Dans un long message adressé aux Sénégalais et au mouvement sportif en particulier, le premier vice-président de la Fédération sénégalaise de football, Saër Seck, qui avait déclaré sa candidature à la succession de Me Augustin Senghor avant de s’engager dans une voie de consensus autour de ce dernier, est revenu sur ses pas. A une semaine de l’Assemblée générale élective de la fédération, prévue le 7 août prochain, Saër Seck revient sur les circonstances qui l’ont poussé à accepter l’accord signé à Eden Roc, siège du CNOSS, égratigne Augustin Senghor dans la conduite des destinées du football sénégalais, tire sur Mady Touré, qu’il juge coupable d’avoir été irresponsable en s’épanchant sur sa position et ignore royalement le quatrième candidat déclaré, Mbaye Diouf Dia… Emedia vous propose ici l’intégralité de la lettre du président de l’Institut Diambars.
« Chers compatriotes
Amis sportifs
Le 10 juillet, je vous faisais part de ma décision de présenter ma candidature à la présidence de la fédération sénégalaise de football (FSF), lors de l’élection prévue le 7 août prochain. Je vous avais entretenu des motivations de cette candidature » fruit d’une mûre réflexion mais aussi d’une longue expérience dans les instances dirigeantes de notre football « .
Je me proposais de partager avec vous » un programme à la fois ambitieux et réaliste qui aurait besoin non pas seulement d’un assentiment de votre part, mais d’une appropriation et d’un accompagnement pour une mise en œuvre bénéfique aux besoins de tous
Chers acteurs du football et chers amis sportifs, j’ai, par la suite, immédiatement été saisi par un comité de médiation en vue de trouver un consensus. Je me dois, à la vérité, de vous informer que le consensus en question se devait, dans son esprit, d’être le condensé des axes programmatiques des différents candidats ainsi que des propositions d’acteurs et d’éminentes personnalités expérimentées du football sénégalais.
C’est seulement ensuite que ce comité chargé du consensus devait définir le processus pour désigner la personne qui devrait diriger le consensus comme Président de la Fédération Sénégalaise de Football.
J’ai fait beaucoup d’efforts et consenti d’énormes sacrifices pour ne pas, à ces moments là, « polluer » la campagne électorale de notre candidat Augustin Senghor à la CAF avec une campagne domestique mais également pour ne pas être celui dont l’attitude ou l’action casserait la dynamique naissante du consensus.
Cependant, ma position constante, exprimée à tous, a toujours été d’être le candidat expérimenté, capable de faire franchir à notre football, déjà bien mis sur orbite, des paliers importants.
Cette position était partagée par de nombreux acteurs et dirigeants importants de notre football avec qui j’ai eu de fréquents échanges approfondis avant de déposer ma candidature.
J’ai également dit, redit et répété, aussi bien aux autres candidats qu’aux membres du comité chargé du consensus, que le porteur de ce programme commun, né du consensus, pour l’avenir de notre football ne pouvait être Maître Senghor qui a présidé aux destinées de notre football lors des trois derniers mandats successifs et qui lui a beaucoup apporté.
Je pensais et continue de penser qu’après trois mandats, cinq CAN, un poste, extraordinaire pour le Sénégal, de 1er Vice Président de la CAF et après avoir déclaré en toute bonne foi que le mandat qui s’achève le 7 août 2021 serait son dernier mandat, qu’il aurait dû prendre du recul et de la hauteur pour aider à trouver un consensus entre les autres candidats.
Ces derniers se seraient, à leur tour, engagés aux côtés de l’Etat, à préserver sa représentation au comité exécutif de la CAF ainsi que son poste de 1er Vice Président au profit de notre pays.
Les faits, sur ce point, m’ont donné tort. Nous avons tous été témoins des péripéties autour de sa candidature pour conduire le consensus dont je lui donne acte et pour laquelle je respecte la position de ses tenants, tous éminents acteurs de notre football.
C’est pourquoi, pour rester dans la dynamique du consensus et trouver la meilleure solution, j’ai proposé à Monsieur Senghor d’abord en réunion entre les 4 candidats puis lors de mon audition par le comité de conduire le consensus jusqu’à la coupe du monde 2022 pour essayer de parachever l’importante œuvre réalisée et ensuite de permettre et favoriser une nouvelle gestion avec l’arrivée d’un nouveau Président.
Cette proposition a été reformulée devant le comité chargé de porter le consensus lors de mon audition personnelle comme condition de ma part pour accepter de rester dans le consensus et apposer ma signature au bas du protocole 2 du 22 juillet.
Au surplus, ce consensus qui est le seul auquel j’adhérais devait se poursuivre avec une rencontre à quatre (Augustin Senghor, Ablaye Sow, Louis Lamotte et Saër Seck) afin de stabiliser la feuille de route et entre autres acter cet accord.
Cette rencontre devait être convoquée sans délai, de manière quasi immédiate.
C’est à ces seules conditions que j’avais accepté de signer le protocole qui m’avait été soumis ; dont le dernier point tente de rendre compte de ces échanges et de cet accord.
Malheureusement le candidat Mady Touré (qui était absent lors de cette audition) s’est largement épanché imprudemment et de manière irresponsable (pour dire le moins) dans sa campagne sur ma position sans en connaître les tenants et les aboutissants au lieu de se concentrer sur son programme (il serait le seul à en avoir) et sur sa quête du vote des acteurs. C’est peut être le manque d’expérience relevé par certains.
Ceci dit, je suis dans l’obligation de constater que depuis lors (jeudi 22 juillet) non seulement le Comité en charge de la médiation pour trouver un consensus n’a pas convoqué cette réunion mais il est véhiculé dans le pays et dans la presse (surtout par notre ami candidat Mady) l’idée que j’aurais totalement accepté que l’actuel président reste en place pour le prochain mandat en entier.
Et que je me serais ainsi renié.
Cela constitue une violation de l’accord tacite, du « gentleman agreement » convenu entre parties prenantes.
Tous ces événements, ajoutés au fait que la logique de mener campagne (proximité du 7 août probablement oblige) a pris le pas sur le point 1 du protocole 2 appelant à la fusion des programmes laissé en souffrance et pour lequel le comité, qui semble avoir posé son dernier acte avec le protocole 2 du 22 Juillet, n’a pris aucune initiative.
En conséquence de tout ce qui précède j’ai décidé de
- Me retirer du consensus dont l’esprit programmatique et les conditions posées par moi ne me semblent plus respectés,
- Ne pas être membre du prochain comité Exécutif (au titre des 8 cooptés prévus dans les accords du consensus) ainsi que d’aucune instance fédérale,
Rester au service du football de mon pays en tant qu’acteur à la base aux commandes exclusives de mon club.
L’ambition personnelle ne saurait être mon leitmotiv, ce que du reste ma passion pour le football, mon parcours et l’histoire récente de notre sport ont fini de démontrer y compris aux plus sceptiques.
Cheminer ensemble c’est aussi et surtout s’imposer des valeurs communes mais aussi savoir se séparer pour, peut-être, mieux se retrouver pour des lendemains meilleurs.
