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30 septembre 2025
un récit de boubacar boris diop
BONNE NUIT, PRINCE KOROMA (4/4)
EXCLUSIF SENEPLUS - Les Deux Ancêtres sont descendus sur Djinkoré illuminée par un grandiose feu d’artifice et, au petit matin, la foule en délire s’est déchaînée : «Gloire à notre nouveau roi ! Gloire à Casimir Olé-Olé !»
L’étranger a souri d’un air complice, sans toutefois rien laisser paraître de ses sentiments réels :
– Pureté d’âme… Vous êtes philosophe, vous, à ce que je vois.
La veille de la nuit de l’Imoko, j’ai trouvé Bithege assis au milieu de la cour. Il paraissait reposé et – pour la première fois depuis son arrivée à Djinkoré – d’humeur plutôt badine.
– J’observe ces lézards depuis quelques minutes, m’a-t-il dit, ils glissent le long du mur puis vont se perdre dans les hautes herbes…
J’ai approuvé de la tête sans rien comprendre à ses propos et il a poursuivi :
– J’aimerais bien savoir où ils vont après, les lézards. Où vont-ils, à la fin des fins ?
J’ai souri :
– Tiens-moi au courant quand tu le sauras, Christian. Moi, je file au dispensaire, nous sommes débordés en ce moment.
C’était la première fois que je le tutoyais.
– Ah ! Votre nuit de l’Imoko, bien sûr…
– Des diarrhées et des évanouissements. Rien de grave, mais nous devons être prévoyants.
Il a proposé de venir avec moi :
– Écoute, le Prince ne sera là que dans une heure, ça me laisse le temps de te déposer au dispensaire et de revenir ici.
– C’est bon, on y va.
– Alors je vais me changer en vitesse.
Pendant que je l’attendais dans la cour, j’ai entendu un cri tout près de la porte d’entrée. Il y a eu ensuite un silence qui m’a paru assez long. Bithege est aussitôt ressorti de sa chambre, une serviette autour des épaules.
– Que se passe-t-il ?
– J’ai entendu un cri.
– Tu ne sais pas ce que c’est ?
Je me suis peut-être fait des idées, mais j’ai eu l’impression qu’il me soupçonnait tout à coup de lui cacher quelque chose. La même petite lueur de méchanceté a brillé dans son regard fixe et dur. C’était effrayant comme l’expression de son visage pouvait changer d’une seconde à l’autre. Quand il y a eu un deuxième cri, encore plus fort, il a jeté sa serviette sur le canapé et s’est précipité dans la rue. Je l’ai suivi. Au bout de quelques mètres, je l’ai vu s’arrêter pour parler avec le Prince Koroma qui venait dans notre direction. Complètement hébété, le Prince tournait la tête de tous côtés en marmonnant des propos incohérents. Entre deux phrases, il répétait : «Je les ai vus… Je les ai vus…»
– De qui parlez-vous, Prince ?
– Ils s’amusaient comme des enfants ! Je vous jure que je les ai vus !
– Qui ? Qui donc ?
– Ils se moquent de nous… Savez-vous qu’ils se moquent vraiment de nous ? Comment osent-ils ?
– Dites-nous ce que vous avez vu, Prince Koroma. Qu’avez-vous vu ?
Aujourd’hui, près d’un an après les événements de cette journée, j’ai au moins une certitude : Bithege avait immédiatement perçu l’extrême gravité de la situation. Moi, j’étais en plein cirage. Je crois aussi que le Prince Koroma me faisait bien trop pitié pour que je puisse penser à autre chose. Son visage, habituellement d’une rayonnante douceur, s’était brusquement assombri. Il ne faisait aucun geste de trop ; son corps semblait se mouvoir avec précaution dans un invisible et dangereux labyrinthe. Ses yeux hagards étaient ceux d’un halluciné encore hanté par ses visions.
À force de patience, Bithege réussit à lui faire raconter son histoire.
Elle était toute simple.
Se promenant seul dans la forêt de Diandio, le Prince Koroma avait entendu un bruit inaccoutumé. Il s’était alors dissimulé derrière un buisson. Et là, il avait surpris les notables de Djinkoré en train de préparer à leur manière la nuit de l’Imoko. Pour le dire aussi crûment que possible, sans jouer avec les mots, les vieux salopards se répartissaient les rôles et mettaient au point leurs foutaises pour la nuit de l’Imoko. Toi, tu seras l’Ancêtre Numéro Un. Non, t’es vraiment con, ne marche pas aussi vite, tu as trois mille ans et tu viens de sortir du tombeau, alors voici comment tu dois te bouger, pareil pour toi Numéro Ancêtre Deux, n’oublie jamais que tu es censée être une charmante vieille dame, tu as cette fichue arthrite, etc., etc. J’ai forcé un peu le trait, je l’avoue, mais c’est juste pour rester fidèle au récit chaotique du Prince Koroma. Ce dernier, qui n’avait jamais été témoin d’une scène aussi affreuse, ajouta que les notables se livraient à leur comédie en se moquant de la crédulité de la populace. Ils chantaient et dansaient de manière grotesque entre deux larges gorgées de tiko-tiki. Celui qu’ils appelaient Ancêtre Numéro Un dut s’y reprendre à plusieurs reprises pour donner l’impression que sa voix, rauque et profonde, venait tout droit des profondeurs de l’abîme et ses complices le gratifièrent d’un tonnerre d’applaudissements. Tous se grimaient avec du kaolin, de la cendre et du charbon et se fabriquaient des vêtements avec des feuilles et des écorces arrachées aux arbres. De sa cachette, le Prince Koroma les entendit prononcer plusieurs fois son nom. Ils disaient avec des éclats de rire d’ivrognes que le Prince Koroma serait un bon roi pour eux, car c’était un parfait crétin. Bithege fit semblant d’être révolté par les révélations du Prince :
– Prince Koroma, connaissez-vous ces mauvaises personnes ?
– Tout ça, c’est le vieux Casimir Olé-Olé, répondit le Prince Koroma. Il est leur chef.
– Le chef de qui ? fit encore Bithege. Nous voulons connaître les noms des autres.
Mais le Prince Koroma n’était déjà plus avec nous. Il dit, très lentement cette fois-ci :
– Ainsi donc, toutes ces choses sont des inventions.
J’aurais voulu dire quelque chose, mais les mots se refusaient à moi. J’étais fasciné par la métamorphose du Prince Koroma : il venait de perdre la raison et il ne la retrouverait plus jamais.
– Calmez-vous, Prince, nous ne les laisserons pas faire, dit Bithege.
– Ce sont des mensonges, hurla le prince, ils font dire ce qu’ils veulent aux Deux Ancêtres ! Casimir Olé-Olé est leur chef !
– Casimir Olé-Olé… murmura Bithege.
Il ne semblait guère surpris d’apprendre que le vieux vendeur de fruits était au centre de toute cette histoire. Il restait cependant un peu tendu.
– Il faut tuer Casimir Olé-Olé, suggéra soudain le Prince Koroma avec un calme étrange.
– Mais pourquoi donc ? ai-je demandé, affolé.
Bien sûr, je n’aimais pas ce que les vieux notables de Djinkoré avaient fait, je n’aimais pas ça du tout, mais je ne comprenais pas non plus qu’on veuille les tuer. Je sais aujourd’hui ce qui me faisait tant paniquer à l’époque : c’était de sentir que j’allais bientôt être mêlé, d’une façon ou d’une autre, à un meurtre politique.
