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26 juin 2025
par Jean-Claude Djéréké
VING ANS QUE MONGO BÉTI A TIRÉ SA RÉVÉRENCE
EXCLUSIF SENEPLUS - Qu’est devenu le feu de la justice, de la liberté qu'il a légué ? Qu’avons-nous fait de son héritage ? L’Afrique honorera-t-elle un jour cet écrivain qui était à la fois un empêcheur de tourner en rond et un géant de la pensée ?
20 ans qu’il s’en est allé dans l’autre monde. 20 ans qu’il rendait l’âme et les armes à l’hôpital général de Douala, celui de Yaoundé ne disposant pas de dialyse qui puisse soigner l’insuffisance hépatique et rénale dont il souffrait. Jour triste que ce 7 octobre 2001. J’eusse aimé être là pour voir enfin son visage et lui dire adieu mais, depuis un an, j’avais déjà quitté la ville et le pays. Ce pays qu’il aimait tant mais où “les pères des indépendances sont devenus fous, les gens compétents se sont exilés, la justice et la démocratie sont truquées, la mémoire des martyrs est enterrée” (cf. ‘L’histoire du fou’, Paris, Julliard, 1994). Il y était revenu en 1991 après 32 années d’exil en France parce qu’il souffrait de se sentir hors lieu (out of place), pour reprendre la formule d’Edward Said, parce qu’il voulait apporter sa modeste pierre à la construction de l’édifice. En effet, dès qu’il posa ses valises au Cameroun, il ouvrit (avec son épouse française Odile Tobner) la librairie des peuples noirs, se lança dans la culture des tomates et l’élevage des porcs dans son village, écrivait régulièrement dans les journaux proches de l’opposition pour dénoncer aussi bien les dérives du régime Biya que la résignation qui poussait la population à noyer ses soucis dans l’alcool et le sexe.
C’est dans les années 1950 que Mongo Beti (l’enfant beti) commença à évoquer les problèmes du pays. Ceux qui ont lu ‘Ville cruelle’ comprendront aisément de quoi nous sommes en train de parler. Publié en 1954 par Présence Africaine du Sénégalais Alioune Diop sous le pseudonyme d’Eza Boto, le roman nous fait voir les abus et exactions que subissaient les Noirs pendant la colonisation. On y découvre vite que Banda, le héros, rejette cette société où les Blancs ont plus de privilèges que les Noirs et font ce que bon leur semble, où justice n’est pas rendue au Noir quand il est spolié ou insulté par le Blanc, où le prêtre blanc dénonce le Noir qui la veille est venu confesser le tort qu’il a causé à son patron blanc. Mais on y admire aussi la solidarité des Africains : d’abord, celle des cinq femmes qui aident Banda à porter son cacao jusqu’en ville et qui rendent visite à sa mère à Bamila pendant son emprisonnement ; ensuite, celle des ouvriers qui se mettent ensemble pour donner une correction au patron blanc qui refusa de payer leur salaire. On est surtout heureux et fier de voir Banda tenir tête aux contrôleurs, même si ces derniers finissent par voler son cacao.
Mongo Beti reviendra à la charge en 1956 avec ‘Le pauvre Christ de Bomba’ que l’on peut considérer comme une description satirique du monde missionnaire et colonial à travers les mésaventures du Révérend Père Supérieur Drumont. Celui-ci voulait “civiliser” et évangéliser les Africains, croyait que ces derniers étaient acquis à sa cause, se prenait pour un Messie, mais le RPS ne réussira pas sa “mission” et c’est le cuisinier Zacharie qui lui donnera les raisons de son échec : “Les premiers d’entre nous qui sont accourus à votre religion, y sont venus comme à une révélation, une école où ils acquerraient la révélation de votre secret, le secret de votre force, la force de vos avions, de vos chemins de fer, est-ce que je sais, moi… le secret de votre mystère, quoi ! Au lieu de cela, vous vous êtes mis à leur parler de Dieu, de l’âme, de la vie éternelle, etc. Est-ce que vous vous imaginez qu’ils ne connaissaient pas déjà tout cela avant, bien avant votre arrivée ? Ma foi, ils ont eu l’impression que vous leur cachiez quelque chose. Plus tard, ils s’aperçurent qu’avec de l’argent ils pouvaient se procurer bien des choses, et par exemple des phonographes, des automobiles, et un jour peut-être des avions. […] Voilà la vérité, Père ; le reste, ce n’est que des histoires.” Mongo Beti défend ainsi l’idée que le missionnaire ne fut ni “civilisateur” ni “évangélisateur” mais auxiliaire ou complice du colon dans certains pays africains, ce que résume bien Fabien Eboussi Boulaga quand il écrit : “Pour différentes l’une de l’autre qu’elles soient, l’évangélisation et la colonisation ne s’opposent pas, elles s’accordent même sur la tâche de redressement de l’homme arriéré et déchu et elles ne se distinguent que comme deux faces d’une même pièce de monnaie. En somme, chacun s’est servi de l’autre, chacun gardant son but propre. Mais ce fut au détriment des Africains.” (cf. À Contretemps. L’enjeu de Dieu en Afrique’, Paris, Karthala, 1991, p. 121).
