Des activités pluvio-orageuses d’intensités modérées à assez fortes par endroits sont prévues sur la quasi-totalité du pays de vendredi à dimanche, a annoncé jeudi l’Agence nationale de l’aviation civile et de la météorologie (ANACIM).
L’ANACIM, qui a émis un bulletin météorologique spécial, précise que ces activités pluvio-orageuses toucheront notamment les régions sud et centre-ouest.
Dans une carte de vigilance, elle évoque un risque élevé pour ces deux parties du territoire, un risque modéré pour l’est, le centre et l’ouest et un risque faible pour le nord du territoire.
"Ces pluies accompagnées d’orages intéresseront le territoire par la partie Est en fin d’après-midi du vendredi et se généraliseront sur l’ensemble du pays au courant de la journée du samedi", expliquent les prévisionnistes.
Ils ajoutent que "ces manifestations pluvieuses se maintiendront sur les régions sud et le long du littoral au cours de la matinée du dimanche". "Une vigilance particulière s’impose", selon eux.
par l'éditorialiste de seneplus, Alymana Bathily
DE SENGHOR À MACKY SALL, LE COUP D’ÉTAT PERMANENT
EXCLUSIF SENEPLUS - Le président songerait à former un gouvernement d’union nationale. Ce ne serait rien de bien nouveau. L’enjeu, c’est d’assurer la survie du système pour encore cinq ou même dix ans au moins
Alymana Bathily de SenePlus |
Publication 17/09/2020
Le président Macky Sall penserait à former un gouvernement d’union nationale. Ce ne serait rien de bien nouveau : il s’agira d’un remake du « gouvernement à majorité présidentielle élargie » d’Abdou Diouf de 1995.
Le président en exercice marche en fait sur ce point comme sur d’autres, sur les pas de son prédécesseur socialiste qui lui-même suivit les traces de celui dont il a hérité de la fonction par dévolution constitutionnelle, si l’on peut dire. Tout comme le président Abdoulaye Wade qui ne toucha en rien au système politique conquis pourtant de haute lutte.
En fait, de Senghor à Macky Sall, il s’est agi de renforcer sans cesse les pouvoirs déjà exorbitants du président de la République et d’allonger autant que possible la durée de son mandat, avec la bénédiction du judiciaire, Cour Suprême ou Cour constitutionnelle.
De Senghor à Macky Sall
Les constitutionalistes indiquent que de 1960 à nos jours, notre pays a adopté successivement trois constitutions et pas moins de 8 révisions constitutionnelles dans le seul but de renforcer sans cesse les pouvoirs du président de la République, d’en prolonger la durée du mandat au-delà de l’échéance initialement convenue et même d’en contrôler la transmission.
C’est cela le « coup d’état permanent » au Sénégal : cette constitution qui fonde un président tout puissant, des maquignonnages récurrents du texte fondamental et des institutions de la République pour conforter sans cesse les pouvoirs du président de la République, allonger la durée de son mandat, enlever toute limitation et annihiler toute capacité à toute institution d’exercer le moindre contrôle de l’Exécutif.
Ainsi dès 1967, le président Senghor revient sur la constitution qu’il avait commanditée et fait adopter après le coup d’état contre Mamadou Dia en 1963 : la durée du mandat est portée de 4 à 5 ans et la limitation des mandats est supprimée. Aussi se fit-il élire après 1963, en 1968, 1973 et 1978.
Il institue à nouveau en 1970 le poste de Premier ministre qu’il avait pris soin de supprimer puis fait insérer un article 35 dans la constitution de 1976 faisant du Premier ministre son dauphin.
Le dauphin constitutionnel Abdou Diouf disposera des institutions de la République dans le même esprit que son prédécesseur. Pour renforcer « l’autocratie présidentielle », il fera du Secrétaire Général à la présidence de la République M. Jean Collin, la deuxième personnalité de l’Etat grâce à son contrôle du Parti Socialiste au pouvoir, de l’Assemblée Nationale et de l’administration publique.
Il se fera ainsi élire en 1981, puis 1988 et en 1993, puis face à la montée de l’opposition malgré la répression, il rétabli le poste de Premier ministre supprimé dès 1983, instaure en 1995 « le gouvernement de majorité présidentielle élargie » auquel participe les principaux partis d’opposition. Il obtient ainsi un répit pour finir son troisième mandat tout en se donnant une image de rassembleur qui contribuera à lui aménager une sortie honorable du pouvoir.
M. Abdoulaye Wade qui arrive au pouvoir en 2000 porté par une espèce de front commun des forces de gauche et qui fait adopter aussitôt de manière consensuelle une constitution qui reste cependant dans l’esprit de celle de Diouf et Senghor, persévèrera dans la logique du renforcement constant du pouvoir présidentiel autocratique.
Du report de l’élection présidentielle du 25 janvier au 3 juin 2007, au décret établissant la répartition des députés par département, de la suppression du Sénat à la création du Conseil de la République pour les affaires économiques et sociales (CRAES) puis au remplacement de cette institution, M. Wade aura tout fait pour phagocyter les institutions de la République ou les liquider tout simplement.
Il voulut même faire adopter par l’Assemblée nationale, un projet de loi adopté le 16 juin 2011, à quelques mois du scrutin de février 2012, permettant l’élection du président de la République au premier tour à la majorité simple avec seulement 25% des suffrages, avec un « ticket présidentiel » dont le vice-président serait à la fois l’adjoint et « l’héritier constitutionnel » du président.
On vit bien que c’était là le parachèvement de « la dévolution monarchique » du pouvoir qu’il concoctait de longue date et qu’il s’agissait de se faire succéder par son fils Karim Wade.
Le 23 juin 2011, la mobilisation populaire en face de l’Assemblée nationale, l’obligea à retirer le projet de loi en catastrophe. Il perdit les élections de février 2012 qui étaient les troisièmes auxquelles il prenait part alors que la constitution de 2001 qu’il avait lui-même élaborée limitait les nombre de mandats présidentiels à deux.
Et maintenant Macky Sall
Macky Sall qui a battu le président Wade à l’issue du deuxième tour de l’élection présidentielle de février 2012 avec le soutien de l’ensemble de l’opposition et de la société civile, sur la vague promesse d’appliquer les recommandations des Assises Nationales, s’inscrira en fait dans la continuité de ses prédécesseurs.
Des Assises Nationales, il fera semblant dans un premier temps de retenir certaines recommandations en organisant des commissions sur la réforme des institutions, sur le foncier et sur la justice sans jamais les mettre en œuvre.
Il reviendra sur son engagement pris avant le deuxième tour de la présidentielle de ramener dès son arrivée au pouvoir la durée du mandat présidentiel de 7 ans à 5 ans et reportera par référendum constitutionnel la mise en œuvre de la réforme de la constitution dans ce sens au prochain mandat.
En 2017, il fera arrêter et condamner à 5 ans de prison le maire de Dakar Khalifa Sall qui apparaissait alors comme son principal challenger à l’élection présidentielle de 2019.
Puis il introduit en avril 2018, un système de parrainage qui lui permet de réduire drastiquement le nombre de candidats. Il est élu pour un second mandat à l’issue de l’élection du 24 février 2020 avec les moyens de ses prédécesseurs : implication de l’administration et des marabouts et corruption de masse.
A peine élu, il supprime le poste de Premier ministre incarnant désormais l’Exécutif à lui tout seul et après un mandat de 7 ans et à l’entame d’un deuxième de 5 ans, ne voilà-t-il pas qu’il déclare ne dire « ni oui ni non » quant à son intention de briguer un troisième mandat ?
Puis de convoquer « une concertation nationale » dans le dessein manifeste de rééditer le coup d’Abdou Diouf du « gouvernement de majorité présidentielle élargie » qui lui donnera une porte de sortie à travers un « dauphin constitutionnel », permettant ainsi au système de se perpétuer comme naguère ou par le biais d’un « chef de l’opposition » adoubé. Ou même en s’obligeant à un troisième mandat.
