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7 juillet 2025
Par Talan Tamba DANFAKHA,
QU’EST-CE QU’UNE BONNE IDEE DE CREATION D’ENTREPRISE ?
Un entrepreneur, en général, emploie plusieurs personnes, y compris lui-même. Un travailleur offre sa force de travail et un entrepreneur, lui, offre sa force de travail et sa créativité.
Un entrepreneur est une personne qui veut satisfaire ses propres besoins (ses motivations) en satisfaisant les besoins de ses clients ou bénéficiaires de ses services. Pour ce faire, l’entrepreneur va créer de la valeur, c’est-à-dire qu’il va valoriser les ressources qu’il peut mobiliser pour les vendre plus chères. Par exemple, un sculpteur de pierres va, grâce à sa créativité et son travail, dessiner sur une pierre qu’il a trouvée quelque part dans la nature, l’image du Coran et, donc, vendre son œuvre à une mosquée. Il aura très peu dépensé mais il pourra gagner de quoi financer ses propres besoins. Un sculpteur, sur pierres, est un auto entrepreneur, c’est-à-dire qu’il n’emploie que lui-même.
Un entrepreneur, en général, emploie plusieurs personnes, y compris lui-même. Un travailleur offre sa force de travail et un entrepreneur, lui, offre sa force de travail et sa créativité. Pour exprimer cette créativité, l’entrepreneur va devoir identifier une solution existante pour la copier, à son compte, ou un vrai problème pour lequel il va trouver, lui-même, une solution. Et, c’est justement, la solution d’un vrai problème que choisit un entrepreneur qui est son idée de projet de création d’entreprise.
L’idée de projets est ce que veut faire l’entrepreneur, le projet est la façon dont il va le faire. Il y a trois types d'idées de projets : celles dont la mise en œuvre permet de satisfaire des besoins
1) déjà satisfaits : c'est quand il y a déjà une offre suffisante voire excédentaire sur le marché visé. Dans ce cas, l’entrepreneur doit s’attendre à une rude concurrence. Sa créativité va s’exprimer dans sa capacité à se différencier de ses concurrents ;
2) pas encore satisfaits : c'est quand il y a une offre insuffisante voire déficitaire sur le marché visé. Dans ce cas, l’entrepreneur doit s’attendre à des difficultés d'approvisionnement ;
3) non exprimés : c'est quand il n'y a pas une offre existante sur le marché. Dans ce cas, l’entrepreneur doit s’attendre à des difficultés de production
Dans tous les cas, l’idée de projet doit répondre aux exigences suivantes : elle
1) s'exprime sous forme d'une phrase infinitive ;
2) satisfait un besoin précis de ses futurs clients ;
3) doit réussir à passer le test des 6cpf/10cpi ou, en clair, six clients potentiels favorables à sa mise en œuvre sur dix clients potentiels interrogés. Une fois que vous avez passé l’étape du choix de votre idée, il faut la formuler, précisément, en répondant aux sept questions que voici : quoi ? Qui ? Où ? Comment ? Combien ? Quand ? Pourquoi ?
Un moyen simple de retenir ces questions est de ne retenir que ceci : QQOCCQP ! Une fois votre idée formulée, il est temps d’en parler aux parties prenantes pour
1) mieux la comprendre soi-même ;
2) l'améliorer des remarques des uns et des autres ;
3) trouver, plus facilement, des personnes qui peuvent vous aider à la planifier dans un business plan ;
4) connaître d'autres idées similaires dont la réalisation est plus avancée que la vôtre ;
5) trouver des cobayes à travers tous ceux qui tenteront de copier votre idée.
Souvent de nombreux jeunes candidats à l’entrepreneuriat ont peur de se faire voler leur idée de création d’entreprise, mais cette crainte n’est pas fondée car une idée est définie par les paramètres suivants : :
1) l'objet ou la solution au problème traité ;
2) le contexte où l'environnement dans lequel l’idée sera réalisée ;
3) les motivations (menaces à neutraliser et opportunités à saisir) ;
4) les parties prenantes : le porteur de projet, les clients, les fournisseurs, les bailleurs de fonds et l'état ;
5) la localisation, là où sera implantée l’entreprise.
Il est IMPOSSIBLE que tous ces cinq paramètres soient identiques quand quelqu'un copie votre idée. Mais, il est possible que certains petits malins gagnent du temps en s'inspirant de votre idée. Ce qui, si vous êtes un vrai entrepreneur, doit vous remplir de fierté et non de craintes.
Les entrepreneurs sont, par nature, généreux : tout ce qu'ils font nourrit les créatures d'Allah. Regardez les premiers entrepreneurs de l'histoire humaine que sont les agriculteurs : les vers de terre, les oiseaux, les bêtes, les passants, la famille, les marchands, les transformateurs, tous trouvent leur compte dans leur labeur. Et, ils n'en sont pas moins heureux.
Talan Tamba DANFAKHA,
Directeur général Kombiko Partner
LA MACHINE ECONOMIQUE EST GRIPPEE
Mamour Cissé, cet homme à l'allure de dandy, est opérateur économique avant d'être un homme politique. Le leader du Parti social-démocrate (Psd/Jant-bi) est propriétaire du centre commercial El Malick et de l'eau minérale "Plaisir".
Mamour Cissé, cet homme à l'allure de dandy, est opérateur économique avant d'être un homme politique. Le leader du Parti social-démocrate (Psd/Jant-bi) est propriétaire du centre commercial El Malick et de l'eau minérale "Plaisir". Très tôt orphelin de père, il abrège ses études à 15 ans pour subir une formation professionnelle sanctionnée par un diplôme en comptabilité deux ans plus tard. Il décroche son premier emploi à Afco et y restera trois ans. En 1980, il s’envole pour la France afin d’y parfaire ses études en gestion. Depuis, il a blanchi sous le harnais. Naturellement, il nous parle de la covid-19 et du secteur privé national.
Des voix s'élèvent pour réclamer le retour du poste de Premier ministre pour coordonner la riposte contre la covid19. En tant qu'ancien ministre d'État, directeur de cabinet du Président Wade, qu'en pensez-vous ?
A cause des fonctions que vous venez de mentionner me concernant, je ne peux rien y penser puisque celles-ci me dictent une obligation de réserve et une retenue m’interdisant de m’introduire dans le domaine réservé du chef de l’Etat. Il a le pouvoir discrétionnaire non seulement de définir la politique de la Nation mais aussi et surtout de nommer aux emplois civils et militaires. L’un dans l’autre, il lui revient à lui, et à lui tout seul, de juger de l’opportunité de tenir seul le gouvernail ou de choisir quelqu’un qui va l’aider dans sa tâche de conduire cette politique de la Nation en coordonnant l’activité gouvernementale. Cette dernière option était la pratique qui prévalait jusqu’en 2019, année où le président de la République, qui venait d’être réélu pour un deuxième mandat, a décidé de supprimer le poste de Premier ministre pour des raisons qui lui sont propres. Et c’est de son ressort, une fois que le Parlement a accepté de voter la Loi. A présent, qui nous dit que les raisons objectives qui avaient fondé le chef de l’Etat à supprimer le poste de Premier ministre se sont évaporées.
Quid de la riposte au coronavirus ?
