SenePlus | La Une | l'actualité, sport, politique et plus au Sénégal
2 octobre 2025
LE TRAIN, LOCOMOTIVE DU PEUPLEMENT DE TAMBACOUNDA
Ville cosmopolite eu égard à la symbiose ethnique et au brassage culturel qui la caractérisent, Tamba doit une partie de son peuplement à l’implantation de la gare ferroviaire, un des symboles historiques en quête d’une seconde vie. Reportage
Ville cosmopolite eu égard à la symbiose ethnique et au brassage culturel qui la caractérisent, Tambacounda doit une partie de son peuplement à l’implantation de la gare ferroviaire, un des symboles historiques en quête d’une seconde vie. Plusieurs versions recueillies affirment que les chemins de fer ont joué un rôle déterminant dans le processus d’installation des populations qui venaient notamment du Mali
Véritable carrefour de communautés ethniques et ville culturelle, l’histoire de Tambacounda semble se confondre avec celle des chemins de fer qui auraient grandement contribué à son peuplement. Une petite incursion dans les locaux de l’ancienne gare ferroviaire permet de se rendre compte du rôle prépondérant qu’ont joué les chemins de fer dans l’accroissement démographique et la reconfiguration de la ville de Tambacounda. Dans le quartier Dépôt qui abrite les infrastructures ferroviaires, le décor est tout simplement austère. Des bâtisses imposantes en état de délabrement avancé accueillent le visiteur. L’hôtel de la gare a presque perdu son charme d’antan. Avec le temps, les façades des bâtiments se sont décolorées sous l’effet de la pollution et du rayonnement solaire. Les ordures jonchent la cour transformée en parking ouvert pour les véhicules. Des commerçants y érigent également leurs étals. A quelques mètres de là, se trouve la gare devenue méconnaissable, faute d’entretien.
De l’autre côté, on aperçoit les bureaux des cheminots et la station-service. Ici, tout est à l’arrêt. Aucune machine ne fonctionne. Bref, le train ne siffle plus à la gare de Tamba. Pourtant, cette infrastructure reste un patrimoine et un symbole dans l’histoire de la région du Sénégal oriental. Elle a contribué à l’agglomération de la ville de Tambacounda devenue, au fil du temps, une grande métropole avec la construction du chemin de fer Dakar-Bamako et la création du camp des cheminots.
Accroissement du peuplement
Selon plusieurs sources concordantes recueillies sur place, l’implantation des chemins de fer serait à l’origine de l’accroissement du peuplement de la ville de Tamba. «Tambacounda a été créée à la faveur de la venue du chemin de fer qu’on appelait le ‘’Dakar-Niger’’. Tous ceux qui ont vécu notre temps ou avant nous connaissaient bien la valeur économique de cette infrastructure. C’est pour cette raison que les populations étaient venues progressivement s’installer pour avoir du travail et s’activer dans les échanges commerciaux. Cette ville était devenue un point de commerce assez important», rappelle Mountaga Dabo, instituteur à la retraite depuis 1996 et ancien président de la commission culture du Conseil régional de Tambacounda. Le nom du quartier qui abrite la gare renseigne également sur la contribution déterminante de l’arrivée des habitants.
D’après M. Dabo, lorsque le chemin de fer fut installé, ceux qui y travaillaient avaient commencé par habiter près du dépôt, l’endroit où stationnaient toutes les locomotives et autres machines. Ce quartier, le plus ancien, selon certaines sources, tire son nom du dépôt des machines de la gare. «C’est l’un des plus vieux quartiers qui a accueilli les premiers employés de la voie ferroviaire composée essentiellement de Bambaras, de Mandingues, de Wolofs, de Khassonkés, de Peuls… », indique M. Dabo. Celui-ci précise que les Khassonkés étaient essentiellement en charge de la main d’œuvre des chemins de fer. Venus du royaume de Khasso, des membres de cette communauté étaient déjà bien employés. Le premier lotissement du quartier ‘’Dépôt’’a eu lieu en 1926. Les premiers habitants étaient composés d’ouvriers bambaras et wolofs, puis mandings», renseigne-t-il.
Des Maliens, premiers à s’installer
Trouvé dans son jardin sis derrière l’une des concessions familiales, Mamadou Silima Coulibaly a la lourde tâche de perpétuer le legs de son père qui fut le chef du quartier Dépôt. «Ceux qui ont fondé ce quartier venaient notamment du Mali. Parmi eux, il y avait des agriculteurs, des éleveurs et des chasseurs, mais aussi des employés de la gare qui ont fini par construire leur domicile dans les parages de l’hôtel de la gare. D’autres communautés comme les Wolofs, les Peuls ont rejoint progressivement le quartier», souligne l’actuel chef du quartier. Le premier chef de quartier s’appelait Batou Diarra. Il a été désigné par le chef de canton à l’époque. Puis Souley Coulibaly, ensuite Moussa Diallo et Boubous Coulibaly, décédé en 2016, lui succéderont.
Kékouta Diallo, octogénaire, est un infirmier à la retraite. Il est le grand frère de l’actuel chef du quartier «Pont» situé non loin du célèbre cours d’eau Mamacounda. Il confirme la thèse selon laquelle l’implantation de la voie ferroviaire a bien poussé plusieurs ethnies à habiter les premiers quartiers de Tambacounda. «La création de la gare a permis de développer des opportunités d’emploi avec des offres de travaux manuels. Les populations des localités environnantes ont rejoint progressivement Tamba afin de trouver une activité génératrice de revenu», témoigne Kékouta Diallo.
D’anciens cheminots témoignent…
Sous un grand arbre proche de la gare, se réunit un groupe de personnes composé majoritairement d’anciens cheminots à la retraite. Ceux-ci devisent sur l’actualité. L’évocation du nom chemin de fer suffit pour briser la glace et changer de sujets de discussion. Un air nostalgique se lit sur leur visage. Ils se souviennent de l’âge d’or de la gare ferroviaire. Lansana Traoré était mécanicien avant de prendre sa retraite en 2018. Son père fut cheminot. Il avait quitté Goudiry pour venir travailler à la gare de Tamba en 1950. Il se rappelle les beaux moments vécus et les témoignages de ses parents. «La plupart de ceux qui officiaient dans cette gare, dès son ouverture, venaient des villages traditionnels environnants comme Tamba Socé, Kothiary, Ndiit. Par la suite, ils ont fini par construire leurs domiciles avant d’y rester définitivement», confie M. Traoré. A l’image de ce dernier, nombreux sont les cheminots qui, en raison des activités professionnelles du chemin de fer, se sont installés définitivement à Tambacounda. C’est le cas de Ninamba Traoré, agent des télécommunications à la retraite. Il faisait partie de l’équipe chargée d’assurer la liaison téléphonique entre les gares. Il insiste sur le fait que la voie ferroviaire a joué un rôle prépondérant dans le peuplement de la ville de Tambacounda. «A l’époque où les trains reliaient Dakar et Bamako, les transactions commerciales connaissaient une forte dynamique. Certains voyageurs, qui pratiquaient des activités comme l’agriculture, l’élevage, le commerce, sont restés à Tamba. Ceci a même contribué à l’élargissement de certains quartiers comme celui de Dépôt», se souvient Ninamba Traoré, nostalgique.
Aujourd’hui, le vœu ardent de ces cheminots est de revoir les trains siffler à nouveau pour permettre aux centaines de pères de famille de reprendre leurs activités. Pour le syndicaliste Tidiane Diallo, la seule option pour réussir la relance des chemins de fer Dakar-Bamako demeure l’acquisition de locomotives. Il fait remarquer que toute l’expertise locale est disponible pour mener à bien la reprise des activités. A ce titre, il appelle à impliquer le personnel qui est laissé en rade dans les négociations.