En attendant, on reportera encore les élections locales initialement prévues en juin 2019 puis en décembre 2019 et maintenant en mars 2021 (?). Il s’agit de gagner du temps. L’enjeu, c’est d’assurer la survie du système pour encore cinq ou même dix ans au moins.
Quand l’action citoyenne sollicite la magie des réseaux sociaux, chaque citoyen peut devenir un héros à sa manière. Cette manière de faire, Niintche, instituteur adjoint à l’école 3 de Keur Madiabel, essaie d’en faire une philosophie
Aux revendications et manifestations, il préfère l’action. Celle citoyenne, consistant à ne plus attendre l’Etat pour agir pour sa communauté. Lui, c’est Junior Diakhaté. Mamadou à l’état civil. Mais vous pouvez l’appeler ‘’Niintche’’, un mot ndiago qui signifie ‘’homme mature’’. ‘’Des amis me l’avaient donné et je l’ai conservé, puisque ce que nous faisons s’identifie ça’’, explique-t-il l’origine de ce surnom.
On peut le croire, car un inconscient n’officie pas, comme lui, dans l’engagement communautaire, depuis plus de six ans. Son domaine de prédilection : mettre les élèves dans de bonnes conditions pour étudier. Surtout que l’actualité l’y poussait un peu plus. ‘’Lorsque le gouvernement a décidé de rouvrir les écoles restées fermées pendant plusieurs mois, nous avions décidé de nettoyer les salles de classe. Nous avons commencé par l’école élémentaire Issa Kane de Grand-Dakar. Après, nous avons fait le CEM Alioune Diop, les lycées Ngalandou Diouf et Blaise Diagne’’, se remémore-t-il.
Par ces sessions de nettoyage, il constate, avec des amis, tous réunis au sein d’une association dénommée Simple Action Citoyenne, que dans beaucoup d’écoles, les salles de classe, et surtout les toilettes, sont grandement détériorées. Au lieu de se limiter à alerter des autorités pour les réfectionner, ils décident de le faire eux-mêmes. Il explique la suite : ‘’C’est comme ça que j’ai lancé un tweet par lequel j’ai demandé à mes followers de m’offrir des chaises turques ou anglaises, de la peinture et de la main-d’œuvre. On a démarré avec l’école élémentaire Issa Kane de Grand-Dakar.’’
Lorsqu’on a plus de 19 000 followers sur Twitter, plus de 5 000 abonnés sur Facebook et presque 3 000 sur Instagram, le message passe plus vite. Sur les réseaux sociaux, Niintche est ce qu’on appelle un influenceur, même s’il se refuse d’en revendiquer la prétention. ‘’On essaie juste de donner de bons exemples à la jeunesse pour qu’elle intègre cet engagement communautaire. Qu’elle rende la monnaie de la pièce à la société qui lui a quand même beaucoup donné. J’ai voulu mettre à profit cette communauté virtuelle de manière positive et citoyenne. Je me suis dit que si 15 000 abonnés me donnaient chacun 100 F CFA, je me retrouverais avec 1 500 000 F. C’est comme ça qu’on a trouvé un mécanisme de financement’’, justifie-t-il.
‘’La magie Twitter’’
Dès lors, la machine s’enclenche. Ils récoltent 650 000 F CFA pour refaire les toilettes et rénover les salles de classe à Issa Kane. Deux jours après, le CEM Blaise Diagne les sollicite. Là-bas, ils refont les toilettes des filles à hauteur de 1 700 000 F CFA. Le Lycée du même nom leur fait une demande par le biais de l’association des anciens élèves. ‘’Lorsque nous avons entrepris ces réfections, le lycée de Yoff nous a appelé en urgence pour rénover six classes qui doivent accueillir ce lundi (hier, NDLR) des élèves’’, renseigne-t-il. Pour cette dernière école, les contributions atteignent 2 117 000 F CFA.
Avec la ‘’magie’’ des réseaux sociaux, beaucoup de jeunes s’identifient à ses actes. Quelque chose de lourd à porter pour l’intéressé qui est obligé de montrer le bon exemple. ‘’Nous avons, s’enthousiasme-t-il, 50 volontaires prêts à faire 280 km avec nous sans rien attendre en retour’’, puisque samedi prochain, ils seront à l’école élémentaire Amath Ba de Podor. D’autres étapes sont prévues à Kébémer, Tambacounda. Actuellement, 43 écoles attendent le passage de Niintche et de ses bénévoles pour leur venir en aide. ‘’C’est quelque chose que je ne peux pas expliquer. Ces jeunes sont simplement motivés par les actions que nous posons et qui sont visibles à travers les réseaux sociaux. Peut-être que cela va changer des choses dans le futur’’, analyse-t-il.
En effet, des vidéos et images des écoles, avant et après les travaux de réfection, sont partagées sur ces plateformes de communication. L‘ambiance bon enfant aidant, beaucoup de jeunes sont ainsi enclins à joindre l’utile à l’agréable.
‘’C’est notre jeune frère, mais il a une humilité qui lui permet d’être notre leader’’
Il ne faut pas pour autant l’exclure de cette catégorie d’âge. Malgré son leadership qu’expose Pape Samba Dièye. ‘’On s’est connu à travers notre engagement communautaire dans la sensibilisation sur la Covid-19. C’est notre jeune frère. Mais il a une humilité qui lui permet d’être notre leader. C’est quelqu’un qui ne recule pas devant la difficulté. A chaque fois qu’on rencontre un obstacle, il nous dit qu’on peut la surmonter’’, témoigne-t-il.
A bientôt 34 ans (26 septembre prochain), ce père de famille (une fille de 2 ans) a grandi entre Niary Tally et Grand-Dakar où il est né. Fils de militaire avec deux frères et deux sœurs, il a fait de la débrouille son dada. Etudiant, inscrit au Département d’histoire de l’université Cheikh Anta Diop de Dakar, après le Bac en 200, il lui arrivait de bosser comme répétiteur, vendeur de cartes de crédit et de puces téléphoniques, ou même journalier. Une petite fatalité pour échapper à une vie de délinquant, chemin que beaucoup de jeunes de son quartier ont emprunté.
Une fois sa Licence décrochée, il ne parvenait plus à tenir financièrement. Il opte alors pour les concours et satisfait à celui du recrutement des élèves-maîtres en 2016. Après un an de formation, il est affecté à Sindji Daga (à la frontière avec la Gambie) comme instituteur adjoint. C’est de là qu’il entreprend ses premiers engagements communautaires, en aidant les populations à filtrer de l’eau potable, construire des latrines, etc.
Depuis 2019, il est muté à Keur Madiabel (localité située dans le Sine-Saloum) comme instituteur adjoint à l’école 3. Il a eu son CAP en février dernier. Avec les lourdeurs administratives, il espère intégrer la Fonction publique dans 3 ou 4 ans.
Dépenses, reste du budget et montants des cotisations publiés chaque jour sur les réseaux sociaux
Si la vie ne lui a pas fait de cadeau, Niintche tente, tant bien que mal, à en donner autour de lui. Avec toute une équipe derrière à qui il renvoie le mérite. Et pour que tout marche comme sur des roulettes, un principe est clairement défini et respecté à la lettre : la transparence. Il explique qu’’’il y a toute une organisation de nos activités coordonnées avec des chefs d’entreprise, des entrepreneurs. Nous avons Moustapha qui collecte les dons, Adam Cox qui les recense. Pape Samba coordonne les activités, Ismaïla est notre maître d’œuvre. Normalement, nous publions chaque soir un rapport qui montre aux internautes ce que nous avons dépensés dans la journée, ce qui reste du budget et quelles sont les cotisations’’.
