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24 juin 2025
par Yoro Dia
MANIPULATION ET PEUR ARTIFICIELLE DE LA GUERRE ETHNIQUE
Ces honorables messieurs, qui m’accusent d’ethnicisme ignorent que contrairement à ce que mon nom, mon prénom et peut-être même mon visage indiquent, je ne parle pas un mot de puular. Ma seule ethnie est le Sénégal
« Bonjour, nous savons que vous avez pris part dans l’affaire Sonko du fait de votre ethnie. Vous pensez pouvoir manipuler les Sénégalais jusqu’à ce qu’une guerre ethnique se déclare au Sénégal. Nous ne comptons pas vous suivre. Mais la prochaine fois que vous aurez un quelconque commentaire sur Sonko, nous règlerons les choses autrement. » J’ai reçu sur Facebook cette joyeuseté de monsieur Ibrahima Ndiaye. Je vais à la fois le rassurer doublement et le décevoir. Le rassurer parce que je ne lui ferai pas l’honneur d’une plainte, mais surtout le rassurer qu’il n’y aura pas de guerre ethnique au Sénégal. La peur de la guerre ethnique est purement artificielle parce que dans notre pays, les entrepreneurs identitaires d’où qu’ils viennent sont voués à l’échec.
L’harmonie ethnique et religieuse au Sénégal n’est le fait ou la volonté de l’État, mais a des racines sociologiques et historiques très profondes.
Senghor, issu d’une double minorité (ethnique et religieuse), a gouverné pendant 20 ans, de même que Wade, issu d’une double majorité. Contrairement à beaucoup de pays africains, nous avons des fondamentaux solides. Nous sommes une Nation et nous avons un État solide. Nos fondamentaux sont tellement solides que nous avons pu gérer notre crise nationale la plus grave (la Casamance) sans qu’elle ne dépasse une crise de basse intensité. Cette crise, comme je l’écris souvent, a permis au Sénégal d’adapter son contrat social qui est passé de « Nation une et indivisible » à Nation plurielle, mais indivisible. Et l’émergenc de Sonko est l’incarnation de ce Sénégal pluriel, mais indivisible.
La menace de la guerre ethnique est une manipulation politicienne, parce qu’il y a toutes les ethnies dans tous les partis, à commencer chez Macky et Sonko. Il y a toutes les ethnies dans toutes les confréries, dans tous les quartiers où l’ethnicité se dilue dans la socialisation. S’il y avait le réflexe ethnique primaire qu’on veut créer de toutes pièces, je doute fort que Me Tall et Me Ly soient les plus grands croisés pour défendre Sonko. Je vais décevoir ce bon monsieur Ibrahima Ndiaye, et je vais continuer à m’exprimer car, comme dit Jefferson, « quand on renonce à la liberté pour plus de sécurité, on ne mérite ni liberté ni sécurité » et mieux encore, chez moi à Thiaroye, on dit «ragal dou dieggi rail». C’est à cause de légions d’insulteurs et des menaces que les meilleurs d’entre nous dans le monde intellectuel avaient abdiqué de leurs responsabilités. Mais heureusement, il y plus de deux semaines, ce pays a pris la première dose du vaccin contre la terreur intellectuelle, avec le réveil des clercs (Ma chronique il y a deux semaines). Une deuxième dose ne sera pas nécessaire parce que le virus a été neutralisé et le Sénégal a secrété des anticorps et retrouvé ses réflexes normaux et naturels de pays de débats, de pluralité et même de polémique, car il n’y a que dans les dictatures où le silence (autocensure) devient une vertu par la peur.
Les dictatures sont silencieuses et les démocraties bruyantes de débats et de controverses. La semaine dernière, je parlais du talentueux Dr Goebbels qui avait inventé la notion de propagande ennemie pour l’ériger en rempart entre les Allemands et la raison ou le simple bon sens. Entre autres armes du Dr Goebbels, il y avait la stratégie qui consiste à attaquer l’émetteur pour détourner l’opinion du message. C’est une tactique primaire de manipulation. C’est ce qu’essaient de faire des messieurs comme Ibrahima Ndiaye en voulant m’enfermer dans le piège de la cage de l’ethnicité, parce que tout simplement j’ai parlé de petite Niominka, une anaphore pour exprimer mon empathie, pour ne pas dire ma pitié pour cette petite victime d’abus de faiblesses qui subit une double peine, parce qu’elle est «l’herbe victime de deux éléphants qui se battent».
Les entrepreneurs et manipulateurs identitaires y ont vu un « appel aux Niominkas ».Ils ont tort. Mon texte avait plus d’ambitions. J’en appelais à tous les Sénégalais et surtout à la République pour défendre Adji Sarr, qui subit une double peine (elle est victime s’il y a complot, elle l’est aussi s’il n’y a pas de complot). Elle est doublement victime parce que c’est la fille de personne, et la République qui est le système qui abolit le hasard de la naissance (privilèges) pour le remplacer par le mérite et l’égalité devant la loi, doit défendre les fils et les filles de personne. Comme moi, ceux qui nous ont gouvernés ou ceux qui gouvernent actuellement, sommes presque tous des fils de personne, qui devons tout à la République. Maintenant, monter l’expression petite Niominka comme un appel identitaire revient soit à avoir un problème de compréhension ou d’ignorance de notre répertoire symbolique traditionnel. Comme je suis de bonne foi, je plaide pour l’ignorance.
Personnellement, je n’ai jamais été vexé ou pris cela comme une question identitaire, quand je suis en Casamance et qu’un Manding, un Balante ou un Diola m’appelle Foulandingo (le petit peul), ou même qu’un Sérère ayant l’audace de réécrire l’histoire m’appelle Machoudo (mon esclave). Pour le machoudo, un peu quand même, parce que je ne reconnais ce droit qu’à mon ami instituteur Mbaye Ngoné Sène de Ndiaraw dans le Sandok, qui chaque année amène jusque chez moi un sac de mil et de niébé, prix pour lui de mon allégeance annuelle, ma famille et moi. Et depuis plus de 10 ans, je lui prête allégeance. Le fait de m’accuser d’ethnicisme a fait beaucoup rigoler mes amis, car ces honorables messieurs, qui m’accusent, ignorent que contrairement à ce que mon nom, mon prénom et peut-être même mon visage indiquent, je ne parle pas un mot de puular. Ma seule ethnie est le Sénégal pour une raison simple. Mon arrière-grand-père, après avoir converti le premier Damel, est resté dans le Cayor, ce qui fait que nous sommes devenus comme les Normands qui ont colonisé l’Angleterre, où tout ce qui est resté de français est le cachet de la Reine ou
du Roi : «Honni soit qui mal y pense, le Roi le Veult.» Tout ce qui m’est resté de puular est le nom et le prénom. J’ai des origines au Fouta, des racines séculaires dans le Cayor, je suis de culture lébou pour avoir passé toute ma vie à Thiaroye-sur-Mer, devenu un fundraiser du Casa-Sports (incarnation de la Casamance plurielle dans un Sénégal pluriel) et partisan du transfert de la capitale à Tamba (Ma chronique du 23 décembre) pour substituer la logique continentale à la logique atlantiste coloniale. Mon ethnie c’est le Sénégal, parce que comme tous les Sénégalais j’ai des appartenances et des identités plurielles et je refuse de couper l’une d’elles ou qu’on m’enferme dans l’une d’elles.