– La nuit de l’Imoko ! cria le Prince. La nuit de l’Imoko ! Je vais dire aux habitants de Djinkoré que c’est un mensonge ! Toutes ces choses, ce sont des mensonges !
Le plus calme de nous trois, c’était bien entendu Christian Bithege. Il tenait beaucoup à savoir si le prince avait eu le temps de raconter sa mésaventure à d’autres habitants de Djinkoré. Quand il eut la certitude que nous étions les seuls à en être informés, il lui dit avec un profond respect dans la voix :
– Prince, allons ensemble dans la forêt de Diandio. Casimir Olé-Olé et sa bande seront châtiés comme ils le méritent.
J’ai failli crier au prince Koroma : « Non, surtout ne faites pas cela ! Ne le suivez pas Prince !» Je n’en ai pas eu le courage. De toute façon, il ne m’aurait même pas entendu. Plus rien n’avait désormais de l’importance pour lui. Bithege m’a fait signe de monter à l’arrière de la Volvo et, tel un automate, le Prince s’est assis à ses côtés. Devant la forêt de Diandio, Bithege m’a prié de les laisser seuls un instant. Ce n’était pas nécessaire, je savais très bien ce qui allait se passer. Bithege prit une sacoche marron dans le coffre. Ses gestes étaient précis et de tout son être se dégageait une impression de farouche et sauvage résolution. Je l’ai regardé prendre le Prince Koroma par la main et s’enfoncer avec lui parmi les hautes herbes. Il est revenu seul au bout de quarante-cinq minutes.
– On y va, a-t-il dit en faisant tourner le moteur de la voiture.
«Je suis déjà bien en retard, ai-je pensé. Au dispensaire, ils vont se demander ce que je suis devenu.» J’essayais sans doute de me convaincre que la vie continuerait comme avant. Mais ce n’était pas si simple. Mon double ne me laissait pas tranquille, il martelait mon crâne avec la même question : «Que vas-tu devenir, après ça ?»
Bithege m’a brusquement annoncé qu’il rentrait le soir même à Mezzara. J’ai fait comme si je n’avais rien entendu et il a ajouté :
– La délégation officielle arrive demain. Elle sera conduite par le Big Boss en personne. Je lui fais mon rapport cette nuit.
Le Big Boss… Il s’était bien payé ma tête, en fin de compte, Christian Bithege. Le silence dans la voiture était pourtant moins pesant que le jour de son arrivée. Si je me taisais cette fois-ci, c’était moins par hostilité à son égard que pour me tenir loin des ténèbres qui risquaient de m’engloutir après le meurtre du Prince Koroma.
Bithege a dit ensuite, sans se tourner vers moi :
– C’était la seule solution…
– Je sais bien.
Même si j’avais du mal à l’admettre, je pensais sincèrement que, d’une certaine façon, ce fils de pute n’avait pas eu le choix. Sans doute encouragé par ma réaction, il a repris :
– Tout s’est passé très vite. Il n’a pas souffert.
– Vous êtes trop bon, Monsieur.
Je ne sais toujours pas d’où m’était venu subitement tant de mépris pour cet homme si sûr de lui. Il a reçu de plein fouet cette sorte de crachat à la figure et au moment où je sortais de la voiture il a dit simplement, avec calme :
– Merci pour tout. Adieu.
Il n’a pas attendu ma réponse, mais j’ai compris le sens de son dernier regard, qui m’a presque fait pitié : «J’ai fait ce que j’avais à faire, tant pis pour toi si tu ne l’as pas compris.»
La suite de mon histoire, je m’en souviens comme si c’était hier.
Les Deux Ancêtres sont descendus sur Djinkoré illuminée par un grandiose feu d’artifice et, au petit matin, la foule en délire s’est déchaînée : «Gloire à notre nouveau roi ! Gloire à Casimir Olé-Olé !» Le président de la République est alors apparu aux côtés de Casimir Olé-Olé, raide, quasi pétrifié, avec sur le visage cet air de lassitude et de bienveillante sévérité qui ne le quitte pas depuis des années.
Le « protocole de l’Elysée », livre de Thierno Alassane Sall, montre que d’Etat, nous n’en n’avons plus depuis 2000 et l’avènement de l’ère libérale avec Abdoulaye Wade, puis Macky Sall
La sortie du livre de Thierno Alassane Sall a été accueillie par un volet de bois vert de thuriféraires du régime brandissant un « argument » de divulgation de secrets d’Etat par l’ancien ministre. Le « protocole de l’Elysée », titre du livre qui devrait être lu par tous les Sénégalais qui savent lire et être rendu accessible oralement à tous les autres, montre que d’Etat, nous n’en n’avons plus depuis 2000, avec l’avènement de l’ère libérale avec Abdoulaye Wade, puis Macky Sall. Le livre, très bien écrit, est aussi passionnant qu’un roman sur la mafia sicilienne, sauf qu’il s’agit ici de faits bien réels, au demeurant non démentis par ses contempteurs, qui se passent dans le Sénégal d’aujourd’hui et qui donnent des haut-le-cœur. Avis aux lecteurs : à ne pas lire le soir si on veut bien dormir. Car en effet, à travers son livre, Thierno Alassane a mis à nu une mafia sénégalaise bien organisée qui a fini de s’emparer de tous les leviers de notre nation et de dévoyer toutes nos institutions pour les mettre au service exclusif de ses propres intérêts.
Conglomérat de dirigeants politiques captés par des hommes d’affaires véreux, multinationales, et pouvoirs néocoloniaux internationaux, d’affairistes locaux portés par des prétendus religieux et autres lobbies occultes, et qui ont placé leurs juges pour sécuriser leur pouvoir et leur impunité, cette Mafia-Etat est devenue redoutable. Avec seuls l’argent et le pouvoir au cœur, et à travers des montages techniques, juridiques et autres micmacs les plus grossiers, elle rafle tout sur son passage : ressources financières du contribuable, foncier et autres ressources naturelles nationales. Au passage, par le récent bazardage de tout le pétrole et le gaz du Sénégal à Timis et à Total, en particulier, le Sénégal aura perdu des milliers de milliards de Francs CFA, dilapidant ainsi des opportunités de propulsion du pays hors de la liste des pays les plus pauvres du monde. Ce matin, dans une radio de la place, on faisait état de l’absence de médecins spécialistes (cardiologues et autres) à l’hôpital de Ziguinchor. Au demeurant, les ressources allouées au secteur de la santé par la mafia-Etat peine à dépasser 5% du budget national, ceci expliquant en grande partie l’effondrement de notre système de santé. Que n’aurions-nous pas pu faire pour notre système de santé avec ces milliers de milliards de Francs CFA « offerts » par la mafia à ses « amis » de Timis et de Total ? Tout Sénégalais entrant dans un hôpital devrait se poser cette question.
Dans sa belle logique, la mafia poursuit de plus belle son œuvre d’accaparement du foncier urbain et rural, et de soustraction des deniers publics à travers les marchés complaisants, y compris dans cette période de crise sanitaire Covid-19 dont on aurait espéré qu’elle secoua la conscience. Une mafia avec une conscience, pourrait-on me répliquer…
L’auteur souligne que Dakar ne devint pas comme Paris en 2000, comme le promettait Senghor, et, à notre avis, tel qu’il est gouverné par le système mafieux, le Sénégal ne sera pas non plus émergent en 2035, ni en 2100 d’ailleurs.