Le romancier camerounais était comme obsédé par le “devoir d’être toujours aux côtés des humiliés qui luttent” (Che Guevara) et de faire entendre leur cri. Une obsession qui le rendait sévère vis-à-vis du Guinéen Camara Laye qui, à ses yeux, parlait peu des souffrances des peuples africains. Il l’accusait notamment de “se complaire dans l’anodin et surtout le pittoresque le plus facile [...], d’ériger le poncif en procédé d’art, de s’acharner à montrer une image stéréotypée de l’Afrique et des Africains : univers idyllique, optimisme de grands enfants, fêtes stupidement interminables” (André Djiffack, ‘Mongo Beti, le Rebelle’, vol I, Paris, Gallimard, 2007, pp. 17-18). Parce que “la réalité actuelle de l’Afrique noire, sa seule réalité profonde, c’est avant tout la colonisation et ses méfaits”, Mongo Beti ne pouvait que se dresser contre la colonisation. ‘Main basse sur le Cameroun, autopsie d’une décolonisation’ (Paris, Maspero, 1972) lui en fournira l’occasion. Mais l’essai, qui fustige la dictature d’Ahmadou Ahidjo et le contrôle des pays africains par la France malgré les “indépendances” de 1960, est aussitôt censuré par un arrêté du ministre de l’Intérieur français, Raymond Marcellin, sous la pression du gouvernement camerounais. C’est en 1976 que l’auteur et l’éditeur obtiendront l’annulation de l’arrêté d’interdiction.
Deux ans plus tard, Mongo Beti met sur le marché ‘Peuples Noirs, Peuples africains’. La revue bimestrielle, où publiera l’exilé Laurent Gbagbo, paraîtra jusqu’en 1991. Farouchement opposé aux ingérences étrangères en Afrique, à l’influence de Jacques Foccart sur certains dirigeants africains, à la coopération franco-africaine, “une vaste escroquerie qui ne profite qu’à la France”, à la francophonie qui, pour lui, est “une institution pernicieuse et destructrice”, Alexandre Biyidi Awala n’en fustige pas moins Ahidjo que Paris juge plus accommodant que les leaders nationalistes de l’Union des populations du Cameroun (UPC). Il n’est pas plus tendre avec Paul Biya, “une créature de François Mitterrand et un chef d'État fantôme sous lequel la justice est devenue une farce permanente et sinistre”.
Après lecture de ‘Ville cruelle’, de ‘Le pauvre Christ de Bomba’ et d’autres ouvrages, il est difficile de ne pas penser avec André Djiffack qu’il y a chez Mongo Beti “comme un mélange de Socrate par l’élévation de l’esprit, de Voltaire par l’effronterie à l’égard des pouvoirs institués, de Sartre par le militantisme impertinent et de Césaire par la lutte anticoloniale en vue de l’émancipation du monde noir” (cf. ‘Mongo Beti le Rebelle’ pp. 17-18), difficile de ne pas tomber sous le charme de “ce Prométhée camerounais qui nous lègue le feu” (Boniface Mongo Mboussa).
Qu’est devenu le feu de la justice, de la liberté et de la vérité légué par Mongo Beti ? Qu’avons-nous fait de son héritage ? L’Afrique digne et debout honorera-t-elle un jour cet écrivain qui était à la fois un empêcheur de tourner en rond et un géant de la pensée et de l’écriture ?