Beaucoup n’ont pas compris mon attitude et ma position et même si certains ont retenu des erreurs voire des fautes, j’ai toujours essayé d’avoir beaucoup de retenue et de hauteur sans jamais perdre de vue l’intérêt supérieur du football sénégalais.
Je remercie tous les acteurs qui m’ont accordé leur confiance et leur soutien (et à qui j’aurais voulu parler individuellement avant ce communiqué) mais je remercie aussi ceux qui ont fait un autre choix dont beaucoup sont des amis, le resteront et avec qui on se retrouvera.
Je souhaite à la prochaine équipe dont se dotera le football sénégalais une bonne chance.
Mes prières ne manqueront pas pour que les objectifs dont chacun de nous rêve se réalisent.
Vive le football sénégalais.
Vive le Sénégal ! »
JACOB DESVARIEUX EST MORT
Le leader du groupe Kassav s'est éteint à l'âge de 65 ans. Atteint du covid-19 et hospitalisé en urgence, le guitariste n'a pas survécu à cette infection
Le confondateur du groupe Kassav, hospitalisé depuis plusieurs jours en Guadeloupe pour infection de covid-19, est mort (30 juillet 2021) à l’hôpital des Abymes à l’âge de 66 ans selon Guadeloupe la 1ère.
Le chanteur, musicien, arrangeur et producteur Jacob Desvarieux, est une personnalité marquante de la vie musicale des Antilles. À Paris où il est né, il se révèle en plein âge d’or du disco. Il devient musicien et arrangeur de studio. C’est là qu’il fait la rencontre de Pierre-Edouard Decimus, avec qui il crée le groupe Kassav en 1979.
Kassav, la machine à zouk
Le groupe qui rassemble entre autres, Jocelyne Béroard, Jean-Philippe Marthely, Jean-Claude Naimro, Patrick Saint-Eloi…est le symbole de la révolution musicale antillaise par le zouk.
Kassav a joué sur les cinq continents. En 1989, le groupe obtient le Prix de la Francophonie au Québec, il a aussi le privilège d’être le premier groupe noir à jouer en Russie, rapporte RFI.
Kassav se produit essentiellement en concert, en enregistrant disque sur disque, et plus de trente albums solos de ses membres. Jacob Desvarieux prend une place prépondérante dans ce succès.
Plusieurs concerts étaient à son programme des grandes vacances aux Antilles. Nous l’avions vu en symbiose avec son groupe Nam Kan à l’espace Arawak au Gosier (Guadeloupe) le 8 juillet 2021.
«LA PEINTURE SOUS-VERRE EST ESSENTIELLEMENT NARRATIVE»
Elle a tourné le dos à l’enseignement de la littérature, mais elle n’a jamais cessé de transmettre sa passion et ses connaissances artistiques. La plasticienne Anta Germaine Gaye anime l'atelier ‘’Fer et Verre’’. Diplômée de l'École normale supérieure d'éducation artistique de Dakar, elle est surtout connue pour sa pratique artistique qui englobe notamment la peinture sous-verre. Dans le cadre d’un atelier organisé par le Goethe-Institut, en partenariat avec le Pénc 1.9, cette grande dame, qui a enseigné l’éducation artistique, s’est confiée à ‘’EnQuête’’.
Parlez-nous de votre atelier ‘’Fer et verre’’…
J’ai enseigné jusqu’à ma retraite, dans la Fonction publique, l’art et plus particulièrement l’éducation artistique, ce qui n’est pas tout à fait de l’art, mais plutôt une activité d’éveil des jeunes à l’art. Et l’atelier ‘’Fer et Verre’’ que je dirige est un atelier de partage et d’échange, donc de rencontres. Je dispense des formations et je reçois également des gens avec des talents divers.
C’est ainsi que l’atelier a abouti avec les activités du Vendredi Slam, qui regroupe un groupe de jeunes qui s’expriment par le slam, cette poésie contemporaine. Les vendredis, on se retrouvait à la nuitée et on chantait, on déclamait, on dansait, on échangeait. Et c'était fabuleux, parce que cet atelier avait une activité presque cathartique, puisque les gens, pour la première fois, parfois, s'exprimaient. Ceux qui n’avaient jamais osé s’exprimer sont ainsi arrivés à le faire. Et c’est bien. Nous avons déjà travaillé sur différentes rubriques telles que La peinture sous-verre ; L’initiation des jeunes et moins jeunes, disons pour tout âge ; des Exercices de calligraphie, de l’ikebana ; La florale japonaise dans laquelle j’ai subi des classes et que je pratique. L’ikebana, ça doit être le reflet de la nature. Notre nature n’est pas celle d’un pays en hiver, ni celle d’un pays complètement déserté. Et c’est donc avec les végétaux, les branches sèches ou vives que l’on trouve. Et on suit des règles bien précises. J’ai participé à toutes les éditions du Partcours qui doit fêter cette année-ci ses 20 ans. C’est une série d’ateliers qui sont ouverts et les gens peuvent aller d’atelier en atelier, voir un peu ce que les gens font. On s’expose soi-même où on expose des groupes.
C’est ainsi que j’ai pu révéler des talents à partir de cet atelier, comme Fally Sène Sow que l’on connaît à présent, qui est mon fils d’adoption et qui a été mon ancien élève.
Vous avez étudié la littérature, mais le virus de l’art vous a piquée et vous avez choisi de peindre plutôt que d’enseigner les lettres à l’université. Pourquoi ?
Au terme de ma formation à l’université Cheikh Anta Diop, j’ai réalisé que je n’avais pas du tout envie d’aller enseigner la littérature. J’adore la littérature. Je pense que je suis une vraie littéraire. Mais les conditions d’enseignement… c’était quelque chose d’incomplet, pour moi. Enseigner la littérature toute la vie, je veux bien. Mais je sentais que je voulais passer ma vie à pratiquer l’art. Ce n’était pas très clair, pour moi, au départ. Est-ce que j’allais peindre ? Est-ce que j'allais dessiner ? Est-ce que j’allais écrire ?
Et qu’est-ce qui a finalement guidé votre choix ?
C’est le fait de réaliser que j’étais à un tournant, que j’allais carrément prendre une direction et que je ne pouvais plus revenir en arrière et que j’allais passer à quelque chose qui était essentiel pour moi. C’est plutôt cette crainte-là. Mais ce n’est pas un facteur extérieur. Je me suis dit : ‘’Mais attendez ! Je vais tout de suite aller enseigner et puis je ne vais faire que ça. Ça prend bien assez de temps et bien assez d’énergie. Mais moi, je suis artiste, je ne peux pas faire ça seulement.’’
Donc, j’ai décidé d’aller dans une école d’art. La formation que j’ai pu avoir était celle de professeur d’éducation artistique. C’est-à-dire, on recrute des bacheliers et, au terme de quatre ans d’études, sous le régime de normalien. Il y a un engagement décennal dans la Fonction publique pour enseigner, puisqu’on a une bourse.