Quant à la riposte à la covid-19 ou coronavirus, le Président Macky Sall a très tôt et vite bien compris que ce n’est pas l’affaire d’un homme mais d’une équipe. Cette équipe composée d’experts éprouvés et avisés existe et s’est mise en bleu de chauffe depuis le 2 mars, date d’apparition du premier cas au Sénégal. Et cette équipe a un coordonnateur en la personne du ministre de la Santé et de l’Action sociale qui s’acquitte, à mon avis, très bien de sa mission. Toutefois, compte tenu de la gravité de la crise sanitaire, il faut se faire à l’idée que le ministre de la Santé doit régulièrement rendre compte de l’évolution de la situation au chef de l’Etat qui de ce fait est le premier coordonnateur de la riposte, et dès lors niveau ne peut être plus rassurant que le sien.
Au regard du nombre de cas à Dakar et Touba, ne faut-il pas confiner ces deux villes?
Il est vrai que ces deux localités que vous citez se trouvent dans une situation alarmante. En effet, sur les 5888 cas positifs enregistrés au Sénégal à la date du 21 juin, plus de 4000 sont détectés à Dakar et plus de 470 à Touba. Les quatre districts sanitaires de la ville de Dakar, qui sont tous passés à plus de 775 testés positifs, caracolent en tête en termes de nombre élevé de cas. A eux quatre, ils totalisent plus de 3000 cas positifs. Quant à Touba, en effet, on y relève aussi un nombre élevé de cas puisqu’on y est à plus de 470. Tout ceci ne peut manquer d’interpeller les consciences. Ce d’autant comme nous le savons, nous comptons à ce jour 84 décès enregistrés depuis le 2 mars 2020. En comparaison avec des pays, dans la même période, comme l’Afrique du Sud avec 87 715 cas, l’Egypte 52 211 le Nigeria 19 147, le Ghana 13 203, l'Algérie 11 504, le Cameroun 11 281 et le Maroc 9 801, nous nous devons de rendre grâce à Dieu. Il reste qu’il faut se rendre à l’évidence pour ce qui est des postulats relatifs à cette maladie qui sévit chez nous. Le premier postulat est que cette maladie existe et est bien là chez nous, ceci en dépit des négations de quelques incrédules irresponsables. Ensuite la maladie se propage vite et s’étend actuellement partout au Sénégal au point que les quatorze régions du pays sont toutes touchées. Enfin, la maladie tue : nous en sommes en trois mois et demi à 84 morts. A partir de ces données tangibles, il convient de considérer la situation avec plus de responsabilité, vigilance et rigueur. C’est vrai que nos personnels soignants se démènent pour contenir la maladie et limiter ses dégâts chez nous. Ils le font avec dévouement, abnégation et même avec un remarquable esprit de sacrifice, eux qui sont en première ligne. Mais ils agissent avec les moyens du bord car il n’existe pas encore de vaccin ou de traitement éprouvé et mondialement homologué, ce qui en soi constitue un autre postulat. C’est dire les prouesses que sont en train d’accomplir nos infectiologues, infirmiers et aides-soignants dans nos structures sanitaires de plus en plus bondées.
Ces personnels, il faut les aider dans leur lutte pour faire reculer et disparaître la maladie au Sénégal. Comment ?
En assimilant d’abord ces postulats que je viens d’évoquer ; ensuite en observant rigoureusement les gestes-barrières, surtout le port du masque et la distanciation physique : aucune légèreté ne devrait être notée dans le respect de ces règles ; enfin demeurer vigilant à chaque instant et réduire les déplacements pour de strictes nécessités. C’est ainsi que vous pouvez répondre plutôt que de confiner les gens à Dakar et Touba. Il faut déclencher à nouveau une puissante, dynamique campagne de sensibilisation, notamment e niveau communautaire, particulièrement dans les communes avec l’appui des ASC. Malheureusement avec l’allégement du couvre-feu et la levée de l’interdiction du trafic interurbain, beaucoup de gens ont perçu tout cela comme une ode à la permissivité et ne prennent plus garde au risque de contaminer d’autres gens du fait de leur seule irresponsabilité. C’est pourquoi, sans cruauté inutile mais sans faiblesse coupable, les autorités doivent veiller avec vigueur à ce que les règles les plus élémentaires qui peuvent être salutaires soient constamment observées jusqu’à ce que le mal se dissipe. Les besoins de survie qui taraudent l’esprit de pas mal de ménages et les difficultés économiques et financières du moment militent contre le confinement dont vous parlez. Une telle mesure signifierait accentuer la tension sociale latente, qui couve. Il ne faut donc pas attiser les braises.
Mais que faire alors devant les récalcitrants et ces incrédules irresponsables dont vous parliez tantôt ?
Mais c’est à l’Etat d’assumer ses responsabilités en faisant comprendre à ceux-là, que s’ils ont le droit de ne pas croire à la réalité de la maladie, ils n’ont pas pour autant celui de la passer à d’autres par contamination. Il y a forcément un moment où il faudra de l’intransigeance puisqu’il s’agit de la vie des gens et la survie d’une Nation, la nôtre. Il y a le libre arbitre que l’on ne doit pas dissimuler derrière la fatalité. C’est trop facile.
Jusqu'ici les prévisions alarmistes contre l'Afrique ne se sont pas réalisées. Comment l'expliquez-vous?
Il faut le dire et le saluer, beaucoup d’Etats africains ont été proactifs dès les premières alertes venues de Chine ensuite d’Europe où la maladie s’est répandue très vite. Ils ont donc pu voir venir. En dépit de la fragilité des systèmes de santé dans la plupart des pays africains et la modicité ou l’inexistence de moyens matériels et hospitaliers, les experts africains en santé, généralement très compétents, ont su faire preuve d’imagination, de courage et d’engagement exemplaire pour contenir la maladie comme c’est le cas au Sénégal. Pour l’heure, les prévisions alarmistes des Nations unies et de l’OMS ne se sont pas concrétisées en Afrique. Pour autant, il n’existe non plus à l’heure actuelle aucun motif qui doive prêter à la jubilation. Bien au contraire, nos Etats doivent redoubler de vigilance et s’ingénier à dégager des fonds conséquents destinés à la lutte contre la pandémie afin de la maintenir à un niveau encore supportable en attendant d’obtenir le traitement ou le vaccin permettant son éradication. Dans le même temps, je le répète, il faudra accentuer les campagnes de sensibilisation pour l’adoption généralisée et régulière des gestes-barrières sinon les prévisions risquent de s’avérer exactes dans un proche avenir.
Tous les pays se préparent à l'après covid. Au Sénégal, la croissance sera de moins de 3%. Quelles seront les conséquences d'une telle crise économique ?
Il est bien vrai que le président de la République, le 3 avril dernier, lors de son traditionnel message à la Nation à l’occasion de la célébration de la date d’indépendance, a clairement indiqué que la croissance économique du Sénégal a été brusquement freinée et passera de 6,8% à moins de 3%. Imaginez, sans verser dans l’apocalyptique, ce que va être la situation économique et sociale du Sénégal avec ce taux de moins 3%, taux au demeurant estimé à 1% en Afrique dans les années qui viennent. Malgré un taux d’un peu plus de 6 % régulièrement enregistré ces six dernières années avec un dynamisme économique incontestablement porté par des investissements publics hardis, l’amélioration de l’environnement des affaires et la mise en œuvre du Pse, de nombreuses entreprises ont néanmoins fermé. Pis, le chômage est resté endémique, des ménages ont été gagnés par la pauvreté tandis que l’Etat croule sous le poids de ses dettes intérieures et extérieures et affiche un taux d’endettement bien élevé même s’il n’a pas encore franchi la limite retenue par l’UEMOA. Le déficit budgétaire a du mal jusqu’ici à être résorbé même si des améliorations y sont apportées tout comme pour la maîtrise de l’inflation. C’est dans ce contexte qu’est survenue dans le monde entier la pandémie liée à la covid-19 balayant tout sur son passage, déréglant l’économie mondiale et donnant chez nous un sérieux coup d’arrêt aux politiques jusqu’ici engagées dans le cadre de ce Pse.