ORANGE MONEY CHERCHE LA RIPOSTE EN PLEINE GUERRE DES PRIX
L'activité de paiement mobile est devenue en treize ans une composante essentielle du succès d'Orange en Afrique. Mais l'arrivée récente de Wave qui a cassé les prix en divisant les commissions par trois, oblige l'opérateur à une riposte vigoureuse
Les Échos |
Sébastien Dumoulin |
Publication 20/10/2021
Dans les ruelles en terre battue des faubourgs d'Abidjan, les boutiques de « mobile money » sont omniprésentes. On les identifie de loin, grâce aux fanions colorés et aux affiches qui recouvrent leurs devantures, faisant la promotion des applis de paiement des opérateurs télécoms : Orange Money, MTN Money, Moov Money. Depuis quelques mois, un nouveau venu a ajouté ses encarts publicitaires à côté de ceux des telcos : Wave.
La mascotte de cette start-up américaine - un petit pingouin - est incongrue sous les tropiques. Mais le fait est que son apparition - d'abord au Sénégal à l'été 2020, puis en Côte d'Ivoire cette année - a glacé la concurrence. La jeune pousse casse les prix. En moyenne, le taux de commission des opérateurs télécoms sur les transactions de « mobile money » avoisine les 3 % et peut monter à 10 % sur les retraits de petits montants. En pratiquant la gratuité totale des retraits et un taux unique de 1 % sur les transferts, Wave divise grosso modo ces prix par trois.
Une attaque violente
Ce n'est pas la première fois qu'un acteur tente de disrupter le marché du « mobile money ». Mais après avoir levé 200 millions de dollars à la rentrée auprès de plusieurs fonds, dont Partech et Sequoia Heritage, le risque posé par la start-up new-yorkaise est devenu plus que crédible.
SAUVER LA MÉMOIRE DU PROCÈS DE L'ASSASSINAT DE SANKARA POUR L'HISTOIRE
nous exhortons le Tribunal militaire à revenir sur sa décision et à accepter que le procès soit filmé et confié aux archives nationales du Burkina Faso à des fins documentaires et historiques
Le procès de l’assassinat de Thomas Sankara et de ses compagnons s’est ouvert le 11 octobre 2021 dans un engouement affirmé du peuple burkinabè. Un procès historique attendu depuis 34 ans par l’opinion national, africaine et internationale. L’importante couverture médiatique du premier jour du procès, avec un nombre important de journalistes venus du monde entier, n’a fait que confirmer le caractère historique de ce procès.
Nous, historiens, chercheurs, juristes, artistes, journalistes, militants associatifs ou politiques, citoyens, du monde entier, avons appris avec stupeur que, malgré la réquisition favorable de la procureure arguant du « but démocratique, historique et mémoriel », le Tribunal militaire a refusé que le procès soit filmé et enregistré. De nombreuses voix se sont élevées au Burkina Faso pour demander que le procès soit diffusé, et filmé en vue de la constitution d’archives historiques.
Dans un communiqué daté du 15 octobre 2021 Mariam Sankara s’élève vigoureusement contre cette décision : « Nous osons croire que le Tribunal Militaire se ravisera et espérons qu’il accédera à cette requête. Car il s’agit non seulement de juger les acteurs de ce crime, mais également d’informer le peuple, de mettre en mémoire, avec les moyens de communication modernes, ce moment important de notre Histoire collective et individuelle. Nous devrons y tirer à jamais des leçons en termes de respect mutuel et du caractère sacré de la vie pour les générations actuelles et futures. »
Le procès comporte en effet, des enjeux tant pour l’histoire du Burkina Faso, de l’Afrique et au-delà, que pour la construction nationale. C’est pourquoi, nous exhortons le Tribunal militaire à revenir sur sa décision et à accepter que le procès soit filmé et confié aux archives nationales du Burkina Faso à des fins documentaires et historiques. Nous exhortons également les avocats de la défense à ne pas s’y opposer.
A défaut d’une diffusion immédiate de l’archive audiovisuelle du procès, sa réalisation est un impératif historique, quitte à déterminer des conditions spécifiques d’accès.
Il n’est pas trop tard pour sauvegarder la mémoire du procès pour l’histoire et la construction nationale burkinabè. Toute autorité et toute bonne volonté pouvant aider à cela sont vivement encouragées.