Son exemple montre aux autorités politiques qu’en jouant réglo, les populations suivent sans se faire prier.
Ce succès ne lui monte pas à la tête, pour autant. Niintche a ses propres fondamentaux auxquels il tient énormément, comme manger ses cacahuètes en toute quiétude, chaque soir, entourés de ses amis ‘’baye fall’’. Il aime plutôt se dire que le succès est pour ceux qui cherchent un trophée. Et que le sien serait de provoquer un réveil citoyen chez chaque Sénégalais. C’est cela sa philosophie. Calquée sur cette pensée tirée du poème ‘’Tu seras un homme, mon fils !’’ de l‘écrivain britannique Rudyard Kipling : ‘’Si tu peux conserver ton courage et ta tête, Quand tous les autres les perdront, Alors, les Rois, les Dieux, la Chance et la Victoire, Seront à tout jamais tes esclaves soumis, Et, ce qui vaut mieux que les Rois et la Gloire, Tu seras un Homme, mon fils !’’
Viré de l’école Issa Kane de Grand-Dakar par la police, sur demande du maire
D’autant plus que ce succès ne s’acquiert pas dans la facilité. Niintche et son équipe rencontrent énormément de difficultés sur le terrain, dans certaines zones. Conscientes que les actions de ces bénévoles traduisent en quelque sorte leurs échecs, des autorités politiques ne les laissent pas faire ce travail. Comme à l’école Issa Kane de Grand-Dakar. ‘’Il nous ne restait que la peinture à terminer. Mais la police a interrompu les travaux, puisque le maire nous accusait de faire de la politique. Je pense qu’il a juste eu peur de ce que nous faisons. Mais notre expérience dans la culture associative nous a permis de nous forger un mental d’acier’’, raconte-t-il.
Toutefois, d’autres faits leur apportent du baume au cœur. Comme le fait que leurs actions soient reproduites à Mbour, à Rufisque. ‘’Même au Cameroun, des personnes nous disent qu’ils vont reproduire’’, se réjouit-il. Il espère surtout que cet effet domino atteindra les coins les plus reculés.
Avec la pandémie de Covid-19, l’association Simple Action Citoyenne avait entrepris une initiative intitulée ‘’Les 100 volontaires fakhass Corona’’. Elle avait ainsi œuvré dans la sensibilisation active, en distribuant des masques et des produits d’hygiène aux populations. Avec les inondations du samedi et dimanche 6 septembre, elle a ainsi apporté son aide aux sinistrés à travers la contribution des bonnes volontés. Une façon de dire qu’elle ne laisse aucun champ d’action sociale.
Malgré ces ‘’débuts’’ enthousiasmants, Niintche a cependant peur qu’un jour, les internautes finissent par se lasser et ‘’se disent que l’on essaye de se substituer à l’Etat. Ce que nous ne faisons pas. Nous sommes preneurs de toute aide, mais sommes aussi totalement apolitiques. Nous espérons faire de ceci une philosophie citoyenne’’.
A un mois de la rentrée des classes, cet amoureux de l’enseignement ne se fixe aucune limite dans son engagement communautaire. Au niveau personnel, avec un plan de carrière bien pensé. Il tient à rester enseignant, ‘’car c’est le seul métier que j’aime’’, et à continuer son travail tranquillement.
D’ici là, beaucoup d’écoles s’impatientent sûrement de l’accueillir, avec son équipe de bénévoles. S’attaqueront-ils aux abris provisoires ? Qui sait ? Avec ces gars, c’est la communauté qui gagne !
NAUFRAGE ÎLES DE LA MADELEINE, LE STATU QUOI UN AN APRÈS
Il y an un an, le pays se réveillait dans l’émoi. Une excursion au large de l’îlot Sarpan avait viré au drame. Bilan : quatre morts, trois portés disparus et 37 rescapés (blessés ou traumatisés). L’enquête annoncée n’a donné aucune suite
Il y a un an, le Sénégal se réveillait dans l’émoi. Une excursion au large de l’îlot Sarpan avait viré au drame. Bilan : quatre morts, trois portés disparus et 37 rescapés (blessés ou traumatisés). L’enquête annoncée n’a donné aucune suite.
Le drame a eu lieu, le lundi 16 septembre 2019. Quatre Sénégalais avaient perdu la vie, dans le naufrage d’une pirogue, au large des îles de la Madeleine : Deux agents du parc national des îles de la Madeleine, une jeune femme et un enfant de 2 ans. Trois autres n’ont jamais été retrouvés. Sous l’effet des pluies diluviennes et de la houle, l’embarcation transportant des dizaines de Sénégalais et d’Européens n’avait pu ramener les excursionnistes.
Sur les réseaux sociaux, les questions et les expressions d’indignation avaient fusé de partout. Soixante-douze heures après le drame, les autorités avaient annoncé l’ouverture d’une enquête et la fermeture du site aux visiteurs.
Un an après, l’île est toujours fermée, mais l’enquête est au point mort. Nos tentatives pour joindre les autorités compétentes ont été vaines. Le directeur des Parcs nationaux n’a pas voulu se prononcer sur la question.
Ce drame a réveillé de douloureux souvenirs relatifs au naufrage du bateau ‘’Le Joola’’, le 26 septembre 2002. Pourtant, en octobre 2018, l’équipage de l’île demandait aux autorités des moyens de transport sûrs pour la traversée. A l’époque, Adja Aissatou Sy, Coordonnatrice de la Cellule de communication du ministère de l’Environnement et du Développement qui avait à sa tête Mame Thierno Dieng, avait promis que la Direction des parcs nationaux allait prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité des visiteurs.
Visiblement, rien n’a été fait.
ENJEUX POUR LA GESTION DE L'EAU
Avec l’OPA lancée par Veolia en France sur Suez, la gestion du secteur de l’eau au Sénégal pourrait tomber entre les mains du premier groupe. Se pose la question des orientations, du sort des travailleurs, mais surtout de la qualité et du prix
Lors de l’appel d’offres lancé par l’Etat du Sénégal en 2017, pour la gestion du secteur de l’eau, elle était arrivée à la troisième et dernière place, derrière Suez et la Sénégalaise des eaux. Aujourd’hui, Veolia pourrait revenir en force dans l’affermage du secteur de l’hydraulique urbaine au Sénégal, grâce au rachat de près du tiers des actions de Suez. Et, d’un coup, celle qui avait la plus mauvaise note revient dans la course, alors même que la bataille entre la deuxième (SDE) et la première (Suez) n’a pas encore connu son épilogue. Même si les dés sont déjà jetés et que la nouvelle attributaire a commencé ses activités depuis janvier 2020.
La question qui se pose ici est quel est le sens même des appels d’offres ? Ne faudrait-il pas mettre des verrous dans les appels d’offres ? Qu’adviendrait-il, si Suez tombe sous le contrôle d’un opérateur étranger au secteur de l’eau et qui pourrait revoir certaines orientations du groupe, etc. ? Professeur agrégé de droit privé, spécialiste du droit économique, Abdoulaye Sakho estime qu’il n’y a pas de souci particulier à se faire, du côté sénégalais.
En ce qui concerne les verrous sur les appels d’offres, il rétorque : ‘’Oui, c’est possible, mais ça risque de créer des lourdeurs. Certains le font en disant que : ‘Si l’entreprise qui gagne le marché change de contrôle, le marché s’arrête.’ Mais ce n’est pas réaliste, à mon avis ; sauf pour des raisons éthiques.’’