Avec quelles conséquences ?
Il faut comprendre que si l’activité économique est en cessation ou au ralenti comme cela a été un peu partout le cas de mars à fin mai, la productivité est affectée provoquant un manque à gagner pour les entreprises en termes de retour sur investissements ou bénéfices ainsi que pour l’Etat en termes de recettes douanières et fiscales. A cause de ces manques, les entreprises n’investissent et n’embauchent pas tandis que l’Etat a du mal à s’acquitter des nécessaires investissements pour les infrastructures socio-économiques de base, financer la santé et l’éducation, soutenir davantage les personnes vulnérables, apurer la dette intérieure et consolider les voies d’un développement économique et social harmonieux. De ce fait, la machine économique qui est un tout est grippée avec ses conséquences sociales relatives à l’insertion retardée des jeunes diplômés en quête d’emploi ou d’expérience professionnelle par un stage. Si nous avons connu de sérieuses difficultés à des taux à plus de 6% l’an, vous pensez bien que ce sera autrement plus difficile avec un taux de croissance de moins de 3%. Ce sera d’autant plus difficile que, comme jamais, il nous faudra davantage compter sur et avec nous-mêmes. La coopération bilatérale comme multilatérale, également plombée par la crise sanitaire risque de se rétrécir considérablement comme peu de chagrin. Tout ceci, conjugué avec les méfaits du virus dans l’activité de la diaspora privant ainsi les pays d’origine de flux financiers, la fermeture des frontières pendant des mois donnant un coup d’arrêt au tourisme du reste déserté à cause de la pandémie, le dérèglement de la chaîne d’approvisionnement mondial, ne peut qu’être annonciateur de lendemains économiques et sociaux moroses.
N’est-ce pas réaliste de la part du Président Macky Sall d’anticiper en annonçant la couleur si tôt ?
En annonçant cette baisse à moins de 3% du taux de croissance au Sénégal, le chef de l’Etat a voulu sans doute marquer les esprits et inciter d’ores et déjà à une prise de conscience de tous pour qu’ensemble nous dessinions les contours d’un Sénégal d’après coronavirus. Ceci passera forcément par la solidarité à tous les niveaux, par le sens du sacrifice, par la réduction du train de vie de l’Etat et les fortes compressions des dépenses de fonctionnement. Il faudra aussi inciter davantage les jeunes à plus d’imagination, de créativité et d’initiative. Tout comme les chefs d’entreprise également. Dans les mois et années qui viennent le sens de cerner les priorités connaîtra toute sa valeur parce que c’est à cela que tout le monde sera confronté, pays, Etats, entreprises comme ménages et individus. Il faudra savoir déterminer ce qui est prioritaire et ce qui ne l’est pas. Il dépendra de nous tous pour que l’après-coronavirus soit une réussite ou un échec. C’est en quoi le Programme de résilience économique et sociale mis en place en mars dernier par le Président Macky Sall peut servir de laboratoire d’expérimentation en vue du saut vers l’après-covid-19. Il lui faudra convaincre pour ce qui est de sa bonne mise en œuvre et de son efficience.
Acteur politique, homme d’affaires, vous êtes sur pas mal de fronts. Peut-on savoir si M.Cissé a un ou des modèles, des références.
A dire vrai, mon modèle à tous points de vue, c’est mon père qui, toute sa vie durant, s’est toujours mis au service des plus humbles, un grand homme, travailleur, de vertu et de générosité qui n’a jamais voulu s’impliquer en politique malgré des invites incessantes de son ami, Me Lamine Guéye. Bien sûr, il y a des hommes publics qui m’ont aussi marqué. Ce sont, pêle-mêle :Cheikh Anta Diop, ce prodigieux intellectuel africain, le chantre de l’antériorité de la civilisation noire qui est au cœur de nos pensées en ces temps de racisme ambiant contre les noirs dans le monde ; le Président Mamadou Dia, un grand patriote, un économiste clairvoyant qui aurait pu faire énormément pour notre pays mais que le colonialisme a brisé ; Me Abdoulaye Wade, un autre panafricaniste, un bâtisseur et un homme d’une générosité proverbiale ; Mamoudou Touré, ancien ministre de l’Economie et des Finances du Sénégal à qui notre pays doit l’essor de sa minoterie, secteur qu’il a su promouvoir par une déprotection courageuse. Tous ces hommes sont des références en matière de nationalisme lucide et courageux, rempart contre la destruction de nos valeurs et le pillage de nos ressources.
À votre avis le secteur privé national sénégalais est-il marginalisé par l'Etat?
Il est effectivement marginalisé et cet état de fait semble s’accentuer. Les sociétés étrangères accaparent tout, investissent vite du fait des commodités et autres avantages offerts par le Sénégal, amortissent en peu de temps leurs investissements avec des prix élevés de leurs produits ou services et plient bagages pour nous laisser accomplir nous nationaux la tâche de Sisyphe, c’est à dire l’éternel recommencement de la construction de notre économie. Et pourtant quand les marchés se présentent, l’Etat oublie les nationaux dans le privé. Pourtant nombreux sont parmi ces derniers qui sont dans la logique du patriotisme économique consistant, en contrepartie des avantages consentis par l’Etat en termes d'assouplissement des relations du travail avec un peu plus de flexibilité et de diminution raisonnable des impôts et taxes, à se plier en quatre pour faciliter au moins l’accès à un premier emploi aux jeunes ou à une formation en entreprise. L’Etat du Sénégal n’aurait-il pas compris tout ceci ? La promotion réelle et soutenue du privé national dans le circuit de production participe d‘une trilogie qui doit guider à chaque instant l’Etat. Ce sont des entreprises viables qui créent la richesse et l’emploi; de la sorte, elles sont en mesure de verser davantage de recettes fiscales à l’Etat qui encaisse par ailleurs des impôts sur le revenu des travailleurs qui, du fait de leur pouvoir d’achat décent, consomment plus et boostent la demande et donc la relance économique. Ceci, seul le privé national est en mesure de le susciter durablement et d’accompagner comme il se doit l’Etat dans la réalisation de ses projets économiques et sociaux. C’est en fait le privé national qui est le véritable acteur de l’Emergence au Sénégal. C’est cela qu’il faut comprendre et si c’est bien compris, alors le Sénégal connaîtra des lendemains meilleurs. Ce qui se passe avec l’Autoroute à péage doit inciter tout le monde à une introspection patriotique profonde afin que nous dégagions les voies et moyens qui nous permettront ici au Sénégal d’impliquer des entrepreneurs sénégalais dans des ouvrages lourds tels que les ponts, les autoroutes modernes ou dans des services stratégiques tels que le satellitaire, les télécommunications, etc. Il convient de dire cependant que le secteur privé national ne réglera le problème de sa marginalisation que s'il fait preuve d’imagination et d’esprit de regroupement pour tendre vers la mise sur pied de solides consortiums. Mais tout cela sera vain si nous ne nous efforçons pas en plus de doter notre pays, par des ressources fortes mobilisées par des privés entreprenants, d’instruments financiers capables d’accompagner et d'aider au développement de l’initiative privée nationale. Il nous faut des banques privées nationales capables de venir en aide aux entreprises nationales. Cela aussi est l’affaire des nationaux qui doivent en prendre conscience.