Ra Sablga Seydou Ouedraogo, Chercheur, Directeur exécutif de l’institut FREE Afrik, Ouagadougou
Brian Peterson historien, Albany NY, auteur de Thomas Sankara A Revolutionary in Cold War Africa
Amber Murrey, géographe politique, Oxford, éditrice de A certain Amount of Madness, The Life, Politics and Legacies of Thomas Sankara, Oxford,
Bruno Jaffré, auteur d’ouvrages sur le Burkina et la Révolution burkinabè, animateur du site thomassankara.net Paris
Premiers signataires : Mariam Sankara, Alfred Sawadogo, Zakaria Soré, Smockey, Robin Shuffield, Giulio Chinappi, Issa N’Diaye, Blandine Sankara, Paul Sankara, Aïda Kiemdé George, Francis Kpatindé, Horace Campbell, Aziz Salmone Fall, Leo Zeiling, Dr. Moussa Traore, Ama Biney, Dr. Harper-Shipman Takiyah, Lucie Viver, Luc Damiba, Rémi Carayol, Moussa Diallo, Patrizia Donadello, Koulsy Lamko, Gnaka Lagoke, Augusta Conchiglia, Maurice Duval, Pierre Ouedraogo, Juan Montero Gomez
Soutenu par : Réseau international Justice pour Sankara justice pour l’Afrique, Balai citoyen, AJB (Association des journalistes du Burkina), SURVIE, CADTM (Comite pour l’annulation des dettes illégitimes) , Comité Sankara de Montpellier, Ligue des Jeunes (Burkina), REPPADD-NIGER, Per a Pace, Comitato Sankara italiano, AFASPA, FuturAfrik
ESSOUFLEMENT DE LA DÉMOCRATIE, INTERNATIONALE REVANCHE DES DAMNÉS DE LA TERRE
Depuis le paradigme du discours de La Baule en 1990, et l’injonction à l’ouverture de Mitterrand aux États africains, se développent les imperfections d’une démocratie importée : mal traduite, captive des cercles décisionnaires, orientée vers l’extérieur
Partout dans le monde à des degrés divers, le raidissement des opinions publiques et la montée des populismes sont les symptômes d’une crise majeure de la représentation. Malgré les asymétries, les sensibles nuances des contextes, et la différence de fortune entre le Nord et le Sud en matière d’acquis démocratiques, une lame de fonds commune est perceptible. Dérèglement planétaire incarné par le rétrécissement des libertés, la promotion des identités nationales, les soulèvements populaires, l’éclatement des repères classiques de lecture post-guerre froide. Lignes de fracture enchevêtrées dans un contexte de crise sur tous les horizons, migratoire, économique, sanitaire, écologique, géopolitique. Partout, les institutions démocratiques semblent arriver à un tournant, dont le signe le plus clinique est la désaffection envers les gouvernants, la défiance vis-à-vis d’eux, voire leur rejet. Un moment porté globalement par les déshérités, déclassés, et perdants de la mondialisation.
Un mouvement qui a commencé dans l’hémisphère Sud
Si l’accession au pouvoir de Donald Trump aux USA, mais plus encore son départ mouvementé, a cristallisé les termes de cette défiance vis-à-vis des élites et des structures délibératives, ils n’en restent pas moins une seule des pièces – l’ultime pièce – d’un puzzle au spectre plus large.
Les signes précurseurs de ce mouvement de fond se sont curieusement déclarés d’abord dans l’hémisphère Sud. Printemps arabes, émeutes de la faim, coups d’États, émergence de vigies citoyennes, ont reconfiguré les paysages politiques et resitué la quête démocratique au cœur des urgences, particulièrement en Afrique. Si l’émergence de cette nouvelle donne n’a pas récolté les fruits tant attendus, que cette énergie inédite promettait pourtant, elle a constitué le ferment d’un désir profond, populaire, issu de catégories longtemps exclues du pouvoir et de son expression classique de démocratie institutionnelle.
DIX ANS APRÈS, LES CIRCONSTANCES DE LA MORT DE KADHAFI RESTENT UN MYSTÈRE
« Kadhafi a été ciblé par un raid aérien de l'Otan, notamment des Français et des Britanniques. (...) Il a été blessé à la tête, a essayé de fuir et a été cueilli par plusieurs révolutionnaires. C'est après que les conditions de sa mort sont ambigues. »
C’était il y a dix ans jour pour jour : le 20 octobre 2011, le leader libyen Mouammar Kadhafi était tué. À l’époque, les rebelles du Conseil national de transition (CNT), appuyés par Washington, Paris et Londres, se battent contre l’armée libyenne. Tripoli est aux mains du CNT et Mouammar Kadhafi en fuite. Les rebelles soupçonnent qu’il est retranché à Syrte, sa ville d’origine et lancent un dernier assaut. Dans les heures qui suivent, on apprend sa capture, puis sa mort. Jusqu'à aujourd’hui, les circonstances de son décès ne sont toujours pas claires.