Il est aussi évident que si cette mafia a pu émerger sous le régime Wade, se renforcer et aujourd’hui tout se permettre sous celui de Macky, c’est que nos concitoyens dans leur grande majorité ont été complices ou tout simplement passifs, ce qui revient un peu au même.
Mais est-ce que les femmes et hommes politiques que nous sommes, qui ont opté pour la résistance patriotique, avons été à la hauteur des enjeux en adoptant des choix stratégiques majeures que nécessitent la situation de notre pays ? Je pense que non. Et pourtant, dès le référendum de 2016, il était devenu clair, pour ceux qui se faisaient encore des illusions, que le Président Macky Sall avait opté pour la continuation du système Wade, faisant fi des conclusions des Assises nationales et de la CNRI qui visaient la refondation de notre Etat. Dans les échéances électorales qui ont suivi, les leaders de l’opposition patriotique se sont plus concentrés à tenter de construire des destins présidentiels à la limite du messianisme, autour du cercle étroit de leurs partis et autres mouvements. Le résultat qui en a découlé était fort prévisible face à une mafia extrêmement puissante et au cynisme sans limites allant jusqu’à la liquidation inédite de candidats à la présidentielle par la justice et par un système de parrainage, avec à la clé l’élaboration et la mise en œuvre d’un système d’achat de consciences des électeurs jamais égalé dans l’histoire électorale du pays.
Les mêmes causes produisant les mêmes effets, comme dit Thierno sur les systèmes mafieux de Wade à Macky, il serait illusoire de penser que l’opposition patriotique, sans une profonde refondation de son action politique, puisse triompher d’une mafia-Etat qui n’hésitera devant rien pour garder sa mainmise sur le pays…pour au moins 50 ans, comme le prévoyait Wade. Après les échecs de 2016 (référendum), 2017 (Législatives) et 2019 (Présidentielle), on aurait espéré que l’opposition patriotique aurait enfin compris. Les signaux en sont encore timides. En effet, beaucoup parmi nous restent obnubilés par l’expérience de Macky Sall qui est arrivé au pouvoir après seulement quelques années de vie de son parti, en occultant la dynamique politique et citoyenne impulsée par les acteurs des Assises nationales et qui a préparé le terrain de la 2e alternance. Aussi, pour recréer une telle dynamique populaire porteuse d’alternative et de rupture, il y a urgence pour l’opposition patriotique de développer ses capacités d’innovation pour sortir des carcans partisans étroits et de construire une large plateforme politique et citoyenne. Cette plateforme devrait être basée sur des modèles de fonctionnement démocratiques et, autour du débat d’idées, offrir la possibilité de compétitions structurées pour le choix des leaders nationaux et locaux qui auront à impulser la refondation de notre nation.
Le « protocole de l’Elysée », après tant d’autres livres publiés sur les scandales de la gouvernance libérale tropicale de Wade à Macky, a fini de dénuder la mafia-Etat ; il est temps de la mettre hors d’état de nuire et reconstruire notre pays, car les Sénégalais sont aujourd’hui encore plus fatigués.
Ousmane Ndoye est Secrétaire National chargé de l’organisation de la LD-Debout.
par le chroniqueur de SenePlus, Hamadoun Touré
POUVOIR ET PANTHÉON
EXCLUSIF SENEPLUS - L’homme d’État refuse le favoritisme, fait le tri entre ses affaires personnelles et celles du pouvoir. Il sait dire non à la vanité de l’homme providentiel
Hamadoun Touré de SenePlus |
Publication 28/08/2020
« La différence entre l’homme politique et l’homme d’Etat est la suivante: le premier pense à la prochaine élection, le second à la prochaine génération » (James Freeman Clarke.
Chérir le pouvoir est l’apanage d’un chef d’Etat, courtiser l’histoire celui d’un homme d’Etat. Le même prince peut faire les deux sans être l’arbitre d’un duel intérieur que peut induire ces deux comportements, rarement compatibles quand celui qui gouverne n’a pas un caractère trempé.
L’exercice du pouvoir impose son rythme avec les coteries, les urgences des préoccupations citoyennes. Il expose notre moi profond, met à nu nos désirs et nos décisions dans le choix des collaborateurs, explique la face cachée des projets de société et surtout leur mise en œuvre.
L’histoire peut être considérée comme la fin d’un parcours soumis au jugement des hommes toujours en quête d’éternité Un parcours que maints dirigeants espèrent terminer dans quelque panthéon. Ce haut lieu accueille également d’autres personnalités qui se sont illustrées, en dehors de l’espace politique, par la Science, les Lettres, l’Art, l’Humanisme, etc.
Pour celui qui gouverne, l’entrée au panthéon, exige qu’il sache quitter son magistère et ses privilèges à temps et volontairement, en déjouer les pièges, résister à la complaisance, maitriser ses penchants, dominer ses sentiments, s’imposer l’impartialité, obéir à la justice, dompter ses préférences. Il doit aussi savoir maîtriser ses pulsions et empêcher que ne prospèrent les intérêts personnels de son entourage. Ce sont là les aspects-clés du leadership. Auxquels s’ajoutent des vertus morales spartiates qui distinguent l’homme d’Etat du chef d’Etat. De telles empreintes indélébiles ouvrent les portes de l’histoire.
Selon le théologien et écrivain américain du 19è siècle, James Freeman Clarke : « La différence entre l’homme politique et l’homme d’Etat est la suivante : le premier pense à la prochaine élection, le second à la prochaine génération ».
Miroir aux alouettes
L’intégrité morale de l’homme qui exerce la plus haute charge de l’Etat est mise à l’épreuve à chaque instant, face aux tentations, aux miroirs aux alouettes brandis par des experts en génuflexion, dont on attend des conseils avisés et qui, loin de vos attentes, vous cernent pour vous rendre inaccessible. Ils vous serinent que votre destin est unique, s’improvisent en protecteurs de votre prétendue vulnérabilité face à de simples adversaires politiques évidemment décrits comme d’irréductibles ennemis tapis dans l’ombre.
Les mêmes conseillers vous contournent et vous détournent des valeurs essentielles qui ouvrent les portes de l’histoire, vous font trahir votre serment et piétiner les simples principes d’une gouvernance vertueuse. Insensiblement, l’arrogance devient votre marque.
L’homme d’État refuse le favoritisme, fait le tri entre ses affaires personnelles et celles du pouvoir, ses émotions et les raisons d’Etat. Il sait résister aux pièges des biens matériels, sait dire non à la vanité de l’homme providentiel. Il a pour devoir de ne pas succomber au vertige du pouvoir qui guette quiconque tient dans ses mains cette puissance dont le non initié ne soupçonne pas l’étendue.
Y-a-t-il un vaccin contre cette maladie aigüe du pouvoir, la « pouvoirite », néologisme osé ? Non, mais il existe un antidote : fidélité au serment, obéissance stricte aux lois et règlements qui doivent s’appliquer à tous avec la même impartialité. Le détenteur du pouvoir doit être sans complaisance, rigoureux dans son exercice, inflexible sur les qualités morales et techniques de ses collaborateurs au-dessus de tout soupçon, garde-fous pendant les moments de défaillance humaine.