THIONE SECK CONDAMNÉ EN APPEL
La durée de sa détention préventive excède donc les neuf mois de prison ferme auxquels il a été condamné lundi, ce qui lui permet de rester en liberté
Le musicien sénégalais Thione Seck, membre de la légendaire formation Orchestra Baobab dans les années 1970, a été condamné lundi en appel à trois ans de prison, dont 8 mois ferme, dans le cadre d'une affaire de faux billets, mais il ne retournera pas en prison, a-t-on appris auprès de son avocat.
Thione Seck, 65 ans, avait été arrêté en mai 2015 puis avait fait neuf mois en détention préventive pour "contrefaçon de signes monétaires" et "tentative d'escroquerie", avant de bénéficier d'une liberté provisoire.La durée de sa détention préventive excède donc les neuf mois de prison ferme auxquels il a été condamné lundi, ce qui lui permet de rester en liberté, a expliqué à l'AFP son avocat, Ousmane Seye.
Un sac contenant "50 millions d'euros", qui se sont avérés être des faux billets, avait été retrouvé chez le chanteur à Dakar.Lors de son procès en mai 2019, il avait obtenu l'annulation de la procédure pour vice de forme durant l'enquête. Il n'avait pas bénéficié de l'assistance d'un avocat durant la garde à vue après son arrestation, selon la justice. Le parquet avait fait appel du jugement de mai 2019 et lors du procès en appel, le 15 juin, le parquet avait requis cinq ans de prison. "Le juge l'a condamné aujourd'hui à trois ans de prison, dont huit mois ferme, pour tentative de commercialisation de billets de banque. Il est libre mais nous ne sommes pas satisfait de l'arrêt", a déclaré Me Seye. L'avocat a annoncé qu'il saisirait la Cour de cassation et une Cour de justice ouest-africaine. Le co-prévenu malien de Thione Seck, Alaye Djité, a été jugé par contumace et condamné lundi à cinq ans de prison. Il est visé par un mandat d'arrêt international.Le musicien avait affirmé lors du procès en première instance avoir été "victime d'un complot" monté par des Gambiens vivant en Suède, qui lui avaient fait miroiter un contrat de 100 millions d'euros pour une série de 105 concerts en Europe. Un de ces Gambiens, Joachim Cissé, basé à Banjul, lui avait, selon lui, remis comme "avance" une somme de "50 millions d'euros" dans le sac contenant les faux billets trouvé à son domicile.
Les enquêteurs n'ont jamais retrouvé la trace de ce groupe de Gambiens et la plainte pour escroquerie déposée par Thione Seck avait été classée sans suite.
Thione Seck, auteur de plusieurs albums à succès, est une des plus belles voix du Sénégal. Son fils Wally Seck est également l'un des chanteurs les plus populaires actuellement au Sénégal.
par l'éditorialiste de seneplus, Alymana Bathily
ORANGE TOUT PUISSANT
EXCLUSIF SENEPLUS - L’inclusion financière des populations pauvres est-elle vraiment une préoccupation du gouvernement ? On pourrait en douter au vu de la liquidation apparemment programmée de Wari au profit d’Orange Money
L’Autorité de régulation du secteur des communications du Ghana, la National Communication Authority (NCA) a publié le 8 juin 2020 sur son Site « une déclaration d’intention » classant l’opérateur MTN en « une puissance dominante significative » sur le marché national (Dominant/Significant Market Power ») des télécommunications.
MTN qui est une entreprise d’Afrique du Sud exerce effectivement une domination écrasante du marché dans tous ses segments avec 67.78% pour l’internet et 57.07 % pour la téléphonie contre respectivement 15.49% et 20.94% pour Vodafone et 15.81% et 20.25% pour AirtelTigo. Le quatrième opérateur Glo ne contrôle que 0.92% de l’internet et 1.74% de la téléphonie.
Cependant, selon Quartz Africa, l’autorité de régulation ghanéenne est préoccupée plus par la position dominante significative de MTN sur le « mobile money » que sur l’internet et la téléphonie voix.
Le développement du mobile money au Ghana est en effet le plus rapide de tous les pays d’Afrique : 40% des 58% des adultes bancarisés dans ce pays en 2017 l’ont été par le mobile money, indique Quartz Africa se référant aux statistiques publiées par le Global Findex Database de la Banque Mondiale.
Dès lors, les autorités du Ghana se font un devoir de réguler pour que tout en encourageant l’inclusion financière, empêcher que les flux financiers des plus pauvres ne soient contrôlée par une seule entreprise étrangère comme c’est le cas au Kenya.
Dans ce pays, l’opérateur Safaricom (appartenant aux groupes Vodacom (Afrique du Sud) et Vodafone (Grande Bretagne), grâce à son service de mobile money M-PESA assure des transactions représentant 40% à 50% du PIB du pays !
L’Agence de Régulation des Postes et Télécommunications du Sénégal (ARTP) ne devrait-elle pas émuler la NCA du Ghana et déclarer Orange qui contrôle 67.15% du marché tous segments confondus, en situation de « puissance dominante significative » pour réguler les opérations de mobile money de cet opérateur dont la plateforme revendique déjà 1.800.000 clients ?
D’autant que les responsables de Wari établi depuis 2008 sur le marché du transfert d’argent et du mobile money au Sénégal, unique challenger d’Orange Money font état depuis quelques temps de « problèmes de connexion au réseau » récurrents qui affectent régulièrement le bon fonctionnement de leurs services dans plusieurs parties du pays.
A cela s’ajoutent les exigences de certaines banques partenaires de Wari qui aboutissent « au blocage dans les IBAN des distributeurs qui par ricochet ne peuvent plus payer les retraits des clients Wari », indique le communiqué publié la semaine dernière par le Groupe et repris par Walf Net.
L’inclusion financière des populations pauvres et rurales est-elle vraiment une préoccupation du gouvernement du président Macky Sall ?
On pourrait en douter au vu non seulement de la liquidation apparemment programmée de Wari au profit d’Orange Money, mais aussi de l’occasion qu’on a refusé de saisir pour apporter l’appui aux populations face au Covid-19.
Au lieu d’acheter des denrées alimentaires à travers une procédure compliquées, de mettre en place une logistique, on aurait pu simplement envoyer de l’argent aux ayants droit par transfert d’argent via Wari et Orange Money.
C’est ce que le Togo a fait en créant de toutes pièces une plateforme numérique à laquelle 450 000 personnes (sur une population totale de 5 million) ont reçu leur aide à la mi-avril.
Le président du Togo, successeur de son père, dictateur s’il en fut, qui n’a pas hésité à couper les connections internet du pays lors des manifestions de 2017 contre son troisième mandant présidentiel successif, n’est donc ni un dirigeant éclairé ni un adepte des technologies numériques.
Il a seulement compris qu’il était indispensable pour la survie de son régime que les populations les plus pauvres reçoivent de l’argent dans les meilleurs délais.
Si on avait fait parvenir l’aide Covid-19 aux populations concernées par une des plateformes de transfert d’argent qui fonctionnent déjà dans ce pays depuis plusieurs années, on aurait non seulement permis aux bénéficiaires de recevoir une aide financière rapidement, on les aurait inclus dans le système financier et on aurait ce faisant, consolidé une base de données nationale indispensable à la planification nationale.