On enseigne aux enfants comment exprimer des choses par les couleurs, par les formes, par la matière. Alors que, par exemple, le professeur de français, il les fait exprimer par des mots. Voilà ! C’est la différence. C’est juste ça. Donc, j’ai eu beaucoup de chance, puisque cette école m’a permis d’apprendre les rudiments que je devais après aller enseigner. Mais aussi, cette école m’a confirmée dans ma vocation d’enseignante. Je pense que je suis essentiellement enseignante. Et même, je le crois, je suis pédagogue.
Et pour enseigner, il faut aimer transmettre ; il faut aimer aider l’autre à oser ; il faut aider l’autre à se révéler à lui-même. Je crois que cela aussi, c’était en moi. Donc, je dirai que j’ai eu beaucoup de chance, même si, au départ, j’ai eu le manque de compréhension de mon entourage pour qui c’était une lubie. Mais, au fil du temps, je pense que ce même entourage a beaucoup apprécié ce que je faisais. Par la suite, je me suis retrouvée à être le mentor ou alors la personne qui booste les jeunes femmes et les jeunes hommes qui veulent aller dans cette direction, qui ne savent pas trop comment faire. Et je pense que mon profil et mon parcours ont aidé à convaincre beaucoup de parents, puisque ce n’était pas enviable dans beaucoup de maisons.
Comment en êtes-vous venue à la peinture sous-verre ?
Lorsque j’ai rédigé mon mémoire de Maîtrise, j’avais pris comme thème ‘’La société traditionnelle dans l’œuvre romanesque d’Ousmane Socé Diop’’, son roman ‘’Karim’’. J’avais parlé de cette société-là. Cette société saint-louisienne avec des pérégrinations dans Rufisque, Gorée, Dakar (les 4 quatre communes). Et en prenant mon sujet de mémoire, par des recoupements, je me suis dit qu’il faut qu'il y ait un lien entre ce que je fais et ce que je vais faire pour que ça ne soit pas perdu. En plus, mes sources d’inspiration étaient les mêmes. C’était la société saint-louisienne, musulmane, à la fois traditionnelle et très avant-gardiste. Et c’est une société métisse avec des emprunts dans différentes cultures et avec une symbiose qui a donné ce qu’on sait, à tel point qu’Ousmane Socé Diop appelait Saint-Louis du Sénégal par cette phrase : ‘’Au centre du bon goût et de l’élégance.’’ J’ai donc pris la parure.
Et lorsque je l’ai prise, un de mes professeurs m’a dit : ‘’Tu ne peux pas traiter ce sujet sans faire de la peinture sous-verre… Avant d’aller voir ceux qui font de la peinture sous-verre, j’ai fait moi-même des essais. Des accidents dans ces essais-là (un verre brisé, un verre gratté qui révèle des choses imprévues) m’ont donné une direction. Et quand je suis allé voir les gens qui faisaient de la peinture sous-verre, longtemps après, ça m’a confortée dans l’idée que je n’allais pas faire la peinture académique - si l’on peut dire - mais que j’allais juste prendre le verre avec tout ce qu’il offrait, tout ce qu’il permettait de faire et que mes recherches se feraient sur le verre. Je n’ai jamais cessé de considérer chacune de mes œuvres comme une étape de mes recherches sur le verre, en faisant passer des émotions, une partie de mon histoire, et de mes rêves également.
L’utilisation du fer est également votre marque de fabrique. Qu’est-ce qui explique votre amour pour ce métal ?
Je pense que pour le fer, il doit y avoir une influence de vitro dans les églises. La peinture sous-verre est apparentée aux icônes que l’on trouve dans les vitraux des églises : des figures saintes qui sont faites en verre soufflé et tout, mais enchâssé dans du plomb. Peut-être que c’est cette dualité, ce paradoxe entre le verre qui est vraiment fragile et le plomb, le métal. Peut-être c’est cela ; la loi des contraires qui s’attirent. Le dur et le fragile, le yin et le yang, l’ombre et la lumière cohabitent. Je me suis laissé aller à mes inspirations sans me donner de limites.
Quelle est l’histoire de la peinture sous-verre au Sénégal ?
Il y avait des Libano-Syriens qui, au début du XXe siècle, faisaient venir des chromolithographies représentant des figures saintes. On en trouvait dans les vieux calendriers. C’était également des saints des confréries khadriya et tidjaniya, comme Cheikh Ahmed Tidiane Chérif.
Que s’est-il passé par la suite ?
Le gouverneur général de l’AOF, William Ponty, a commis une circulaire interdisant la circulation de ces images saintes, parce qu’elles avaient une très grande influence sur l’esprit, disait-il, des Africains, des colonisés qui devaient juste être influencés par la France.
Ainsi, cette circulaire interdisait la vente, la circulation, l’utilisation et l’achat de ces images. Des ouvriers (charpentiers, maçons, couvreurs, etc.), ceux qui avaient accès aux matériaux des chambres de commerce y trouvaient du verre industriel, ont mis ces verres-là sur les images et les claquer. Mais, au fil du temps, ces peintures de saints se sont substituées également à des peintures des saints du terroir comme Cheikh Ahmadou Bamba, El Hadj Malick Sy, Seydina Limamou Laye. Il y avait également des paraboles qui étaient racontées. Ces images saintes renferment des histoires. La plupart des peintres étaient instruits en arabe. C’était des lettrés, mais la majeure partie des masses auxquelles ils s’adressaient étaient des analphabètes. Alors, ils allaient dans les campagnes montrer ces images en racontant des histoires. Et les gens achetaient ces images ou donnaient quelques pièces pour connaître la suite de l’histoire.
Mais il y a eu après un genre de migration (quelque chose qui ne reste pas sur place, qui évolue). Au-delà des images saintes, il y a eu celles profanes, qui ne parlaient plus de religion, mais de la vie en général. Il y avait aussi des images satiriques qui racontaient des histoires drôles, par exemple, quelqu’un qui court, parce que le lion le poursuit ; il s’apprête à grimper sur un arbre, mais un grand serpent l’attend là-bas. Il y avait également des figures de mode comme Al Demba avec son grand pantalon bouffant qui danse.
Avec l’avènement de la photographie qui n’était pas à la portée de tous, il y avait les photographies des élégantes de l’époque et de figures religieuses qui étaient reprises en couleurs. Et beaucoup demandaient qu’on leur fasse des cadres en verre avec de belles images des coques, des fleurs, des oiseaux, ils mettaient leur photo dedans. A l’avènement d’une grande mode appelée le ‘’Xoymet’’, on mettait partout sur les murs des photographies, des objets d’autruche ou de peigne, pour décorer et pour accueillir la mariée. Dans toutes les maisons, tous les murs étaient enluminés de ces photos-là.
Qu’est-ce qu’il y a eu de nouveau dans la pratique de cet art ?
C’est une question de mode. On reconnaît un mobilier grâce aux caractéristiques de l’époque où il a été fait. Les gens étaient très conventionnels. Et dès qu'ils en avaient les moyens, ils achetèrent ce qui se faisait. Lorsque vous regardez les photos de femmes, vous pouvez savoir en quelle année elles ont été photographiées grâce à la coiffure, au tissu de l’époque, à la posture même. C’est pour cela qu’on dit que la peinture sous-verre est essentiellement narrative. Témoin d’une histoire, dans un lieu déterminé, elle racontait très joliment, avec de très jolies couleurs.