Autrement, la perception du citoyen des collaborateurs du dirigeant au pouvoir ne peut qu’être négative, chargés qu’ils seront de tous les maux d’Israël à l’inverse du chef qui doit être un parangon de vertu. En fait, le choix de collaborateurs incapables et incompétents révèle l’incapacité de son auteur à se hisser au niveau de ses hautes fonctions.
Symphonie harmonieuse
Tel un chef d’orchestre, l’homme d’Etat doit réussir une symphonie harmonieuse en détectant les meilleurs instrumentistes et en installant chacun à la place qu’il faut pour éviter les fausses notes.
L’enjeu est de rassembler dans la même équipe des acteurs d’horizons divers, de formation différente et d’intérêts parfois divergents, et de faire de leur enrichissante diversité un atout au profit de l’intérêt général, le seul qui vaille lorsque l’on a en charge la conduite de tout un peuple.
Les collaborateurs et autres conseillers doivent admirer, craindre et respecter celui qui est à leur tête. S’ils décèlent ses défauts, ses faiblesses humaines, ses décisions fondées sur l’affect, ils deviennent des béni oui oui, incapables de dévier les désirs du chef en allant, au contraire, jusqu’à les anticiper.
Les causes de telles dérives morales sont simples. L’entourage est coopté en fonction d’affinités amicales, familiales, sociales et ethniques ou de penchants étrangers à l’efficacité.
L’exercice du pouvoir s’apparente, très souvent, à une lutte contre soi-même à travers un compagnon encombrant appelé l’Ego. Il gonfle de manière soudaine lorsque vous ne vous rappelez pas souvent vous-même à l’ordre. Il tend à la démesure dès que vous cessez d’être humble et que la volupté de vos fonctions vous enivre.
Impartiale, l’histoire ouvre ses portes à tout prince qui accède au pouvoir. Il les franchit ou butte devant elles en fonction de sa vision et de sa gouvernance. C’est à l’aune de cet exercice que le peuple juge. Il est aussi le marqueur des empreintes à léguer à la postérité.
LIMITATION DU NOMBRE DE MANDATS PRÉSIDENTIELS EN AFRIQUE, LA ROUTE EST ENCORE LONGUE
Sept des dix présidents en exercice depuis le plus longtemps sur la planète sont africains. De tels agissements montrent que le continent est loin d’en avoir fini avec l’ère désastreuse des présidents à vie
Le Monde Afrique |
Adem K Abebe |
Publication 28/08/2020
Alassane Ouattara en Côte d’Ivoire, Alpha Condé en Guinée, Yoweri Museveni en Ouganda, Faure Gnassingbe au Togo… Nombreux sont ceux qui veulent rester au pouvoir.
Le président ivoirien Alassane Ouattara (78 ans) a finalement confirmé le 20 août qu’il briguerait un troisième mandat en octobre. Quelques jours plus tard, le parti au pouvoir en Guinée a demandé au président Alpha Condé (82 ans) de se présenter pour la troisième fois.
De tels agissements montrent que l’Afrique est loin d’en avoir fini avec l’ère désastreuse des présidents à vie. Amorcée dans la foulée des indépendances, celle-ci s’est prolongée jusqu’à la fin des années 1990, avec des effets délétères sur la stabilité, la démocratie et le développement socio-économique du continent.
Au cours des vingt dernières années, l’Union africaine (UA) a mis au point des moyens relativement efficaces pour lutter contre les coups d’Etat anticonstitutionnels contre les gouvernements. En revanche, l’UA n’a toujours pas réussi à régler le problème des présidences impériales. Du fait de cette inaction, l’organisation se voit traitée de club privé des dirigeants en place.
Sept des dix présidents en exercice depuis le plus longtemps sur la planète sont africains. Parmi ceux-ci figurent le Camerounais Paul Biya, qui dirige le pays depuis 1982, et Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, aux commandes de la Guinée équatoriale depuis 1979. Leurs régimes sont souvent définis par l’instabilité, l’absence de libertés civiles comme politiques, ainsi qu’un patrimonialisme et une corruption étendus.
Contourner la limitation de deux mandats
Issu des rangs de l’opposition, Alpha Condé a pris le pouvoir en 2010 après avoir remporté les premières élections pluralistes organisées en Guinée à la mort, en 2008, de Lansana Conté, lui-même arrivé à la tête du pays au moyen d’un coup d’Etat vingt-quatre ans auparavant. Un gouvernement de transition, mis en place en 2010, a été suivi de l’adoption d’une nouvelle Constitution et de nouvelles élections.
Farouche adversaire de Lansana Conté, Alpha Condé s’est notamment opposé à l’amendement constitutionnel de 2003 autorisant son adversaire à briguer un troisième mandat. Une fois aux commandes, en 2010, Alpha Condé a rapidement consolidé son pouvoir grâce à l’hégémonie de son parti, le Rassemblement du peuple de Guinée, avant d’être réélu en 2015. En 2019, son gouvernement a annoncé son intention d’adopter une nouvelle Constitution visant à contourner une disposition interdisant de modifier la limite de deux mandats présidentiels.
C’est à lui qu’est revenu l’honneur de prononcer le discours du gouvernement sénégalais le 26 août 1958 devant De Gaulle à la veille du référendum de septembre 1958. Un des faits marquants de sa carrière politique freinée par son emprisonnement en 1962
C’est à lui qu’est revenu l’honneur de prononcer le discours du gouvernement sénégalais le 26 août 1958 devant le Général De Gaulle à la veille du référendum de septembre 1958. Cet événement est l’un des faits les plus marquants de sa carrière politique freinée par son emprisonnement en 1962 en compagnie de Mamadou Dia.
L’histoire retiendra de lui un discours mémorable. Celui qu’il déclama un jour d’août 1958 devant le Général De Gaulle, à l’actuelle Place de l’Indépendance à l’époque appelée Place Protêt. Ce jour-là, en l’absence de Léopold Sédar Senghor et de Mamadou Dia, les deux chefs de l’exécutif, et en tant que ministre de l’Intérieur, il agite l’idée d’une indépendance du Sénégal à travers ses mots : « Nous disons indépendance, unité africaine, confédération ». L’homme qui clame ces slogans s’appelle Valdiodio Ndiaye. Il sera l’un des principaux artisans de l’indépendance du Sénégal et de la création de la Fédération du Mali.
Prince héritier du royaume des sérères guelewar, Valdiodio Ndiaye est né le 7 avril 1923 à Kaolack. Il effectue d’abord sa scolarité au lycée Faidherbe de Saint-Louis, puis poursuit de brillantes études juridiques à la Faculté de droit de l’Université de Montpellier où, avec une thèse intitulée « La notion de citoyenneté dans l’Union française », il décroche un doctorat en 1951. Sur le plan politique, il occupe d’importantes fonctions au Bloc démocratique sénégalais (BDS) et à l’Union progressiste sénégalaise (UPS). Devenu maire de Kaolack en 1960, il est nommé ministre des Finances en novembre 1962. Avec le président du Conseil, Mamadou Dia, et trois autres de leurs compagnons, Ibrahima Sarr, Joseph Mbaye et Alioune Tall, il est accusé de « tentative de coup d’État » en décembre 1962. Son destin bascule dans la tragédie. Condamné à 20 ans de prison en mars 1963, Valdiodio Ndiaye, qui a œuvré pour la liberté et prouvé son attachement aux valeurs démocratiques, tenu dans l’isolement le plus terrible, coupé de sa famille, sera finalement libéré au bout de 12 ans d’emprisonnement, le 27 mars 1974. Il reprend alors sa carrière d’avocat.