En fait, tout est parti de juillet, quand Engie, premier actionnaire de Suez (maison mère de Sen’Eau) a décidé de vendre toutes ses actions (33 %), pour se concentrer sur des activités autres que l’eau et les déchets qui sont les domaines de prédilection de Suez. Récemment, dans BFM TV, le PCA d’Engie, Jean-Pierre Clamadieu, disait : ‘’Le Conseil d’administration a annoncé, en fin juillet, un certain nombre d’orientations stratégiques pour le groupe. Il s’est agi de faire un choix plus clair sur les priorités. Nous avons ainsi défini deux priorités très en ligne d’ailleurs avec les enjeux du moment.’’
Parmi ces nouvelles priorités d’Engie, il n’y a pas l’eau pour laquelle le futur ex-premier actionnaire de Suez s’est battu au Sénégal. Pour l’avenir, le groupe compte davantage se focaliser sur ce qu’il sait faire le mieux : c’est-à-dire l’énergie. Monsieur Clamadieu sur les deux grandes priorités du groupe : ‘’Il s’agit des renouvelables. Le groupe (Engie) est devenu un très gros développeur de renouvelables au plan mondial (hydraulique, mais surtout éolien et solaire). Nous jouons dans la cour des grands sur les renouvelables et il faut y mettre les moyens. La deuxième, ce sont les infrastructures. Nous sommes un grand champion des infrastructures gazières en France et on veut être un peu plus actif à l’international ; et surtout avec les infrastructures des collectivités locales.’’
Avenir incertain pour Sen’Eau
C’est donc pour optimiser ses capacités dans le domaine qu’Engie veut se débarrasser de Suez et de l’eau, plongeant la mère de Sen’Eau dans un avenir incertain. Ce, d’autant plus que l’entreprise en pole position pour le rachat n’est autre que le rival historique Veolia. Un peu comme si le Paris Saint-Germain envisageait d’acheter le contrôle de l’Olympique de Marseille.
En effet, entre les deux géants français, les relations ont toujours été conflictuelles. Leur inimitié s’avère même aussi vieille que leur naissance. Mais pour le top management de Veolia, ce n’est pas une raison de renoncer au ‘’beau projet’’ qu’ils envisagent de mettre en place pour la France. L’occasion est même parfaite, selon le président directeur-général du groupe, de tourner la page de ces rivalités. Antoine Frérot : ‘’C’est le moment de dépasser cette rivalité. Jamais l’urgence écologique n’a été aussi forte. Jamais la plupart des populations, les pays n’ont autant ressenti cette nécessité d’agir pour l’écologie. En ce temps de pandémie, que ça soit en Europe ou même ailleurs, notamment en Chine, les plans de relance vont faire une belle place à l’écologie. C’est le moment de regrouper nos forces. Parce que sur le marché mondial, la taille est capitale. Elle est capitale pour pouvoir investir massivement en innovations et en recherche-développement pour trouver des solutions pour résoudre la crise écologique.’’
Mais le pari semble loin d’être gagné. Car aussi bien le top management de Suez que les salariés ne sont, pour le moment, enchantés par cette volonté de Veolia de contrôler le deuxième mondial. En France, les travailleurs se battent pour dire non à l’opération lancée par le concurrent historique. Franck Reynhold Von Essen, un des responsables syndicaux, à l’occasion de leur débrayage la semaine dernière. ‘’On s’est mobilisé pour montrer notre opposition totale au projet d’OPA de Veolia sur le groupe Suez par le rachat de la participation d’Engie. Nous sommes plus qu’inquiets. On ne croit pas qu’un tel mariage entre ces deux grands groupes peut se faire sans casse sociale’’.
Pour Dalenda Drissi, employée à Suez, qui dit OPA dit doublons ; qui dit doublons dit licenciements. ‘’Nous avons peur pour nos emplois. Nous voulons conserver nos emplois. Nous, nous voulons rester Suez’’, fulmine la salariée.
Ainsi, plus de 2/3 des travailleurs ont dit non à ce mariage. Malgré les assurances du PDG de Veolia. Qui disait : ‘’Nous avons sécurisé avec un partenaire, l’entreprise française de gestion des infrastructures Meridiam, dont c’est la spécialité, la reprise des activités d’eau en France pour Suez. Et cette entreprise a un très ambitieux projet pour l’eau en France. Et elle est prête à y apporter des moyens importants, sans doute plus même que ce que sa maison mère est prête à lui apporter. Elle peut garantir que tous les emplois seront préservés dans l’eau en France chez Suez. Mais également que les Français ne paieront pas plus cher leur eau.’’
Quid maintenant des travailleurs qui sont hors de France, notamment au Sénégal ? C’est pour le moment l’omerta. Sur plus de 90 000 travailleurs à travers le monde, Suez compte 30 000 en France, dont 11 000 dans le domaine de l’eau. D’ailleurs, même si l’Etat français (actionnaire dans Engie à hauteur de plus de 23 %) semble bénir le scénario, il insiste sur la nécessité de sauver tous les emplois.
Quid des mille travailleurs de SDE ?
Au Sénégal, Suez a hérité de la SDE plus de 1 000 travailleurs. C’était l’une des conditions du cahier des charges, lors de l’appel d’offres international de 2017. Et jusque-là Suez s’est bien acquittée de cette obligation. En cas de reprise, Veolia va-t-il respecter les mêmes engagements ? Là aussi, le Pr. Sakho, auteur d’un livre sur les groupes de société publié en 2010 aux éditions Carthala, rassure : ‘’Concernant le marché de l’eau au Sénégal et son attribution à l’une de ces entreprises, je ne crois pas qu’il y aura des incidences notables. Au contraire, si l’opération se réalise, les autorités sénégalaises pourraient essayer, par la négociation intelligente, de monter d’un cran leur degré d’exigence relativement à la qualité et au prix de l’eau. Mais attention, aucune obligation pour le concessionnaire. Ceci dit, il convient quand même de voir ce qu’il y avait dans le contrat et les conditions d’exécution de celui-ci.’’
A cet effet, il faut rappeler que Veolia avait, lors de l’appel d’offres, émis le prix le plus cher (SDE 286,9 F CFA le mètre cube ; Suez 298,5 F CFA ; Veolia 366 F CFA).
Par ailleurs, analyse le professeur : ‘’Ce genre d’opérations de concentration entraîne des conséquences sur la marche des deux entreprises et sur le marché dans lequel elles évoluaient. D’une part, le droit de la concurrence intervient pour limiter les effets néfastes sur le marché et sur les autres acteurs. D’autre part, c’est le droit du travail qui protège les salariés par des dispositions spécifiques dont celles qui obligent au maintien des contrats de travail malgré les changements opérés dans l’ordre commercial et financier. Mais cette protection est insuffisante et c’est ce qui justifie la colère et les manifestations des salariés des entreprises en cause (en France). Ces derniers craignent des lendemains qui déchantent. Ils cherchent à peser sur le cours des choses et c’est de bonne guerre.’’
Au Sénégal, c’est encore la sérénité. Ni du côté de l’Etat, encore moins chez les travailleurs, on semble se préoccuper du climat délétère de Suez en France. Joint par téléphone, le secrétaire général du Sutes (Syndicat unique des travailleurs des eaux du Sénégal), Baba Ngom, déclare : ‘’Je n’en connais pas les tenants et les aboutissants. En arrivant, Suez a conservé tout le personnel laissé par la SDE. Nous pensons que s’il doit y avoir un autre repreneur à Suez, le même schéma va être maintenu. De toute façon, dans l’appel d’offres, il était bien spécifié que le partenaire stratégique doit conserver l’ensemble des emplois. Si toutefois il veut se débarrasser de travailleurs, on fera de sorte que les gens partent avec beaucoup d’argent.’’