20 octobre 2011. Il est 13h15, heure locale. Un commandant du CNT, Abdel Madjid, annonce la capture de Mouammar Kadhafi. Après quarante-deux ans de régime autoritaire, celui que l'on nomme le « Guide de la Révolution » est retranché à Syrte, son dernier bastion. À bord d'un convoi de véhicules, il tente de quitter la ville. Le convoi est bombardé par les forces de l'Otan.
Mouammar Kadhafi tente de fuir. Certains affirment qu'il aura tenté de se cacher dans des égouts avant d'être capturé par des combattants du CNT. Les premières photos de sa capture le montrent le visage ensanglanté, désorienté. Mais vivant.
Quarante minutes plus tard, ce même commandant du CNT déclare que Mouammar Kadhafi serait mort, qu’il aurait succombé à ses blessures. Il faut attendre encore une heure avant d'avoir une confirmation de son décès. Que s'est-il passé ?
ACHEVEMENT DE SAMORY DE OUSMANE SEMBENE, DIVERGENCES ENTRE MOUSSA SENE ABSA ET PR KASSE
Réaliser le film Samory, «l’œuvre de la vie de Sembène», pour lui rendre un hommage. Cette idée à peine agitée, a été balayée d’un revers de la main par le professeur Maguèye Kassé
Réaliser le film Samory, «l’œuvre de la vie de Sembène», pour lui rendre un hommage. Cette idée à peine agitée, a été balayée d’un revers de la main par le professeur Maguèye Kassé. Qui estime que personne ne peut le faire comme le père du cinéma africain. Ce que Moussa Sène Absa réfute. Pour lui, c’est bien possible et qu’il suffit de le faire de manière collégiale.
Cela fait 14 ans que le père du cinéma africain repose à Yoff. Pour autant, son œuvre, bien que précurseur sur bien des aspects, n’est pas encore achevée. Il reste, entre autres, Samory dont 2 tomes ont été rédigés par l’aîné des anciens avant sa mort, n’est toujours pas sorti. Si d’aucuns par respect ou admiration pour lui estiment que personne à part Ousmane Sembène n’est capable de le réaliser, d’autres affirment le contraire. C’est la quintessence du panel Ousmane Sembène en question organisé à la mairie de Ouagadougou hier. Que reste-t-il de l’héritage de Ousmane Sembène ? C’est une question à laquelle nombreux sont les jeunes qui s’y intéressent. A cet effet, un panel a été organisé. Intitulée Ousmane Sembène en question, cette rencontre a réuni des anciens compagnons du réalisateur, des acteurs et des universitaires pour analyser l’écriture visuelle du réalisateur et le cinéma de Sembène et la postcolonialité. Mais les débats ont été surtout marqués par l’achèvement de Samory.
C’est le Secrétaire général du ministère de la Culture qui a fait la proposition. «Il faut penser à achever les œuvres de Ousmane Sembène. Qu’on réunisse les personnes ayant les qualités pour le faire, vu que Samory a été déjà rédigé», a déclaré l’officiel sénégalais. Une affirmation qui est perçue comme un blasphème par le professeur Maguèye Kassé. Pour lui, personne ne peut réaliser Samory comme l’a voulu Ousmane Sembène. «Je le dis sans ambages : ce que j’ai appris de Sembène, ce qu’il m’a dit, les tomes que j’ai lus de Samory, je dis que personne ne peut avoir la trajectoire, l’idée que Sembène avait pour faire Samory», a-t-il sèchement déclaré.
Moussa Sène Absa n’est pas d’accord avec l’universitaire. Pour lui, le projet est réalisable à condition de le faire de manière collégiale. «On meurt tous avec nos idées. Nous n’avons pas les mêmes rêves. Par contre, les histoires sont universelles», a-t-il répondu au professeur Kassé. Avant d’ajouter : «Si le Sénégal se mobilisait avec la sous-région, que ça ne soit pas un film sénégalais mais ouest-africain parce que Samory, ce n’est pas que pour le Sénégal, la Guinée ou le Mali. C’est pour un empire, donc tous les fils de cette région se mobiliseraient en mutualisant les moyens, c’est un film de 4 fois 2 heures. C’est une épopée. On peut prendre un Sénégalais, Malien, Guinéen et ainsi de suite et créer une dynamique pour faire un grand film pour rendre hommage à Ousmane Sembène. Si nous ne le faisons pas, d’autres vont le faire.»