A part la peinture, quelles autres passions avez-vous ?
C’est la vie tout simplement (elle aime particulièrement les fleurs). C’est l’écriture, ma famille, mes amis, c’est l’autre. L’autre ne m’est jamais indifférent. Et c’est ma foi et ma croyance. J’ai la conviction qu’il y a une vie ici, qu’il y a une autre vie qui va arriver.
DES DOSES VACCINS RÉSERVÉES POUR LES JOURNALISTES
Pour faire face à la 3e vague de la Covid-19 qui fait des ravages dans les secteurs socio-économiques et qui dévaste les rédactions, le Synpics a démarché la mise en place d’une unité de vaccination avancée pour le secteur de la presse.
Pour faire face à la 3e vague de la Covid-19 qui fait des ravages dans les secteurs socio-économiques et qui dévaste les rédactions, le Syndicat des professionnels de l’information et de la communication du Sénégal (Synpics) a démarché la mise en place d’une unité de vaccination avancée pour le secteur de la presse. Ainsi, en collaboration avec le ministère de la Santé et de l’Action sociale, ‘’les journalistes, techniciens et autres travailleurs des médias peuvent se rapprocher des équipes qui seront installées à la Maison de la presse les vendredi 30 juillet, samedi 31 juillet et lundi 2 août pour y recevoir leur dose de vaccin’’.
Dans un communiqué parvenu, hier, à ‘’EnQuête’’, le Synpics a rappelé que ‘’les membres de la presse sont, malheureusement, non seulement des personnes à risque, mais également des vecteurs de transmission de la maladie, au regard de leurs innombrables déplacements’’.
Selon la note, le respect strict des mesures barrières, notamment la distanciation physique, le port du masque et l’usage du gel hydro-alcoolique, ‘’sera de vigueur lors de ces trois jours de vaccination’’. Outre cette initiative en faveur des acteurs des médias, le Synpics demande aux responsables des rédactions de prendre des mesures de protection supplémentaires au sein de leurs entreprises respectives et dans les différentes étapes de la chaine de production et de diffusion des informations.
‘’Une désinfection systématique des studios, du matériel de tournage et/ou d’enregistrement, ainsi que des moyens de transport (véhicules) est fortement recommandée, en plus du télétravail’’. Il invite également la presse à accentuer son rôle de conscientisation du public, afin de stopper au plus vite la propagation de la pandémie.
PART DE RESPONSABILITÉ DES ACTEURS POLITIQUES
Selon le sociologue Waly Diouf, plusieurs paramètres entrent dans l’explication du désengagement des populations dans la lutte contre la pandémie.
‘’On ne peut pas négliger les effets pervers des attitudes des acteurs politiques’’
Selon le sociologue Waly Diouf, plusieurs paramètres entrent dans l’explication du désengagement des populations dans la lutte contre la pandémie.
Pendant que le variant Delta accroît le taux de contaminations, on assiste aujourd'hui, au Sénégal, à un relâchement presque total de la population. Comment expliquer cette situation ?
Le Sénégal est, depuis mars 2020, concerné par la pandémie de Covid-19, cette pneumonie qui s’est déclenchée vers novembre 2019 à Wuhan (province d’Hubei, Chine). Conformément aux orientations de l’Organisation mondiale de la santé déclinées à travers les dispositions du Règlement sanitaire international, le gouvernement a introduit un ensemble de mesures politiques, administratives, juridiques et sanitaires pour endiguer la pandémie. Depuis quelques mois cependant, différents pays font l’objet d’une prolifération de variants du Sars-Cov-2, le virus responsable de la Covid-19.
Le variant Delta, qui a été documenté au Sénégal depuis avril 2021, fait aujourd’hui l’objet d’une plus grande inquiétude, en raison de sa contagiosité, mais aussi de sa morbidité. Le communiqué n°511 indique que le Sénégal a enregistré, à ce jour, 57 263 cas de contamination dont 45 170 guéris, 1 281 décès et 10 811 en cours de traitement. Rien que pour la journée du 25 juillet, 12 décès et 690 nouvelles contaminations ont été documentés, avec un taux de positivé de 29,47 %. Ces différentes statistiques traduisent le niveau critique de la situation sanitaire.
L’allègement important des mesures, qui a été décidé par le gouvernement à partir de mars 2021, avec notamment la levée du couvre-feu, a été un des éléments ayant remis en cause les mesures de distanciation physique et sociale, mais aussi produit un relâchement vis-à-vis des autres moyens de lutte dont principalement le port du masque. Cette évolution de la politique nationale, même si elle répond à une certaine demande sociale, reste cependant peu pertinente, du point de vue de certains observateurs, pour un pays où une majorité de la population est encore hésitante à la vaccination.
On ne peut pas également négliger les effets pervers des attitudes des acteurs politiques, avec les différentes tournées et rassemblements organisés dans différentes localités du pays, sur le relâchement des gestes barrières par les populations.
En outre, il existe encore certains Sénégalais qui ne croient pas à l'existence du virus. Qu'est-ce qui l'explique, selon vous ?
Aujourd’hui, caractériser les attitudes ou discours de certaines populations comme le fait de ne pas croire en l’existence de la Covid-19, constituerait une analyse tronquée qui ne permet pas de déceler les processus cognitifs sous-jacents. Ces discours laissent plutôt entrevoir des attitudes de déni, étant ici entendu comme un mode de défense particulier où la personne refuse de reconnaître une réalité traumatisante, tout en la reconnaissant d’une certaine manière. Cette définition met en avant deux aspects assez intéressants.
Le premier décline les processus sélectifs chez l’individu face à une réalité de nature traumatisante. Or, comme nous pouvons l’observer, les populations ont été confrontées, depuis mars 2020, à des décisions politico-sanitaires de gestion de la pandémie particulièrement contraignantes et traumatisantes. Les mesures de distanciation physique et sociale, par exemple, remettent en cause un ensemble de pratiques et de formes de solidarité dont la conséquence est de produire un ‘’drame social’’.
Dans ces conditions, adopter une attitude de déni constitue, pour certaines catégories, une forme de réponse cognitive à la situation de crise qu’instaure la pandémie, ainsi que ses modalités de gestion.
En second, on peut retenir, de la définition du déni, les processus qui consistent à réorienter la perception sur une réalité afin de la rendre plus acceptable. Concernant la pandémie de Covid-19, ces processus ont été favorisés par ce qu’on caractérise d’infodémie.
En effet, le développement de la pandémie a été accompagné d’une surabondance d'informations, de véracité très variable, ne facilitant pas à la population générale de trouver des informations fiables, afin d'agir en conséquence. En dehors des capacités à opérer des choix face à ce flot d’informations, certains s’orientent également vers des itinéraires de convenance.
Ainsi, on peut constater que les théories complotistes qui accusent les pouvoirs publics, par exemple, ne traduisent, en effet, que des manières de réinterpréter la réalité, afin d’en amenuiser les effets.