Tamba Socé a contribué à la première vague de peuplement
Le village de Tamba Socé aurait joué un rôle essentiel dans le peuplement de la ville de Tambacounda, si l’on se fie à certaines sources. Des versions recueillies témoignent de l’apport considérable de cette localité dans l’avènement des premiers habitants de Tambacounda. «Tamba Socé a joué une partition importante dans le peuplement de la zone, d’autant que c’est dans ce village que les responsables de la gare faisaient les recrutements pour les chemins de fer. C’était le seul village qui était dans la zone au moment du démarrage des activités de la gare. Les populations venaient travailler le matin pour rentrer le soir ; avec le temps, certaines ont fini par rester et s’installer définitivement», relève l’instituteur à la retraite, Mountaga Dabo, notable à Tambacounda.
Sur la question du peuplement de la ville de Tambacounda, Mady Ndiaye, guide touristique et animateur d’émissions culturelles à la Rts Tamba, se montre prudent et nuancé. Selon lui, plusieurs versions ont été avancées. La première soutient que ce sont des habitants de Tamba Socé qui ont fondé la ville de Tambacounda. Leur argument, dit-il, est fondé sur le fait que Tamba Waly, l’ancien chef du village de Tamba Socé, fut un chasseur. C’était durant ses heures de chasse qu’il a découvert l’endroit où est bâtie la ville de Tambacounda. D’autres sources estiment que c’est un Malien du nom de Moriba Diakité qui ferait partie des premiers à habiter la ville.
Reconnaissance aux grandes figures de Tambacounda
Le Conseil départemental de Tambacounda entend rendre hommage à certaines grandes figures qui ont marqué l’histoire de la ville de Tambacounda, notamment celles-là qui ont joué un rôle historique et contribué au rayonnement de cette localité. Cet acte de reconnaissance, selon le secrétaire général du conseil, Hubert Ndèye, se fera à travers l’attribution de noms à des rues, des places ou des édifices publics. A ce titre, le Conseil a mis en place une commission de recensement des infrastructures. Une seconde commission chargée du choix des personnes a été également créée. «Elles sont toutes en train de travailler pour faire parvenir au Conseil départemental des propositions afin de concrétiser cet ambitieux projet des autorités locales. C’est un travail que nous menons avec l’implication de toutes les parties prenantes comme les communes et autres segments», indique M. Ndèye.
Sur ce même registre, le Conseil municipal compte faire de la Semaine des arts et de la culture, organisée en 2015 et en 2016, une vitrine de promotion et de valorisation du patrimoine culturel de toutes les communautés vivant à Tambacounda.
par Siré Sy
AU MALI ET POUR LE MALI, NOUS FAISONS FAUSSE ROUTE
Le meilleur service que la CEDEAO puisse rendre à la sous-région et à l’Afrique, c’est de permettre - enfin - l'avènement d'une nouvelle république, un nouveau forme d'Etat dans le pays : l'Etat fédéral
Tout, au Mali et dans le Mali, parle et raisonne en Etat fédéral plutôt qu’en État unitaire, centralisé, jacobin et accapareur. Le problème fondamental du Mali et au Mali, c'est le refus de ses classes dirigeantes de voir la réalité en face : le Mali, de par sa trajectoire historique, de par sa vocation, de par sa dimension géographique et de par sa composition ethnographique, est par essence et par existence, un Etat fédéral et non un Etat centralisé. C’est donc le fait de toujours repousser l’avènement de l’Etat fédéral du Mali (Etat fédéral du Malikura), qui est à l'origine de tous les maux au Mali, davantage que les différents régimes - civil et militaires - qui se sont succédé.
Le Mali n'a plus besoin d’une réformation et des réformes, parce que les réformes sont le propre d'un Etat jacobin et centralisé. Le Mali a plus besoin d'une refondation, pour passer de la rupture épistémologique ‘’d’un Mali pour soi’’ vers ‘’un Mali en soi’’, parce que la refondation est le propre pour aller vers une Etat fédéral au Mali.
Les présidents Modibo Keita, Alpha Omar Konaré, Amadou Toumani Touré, Dioncounda Traoré, Ibrahima Boubacar Keita, - des présidents civils -, ont tous engagés des réformes de toutes sortes, mais le Mali n'est pas sorti de l'ornière. Les présidents Moussa Traoré, Amadou Sanogo, Amadou Toumani Touré - des présidents militaires -, ont aussi pris des initiatives et mené des actions, mais le Mali n'est pas toujours sorti de l'ornière.
C’est pourquoi au Think Tank Africa WorldWide Group, nous croyons dur comme fer que le problème du Mali et au Mali, l'avenir du Mali et au Mali, n'est pas une affaire de régime civil ou militaire à la tête de la transition, que le problème au Mali et du Mali, n'est pas l'organisation d'une élection présidentielle. Loin s'en faut. Le problème au Mali et du Mali,- que nous aimons tant -, réside en son modèle d’Etat, à sa gouvernance (trop) centralisée. Le meilleur service que la CEDEAO puisse rendre à la sous-région et à l’Afrique, c’est de permettre – enfin - l'avènement d'une toute nouvelle république, d'un tout nouveau forme d'Etat au Mali et pour le Mali : l'Etat fédéral du Mali - le MALIKURA -.
Tant il est vrai que le Mali, de par sa géographie (le Mali s'étend sur une superficie de 1,24 million km²), de par sa position géostratégique et géo-spatiale (au cœur du sahel et frontalier avec 7 pays que sont la Mauritanie à l'Ouest, de l'Algérie au Nord-Nord-Est, le Niger à l'Est, le Burkina Faso et la Côte d'Ivoire au Sud-Sud-Ouest, la Guinée au Sud-Ouest et du Sénégal à l'Ouest-Sud-Ouest), les distances entre ses grandes villes (1 000 Km entre Bamako et Tombouctou et 1 200 km entre Bamako et Gao), de la diversité de ses groupes ethniques (les Bambara, les Peuls, les Touaregs, les Maures, les Malinkés, les Dogons, les Sénoufos), de son histoire millénaire et de sa trajectoire multiséculaire (le royaume du Mali, de Ségou, du Macina, l’empire Songhaï de Gao), au Mali et pour le Mali, tout parle et raisonne en ‘’Etat fédéral’’.
Nous faisons fausse route, si nous maintenons le Mali et au Mali, le cycle infernal des réformes (élections après élections) et ne pas aller avec et pour les Maliens en tête, vers un référendum pour que les maliennes et les maliens se prononcent pour ou contre un Etat fédéral.
Rester dans les réformes avec comme point de mire, l'organisation de la prochaine élection présidentielle dans une année, c'est être, rester et demeurer toujours dans la culture d’objectif. Par contre, oser la refondation pour le Mali, aller vers un référendum pour rendre possible le fédéralisme, c'est être dans une culture de transformation.
C'est de cela que le Mali a plus besoin. Parce qu'en définitive, ce n'est pas le ‘’Mali en soi’’ qui est en crise mais le ‘’Mali pour soi’’. Et quand le Mali éternue, c'est toute la CEDEAO qui tousse.
Siré Sy est fondateur du Think Tank Africa WorldWide Group
NIASSE ACCUSÉ DE VOULOIR FAIRE ESCAMOTER LE DÉBAT SUR LA GESTION DES INONDATIONS
Le groupe parlementaire liberté et démocratie tient à faire constater à l’opinion que le bureau du parlement ne souhaite ni le contrôle de l’action du gouvernement ni la transparence dans la gestion des finances publiques - COMMUNIQUÉ
SenePlus publie ci-dessous, le communiqué du groupe parlementaire liberté et démocratie, daté du 16 septembre 2020, relatif aux tractations en cours à l'Assemblée nationale quant à la gestion par le gouvernement, du Programme Décennal de Lutte contre les Inondations.