Pour le professeur Wone, «il ne faut pas se faire d’illusions en pensant pouvoir faire Samory à la place de Sembène». Le chercheur explique sa pensée sur le sujet avec ces mots : «Samory a été présenté comme le projet de sa vie. Il est allé très loin dans la préparation.» Il le disait lui-même : «Samory concerne toute l’Afrique et était d’un budget assez lourd et il est parti sans le réaliser. On peut donner corps de plusieurs manières à ce projet.
Sembène a joué un rôle important dans la carrière de beaucoup de grands réalisateurs et producteurs.» Il ajoute : «Qui peuvent trouver le moyen de se réapproprier cette œuvre à leur façon car on ne peut pas faire Samory comme l’aurait fait Sembène. On peut lui rendre hommage en se projetant à travers Samory ou une grande fresque qui est proche du rêve de Sembène (…) ce qui est intéressant c’est ce que ce débat peut susciter aussi bien chez les compagnons de Sembène que chez la nouvelle génération.»
AWADI, OUMOU SY, KOUTHIA ET GERMAINE ACOGNY RÉCOMPENSÉS
Awadi, Oumou Sy, Kouthia et Germaine Acogny ont été décorés au Burkina Faso lors de la 27ème édition du Fespaco
Malick GAYE (Envoyé spécial à Ouaga) |
Publication 20/10/2021
Awadi, Oumou Sy, Kouthia et Germaine Acogny ont été décorés au Burkina Faso lors de la 27ème édition du Fespaco.
C’était à la 3ème édition des Celebry days organisée en marge du Fespaco. Si Awadi a reconnu être surpris par cette récompense, il y voit la célébration de l’amitié entre les deux pays. «Franchement, j’ai été surpris. Rokhaya Niang m’a demandé de venir. Je viens faire acte de présence et je découvre ça. C’est beaucoup d’honneur. Cette récompense célèbre l’amitié entre nos deux pays, nos jeunesses. C’est le symbole d’une vraie amitié», a déclaré le musicien.
Même son de cloche chez Oumou Sy, la costumière. «C’est beaucoup de plaisir et d’émotion. Le Burkina et le Sénégal c’est le même pays. C’est la première fois qu’une costumière est décorée. C’est une forme de reconnaissance de notre travail car il y a beaucoup de domaines dans le cinéma», a-telle déclaré. Cette récompense vient reconnaître les efforts que ces 4 nommés ont réalisés tout le long de leurs carrières. Une autre victoire du Sénégal !
LUMIERE SUR LA VIE SOMBRE DES MIGRANTS EN FRANCE
Pénétrer la triste vie des sans-papiers dans un taudis en France, c’est ce qu’offre la réalisatrice Mame Woury Thioubou à travers «5 étoiles»
Malick GAYE (Envoyé spécial à Ouaga) |
Publication 20/10/2021
Pénétrer la triste vie des sans-papiers dans un taudis en France, c’est ce qu’offre la réalisatrice Mame Woury Thioubou à travers «5 étoiles». Son documentaire en compétition au Fespaco a été projeté lundi dernier. C’est un rêve qui se réalise pour la journaliste-réalisatrice.
C’est un rêve qui se réalise pour Mame Woury Thioubou. Son documentaire primé à Carthage, lors des Journées cinématographiques, a été projeté au Fespaco. En compétition officielle dans la catégorie des documentaires, la réalisatrice est largement revenue sur les motivations qui l’ont poussée à mettre en lumière le quotidien de migrants en France. «Ces jeunes quittent nos pays pour l’Europe, ils prennent la route du désert, ils passent par la Libye, ils traversent la Méditerranée pour arriver en Italie. Ensuite, ils traversent les montagnes pour aller en France. Certains se retrouvent à Lille. Leur situation dans ce squat abandonné où ils vivent m’a interpellée. Je me suis demandée pourquoi ces jeunes prennent-ils tous ces risques ? J’ai voulu connaître leurs motivations», a expliqué Mame Woury Thioubou après la séance de projection.
5 étoiles s’est évertué à braquer une lumière sur ce que vivent ces jeunes. Qui, après avoir vécu, pour certains, les affres des prisons libyennes où escroquerie et torture faisaient partie de leur quotidien, atterrissent en France avec la tête pleine de rêves. Dans l’Hexagone, c’est un autre combat qu’ils doivent gagner.