IL FAUT PROFESSIONNALISER LA RIPOSTE COMMUNAUTAIRE
EXCLUSIF SENEPLUS - L'assouplissement des mesures est intervenu trop vite - Le CNLS est-il impliqué dans la gestion de cette pandémie ? L'Afrique court un réel risque de devenir le prochain épicentre - AU FOND DES CHOSES AVEC CHEIKH DOUDOU MBAYE
Le risque de voir l'Afrique devenir le prochain épicentre de la pandémie à covid 19 est bien réel. Selon Cheikh Doudou Mbaye, spécialiste en santé publique, le scepticisme de la population ajoutée complotisme anti-vaccin pourraient conduire le continent vers l'hécatombe. Pour l'invité de Lika Sidibé, la gestion communautaire annoncée par les autorités du ministère de la santé doit être mieux élaborée et davantage professionnalisée ajoutant que cela doit être du ressort des structures comme le Comité National de Lutte contre le Sida (CNLS) qui dispose d'une solide expérience en la matière.
Cheikh Doudou Mbaye Mbaye déplore par ailleurs, l'inexistence d'un modèle de référence de calcul du pic de l'épidemie au Sénégal. Selon lui, la courbe baissière annoncée par le ministre de la Santé pour justifier l'assouplissement des mesures est incohérente. Car, fait-il remrquer, la courbe montre depuis lors, une épidémie non maîtrisée et en dents de scie.
Nous avons assoupli trop vite les mesures - Une épidémie se gère avec la communauté - Le conseil national de lutte contre le sida - le scepticisme des populations,
"QU'ON GARDE GORÉE INTACTE AVEC SES RUES"
Maire de Gorée, Augustin Senghor rappelle que si l’île est classée patrimoine mondial, c’est grâce à son histoire. Selon lui, il faut garder intact cet héritage avec les noms de rue hérités de la colonisation
A Gorée, la plupart des rues portent encore le nom des colons…
Je peux dire que toutes les rues de Gorée portent à 90% le nom des colons européens et particulièrement de Français qui sont les derniers occupants de l’île. Il n’y a pas à proprement parlé de noms sénégalais à part les rues comme la rue des Bambara, la rue de Dakar. C’est vraiment des exceptions qui portent le nom de personne ou de communauté.
Quel est le symbole que revêtent ces noms ?
C’est un symbole particulier. Avant les indépendances, Gorée comme beaucoup de localités, notamment comme toutes les quatre communes françaises, était sous occupation française. Ipso facto les rues ont été baptisées aux noms des gouvernants, des Français qui occupaient l’île. C’est aussi simple que cela. C’est la même chose quand on va à Saint-Louis, voire un peu à Dakar dans certaines rues à Rufisque aussi. Il n’y a pas de symbole particulier qui soit attaché à cela, sauf que les habitants de l’époque naturellement étaient tournés vers la France, et donc les décideurs. Les collectivités locales donnaient des noms français aux différentes rues et places.
Dans sillage du mouvement «Black lives matter» qui fait suite à l’assassinat de George Floyd, des statues d’esclavagistes ont été déboulonnées. Il y a un débat partout sur cette question. Est-ce que ce n’est pas le moment de débaptiser ces rues ?
Sous cette question, je vais donner une réponse qui est assez mitigée parce qu’il faut savoir que Gorée est classée patrimoine mondial. Et si Gorée est classée patrimoine mondial, c’est par rapport à son histoire. Est-ce que ce serait cohérent de préserver cette histoire pour les générations futures et débaptiser ces rues et surtout d’effacer cette histoire-là ? Puisque qu’aujourd’hui pour pouvoir se souvenir de ces faits-là vraiment condamnables, on a besoin de laisser des traces aux générations futures pour qu’elles comprennent, qu’elles voient et touchent du doigt, du regard ce qui s’est passé il y a plusieurs siècles en avant. C’est comme si on nous disait puisqu’on veut effacer l’image de la violence sur George Floyd, démolissez la Maison des esclaves. Il faut savoir raison gardée, ne pas faire dans l’émotivité qui nous est toujours attribué par les autres civilisations, notamment les Européens, les Occidentaux et analyser lucidement ce qu’il faut faire. C’est un patrimoine, il se conserve avec ses plus et ses moins, c’est-à-dire avec ses choses positives et ses choses négatives. Et c’est en cela que la conservation du patrimoine historique et culturel nécessite des fois d’y réfléchir deux fois avant d’effacer ses traces. Sinon ça va nous amener vers l’oubli de ce que jamais l’humanité ne devrait oublier. S’il y a oubli, il y a des risques de répétition de l’histoire. C’est important qu’on préserve ça : Quand les touristes viennent, ils auront le droit de savoir ce qui s’est passé et qu’ils puissent créer un sentiment de repenti pour que les gens disent plus jamais ça. Je militerai à ce qu’on garde intacte Gorée en tant que patrimoine avec ses rues. Il y a une quinzaine d’années, une nouvelle politique d’adressage des rues avait été lancée. Le Conseil avait pensé qu’il valait mieux préserver ce patrimoine avec ses rues qui sonnent européennes pour montrer les stigmates et de la traite négrière et de la colonisation.
par Siré Sy
MACKY, LE CŒUR EST-IL TOUJOURS À L'OUVRAGE ? (4/5)
EXCLUSIF SENEPLUS - Le président va-t-il se laisser vaincre par l'adversité ou bien, va-t-il se rebiffer et demeurer ce qu'il n'a jamais cessé d'être : un combattant et un persévérant ? PRÉSIDENT ET GESTION DE CRISE, ‘’QUAND L’HEURE EST GRAVE !’’
L'adage dit que c’est au pied du mur que l'on reconnaît le maître-maçon. Dans la même temporalité, c'est par et dans la gestion de crise(s) de magnitude ‘’secousse du régime’’ sur l'échelle d'une Nation-État, que l'on apprécie les choix, les décisions et le leadership d'un chef d'Etat dans sa fonction de président de la République. Le Think Tank Africa WorldWide Group vous propose une toute nouvelle série du Feuilleton managérial : Président et Gestion de crise, ‘’quand l'heure est grave !’’, de cinq (5) épisodes, entièrement et exclusivement consacré au président Macky Sall. Pour cette quatrième épisode de ''Président et Gestion de crise ‘’quand l'heure est grave’’, Style et Méthode de gestion de crise du président Macky Sall, ''Le coeur est-il toujours à l’ouvrage’’ ?
Entre Macky et une franche des Sénégalais qui grossit de plus en plus, c'est comme qui dirait, la grande incompréhension de part et d'autre. Entre un sentiment de dépit qu’on pourrait dire, traverser le président de la République et une sorte de désamour grandissant de bon nombre de sénégalais envers leur président. Au point qu’à travers un certain mutisme, une prise de parole de moins en moins ferme et une gestion du temps qui prend tout son temps, se pose une question : le cœur de Macky Sall, serait-il toujours à l'ouvrage, comme au premier jour de Mars 2012 ? Est-il permis de lire à travers son style de management de ces derniers mois et que la gestion du Covid-19 a eu à révéler en substance, un certain dépit (au sens de chagrin mêlé de colère, dû à une déception, à un froissement d'amour-propre) du président envers une bonne frange de ses propres partisans d’abord et des Sénégalais en général ? Au laboratoire de l'imaginaire, le symbole le plus fort et le plus illustratif de ce ‘’certain dépit’’ entre le chef de l'Etat et les siens, pourrait se lire à travers cette décision du président de la République lui-même, de quitter la résidence du palais présidentiel pour aller retourner habiter dans sa propre résidence, sa maison à Mermoz. Chez lui. De ne plus habiter au Palais. De ne plus habiter le Palais.