"Le Groupe parlementaire informe l’opinion publique nationale et internationale que, suite à sa saisine du président de l’Assemblée nationale pour une convocation d’une session extraordinaire de l’institution, le Bureau a décidé de créer une mission d’information sur le problème des inondations, lors de sa réunion extraordinaire tenue le mardi 16 septembre 2020.
Le Bureau a rejeté notre demande d’audition des ministres et responsables concernés par les inondations et le Programme Décennal de Lutte contre les Inondations (PDLI).
Le groupe parlementaire liberté et démocratie en prend acte et tient à faire constater à l’opinion que le bureau de l’Assemblée Nationale ne souhaite ni le contrôle de l’action du gouvernement ni la transparence dans la gestion des finances publiques.
Au demeurant, le groupe parlementaire considère que cette mission d’information du bureau n’exclut nullement la pertinence et la nécessité pour l’Assemblée Nationale de convoquer une session extraordinaire et d’organiser des séances d’audition publiques qui constituent le meilleur moyen pour les députés de s’informer dans l’immédiat et aux populations de se faire une idée sur la gestion des inondations et du plan décennal qui fait l’objet de vives polémiques.
Le Groupe parlementaire liberté et démocratie demeure convaincu que le meilleur moyen d’avoir des informations auprès des ministres concernés par la gestion des inondations pour atténuer la polémique autour de l’argent dépensé dans le cadre du plan décennal et d’informer le peuple souverain est l’organisation des séances d’audition en plénière retransmise en direct à travers les médias.
Fort de cela, le groupe se fait le devoir de saisir l’ensemble des députés de tout bord (majorité, opposition et non-inscrits) pour une convocation de l’Assemblée Nationale en session extraordinaire conformément aux dispositions de l’article 81 de la constitution et l’article 05 du règlement intérieur de l’Assemblée dans les meilleurs délais pour faire jouer à l’institution parlementaire pleinement sa mission de contrôle."
LE JOUR ET LA NUIT, UN HYMNE À LA MORALE
Écrit dans un style simple auquel il doit sa beauté et son originalité, ce livre d'Oumar Sankharé, réédité à titre posthume en 2016 par les Éditions Maguilène, traduit toute la personnalité de son auteur
Décédé en octobre 2015 à Dakar, Pr Oumar Sankharé a marqué son époque grâce à sa dimension intellectuelle. L’homme, seul double agrégé en Afrique de Grammaire et de Lettres classiques, était du lot de ces professeurs qui maîtrisent parfaitement le Grec et le Latin. Son roman « Le jour et la nuit », réédité à titre posthume en 2016 par les Éditions Maguilène, a traversé toute une génération de lecteurs. Écrit dans un style simple auquel il doit sa beauté et son originalité, ce récit passionnant où la « douleur de l’homme » constitue la trame, traduit toute la personnalité de son auteur.
Agrégé de Lettres classiques et de Grammaire, feu Oumar Sankharé est né en 1950 à Thiès. Il a enseigné à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar et à l’Université Gaston Berger de Saint-Louis. Son ouvrage « Le jour et la nuit » occupe, sans aucun doute, une place de choix dans la collection des plus belles œuvres littéraires sénégalaises. Édité pour la première fois en 1992 par les Nouvelles imprimeries du Sénégal (Nis), il lève un coin du voile sur le caractère particulier de son auteur. Un homme singulier qui, au-delà de ses qualités intellectuelles reconnues de tous, était aussi un humaniste d’une extrême sensibilité. La rigueur de sa plume montre combien il tenait à l’ordre et à la discipline. À l’humilité. « Le jour et la nuit » constitue l’une de ses productions les plus connues. Elle aura traversé toute une génération de lecteurs. Pr Oumar Sankharé semble y mêler tous les genres littéraires : poésie, conte, épopée, théâtre…Ce récit qui prend souvent la forme d’une autobiographie, célèbre les us et costumes de la société sénégalaise. Il s’agit d’une célébration de nos valeurs dans toute leur splendeur ; un hymne à la morale. La trajectoire mouvementée du personnage principal, Doudou, nourrit la trame de ce roman d’initiation riche d’aventures. Dans cet ouvrage, le sort s’acharne sur le héros dès les premières pages. À la suite du décès accidentel de son père, les jours se suivent et se ressemblent pour Doudou qui connaîtra une succession de déchéances qui le mèneront même jusqu’à la prison. Une vie qui n’a été qu’un tissu de revers.
Extrait
Perdu dans les profondeurs de la brousse, Ndiobène offre l’aspect habituel des villages africains. Des pistes tortueuses le reliant au reste du pays. Près d’une petite rivière, s’étendent de vastes champs bordés d’arbres. Çà et là, entre des ruelles minuscules, se dressent des agglomérations de cases en argile recouvertes d’un toit de chaume.
Je fus d’abord frappé par l’aimable hospitalité des habitants. En peu de temps, je me fis de nombreux camarades parmi les garçons de mon âge. Nous formions une bande joyeuse dont les activités étaient partagées entre les promenades à travers la brousse et les jeux de plein-air. Armés d’un lance-pierres, nous allions à la chasse des passereaux qui pullulent dans cette contrée. Le tireur qui réussissait à atteindre le plus grand nombre d’oiseaux était déclaré victorieux et, selon la règle du jeu, les autres devaient lui remettre leur gibier. Par les soirs de clair de lune, derrière une concession, nous nous installions en rond. Au milieu se tenait un joueur qui s’efforçait de se délivrer par tous les moyens. L’enfant se débattait de toutes ses forces pour rompre son encerclement. Repoussé, il remontait à l’assaut. S’il arrivait à passer entre deux camarades, ceux-ci étaient éliminés et le jeu reprenait sans eux. Nous organisions également des séances de cinéma. Entre les branches d’un arbre, l’opérateur suspendait un morceau d’étoffe transparente. Derrière cet écran et à la lueur de quelques bougies, il manipulait des pantins confectionnés à l’aide de bûchettes…
NON, UN SUPPORTER MARSEILLAIS N'A PAS ÉTÉ TUÉ LORS DES AFFRONTEMENTS APRÈS PSG-OM
Des publications partagées sur des sites d'actualité sénégalais affirment qu'un homme a été tué par balles par des supporters parisiens dans la capitale, suite au match entre l'OM et le PSG. C'est faux
AFP |
Sami Acef, Christian Gauvry |
Publication 16/09/2020
Des publications partagées plus d'un milllier de fois sur les réseaux sociaux en France et sur des sites d'actualité sénégalais affirment qu'un homme a été tué par balles par des supporters parisiens dans la capitale, suite au match entre l'Olympique de Marseille et le Paris Saint-Germain. C'est faux. Cet homme était un éducateur dans un club normand, et a été tué à Elbeuf (Seine-Maritime). Une mineure a été mise en examen pour homicide et écrouée.
"Le supporter marseillais Ndiaga Samb a été tué par balles à Paris par des supporters parisiens alors qu'il fêtait la victoire de l'OM face au PSG", affirment tour à tour des posts sur Twitter, Facebook, ou encore des articles sur des sites sénégalais comme Dakaractu.com ou Senenews.com. Ces sites avancent que l'homme était un "éducateur et coach adjoint U12 d’un club Français (CSP Foot)".
Ce club de Caudebec-les-Elbeuf, près de Rouen, a effectivement rendu hommage lundi à cet éducateur décédé dans la nuit de dimanche à lundi, via un message sur sa page Facebook.
"C'est avec une grande tristesse que nous avons appris la disparition de l'un de nos éducateurs. Ndiaga Samb "Diackss" nous quitte en laissant une trace indélébile", écrit le club.