En outre, il est important de reconnaître que la dimension sanitaire n’est pas le seul impact de la Covid-19 en Afrique particulièrement où les mesures de gestion sont difficilement conciliables avec une économie essentiellement informelle. Les récentes émeutes populaires au Sénégal, en mars 2021, sont en grande partie liées à la précarité des ménages qui est accentuée par les orientations de la politique nationale de gestion de la pandémie, en dépit des efforts de résilience de l’État.
Quelles solutions s'imposent ?
La responsabilisation des communautés dans la réponse aux problèmes de santé publique n’est plus à discuter. Cependant, les apories autour de ce principe ont conduit à des modalités et pratiques d’implémentation qui les ont rendues contre-productives dans différentes expériences de gestion de la pandémie. Cette situation s’observe dans les difficultés des pouvoirs publics à engager les communautés dans les mesures de lutte promues. D’ailleurs, dans plusieurs pays, la politique nationale s’oriente vers une approche dissuasive.
En Guinée, par exemple, la réponse à la faible adhésion à la vaccination a été d’imposer un carnet de vaccination aux personnes qui désirent avoir une mobilité interurbaine. Une telle approche, même si elle contraint les populations aux décisions de l’État, est toutefois productrice d’effet pervers avec des pratiques de contournement des normes et des corruptions des services de contrôle.
On distingue ainsi les limites des différentes approches, mais aussi l’intérêt d’un élargissement de la perspective. Concrètement, il s’agit de construire la réponse à travers un ‘’bricolage’’ basé sur les points positifs de ces différentes approches.
Il est, en outre, primordial que les pouvoirs publics, en particulier, se repositionnent dans une communication par l’exemple, afin de redynamiser la confiance au dispositif et de conduire les populations à s’approprier la lutte contre la pandémie.
Face à la propagation assez rapide du variant Delta du coronavirus, le Sénégal cherche encore la bonne formule de lutte, alors que de larges pans de la société refusent de croire, encore aujourd’hui, en l’existence de la Covid-19. Des spécialistes analysent la situation et préconisent des solutions.
Le business de la vente de masques a repris de plus belle. Troisième vague oblige. Dans la capitale sénégalaise, les vendeurs pullulent, surtout aux abords des structures publiques et privées, et des lieux de culte. Le jeune Amadou Ndiaye, originaire de Diourbel, tire son épingle du jeu, depuis les premiers mois de l’avènement du coronavirus au Sénégal, en 2020. Très dégourdi, casquette bien vissée sur la tête, il rivalise d’astuces face à ses deux autres concurrents pour empocher les 100 F des rares clients du carrefour ‘’Sahm’’. Il faut courir dans tous les sens pour intercepter, le premier, ceux-là qui doivent entrer dans l’hôpital Abass Ndao.
‘’La vente avait pris un coup, mais depuis le mois passé, les affaires ont repris. On se débrouille tant bien que mal avec ça, même s’il faut reconnaître qu’il y a moins de clients que lors des précédentes flambées de cas’’, lance-t-il, occupé à faire la monnaie. Le jeune homme vend des masques certes, mais n’en porte pas. D’une voix à peine audible, il nous confie qu’il ne compte pas en porter : ‘’Sincèrement, je ne crois pas à l’existence de la Covid-19 dans ce pays. Nos autorités sont les premières à fouler aux pieds les règles qu’elles ont-elles-mêmes établies. Combien de rassemblements il y a par jour, organisés par des ministres et le président lui-même ? Au début, en mars 2020, j’ai cédé à la psychose, mais j’ai fini par me faire à l’idée que la Covid-19 est une pure invention au Sénégal. Et puis, d’ailleurs, il y a des maladies bien plus graves dans ce pays qui tuent nos parents’’.
Tout porte à croire qu’Amadou en a gros sur le cœur, surtout qu’avec les mesures de semi-confinement, la pauvreté a gagné du terrain et s’est accentuée chez ceux-là qui, comme lui, vivent au jour le jour. ‘’C’est injuste, parce qu’ici, ce sont les pauvres qui en paient le prix. Chez nous, on ne sait pas ce qu’est le télétravail. En tout cas, moi, je vends les masques pour ceux qui croient à l’existence de la maladie’’, lance-t-il en cherchant du regard de potentiels clients, son petit carton de masques à l’épaule.
Ni le rappel du nombre de décès ou la panique chez les médecins, encore moins les hôpitaux débordant de monde ne lui font changer d’avis.
D’ailleurs, parmi les acheteurs, n’eût été le protocole sanitaire exigé à l’entrée de l’hôpital, beaucoup affirment qu’ils se seraient bien passés du masque de protection. Comme A. Ndiaye, ils sont nombreux ces Sénégalais qui réfutent catégoriquement l’existence du virus dans le ‘’pays de la Teranga’’.
Les acteurs de l’informel font de la résistance
Vendeurs ambulants, vendeurs de café, gérants de Fast-Food ambulant..., nos interlocuteurs, tous acteurs du secteur informel sont formels : la Covid-19 n’a jamais franchi les frontières sénégalaises. Du côté des chauffeurs de taxi, ce n'est qu'à l'apparition d'un policier ou d'un gendarme dans les parages que le masque reprend sa place. Sinon, il est rangé en poche ou dans un coin du véhicule.
"Le coronavirus n'existe pas au Sénégal. C'est juste une invention des autorités pour contrôler nos déplacements et aussi pour que l'Occident abreuve nos autorités de sous. On a tout compris. Si cette maladie existait réellement dans ce pays, Macky Sall n’allait pas faire le tour du Sénégal en pleine pandémie. Ce n’est que de la comédie, tout cela’’, martèle Ibrahima Dramé au volant de son taxi.
Le trentenaire digère mal la situation économique critique qui règne dans bon nombre de ménages. De nouvelles mesures restrictives connaîtront, selon lui, une farouche opposition de la part des Sénégalais. Les composantes de cette frange de la population qui ne croient pas (ou plus) à l’existence de la Covid-19 font florès.
‘’C’est le président qui a sonné la fin de la Covid-19’’
D’une manière générale, pour ‘’les incrédules’’, plus aucune mesure ne devrait voir le jour. Si ces états d’esprit paraissent exagérés ou suicidaires pour certains, en psychologie, ils trouvent une explication. ‘’Le premier responsable de cette indifférence, du désengagement et de la démobilisation, c’est le pouvoir. C’est le président qui a sonné la fin de la Covid-19 et personne d’autre. Premièrement, lors de la première vague, il y a eu un consensus national qui a permis de mobiliser des fonds et les gens se sont engagés à donner pleins pouvoirs à Macky Sall pour gérer cette pandémie. On a voté un budget de 1 000 milliards de francs CFA, mais on sait juste que les 15 milliards ont servi à acheter du riz. Deuxièmement, Macky Sall vient de se balader dans presque 11 régions du Sénégal en tournée économique, mobilisant plus de trois millions de Sénégalais avec tout l’appareil d’Etat et les populations qu’on a transportées d’un bout du Sénégal à l’autre’’, analyse pour ‘’EnQuête’’ le psychologue Serigne Mor Mbaye.
