense — ou ne veut bien le dire — le président de la République Macky Sall. Lors du Conseil des ministres du 20 octobre dernier, le chef de l’Etat a demandé à ses ministres de reprendre l’opération « Cleaning day ».
Ainsi, le ministre Abdoulaye Sow en charge de l’Hygiène publique est invité à relancer l’organisation régulière des Journées nationales avec l’implication, au premier plan, des collectivités territoriales et des forces vives de la Nation. Hélas, le problème de Dakar n’est pas relatif seulement à une collecte régulière des ordures. Il y a beaucoup de préalables pour arriver à hisser l’ex-capitale de l’AOF dans le top des villes les plus propres du continent. Et si ces préalables ne sont pas réglés, les régimes se succéderont en laissant entier le problème de l’insalubrité et de l’incivisme à Dakar.
QUAND LES MUSCLES DE BALLA GAYE 2 ET DE TYSON CHASSAIENT LES TABLES DE MULTIPLICATION DES CAHIERS !
Ecole : les cahiers et sacs aux effigies de Mame Boye Diao et Néné Fatoumata Tall font désordre
Lors de la rentrée des classes, le candidat à la mairie de Kolda, le directeur général des Domaines, Mame Boye Diao, a offert des cahiers à son effigie aux potaches de cette ville du Fouladou. Tandis que Mme Néné Fatoumata Tall, ministre de la Jeunesse et candidate à la mairie de Golf-Sud (Guédiawaye), elle, a distribué des cartables avec sa frimousse aux élèves de sa commune. Ces images de propagande politique en milieu scolaire ont déclenché une véritable levée de boucliers de la part des acteurs de l’éducation. Cette « tragédie » pédagogique rappelle au « Témoin » celle perpétrée en 2013 par la défunte Sips (Société industrielle de papeterie au Sénégal) qui avait produit et commercialisé des cahiers à l’effigie des lutteurs comme Balla Gaye 2, Yékini, Mohamed Ndao Tyson etc. Devant la levée de boucliers, les cahiers avaient été retirés de la vente !
A quelques mois des élections locales, les supports de propagande politique se sont invités en milieu scolaire. Et deux politiciens se sont illustrés d’une bien triste manière dans ce registre. Il s’agit du candidat à la mairie de Kolda, Mame Boye Diao, qui a offert des cahiers à son effigie aux élèves de sa ville. Des photos qui barrent la couverture des fournitures scolaires que l’actuel directeur des Domaines a distribuées aux pauvres écoliers de sa commune. C’était lors de la rentrée des classes. Mme Néné Fatoumata Tall, ministre de la Jeunesse, elle aussi, a profité de la misère des élèves de Golf-Sud (Guédiawaye) pour les doter de cartables à son effigie. La transformation de ces fournitures scolaires en supports de propagande politique a suscité une vague de réactions hostiles de la part des acteurs de l’éducation. Parents d’élèves, enseignants, syndicalistes et inspecteurs de l’enseignement ont tous dénoncé et condamné ce que « Le Témoin » qualifie de crime éducatif. Par exemple, Birahim Seck, coordonnateur du Forum civil, et Mouhamadou Ngouda Mboup enseignant-chercheur en droit public ont tous déploré ces « meetings » politiques en milieu scolaire. « D’ailleurs, le préfet de Kolda doit inviter Mame Boye Diao à retirer ses cahiers de propagande et interdire leur utilisation par les élèves au sein des établissements publics scolaires » a exigé l’universitaire en sa double qualité d’enseignant et de parent d’élèves.
Cette levée de boucliers nous rappelle celle provoquée par « Le Témoin », alors hebdomadaire, lorsque nous dénoncions, en octobre 2013 la défunte Société industrielle de papeterie au Sénégal (Sips) pour avoir produit et commercialisé des cahiers scolaires à l’effigie des lutteurs comme Balla Gaye 2, Yékini, Mohamed Ndao Tyson et autres. Certes, à l’époque, nous n’avions rien contre l’arène sénégalaise, la lutte étant subitement devenue un véritable phénomène de société à la faveur notamment de l’engouement des sponsors qui y avaient injecté beaucoup d’argent et aussi de promoteurs très doués en matière de business. Seulement voilà, aux yeux de nombreux acteurs de l’éducation — et des journalistes du « Témoin » ! — distribuer des cahiers avec des effigies de « mbeurs » à des élèves ne pouvait que les crétiniser ! Et, surtout, à les dévier des chemins de l’école pour ceux des arènes. Comme le faisaient valoir à l’époque les acteurs de l’éducation, quand les fabricants de cahiers scolaires comme la Sips s’invitaient dans les écoles à travers la confection de manuels à l’effigie de lutteurs, cela pouvait mettre en danger le fragile équilibre mental des jeunes écoliers. Lesquels, rappelons-le, risquaient d’abandonner cahiers et livres pour aller soulever des poids et des haltères, histoire de se muscler et de devenir des lutteurs. D’où la révolte sonnée par certains enseignants et parents d’élèves contre ces cahiers faisant la publicité des personnages de lutte dont les photos barraient la couverture des cahiers d’écoliers.