Avant même le Covid-19, l’adversité envers et contre le président était passée d’une adversité politique à une animosité politique, une adversité aux allures cryptos-personnelles. En effet, du président, un ‘’certain moule’’, a toujours estimé que la station qu'il occupe n'est pas ‘’taillé’’ pour lui et que Macky serait surgit de nulle part pour coiffer tout le monde au poteau. Si bien que ce ‘’certain moule’’ se demande toujours, diantre, par où est-il passé pour coiffer tout le monde au poteau ? Quand une personne est dans cette posture et est perçue comme un intrus dans un écosystème, comme un cheveu dans la soupe, rien ne lui sera pardonné et tout sera retenu contre lui.
Macky, un ‘’anti-moule’’
De l’amitié et du rapprochement entre le président Abdou Diouf et le président Macky Sall et dont le président Ablaye Wade ne peut pas se l'expliquer, pourrait être analysé sous le prisme de la tragédie grecque, une sorte de convergence de destins des deux hommes, ‘’Macky ak Abdou’’.
Si Abdou Diouf était certes un pur produit de ce ‘’certain moule’’, l'on lui a toujours opposé son parachutage forcé et son manque de légitimité politique, au point que devant l'adversité et les crocs-en jambe, le président s’était finalement résigné et a fini par tomber dans le renoncement.
Pour Macky Sall, il n'est pas un pur produit d'un ‘’certain moule’’ mais il s'est forgé et a acquis une légitimité politique de par sa trajectoire. Mais voilà, parce que férocement combattu et regarder d’en haut, une sorte de dépit, commencerait-elle à gagner petit à petit Macky Sall ? A l’un (Abdou Diouf), on lui avait opposé son manque de légitimité politique quoique faisant partie d’un ‘‘certain moule’’. A l’autre (Macky Sall), on lui oppose sa non-appartenance à ce ‘’moule’’ bien qu’ayant une légitimité politique. Pour ce ‘’moule’”, il faut remplir ces deux conditions et de façon constitutive : être issue du ‘’moule’’ et acquérir une légitimité politique pour présider les plus hautes fonctions de la République. Comme un certain Léopold Senghor ou un certain Ablaye Wade, tous deux étant de purs produits du ‘’moule’’ et ayant acquis une légitimité politique sur le terrain.
Devant les difficultés de toutes sortes, entre dépit et désamour, le président Macky fera-t-il comme le président Abdou Diouf ? Macky Sall va-t-il se résigner et se laisser vaincre par l'adversité et ainsi opérer dans le renoncement de soi, ou bien, va-t-il se rebiffer, rester, continuer et demeurer ce qu'il n'a jamais cessé d'être - un combattant et un persévérant - ? Dieu seul sait.
Le président Macky Sall, de par sa trajectoire et son histoire, est une certaine idée du Sénégal, en rupture de ban avec un ‘’certain système’’…. En est-il conscient lui-même ? Seul lui le sait !
A Rufisque, l’une des quatre communes de plein exercice de la métropole, les séquelles de la colonisation restent encore vivaces. Les édifices de l’époque coloniale demeurent toujours malgré un état de délabrement avancé pour certains
A Rufisque, l’une des quatre communes de plein exercice de la métropole, les séquelles de la colonisation restent encore vivaces. Les édifices de l’époque coloniale demeurent toujours malgré un état de délabrement avancé pour certains. Et les populations continuent à se côtoyer dans des rues qui, pour la plupart, portent encore les noms de personnalités de la période post-indépendance.
Les traces de la colonisation restent présentes dans Rufisque qui fut un centre d’attractivité économique avec des infrastructures de base et usines donnant à la cité la vocation d’un poumon économique avec un port avant même celui de Dakar. Les importantes bâtisses érigées durant cette ère et formant l’essentiel des constructions dans la zone appelée Vieux Rufisque font ressortir, à côté de rues traînant à ce jour les stigmates de la domination française, les traces de ce passé. L’une des trois longues rues allant du centre-ville aux quartiers Mérina et Thiawlène porte encore le nom de Paul Sicamois, un ancien maire du temps de la colonisation. Bouffière est le nom que porte la rue 16, Demoby la 39, André Lebon la 35, Léon Armand la 35, 47 la Péchot. La rue 27 porte le nom Garonne et la liste est loin d’être exhaustive dans la ville érigée en commune en 1880. Des personnes pour l’essentiel mal connues de la majorité des Rufisquois qui quotidiennement arpentent ces rues aux indications sur panneaux bleus parfaitement visibles avec les noms de «ces inconnus». «Les jeunes d’aujourd’hui ne parlent pas de ces rues parce que ne les connaissant pas», a fait savoir Idrissa Ba, un habitant de la ville, approuvant la «rebaptisation» des rues aux noms de personnalités locales.
«C’est Mbaye Jacques Diop (maire entre 1987- 2002) qui a entamé le processus de remplacement des noms des rues. C’est de lui qu’est venue l’appellation du boulevard par le nom de Maurice Guèye. Même chose pour les rues Ousmane Socé Diop et Adama Lô», a noté Amadou Sène Niang, porte-parole du maire Daouda Niang. «De tous les maires lui ayant succédé, seul Daouda Niang a pris le flambeau dans cette démarche», a-t-il expliqué. A la faveur d’un Conseil municipal en date de décembre 2017, plusieurs rues ainsi que la mythique Place Gabard ont eu de nouveaux noms. Alé Gaye Diop s’est en fait substitué à l’ancien maire Gabard, le tronçon entre le canal de l’est et le rond-point Bata (1646 m) porte le nom de Me Mbaye Jacques Diop, le tronçon entre la Sgbs et Rufsac sur la Rn répond de Alioune Badara Mbengue, ancien ministre socialiste. «C’est une volonté d’honorer les fils de Rufisque», a argumenté Sène Niang sur le choix de noms locaux pour les infrastructures de la ville. Pour autant, notre interlocuteur n’est pas sans réserve sur le sujet. «La chose peut être considérée sous l’angle d’un dilemme philosophique. Il s’agit de valoriser un patrimoine culturel et architectural et changer tout peut être discutable», a-t-il émis. «Ce sont des bâtiments construits par les Français et qui demeurent jusqu’à ce jour. Faut-il donc tout débaptiser au profit de personnalités rufisquoises ou raser tout et repartir sur des bases purement locales», s’est-il interrogé avec la conviction que le débat vaut son pesant d’or. Une œuvre d’indigénisation incomplète puisque les nouvelles baptisées se dérivant en Thianar Ndoye, Anta Madjiguène Ndiaye s’entrecoupent avec les vieilles Calvert (rue 12), Savet (rue 18), Thionk (rue 23), renseignant par le fait de la profondeur de l’aliénation dont ont du mal à se départir pour de bon les locaux, 60 ans après l’indépendance.