‘’Le constat est là. Il y a eu, d’abord, un relâchement de la part de l’Etat. La situation actuelle pourrait s’expliquer par la communication politique que l’Etat a dernièrement utilisée. Des efforts ont été faits. Mais après, on a vu une posture de victoire, de glorification, dans une démarche de communication pour dire : ‘Nous avons pu vaincre la Covid-19.’ Cela a rythmé le discours politique, surtout le discours étatique et a influencé la posture des Sénégalais, parce que ceux qui respectaient plus ou moins les mesures barrières, dans une logique de prévention active, ont fini par croire que la Covid-19 avait disparu du territoire’’, soutient pour sa part le sociologue Ismaila Sène.
Il ajoute : ‘’Je ne pense pas qu’il y ait des Sénégalais qui n’ont pas cru à l’existence de la Covid-19. Je dirai, comme hypothèse, que ce sont plutôt des gens qui n’ont pas été convaincus des mesures qui ont été proposées pour lutter contre la pandémie ou des Sénégalais qui ont, plus ou moins, banalisé la maladie. A mon avis, la croyance y était, sans pour autant qu’ils s’inscrivent dans une prévention active. Par rapport aux données que j’ai pu recueillir, c’est beaucoup plus une logique de banalisation plutôt qu’une logique de remise en question de la Covid-19.’’
En d’autres termes, l’Etat du Sénégal est l’acteur principal de ce nouvel état d’urgence qui indiffère plus d’un.
L’absence d’une prise en charge psychosociale
L’évidence, selon le psychologue, c’est que la Covid-19 a installé les Sénégalais, dès mars 2020, dans un climat traumatogène, de peur et d’angoisse, et surtout de paupérisation. A l’en croire, l’impact de la pandémie au Sénégal est beaucoup plus profond : ‘’Pensez-vous que les populations sont à nouveau prêtes à se retrouver encore dans un état de confinement ? En mars dernier, j’ai écrit aux institutions internationales pour dire qu’il faudrait qu’on investisse dans l’impact de la pandémie sur la santé mentale des populations. Il faut absolument tenir compte de cela, car la pandémie, avec son caractère traumatogène et ses contraintes de confinement, de stigmatisation, d’isolement, nous a installés dans une situation dépressive. Toutes les personnes qui ont été fragiles ont basculé dans la dépression. J’ai suivi certaines personnes que la Covid-19 a installées dans une situation dépressive momentanée. Il a fallu les accompagner, mais également leurs familles. Cela n’est pas un luxe, c’est ce à quoi devaient servir ces milliards’’.
Pour Serigne M. Mbaye, un vaste programme de prise en charge psychosocial des populations s’impose. Il s’agit de faire en sorte que les gens puissent disposer d’une écoute téléphonique permanente pour les apaiser. Quant aux personnes affectées mentalement, elles bénéficieront d’une écoute et d’un counseling de spécialistes, afin de les aider à dépasser toute la dimension psychosomatique.
‘’Les Sénégalais n’ont pas vu de modèles’’
Par ailleurs, rappelant que les Sénégalais n’ont pas vu de modèle en matière de respect des mesures barrières, le sociologue I. Sène plaide pour l’application des mesures préventives par ceux-là qui les ont mises en place. ‘’La meilleure solution, c’est que les autorités qui prennent ces mesures soient les premières à les respecter. On a constaté que les premiers à violer ces mesures sont soit le président, soit des autorités politiques. Donc, on est dans une situation où il devient compliqué pour les Sénégalais de se conformer à ces mesures. Il faut que les acteurs qui gouvernent soient les premiers à respecter les mesures barrières pour convaincre la population de la pertinence et de l’utilité de ces mesures‘’, explique-t-il.
Sans ce préalable, il sera difficile, selon le spécialiste, de changer cet état de défiance chez la population. Partant du fait que l’Etat a perdu en crédibilité, ces experts préconisent une nouvelle approche de lutte impliquant les responsables communautaires et religieux. ‘’On doit passer à une dimension de prise en charge communautaire, détaille M. Mbaye, par des actions de solidarité communautaire. Il y a une défiance par rapport au pouvoir en place. Il faudrait retourner vers la société civile et les communautés elles-mêmes.
Je pense que le pouvoir religieux peut jouer un rôle, de même que les mouvements associatifs. Ces entités-là sont un peu plus crédibles que le pouvoir central. Aussi, il faut sortir de la dimension mercantile de la gestion de la pandémie. Le test doit être possible dans nos postes de santé, mais que l’Iressef ou l’Institut Pasteur monopolise le dépistage, c’est antidémocratique et criminel. Il faudrait que les dépistages puissent se faire partout dans le pays. Le personnel médical travaille dans des conditions inhumaines. Il est foncièrement exposé. C’est criminel. Le pouvoir et le ministère de la Santé doivent rendre des comptes. C’est une urgence’’.
Dans la même veine, le sociologue Ismaila Sène indique qu’il serait intéressant d’impliquer certains acteurs qui ont une légitimité sur les plans communautaire et social (autorités religieuses, autorités et leaders communautaires, les ASC) afin de les amener à s’approprier le combat et les pousser à le porter. Ils serviront ainsi de relais aux populations.
LE CNRA INTERDIT LA DIFFUSION DE LA SÉRIE ’’INFIDÈLES’’
Dakar, 29 juil (APS) - Le Conseil national de régulation de l’audiovisuel (CNRA) a décidé, jeudi, d’interdire aux télévisions la diffusion de la bande annonce de la saison 3 de la série ’’Infidèles’’ telle qu’elle ’’est proposée sur Internet et tout contenu’’ de la production.
Dans cette décision transmise à l’APS, le CNRA indexe des images ’’incitant à des pratiques sexuelles jugées déviantes ou contraires à la morale et aux bonnes mœurs’’.
Selon l’organe de régulation, ces images constituent ’’une incitation à la débauche ou un encouragement à s’adonner à une activité sexuelle, à la pornographie et à la prostitution’’.
Saisi par l’ONG islamique Jamara, le CNRA estime que cette production porte ’’atteinte à la préservation des valeurs, sensibilités et identités culturelles et religieuses’’.
Il prévient que ’’le non-respect de la présente décision, outre l’interdiction définitive de diffusion de la série +Infidèles+ sur toutes les télévisions de droit sénégalais, expose la ou les télévisions responsable (s) aux sanctions prévues (...)’’.
L'AVENIR EN POINTILLÉ DES RÉCUPÉRATEURS DE MBEUBEUSS
Après des décennies de gestion chaotique, le gouvernement prévoit de transformer la décharge à ciel ouvert en une unité de recyclage et de valorisation des déchets en 2025. Mais ce projet menace l'économie informelle florissante qui s'y est développée
C'est un petit monde en sursis, celui des "récupérateurs" de plastique et de métal de l'immense décharge de Mbeubeuss, aux portes de Dakar.Un centre de recyclage devrait y voir le jour dans quatre ans, menaçant des milliers d'emplois.