En 1981, il participe à la fondation du Mouvement démocratique populaire (MDP) avec Mamadou Dia, mais s’éloigne de celui-ci en 1983 et rejoint le Parti socialiste (PS). Lors de la présidentielle sénégalaise de 1983, il apporte son soutien au Président sortant Abdou Diouf. Valdiodio Ndiaye meurt l’année suivante, le 5 mai 1984. Il est inhumé à Kaolack, sa ville natale, dont il fut pendant longtemps le maire. Le plus grand lycée de Kaolack porte son nom.
LA CEDEAO RÉCLAME UNE TRANSITION CIVILE ET DES ELECTIONS
Les pays d'Afrique de l'Ouest réunis en sommet sur le Mali ont réclamé à la junte, vendredi 28 août, un retour rapide des civils au pouvoir
Dix jours après le coup d'État contre le pouvoir au Mali, la Communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest (Cédéao) a réclamé, vendredi, à la junte le lancement immédiat d'une "transition civile" et des élections législatives et présidentielle d'ici 12 mois.
Les pays d'Afrique de l'Ouest réunis en sommet sur le Mali ont réclamé à la junte, vendredi 28 août, un retour rapide des civils au pouvoir, demandant le lancement immédiat d'une "transition civile" et des élections d'ici 12 mois, en échange d'une levée progressive des sanctions.
La Communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest (Cédéao) "demande" à la junte "d'engager une transition civile immédiatement" et la "mise en place rapide d'un gouvernement pour (...) préparer les élections législatives et présidentielle dans un délai de 12 mois", a déclaré dans son discours de clôture le chef de l'État nigérien, Mahamadou Issoufou.
DAKAR LÈVE 17, 6 MILLIARDS DE FCFA POUR FINANCER LA PRÉ-EXPLOITATION DU TER
Le gouvernement du Sénégal a signé vendredi avec la Banque publique française d’investissement (BPI) un contrat de financement de 17, 6 milliards de francs pour la pré-exploitation du Train express régional
Dakar, 18 août (APS) – Le gouvernement du Sénégal a signé vendredi avec la Banque publique française d’investissement (BPI) un contrat de financement de 17, 6 milliards de francs pour la pré-exploitation du Train express régional (TER) devant relier Dakar à la Nouvelle ville de Diamniadio, a appris l’APS.
Le ministre sénégalais de l’Economie du Plan et de la Coopération Amadou Hott et le directeur exécutif en charge de l’export à la BPI ont notamment procédé à la signature de ce contrat de 26, 9 millions d’Euros en présence du ministre délégué auprès de celui en charge de l’Europe et des Affaires étrangères, chargé du Commerce extérieur et de l’Attractivité de la France, Franck Riester.
‘’Ce financement de BPI à hauteur de 26,9 millions d’Euros (environ 17,645 milliards CFA) permettra de mettre en place les services nécessaires à une bonne exploitation du TER, par la Société d’Exploitation-maintenance du TER (SETER)’’, souligne le ministère sénégalais de l’Economie dans un communiqué publié sur son site.
Le Train express Régional (TER), ‘’un des projets phares’’ du Plan Sénégal émergent (PSE) reliera le centre-ville de Dakar au nouvel aéroport International Blaise Diagne situé à 55km, en 30 à 45 minutes, et constituera l’épine dorsale du transport dans la capitale sénégalaise, fait-on valoir.
Le début d’exploitation est prévu pour 2021, indique-t-on dans le communiqué.
BPI France y est présenté comme ‘’un partenaire privilégié’’ du Sénégal.
Cité dans le communiqué Franck Riester a déclaré que, “ce projet est un symbole du dynamisme de la coopération économique franco-sénégalaise”.
INTERRUPTION DE LA PUBLICATION DU RAPPORT DOING BUSINESS
La Banque mondiale a annoncé l’interruption de la publication du rapport Doing Business le temps de procéder à une évaluation après des ‘’irrégularités’’ signalées dans des rapports 2018 et 2020.
Dakar, 28 août (APS) – La Banque mondiale a annoncé l’interruption de la publication du rapport Doing Business le temps de procéder à une évaluation après des ‘’irrégularités’’ signalées dans des rapports 2018 et 2020.
’’Un certain nombre d’irrégularités ont été signalées concernant des modifications apportées aux données des rapports Doing Business 2018 et Doing Business 2020, lesquels ont été publiés respectivement en 2017 et 2019. Ces modifications n’étaient pas cohérentes avec la méthodologie Doing Business’’, fait part la Banque dans un communiqué.
Selon la même source, ’’la situation a été exposée au Conseil des administrateurs de la Banque mondiale, ainsi qu’aux autorités des pays les plus touchés’’.
Elle indique la publication du rapport Doing Business sera interrompue pendant la durée de l’évaluation.
Soulignant que ‘’l’intégrité et l’impartialité’’ de ses données et analyses sont ‘’capitales’’, la Banque s’est engagé à ‘’un examen et une évaluation systématiques des modifications apportées aux cinq derniers rapports Doing Business après le processus institutionnel d’examen des données’’.
Ses responsables ont demandé ‘’à la fonction indépendante d’Audit interne du Groupe de la Banque mondiale de réaliser un audit des procédures de collecte et d’examen des données aux fins du rapport Doing Business ainsi que des mesures de contrôle destinées à préserver l’intégrité des données’’.
’’En fonction des résultats de ces actions, nous corrigerons rétrospectivement les données des pays les plus concernés par ces irrégularités’’, promettent-ils.
Le communiqué rappelle que ’’tout au long de ses 17 années de parution, le rapport Doing Business a été un outil précieux pour les pays soucieux de mesurer le coût de l’activité économique’’.
’’Les indicateurs et la méthodologie Doing Business sont conçus indépendamment des pays, mais bien dans le but de contribuer à l’amélioration du climat général des affaires’’, précise t-on encore.
FELWINE SARR À LA RECHERCHE DU FEU NOUVEAU
Son départ de l'UGB a été diversement apprécié, certain parlant d’une fuite des cerveaux. Mais pour l'intéressé, pas question de se justifier. L’universitaire livre ici sa réflexion sur ce qui attire tant d’intellectuels africains aux Etats-Unis
Son départ a été diversement apprécié, certain parlant d’une énième fuite des cerveaux. Mais pour Felwine Sarr, il n’est pas question de se justifier – « je ne fuis rien », martèle-t-il –, mais d’expliquer les raisons d’un choix motivé par « l’envie de trouver le lieu de (sa) plus haute fécondité intellectuelle », de « reprendre le chemin de l’apprentissage ». Bref, d’aller chercher « le feu nouveau » et de confronter sa pensée à l’échelle du monde. Dans cet entretien exclusif au « Soleil », l’universitaire sénégalais nous livre aussi sa réflexion sur la géopolitique des savoirs, la mobilité des chercheurs et ce qui attirent tant d’intellectuels africains (et du reste du monde) aux Etats-Unis.
Pourquoi après treize ans à Gaston Berger avez-vous décidé de rejoindre l’Université Duke aux Etats-Unis ?