Donc, je tiens à rassurer ce bon monsieur Ibrahima Ndiaye qu’il n’y aura pas de guerre ethnique, parce que comme l’a écrit le Pr Makhtar Diouf dans les Ethnies la Nation, « le Sénégal est l’une des rares sociétés africaines à s’être détribalisé » et « desethnicisé » grâce, entre autres, aux deux melting-pots que sont le Wolof et les confréries. Nous sommes une Nation indivisible, mais plurielle. Les manipulateurs identitaires perdent leur temps et nous font perdre du temps, au point d’occulter des débats importants, comme le fait que la Mauritanie soit en train de devenir la plus grande alliée du Sénégal, certes grâce à l’histoire, mais aussi au business, avec le pétrole et le gaz, comme le modèle de l’Union européenne qui a substitué le business à la guerre comme mode de régulation de leurs relations, avec à la clé la plus longue période de paix et de prospérité de l’histoire de l’Europe.
Avec le pont de Rosso et celui de Farafegny, le Sénégal et ses voisins s’acheminent vers ce modèle qui inclura aussi la Guinée, malgré le ressentiment dont Alpha Condé accable le Sénégal (qui l’a sauvé des geôles de Lansana Conté) et qui
remonte à ses frustrations d’étudiant à la Feanf (Fédération des étudiants d’Afrique noire en France) avant les indépendances. C’est sur des chantiers aussi gigantesques ou ceux de l’emploi, de la sécurité nationale et le terrorisme entre autres qu’on devrait juger nos politiques qui veulent nous enfermer dans la distraction massive de la peur artificielle du conflit ethnique.
A côté du message de Monsieur Ibrahima Ndiaye, j’en ai reçu beaucoup d’autres qui partagent mon point de vue et d’autres naturellement très critiques, mais très courtoises. C’est cela le relativisme qui est l’âme de la démocratie et l’antithèse de la terreur intellectuelle.
VIDEO
LE SÉNÉGAL ET SES CRISES AU MIROIR DE DEUX INTELLECTUELS
Ce qui a longtemps fait la stabilité et l'unité du pays, parfois à coups de légendes, a cédé. Les hommes politiques ont troué la barque de la justice. La démocratie sénégalaise a toujours été surévaluée - ENTRETIEN AVEC MBOUGAR SARR & ELGAS
La chaîne de télévision itv acceuille à travers cette émission spéciale, deux intellectuels en la personne de Mohamed Mbougar Sarr et Souleymane Gassama alias Elgas, afin de décrypter la récente flambée de tension au Sénégal. Depuis la France, les deux penseurs posent un regard lucide sur la situation sociopolitique nationale marquée par des troubles multiples et multiformes.
LES DERNIERS MOTS DE PAPE DIOUF À SA FEMME, QUI LANCE UNE FONDATION À SON NOM
L'ancien président de l’OM, s’est éteint il y a un an jour pour jour à Dakar du coronavirus. Emue, sa veuve témoigne de son attachement viscéral à Marseille et lance une fondation à son nom
Pape Diouf, ancien président de l’OM, s’est éteint il y a un an jour pour jour à Dakar du coronavirus. Emue, sa veuve témoigne de son attachement viscéral à Marseille et lance une fondation à son nom.
Un an déjà. Le 31 mars 2020, Pape Diouf disparaissait soudainement à Dakar, à l’âge de 68 ans, des suites du coronavirus. Malgré une tentative de rapatriement sanitaire en France par l’intermédiaire de Julien Fournier, notamment, l’ancien président de l’OM est décédé avant de pouvoir monter dans un avion médicalisé pour rejoindre un hôpital à Nice. Laissant un grand vide auprès des supporters de l’OM, club dont il a été un président respecté de 2005 à 2009. Mais aussi de ses proches comme sa femme, Oumy, qui témoigne dans La Provence.
Elle souligne son adoration pour Marseille où il a gardé une place à part dans les cœurs. La réciproque était vraie. "En tout humilité, je ne pense pas être à la hauteur pour restituer avec les mots exacts l’amour qu’il avait pour Marseille et pour l’OM, poursuit sa veuve. Il le vivait et le respirait, et nous avec. (…) Marseille était son monde et l’OM sa maison. Il continuera de porter haut le drapeau de l’oM là où il est, en bon ambassadeur qu’il est."
Pour la procureure Fatou Bensouda, qui avait fait appel , cette décision est une nouvelle défaite. Pour Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé, c’est la fin d’une décennie de procédure
La chambre d’appel de la Cour pénale internationale a confirmé l’acquittement de Laurent Gbagbo et de Charles Blé Goudé, prononcé en première instance le 15 janvier 2019. Cette décision ouvre la voie au retour de l’ancien président ivoirien dans son pays.
« La chambre d’appel rejette l’appel du procureur et confirme la décision de la chambre de première instance. » Au terme d’un long exposé au cours duquel il est revenu sur les différentes étapes de la procédure, le Nigérian Chile Eboe-Osuji, président de la chambre d’appel de la Cour pénale internationale et ancien président de la CPI, a confirmé ce mercredi 31 mars l’acquittement de Laurent Gbagbo et de Charles Blé Goudé, prononcé en première instance le 15 janvier 2019.
Une heure avant, l’ancien président ivoirien avait fait son arrivée dans une CPI déserte en raison de la situation sanitaire. Devant le siège de la juridiction internationale, une vingtaine de ses partisans étaient quand même présents. En costume-cravate, portant des lunettes de soleil, Laurent Gbagbo, accompagné de son épouse Nady Bamba, se disait alors « confiant » quant à l’issue de la procédure. Et d’ajouter, sourire en coin en pénétrant dans le hall principal de la CPI : « C’est la première fois que je passe par ici et non par l’entrée des prisonniers ! »
Le bureau du procureur, qui dénonçait notamment des « vices de procédure », avait demandé à la chambre d’appel de revoir l’acquittement de Laurent Gbagbo et de Charles Blé Goudé en première instance et de conclure à un non-lieu.