Mais "il n'est pas du tout décédé à Paris", a déclaré à l'AFP le 15 septembre Frédéric Crébiller, responsable sportif du CSP foot.
Un mec "passionné" et "dévoué au foot"
"Mon secrétaire du club m'a appelé lundi matin. Il me dit que Djaxx (M. Samb, NDLR) a été poignardé dans un appartement, à Elbeuf", a précisé M. Crébiller, également contacté par nos confrères de Libération.
L'ECO AUTHENTIQUE NE VERRA PROBABLEMENT JAMAIS LE JOUR
L'économiste sénégalais, Ndongo Samba Sylla, démystifie la monnaie et démolit ce qu’il nomme : ‘’le schéma de l’économie coloniale.’’ Une économie extravertie, bâtie sur des concepts erronés et qui appauvrit plus qu’elle ne développe l'Afrique
Membre du Groupe sur la souveraineté économique et monétaire de l’Afrique (auteur d’une lettre ouverte signée par plus de 600 économistes à travers le monde dont de prestigieux économistes comme Mme Stéphanie Kelton, ex-Conseillère économique de Bernie Sanders), l’économiste sénégalais, Ndongo Samba Sylla, revient, dans cet entretien, sur cette initiative internationale, démystifie la monnaie et démolit ce qu’il nomme : ‘’Le schéma de l’économie coloniale.’’ Une économie extravertie, bâtie sur des concepts erronés et qui appauvrit plus qu’elle ne développe le continent !
Comment est né votre Groupe sur la souveraineté économique et monétaire de l’Afrique et qu’est-ce qui fait sa particularité par rapport aux initiatives précédentes ?
Notre Groupe sur la souveraineté économique et monétaire de l’Afrique est né, il y a deux ans, dans le cadre de la préparation de la Conférence internationale sur le même sujet, qui s’est tenue en novembre 2019 à Tunis, avec la participation d’un aréopage d’économistes de renommée mondiale. Nous pensons que la souveraineté monétaire est cardinale et qu’une bonne compréhension de ses enjeux permettrait aux pays africains de mettre en place des politiques économiques bénéfiques à la grande majorité et d’être plus indépendants vis-à-vis de la finance internationale. Notre mission, en tant qu’intellectuels, est aussi de participer à l’éducation monétaire de nos compatriotes, en dissipant les nombreux mythes et incompréhensions sur le sujet.
C’est quoi la monnaie et pourquoi est-ce un attribut de souveraineté important ?
Dans la période moderne, la monnaie a été une créature de l’Etat : c’est un titre de dette émis par l’Etat qui peut prendre de nombreuses formes (pièces, billets, obligations, bons, réserves). Comme l’Etat a le monopole de l’émission de sa monnaie, il ne peut jamais en manquer. Il peut toujours créer des titres de dette. Mais il n’est pas garanti que les populations vont les accepter. Pour faire accepter sa monnaie, l’Etat impose aux populations le paiement des taxes et impôts dans sa propre devise/unité de compte. L’Etat n’a pas besoin des taxes et impôts pour se ‘’financer’’, puisqu’il a le monopole de la création monétaire. Mais il a besoin des taxes et des impôts pour obliger les populations à accepter sa devise et pour d’autres objectifs importants.
Ainsi, quand l’Etat fait des dépenses, il crée de l’argent frais. Quand il reçoit des impôts et des taxes, ces ‘’revenus’’ fiscaux réduisent la quantité de monnaie en circulation.
‘’Les impôts et taxes ne financent pas les dépenses d’un Etat émetteur souverain de monnaie’’. Pourriez-vous être plus clair ?
Pour le comprendre, il peut être utile de revenir à l’étymologie du mot ‘’revenu’’ - quelque chose qui ‘’revient’’ : l’Etat dépense d’abord sa devise, puis une partie de celle-ci ‘’revient’’ sous forme d’impôts et de taxes. Un bon exemple est fourni par les colonies qui sont par la suite devenues les Etats-Unis d’Amérique. Face à l’austérité monétaire que leur imposait l’Angleterre, celles-ci se sont rebellées pour exiger leur indépendance monétaire et politique. Quand les gouvernements de ces colonies ont voulu avoir plus de marge de manœuvre et augmenter leurs dépenses publiques, ils ont commencé à émettre du papier-monnaie (billets du Trésor) et, simultanément, à imposer des taxes dans leur unité de compte. Quand une partie des billets ‘’revenaient’’ vers eux à la suite du paiement des taxes par les populations, ils les brûlaient tout simplement ! Parce qu’ils savaient que les taxes et impôts ne sont pas une source de financement, mais une manière de créer une demande pour la devise qu’ils émettaient. Pour pouvoir payer des impôts et des taxes dans la monnaie de l’Etat, il faut d’abord que l’Etat dépense sa propre devise !
Les colonisateurs européens ont fait la même chose en Afrique : prohibition des devises indigènes et obligation, pour les populations, de payer leurs taxes dans l’unité de compte choisie par le colonisateur ! En Afrique centrale, au début de la colonisation, les administrateurs français envoyaient des militaires dans les marchés pour exiger l’usage de la devise coloniale. Le refus de payer les taxes dans la monnaie coloniale était passible de sanctions !
Ces différents exemples montrent pourquoi la monnaie est un attribut important de souveraineté, pourquoi on ne peut pas séparer un Etat de sa devise sans attenter à sa souveraineté politique (comme dans le cas des pays qui sont en union monétaire) et pourquoi les taxes et impôts ne financent pas la dépense d’un souverain monétaire.
En sus de ces explications, pouvez-vous donner quelques bonnes raisons, pour un pays, de battre sa propre monnaie ?
Un Etat qui émet sa monnaie n’a aucune contrainte financière intrinsèque sur son propre territoire : il peut acheter tout ce qui se vend dans sa propre devise sans être contraint par le montant des revenus fiscaux. Sa capacité à créer de la monnaie est limitée seulement par les ressources réelles à sa disposition (terres, main-d’œuvre, matières premières, équipements, etc.). Si l’Etat crée de la monnaie, c’est-à-dire des droits sur la production en cours et future, alors que la production ne croît pas, le niveau des prix va augmenter. Tant que l’Etat peut mobiliser des ressources locales afin d’augmenter les capacités productives locales, il peut créer de la monnaie sans craindre le risque d’une envolée du niveau des prix.
Par contre, les pays qui n’ont pas leur propre devise, comme le Sénégal, ont une contrainte financière. Ils sont dépendants des impôts et des taxes pour leurs dépenses publiques. Sur le plan financier, ils fonctionnent comme des colonies ou des collectivités locales. Je ne dis pas cela pour faire de la provocation, mais pour faire comprendre les différences fondamentales entre un Etat qui a sa monnaie et un Etat qui n’en a pas.
Mais on peut vous rétorquer qu’il y a en Afrique des pays qui battent leur propre monnaie, mais qui ne sont guère mieux lotis. Est-ce donc une condition suffisante ?
En fait, avoir sa propre devise ne confère qu’une souveraineté monétaire nominale. Une souveraineté monétaire réelle suppose un contrôle sur les ressources locales et sur le système financier. Elle suppose aussi l’absence d’endettement souverain en monnaie étrangère. Les pays qui utilisent le franc CFA n’ont aucune souveraineté monétaire, tandis que les autres pays africains - qui disposent de leur propre devise - ont une souveraine monétaire limitée.
Sachant que la plupart des Etats africains sont dépendants des échanges avec l’extérieur, n’est-ce pas un obstacle à leur souveraineté économique et monétaire ?