Bref, nos braves lutteurs avaient fini par chasser les cartes géographiques et autres « tables de multiplication » des pages de couverture des cahiers. Contrairement à l’époque des années Senghor et Abdou Diouf où les figures emblématiques de l’histoire du Sénégal comme « El Hadji Oumar Tall », « Lat Dior », « Le Cheval Malaw », « Les rizières de la Casamance », « La Place de l’Indépendance », « L’Armée Sénégalaise » etc ornaient les belles couvertures de nos manuels scolaires. Mieux cette célèbre page dite « table des multiplications » considérée comme étant un instrument de calcul ou de mesure pédagogique a eu à occuper, de tout temps et sur plusieurs générations, la dernière page de tous les cahiers d’écolier. Et toutes marques confondues !
Le mea-culpa de la Sips en 2013
Au lendemain de la publication de notre article condamnant ces cahiers faisant la promotion de lutteurs, des directeurs d’établissements privés avaient déconseillé les parents d’élèves d’acheter ces cahiers aux personnages « anti-modèles ». Et plus tard, « Le Témoin » avait appris que le ministre de l’Education d’alors avait fait sommer la direction de la Sips d’arrêter la production de ces cahiers déjà écoulés dans le marché. Interpellée par « Le Témoin » à l’époque, Mme Marie-Jo Badiane, responsable commerciale de la Sips, déclarait ceci : « Effectivement, on reconnaît avoir fait des photos de lutteurs sur nos différents produits. Mais c’était dans un autre contexte c’est-à-dire l’avènement de Mohamed Ndao « Tyson » dans l’arène sénégalaise. On avait fait « Tyson », « Yékini » et « Balla Gaye 2 » recadrait-elle avant de reconnaitre son erreur de marketing « C’est fini, on a arrêté la production ! La Sips ne fait plus des photos de lutteurs sur ses produits…» rassurait Mme Badiane, responsable commerciale de la Sips dans nos colonnes en 2013. Si les responsables commerciaux et marketing de la Sips avaient tourné cette sombre… page de couverture montrant les « stars » de la lutte sénégalaise, c’est parce qu’ils s’étaient rendu compte que cette stratégie commerciale consistant à attirer les élèves en leur faisant miroiter les photos de « Modou Lo », « Yékini » ou « Balla Gaye 2 » ne profitait pas au système éducatif. Souhaitons que Mame Boye Diao et Mme Néné Fatoumata Tall fassent, eux-aussi, leur mea-culpa. Ou soient contraints de le faire !
LES CAHIERS NARCISSIQUES DE MAME BOYE DIAO
Candidat à la mairie de Kolda, le directeur général des Domaines a offert des cahiers à des élèves en pleine rentrée. Des fournitures scolaires à son effigie… Tollé général.
Candidat à la mairie de Kolda, le directeur général des Domaines a offert des cahiers à des élèves en pleine rentrée. Des fournitures scolaires à son effigie… Tollé général.
Générosité caritative bien ordonnée commençant par soi-même, la chanson satirique française Les Dames patronnesses enseignait, dès 1960, qu’il fallait s’identifier face à la communauté comme le bienfaiteur de tel ou tel indigent : « Tricotez tout en couleur caca d’oie / Ce qui permet le dimanche à la grand-messe / De reconnaître ses pauvres à soi. » Qui n’est pas tenté de distiller un peu de soi dans un vrai-faux mécénat mué en sponsoring, comme lorsqu’une grande marque d’ordinateur inonde de ses dons marketés le campus d’un État en voie de développement ? Quand la politique s’en mêle, l’affaire prend évidemment une tout autre tournure. Et vint le sac de riz estampillé Faure Gnassingbé ou la montre Compaoré qui ne devait pas manquer de vous rappeler l’heure d’un scrutin voué à maintenir le « beau Blaise » au pouvoir… La gêne instillée par la générosité politicienne devient scandale quand elle cible les élèves candides d’un système éducatif censé être neutre idéologiquement.
En cette période de rentrée scolaire qui prend toujours des airs de casse-tête domestique, le directeur général des Domaines sénégalais a laissé parler son portefeuille en fournissant des cahiers à des écoliers souvent déshérités.
Charité et propagande
Premier détail embarrassant : Mame Boye Diao est candidat à la mairie de Kolda à l’occasion du scrutin prévu le 23 janvier prochain. Deuxième détail fâcheux : lesdits cahiers ont été imprimés à son effigie. Voilà comment la charité devient propagande politicienne… Traditionnellement, les couvertures des précieux livrets servent de support à quelque carte géographique, illustration botanique ou table de multiplication.
Pour la rédaction de senenews.com, la grande photo qui barre la couverture des cahiers offerts « viole le paravent apolitique qui est censé couvrir l’école nationale sénégalaise ». « À cheval donné on ne regarde pas les dents. » À cahier donné, les parents d’élèves – cible indirecte de la campagne marketing – peuvent-ils jauger la couverture ? Pour leur épargner un choix délicat en temps de vie chère, des observateurs en appellent à la responsabilité de l’inspecteur d’académie. Birahim Seck, coordonnateur du Forum civil, a enjoint au ministère de l’Éducation nationale de prendre des mesures urgentes.
Pour l’enseignant-chercheur en droit public Mouhamadou Ngouda Mboup, c’est le préfet de Kolda qui « doit inviter Mame Boye Diao à retirer ses cahiers de propagande et interdire leur utilisation par les élèves au sein des établissements publics scolaires ».