UN MOUVEMENT POUR ALERTER LE PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE SUR LA VERITABLE SITUATION DANS SON «TITRE FONCIER»
S’étendant de Ndierba à Dembancané, c’est-à-dire du département de Dagana à celui de Bakel, le Fouta est un terroir très vaste habité par des Halpulaar, des Mandingues et des Wolofs
Manque d’infrastructures sanitaires et d’eau potable, routes dégradées, villages non électrifiés, réseaux téléphoniques défaillants, cherté des denrées alimentaires obligeant les habitants à s’approvisionner au Mali et en Mauritanie… Autant de maux décriés par les populations du Fouta qui se disent oubliées par les autorités politiques locales. Lesquelles ne s’intéresseraient à eux qu’à l’approche des élections. Face à cette situation peu reluisante, les Foutankés alertent le président de la République sur les urgences auxquelles ils sont confrontés.
S’étendant de Ndierba à Dembancané, c’est-à-dire du département de Dagana à celui de Bakel, le Fouta est un terroir très vaste habité par des Halpulaar, des Mandingues et des Wolofs. Un terroir dont les populations crient leur ras-le-bol et alertent le président de la République Macky Sall face aux maux dont elles souffrent. Des associations de jeunes du Fouta comme « Fouta Tampi », « Macky yejjo Fouta, « Mouvement Daandé Maayo Emergent », « Podor va mal », sont récemment sorties dans les rues pour manifester contre la descente sur le terrain de politiciens pour y tenir des rassemblements notamment dans les départements de Podor à Matam. Une jeunesse qui a manifesté son ras-le-bol et son désespoir en scandant que le « Fouta va mal » et que ce terroir est sacrifié tout en alertant le président Macky Sall sur l’urgence de s’atteler au développement d’une zone qui a d’énormes potentialités. « Le Fouta a de grandes potentialités dans tous les secteurs de l’agriculture, de l’élevage et de la pêche. Le problème majeur des jeunes est la formation. Il y a beaucoup d’étudiants originaires de ce « pays », mais le problème est qu’ils n’ont pas bénéficié d’une formation qualifiante qui réponde aux besoins du marché du travail. Malgré les nombreux diplômés, il n’y a pas de débouchés ni d’entreprise au Fouta » ont soutenu des jeunes du terroir des départements de Podor, Matam et Bakel, fuse le même cri de désespoir : le Fouta est abandonné, laissé à lui-même. Les politiciens ne font absolument rien pour le développement de la localité. Les habitants disent ne voir les politiciens qu’à l’approche des élections avec des promesses qu’ils ne respectent jamais pour berner et arnaquer la population désœuvrée.
La jeunesse, désemparée, émigre massivement en Afrique de l’Ouest (Côte d’Ivoire surtout) mais aussi en Afrique centrale (Gabon, Congo) si elle ne prend pas les pirogues de la mort pour tenter de rejoindre l’Europe. Ceux qui ne peuvent pas émigrer s’entassent à Dakar où ils végètent ou s’adonnent à de petits métiers. A Bakel, département frontalier du Mali et la Mauritanie, la population s’approvisionne dans ces pays. « La population est désemparée et préfère acheter des produits qui viennent de la Mauritanie et du Mali et qui sont plus accessibles. Quand les produits locaux arrivent à Bakel, ils sont cédés au double ou au triple du prix pratiqué à Dakar. Par exemple le prix de la tonne de ciment peut atteindre 90.000 francs alors qu’il tourne autour de 70.000 francs dans la capitale. Les commerçants se basent sur l’état des routes pour augmenter les prix. Les réseaux téléphoniques ne fonctionnent pas correctement ce qui fait que, pour joindre des correspondants dans certains villages, c’est la croix et la bannière. Et pourtant, nos localités bénéficient d’une excellente couverture des opérateurs de téléphonie mobile établis au Mali ou en Mauritanie », se lamente un jeune habitant de Bakel.
« On est sacrifiés mais on n’a pas le choix, Bakel est un département qui ne bouge pas mais qui essaie de faire de son mieux grâce à ses émigrés »
Les routes ne sont pas fonctionnelles, la plupart des structures de santé sont à l’agonie et manquent de tout. Des villages comme Alahina Bambara, dans le département de Bakel, ne sont toujours pas électrifiés. Il n y a pas de forage et l’eau potable est une denrée rare. Les femmes se battent pour survivre alors que les récoltes sont parfois détruites par les eaux de la pluie. Très dynamiques, beaucoup parmi ces femmes s’adonnent au maraichage. Hélas, il n’y a pas de châteaux d’eau dans la plupart des villages alors que les pompes tombent souvent en panne. Pis, les puits manquent d’eau. Malgré ces difficultés, ces braves dames réussissent dans leurs activités de maraîchage pour venir en aide à leurs familles. « Les jeunes veulent travailler, mais ils n’ont pas les moyens qu’il faut pour cela et l’Etat n’appuie pas la population. Nous n’avons pas d’électricité et on recharge nos téléphones portables grâce à des panneaux solaires. Le réseau téléphonique est aléatoire et il peut arriver souvent des jours sans avoir de nouvelles de nos familles. On est obligé d’aller jusqu’à Bakel pour se connecter. Nous mangeons des poissons « yaboye » pêchés depuis 2 à 3 semaines car la population se ravitaille en denrées alimentaires à partir de la Mauritanie et du Mali. Nous ne demandons pas grand-chose, mais juste ce qui est vital. C’est-à-dire, disposer de bons établissements sanitaires, de routes, d’électricité et de forages pour avoir de l’eau potable. Nous souhaitons aussi la diminution des prix des denrées alimentaires. De même, on voudrait des bassins de rétention pour donner aux jeunes et aux femmes la possibilité de travailler la terre pour diminuer l’exode rural », liste un cadre installé dans la capitale.
La route de Tamba-Bakel est dégradée, elle n’est plus fonctionnelle. Ce qui fait que les usagers sont obligés de la contourner pour prendre l’axe Ourossogui-Linguère. Les populations éprouvent ainsi du mal à voyager de Bakel à Dakar, trajet pour lequel il faut souffrir 14 heures durant. « Les autorités disent que l’argent pour refaire cette route est disponible, mais rien ne bouge. Certes, l’axe Tambacounda-Goudiri est presque terminé et nous en sommes reconnaissants au président de la République mais le tronçon Goudiri-Bakel, c’est l’enfer » se désole Zakaria Coulibaly, un habitant de Alahina dans le département de Bakel. L’hôpital de cette ville manque de tout et les femmes rencontrent énormément de difficultés pour y accoucher. Il n’est pas rare que les parturientes soient évacuées à Ourossogui, dans le département de Matam, pour y être délivrées. Une chose que les Bakelois jugent anormale dès lors que leur ville est un chef-lieu de département. Comme partout ailleurs à travers le territoire national, la conduite de motos-taxis Jakarta est la seule activité accessible à la jeunesse. Un scandale dans une zone qui regorge d’opportunités notamment avec la terre qui est fertile et aussi le fleuve Sénégal. « Il suffit juste d’être appuyés. On se sent délaissés. Ce sont les émigrés qui se sont substitués à l’Etat tout ici. Eux qui construisent des écoles, des dispensaires, des maisons de jeunes, des mosquées et participent au développement. Nos dirigeants ne font rien de concret pour les populations », dénonce encore Zakaria Coulibaly.