Décidé à prendre le contrôle de son rival historique et de bâtir une puissance mondiale dans le domaine de la transformation écologique, Veolia n’exclut pas de lancer une OPA (offre publique d’achat).
par Nioxor Tine
MULTIPLE PHOTOS
COVID-19, REDOUBLER DE VIGILANCE
Il est prématuré de crier victoire, car les autorités n’ont qu’un aperçu partiel de la situation épidémiologique, du fait du divorce entre les statistiques officielles et la réalité de terrain, d’où l’urgence des enquêtes séro-épidémiologiques
Plusieurs experts n’ont cessé de pointer du doigt les limites du dépistage des patients suspects de Covid-19, qui privilégie les patients symptomatiques et les contacts vulnérables, au détriment des sujets asymptomatiques.
Cette stratégie, caractérisée par le faible nombre de tests réalisés, rend insuffisamment compte de la réalité de la pandémie et se traduit, la plupart du temps, par une sous-estimation des nombres de cas et de décès. Néanmoins, on peut considérer, sur la base des résultats des examens virologiques annoncés par les autorités, que depuis la mi-août, on observe une baisse persistante du nombre de cas positifs.
Cela semble indiquer une embellie transitoire de la pandémie au Sénégal, dont les véritables causes ne sont pas encore élucidées. Il y a certes eu les mesures fortes annoncées au début du mois d’août 2020, pour inciter les populations à un respect plus rigoureux des gestes barrières, avec l’appui des forces de défense et de sécurité.
Mais il serait mal venu pour des politiciens et officines du pouvoir, de vouloir faire dans la récupération politicienne. En cherchant à s’attribuer les mérites de cette présumée tendance baissière, ils montrent simplement, qu’ils n’ont rien retenu des leçons d’humilité, que la pandémie est en train de délivrer au monde.
Le reflux apparent de la pandémie n’a, en effet, rien à voir avec l’appréciation positive des efforts de notre pays dans la lutte contre la Covid-19, faite par le Centre d’études stratégiques et internationales, relayé par le quotidien USA Today.
Ce que le think-tank américain a voulu récompenser, c’est avant tout la phase de début d’épidémie, marquée par l’expertise des professionnels de santé ayant déjà été confrontés à la fièvre à virus Ebola, le fort leadership des autorités nationales et les décisions volontaristes pour contenir la pandémie.
Malheureusement, les mesures suggérées par les techniciens aux décideurs, même si elles partaient d’une bonne intention, ont manqué d’efficience et de soutenabilité, annihilant les efforts consentis au départ. Il est, ici, question, de l’hébergement de cas-contacts dans des réceptifs hôteliers et de l’hospitalisation tous azimuts, de cas positifs ou asymptomatiques dans de grands hôpitaux nationaux, finalement très onéreux.
Ces initiatives ont même compromis la mise en œuvre du plan de résilience économique et social, dans un contexte de mal-gouvernance, de gestion solitaire et de détérioration du climat social, conduisant à l’assouplissement des gestes barrières, intervenu le 11 mai 2020, au grand dam des acteurs de la riposte.
Un autre aspect à prendre en compte est que cette tendance baissière est observée dans certains autres pays de la sous-région ouest-africaine comme le prouvent ces chiffres publiés par le site de CDC-Africa. Il s’agit essentiellement du Nigéria, du Ghana et de la Côte d’Ivoire..., où nous notons une tendance générale au ralentissement de la propagation de la Covid-19.
La comparaison des premières semaines du mois de juillet et de septembre 2020, dans la région ouest-africaine, a permis d’observer :
une progression des nombres de cas, allant de 86315 à 165049,
une progression des nombres de décès, qui passe de 1449 à 2472,
un discret fléchissement de la létalité de 1,67% à 1,49%,
une diminution de 7091 nouveaux cas,
une diminution de 75 nouveaux décès.
Malgré ces chiffres encourageants, il est tout de même prématuré de crier victoire, car les autorités sanitaires n’ont qu’un aperçu partiel de la situation épidémiologique, du fait du divorce flagrant entre les statistiques officielles et la réalité de terrain, d’où l’urgence des enquêtes séro-épidémiologiques.
N’oublions pas, par ailleurs, les possibilités d’apparition de nouveaux clusters ou de secondes vagues redoutées dans plusieurs pays, à travers le monde !
Les pouvoirs publics devraient s’inscrire dans la perspective, non pas d’une levée tous azimuts des mesures restrictives (transport, évènements socioreligieux...), mais d’une redéfinition à court ou moyen terme de politiques publiques permettant une application rigoureuse des mesures préventives, tout en préservant les intérêts des usagers et des travailleurs.
UN MARIAGE DE CŒUR ET DE RAISON
Dans la société sérère, l’homme et la femme « luttent », selon le rôle dévolu à l’un et l’autre dans les différentes séquences qui constituent l’organisation et le déroulement d’un tournoi de lutte traditionnelle sérère.
La lutte, expression corporelle par essence, allie harmonieusement sport et culture. La femme y ajoute une touche particulière. Dans la société sérère, l’homme et la femme « luttent », selon le rôle dévolu à l’un et l’autre dans les différentes séquences qui constituent l’organisation et le déroulement d’un tournoi de lutte traditionnelle sérère.
L’histoire de la lutte est intimement liée à celle de l’ethnie sérère qui la pratique depuis la nuit des temps. A ses origines, elle était perçue comme une arme de défense pour contrer l’ennemi durant les affrontements où aucune arme conventionnelle n’avait droit de cité. Tous les coups étaient permis. L’on pouvait, au mépris de toute considération et sans aucune mauvaise conscience, faire usage de coups de poings, de corne ou d’armes blanches. L’instinct de survie prévalait sur tout. La lutte traditionnelle en pays sérère n’a pas vécu ces aspérités et rides propres à cette période où la loi du plus fort était la meilleure.
Une véritable religion
La lutte est pratiquée sous le tryptique Sport, Culture, Communion, avec une bonne dose de passion, souvent contenue. Chez le Sérère, elle est ce que le football représente pour le Brésilien, une véritable religion. Les acteurs en sont les jeunes des villages regroupés en clases d’âge : jeunes garçons, adolescents et adultes qui, au cours de veillées après une journée de dur labeur dans les champs, célèbrent ainsi à leur manière la «fête des récoltes », synonyme d’abondance de produits agricoles arrivés à maturation. La place publique sert de cadre à ces joutes sportives agrémentées de pas de danse au rythme des chants de lutte entonnés par les jeunes filles, les femmes d’âge mûr et les vieilles dames dont les envolées lyriques dopent les athlètes qui combattent pour l’honneur de leur famille, de leur lignée et du village. Chez les Sérères, la lutte se pratique sous deux formes : tournoi inter-quartiers qui réunit les jeunes d’un même village et celui opposant des compétiteurs venus de villages différents. Pour ce dernier cas de figure, l’entité porte-étendard du village est constituée des meilleurs lutteurs. L’affrontement entre des lutteurs du même village est exclu. De nos jours, la lutte traditionnelle sérère s’est drapée d’un « manteau de modernisme », notamment dans sa phase organisationnelle. Dans certaines contrées, les tournois de lutte s’étalent sur une semaine au terme de laquelle les vainqueurs des différentes catégories de poids sont récompensés avec du bétail, de l’argent, du tissu, des meubles, du matériel de construction, de l’électro-ménager, entre autres trophées. En plus de cette face visible de la lutte faite d’exploits techniques, de chants, danses et présents remis aux champions, il en est une autre tout aussi stimulante qui participe davantage à modeler et à former le lutteur : l’éducation. C’est dans l’épreuve que l’on respecte l’autre. C’est également dans la confrontation que l’on apprend à se surpasser et à se sublimer pour prouver à l’adversaire que l’on est meilleur que lui, sans lui manquer de respect. La lutte traditionnelle sérère est un cadre propice à l’apprentissage et à l’éducation de tous les éléments qui gravitent autour. Elle a ses règles de conduite et ses garde-fous. Seuls les athlètes imbus d’un sens de responsabilité très aigu y sont conviés.