Et l’universitaire de rappeler qu’en août, un responsable du mouvement d’opposition Gueum Sa Bopp, Bougane Gueye Dany, avait reçu du préfet une lettre lui demandant de retirer ses affiches publicitaires destinées à pousser les citoyens à s’inscrire sur les listes électorales. Gageons que l’indignation à l’égard d’un don propagandiste n’a pas, elle aussi, une motivation partiale…
«ABDOULAYE WADE ETAIT DANS L’ESPRIT DE KWAME NKRUMAH»
Palabres avec… José Pentoscrope, économiste et initiateur du prix Fetkann Maryse Conde
Responsable associatif et militant des Droits de l’Homme, José Pentoscrope est particulièrement sensible au devoir de mémoire. Le prix Fetkann Maryse Condé est organisé par le CIFORDOM, le Centre d’Information, Formation, Recherche et Développement pour les originaires d’Outre-mer. Cette association, basée à Massy, est présidée M. Pentoscrope. Economiste, il est l’initiateur de ce prestigieux prix. Le prix Fetkann encourage la participation de tous les citoyens du monde quels que soient leur origine, leur âge et leur nationalité. Mis en place en 2004, suite à l’application de la loi Taubira du 10 mai 2001, il récompense des productions littéraires. Il a choisi Dakar et le Théâtre Daniel Sorano pour annoncer la prochaine remise de prix prévue au mois de novembre à Paris et aussi pour célébrer les 20 ans d’existence de cet événement qui a fini par s’imposer malgré les difficultés. Rencontre avec un militant soucieux de réparer les nombreuses injustices subies par le peuple Noir.
M. Pentoscrope, parlez-nous des difficultés que vous rencontrez dans l’organisation de ce prix ?
Nous rencontrons énormément de difficultés, car c’est un prix vraiment militant. Il est né avec une forte opposition. Parce que nous nous attaquons à de vieilles citadelles. Du moins, on nous a juste pris pour des opposants qui voulaient faire bouger les lignes. Or ce n’était pas du tout le cas. Nous voulions juste être nous-mêmes et permettre à ceux qui viennent de chez nous d’avoir également un prix. C’est vraiment notre seul objectif. La plupart des jurys des grands prix sont entre eux. Le jury du prix Fetkann est un jury composé de tout le monde. Nous récusons la notion de races. Nous ne parlons jamais en termes de couleurs. Nous parlons en termes d’humains. Il n’y a pas de problèmes de couleurs ou de compétences. Les gouvernements de l’époque pensaient que le prix s’en prenait à la France par rapport à l’esclavage et à la colonisation.
D’habitude, vous sélectionnez presque une centaine de livres. Comment se fait alors le choix au vu du nombre important d’œuvres choisies ?
Cela fait aussi partie des difficultés que nous rencontrons. Lorsque vous voulez lire des livres, d‘abord il faut les acheter. La première difficulté pour une association pauvre a été de demander des subventions que nous n’obtenions pratiquement jamais. Dans un domaine comme celui-là, les portes sont le plus souvent fermées. C’est ce qui explique d’ailleurs que nous avons procédé avec prudence. Nous avons voulu d’abord avoir des fondements solides avant de nous lancer. Lorsque nous avons fait le tour des éditeurs en leur disant que nous allions lancer ce prix. Ils nous ont dit oui mais il fallait acheter. Nous avons donc constitué un petit fonds de réserve avant de démarrer. Ainsi on a attendu deux ans avant de lancer nos activités. Le Prix a été créé en 2001, mais la première dotation a eu lieu en 2004. Après avoir réussi à glaner quelque chose durant deux à trois ans, nous avons contacté les éditeurs en leur demandant deux livres pour les faire circuler parmi les membres du jury. Ils nous ont dit qu’ils peuvent nous donner un, mais qu’il faut acheter le deuxième. Ce premier écueil passé, il fallait trouver des membres du jury compétents mais également sérieux.
Cela veut-il dire que rien n’a été facile pour vous dans le cadre de l’organisation de ce prix ?
Effectivement, il a fallu toujours se battre un peu plus pour faire ses preuves et convaincre les plus sceptiques. Nous devions répondre à certains critères et faire comme tous les autres car les prix sont remis à date fixe. Nous avons choisi le mois de novembre pour notre part. Et depuis 2004, nous remettons les prix toujours la troisième semaine du mois de novembre à Paris. Et la cérémonie de remise a eu lieu au café de Flore. Ce lieu constitue un sommet de la culture française car c’était le fief de Jean Paul Sartre et Simone de Beauvoir. Pourtant, lorsque l’équipe qui organise l’événement s’est rendue pour la première fois au café de Flore pour demander d’y organiser la manifestation, la réponse fut négative. On nous a rétorqué que nous n’étions pas sérieux ni rigoureux et si on vous accepte, vous allez gâcher la réputation de la maison. On ne s’est pas découragé pour autant et nous avons cherché des soutiens dont un académicien que nous connaissions. Cet académicien nous a suivis car il était avec nous pour l’inauguration de la salle Toussaint Louverture. Il s’est dit que si nous étions capables de faire ça, nous devrions pouvoir relever ce nouveau défi sans problèmes. Ainsi, il a plaidé notre cause au niveau de la Direction du Café Flore et finalement nous avons pu accéder au lieu pour organiser notre première cérémonie de remise de prix. Finalement, le Directeur nous a reçu et a accepté du bout des lèvres de nous accueillir. Il a tenu cependant à nous dire que c’était juste pour la première édition. Mais devant le succès de la cérémonie, c’est lui-même qui m’a proposé de revenir la prochaine fois. A l’entendre, au vu de la qualité des personnes qui étaient venues mais aussi des lauréats et de la qualité des débats, nous avions bien notre place au café Flore. Depuis, nous n’avons jamais quitté les lieux. L’année dernière, nous n’avons pas pu organiser à cause du confinement. L’autre difficulté est liée à la catégorie « Jeunesse ». Lorsque vous demandez à des enseignants de lire des livres hors programme, ce n’est jamais facile et il faut les relancer constamment pour arriver à les convaincre. Voici en gros les difficultés.