« Les habitants du Fouta réclament une université à vocation agricole et l’installation d’une centrale solaire pour le développement des potentialités de la zone
De Ndierba à Dembankhané, le Fouta a toujours bénéficié de l’apport de ses fils émigrés à travers des associations de développement. Et si, aujourd’hui, le Fouta s’est tant soit peu développé, c’est parce qu’il a bénéficié des écoles, des collèges et des lycées, des postes de santé, des cases de santé, des forages et de châteaux d’eau grâce aux immigrés et aux partenaires de développement réalisés par des associations de ressortissants établis à Dakar et à l’étranger. « L’Etat n’a donc absolument rien fait dans le Fouta depuis Senghor, Abdou Diouf et Abdoulaye Wade et c’est devenu aujourd’hui pire avec Macky Sall. Au-delà de l’émigration clandestine, qui est un phénomène très ancien puisque les Hal Pulaar sont de grands voyageurs, le Fouta est victime d’une saignée provoquée par un exode rurale », se désole un étudiant.
Pour fuir la pauvreté, les jeunes quittent leur terroir pour venir à Dakar effectuer de petits métiers. « Ce qui est important, c’est que l’Etat fait tout pour désenclaver le Daande Maayo, de Cas-Cas jusqu’à Nguidjilone en passant par Odobéré qui étaient avant des villages enclavés pendant la saison des pluies. Il faut qu’on soit honnêtes et sincères et qu’on dise la vérité. Le président Macky Sall a fait beaucoup de bonnes choses dans le Fouta. Ce que Macky Sall y a réalisé, aucun de ses prédécesseurs ne l’a fait dans le Fouta. Cela dit, il manque encore beaucoup de choses comme des infrastructures de base, des hôpitaux, des écoles et des lycées techniques, une université ainsi que l’aménagement des terres pour que les gens puissent s’adonner à l’agriculture afin de faire du Fouta comme le grenier du Sénégal. Nous avons l’eau, la terre et le soleil.
Au Fouta, les gens travaillent la terre, mais la Saed ne permet pas aux populations d’avoir des revenus décents. La Saed qui nous tue et le président Macky Sall doit s’intéresser de plus près à ce que fait réellement cette société d’aménagement. Elle ne fait qu’appauvrir les gens parce que quand tu produits de l’oignon, des pommes de terre, du maïs et du riz mais tu paies l’électricité, tu ne gagnes rien », confie Diakariya Niah, acteur de développement et membre du Collectif pour la défense des intérêts du Bossea. Selon lui, le président a à son actif de grandes réalisations dans les périmètres rizicoles de Podor, le désenclavement de l’île à Morphil et la réhabilitation de la RN 2 ou route de Ndioum. Cela dit, la réhabilitation de la route Ourossogui-Thilogne tarde à être effective depuis plus de trois ans. Quand un malade quitte Agnam ou Thilogne pour Ourossogui, avant d’arriver, il a de grandes chances de mourir parce qu’il n’y a pas de route.
Les ambulances, quand elles existent, sont en mauvais état du fait de l’état épouvantable des pistes ou des axes routiers. Les postes et les centres de santé sont au plus bas niveau. Il n’y a pas d’appareils d’échographie ni de radiographie. Les populations quittent leurs localités pour une échographie à Mbolo Birane dans le département de Podor. Il y a un problème d’équipements sanitaire à l’hôpital d’Ourossogui qui souffre de tous les maux. « L’hôpital central de la zone devait être du même niveau que celui de Touba. C’est déplorable aujourd’hui que les malades quittent Matam, Ourossogui et Bakel pour se faire soigner à Touba », se désole un cadre de la région. Nos interlocuteurs rappellent ainsi au président Sall leur vieille doléance relative à la construction d’une université à vocation agricole dans le Fouta. « Il est temps que le président érige ici une université pour répondre aux potentialités de la zone. Si des investissements de grande ampleur sont réalisés sur place, les Foutankobés ne vont plus quitter leur terroir pour aller chercher du travail à Dakar, dans les autres pays d’Afrique ou en Europe. Notre richesse se trouve dans nos terres du Walo et le Dieri.
Les gens qui veulent investir doivent venir discuter cartes sur table avec nous pour instaurer un partenariat gagnant-gagnant. Car, il n’et pas question de les laisser prendre nos terres et nous laisser pauvres. Encore une fois, nous disposons d’eau, de terre et de soleil pour notre développement. « Fouta Tampi », ce n’est pas pour s’opposer au président, mais c’est pour lui faire part de maux des Foutankobés qui sont bernés par les politiciens alors que les étudiants et les jeunes cadrent sont laissés rade » confie Moussa Sy, un étudiant. Cheikh Oumar Kane, étudiant originaire du département de Podor, estime qu’il faut financer les projets viables et porteurs d’espoir des jeunes. Des projets relatifs à l’agriculture pour répondre aux potentialités de la zone. « Il y a des démarches qui ont été menées au niveau du ministère de la Jeunesse et le conseil départemental à travers la DER, mais elles n’ont rien donné. Autrement dit, on n’a pas obtenu de financements. Il y a toujours des intermédiaires qui captent les financements. C’est ce qui retarde le département. Si la DER veut vraiment financer la jeunesse, il ne faudrait pas qu’elle passe par niveau du conseil départemental. Sinon, ça va être trop politisé et il y aura des détournements de fonds », a alerté un étudiant qui dispose d’un projet à faire financer.
Selon le responsable de de l’Alliance Pour la République (APR) à New York, habitant de Thilogne dans le département de Matam, Aliou Ngaido, c’est le droit absolu des associations de jeunesse de crier leur ras-lebol et de demander au président de la République de satisfaire leurs doléances. A en croire ce chargé de mission à la présidence de la République, le président Macky Sall a beaucoup fait pour le Fouta mais il reste énormément de choses à réaliser. « Bien que le président ait beaucoup réalisé dans le domaine de l’agriculture, l’aménagement des terres, l’électrification des villages, la construction des forages et le désenclavement de l’île à Morphil, la réhabilitation de la route de Ndioum, il faut qu’on sache qu’il est là pour tous les Sénégalais et aussi pour l’émergence de toutes les localités du pays. Le chômage des jeunes est universel, mais il faut reconnaître que la plupart de nos jeunes ne sont pas qualifiés. Nous sollicitons du président de la République qu’il mette des centres de métiers pour permettre aux jeunes du Fouta d’avoir des qualifications. Il faut que les ministres et directeurs généraux aident le président Macky Sall en écoutant les populations et en réglant leurs problèmes.