J’ai tout simplement décidé, après treize ans de bons et loyaux services, sur lesquels je reviendrai, de reprendre ce que j’appelle mon chemin d’apprentissage. Cela fait des années que je souhaite élargir mon champ disciplinaire. J’ai une formation initiale d’économiste, mais avec une inclination pluridisciplinaire et suis intéressé par les humanités dans lesquelles je fais des travaux ; et je voulais faire une sorte de migration disciplinaire et continuer à construire une expérience à la croisée des sciences humaines et des sciences sociales. Et très peu de départements dans nos universités offrent cette pluridisciplinarité dans la réalité. Il n’y a pratiquement pas de départements d’humanités dans le sens où on peut, dans le même enseignement, croiser plusieurs disciplines. On est encore dans une ère où on cloisonne les disciplines et on a hérité de ce système de cloisonnement-là. J’ai fait treize ans à l’Ugb et ce n’est pas une démarche que j’apprécie, très franchement, de faire un bilan statistique et comptable de tout ce que j’ai fait, mais je crois que c’est nécessaire pour éclairer notre discussion. J’étais recruté en tant qu’enseignant chercheur en 2007 au département d’économie. Dès que je suis arrivé, je me suis impliqué dans la vie du département et de l’Ufr (Unité de formation et de recherche, Ndlr). Je me suis occupé du Master de développement local et de coopération. Ensuite, j’ai dirigé le Master d’analyse économique et quantitative, j’ai été directeur adjoint de l’Ufr. Enfin, j’ai été élu doyen de la fac d’économie, que j’ai dirigée pendant trois ans. J’ai été aussi cofondateur du Laboratoire de recherche en économie de Saint-Louis (Lares) et du Laboratoire d’analyse des sociétés et pouvoirs / Afrique-Diasporas (Laspad) qui est un laboratoire beaucoup plus transdisciplinaire. Je me suis vu confié la mise en place de l’Ufr Crac (Civilisation, Religions, Art et Communication) qui n’existait pas avant. Le recteur de l’époque, Mary Teuw Niane, avait initié une grande discussion dans l’université et une commission pour réfléchir à une Ufr qui allait mettre les savoirs endogènes, les littératures africaines, les arts, les religions au cœur de sa démarche pédagogique. Et à l’issue des discussions, il m’a demandé de la mettre sur pied, ce que j’ai fait. Je me rappelle ce jour, sortant de l’assemblée de l’université, avec un document autorisant l’ouverture de trois départements l’année en cours et de trois autres l’année suivante, j’ai dû travailler avec mon assistante de l’époque, Khady Ndiaye, à trouver les locaux, à suivre les chantiers, à mettre en place les commissions de recrutement pour l’administration, à recruter les profs, les étudiants, et à faire tout le travail pour que l’Ufr existe et sois une réalité. C’était une entreprise titanesque. Et je l’ai dirigée pendant trois ans. Sur le plan de la recherche, j’ai énormément encadré des étudiants en Master et en thèse : plus de 150 mémoires de Master, une vingtaine de thèses de doctorat encadrées et soutenues sous ma direction. La dernière, je l’ai faite soutenir quelques jours avant de quitter le Sénégal. Et d’ailleurs j’étais très heureux, puisque mon premier docteur, Cheikh Tidiane Ndiaye, était avec moi membre du jury, parce qu’il était devenu agrégé en économie en novembre dernier. Donc, durant ces treize ans, j’ai enseigné, j’ai fait de l’administration à plusieurs niveaux, j’ai contribué à la formation doctorale, j’ai accompagné des collègues aux concours d’agrégation, j’ai dirigé deux Ufr et j’ai formé la relève. Beaucoup de mes docteurs sont aujourd’hui professeurs à la fac, à Saint-Louis, à Dakar, à Bambey et à Ziguinchor. D’autres sont au ministère de l’Economie et du Plan, dans le privé, dans les Ong, etc. Comme on dit en Wolof, je pourrais considérer que « sama jan wacna » (mission accomplie, Ndlr). J’ai eu beaucoup de chance d’atterrir à l’Ugb au retour de mes études. A l’Ufr de sciences économiques j’ai trouvé des mentors qui m’ont accueilli avec bienveillance, notamment le professeur Adama Diaw et j’ai trouvé également une université dynamique et innovante sous le leadership de Mary Teuw Niane qui offrait un espace d’expérimentation et d’action.
Je le disais tantôt, un chercheur (un écrivain aussi) à besoin d’être sans cesse en quête des lieux de sa plus haute fécondité intellectuelle et artistique, pour continuer à produire et à être créatif. On se déplace, on met sa pensée et sa sensibilité à l’épreuve du monde, on va chercher ce que j’appelle le feu nouveau et on essaie de reprendre un chantier épistémologique. Ce lieu de sa fécondité on peut le trouver là où on est, comme on peut ne plus le trouver là où on est parce qu’il faut changer de cadre, changer de lieu, changer sa manière de faire, de culture scientifique, se confronter à d’autres idées, à d’autres contextes pour continuer à apprendre… Et puis il y a quand même une notion implicite dans la réflexion sur mon départ, c’est celle de dette infinie. Comme si on n’avait jamais fini de payer sa dette à la société. J’ai fait mes études au Sénégal jusqu’au bac, j’ai étudié l’économie à l’université d’Orléans durant quinze ans, après cela je suis rentré. Après treize ans de bons et loyaux services, avec tout ce que je vous ai énuméré comme engagement dans ma fac, certains ont toujours le sentiment que c’est insuffisant, qu’on n’a jamais fini de rendre. On oublie qu’une communauté, pour qu’elle soit forte, il faut qu’elle soit composée d’individus qui poursuivent les chemins de leurs accomplissements. Et c’est important que les personnes puissent faire des choix individuels afin de réaliser pleinement leurs potentialités. Sinon, c’est l’entropie du groupe, qui est guetté par la dégénérescence de l’énergie et il faut que certains prennent des chemins de traverse, sortent, reviennent, renouvellent l’élan, prennent de la distance, du recul, cultivent un feu nouveau…C’est ainsi qu’ils continueront à apporter à la communauté, y compris en prenant des chemins que le groupe ne comprend pas sur le court terme, en continuant à cultiver leur capital humain, s’ils en ont la possibilité.
Pourquoi préférez-vous parler de mobilité au lieu de fuite des cerveaux ?