Pourquoi avez-vous choisi Dakar pour votre point de presse ?
Je suis très heureux d’être au Sénégal car j’ai besoin de l’aide des Sénégalais pour ce prix. Je souhaite y trouver des ambassadeurs du prix Fetkann à cause de la qualité des intellectuels du pays de Senghor. Les Sénégalais sont des ambassadeurs de leur propre dignité. Et c’est assez suffisant pour justifier le choix de Dakar qui me ravit au plus haut point.
Quelles sont les raisons qui vous ont poussé à choisir Maryse Condé ?
En 2013, nos relations que nous avions aux Etats Unis nous ont convaincu qu’il fallait accoler quelque chose au Fetkann. La FetKann, c’est la fête de la canne à sucre. Parce qu’il faut savoir que l’esclavage a permis à nos ancêtres de travailler la canne à sucre avec beaucoup de difficultés, d’habilité et d’imagination. Ils ont réussi à la transformer en sucre. Ainsi, on a compris qu’il fallait accoler le nom d’une personnalité. Comme c’est un prix littéraire, on a forcément pensé à quelqu’un qui évolue dans le domaine de la littérature. On a alors ouvert une large concertation aussi bien en Afrique, aux Caraïbes, aux États Unis et dans l’Hexagone. Ensuite, il y a eu un certain nombre de noms qui sont sortis du lot. On a pensé à Senghor, à Toni Morrison, Aimé Césaire, René Maran, le premier lauréat du prix Goncourt etc. Finalement, on a choisi Maryse Condé qui est une grande militante et une grande écrivaine. Et surtout, ce qui est essentiel pour nous, elle avait un lien avec l’Afrique. Nous sommes panafricanistes et partisans des Etats Unis d’Afrique. C’est pour cela que j’ai bien aimé les relations que j’avais à l’époque avec le Président Wade parce qu’il avait bien compris tout cela. Il était vraiment dans l’esprit de Kwame Nkrumah qui était un des pères du panafricanisme. Ce lien important qui relie l’Afrique aux Caraïbes Maryse Condé l’a bien porté parce qu’elle a enseigné en Afrique. Ainsi, elle a eu à donner des cours au Sénégal, en Guinée, au Burkina Faso et par la suite elle a servi à l’Université de Columbia aux USA. Quand on lui a fait la proposition, elle a dit qu’elle a accepté parce que c’est un prix militant. C’est un prix qui prône l’humain. C’est aussi un prix qui prône l’égalité homme femme et elle est aussi militante féministe. Voilà la raison pour laquelle nous avons choisi Maryse Condé. Nous n’avons pas regretté notre choix parce que le monde entier a reconnu ses qualités. Puisqu’elle a eu le prix Nobel de littérature quelques temps après et d’autres grandes distinctions.
Quels sont les critères de choix pour les différents participants?
Nous recevons tous les textes qui font l’éloge de l’homme, du respect des autres et de la tolérance. Les textes que nous refuserons, par exemple, ce sont des textes de Monsieur Zemour. Des textes qui font l’apologie du racisme ne feront jamais partie de notre sélection. Nous n’avons pas de complexes à avoir car nous sommes aussi intelligents que tous les autres.
Par Abdoul Aly KANE
REFLEXIONS SUR LA CONTRIBUTION D’ACHILLE MBEMBE AU SOMMET DE MONTPELLIER
Il revient aux Africains d’en faire un continent émergent centré en priorité sur son propre marché intérieur, comme c’est le cas en Chine
L’intervention d’Achille Mbembe à Financial Afrik nous donne l’opportunité de revenir sur notre dernière chronique consacrée au Sommet de Montpellier, et particulièrement sur la contribution de l’intellectuel camerounais. Nous avons jugé utile d’y revenir, parce qu’ayant à l’esprit qu’il s’agissait d’un travail collectif matérialisé par un texte de 142 pages ayant nécessité l’organisation de « 65 débats dans 12 pays avec la participation de 5000 jeunes d’Afrique ».