Le président a dit avoir compris les jeunes, il a dégagé 350 milliards pour conforter les jeunes désœuvrés et les faire sortir de la pauvreté. La seule solution pour le développement du Fouta c’est l’agriculture, cultiver les terre pour survivre, sortir de la pauvreté et aller vers l’autosuffisance alimentaire. Il faut que les autorités locales aident le président dans son élan d’émergence du Sénégal. Il faut qu’on finance les jeunes et les femmes qui s’activent dans l’agriculture, qu’on aménage les terres et qu’on installe une centrale solaire pour pallier à la cherté de l’électricité », préconise le chargé de mission à la présidence de la République.
CES RÉSIDUS DE L'OCCIDENT DÉVERSÉS À DAKAR
La capitale est devenue un gigantesque dépotoir de conteneurs renfermant toutes sortes de marchandises. Le moindre espace est inondé par des tonnes de friperies, de matériels électro-ménagers, de meubles, de scooters, venant de la Chine et de l’Europe
Dakar s’est complètement métamorphosée. En mal ! Plutôt que d’embellir, la capitale est devenue un gigantesque dépotoir de conteneurs renfermant toutes sortes de marchandises. Dans ce maelstrom, le moindre espace est inondé par des tonnes de friperies, de matériels électro-ménagers, de meubles, de scooters, de vêtements et de chaussures venant de la Chine et de l’Europe. Soucieux de l’état économique du pays, l’Union nationale des consommateurs du Sénégal dénonce cette situation de dépôtoir pour ne pas dire de poubelle. Toutefois, les populations ne se plaignent pas trop car les prix bas de la friperie, en particulier, les arrangent
Chaque jour, nos compatriotes prennent d’assaut les différents marchés de la capitale pour se ravitailler. Il est 7 heures du matin à Colobane, l’épicentre de la friperie. Un vent souffle sur tous les couloirs et ruelles du marché. A ce qu’il se dit, les prix sont pkus accessibles à cette heure de la matinée. Des colis viennent d’être déballés et leur contenu, des tonnes de friperie de toutes origines, sont étalés sur les tables. L’ambiance est si gaie que des jeunes commerçants se mettent à chanter, tapant des mains dans une parfaite symphonie. La tonalité musicale est donnée et tout le monde s’y met. Des acheteurs maitrisant les rouages du marché s’arrachent ces vêtements usagés. Une jeune dame est courbée, la tête baissée avec son petit sac flottant sur le côté et dans lequel se trouvent quelques tenues lourdes par cette période glaciale. Fatou Dieng vient de Pikine. « La friperie nous arrange, nous les pauvres. Surtout que les produits sont de bonne qualité et à la portée de tout le monde. Maintenant, nous savons que les commerçants viennent ici pour acheter des produits qu’ils revendent plus chers. J’ai trois enfants à la maison et il fait froid. Donc j’achète des pull-overs pour eux », confie la dame Fatou Dieng.
A l’en croire, même les supposés riches fréquentent le marché le plus célèbre de la ville pour se ravitailler. Juste à côté, un vieux marchand expose ses produits. Il vend des chemises. « Mon fils, j’ai souvent des clients au volant de belles voitures qui viennent passer des commandes. Je fais le tri des meilleures chemises pour eux qui sont mes clients préférés. Ces chemises, c’est de la qualité car elles viennent de Turquie », indique le vieux Mamadou Diop. A l’en croire, les prix pratiqués dans le marché sont à la portée de tout le monde, surtout les jeunes. Interrogé sur le fait de savoir si les importations massives de friperie ne concurrencent pas défavorablement l’industrie locale, notre interlocuteur souligne que le Sénégal ne dispose pas d’industrie textile que pourrait gêner la friperie. « Il appartient à l’Etat de créer les conditions d’une économie dynamique », conseille le vieux commerçant confortablement assis sur sa table et sirotant son café Touba pour se réchauffer le corps par ce froid matinal.
A Petersen, une Chine en miniature
Au marché de Petersen, les produits électro-ménagers venant de la chine inondent le marché. Dans ce milieu, des téléviseurs de toutes marques sont exposés, des réfrigérateurs, des machines à laver et fours micro-ondes de chauffage etc., Ismail Camara descend d’un taxi. Il est venu acheter une machine à laver. « Je suis venu acheter une machine à laver. Le propriétaire m’a appelé car je suis un fidèle client et je lui avais demandé de me trouver une machine. Le prix dépend du produit », informe Ismail Camara. A l’en croire, il veut lancer une deuxième entreprise de pressing après le succès de la première dont les machines ont été acquises auprès de son fournisseur de Petersen. Dans ce marché, on vend de tout. Batteries pour téléphones portables, câbles et autres sont proposés aux visiteurs. « Les gens viennent ici pour acheter des verres et autres vaisselles qu’ils revendent dans les boutiques de la place pour nous faire croire que les produits viennent fraichement d’Europe », confie une dame habituée de ce marché. Juste à côté, un camion transportant un conteneur est sur le point de décharger des produits de seconde qualité, bloquant les ruelles et couloirs du marché Petersen. « J’ai des parents qui sont en Europe et qui m’envoient ces produits que je revends facilement à des clients attitrés », confie un jeune homme, la trentaine, supervisant le déchargement du container. Au rond-point Liberté 6, tout le long des deux voies, des commerçants exposent leurs montagnes de chaussures venant de la Chine à des prix qui sont à la portée des clients.
Montagnes de chaussures «chinese» au rond-point Liberté VI
Les trottoirs sont ainsi occupés, donnant à l’endroit un joli décor. Une jeune demoiselle, physique avenant, vêtue d’une chemise colorée, 1,70 mètre dans un pantalon bleu ciel, est venue acheter des chaussures à quatre mille francs la paire. Aïcha sow est une cliente de ces marchands et vient fréquemment se procurer des chaussures qu’elle trouve accessibles et de bonne qualité. Dans la commune de Keur Massar, un magasin spécialisé dans la vente des fauteuils venant de l’extérieur attire chaque jour son monde. « Nos fauteuils, chaises et tables nous viennent de l’extérieur et les gens aiment tout ce qui vient d’ailleurs » confie le commerçant. Jean-Pierre Dieng, président de l’UNCS (union nationale des consommateurs du Sénégal), se veut être clair face à l’envahissement de tous ces produits qui ont fini par faire de Dakar une poubelle de l’Europe. « Nous ne pouvons pas nous développer avec cette politique. La ville est devenue une poubelle pour les autres pays. Nos commerçants sont dans des situations très précaires parce que le marché n’est pas protégé. Il faut que nos autorités pensent à une économie locale très performante et non transformer la ville en une poubelle de l’occident » se désole-t-il.
LES LIMITES DES LIBERTÉS DU JOURNALISTE
La presse sénégalaise demande depuis des années que l’Etat dépénalise les délits de presse
Les Fake news, la manipulation, les dérives telles que les insultes les plus ordurières polluent aujourd’hui le secteur des média. Interrogés par « Le Témoin » sur les limites de la liberté de presse, des confrères et conseillers en stratégie et organisation, donnent leur avis.