Discrétion et originalité
En pays sérère, seuls les hommes luttent. Il en est autrement chez leurs cousins du Sud (les Diolas) où les femmes s’adonnent à ce jeu dans certaines contrées de la Casamance. Les femmes sérères sont plutôt affectées à des tâches dont elles s’acquittent avec un réel bonheur au même titre que leurs sœurs lutteuses. Occulter le rôle prépondérant que la femme joue dans la lutte en pays sérère ne saurait relever de l’oubli. Il serait plus juste de dire qu’elle est incontournable. L’on imagine mal un tournoi de lutte, aussi bien en amont (le mystique surtout) qu’en aval (organisation matérielle) sans l’indispensable grain de sel qu’est la touche féminine. Elles gèrent à merveille l’accueil et la restauration des lutteurs étrangers durant toute la durée du tournoi. Cette charge sociale leur revient de plein droit. Ajoutez-y l’animation, la préparation mystique des lutteurs, la confection des tenues de lutteurs et les ornements spécifiques à chaque famille. Ce sont là autant de séquences qui démontrent à suffisance le rôle déterminant de la femme dans la lutte traditionnelle sérère où elle est en même temps actrice et spectatrice. Le premier jalon de cette longue marche vers le triomphe (la victoire du fils lutteur) est posé dès après la naissance avec des séances de massage bien appropriés dont l’objectif recherché et de faire de ce corps frêle une machine à gagner qui fera la fierté de tout le village dans le futur. Rien n’est de trop pour la femme sérère désireuse de goûter aux délices que procure une telle joie. Pour ce faire, elle s’arme de patience et déploie un trésor d’ingéniosité et de savoir-faire pour la confection des pagnes noirs dont doit se vêtir le lutteur. L’amour que la mère ressent pour son fils transparaît à travers les motifs imprimés sur les pagnes avant la teinture. Ces signes distinctifs permettent de déterminer l’arbre généalogique du lutteur. Le régime alimentaire du futur champion est également source de préoccupation pour la mère. Ce volet important constitue une priorité durant la période de « fabrication » (au plan athlétique) du futur champion. La mère veille scrupuleusement sur cet aspect fondamental. Voir son fils bâti comme un athlète inspire la maman. Elle compose une chanson en invoquant l’arbre généalogique de son fils.
Forte implication du mystique
La lutte est certes physique, mais également mystique. Point de tabou pour la femme sérère. Elle y joue un rôle prépondérant en s’impliquant dans la préparation de ses fils lutteurs. Succès et protection des lutteurs contre le mauvais sort et les personnes malfaisantes sont à la charge des mères souvent assistées par les femmes de leur classe d’âge et les vieilles femmes. Le rituel se compose de bains mystiques pris avant le combat et de prières dans des endroits bien définis pour implorer les « pangols ». Il est assujetti à certaines contraintes. Ainsi, les mères ne doivent pas suivre les combats de lutte de leurs fils. Ensuite, elles sont tenues de rester sur place, assises sur le lit, leurs jambes ne doivent pas toucher le sol. Elles sont également interdites de parole et tout mouvement avant le retour de leur fils de la séance de lutte. Transgresser une consigne peut être source de défaite pour le fils dont la mère a fauté. Le retour au bercail ne sera pas pour autant catastrophique pour le vaincu. Tout se fête en milieu sérère. La victoire comme la défaite. Certes à des degrés différents. En cas de triomphe, les mamans rivalisent d’inspiration et d’esprit de créativité pour composer une chanson magnifiant le courage et l’exploit du vainqueur. En cas d’absence de la mère pour cause de décès, ce rôle est dévolu à la tante. Il lui revient de confectionner la tenue, de s’adonner à la préparation mystique aidée en cela par des femmes de sa classe d’âge et les vieilles femmes. « Le passage du pilon » est une autre séquence bien connue de la femme sérère. C’est souvent la tante qui l’exécute. Cela consiste à faite tomber le pilon quatre fois de suite. A chaque chute, le lutteur doit l’enjamber avant de sortie de la concession. Le pilon doit rester dans cette position jusqu’au retour du lutteur. Nul ne doit le déplacer et encore moins l’utiliser. Cette pratique est très courante. Nombre de lutteurs ont révélé que ce rôle était dévolu à leur tante.
Un don inné pour la chanson
S’il est également un autre rôle important que joue la femme sérère dans la lutte traditionnelle c’est bien l’animation. D’habitude, le chant et le tam–tam sont des domaines réservés aux griots. Dans la société sérère, les chants de lutte font exception. L’on en veut pour preuve le duo Clémence Mayé Ndeb Ngom de Fatick - feue Khady Diouf Yerwago. Aucune de ces deux cantatrices n’est griotte et Dieu sait qu’elles font pâmer de plaisir leurs nombreux inconditionnels grâce à leurs envolées lyriques. De nos jours, la jeune fille sérère est confinée dans la préparation des repas destinés aux lutteurs et à l’animation (les chants) à l’image de Mbayang Loum. Cette grande diva native de Mbiin Farba (un village du département de Foundiougne) où elle vit avec sa famille, est la coqueluche des mordus de « ndiom » (lutte traditionnelle). Elle a le don de doper les lutteurs et les … spectateurs qui l’arrosent de billets de banque. Certains tombent en transes. Passion quand tu nous tiens.
MACKY SALL ANNONCE L’ÉRECTION DE KEUR MASSAR EN DÉPARTEMENT
Le président de la République Macky Sall a fait cette annonce lors d’une visite des zones inondées dans la commune de Keur Massar
Dakar, 17 sept (APS) - Le chef de l’État Macky Sall a annoncé jeudi l’érection de la commune de Keur Massar en département ‘’en réponse aux nombreux problèmes d’assainissement et d’urbanisation’’ de cette localité.
Le président de la République Macky Sall a fait cette annonce lors d’une visite des zones inondées dans la commune de Keur Massar. Il a, à cet effet, invité le ministre en charge des collectivités territoriales à réfléchir en collaboration avec les autorités administratives sur ’’ la cohérence territoriale’’ devant permettre la mise en œuvre de cette nouvelle mesure.
Le président Macky Sall a par ailleurs insisté sur la nécessité et l’urgence de ’’ne plus donner des lotissements dans des zones de cuvette (…) pour ainsi éviter le spectre désolant des inondations’’.
En terme de mesures urgentes et immédiates, Macky Sall a promis, dans le cadre du plan ORSEC ’’le renforcement des moyens de pompage pour sortir l’eau des quartiers avec notamment la dotation de motos pompes qui auront des capacités de 800 à 1000 mètres cubes/heure’’.
Si ce projet de départementalisation voit le jour, Keur-Massar sera le 5e département de la région de Dakar après Dakar, Guédiawaye, Pikine et Rufisque.
La commune de Keur-Massar, créée en 1996, est l’une des 16 communes du département de Pikine. Elle s’est beaucoup développée au cours des dernières années en termes d’activités économiques et de démographie.
AU LARGE DE DAKAR, J’AI REPÉRÉ L’ÉPAVE DE L’AVION DANS LEQUEL VOYAGEAIT DAVID DIOP
Agé de 33 ans, Mamadou Faye Samb est à la fois plongeur-secouriste et pêcheur sous-marin. Domicilié à Yoff-Ndénat, il nous… plonge dans les profondeurs de l’océan abritant de mystérieuses créatures
Agé de 33 ans, Mamadou Faye Samb est à la fois plongeur-secouriste et pêcheur sous-marin. Domicilié à Yoff-Ndénate, il appartient à une grande famille où l’on est pêcheurs sous-marins de père en fils. En sillonnant les profondeurs de la mer, Mamadou Faye Samb soutient avoir repéré quelque part au large de Dakar l’épave de l’avion d’Air France qui s’était abîmé en mer le 19 août 1960. Parmi les 54 passagers victimes de ce terrible accident, le célèbre poète David Diop ou l’auteur d’« Afrique, mon Afrique ». En exclusivité pour « Le Témoin », notre plongeur nous… plonge également dans les profondeurs de l’océan abritant de mystérieuses créatures.