De cette interview, il ressort qu’il s’est agi de “faire bouger les lignes entre la France et les sociétés civiles africaines, via une meilleure intégration de la jeunesse et des diasporas africaines dans le débat, devenant ainsi de nouveaux interlocuteurs en matière de démocratie, d’arts et de culture, de climat ». « Ce n’est pas à la France de régler les problèmes africains », estime—t-il, laissant entendre que « l’Afrique doit s’en prendre à elle-même pour n’avoir pas su développer des anticorps lui permettant de résister contre ses propres tendances autoritaires ». « Il est plus facile de blâmer l’autre que de se prendre en charge soi même » conclut-il sur ce point. Achille Mbembe dédouane ainsi ceux qui, comme les pouvoirs politiques « françafricains », ont favorisé l’installation dans la durée de dictateurs, d’empereurs et autres maréchaux en Afrique avec ce qu’on appelle des successions dynastiques. Jacques Foccart n’aurait donc aucune responsabilité dans l’évolution politique et sociale du continent, et le néocolonialisme ou France-Afrique n’aurait aucune espèce de réalité !
Nous pensons pour notre part qu’une telle posture adoptée par Mbembe n’aide pas à une quelconque redéfinition des relations entre la France et le continent, son pré-carré en particulier. Comme précisé dans notre dernière chronique, notre intérêt portait davantage sur la question économique, bien qu’elle n’englobe pas l’entièreté de la relation. En effet, en matière d’ «apurement des différends » figure en bonne place l’histoire coloniale dont il est nécessaire de rétablir les vérités en mettant à la disposition des historiens et des étudiants en particulier, les archives coloniales, et ce, dans le strict souci de panser les blessures du passé.
Pour en venir aux 13 propositions d’Achille Mbembe, nous y avons cherché en vain des propositions précises sur l’économie. S’il est vrai que dans le corps du texte sont développés les problèmes du FCFA et des investissements français, entre autres, il demeure que ces développements n’aboutissent pas à des prises de position ni de préconisations précises, donnant ainsi le sentiment de renvoyer les acteurs à leurs propres responsabilités. Nous avons retenu la proposition d’« accompagner la jeunesse africaine vers l’emploi” sans pour autant préciser les secteurs porteurs d’emplois à prioriser. Cet accompagnement se ferait en “orientant la diplomatie économique française et la coopération universitaire en faveur de la formation professionnelle et du compagnonnage”.
En renvoyant cette question aux seuls États, Achille Mbembe et ses experts dégagent en touche la question de l’industrialisation, essentielle dans la création d’emplois indispensable pour couvrir une demande potentielle d’emplois de 350 millions de jeunes à l’horizon 2030. Or l’industrialisation est liée à la mobilisation des ressources financières internes et externes, publiques et privées, pour la réalisation d’investissements et l’acquisition du know-how technologique.
À ce sujet, Achille Mbembe ne se prononce pas. L’industrialisation doit porter sur la transformation des matières premières d’Afrique. La Côte d’Ivoire s’est engagée avec un groupe chinois pour la construction de deux nouvelles usines de transformation du cacao à Abidjan et San Pedro totalisant des investissements d’environ 329 millions d’euros, sur prêts de banques chinoises ; ce groupe s’engagerait pour l’achat de près de 40 % de la production, ce qui permettrait d’échapper en partie à la spéculation sur les bourses de Londres et New York où s’échange chaque année l’équivalent de 30 fois la production mondiale de cacao.
Achille Mbembe n’ignore pas que c’est l’efficacité de ce type de partenariat qui ouvre les économies africaines à la Chine. La deuxième proposition de la contribution qu’il a coordonnée est la « transformation profonde de l’aide publique au développement ». La réflexion sur ce qu’il préfère appeler “politique d’investissement ou participation solidaire” serait confiée à un groupe de travail avec des représentants africains, des institutions internationales et de la société civile “
Lorsqu’il affirme que “des investissements de long terme se feront aussi bien dans le domaine agricole, les projets d’infrastructures, la transition numérique, l’eau potable, le climat, la santé, les arts et la culture’’ il ne précise pas comment le tout sera financé. A partir de là, on peut considérer qu’il laisse vraiment l’Afrique livrée à elle-même. On a vu ce que ce type de consigne a donné dans la politique de relance post-Covid où le partage des DTS (droits de tirage spéciaux) a abouti à l’attribution d’une portion congrue à l’Afrique, soient 33 milliards de dollars de DTS sur un global mondial de 650 milliards $.
Au Sommet de Paris, la France du Président Macron s’est engagée à militer pour une rétrocession de DTS d’autres pays « riches » en faveur de l’Afrique pour arriver à 100 milliards, sans résultats pour l’instant. Nous aurions préféré que la contribution d’Achille Mbembe fût moins générale, et davantage portée sur les aspects économiques et financiers qui représentent l’enjeu fondamental au regard du croît démographique du continent. Cette perspective n’est pas la seule affaire de l’Afrique ; elle concerne le monde entier avec des conséquences fortes sur les flux migratoires et la sécurité dans le monde. Nous attendions l’intellectuel camerounais sur des propositions fortes sur les infrastructures de développement aptes à attirer les investissements, tels les infrastructures de désenclavement non encore réalisées au niveau CEDEAO, voire de l’Afrique, et sur la question de l’énergie.