par Madiambal Diagne
L'EC(H)O D'UN SILENCE BAVARD
Le silence de nos autorités après l’option de Paris laisse dubitatif. Peut-être que la France mérite tout ce dont on l’accuse, mais la situation révèle une impréparation des pays de l’Afrique de l’Ouest à assumer leur souveraineté monétaire
Les pays de l’Afrique de l’Ouest avaient clamé urbi et orbi vouloir mettre fin à la monnaie Cfa et réviser ainsi leurs accords de coopération monétaire avec la France. Les chefs d’Etat membres de la Cedeao, suivant les recommandations de leurs experts, avaient indiqué que 2020 sonnera le glas de la monnaie Cfa qui devra être remplacée par l’eco. Le 21 décembre 2019, les Présidents Emmanuel Macron (France) et Alassane Dramane Ouattara (Côte d’Ivoire) avaient confirmé cette échéance inéluctable pour les pays de l’Afrique de l’Ouest. Il est à remarquer que les pays de l’Afrique centrale, membres de la Banque des Etats de l’Afrique centrale (Beac) et les Comores, tous soumis au même régime, se sont encore gardés de trancher le débat. Le 24 mai 2020, le gouvernement français a initié un projet de loi entérinant la fin du franc Cfa en Afrique de l’Ouest et la restitution à la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Bceao) de la totalité des réserves de change déposées dans les comptes du Trésor français. Le ministre des Affaires étrangères de la France, Jean-Yves Le Drian, prenant les airs d’un Charles de Gaulle sur la Place Protêt à Dakar en 1958, a déclaré devant l’Assemblée nationale française que son pays répondait ainsi à une demande des huit pays membres de l’Uemoa (Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée-Bissau, Niger, Mali, Sénégal, Togo).
La France se retire également des organes de gestion de la monnaie, permettant aux pays africains de recouvrer leur souveraineté monétaire pleine et entière. Elle ne s’engage pas moins à continuer à assurer la garantie de la convertibilité de la prochaine monnaie eco. Est-ce de la mansuétude ou juste une pudeur diplomatique ? En tout cas, on peut se demander combien de temps cette offre de garantie de la convertibilité pourra durer, d’autant que le pays garant n’aurait désormais aucune autorité ou emprise sur le cours des choses. Quel pays garantirait une monnaie adossée à des économies de pays dont il ne participe pas à la définition des politiques économiques ? En outre, garantie pour garantie, qu’est-ce qui assure que le successeur de Emmanuel Macron en France adoptera la même position ou que le successeur de Alassane Dramane Ouattara ne voudra pas changer de stratégie quant à la politique monétaire ?
Les polémistes deviennent subitement aphones
Le débat avait pris en haleine les élites africaines autour de la question du franc Cfa. Cette monnaie qualifiée de «coloniale» était présentée comme le mal provoquant les retards économiques des pays africains. Qu’à cela ne tienne ! Seulement, il ne se trouvait pas un économiste africain en mesure de présenter une expérience monétaire africaine plus efficace ou étant plus avantageuse que le franc Cfa. Au contraire, tous les pays qui encourageaient à pourfendre le Cfa comme le Nigeria, la Guinée ou le Ghana faisaient en quelque sorte du Cfa une monnaie refuge pour leurs transactions. Dans certains de ces pays, le Cfa est même accepté dans les transactions quotidiennes domestiques comme l’est aussi le dollar américain dans de nombreux autres pays africains. C’est dire !
Dans une chronique en date du 24 juin 2019, intitulée «Qui voudrait d’une monnaie de singe ?», nous mettions en garde, car «personne ne voudra porter la responsabilité d’être mis au ban de la communauté pour cause de manque de sentiment panafricaniste ou de volonté d’intégration régionale africaine. Personne ne voudra apparaître comme étant le support de supposés intérêts étrangers à l’Afrique. Les chefs d’Etat risquent ainsi de donner leur onction à un projet que tout le monde sait prématuré, tant les conditions préalables et nécessaires à sa réussite ne sont pas encore satisfaites. L’eco risquera en effet de se révéler comme une monnaie de singe, à l’instar de la plupart des monnaies en cours dans bien des pays africains». Nous demandions en conséquence de ne pas lâcher la proie pour l’ombre.
On peut présumer que le contexte de la pandémie du Covid-19 devrait y être pour quelque chose. Les esprits sont tournés à chercher à se sauver, mais on ne peut pas ne pas constater que c’est le silence radio après l’annonce par la France de son retrait des organes de l’Union monétaire. Les chefs d’Etat africains, qui avaient officiellement demandé la fin du franc Cfa, se gardent encore de se féliciter de la décision de la France. Le Nigeria, qui caressait le dessein de prendre la place de la France dans l’espace monétaire, ne montre plus un enthousiasme débordant pour l’eco, dès l’instant que les pays de l’Uemoa ont montré ne pas vouloir être sous le joug du Naira. Le Nigeria, dont les plans sont contrariés, dispute à l’Uemoa le droit d’utiliser le nom eco. Jusqu’où cette querelle de baptême va-t-elle aller ? Va-t-on voir circuler deux monnaies appelées toutes «eco» dans le même espace de la Cedeao ?
Les activistes qui criaient à tue-tête pour la fin immédiate du Cfa ont déserté les plateaux des télés, des radios et les colonnes des journaux. Les rares et assez timides réactions encore enregistrées sont pour accuser la «France de chercher à torpiller l’eco en se retirant de manière aussi précipitée». Peut-être que la France mérite tout ce dont on l’accuse, mais la situation révèle une impréparation des pays de l’Afrique de l’Ouest à assumer leur souveraineté monétaire. Force est de dire que les Chefs d’Etat africains avaient fini par céder à une certaine clameur des réseaux sociaux, aux invectives de quelques grandes bouches d’activistes qui ont investi les nouvelles manufactures d’opinions et donc avaient fini par prendre des décisions pas suffisamment mûries. Ils sont coupables de n’avoir pas assumé toutes leurs responsabilités de Chefs d’Etat, même au prix de passer pour des vilains. Il était de mauvais ton de chercher à défendre la qualité du franc Cfa face aux attaques dont il faisait l’objet. Ainsi, a-t-on laissé prospérer tous les fantasmes sur le Cfa, voulant par exemple que la France profite des réserves de change déposées dans les coffres de la Banque de France pour financer son économie. Or le montant des liquidités déposées par la Bceao sur le compte d’opérations ouvert auprès du Trésor français est de l’ordre de 10 milliards d’euros à la fin de l’année 2019. Un tel montant ne suffirait même pas pour payer la dette du seul Sénégal ou pour financer la phase II de son Plan Sénégal-émergent (Pse). 40% des 10 milliards d’euros appartiennent à la Côte d’Ivoire et les 19% au Sénégal. Les réserves de change étaient rémunérées au taux de 0,75%. La France peut placer cette somme sur les marchés et peut-être récolter un meilleur taux ou l’utiliser dans ses transactions courantes. Qui sait ? La France n’a jamais dit comment elle utilise cette somme, mais on ne peut pas ne pas remarquer qu’elle est dérisoire à l’aune d’une économie d’un pays comme la France. Le Pib de la France est évalué à plus de 2 500 milliards d’euros et les taxes sur les transactions financières rapportent plus de 3 milliards d’euros par jour à la France.
Le Cfa est parti pour rester encore pendant quelques bonnes années
Le vin est tiré, il faut le boire. Il ne semble pas envisageable de demander à la France de revenir sur sa décision. Le cas échéant, le ridicule tuerait. Il n’en demeure pas moins que la circulation du Cfa est partie pour demeurer quelques bonnes années encore. L’appellation de la monnaie pourrait changer dans les livres comptables, mais la monnaie fiduciaire va demeurer. Mettre en circulation une nouvelle monnaie se fait dans le long terme. L’expérience enseigne que même pour changer une série de coupures de billets de banque, les autorités monétaires déroulent l’opération sur une longue période. Il faudrait aussi s’assurer de la fiabilité des nouveaux billets de banque qui seront mis en circulation. On a vu qu’en dépit des nombreux filets de sécurité censés protéger et rendre les billets de banque inviolables, des pays comme les nôtres sont régulièrement victimes de grandes opérations de faux monnayage. Va-t-on aussi pousser le bouchon du nationalisme africain jusqu’à préférer battre monnaie dans nos propres unités industrielles qui n’offrent pas toujours les meilleures garanties de sécurité ? Ou bien voudrait-on éviter de s’approcher de la France et aller faire battre notre monnaie en Chine ou en Russie ?