Le Témoin : M. Samb, êtes-vous un pêcheur sous-marin ou un plongeur secouriste ?
Mamadou Faye Samb : Je peux dire les deux à la fois ! Parce que j’appartiens à une famille dont les membres sont des pêcheurs sous-marins. Nous ne vivons que de la pêche sous marine c’est-à-dire la capture des poissons, des langoustes, des crevettes et autres espèces de profondeurs pour ensuite les vendre sur le marché. De père en fils, nous pratiquons tous le métier de la pêche sous-marine. Pour la petite histoire, mon défunt père, Doudou Coly Samb, fut le premier Noir plongeur sous-marin de l’Afrique occidentale française (Aof). C’était durant les années 50 et 60. Je suis également plongeur-secouriste puisqu’en cas de noyade ou d’accident en haute mer, certaines familles de victimes m’associent dans les opérations de recherches et de secours.
Justement, on nous souffle que vous ayez repéré l’épave d’un avion au large de Dakar. Qu’en est-il exactement ?
Chaque jour, mon métier de plongée me conduit dans différentes zones poissonneuses pour traquer les produits halieutiques. Ce, jusqu’au jour où je suis tombé sur l’épave d’un avion reposant au fond de l’océan. Je peux même vous préciser que l’épave se trouve au large de Dakar et à 40 mètres de profondeur. D’ailleurs, le logo et la couleur d’Air France sont à peine visibles sur l’aile de l’appareil. Et lorsque j’en ai parlé à des amis enseignants, ils se sont dit convaincus que cette découverte ne pouvait être que l’avion d’Air France qui s’était crashé au large de Dakar en 1960. Et ils m’ont expliqué que le poète David Diop faisait partie des victimes de cet accident d’avion. Parce qu’en dehors de cet accident ayant coûté la vie à David Diop, il n’y en a pas eu d’autres concernant la compagne d’Air France, ici au Sénégal. D’ailleurs, j’ai fait une autre découverte derrière l’ile de Ngor et plus précisément au large de Ouakam. Un jour, dans ces eaux profondes, j’ai poursuivi un ban de gros poissons genre thiofs qui s’étaient réfugiés dans une épave d’avion. Sur place, j’ai constaté que l’hélice de l’avion est toujours intacte. Un vieux notable de Yoff m’a dit que c’est un avion mauritanien qui s’était abimé en mer en 1979.
Peut-on connaitre exactement dans quelle zone se trouve l’épave de l’avion d’Air France ?
Je ne saurais vous le dire ! En tout cas, c’est au large de Dakar. D’ailleurs avec mon appareil de localisation GPS, j’ai pris le soin de mentionner la distance, la position de l’épave et la profondeur des eaux sur mon agenda pour pouvoir y retourner facilement. Même les membres de l’équipage de ma pirogue ne connaissent pas l’endroit. Car, en haute mer, c’est moi qui effectue les plongées sous marines pour capturer les poissons avant de les remonter à la surface. Eux, ils se contentent de garder les prises à bord de la pirogue. Même s’ils connaissent l’endroit, ils peuvent l’oublier du fait que nous opérons dans tous les coins et recoins de l’Atlantique. D’ailleurs, je déplore le fait que les autorités sénégalaises ne soient pas trop passionnées ou obnubilées par les découvertes à caractère historique ou archéologique. Je profite de cette interview pour lancer un appel à la télévision France24, à l’ambassadeur de France au Sénégal et aux responsables de la compagnie d’Air France. Si ces derniers sont vraiment intéressés, je suis prêt à retourner sur les lieux pour filmer l’épave. Je demande seulement qu’ils m’offrent une caméra sous-marine pour que je puisse filmer l’épave de l’avion.
Est-ce que la pêche sous-marine nourrit bien son homme ?
Non ! On pratique ce métier avec tous les risques qu’il comporte pour avoir seulement de quoi vivre au quotidien. Rien qu’à Dakar, nous sommes plus de 300 pécheurs sousmarins vivant dans des situations très difficiles. Et l’Etat n’a rien fait pour nous organiser et nous aider en équipements. Aucun pêcheur sous-marin n’est en mesure d’acheter des équipements et accessoires neufs qui coûtent trop cher à Dakar. Nous n’utilisons que du matériel d’occasion ou venant (Ndlr, de France c’est-à-dire de seconde ou troisième main !) à savoir des bouteilles d’oxygène, des fusil pour capturer ou tuer les poissons, des combinaisons, des palmes, des gants, des bouées etc. Tout cela, encore une fois, est très vétuste. Par exemple, les bouteilles d’oxygène que nous utilisons, dont la plupart sont défectueuses, peuvent exploser à tout moment ! Sans oublier les risques de syncope, les incidents biochimiques et autres accidents cardiovasculaires faute de décompression etc. Parce que la plongée sous-marine met le corps à rude épreuve et lui impose de fortes pressions lorsque la descente se fait à de grandes profondeurs. Il est donc indispensable, une fois sortis de mer, d’aller décompresser l’organisme. Malheureusement, au Sénégal, il n’y aucune cabine de décompression installée sur les quais de pêche ou les plages autorisées. Aujourd’hui, presque la moitié des pêcheurs sont décédés d’accidents de décompression. D’autres sont paralysés à vie. Pas plus tard qu’il y a deux semaines, mon jeune frère est décédé en haute mer suite à un accident de plongée. D’ailleurs, ma famille est toujours en deuil.
Etes-vous, comme on dit, un « mercenaire » de la pêche sous-marine?
Oui ! Pour s’en sortir, il faut être un mercenaire ! A chaque fois qu’il fait beau temps, des mareyeurs mauritaniens viennent nous chercher à Dakar pour la pêche sous-marine. Une fois dans les eaux mauritaniennes, ils nous payent entre 2.000 cfa et 3.000 cfa/kg pour le thiof, le mérou, la langouste, la crevette etc. Par exemple, pour une tonne capturée, on peut se retrouver avec une somme de 3 millions cfa que nous nous partageons, nous Sénégalais. Or, les mareyeurs mauritaniens revendent ces produits à l’exportation à 8.000 cfa/kilo. Vous voyez, rien que pour la tonne, ils peuvent se retrouver avec 8 millions cfa. Il nous arrive parfois de pêcher jusqu’à 10 tonnes dans les eaux mauritaniennes et pour le compte de mareyeurs mauritaniens. Juste pour vous dire que le « mercenariat » sous-marin nourrit bien son homme !
A ce qu’on dit, les fonds marins regorgent de nombreux mystères. Est-ce vrai ?
Comme la terre, la mer a ses réalités ! Tout ce qui existe comme êtres surnaturels sur la terre des hommes, on le rencontre dans la mer à savoir les djinns, les sorciers etc. Vous savez, les océans sont réputés pour abriter toutes sortes d’étranges créatures telles que des monstres marins, des sirènes et des serpents de mer. Au large de Dakar, j’ai eu à rencontrer un chameau, je dis bien un chameau comme on en voit dans le désert, dans les eaux profondes. Nous faisons des plongées de nuit entre 2 h et 5 h du matin, il arrive des fois, au fond de l’océan, que des voix étranges vous appellent par votre nom. Lorsque ça se produit, je suis presque paralysé par la chair de poule. Sans me faire prier, je remonte alors à la surface ! Certains animaux retrouvés dans les grandes profondeurs n’ont rien à voir avec ceux qui vivent à proximité de la lumière c’est-à-dire en surface. Il y a aussi les requins qui vous poursuivent. Heureusement, nous sommes toujours armés de fusil de chasse et de torches pour nous défendre. Pour cela, mon défunt père nous avait donné, mes frères et moi, des bains mystiques à effectuer avant d’aller en mer. La zone la plus dangereuse abritant des monstres et des djinns, c’est entre Ouakam et l’Ile de Ngor. Elle contient aussi des requins que certains baigneurs confondent à des baleines. D’ailleurs, nos parents lébous nous ont toujours déconseillé cette zone très poissonneuse, mais dangereuse !