Sur l’énergie, principal facteur bloquant de l’industrialisation du continent, l’éventualité d’un partenariat solide aurait pu être mise en relief, en particulier avec la France pour l’exploitation de l’énergie nucléaire en Afrique, si l’on sait qu’elle est réputée non émettrice de CO2 (les risques inhérents à ce type d’énergie étant pris en compte après les accidents de Tchernobyl et Fukushima). Nous l’attendions aussi sur la question de la monnaie, mais celle-ci ne figure pas dans les 13 propositions finales, davantage axées sur des questions d’ordre institutionnel portant sur l’organisation de la diaspora et de la jeunesse africaines.
Par cette vision du partenariat Afrique-Europe-France, Achille Mbembe aura déçu par son manque d’engagement pour le développement de solutions concrètes au bénéfice de l’Afrique.
Les yeux du monde sont tournés vers l’Afrique. Le dernier pays en date est le Canada qui compte participer à la relance des économies africaines, suivant les traces des États-Unis, de la Chine, de la Russie, de l’Europe. Ces pays considèrent plutôt l’Afrique comme un marché émergent. Il revient aux Africains d’en faire un continent émergent centré en priorité sur son propre marché intérieur, comme c’est le cas en Chine. La ZLECAf (Zone de libre-échange continentale africaine) doit être considérée comme le premier jalon, le premier creuset d’une économie africaine complémentaire tendue vers la satisfaction des besoins d’une population de plus de 2 milliards d’individus à l’horizon 2050. Les pays tendus vers ce type de partenariat trouveraient leur compte dans l’élargissement d’un marché africain générateur d’économies d’échelles et de débouchés pour leurs produits, et la sécurité mondiale y gagnerait.
Par Mlle Fatou Kiné DIENE
PROTOTYPE D’UN FEMINISME ISLAMIQUE
À l’heure actuelle, la femme musulmane est obnubilée par des préjugés concernant la religion et son rôle en tant qu’individu social à part entière
À l’heure actuelle, la femme musulmane est obnubilée par des préjugés concernant la religion et son rôle en tant qu’individu social à part entière. D’où l’installation de l’hermétisme dans les esprits d’un bon nombre de femmes de la communauté musulmane. Ainsi, l’importance d’éclaircir le rôle social de la femme et sa mission dans la religion se révèle capitale. Cependant, même si certains militent aveuglément et fanatiquement pour le patriarcat, prônent la misogynie et prennent l’Islam comme justificatif pour asservir la femme et l’exclure des scènes décisionnelles concernant des questions d’ordre social, politique et économique, la lanterne sera éclairée intelligemment par le biais même d’exemples féminins reconnus dans le Coran. Sous ce rapport, nous tenterons, tout d’abord, de montrer la place et les devoirs de la femme dans la religion islamique, ensuite, de dire le rôle qu’elle a dans la société, et enfin, de démontrer que la conciliation de ces deux rôles ne s’exclue pas.
D’abord, la femme musulmane a des devoirs qu’elle doit accomplir envers sa religion l’Islam mais elle a été privilégiée par ladite religion qui lui a conféré une prestigieuse place et des droits propices à son accomplissement en tant qu’humain.
Premièrement, la femme musulmane doit jouer pleinement son rôle de croyante d’où l’accomplissement de ses devoirs envers sa religion. En effet, dans la religion islamique, la femme tout comme l’homme est tenue de respecter les préceptes islamiques, de suivre les indications et les recommandations divines mentionnées dans le Saint Coran et surtout de pratiquer les enseignements du Prophète Muhammad (PSL), fort heureusement, les femmes peuvent se référer aux mères des croyants (les femmes du prophète Muhammad (PSL) ) et s’inspirer de leurs parcours, de leur «modus vivendi» (manière de vivre) afin de devenir de ferventes croyantes et surtout mieux pratiquer la religion islamique. Donc Allah a institué l’égalité de l’homme et de la femme en terme de responsabilité et de devoirs par rapport à la religion. Par exemple, comme l’homme, il incombe à la femme de faire les cinq prières quotidiennes, de jeûner pendant le mois de Ramadan, d’effectuer le sacrifice du mouton lors de la fête de l’Aïd El Kabir (Tabaski) si ses moyens ne font pas défaut et de faire les pratiques religieuses surérogatoires comme les prières «nafila», pèlerinage à la Mecque…
Ainsi, à l’aune de ces exemples, la femme musulmane a le devoir de pratiquer sa religion, d’être au service de son Créateur Allah le Tout-Puissant. Elle doit aussi éviter les interdictions divines, suivre les recommandations du Coran, fonder une famille dont elle s’occupera, adopter la soumission face à son époux tout en suivant les préceptes islamiques et la raison, avoir un bon comportement conforme à celui voulu par Allah. Ainsi, elle pourra être au service de sa religion en véhiculant l’enseignement et les principes fondateurs de l’Islam mais en incarnant des qualités comme la vertu, la piété, la discrétion, la pudeur, la générosité et la pureté grâce à son éducation et son instruction. Prenons l’exemple d’Aïcha, la femme du prophète Muhammad (PSL), mère des croyants qui manifestait un goût particulier à l’apprentissage du Coran et des hadiths, à la spiritualité et qui participait brillamment à l’expansion des messages du Prophète grâce à son érudition.