La presse sénégalaise demande depuis des années que l’Etat dépénalise les délits de presse. Une revendication mise sous le boisseau par les différents pouvoirs, de celui du président Abdoulaye Wade à celui de son successeur, l’actuel chef de l’Etat Macky Sall. Beaucoup de parlementaires, d’hommes politiques et de Sénégalais lambda ont toujours exprimé leur peur de voir des journalistes bénéficier de plus de liberté, voire d’une impunité totale pour porter atteinte à l’intégrité morale d’honnêtes citoyens ou de saper la cohésion sociale du pays à cause de leurs écrits ou de leurs commentaires audio ou visuels. Aujourd’hui, de plus en plus, plusieurs personnes par les canaux des nouveaux médias (sites d’information et les réseaux sociaux d’une manière générale) et même de la presse traditionnelle, attaquent des citoyens en usant de leur casquette de journalistes.
Le conseiller en stratégies et organisation Sarakhe Ndiaye, qui suit depuis plus de 30 ans la presse nationale, estime que la liberté du journaliste s’arrête là où se situe la limite fixée par l’observance des règles de son métier. « Le journalisme est normé et obéit à des considérations techniques, éthiques et déontologiques. Le cœur de son métier est de donner de l’information en se fondant sur des faits et d’éclairer la lanterne de ses lecteurs, auditeurs ou téléspectateurs. Si l’on veut parler du cas précis de Madiambal, il semble bien dépasser ce cadre pour se retrouver dans une posture moins indiquée en faisant fi de ce qu’exige sa mission », a indiqué M. Ndiaye.
A cet effet, il soutient que « la République a ses règles et nul n’a un blanc-seing pour dire tout ce qui lui est loisible. C’est la réputation et l’honorabilité des sujets sur lesquels on écrit qui en pâtissent. Donc, nécessairement, il faut savoir raison garder ». Sarakh Ndiaye insiste sur le fait que les journalistes doivent respecter les textes qui régissent leur métier. « Du fait des rapports de forces et des enjeux de pouvoir de toutes sortes, les journalistes deviennent des armes redoutables dans les guerres d’opinion. Ils sont alors à la merci des manipulations allant dans le sens de faire pencher la balance en faveur d’un camp. Et les intéressés ne lésineront pas sur tous les moyens imaginables pour parvenir à leurs fins.
Face à cette donne, seule la conformité aux règles professionnelles et éthiques peut sauver le journaliste », a-t-il conclu. Pour le chargé de communication du Cored (Conseil pour le respect des règles d’éthique et de déontologie), Samba Dialimpa Badji, le journaliste ne peut pas tout se permettre dans l’exercice de son métier. « L’exercice du travail de journaliste est encadré par la loi. Il y a d’abord le code pénal qui énumère dans sa section 6 les infractions commises par tous moyens de diffusion publique. C’est le cas de la diffusion des fausses nouvelles, de la diffamation. Il y a ensuite le code de la presse qui parle des devoirs des journalistes. Ces deux textes montrent clairement que le journaliste ne peut pas tout dire sans être inquiété », rappelle Samba Dialimpa Badji.
C’est dans la même lancée qu’abonde l’ancien directeur de publication du quotidien « EnQuête », Ibrahima Khalil Wade. « Je pense que la liberté des uns s’arrête là où commence celle des autres. Ce principe sur la liberté est sacré. Partant de ce fait, nul n’a le droit, au nom de la liberté, de porter préjudice ou bien du tort à ses semblables à travers ses écrits, paroles ou comportements. Ces remarques sont plus valables encore chez le journaliste. Ce dernier n’est pas n’importe qui dans une société, son rôle est certes d’informer vrai et juste, mais il ne doit jamais perdre de vue que : tout ne se débat pas. Il y a des lignes rouges à ne pas franchir. Et il est de notre devoir de dénoncer tous ceux qui, pour une raison ou une autre, tentent de semer la zizanie dans notre nation. Personne n’a le droit d’anéantir notre cohésion sociale », estime Ibrahima Khalil Wade.
A l’en croire, la liberté de presse n’autorise pas le journaliste à verser dans les excès. « Liberté ne signifie pas libertinage. Il faut de la mesure et de la responsabilité en tout. Il est grand temps que les gens reviennent à la raison. Si la pirogue Sénégal sombre, personne ne s’en relèvera. D’où l’intérêt pour tous les acteurs, y compris et surtout les journalistes, de prendre de la hauteur et d’être plus responsables dans les actes qu’ils posent au quotidien », a conseillé, pour conclure, l’ancien directeur de publication du quotidien « EnQuête ».
PAR Habib Sy
REFLEXION SUR LA THÉORIE DE LA RÉVOLUTION AFRICAINE PRÔNÉE PAR OUSMANE SONKO
Le leader de Pastef certainement dopé par sa nouvelle popularité incontestée, tant au plan national qu'international, a cru devoir porter sur ses épaules la conscience d'une révolution africaine.
Après sa libération, suite à sa garde à vue liée aux événements douloureux du début du mois de mars 2021, le leader de PASTEF, certainement dopé par sa nouvelle popularité incontestée, tant au plan national qu'international, a cru devoir porter sur ses épaules la conscience d'une révolution africaine.
L'ampleur, sans précédent de la révolte, ainsi que son intensité, menée essentiellement par la jeunesse, l’ont à coup sûr inspiré, au point qu'il ait tenu les propos selon lesquels, les prémices, ou les préludes de la révolution africaine pourraient voir le jour au Sénégal. Nous pourrions même nous épargner le conditionnel, dans la mesure où la puissance du discours traduisait une forte conviction.
Théorie à priori séduisante, que nous ne pouvons ranger dans un idéel de jeunesse politique. Certes, le mot théorie est souvent employé dans un esprit péjoratif, pour en déprécier le sens. Mais le sujet est d’une importance qui ne saurait autoriser pareille conception. Pour nous, il s’agit plutôt d’une « conception méthodique, systématiquement organisée… » André Lalande.
Bien que novice dans l’arène politique, l'homme a fini de prouver sa maturité, son sens de la responsabilité et son patriotisme pour un pays qu'il est prêt, et certainement apte à diriger, par la voie des urnes. C'est, nous le pensons, cet attachement à la démocratie qui explique qu'il ait utilisé le concept de « révolution africaine » qu’il veut pacifique. Un glissement sémantique qui a son importance pour les analystes de son discours politique et ses camarades de l’opposition.
L'homme anti- système a-t-il brusquement changé de doctrine ? Le soulèvement populaire dont il a été incontestablement le déclic, a-t-il imprimé chez lui une pensée nouvelle, un élargissement, une extension de la mission qu’il s’est construite, et que lui confère aussi une frange importante de la population ? Autrement, a-t-il opéré une révolution d'approche, de vision ou de projet de société ? La question mérite d'être posée.