Pour l'instant, ils sont encore nombreux à arpenter le sol jonché d'ordures et à ramasser les bouteilles et autres déchets en plastique à l'aide de bâtons à la pointe crochue, au milieu des vaches et de centaines d'oiseaux en quête de leur pitance.
L'odeur est rance et la chaleur intense sur cette montagne de déchets multicolores en forme de volcan que les ramasseurs surnomment "Yemen".
Des camions-bennes viennent régulièrement déverser de nouveaux chargements, entraînant une ruée des récupérateurs, toujours à l'affut des meilleures pièces.
"Tout le monde s'enrichit ici", assure Laye Niaye, un agent de sécurité, en observant hommes, femmes et enfants patauger dans les ordures.
Dakar, capitale en croissance constante de plus de trois millions d'habitants, produit chaque année des milliers de tonnes de déchets, dont la plupart aboutissent à Mbeubeuss, à une trentaine de kilomètres du centre de Dakar.
La décharge a la réputation d'être une importante source de pollution. Parmi les nuisances: les fumées nocives qui s'échappent des brasiers allumés pour isoler les métaux et qui envahissent les zones résidentielles voisines.
La décharge est tellement vaste - environ 115 hectares - qu'il est difficile de contrôler ce qui s'y passe.Des villages informels y ont même vu le jour.
- Courage et détermination -
Après des décennies de gestion chaotique, le gouvernement sénégalais prévoit de transformer la décharge à ciel ouvert en une unité de recyclage et de valorisation des déchets à l'horizon 2025.
Mais ce projet menace l'économie informelle florissante qui s'y est développée.
On estime à 2.000 le nombre de personnes qui, ignorant la puanteur et les vapeurs toxiques, y gagnent plus ou moins bien leur vie.
Pour s'en sortir correctement, "il faut être dur, courageux, déterminé", souligne Mouhamadou Wade, un quinquagénaire au corps sec et musclé ayant passé les 30 dernières années à s'activer sur la décharge.
Comme beaucoup d'autres ici, il voit d'un mauvais oeil le projet de centre de tri.
S'il est dangereux et sale, le travail sur la décharge peut s'avérer payant pour les meilleurs.
Selon une étude réalisée en 2018 par l'ONG Wiego sur l'emploi informel des femmes, un quart des récupérateurs de Mbeubeuss gagnent plus de 100.000 francs CFA par mois (152 euros), soit près de deux fois le salaire minimum au Sénégal.
Quelques-uns gagnent le double, et d'autres beaucoup moins.
Les récupérateurs vendent les matières recyclables qu'ils collectent à des grossistes, qui les revendent à leur tour à des sociétés spécialisées.
Souleiman Diallo, 40 ans, est justement en train de charger de grosses balles de plastique à l'arrière du camion d'un négociant.
"C'est très difficile, mais il n'y a pas de travail" ailleurs, dit-il.
- 'Toujours perdants' -
Pape Ndiaye, 66 ans, porte-parole de l'association des récupérateurs, estime que l'activité contribue à "protéger l'environnement", mais qu'avec des prix qui stagnent depuis 20 ans (le kilo de plastique vaut toujours 75 francs CFA, ou 11 centimes d'euro), ce sont les intermédiaires qui en profitent, alors que "les récupérateurs sont toujours les perdants".
La décharge est placée sous la supervision de l'Unité de Coordination de la Gestion des déchets solides (UCG).Pour son responsable sur place, Abdou Dieng, les principales préoccupations sont les feux et la fumée.
Il s'énerve tout à coup en voyant des fumeroles s'élever d'un coin de la décharge récemment recouvert de gravier et de sable, signe que quelqu'un a allumé un nouveau brasier.
"Dès que je mets la main sur lui, je vais lui créer beaucoup de problèmes", promet le jeune homme, envoyé il y a un an parce que les riverains se "révoltaient" contre les nuisances.
Selon Maguette Diop, de l'ONG Wiego, le contrôle des feux par le personnel de l'UCG a déjà permis de réduire le nombre de maladies dans le voisinage.
En juin, le président Macky Sall a promis une aide aux récupérateurs qui vont perdre leur source de revenus avec l'arrivée du centre de tri.
Mais d'après Mouhamadou Wade, le vétéran de la décharge, personne n'est vraiment rassuré. "On ne sait pas de quoi demain sera fait", soupire-t-il.
«NOTRE SERIE EST UNE SORTE DE DECLARATION D’AMOUR AUX CULTURES URBAINES»
Femme de son temps, Fatou Kandé Senghor a choisi d’user de sa caméra et de sa plume pour livrer des messages porteurs et conscients. Elle s’intéresse beaucoup aux cultures urbaines. Après avoir écrit un livre consacré à cette expression artistique, cette professionnelle de l’image a réussi à se mouvoir sur différents supports comme la photographie, la vidéo et le cinéma. Entretien avec une grande figure de la culture sénégalaise aux idées avant- gardistes.
Après un livre titré Walabok sur les cultures urbaines, vous avez conservé le même titre pour la série. Qu’est – ce qui explique ce choix ?
Je voulais que Walabok fonctionne comme un concept de label. Que le titre du livre soit le titre du film, de l’expo photo et de la base de données Hip Hop que j’ai soigneusement récoltée. De même que l’installation et le cycle de conférences.
On note la présence de rappeurs comme Fou Malade et d’autres figures du mouvement au niveau de l’écriture du scénario de la série…
Un scénario n’est jamais fermé. Il faut inviter les gens autour de vous qui viennent avec des idées pour enrichir le concept. J’ai invité de véritables artistes à contribuer à la matière première du film car l’écriture est la base de toute création. Ce, contrairement à ce que certains croient. Il n’y a pas de recette miracle quand on veut un produit de qualité. Mon team à moi est le meilleur et il y a toute une anthologie pour le prouver. Ils ont tous été généreux et solidaires car ils savaient que le hip hop en avait besoin.
Même dans la trame de la série, on note aussi la présence d’autres grandes figures comme Mona, Ada Anibal, Daara j, Nit Dof, Killah, One Lyrical, Dj G- Base, Xuman, Duggy Tee et tant d’autres…
Je tenais à ce que la série propose un casting de choix pour relever le niveau et donner la réplique à des acteurs savoureux. Je tenais à rendre hommage à plusieurs générations d’adeptes du hip hop. Notre série est une sorte de déclaration d’amour aux cultures urbaines. Et en même temps, une chronique radio des quartiers populaires. C’est pour cela que tout le monde se retrouve là-dedans.
Outre le choix des rappeurs, on remarque que les acteurs de la série ne sont pas de grandes figures dont des débutants ?
Les acteurs sont de toutes catégories. L’histoire leur plait, alors ils apportent un soin et une touche particulière à leur jeu. C’est une vieille recette qui paye toujours. Avec de la passion, on sait tout faire. Attendez de voir la tournure de l’histoire de notre saison 2 et les nouvelles pointures qui seront invitées.
Comment avez-vous choisi l’actrice principale ?