De même que Al Aliya Bint At-tayib Bint Kirâne, au XIX siècle, elle enseignait la logique à la mosquée Al andalous où elle dispensait des séances pour les femmes et d’autres pour les hommes. Deuxièmement, l’Islam a gratifié la femme d’une place importante et lui a conféré des droits qui lui permettent de s’accomplir et de valoir son pesant d’or dans la société. Étant donné que l’Islam a beaucoup contribué positivement à l’émancipation du genre féminin et s’est beaucoup investi en faveur de la condition féminine en lui attribuant des droits même si certains roublards misogynes se servent de différents subterfuges pour asservir la femme en prenant comme prétexte la religion islamique qui a purement et simplement libéré la femme de nombreuses turpitudes dont elle était victime dans la période antéislamique et lui a rendu toute sa dignité humaine. Notons bien que avant l’arrivée de l’Islam, la naissance d’une fille symbolisait le déshonneur et la répugnance et présageait le malheur. Avant l’avènement de l’Islam, chez certains peuples de la Chine, d’Inde et de la Péninsule Arabique, des études ont révélé qu’on enterrait la fille vivante dès sa naissance. Pour contrer cela, Dieu dit dans le Coran : « Et lorsqu’on annonce à l’un d’eux une fille, son visage s’assombrit et une rage profondément l’envahit. Il se cache des gens à cause du malheur qu’on lui a annoncé. Doit-il la garder malgré la honte ou l’enfouira-t-il dans la terre ? Combien est mauvais leur jugement ?»
Chez les grecs, la femme était considérée comme un être impur. Le poète Hésiode l’a ainsi décrite comme « un être doté d’un cerveau de chien et de beaucoup de ruse.» Quant à Démosthène, il disait que : «Nous prenons les prostituées pour le plaisir, les amantes pour la santé quotidienne de nos corps et les épouses pour la procréation.» Quelle phallocratie ? Le pire c’est qu’en Inde chez les Manu, la femme était réduite à un objet transmissible par héritage. Malgré tout ça l’Islam est venu restaurer la dignité de la femme en lui conférant le sacerdoce, la valeur et la gloire à travers des droits rayonnants pour son embellissement moral. Par exemple, dans le Coran, une sourate est dédiée à la femme ; An Nîsa (Les femmes), ce qui justifie la place grandissime qu’occupe la femme dans la religion islamique.
De surcroît, l’Islam a insisté sur l’éducation et l’instruction de l’homme comme de la femme car il a été rapporté dans un hadith, la phrase suivante : « La quête du savoir est une obligation pour tout musulman.» Cette phrase montre qu’aucune distinction de sexe n’a été faite concernant le devoir de s’éduquer et de s’instruire. Aussi, la femme qui était utilisée comme simple objet pour satisfaire des pulsions sexuelles et enfanter a retrouvé sa valeur grâce à l’Islam qui promeut le mariage et exige une dot et un engagement d’entretenir et de subvenir aux besoins de la conjointe de la part du futur époux et surtout l’interdit l’exercice de tout acte violent sur la femme. L’Islam préconise la complémentarité et l’entente dans le couple. Ainsi, Dieu dit dans le Coran : «Elles sont un vêtement pour vous et vous un vêtement pour elles.». De plus, Allah a confié la mission la plus noble à la femme, celle de mettre au monde, l’enfantement. Du coup, force est d’admettre que la femme est le noyau de la procréation. Tout ceci montre que l’Islam a été toujours philogyne et tout ce qu’il interdit à la femme lui est nocif et compromet sa sécurité. En somme, la femme musulmane, valorisée par l’Islam grâce à l’importantissime place et l’honneur qu’il lui a conférés, a aussi des devoirs à accomplir envers ladite religion et peut être prise comme modèle spirituel car pouvant atteindre une ascension spirituelle considérable vu le caractère juste d’Allah, le plus Juste. Cependant, la femme musulmane a aussi un rôle à jouer au profit de la société car devant lui être utile.
Ensuite, la femme en tant qu’individu social à part entière est l’une des parties prenantes du développement de la société.
En premier lieu, la femme musulmane peut bel et bien être au service de sa communauté tout en étant en conformité avec sa religion. Puisque la religion, on le vit dans le cœur ; la foi et dans l’âme mais aussi en le pratiquant et elle n’est là que pour le salut du croyant aussi bien sur terre que dans l’audelà, elle n’exclue pas ce qui est bénéfique à la condition humaine et n’a nullement aucun intérêt à annuler la mission terrestre d’un croyant en se basant sur son sexe. Allah, Le Juste a assigné à chacun des hommes une mission bien définie mais aussi un don spécial pour réussir ce dessein. De là tout simplement, magnifions l’omniscience et l’omnipotence d’Allah.
La femme doit assumer son existence comme l’homme et agir pour le bien-être de sa communauté, ainsi exploiter son don divin et obtenir une rétribution gracieuse de la part de son seigneur. La femme musulmane devant sacrifier les apparences doit chercher l’agrément d’Allah en œuvrant pour le bien de son prochain. Sur ce, elle peut impacter positivement sa communauté, de par son comportement, de par ces actions et de par la personnalité qu’elle laisse apparaître. Il n’est même pas exclu qu’elle défende des causes nobles relatives aux questions temporelles et aux besoins politiques, économiques et sociaux de son époque. Du coup, la gent féminine musulmane doit faire fi de tout préjugé véhiculé par de malhonnêtes et aigries gens qui se cachent derrière les belles prisons de la tradition pour ensuite venir chercher des justifications dans la religion.