Parce que le terme fuite est totalement inadéquat. Il n’y a rien à fuir. Pour ma part, je ne fuis rien. Nous ne sommes pas en guerre à ce que je sache. Peut-être contre l’ignorance, pour ce qui nous concerne, mais cette bataille-là, elle se mène sur un front élargi. On peut être immobile et sédentaire et avoir le cerveau en fuite tous les jours, parce que tout simplement, on n’affronte pas sa réalité, on ne la pense pas, on ne l’envisage pas avec lucidité. La quête du savoir a toujours été liée au voyage et à la mobilité. Nos grandes figures spirituelles qu’on aime à citer en exemple sont des gens qui ont voyagé, sont allés chercher le savoir jusqu’aux confins du monde, pour rencontrer des maîtres spirituels, se former sur les chemins du voyage. Ils ont pérégriné dans plusieurs zones géographiques. On est dans un monde connecté, global et ouvert, le savoir est dématérialisé, on peut donner des cours en ligne, faire soutenir une thèse en ligne, contribuer à la constitution du savoir là où on est, à partir de plusieurs lieux. Ces lieux ne sont plus forcément physiques. C’est le destin des universitaires, des quêteurs de savoirs et des chercheurs d’être en mouvement. De plus, je pense qu’il y a une réflexion à mener sur c’est quoi l’utilité de la présence physique d’un chercheur dans un lieu. Dans une université, on donne des cours, on produit des savoirs, on fait de la recherche et on transmet. Bien sûr il y a une sémantique de la présence. Mais la transmission, ce n’est pas juste le fait d’être dans une salle de classe devant un certain nombre d’étudiants, ce qu’on peut d’ailleurs faire à distance, mais c’est surtout laisser des ouvrages et une pensée, qui, on l’espère, vont durer dans le temps. D’ailleurs, dans une université on enseigne aux étudiants des savoirs qui sont dans des ouvrages dont les auteurs ne sont plus ou pas physiquement présents. La base des curricula, ce sont ces textes dont les enseignants transmettent les contenus. Je pense qu’il faut avoir une vision beaucoup plus large de ce qu’est contribuer aux savoirs et à la formation. On contribue bien évidemment en étant présent, en encadrant, en enseignant, des choses qu’on peut d’ailleurs faire en ligne ; mais on contribue surtout en laissant des ouvrages de référence, de la recherche, des articles qui vont transcender le temps et surtout faire en sorte que le savoir soit « désacadémisé », c’est-à-dire qu’il ne reste pas cantonné à l’université. A un moment donné on transmet dans les espaces configurés par l’académie, puis à un autre moment on transmet au corps social. Tant qu’on produit du savoir, on est en train de transmettre dans une temporalité et une géographie élargie. Cette année, j’avais deux cours (un sur l’épistémologie et un autre sur la politique économique). Cheikh Ndiaye, mon ancien doctorant devenu agrégé, a repris le cours de politique économique et moi je garde le cours d’épistémologie. Donc, je continue cette forme de transmission-là. Mais les autres formes de transmission (les ouvrages, les conférences, les articles) sont aussi importantes, sinon plus, parce qu’elles durent dans le temps, elles transcendent les géographies et surtout elles sortent le savoir de la salle de classe.
Quelle place pour l’Afrique dans la géopolitique des savoirs qui se redessine ?
Je trouve que le continent profite déjà de la mobilité des savoirs dans le monde. Moi qui ai dirigé deux Ufr dans mon université, je vois très bien quel a été l’apport des chercheurs étrangers, de l’Afrique, de la diaspora, mais aussi d’autres zones géographiques, à venir dans nos universités, à encadrer des thèses, à nous aider dans des formations pour lesquelles nous n’avions pas la ressource, à effectuer des missions d’enseignement pour nos formations de troisième cycle. Nous continuons à profiter énormément de la mobilité des chercheurs. Nous avons des jeunes chercheurs que nous envoyons faire des thèses en cotutelle à l’étranger dans des laboratoires et beaucoup de nos formations ont été soutenues par la circulation des savoirs et le fait que les chercheurs du monde entier viennent apporter leur contribution à ce que nous faisons sous nos cieux. Mais il ne s’agit pas juste que de cela. Le continent doit produire des savoirs qui répondent aux besoins de ses sociétés, des savoirs nouveaux pour les besoins présents et à venir. Il doit aussi contribuer aux grandes questions de l’humanité : la question du vivant et comment réparer le vivant, les questions liées à la technoscience, au vivre ensemble, aux écologies, aux économies qu’il faut réinventer. Donc, là aussi, il y a de grands défis pour que le continent reprenne sa place dans une géopolitique des savoirs qui se redessine avec différents pôles ; et surtout ne plus se considérer juste comme un consommateur de savoirs produits ailleurs. Mais pour cela, il y a toute une politique et un investissement dans la recherche dans l’enseignement supérieur beaucoup plus conséquent que nos pouvoirs publics devraient consentir. Et pour ce qui est de la perte supposée, elle est moins liée à la circulation de nos chercheurs, mais plutôt à ces milliers d’étudiants que nous envoyons à l’étranger à qui nous donnons des bourses et qui après leurs études pour une grande partie ne rentrent pas. Cette perte-là elle est silencieuse et invisible, elle n’en est pas moins réelle.
Quelles initiatives comptez-vous mettre en place pour favoriser la circulation des savoirs dans les deux sens ?
Je n’ai pas attendu d’aller à Duke pour prendre des initiatives dans ce sens. C’est en étant au Sénégal, à Saint-Louis, que j’ai monté,avec Achille Mbembé en 2016, les Ateliers de la pensée qui, pour moi, sont une plateforme qui fait circuler les savoirs parce que les gens viennent de l’Afrique, des diasporas et du monde entier pour venir réfléchir à des problématiques du continent et du monde. Aujourd’hui, on en est à trois éditions, plus une école doctorale, et je pense qu’il n’y a pas plus éloquent comme plateforme sur la question. Il y a aussi des choses qui peuvent se faire au niveau de l’université comme faire venir des doctorants, des post-docs monter des programmes de recherche qui font circuler les gens entre l’Afrique et d’autres lieux. C’est des choses que j’ai bien évidemment l’intention de faire et la chaire que j’occupe me permettra de le faire. Mais je pense que le grand projet de circulation des savoirs (les Ateliers de la pensée) on l’a déjà mis en place et il continuera à exister.
Compte tenu de ce que vous représentez, est-ce que votre départ ne risque pas de faire croire à la jeune génération de chercheurs sénégalais que le summum d’une carrière universitaire ne s’obtient qu’à l’étranger ?
Je pense que non. J’ai envie de dire que le summum de ma carrière, en toute modestie, je l’ai déjà atteint au Sénégal. Je suis rentré en 2007 et ai débuté comme maître assistant. En 2009, je suis devenu agrégé au Cames et en 2016 je suis devenu professeur titulaire. Donc, j’ai franchi toutes les étapes de la carrière universitaire jusqu’au bout en restant dans mon université. J’ai obtenu le Prix Abdoulaye Fadiga pour la recherche scientifique en étant dans mon université. Et je pense que ce qu’il faut dire surtout, c’est que mon travail de chercheur, je ne le considère pas comme une carrière à manager dont on recherche le sommet. Je le considère comme une quête continue et ininterrompue de clairvoyance, pour laquelle aucun sommet n’est jamais atteint. Je le considère comme un lieu d’élargissement de mes capacités de compréhension du monde. Si on devait réfléchir en termes de carrière, je pense que je l’ai faite au Sénégal et j’y ai gravi tous les échelons de la profession d’universitaire.
Il faut plutôt interroger le fait que lorsqu’on se déplace dans un autre lieu, que nous accordions symboliquement plus de poids et plus d’importance à ce lieu-là. Bien qu’on y va parce que ces lieux sont féconds pour nous, mais cela ne veut pas dire pour moi que le summum c’est ici à Duke. Quant à la symbolique des lieux, c’est nous qui leur accordions un sens et un poids. En résumé, mon départ ne devrait pas être interprété comme ça. Je souhaite qu’il soit interprété comme je l’ai expliqué : un désir d’élargir mes horizons intellectuels et d’être beaucoup plus fécond. « Jambaar dawul défa uti dooley », dit le proverbe wolof. Par ailleurs, il faut considérer que l’Afrique est déterritorialisée, elle déborde la géographie du continent, elle est dans ses diaspora. Elle est surtout là où nous la portons. Et surtout, nous ne sommes pas seulement affectés par les lieux où nous allons, nous les affectons aussi par notre présence. J’ai écrit un livre intitulé « Habiter le monde » dans lequel je réfléchis à ces questions.