Au demeurant, Dans une tribune publiée dans ces colonnes en mars 2017, l’économiste Ndongo Samba Sylla présentait des faits intéressants sur la question du franc Cfa, qui se doivent d’être lucidement analysés pour toute transition vers une nouvelle monnaie. Les limites que le franc Cfa a représentées pour l’intégration économique du continent, le «déficit chronique de crédits bancaires des pays» de l’espace Cfa, ainsi que l’effet néfaste des flux financiers illicites sur les économies des pays de cette zone monétaire sont des arguments abordés par l’économiste sénégalais. Ces pistes bien intéressantes méritent une étude rigoureuse des gouvernants et des acteurs de la transition monétaire dans notre zone. Le silence de nos autorités après l’option faite par la France laisse dubitatif tout observateur. Il est bien de sortir d’une situation préjudiciable, mais encore faudrait-il une prise de responsabilités assez conséquente des élites politiques et économiques pour impulser une démarche nouvelle. Il faudrait de toute force que cette sortie du franc Cfa ne soit pas un «chaos monétaire programmé» comme bien des milieux pourraient être amenés à l’envisager. Une logique dans laquelle nos Etats attendraient un fait accompli, et prôner une navigation à vue sera plus que dommageable aux plans économiques et sociaux.
LES SYMBOLES DU COLONIALISME AU COEUR DE DAKAR
Faidherbe, Jean Jaurès, Carnot, Fleurus, boulevard Général De Gaulle,… Les rues et avenues de la capitale sénégalaise ont un fort accent français qui rappelle le douloureux passé colonial
Faidherbe, Jean Jaurès, Carnot, Fleurus, boulevard Général De Gaulle,… Les rues et avenues de Dakar ont un fort accent français qui rappelle le douloureux passé colonial. Ces plaques apposées au coin des rues de la capitale sont-elles des rappels historiques ? Ou des hommages ? Depuis la mort de George Floyd aux Etats-Unis, les statues et rues qui portent le nom des personnages liés au passé colonial et à l’esclavage sont devenues des symboles à abattre.
Depuis la mort de George Floyd, tué par un policier blanc aux Etats-Unis, un vent de contestation souffle à travers le monde pour un changement de statut des Noirs et la disparition de l’espace public des statues qui sont le visage de l’oppression, de l’esclavage. Des Usa à la Grande Bretagne, en passant par la Belgique, les monuments érigés en la mémoire de Cécile Rhodes, Léopold II, Edward Colston, Robert E. Lee entre autres sont contestés, vandalisés, voire carrément arrachés de leur socle en marge des manifestations liées à la mort George Floyd et aux violences policières. Ces manifestations qui réveillent les vieilles plaies raciales, des souffrances séculaires, comme la traite négrière et la colonisation, relancent aussi le vieux débat sur l’histoire du maintien des hommes ayant écrit les plus sombres pages de l’histoire de l’humanité dans nos villes.
Aujourd’hui, les rues africaines gardent les vestiges de ce lourd passé de l’histoire. Et 60 ans après les indépendances, les noms des hommes qui ont opprimé les Peuples africains et écrit leurs faits d’arme avec le sang noir sont partout à Dakar, qui fut la capitale de l’Afrique occidentale française.
Le Plateau s’est réveillé sous un ciel couvert de poussière. En cette matinée de juin, les rues de ce quartier situé au cœur de Dakar, qui est le centre des activités commerciales, grouille de monde. Un peu partout, les noms des colonisateurs sont marqués sur les plaques au niveau des rues qui leur sont dédiées en hommage. Un acte inqualifiable, selon les activistes qui exigent leur «débaptisation» comme la Rue Jean Jaurès figée dans son effervescence quotidienne.
Ici, tout le monde a le pas pressé. Les magasins de vente de moquettes, tapis, appartenant aux commerçants d’origine libanaise, longent la rue. En remontant vers Sandaga, ce sont les commerces d’habits et autres qui s’offrent aux visiteurs. Sur la chaussée, les petits commerçants ont fini de s’approprier le passage piéton en ne laissant qu’un petit espace où les gens se bousculent. Et les vendeuses de cacahuètes, de sachets d’eau, de fruits n’arrangent pas les choses. Pendant ce temps, véhicules particuliers et transports en commun poursuivent leur rotation sur cette rue très fréquentée de la capitale.
Jean Jaurès, l’une des figures majeures du socialisme français, n’est pas la seule ancienne personnalité du pays colonisateur dont le nom reste toujours gravé sur les murs à Dakar. Il y a aussi Louis Faidherbe qui constitue l’une des grandes figures du colonialisme français. Gouverneur du Sénégal avant indépendance, une statue lui a d’ailleurs été dédiée à Saint-Louis. A Dakar, sur l’avenue qui porte son nom, le lieu est très connu des Sénégalais, en particulier des Dakarois. Des marchands ambulants la squattent à la recherche d’un éventuel acheteur. Le dispositif de lavage de mains installé à certains endroits témoigne de l’engagement contre le coronavirus, contrairement au relâchement constaté dans certains lieux. A l’intersection avec l’avenue Lamine Guèye, un volontaire de la mairie de Dakar régule la circulation pendant qu’un policier procède au contrôle de papiers de chauffeurs stoppés dans leur course. Sur la chaussée, les vendeuses d’eau profitent de la chaleur pour écouler leur marchandise. Idem au boulevard Général de Gaulle où est pourtant tenu le défilé militaire et civil chaque 4 avril qui célèbre l’accession du Sénégal à la souveraineté internationale. Ce n’est pas tout : Il y a les rues ou avenues Félix Faure, Jules Ferry, Carnot… Quand on marche dans les rues de Dakar, Saint-Louis, Rufisque, Gorée, on revisite le passé colonial glorifié par les honneurs rendus aux administrateurs de colonie et militaires ou de batailles comme Niomré pendant lesquelles des résistants ont été massacrés. Est-ce par devoir de mémoire que ces noms sont conservés ? Ne s’agit-il pas d’un rappel gratuit de l’humiliation et la gloire perpétuée d’une époque peu glorieuse ? Ou les noms donnés aux rues et avenues constituent-ils simplement des actes de mémoire ? Est-ce que le fait de modifier le passé ne sera-t-il pas considéré comme du révisionnisme ?
Si la statue de Faidherbe à Saint-Louis, symbole de l’occupation, est conspuée par des activistes, contrairement à la mairie, les autres plaques commémoratives, emblèmes d’un sombre passé colonial, ne semblent pas émouvoir, contrairement en Occident. Même si personne ne peut mesurer la profondeur et la pérennité de ce combat contre l’oppression raciste. Maire de Plateau, Alioune Ndoye suscite le débat : «Nous allons proposer au Conseil municipal la mise en place d’une grande commission composée de tous les sachants que comptent notre commune, notre région de Dakar et l’Université pour proposer le changement des noms de nos avenues, rues et places publiques.»