La femme musulmane a du talent à exploiter pour servir à la fois sa communauté et sa religion. Il n’est pas mentionné dans aucune sourate que la femme doit s’exempter de participer à la vie active de sa communauté. Elle doit être instruite grâce à un goût aux «fleurs cognitives», entreprenante et résiliente et surtout être patriote pour pouvoir participer aux instances décisionnelles. Par exemple, Mme Samia Suluhu Hassan qui vient d’être élue récemment Présidente de la Tanzanie, incarne le leadership féminin musulman et dirige élégamment et pudiquement son pays ex cathedra avec son voile qui symbolise l’émancipation de la femme musulmane.
En deuxième lieu, la femme musulmane a aussi le rôle d’éduquer et de transmettre les valeurs cruciales à sa progéniture pour la bonne marche de la société sur tous les plans. En effet, il incombe à la femme la tâche de donner une bonne éducation de base à ses enfants en les inculquant des valeurs, en adoptant un comportement pouvant servir d’exemple. Devant être imbue de qualités comme la piété, la gentillesse, la bienveillance, la générosité, la pudeur, le patriotisme, la mansuétude, elle doit assurer la promotion de ces qualités. Aussi, elle doit savoir allier la fermeté de son caractère et la douceur qui sont souvent déterminées par les circonstances, d’où la capacité d’adaptation face à des circonstances.
En véritable joyau social, la femme musulmane doit pouvoir allier sa vie conjugale et celle professionnelle tout en étant circonspecte. Elle doit être entreprenante pour être autonome financièrement, seconder son homme et faire résister son couple face aux affres de la vie. Tenant compte de l’influence qu’a la femme, l’avenir d’une société repose sur elle, l’éducatrice, la formatrice mais aussi l’actrice. Elle doit insuffler des ondes positives à son entourage. Elle doit être économe pour faire prospérer les biens de son mari pour que son couple puisse avoir une sécurité financière. Par exemple, la femme entrepreneure qui veille bien sur l’éducation de ses enfants et travaille sert deux fois sa communauté, d’une part, elle participe à l’essor de l’économie publique et d’autre part, elle forme quelqu’un qui serait capable de servir la société dans l’avenir en respectant les normes sociales.
En somme, l’engagement auprès de sa communauté, le patriotisme et sa fonction d’éducatrice légitiment le rôle important qu’elle a dans la société. Cependant, notons que les deux rôles qu’elle joue à savoir celui dans l’Islam et celui qui lui est assignée par la société ne s’excluent pas. Enfin, le statut quo exige la conciliation de ces deux rôles pour l’accomplissement de la femme sur les plans spirituel et social. Étant donné que la société a beaucoup évolué, de nombreuses pratiques ont été réformées, il serait plus productif que la femme musulmane accomplisse ses devoirs envers la religion et utilise à bon escient les droits que lui confère sa religion en participant à la vie active de sa communauté dans l’unique but d’impacter positivement et ainsi porter haut dans la dignité et la fierté le drapeau de l’Islam. La conciliation de ces deux rôles ferait l’idéal et sera belle et appréciée comme une orchidée. Le fait d’être une citoyenne actrice de développement n’agresse en rien la croyance et la dévotion de la femme musulmane. Prenons en compte l’exemple de femmes religieuses qui se sont démarquées en conciliant ces deux rôles. Sokhna Khadija, la mère des croyants, première croyante, première femme du prophète Muhammad (PSL) qui entreprenait dans le commerce, jouait pleinement son rôle de mère de famille et a beaucoup participé à l’expansion de l’Islam au côté de son époux.
Aussi Sokhna Mouslimatou MBACKE Bint Khadimou Rassoul fut une fervente croyante musulmane mais au-delà de son statut de femme religieuse, fille du Cheikh, elle entreprenait dans divers domaines, était une éducatrice et s’était dévouée à la cause sociale en véritable patriote. Elle fut la première femme sénégalaise qui a été élevée au grade de chevalière de l’Ordre National du Lion en 1962.
En définitive, la religion islamique a conféré à la femme une place d’honneur qu’elle rêvait durant la période antéislamique et des droits qui peuvent lui servir de tremplin pour servir à la fois Son Seigneur Allah le Tout-Puissant et la société dont elle est le noyau. Nous pensons que l’Islam a secouru la femme, l’a affranchie et a confirmé sa dignité humaine mais aussi l’a responsabilisée. Donc la femme a de quoi être fière de l’Islam et peut bien servir sa communauté tout en respectant strictement les préceptes islamiques car ceux-ci ne la contraignent que pour lui donner une liberté digne de ce nom qui ne pourra être chipée. Dès lors, on pourrait parler d’un féminisme islamique au vrai sens du terme considérant raisonnablement qu’il n y a pas une religion plus féministe que celle islamique car elle lui reconnaît toute sa dignité humaine et l’a valorisée. Cependant, le rôle de la femme musulmane dans la société évolue, se modernise et s’adapte aux contextes sociaux au grand dam des pratiques misogynes.
Par Mlle Fatou Kiné DIENE
Écrivaine, Entrepreneure sociale, Militante des droits féminins