En effet, si l'antisystème est compris comme l'élimination d'un ensemble de pratiques, la révolution, brusque, brutale ou pacifique, consiste en l'instauration d'un ordre nouveau. La différence n'est pas simplement sémantique, étant entendu qu’en plus d'être un changement politique, la révolution, c’est aussi un bouleversement de l’ordre social. L’instauration d’un ordre nouveau est la substance, la quintessence de la révolution.
Le leader de PASTEF, pour le moment, n’a décliné aucun contenu de la « révolution africaine » qu’il veut prôner. Apprenant de l’histoire, nous sommes fondé de nourrir des craintes. L’ordre nouveau ne serait-il pas, l’ordre de la puissance brandie au nom d’une nouvelle élite de maitres, investis d’un pouvoir plus nocif que celui qu’il a supplanté ? Interrogation légitime, dans la mesure où, l’avènement de cette révolution ne bouleversera aucun ordre social.
En somme, la question du progrès de l’Afrique, libérée des scories, de dirigeants à la solde de puissances étrangères, de politiques de prévarication des ressources financières et du sous-sol , de corruption, et de trucages des élections, trouve-t-elle la réponse dans l’accomplissement d’une révolution à dimension continentale, dont le Sénégal serait le précurseur ?
La réponse d’Ousmane Sonko semble sans équivoque, étant entendu que ses propos ne font l’objet d’aucune ambiguïté. Soit ! Alors ! Le printemps arabe serait-il un épiphénomène à classer dans la catégorie des révoltes spontanées, sans un sous bassement social solide ? Etait-ce vraiment une révolution ?
Ne pouvant répondre avec certitude, on pourrait prêter à Ousmane Sonko l’intention de jeter les bases d’une « véritable » révolution africaine à partir du Sénégal. Nous pensons autrement. Plus qu’une révolution, l’Afrique a besoin d’une Renaissance pour se réconcilier avec elle, et tracer les voies de son futur. Pour être ce qu’elle aujourd’hui, l’Europe a du entreprendre une enjambée de plus de mille ans dans son passé. Au XVIe, les grands esprits de la renaissance sont allés puiser dans les pensées et institutions de la Grèce antique et de Rome.
Ainsi, ils ont découvert que ce système politique appelé démocratie, qui selon Churchill est «le pire des systèmes à l’exclusion de tous autres» était une construction de leurs ancêtres grecs. Ils l’ont repensé, remodelé, refondé, pour, aujourd’hui en faire la base de tout contrat social, qui a pour but d’assurer le progrès et le bien être des parties. Ils ont aussi trouvé, que leurs ancêtres avaient l’esprit tellement juridique, qu’ils ont conçu la république. Certes, plus de mille après, sa restauration est passée par des révolutions brutales, mais au prix de l’installation d’un nouvel ordre social. Des institutions solides, l’Afrique en connues bien avant l’arrivée de Barack Obama au pouvoir, aux Etats Unis. La charte du Mandé, et le long séjour à l’extérieur de l’empire, du Mansa Moussa, lors de son pèlerinage à la Mecque, en sont des illustrations.
Des révolutions qui ont renversé un ordre social ne sont pas une nouveauté en Afrique. Près de nous, au Fouta, en 1776, Thierno Souleymane Baal a réalisé la révolution Torodo. Il nous a légué un corpus d’une organisation institutionnelle et politique, susceptible, ou plus exactement, apte à résoudre les travers de notre «vouloir vivre une vie commune. » Mais les africains sont en rupture avec leur histoire, entendue au sens de connaissance des différentes manières d’être par le passé, des peuples et des institutions du continent. Le rapprochement avec notre histoire pour en tirer la substance fondatrice de notre organisation sociétale est une mission titanesque, plus compliquée, plu sdélicate et plus difficile qu’une révolution.
Aussi, sont –ils rares, voire inexistants, les dirigeants qui ont osé ou tenté de l’entreprendre. Les fondements théoriques ont déjà été posés par Cheikh Anta Diop, et vulgarisés plus ou moins par d’autres panafricanistes. Il faut maintenant une masse critique de leaders à la tête des Etats africains, et de sociétés civiles, nourris et moulés à la sève panafricaniste, animés de la volonté de puiser dans notre fonds historique et culturelle, pour poser les premiers jalons de la construction d’une Afrique debout, digne, indépendante et progressiste. A moins que la révolution ne soit une renaissance, notre réflexion est différente de celle d’Ousmane Sonko, qui ne peut être une panacée pour l’Afrique. C’est l’opinion d’un grand frère, admiratif d’Ousmane Sonko, dans son combat pour les libertés et la démocratie, et avec qui il partage le front de l’opposition.
LE POUVOIR NE LACHE PAS LE CLAN SONKO
Djiby Guèye Ndiaye, chef de protocole du leader de Pastef, va être entendu dans le cadre des manifestations du 8 février dernier après le refus d’Ousmane Sonko de déférer à la convocation de la Section de Recherches de la Gendarmerie
Le chef de protocole du leader de Pastef est attendu ce matin devant les enquêteurs de la Division des Investigations Criminelles (Dic). Djiby Guèye Ndiaye va être entendu dans le cadre des manifestations du 8 février dernier après le refus d’Ousmane Sonko de déférer à la convocation de la Section de Recherches de la Gendarmerie. Une nouvelle affaire judiciaire qui risque d’assombrir le vent d’apaisement qui souffle depuis quelques temps.
Le pouvoir a toujours le Pastef dans son collimateur. Après son N°1 Ousmane Sonko, son administrateur général Birame Soulèye Diop, le coordonnateur de la section Pastef de Dakar, Abass Fall et les nombreux «Sonko boys» qui ont été arrêtés, c’est au tour de Djiby Guèye Ndiaye d’avoir maille à partir avec la justice. En effet, le chef de protocole du leader de Pastef a reçu une convocation verbale de la Dic. Il va être interrogé, aujourd’hui, sur les manifestations qui ont éclaté, le 8 février dernier, devant le domicile de l’ancien inspecteur des Impôts et Domaines suite à son refus de déférer à la convocation de la Section de Recherches dans le cadre de l’enquête sur les accusations de viols et de menaces de mort dont il fait l’objet de la par de Adji Raby Sarr.
Toutefois, selon un responsable patriote contacté par «L’As», les motifs de cette convocation ne son pas connues. «Nous attendons demain (ndlr, aujourd’hui) pour voir exactement ce qu’on lui reproche. S’il s’agit de l’oppression comme ils ont voulu faire avec notre président Ousmane Sonko, nous allons résister. Mais, pour le moment, nous ignorons le fond du dossier», affirme au bout du fil notre interlocuteur. Il urge de signaler que cette nouvelle convocation d’un membre de Pastef survient moins d’une semaine après la libération de beaucoup de responsables (Birame Soulèye Diop, Abass Fall) et militants patriotes. Ces libérations entrent dans le cadre du désamorcement de la bombe politico-sociale née de l’arrestation d’Ousmane Sonko.