A l’instar de la liberté individuelle, la souveraineté économique et monétaire n’est pas un absolu. Il est plus utile de la concevoir comme un continuum. Pour gagner en souveraineté, nos gouvernements doivent faire un effort maximal pour mobiliser leurs ressources locales, en privilégiant la finance locale. Ils doivent comprendre cette chose très simple : ‘’Ils peuvent financer en monnaie nationale tous les projets matériellement et techniquement faisables à partir des ressources nationales, sans qu’ils ne soient trop contraints par le montant de leurs recettes fiscales.’’ A partir d’un tel constat, la stratégie devrait consister à identifier les différentes ressources disponibles et celles à acquérir. Si les pays africains, tous sans exception, ont une souveraineté monétaire limitée, cela résulte certes du caractère répressif du système économique mondial, mais aussi de leur faible contrôle sur leurs propres ressources et de ce que leurs systèmes financiers n’ont pas été conçus pour répondre à leurs besoins nationaux. Souveraineté économique et souveraineté monétaire vont de pair.
Pourquoi, selon vous, les Etats ne travaillent pas dans ce sens ?
L’ignorance, l’entêtement et le manque de volonté. Ignorance, car les dirigeants politiques et leurs conseillers économiques ont souscrit jusque-là à des visions erronées largement discréditées – comme l’obsession pour les déficits publics faibles, la prétendue indépendance des banques centrales, le choix de celles-ci de privilégier la lutte contre l’inflation au détriment de l’emploi et de la transformation structurelle et socio-écologique, tous les discours obscurantistes sur les dangers de la ‘’planche à billets’’, etc. L’entêtement à poursuivre les politiques d’avant la pandémie ne sera pas une bonne nouvelle pour les économies africaines. Enfin, le ‘’manque de volonté’’ a jusque-là signifié l’adoption de politiques qui satisfont les préférences à court terme des dirigeants politiques et de leurs partenaires au développement au détriment d’un véritable agenda de transformation.
Qui est habilité à créer et à gérer la monnaie ?
La monnaie est un bien public. Mais, dans le système capitaliste, elle est gérée par le secteur privé, sous la supervision à géométrie variable des autorités publiques. Partout, la monnaie en circulation est créée essentiellement (à plus de 95 %) par les banques commerciales. Ce sont elles qui disposent de la ‘’planche à billets’’. Quand une banque accorde un prêt à un client, elle crée de l’argent frais (des inscriptions électroniques sur un compte bancaire). Quand ce prêt est remboursé, cet argent est détruit (ces inscriptions électroniques sont effacées). Donc, il y a deux sources de création monétaire : l’Etat et les banques.
L’un des objectifs de la mondialisation financière est de corseter les pouvoirs de création monétaire des gouvernements des pays périphériques (on leur interdit de faire du déficit – la seule manière pour eux de créer de la monnaie) au profit des grandes banques qui financent la spéculation financière et immobilière plutôt que l’économie réelle. Un des enjeux autour de la souveraineté monétaire est la réappropriation de la monnaie comme bien public au service de la grande majorité plutôt qu’un bien privatisé servant les besoins d’une minorité globale.
Depuis des années, des intellectuels mènent ce combat. Mais on a l’impression que rien ne bouge, dans certains pays. Qu’est-ce qui bloque, à votre avis ?
Je pense que le combat a énormément avancé grâce à la mobilisation des mouvements panafricanistes et de certains intellectuels. Les populations africaines se rendent compte, de plus en plus, de l’importance de la souveraineté économique et monétaire. Mais les dirigeants politiques, comme sur beaucoup de sujets, sont en retard sur les évolutions souhaitées par leurs peuples.
Actuellement, les populations africaines luttent contre les ‘’troisièmes mandats’’. Sur les questions économiques et monétaires, nous autres économistes hétérodoxes continuons de nous battre contre la possibilité d’un ‘’40e mandat’’ : il est temps de se défaire du cocktail économique désastreux qui prévaut depuis les années 1980 ! Dans le cas du franc CFA, né en 1945, nous continuons de lutter contre un ‘’76e mandat’’ !
Sur cette dernière question, Paris a annoncé son retrait des instances de décision de la BCEAO, le changement du nom CFA en Eco, ainsi que la fin de l’obligation de dépôt de ses réserves au Trésor français. Qu’en pensez-vous ?
La réforme annoncée par le duo Macron-Ouattara, en décembre 2019, est une réforme administrative, principalement symbolique. Elle n’apporte aucun changement substantiel au cadre existant. L’annonce récente de Ouattara selon laquelle l’Eco, censé se substituer au franc CFA, ne verra pas le jour avant 3 voire, 5 ans, n’est pas une surprise. J’avais soutenu que la rhétorique de la fin du franc CFA et de son changement en Eco n’a aucune portée opérationnelle et que c’est de la poudre aux yeux.
L’Eco CEDEAO a enthousiasmé beaucoup de panafricanistes, mais vous avez toujours semblé moins euphorique pour les monnaies uniques. Pensez-vous que l’Eco pourrait réussir là où le CFA a échoué ?
Les panafricanistes se font beaucoup d’illusions sur l’Eco ‘’authentique’’, le projet de monnaie unique pour les quinze pays de la CEDEAO. Premièrement, cette monnaie ne verra probablement jamais le jour. Tant que l’approche par les ‘’critères de convergence’’ et l’approche ‘’gradualiste’’ (les pays prêts lancent l’Eco) sont maintenues, il faudra s’attendre à des reports réguliers de son lancement. Il faut aussi analyser l’Eco comme une question politique pouvant être résumée ainsi : les pays de la CEDEAO, les pays francophones en particulier, sont-ils prêts à utiliser une monnaie pilotée par le Nigeria ? Le Nigeria n’abandonnera jamais sa monnaie nationale, s’il n’est pas le patron de l’Eco, tandis que les pays francophones, jusque-là, ont préféré s’intégrer avec la France et l’Europe plutôt qu’avec leurs voisins.
Deuxièmement, à supposer que cette monnaie voie le jour, elle créerait des problèmes similaires au franc CFA en tant que monnaie unique. Aux Etats-Unis, si une grande banque fait faillite dans un Etat donné ou si un Etat donné fait face à des difficultés budgétaires importantes, c’est le Trésor fédéral qui nettoie l’ardoise. C’est ce qu’on appelle le fédéralisme budgétaire. Avec une monnaie unique CEDEAO, nous aurions des Etats unis sur le plan monétaire, mais chaque pays aurait ses propres lois, son propre budget, etc., sans le bénéfice d’un Trésor fédéral. Si une grande banque nigériane fait faillite au Cap-Vert, c’est le gouvernement capverdien qui devra nettoyer l’ardoise et se condamner à vivre dans l’austérité pendant des décennies.
C’est cela le projet de monnaie unique CEDEAO : un copier-coller de l’euro, une monnaie sans souverain qui soumet les pays en crise à une austérité permanente. Nous devons toujours nous rappeler que la monnaie est la créature et l’instrument d’un Etat. Ce qui signifie que seules deux formules peuvent logiquement être acceptées : une monnaie nationale ou une monnaie fédérale. Les formes d’intégration intermédiaires sont vouées à l’échec. Soulignons également que la Zone euro est la seule zone monétaire entre pays souverains en vigueur à avoir été créée dans la période postcoloniale. Les autres zones monétaires existantes sont des créations d’origine coloniale. La Zone euro est une anomalie historique qui viole le principe ‘’un Etat/Fédération, une monnaie’’. Les Européens sont en train de chercher à rectifier les failles originelles dans la conception de l’euro.
Pour le Groupe sur la souveraineté économique et monétaire, il faut des ruptures fortes dans les stratégies de développement en Afrique. Quels doivent être les principaux axes de ce vaste chantier ?