En effet, pour ceux qui arrivent à Lille, la maison d’accueil s’appelle 5 étoiles. C’est une ancienne usine abandonnée que ces jeunes occupent. Un taudis ! Dans cette ville, ils découvrent la face hideuse de l’Occident, loin des clichés que la télévision diffuse. Regard raciste, assistance permanente, avenir incertain, voilà entre autres le quotidien de ces jeunes. Qui abandonnent tout en quête de l’eldorado. «C’est une vie d’assistance permanente qui ont ces jeunes dans cette usine abandonnée. Et quand ils arrivent dans des associations de sans-papiers, ce n’est pas la fin de la galère, car ils trouvent des gens qui, pendant des années, cherchent de se régulariser.
Après le tournage du film, j’ai plus approfondi mes questionnements. Au départ, je voulais savoir pourquoi ces jeunes prennent-ils autant de risques ? En parlant avec eux, on se rend compte que leurs motivations sont profondes. Ce sont des choses ancrées en eux. Ce sont des problèmes qui interpellent la société. On doit réfléchir ensemble sur cette question», a affirmé Mame Woury Thioubou. Ce film militant pose le débat sur la place de l’humain dans ce monde globalisé. En effet, après l’avoir regardé, on ne peut que s’interroger sur le rôle de chacun dans cette tragédie. Qu’a-t-on fait pour instaurer cette situation qui pousse les jeunes à risquer leur vie pour le bien matériel ?
Pour la réalisatrice, c’est cette question que tout le monde devrait se poser pour avoir la solution. «J’avais des problèmes pour filmer des gens à visage découvert. Ils n’acceptaient pas de se faire filmer pour des raisons socioéconomiques», a expliqué Mame Woury Thioubou.
«QUE BENNO M’INVESTISSE OU PAS JE SERAI CANDIDAT»
L’inspecteur principal des Impôts et domaines, Abdou Ben Sambou, sera-t-il le 4ème maire de Thionck-Essyl ? Telle est en tout cas la volonté d’une bonne frange de la population de la commune
L’inspecteur principal des Impôts et domaines, Abdou Ben Sambou, sera-t-il le 4ème maire de Thionck-Essyl ? Telle est en tout cas la volonté d’une bonne frange de la population de la commune.
Des jeunes, des femmes et des notables qui, pour les besoins de la déclaration de candidature du responsable apériste de Thionck-Essyl, ont sonné la mobilisation et enclenché la matérialisation d’un tel dessein. Pour Ben Abdou Sambou, Thionck-Essyl, par cette mobilisation, est définitivement ancrée dans le Benno bokk yaakaar et est derrière le président de la République, Macky Sall. Une démarche, en outre, que l’intéressé assimile à un nouveau pacte scellé avec ses concitoyens.
«Je serai le candidat du changement et je suis prêt pour le changement. Que personne ne se dresse contre la volonté du peuple de Thionck-Essyl, cela nous ne l’accepterons pas», avertit d’emblée Ben Abdou Sambou.
L’inspecteur principal des Impôts et domaines dit être motivé par le travail accompli sur le terrain en une année d’engagement politique où il a su faire adhérer la population à un certain nombre d’actions concrètes, ciblées sur le développement. «Et, le résultat est qu’en une année seulement, nous avons su susciter l’espoir chez ces populations. Nous allons nous battre pour soulager les souffrances des nôtres. Je ne trahirai jamais l’espoir et les aspirations des populations de Thionck-Essyl à un mieuxêtre ; c’est le sens de mon engagement», a-t-il martelé en marge de sa déclaration.
Suffisant pour avertir, du coup, qui de droit que sa candidature est plus que jamais irréversible. «Si la coalition m’investit, je suis candidat, si la coalition ne m’investit pas, je suis candidat. Car, nous ne pouvons pas trahir cet espoir que nous incarnons aux yeux de la population», assène-t-il. . Le fils de l’ancien gouverneur de Dakar, Saliou Sambou, dit être loin de la démagogie, de la politique politicienne. Avant de s’interroger sur ce que les autres, ses potentiels adversaires au sein de Benno et de l’opposition, ont réalisé avant son avènement sur le champ politique.