Comment vivent les espèces et autres monstres dans l’océan ?
Dans les profondeurs océaniques, les gros poissons et autres espèces vivent comme nous c’est-à-dire en familles ou en groupes. Ils vivent aux creux des rochers et autres épaves de bateaux, d’avions etc. Cela leur sert de « maisons » leur permettant de se mettre à l’abri des prédateurs. Seuls les montres et autres créatures étranges vivent dans la « rue » pour dire qu’ils sont sans abri. Comme des animaux terrestres, ils s’entretuent dans l’obscurité des eaux profondes de l’océan. Parce qu’à partir de 200 mètres de profondeur, se trouve la « zone de minuit ». Là, la lumière du jour ou le soleil ne parvient plus à l’atteindre.
Les êtres humains que nous sommes y évoluent comme des aveugles. Dans ces fonds marins, on entend que les frémissements des prédateurs qui essayent de repérer leurs proies. Vraiment, personne ne peut vous décrire les mystères de l’océan. En cas de noyades ou de sinistres en haute mer, par exemples des crashs d’avions, on constate la présence des plongeurs de Ngor, Yoff, Ouakam etc. aux cotés des sapeurs-Pompiers. Comment vous voyez cette collaboration des les opérations de recherches et de secours… D’abord, je tiens à préciser que les sapeurs pompiers sont plus professionnels, mais nous sommes plus aguerris, nous plongeurs sous-marins amateurs. Parce qu’avec nos équipements précaires et limités, on fait des plongées en bouteille de plus de 100 mètres de profondeur de 15 minutes maximum sous l’eau.
A nos risques et périls compte tenu des accessoires obsolètes dont nous disposons et qui n’existent plus sans doute dans aucun autre pays. Dans de nombreux cas de noyades ou accidents en haute mer, les piroguiers et les plongeurs sous-marins appuient bénévolement les sapeurs-pompiers dans les recherches. Et dans nombreux cas, ce sont les plongeurs sous-marins qui retrouvent les corps sans vie avant de les remettre aux sapeurs-pompiers. Dès le lendemain, on lit avec désolation dans les journaux que les corps ont été retrouvés par les sapeurs-pompiers. Alors que c’est nous, plongeurs sous-marins « amateurs », qui les avons repêchés !
La redoutable pandémie de Covid19 n’a pas que conséquences dramatiques, hélas puisqu’elle « tue » aussi sur le plan économique. Une véritable hécatombe puisque, dans notre pays, le covid19 a provoqué la faillite de 27,4 % des entreprises formelles. C’est le résultat du « Rapport de l’enquête sur les intentions d’investissement post covid-19 des entreprises formelles » qui vient d’être publié par l’Agence nationale de la statistique et de la démographie (ANSD). Ce sont surtout les bars, hôtels et restaurants qui sont les plus touchés par la pandémie.
Les entreprises formelles au Sénégal paient un très lourd tribut par rapport à la covid19. 27,4% de celles-ci — soit plus d’une entreprise sur quatre ! — ont carrément arrêté leurs activités. L’échantillon d’enquête ciblant 792 unités a été construit à partir de la base du Centre unique de Collecte de l’Information (CUCI) qui enregistre les unités ayant déjà au moins une fois déposé un état financier à l’ANSD.
Trois strates (petites entreprises, moyennes entreprises, grandes entreprises) ont été retenues sur la base du chiffre d’affaires, conformément à la définition retenue dans le projet de loi portant sur le développement des Petites et Moyennes Entreprises et la Modernisation de l’économie. Il ressort des résultats de l’enquête de l’ANSD que l’arrêt momentané d’activité a été constaté auprès de 27,4 % des entreprises formelles et touche notamment les petites unités (30,9 %).
Le phénomène est plus ressenti dans les secteurs des hôtels, bars et restaurants (50,2 %), des services fournis aux entreprises (31,7 %), des services personnels et divers (29,7 %), du commerce (27,2 %), des autres industries (25,5 %) et des transports (24,3 %). Ce désastre économique est provoqué par la fermeture des frontières (36,6 %), la fermeture des marchés, des écoles et des universités (33,0 %), des problèmes de financement (32,0 %), les difficultés d’approvisionnement en matières premières (28,0 %) et les difficultés d’écoulement de la production (21,7 %) lit-on dans le rapport.
A en croire les enquêteurs de l’ANSD, « à défaut de fermer momentanément, 5,4 % des entreprises ont changé d’activité depuis mars 2020 pour s’adapter à la crise. Ce sont essentiellement les petites entreprises et les moyennes entreprises qui sont concernées par ce changement de branche d’activité. Près de la moitié (49,6 %) des entreprises qui ont changé d’activité se sont orientées vers le commerce contre 42,7 % vers les activités de services de soutien et de bureau. Les petites entreprises sont les plus nombreuses à s’orienter vers le commerce (51,4 %) et les activités de services de soutien et de bureau (44,7 %) ». L’enquête fait aussi ressortir que 60,9% des entreprises ont enregistré un repli des quantités produites.
Investissements bloqués jusqu’après la pandémie
La valeur moyenne des besoins de financement à court terme est de 1,1 milliard pour les grandes entreprises, 215 millions pour les moyennes et 33 millions pour les petites entreprises selon les enquêteurs de l’ANSD. Ces derniers révèlent qu’en ce qui concerne les intentions d’investissement, 68,4 % des entreprises ambitionnent d’investir après la pandémie. « Ce taux est supérieur à 65,0 % dans l’essentiel des secteurs d’activités sauf celui des services personnels où il est ressorti à 50,1 %. Par rapport à la taille, il est de 71,0 % pour les grandes entreprises, 60,2 % pour les moyennes et 69,1 % pour les petites. Les prévisions d’investissement portent essentiellement sur l’acquisition de matériels informatiques ou de logiciels (41,8%), la machinerie, les équipements et les véhicules (36,5%), la formation des employés et le recrutement (35,9 %), le développement de site web et le e-commerce (34,4 %) ainsi que la construction et la rénovation (33,4 %). Les grandes entreprises (45,5 %) et les moyennes (58,9 %) comptent investir davantage dans la machinerie, les équipements et les véhicules tandis que les petites unités (43,0 %) souhaitent le faire dans l’acquisition de matériels informatiques ou de logiciels. La valeur moyenne des intentions d’investissement est de 1,5 milliard pour les grandes entreprises, 216 millions pour les moyennes et 36 millions pour les petites entreprises » soulignent les enquêteurs.
Soutien appréciable de l’Etat
Les mesures de relance et de riposte dont les entreprises ont bénéficié sont essentiellement les mesures fiscales (28,8 %) et le report d’échéance des prêts (9,7 %) et ce, quels que soient la taille et le secteur d’activité. Selon les responsables d’entreprises interrogés, les mesures de riposte supplémentaires qui pourraient être prises par le Gouvernement sont les facilités dans l’obtention de prêts (53,3%), les subventions d’exploitation (48,9 %) et la gratuité du paiement du loyer, de l’eau ou de l’électricité (47,4 %). Les responsables des grandes entreprises (46,2 %) et des moyennes entreprises (41,9 %) sont plus favorables aux subventions d’investissement tandis que ceux des petites entreprises (55,7%) souhaitent surtout que l’obtention de prêts leur soit facilitée.