D’ailleurs, le Mouvement pour la Défense de la Démocratie (M2D) avait, dans un mémorandum de dix points, posé ses exigences au chef de l’Etat. Il s’agit notamment de la libération de tous les détenus politiques et de l’organisation des élections locales en 2021. C’est dire qu’avec cette nouvelle convocation, le pouvoir risque de raviver la tension qui semble être sur une pente descendante après l’intervention du Khalif général des Mourides.
Serigne Mountakha Mbacké a joué les bons offices en demandant au pouvoir et à l’opposition de taire leurs égos et de trouver une issue heureuse à la crise politico-sociale qui a causé la mort d’une dizaine personnes et fait plusieurs blessées. Sur les réseaux sociaux, beaucoup de patriotes sont sur le pied de guerre et appellent à la résistance. «Les arrestations et convocations continuent… Djiby Guèye Ndiaye à la DIC demain. #FreeSenegal», a publié El Malick Ndiaye, un des membres du pôle communication de Pastef sur sa page Facebook.
En effet, la convocation de Djiby Guèye Ndiaye, une des pièces maitresses du système de Pastef, peut constituer une bombe entre les mains du pouvoir. D’autant que lors de sa visite chez le mouvement Frapp France-Dégage, Ousmane Sonko avait clairement mis en garde le pouvoir contre tout non-respect des exigences posées par le M2D. « La deuxième vague de manifestations risque d’être plus dévastatrice que la première, parce que le peuple est déjà conscient et mobilisé», avait indiqué le chef de file des «Patriotes». Alors, le report des élections locales et cette nouvelle convocation d’un membre de Pastef peuvent constituer une goutte d’eau qui va faire déborder le vase.
par Elhadji Ibrahima Thiam
L'UCAD, CE HAUT LIEU DE VIOLENCE
L'université est comme un poste-frontalier qui, dès qu’on le franchit, nous plonge dans une zone de non-droit où les contradictions se règlent à coups de machette ; où les forces de l’ordre n’osent pas s’aventurer
En d’autres temps et d’autres circonstances, les affrontements de la semaine dernière entre deux groupes d’étudiants à l’Ucad seraient considérés comme un simple grabuge. Un de plus. Comme l’Ucad a fini d’en être habituellement le théâtre. Ça n’émeut même plus personne. Mais le contexte dans lequel cette bataille rangée a éclaté lui a donné des échos de portée ethnique. Pas étonnant. Depuis quelques temps, le fait ethnique revient avec persistance dans le débat public, alimenté aussi bien par des hommes politiques que par des hommes de média. À tel enseigne qu’aujourd’hui, tout acte isolé, même à l’échelle d’un hameau, par exemple une banale rixe entre un berger et un cultivateur pourtant très fréquent, aurait toutes les chances d’être analysé à l’aune d’un conflit inter-ethnique. Ce qui s’est passé donc l’autre jour à l’Ucad a pris de la mousse parce qu’il a trouvé un terreau fertile entretenu, on le disait, à coups de bêche par des individus qui n’ont que faire de la cohésion nationale.
Sinon, c’est connu, à l’Ucad, la violence est endémique et cela ne date pas des affrontements de l’autre jour. Des bagarres à relents communautaires (confrériques) ou pour le contrôle des amicales voire pour l’amélioration des conditions de vie ou d’études ont rythmé la marche de ce présumé temple du savoir. Ce qui est nouveau, par contre, c’est ce conflit sur la base de l’appartenance ethnique. Semble-t-il, les deux camps ont fait la paix, tant mieux.
Cependant, ce fâcheux épisode ne fait que nous rappeler ce qu’est devenue l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar depuis longtemps : un sanctuaire de la violence physique. L’Ucad, c’est comme un poste-frontalier qui, dès qu’on le franchit, nous plonge dans une zone de non-droit où les contradictions se règlent à coups de machette ; où les forces de l’ordre n’osent pas s’aventurer, à quelques rares exceptions près, à cause des franchises universitaires. Qui aurait cru que des policiers seraient acclamés un jour au campus ? Pourtant, c’est ce qui est arrivé quand les deux groupes d’étudiants s’étripaient à mort. L’incursion dans le campus social des forces de l’ordre sur la demande du Recteur pour mettre un terme au déchaînement de violence a soulevé des applaudissements nourris de pensionnaires sans doute excédés par l’impunité qui a fini de s’installer dans l’espace universitaire. Que n’a-t-on pas dit lorsque, en fin février dernier, la Direction du Coud a saisi des armes blanches à l’intérieur du campus social ? À l’époque, la lourde ambiance politico-judiciaire qui prévalait avait amené certains à parler de coup monté pour charger des sympathisants d’un leader politique. Ne fuyons pas la réalité, «le présumé haut-lieu de l’exigence est devenu, avec l’usure du temps et les vicissitudes du sous-développement un bouillon d’insouciance où pourrissent les talents les plus prometteurs», écrivait déjà, en 1991, le caustique et brillant chroniquer Ibou Fall.
Trente ans après, les choses vont de mal en pis. Pour paraphraser Mamadou Sy Albert, l’époque de l’étudiant militant est révolue. Dans son ouvrage «Ucad cinquante ans après : Les mutations profondes de la communauté universitaire», paru en 2011, le journaliste pose un regard d’une rare justesse sur les bouleversements sociologiques intervenus au sein de l’espace universitaire durant ces dernières années. Il relève que, de politique entre 1960 et 1980, le mouvement syndical étudiant sénégalais nourris aux grandes idéologies du changement a transmuté à partir des années 1980 pour devenir une simple caisse de résonnances des revendications à caractère purement social et pécuniaire. Non sans faire remarquer que la disparition de l’Union nationale patriotique des étudiants du Sénégal et de l’Union des étudiants de Dakar a favorisé l’émergence des Amicales dont les renouvellements constituent, chaque année, à l’exception des Ecoles et Instituts ou encore de la Faculté de Médecine, des moments de vives tensions. «Le mouvement étudiant n’est plus mobilisable autour de questions de société. Il devient plus économique, plus social, plus culturel, plus religieux, bref il est moins idéologique. Les positionnements obéissent désormais à des logiques de groupes tissés dans un même espace pédagogique, dans le territoire de la communauté villageoise, de la commune ou de la région. L’appartenance à la même communauté religieuse, culturelle et linguistique se greffe sur ces liens de camaraderie. Ce n’est plus l’appartenance à des organisations politiques divergentes par leur projet de société ou par leur démarche syndicale de gestion des problèmes sociaux et académiques qui crée les clivages entre les étudiants», écrit-il. Il a raison, on n’a même déjà vu, à l’Ucad, un regroupement des homonymes d’un défunt grand marabout ou encore, plus saugrenu, une association d’étudiants jumeaux.