Une manière, pour lui, de brandir les réalisations déjà à son actif et de réitérer son engagement à les poursuivre au profit des jeunes, des femmes, des religieux, etc. «C’est dire que nous sommes en train de signer définitivement un pacte avec la population de Thionck-Essyl. Et c’est une candidature pour le bien-être des populations de Thionck-Essyl. Et je ne reculerai pas et il faut que ce soit très clair», estime Sambou.
MOUSTAPHA SY CRÉE UN MALAISE
La forte délégation envoyée par la coalition Yewwi askan wi au Gamou du champ de courses à Tivaouane, n’a pu être reçue par le leader du Parti de l’unité et du rassemblement. De quoi faire douter les alliés politiques de sa fiabilité
La forte délégation envoyée par la coalition Yewwi askan wi au Gamou du Champ de courses à Tivaouane, n’a pu être reçue par Serigne Moustapha Sy, le leader du Parti de l’unité et du rassemblement (Pur) et chef religieux. Pire, ce dernier n’a même pas adressé publiquement un mot à ses hôtes du jour. Ce qui pousse ces derniers à se demander si le chef des Moustarchidines est toujours un allié fiable.
La célébration du Mawlid au Champ de courses de Tivaouane a révélé un malaise au sein de la coalition politique Yewwi askan wi (Yaw). Un malaise qu’aucun des protagonistes ne veut encore assumer publiquement, même si en coulisse, des dents grincent. Les choses ont commencé avec l’arrivée à Tivaouane de la délégation des leaders politiques membres de différentes structures représentées dans Yaw.
Alors qu’il était entendu qu’ils seraient reçus par Serigne Moustapha Sy, le leader des Moustarchidines a invoqué un agenda chargé et d’autres contraintes, pour laisser son fils Mame Cheikh Tidiane accueillir ses hôtes. Quelque peu déçus par cet accueil inattendu, les membres de la délégation, parmi lesquels on a remarqué Khalifa Sall, Ousmane Sonko, Aïda Mbodj, Barthélemy Dias et Ahmet Aïdara, entre autres, ont préféré prendre leur mal en patience, se disant sans doute que le chef religieux allait «se rattraper» au cours de la cérémonie officielle. Quelle ne fut leur surprise de voir que l’annonce de leur présence a été laissée aux bons soins de Cheikh Tidiane Ndiaye, qui a suppléé Issa Sall comme député du Pur. Ce dernier a salué au Champ de courses, la présence importante de ces leaders de Yewwi askan wi. Et cela c’en est arrêté là.
Ceux qui attendaient de Serigne Moustapha que, au cours de son discours, il fasse une quelconque mention de son engagement politique aux côtés des présents, sont restés sur leur faim. Tout le monde a remarqué que le leader de la Diwanul Moustarchidine wal Mourstarchitay, d’habitude si disert en matière de digressions politiques, n’a nulle part, au cours de la nuit, brossé un sujet ayant un quelconque rapport avec les nouvelles alliances qu’il a tissées. Bien que déçus, ses nouveaux amis politiques sont resté zen devant les journalistes, même si en privé, certains n’ont pas manqué de pester contre ce qu’ils assimilent à «un manque de respect notoire». Au point que certains d’entre eux se sont interrogés à voix haute : «Moustapha Sy est connu pour ses changements d’humeur et d’orientation. Son attitude cacherait-elle un quelconque revirement prochain ?» Du côté de la Diwanu Moustarchidina, on minimise et relativise.
Pour ses partisans, le marabout n’a nullement manqué de respect à ses hôtes, puisqu’il les a fait recevoir par son fils. Certains indiquent que «nul ne peut dévier le Serigne de son calendrier, et il en est le seul maître». Ils comprennent que cela puisse dérouter des personnes peu au fait du comportement de leur leader, mais pour les Moustarchidines, il n’y aurait rien de plus normal que cela.
Poussés dans leurs retranchements, certains se lâchent tout de même un peu, en faisant remarquer qu’ils ont été quelque part, floués : «Quand nous venions dans la coalition, on nous l’avait présentée comme un ensemble de quatre grands partis représentatifs. Mais on se retrouve aujourd’hui avec un conglomérat dans lequel on côtoie des gens qui ne représentent même pas leur quartier et qu’on doit traiter comme des égaux.»
D’autres se plaignent en plus, des velléités des partis comme Pastef, qui voudraient imposer leurs candidats dans des localités comme Tivaouane et d’autres, que le Pur estime devoir lui être naturellement dévolues