Le chantier le plus important est d’ordre intellectuel. Il y a des idées simples, quoique contre-intuitives, que les dirigeants politiques et leurs conseillers économiques ignorent ou ne comprennent pas. Ceci les conduit à adopter des politiques économiques infructueuses. Une idée répandue est que les pays africains doivent être dépendants de la finance internationale pour leurs investissements, car ils manqueraient d’épargne. Pareil raisonnement justifie l’endettement en monnaie étrangère et les efforts incroyables pour attirer les investissements étrangers. Il est pourtant erroné sous deux aspects.
Premièrement, ce n’est pas l’épargne qui finance l’investissement. C’est plutôt l’investissement qui crée l’épargne. Et quand les banques commerciales accordent des prêts, elles ne s’appuient pas sur une épargne préalable à leur disposition : elles créent de l’argent ex-nihilo. Elles utilisent ‘’leur’’ propre ‘’planche à billets’’.
Deuxièmement, les investissements étrangers, en raison des facilités qui leur sont offertes, n’augmentent pas toujours l’épargne des pays africains. Souvent, ils tendent à l’exporter sous différentes formes. Pensons juste aux flux financiers illicites. Dans notre lettre ouverte, nous remettons en question les stratégies économiques basées sur le mythe d’une Afrique incapable de contribuer significativement au financement de son développement, en raison d’une faible épargne.
Dès que les gouvernements africains auront une idée plus claire des possibilités internes importantes qu’ils ont de la relation entre épargne et investissement, du fonctionnement du système monétaire, etc., alors ils pourront, espérons-le, se détourner des stratégies économiques que leur recommandent la Banque mondiale et le Fonds monétaire international (FMI) au profit de politiques de mobilisation des ressources locales et de schémas alternatifs de coopération régionale permettant l’atteinte de la souveraineté alimentaire et énergétique ainsi qu’une réelle intégration dans le domaine des infrastructures.
Justement, le groupe a cité, parmi les problèmes structurels, l’absence de souveraineté alimentaire, l’absence de souveraineté énergétique et une industrie à faible valeur ajoutée. Comment y remédier ?
Prenons le cas du Sénégal. Nous avons des terres. Nous avons des paysans qui ont du savoir-faire, mais qui, malheureusement, ne bénéficient pas d’un soutien important et cohérent de la part de l’Etat. Alors que le secteur agricole emploie la majeure partie de la force de travail, il n’a reçu que 2 % du total des crédits bancaires en 2019. Mieux, nous signons des accords de libre-échange qui font que nos produits agricoles sont en concurrence avec des produits étrangers souvent fortement subventionnés. Pire, le franc CFA que nous utilisons handicape la production domestique et les exportations. Son arrimage à l’euro en fait une monnaie forte. En outre, nous n’investissons pas assez dans les infrastructures rurales. Enfin, nous avons été programmés culturellement pour préférer les produits venant de l’étranger aux nôtres. Comment pouvons-nous développer l’agriculture dans de telles conditions ?
Nous n’avons pas le cadre : le fonctionnement du système bancaire, notre politique commerciale, la politique de change, la politique en matière d’infrastructures et la politique culturelle concourent toutes à ralentir le développement du secteur agricole. Résultat : malgré tout le potentiel que nous avons, nous sommes déficitaires vis-à-vis de l’extérieur, sur le plan alimentaire. Bien souvent, nous devons donc nous endetter en monnaie étrangère pour boucher ce déficit. C’est le schéma de l’économie coloniale.
L’Afrique peut-elle se passer des investissements directs étrangers (IDE) que vous listez parmi les stratégies problématiques dont la promotion est assurée par le FMI et les créanciers internationaux ?
La question, selon nous, est plutôt de savoir de quels genres d’IDE le continent a besoin. Les gouvernements africains et leurs agences de promotion des investissements extérieurs se font énormément d’illusions sur les IDE. Ils croient, à tort, que ces derniers vont créer des emplois. Chaque année, alors que 17-18 millions de personnes entrent sur les marchés du travail en Afrique subsaharienne, les IDE créent entre 100 mille et 150 mille emplois. Une goutte d’eau. Est-ce que les IDE se traduisent par des transferts de technologies ? C’est rarement le cas. Or, c’est sans doute l’aspect qui pourrait les rendre désirables et bénéfiques.
Pourriez-vous revenir sur les impacts pervers de ces IDE sur les économies des pays africains ?
Les IDE à destination du continent ont souvent concerné les secteurs des hydrocarbures et des mines. D’où leur caractère extractif : peu d’impôts payés, peu de salaires distribués, des flux financiers illicites, des rapatriements importants de profits, accaparement des terres, pollution, etc. La concurrence que se livrent les pays pour attirer les ‘’investisseurs étrangers’’ exacerbe cette orientation extractive.
Par ailleurs, les conventions bilatérales d’investissement que nos pays signent avec les pays en dehors du continent, reviennent bien souvent à instaurer une discrimination de fait en faveur des ‘’investisseurs étrangers’’ et au détriment de leur propre secteur privé. Comme nous le disons dans notre lettre ouverte, les pays africains doivent privilégier une approche panafricaine régionale/continentale à ce sujet, au lieu de la concurrence destructrice.
A cause de la pandémie de Covid-19, beaucoup de pays vont connaître des chutes vertigineuses de leur croissance. Le gouvernement sénégalais parle de -1 % contre les 6 % initialement prévus. Qu’est-ce qui explique une telle vulnérabilité face aux chocs exogènes ?
La grande extraversion économique des pays africains est un legs colonial qui a été renforcé par les politiques néolibérales qu’ils mènent sous la dictée des institutions de Bretton Woods. Ceci dit, la pandémie a eu des conséquences moindres en Afrique, comparativement aux pays du Nord. Nos pays ont particulièrement souffert de la baisse des prix des produits primaires et de la réduction des transferts des migrants internationaux. A la différence des pays du Nord, les gouvernements africains ont, pour la plupart, évité les confinements généralisés. Ce qui a atténué l’effet récessif de la pandémie dans leur cas. La relative résilience montrée par beaucoup de pays africains devrait nous encourager à mobiliser davantage nos ressources locales, à stimuler des formes de coopération régionale basées sur l’émulation plutôt que la compétition et à négocier avec les pays du Nord les termes d’une ouverture plus équilibrée et bénéfique à tous.
Que pensez-vous du rapport Doing Business qui fait courir beaucoup d’Etats africains ?
J’avais écrit, en 2013, dans les colonnes de votre journal, que ‘’quiconque vainc par Doing Business périra par Doing Business’’. Depuis lors, je ne me suis plus intéressé à cet indicateur controversé, puisqu’il n’a aucune validité théorique, n’explique rien, ne prédit rien. C’est un outil majeur de l’agenda néolibéral promu par la Banque mondiale.
Pensez-vous que les 1 000 milliards de francs CFA mobilisés par le gouvernement sénégalais, dans le cadre du Plan de résilience économique et social contre la Covid-19, ont été bien dépensés ? (La répartition initiale faisait état de 64 milliards pour la santé, 100 milliards pour la résilience et cohésion sociale, 802 milliards pour le secteur privé et 33,6 milliards pour la sécurisation des circuits d’approvisionnement).
Avec un budget contraint, les arbitrages sont difficiles à réaliser dans cette période particulière. Ce sera au Parlement sénégalais de nous fournir une évaluation du plan de riposte. Avec la pandémie, la consommation des ménages a baissé tout comme l’investissement des entreprises, les recettes d’exportation et les transferts des migrants internationaux.