Le jeune cinéaste Al Hadji Demba Dia est un collaborateur de valeur dans le projet walabok. Il vit à Keur Massar, un quartier populaire intéressant et vibrant. Il tenait à débusquer la jeune rappeuse qui aurait aussi des talents d’actrice. Alors, il a quadrillé son quartier pour la trouver. Dans le hip hop, la notion de représentation d’un espace géographique est très importante.
Les femmes occupent une place prépondérante dans la série et pourtant le mouvement ne leur accorde pas souvent une place de choix. Est-ce votre fibre féminine qui a conduit à cette vision ?
Je suis une femme Africaine. Je ne peux écrire qu’avec ce vécu. Et dans notre quotidien, les femmes occupent une place prépondérante. Ça, c’est dans la vraie vie. Je n’ai pas eu à faire beaucoup d’efforts. Dans le hip hop, il n’y a pas beaucoup de femmes parce qu’elles ne sont pas très exposées à cette forme artistique. La misogynie de la culture sénégalaise est la même dans le hip hop. Ce sont les mêmes filles et fils de Sénégalais qui se retrouvent sous la bannière des cultures urbaines. Les femmes ont une tonne de choses à dire depuis toujours. Je pense que dans les temps modernes, les cultures urbaines sont un moyen d’expression parfait pour elles.
Comment appréciez-vous la prolifération des séries au Sénégal ?
Il faut de tout pour faire un monde. C’est dans la quantité que va émerger la qualité. Il faut que les Sénégalais soutiennent les séries made in Sénégal comme la sous-région le fait. Les séries sont de meilleure qualité technique. Les décors et le costume ont fait un énorme progrès. C’est tout cela qui fait le made in Sénégal. On est dans le monde de l’imaginaire. Toutes les thématiques sont permises. Il n’y a pas de raison pour que les Sénégalais se plaignent de ce qui existe en ce moment et pensent que nos productions doivent représenter à la lettre ce qu’ils appellent « nos valeurs ». Cette schizophrénie doit cesser. Après tout, le pays va vibrer dans des festivals parce que tel ou tel réalisateur a eu un film dans un grand festival international. Ce, à commencer par l’Etat lui-même.
En lieu et place des canaux habituels que sont les chaînes de télé de la place, vous avez choisi Internet et wido…
Le grand public sénégalais a l’habitude de la gratuité, il fallait créer la rupture. Wido est la plateforme d’Orange Sénégal payante et mon coproducteur principal est Orange studio France. L’intérêt d’un coproducteur, c’est de recouvrer ses fonds. Alors, il faut faire du chiffre. Nos productions ne peuvent pas vivre de subventions uniquement. Après Wido, la série sera distribuée sur toutes sortes de canaux jusqu’à nos télés locales un jour. En attendant, un épisode est visionné à à100 F Cfa. Ce n’est pas un bras, c’est changer d’attitude envers la création qui est importante.
Comment jugez-vous l’évolution du cinéma sénégalais ?
C’est l’étape du moment qui m’intéresse. 2021 et à venir, je sais que ça a été une année particulière. La condition sanitaire du monde est alarmante et nos productions ont souffert. Ma jauge à moi, c’est le Fespaco, notre festival de cinéma du continent. Cette année, le Burkina Faso, pays organisateur, a fait du Sénégal son invité d’honneur. C’est à cet événement là que nous devons étaler notre moisson. Le savoir-faire qui grandit en fiction, long et court métrage, documentaire et série pourra s’étaler et prouver l’évolution de notre cinéma et audiovisuel. Je ne parle pas de compétition. Je parle de proposition artistique pour un pays qui se targue d’avoir eu deux maitres comme Ousmane Sembene et Djibril Diop Mambetty. A cet effet, pour cet événement prévu en octobre de cette année, nous espérons faire preuve d’organisation et d’excellence avec un concept et un vrai programme et une délégation solide et représentative de tous les corps de métier de notre discipline. Bien-sûr, il ne faut pas oublier d’emmener avec nous les acteurs des autres disciplines artistiques. Mais tout cela se réfléchit et s’organise. C’est mon message personnel au Chef de l’Etat en tout cas.
À l’origine le milieu était accaparé par les hommes, Safi Faye mise à part. Actuellement, beaucoup de femmes ont investi le créneau et sont devenues des réalisatrices confirmées…
Le cinéma, la production télé visuelle sont assez récents. Finalement, en y repensant bien, l’ère numérique a fait souffler la démocratisation du secteur. C’est normal que nous soyons à une époque où il y a plus d’engouement chez les hommes comme chez les femmes pour le métier. La nouvelle génération vit les questions de genre différemment de l’époque. C’est tous les produits qui devront être de qualité que l’on soit homme ou femme. Je reste cependant une grande défenseuse de la discrimination positive car les histoires racontées par les femmes ont quelque chose que les mentalités sur le continent ont besoin.
Photographe, vidéaste, réalisatrice et écrivaine. Qu’est –ce qui fait courir Fatou Kande Senghor ?
Je suis une artiste, une citoyenne, une maman, un être plein de passion et motivée par le collectif, la transmission et la création en masse. Je ne suis pas une compétitive, une accapareuse ou je ne sais quoi que les gens s’autoproclament dès qu’ils sont reconnus dans un milieu et j’aime les compétences réelles. Vous voulez défendre, parler, représenter, protéger, organiser, vous avez intérêt à apprendre le métier. La théorie, la pratique et la réflexion pour faire une différence constructive et utile. Nous vivons dans un pays où l’amateurisme peut être plébiscité, l’ignorance validée, la méchanceté cautionnée. Moi, je fais attention de sorte que ni ma création ni ma personne ne soient prises au piège dans ces prismes-là.
Pouvez-vous nous expliquer cet attrait manifeste pour les cultures urbaines. Seriez-vous une rappeuse ratée ?
Oui ! J’aurai pu être une super rappeuse et je le regrette tous les jours. J’ai 50 ans. Ce que le rap était au début, je ne vois pas de famille qui était assez ouverte d’esprit pour vous laisser oser le faire en public. Je reste sur ma faim, car ma chance est passée. Cependant, les jeunes sœurs au Sénégal ne tiennent pas la route au-delà des 40 ans. Elles sont prises dans l’étau des fantasmes de la communauté, du clan, de la religion, du patriarcat. Personne n’envisage d’exister pleinement dans son art avec un mari, un bébé et une belle famille fière de ce que vous faites. La pression est trop forte et elles ne sont pas assez solides pour y résister.
Quelle surprise nous réserve encore Fatou ?
Le Hip Hop et les cultures urbaines ne devraient pas être un fourre-tout pour cas sociaux et jeunes révoltés. C’est une communauté de guerriers des temps modernes, intelligente, vive, sincère et visionnaire acquise à la cause du vivre ensemble. C’est cet état d’esprit qui a permis à Fatou Kandé Senghor à devenir une artiste pluridisciplinaire en mission. Alors, les surprises, elles arrivent et toujours dans mon univers naturel Hip Hop.
Magatte Diop envisage de réunir la grande famille du cinéma au sein d’une même entité après le décès de Cheikh Ngaido Ba. Que vous inspire cette démarche ?