Pourquoi de plus en plus de chercheurs africains (et du monde entier, du reste) préfèrent désormais aller aux Etats-Unis ? Qu’est-ce qui vous attire là-bas ?
Parce que c’est l’un des lieux qui offrent les meilleures conditions de recherche. C’est aussi simple que cela. Mais c’est aussi l’un des lieux de la plus grande ouverture épistémologique. On y rencontre une diversité intellectuelle, on peut y poser des questions avant-gardistes parce que le dispositif qu’ils mettent en place le permet, et surtout des moyens sont mis à votre disposition pour que vous exploriez les questions qui vous intéressent. Moi, j’amène ma recherche à Duke, ce n’est pas Duke qui m’impose le thème de ma recherche. J’ai amené un projet de travail sur les humanités africaines et un projet sur les écologies des savoirs et l’université me crée un cadre approprié, met les moyens à ma disposition pour que je puisse explorer ces questions qui sont fondamentalement liées à l’Afrique. Il y a une ouverture épistémologique, qui fait que quand vous arrivez, vous avez la latitude d’explorer des champs nouveaux. Quand on regarde la frilosité avec laquelle en France on considère les études décoloniales ou postcoloniales ou les débats d’un autre âge qui veulent les empêcher d’accéder à l’université, on comprend bien que beaucoup de gens aient envie d’aller dans des lieux les plus ouverts d’un point de vue intellectuel et épistémologique. Et il y a une forte tradition entre les penseurs postcoloniaux et les Etats-Unis. Beaucoup d’écrivains, de Maryse Condé à Dongala, Waberi, Alain Mabanckou, Ngugi Wa Thiong’O en passant par Edouard Glissant et (Foucault et Derrida en France) sont passés par là, des Indiens (Spivak, etc.), des Latino-américains (Mignolo, Arthuro Escobar), des Asiatiques. On y a aussi de grands philosophes et penseurs africains, Mudimbe, Wiredu, Appiah, Souleymane Bachir Diagne, Mamadou Diouf. Achille Mbembé y circule beaucoup. C’est comme la musique ou les autres formes d’art. Les musiciens de jazz vont dans les capitales où ils rencontrent les grandes figures de cette musique, les clubs de jazz… Picasso a quitté son Espagne natale pour venir à Montmartre à Paris, parce qu’à l’époque c’était la capitale mondiale du renouveau de la peinture. Les chercheurs dans tous les domaines, que ce soit l’architecture, la musique, la littérature, la pensée, les sciences dures vont dans les lieux de la plus haute créativité intellectuelle et artistique. Et il y a des clusters, des lieux comme ça, où, à un moment donné, vous allez confronter votre expérience à celle des autres, mettre votre pensée à l’épreuve du monde et vous l’enrichissez au contact des archives du tout-monde. Pourquoi nous les Africains serions-nous exclus de ce mouvement, alors que nous avons porté la vie aux confins du monde et marqué de notre empreinte les cultures du monde ? A une époque, à Sankoré, au Mali, les gens venaient du monde entier pour s’y former, parce que c’était un lieu d’une grande fécondité et ce sont des lieux comme ça que nous devons créer à nouveau.
LES VOISINS DU MALI INSISTENT SUR LE RETOUR DES CIVILS AU POUVOIR
Le président de la CEDEAO, Mahamadou Issoufou, a tancé les militaires pour leur refus de rentrer dans leurs casernes, à l'ouverture d'un sommet appelé à statuer sur le maintien des sanctions contre ce pays
Le chef de l'Etat nigérien, président en exercice de la Cédéao, a défendu le principe général des sanctions contre les putschistes en ouvrant les travaux de ce deuxième sommet extraordinaire virtuel des dirigeants ouest-africains, dix jours après le coup d'Etat.
Ils sont censés délibérer sur le maintien, la levée ou le renforcement de sanctions déjà prises contre leur voisin et membre de l'organisation.
"Pour un pays, le putschisme est une grave maladie.Pour en guérir, une seule ordonnance: les sanctions", a affirmé M. Issoufou à Niamey.
La junte "refuse de regagner les casernes alors que le pays est en guerre, ce qui exige, plus que jamais, que l'armée se concentre sur sa mission traditionnelle", a-t-il dénoncé en faisant référence à la propagation jihadiste.L'ennemi cherche justement "à exploiter le vide institutionnel actuel", a-t-il mis en garde.
- Blocage institutionnel -
Un groupe d'officiers a renversé le 18 août le président malien Ibrahim Boubacar Keïta, à la tête depuis 2013 de ce pays qui s'enfonce depuis des années dans la crise sécuritaire, économique et politique.
M. Keïta avait le soutien de la communauté internationale et de la Cédéao.Mais il faisait face à une contestation grandissante nourrie par l'apparente incapacité à faire face aux violences jihadistes et intercommunautaires, un profond marasme économique et social et le sentiment répandu de corruption endémique du pouvoir.
Le Mali était en situation de blocage institutionnel quand les militaires ont déposé le président, accomplissant le voeu d'un mouvement de contestation hétéroclite qui réclamait dans la rue la démission de M. Keïta depuis des législatives contestées en mars-avril.
La Cédéao réclame le retour des civils au pouvoir.Elle a différents motifs d'inquiétude tenant à la légitimité des dirigeants ouest-africains et à une stabilité sahélienne déjà mise à mal.
Lors d'un premier sommet par vidéoconférence le 20 août, elle a dénié toute légitimité aux putschistes, suspendu le Mali de ses organes de décision, ordonné la fermeture des frontières de ses Etats membres avec le Mali, et stoppé tous les flux financiers et commerciaux.
Cet embargo préoccupe les colonels nouveaux maîtres de Bamako, tant la population pauvre de ce vaste pays enclavé a un besoin vital d'échanges.
- Un an maximum -
Les militaires ont promis de restituer le pouvoir aux civils.Ils ont manifesté leur volonté de compromis auprès de la mission de médiation dépêchée par la Cédéao au Mali de samedi à lundi.Ils ont accédé à la demande de la Cédéao et ont laissé ses émissaires rencontrer le président déchu.Jeudi, veille du sommet, la junte a annoncé l'avoir libéré.
Le rétablissement de M. Keïta dans ses fonctions, exigence initiale de la Cédéao, n'est plus d'actualité.Le président en exercice de l'organisation a acté vendredi que, selon les propos que M. Keïta a tenus à la mission de médiation, il a démissionné de son plein gré.
En revanche, la transition devant ramener les civils au pouvoir, sa durée et l'identité de celui qui la dirigera partage la Cédéao et la junte.
La "transition ne saurait dépasser 12 mois", selon le rapport de la mission de la Cédéao consulté par l'AFP, alors que la junte souhaitait initialement trois ans.Elle en propose deux à présent.
Pas question non plus pour les pays ouest-africains que cette transition soit conduite par un militaire en exercice.
"Si nous pouvons considérer que la question de la libération d'IBK est résolue, il n'en est pas de même pour celle du retour à l'ordre constitutionnel qui suppose que tous les militaires regagnent les casernes", a souligné M. Issoufou.