Pour compenser cette chute de la demande globale, le gouvernement doit réaliser un déficit plus important que la norme. N’ayant pas de souveraineté monétaire (financer gratuitement par la création monétaire une partie de ses dépenses en monnaie locale, sans hausse de la dette) et ne pouvant pas compter sur une hausse de la pression fiscale (une mesure contreproductive en la circonstance), le Sénégal est dépendant de l’extérieur pour le financement de sa riposte : les dons et la dette. Selon les estimations publiées en juin par le FMI, le gouvernement sénégalais était censé enregistrer cette année un déficit de 1 373 milliards de F CFA (9,6 % du PIB) financé grâce à des dons de 500 milliards F CFA (3,5 % du PIB) et par la dette. A titre de comparaison, le déficit public était de 759,8 milliards (5,5 %) du PIB en 2019, financé à hauteur de 221 milliards par des dons (1,6 % du PIB). Mais ces estimations basées sur un taux de croissance de 1,1 % en 2020, ne sont sans doute plus d’actualité.
Quelles conséquences pour les populations ?
Avec des taux de croissance économique de 6 %, les Sénégalais étaient majoritairement dans une situation difficile. Un ralentissement ou une contraction de l’économie ne pourra que compliquer les choses. Pour une sortie par le haut de cette situation qui n’est pas spécifique au Sénégal, il faudra des mesures hardies au niveau mondial.
Outre la nécessité d’une annulation des dettes souveraines extérieures, les banques centrales des pays riches devraient étendre aux pays africains les facilités qu’elles ont octroyées aux banques centrales de certains pays émergents (ou une formule équivalente via le FMI). Cela permettrait aux pays africains d’assurer leurs importations essentielles, de stabiliser la valeur externe de leurs monnaies et d’avoir plus de marge de manœuvre sur les plans monétaire et fiscal.
En contrepartie, les pays africains devraient fournir des garanties de transparence et de bonne gestion et se résoudre à faire ce qu’ils auraient toujours dû faire : mobiliser leurs ressources locales.
Pouvez-vous revenir sur les défis de l’après-Covid ?
La pandémie confirme avec force les diagnostics qui ont été faits depuis plusieurs décennies, au sujet de l’évolution du continent africain qui doit reconquérir sa souveraineté économique et monétaire. A court et moyen termes, l’endettement extérieur des pays africains pèsera comme une épée de Damoclès. L’endettement des ménages et des entreprises, quoiqu’on en parle très peu, sera aussi un défi majeur. Pour le réduire, les Etats devront faire plus de déficit, ce qui va accroître les niveaux d’endettement public. Si les Etats ne font rien, et que le secteur privé se désendette tout seul, les économies vont peiner à se relever. Des politiques monétaires et budgétaires vigoureuses orientées vers la mobilisation des ressources locales seraient appropriées. Mais les pays africains qui ont contracté des prêts d’urgence auprès du FMI pour faire face à la pandémie, lui ont promis de revenir à ‘’ l’orthodoxie’’ en 2022.
Les temps à venir s’annoncent difficiles pour le continent. Les pays qui souhaitent tirer leur épingle du jeu devront faire preuve d’audace et d’imagination. La solidarité panafricaine, bien souvent introuvable, pourrait faciliter une sortie de crise plus ambitieuse.
Dans le cas du Sénégal, l’exploitation prochaine du pétrole et du gaz comporte des défis et des opportunités. Le trio hydrocarbures-franc CFA-libéralisation commerciale risque de désarticuler l’économie sénégalaise, de la désindustrialiser davantage et de la rendre plus instable. Pour que les hydrocarbures aient un rôle bénéfique, le Sénégal doit avoir une autonomie sur la gestion de la valeur externe de sa monnaie. Ce qui n’est possible que s’il se dote d’une monnaie nationale. Autrement, il faut craindre que son économie ne se transforme en une sorte de République du Congo.
DANIEL SORANO, UN ARTISTE COMÉDIEN ACCOMPLI
Son nom est bien plus célèbre que son œuvre, au Sénégal. Pourtant, c’est un personnage réputé dans le monde du théâtre qu’il a marqué par sa transversalité, sa prolificité et son panache en 15 ans de carrière et 41 ans de vie
Il ne fait aucun doute que son nom a fini par se confondre au théâtre sénégalais et autres évènements culturels de grande envergure. Le Théâtre qui le porte est aujourd’hui un symbole architectural tout autant qu’il est un haut-lieu de convergence d’intelligences et de spécificités culturelles. Un peu comme lui, Daniel Sorano. L’homme, Daniel Édouard Marie Sorano de son vrai nom, est un Français né à Toulouse en décembre 1920. Sa mère est une signare nommée Marianne Blanchot, fille de l’ancien Gouverneur du Sénégal François Blanchot.
Il a convaincu son monde pour sa belle tenue sur les planches et sa charmante immersion dans ses rôles de comédien. Ses percepteurs au Conservatoire de Toulouse avaient d’ailleurs très tôt détecté ces qualités. Ainsi, ils le débouteront de la section chant pour l’amener à se concentrer et à briller dans le théâtre. Il intègre plus tard la troupe du Grenier de Toulouse en 1945 et y affute ses premières humanités pratiques. À l’époque, il était déjà distingué dans un rôle de muet, celui de Biondello de La Mégère apprivoisée de Shakespeare. Il s’attachait chaque soir les oreilles avec du fil de pêche et mangeait trois pommes sur scène en roulant des yeux. La performance était beaucoup et agréablement commentée à l’époque par les critiques. En 1952, Jean Vilar lui souffle à l’oreille, après une interprétation : «Ce soir, j’ai appris comment on jouait Molière». C’était à la fin de sa prestation dans le rôle de la Flèche dans l’Avare. Mais le rôle qui construit résolument sa renommée d’artiste est son rôle Cyrano de Bergerac en 1960. C’est à cette époque qu’il faisait les beaux jours du Théâtre national populaire de France (Tnp) aux côtés d’autres grands noms du quatrième art.
Daniel Sorano a à, son actif d’interprète, 8 téléfilms, 4 théâtres télévisés, 18 films au cinéma et 23 théâtres. Il avait un don particulier pour la farce et les tonnerres ridicules, tout en inspirant par sa bouille de tendresse qui charmait ses spectateurs. Il est crédité pour avoir bien nourri l’art de suggérer la nuance à travers le trait le plus épais, le plus grossi, le plus théâtral.
Le comédien Daniel Sorano est mort en mai 1962, d’une crise cardiaque, dans sa chambre d’hôtel à Amsterdam. L’acteur, qui était âgé de quarante et un ans, était venu aux Pays-Bas avec un plateau de tournage français pour tourner le film «Le Scorpion». Durant le tournage d’une scène à Amsterdam, Daniel Sorano s’était déjà trouvé mal. Pendant toute la journée, il avait gardé le lit, et en fin de soirée, des employés de l’hôtel ont ouvert sa porte avec un passe-partout et l’ont trouvé mort, étendu à côté de son lit.
Aujourd’hui, le prix Daniel-Sorano qui était remis par l’Académie des Arts et des Sciences de Toulouse a disparu mais de nombreux théâtres et salles portent le nom de l’acteur. Le Sénégal a, aujourd’hui, immortalisé son nom à travers le Théâtre national pour ses origines et ses prouesses de renommée mondiale.
TRUMP SE VEUT LE CHANTRE D'UN NOUVEAU MOYEN-ORIENT
L'analyste politique, René Lake, décrypte les enjeux de l'accord d’entente historique signé entre Israël, les Emirats arabes unis et Bahreïn, mardi à la Maison Blanche, au grand dam de la Palestine et de l'Iran
Le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou a signé mardi 15 septembre des accords historiques avec les Emirats arabes unis et Bahreïn, qui reconnaissent désormais l'Etat hébreu, sous l'égide du président américain Donald Trump.
Ce la peut-il redéfinir les forces au Moyen-Orien ? Quid de la Palestine qui crie à la trahison ? Quelle retombée pour Donald Trump à quelques mois de la présidentielle américaine ? L'analyste politique, René Lake, répond au micro de VOA (à partir de 4 mn 50).
LA PRISON POUR LAMINE DIACK
Les juges ont reconnu l'ancien patron de l'IAAF coupable de corruption passive pour le versement de pots-de-vin par des athlètes russes et pour le financement des campagnes sénégalaises par la Russie. Il écope de 4 ans d'emprisonnement dont 2 ferme
L'ancien président de la fédération internationale d'athlétisme (IAAF, 1999-2015) Lamine Diack a été condamné mercredi à Paris à quatre ans de prison, dont deux avec sursis, pour son implication dans un réseau de corruption voué à cacher des cas de dopage en Russie.
Ressorti libre à l'issue de la lecture du jugement, le Sénégalais de 87 ans a annoncé par la voix de son avocat qu'il ferait appel. Il été reconnu coupable de corruption active et passive et d'abus de confiance et a été condamné à une amende maximale de 500.000 euros. Lamine Diack a la possibilité de faire appel.
Parmi les six prévenus, tous reconnus coupables, la peine la plus lourde a été prononcée contre son fils, Papa Massata Diack, qui est resté à Dakar et avait refusé de comparaître au procès en juin: il a été condamné à cinq ans de prison ferme et un million d'euros d'amende et le tribunal a maintenu le mandat d'arrêt à son encontre.
Des peines de prison ont été prononcées à l'encontre des autres protagonistes: 2 ans avec sursis et 140.000 euros d'amende pour l'ancien chef de l'antidopage à l'IAAF, Gabriel Dollé, et trois ans de prison dont deux avec sursis et 100.000 euros d'amende pour l'avocat Habib Cissé, qui conseillait Lamine Diack; deux responsables russes jugés en leur absence, l'ancien président de la fédération nationale d'athlétisme Valentin Balakhnitchev et l'ancien entraîneur Alexeï Melnikov ont été condamnés respectivement à trois et deux ans de prison ferme, avec maintien du mandat d'arrêt à leur encontre.
Par Kossoro CISSOKHO
A PROPOS DU «CONFLIT» AU NIVEAU DE LA CHAMBRE DE COMMERCE DE DAKAR
C’est le Secrétaire général qui assure l’administration de la chambre (budget, objectifs moyens, délais, évaluation du personnel, etc.)
Au regard des faits recueillis de part et d’autre, on se rend compte que la situation contentieuse qui oppose la chambre de commerce et l’Union nationale des chambres de commerce a pour origine une multitude de facteurs dont certains sur lesquels nous mettrons l’accent.
D’abord, il y a lieu de retenir que la chambre de commerce de Dakar comme d’ailleurs toutes les chambres de commerce a, entre autres, une fonction de conseil, d’assistance d’encadrement et de formation à l’endroit des opérateurs économiques.
A cet effet, elle bénéficie d’une autonomie de gestion tant au plan administratif qu’au niveau financier. Cependant, malgré cette autonomie, la chambre de commerce est soumise à une double tutelle à savoir : la tutelle technique assurée par le ministère du Commerce, et la tutelle financière assurée par le ministère des Finances.
A ce niveau, toutes les chambres de commerce bénéficient annuellement des contributions financières disproportionnées de la part de l’Etat, ce pour combler l’insuffisance de leurs ressources propres. Le président de la chambre de commerce étant élu par ses pairs membres titulaires, engage l’institution au plan juridique tant au niveau interne qu’externe. Il est assisté d’un bureau qui exécute la politique consulaire et rend compte aux membres de l’Assemblée générale considérée comme organe délibérant.
En réalité, le président de la chambre de commerce a un rôle plus honorifique dans la gestion de la chambre de commerce. La clé de voute de cette institution est le Secrétaire général, nommé par le président, qui doit informer le ministère du Commerce et le ministère des Finances. C’est le Secrétaire général qui assure l’administration de la chambre (budget, objectifs moyens, délais, évaluation du personnel, etc.) Quant à l’Union nationale de la chambre de commerce, elle a été créée sous la présidence de feu Issa Diop.
L’Union des chambres de commerce n’est pas en réalité un organe au même titre que la chambre de commerce. En effet, l’objectif assigné a L’union est d’être un instrument de coordination des politiques des chambres de commerce et d’identification des goulots d’étranglement qui handicapent leur fonctionnement, en vue de trouver des solutions communes. Ainsi, l’Union des chambres, sous la présidence d’un membre désigné à cet effet, se réunit par rotation dans chacune des chambres de commerce du Sénégal.
En outre, il n’existe pas un lien hiérarchique entre la chambre de commerce et l’union des chambres de commerce, qui est une émanation de toutes les chambres de commerce du Sénégal. En théorie, toutes les chambres de commerce du Sénégal sont membres de l’union. Mais dans les faits, plusieurs chambres restaient des mois sans verser leurs contributions à l’union, a fortiori, assister aux réunions. Cela peut s’expliquer par le fait que les chambres de commerce n’ont pas les mêmes capacités financières.
A ce niveau, la chambre de commerce de Dakar est première, la deuxième celle de Kaolack, et la troisième, Saint-Louis. S’agis - sant du manque de dynamisme des chambres de commerce au niveau du développement économique et social du pays, plusieurs explications sont plausibles.
D’abord il faut avoir à l’esprit que les pouvoirs publics n’ont jamais eu la volonté politique d’impliquer réellement les chambres consulaires tant dans la conception qu’au niveau de l’exécution des politiques publiques. Le constat qui découle de ce fait est que les pouvoirs publics se bornent souvent à recevoir des observations pertinentes formulées dans divers domaines (industriel, économique, commercial, agricole, etc.) qu’ils ne prennent pas souvent en considération.
Par ailleurs, les chambres de commerce ont initié de nombreux projets tels que la gestion des gares routières, du port autonome de Dakar, du parking automobile qui n’ont jamais eu d’approbation de la part des pouvoirs publics. Il faut aussi retenir que, lors des nombreux bechmarking effectués par la chambre de commerce dans la sous-région, il a été constaté que les chambres de cette zone ont un dynamisme très frappant dans le développement économique et social de ces pays. Ensuite, les contributions financières allouées à ces chambres par ces Etat sont plus substantielles que celles allouées aux chambres de commerce du Sénégal.
Exemple : là où le budget de la chambre de commerce du Burkina Faso s’élevait à 1 milliard 200 millions F Cfa, celui de la chambre de commerce du Sénégal s’élevait à 400 millions F Cfa. Par ailleurs, chaque fois que la chambre de commerce de Dakar initie des projets de grande portée économique, le pouvoir public s’en approprie.
Exemple : c’est le cas du guichet unique. Enfin la loi 2017-15 du 06 février qui remplace la loi n° 89-08 du 17 janvier 1989 (chambre de commerce) porte la création de la chambre nationale du commerce d’industrie et des services et les chambres régionales de commerce d’industrie et de services, cela en attendant la création d’une chambre nationale d’agriculture.
A notre avis, ce n’est pas l’avènement d’entités nouvelles à la place des chambres de commerce qui va apporter une innovation majeure. Comme nous l’avons souligné précédemment, tant que toute structure créée n’est pas impliquée, concernée, intéressée dans la conception et l’exécution des politiques publiques, le même constat va se reproduire. Si les chambres de commerce n’ont pas eu toute leur plénitude de participer au développement économique et social du pays, c’est parce que, entre autres, elles ont été considérées comme des organismes professionnels dont les observations à fort contenu économique, social, industriel et agricole ont été rangées dans les placards ou armoires.
Kossoro CISSOKHO
Ancien secrétaire général adjoint, conseiller juridique et chef du personnel de la chambre de commerce d’industrie et d’agriculture de Dakar