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30 septembre 2025
PASCAL LISSOUBA EST MORT
L'ex-président qui a dirigé le Congo de 1992 à 1997, est décédé lundi à Perpignan, en France, à l'âge de 88 ans, a-t-on appris auprès de son parti, l'Union panafricaine pour la démocratie sociale.
L'ex-président Pascal Lissouba, qui a dirigé le Congo de 1992 à 1997, est décédé lundi à Perpignan, en France, à l'âge de 88 ans, a-t-on appris auprès de son parti, l'Union panafricaine pour la démocratie sociale.
"Le président Lissouba est décédé aujourd'hui des suites d'une maladie", a déclaré lundi 24 août le député Honoré Sayi, porte-parole de l'Union panafricaine pour la démocratie sociale (UPADS). Il est mort à Perpignan, dans le sud de la France.
"Avec un cœur lourd et meurtri, je vous annonce le décès ce lundi 24 août 2020 de mon père, le professeur Pascal Lissouba, ancien président de la République du Congo, à son domicile en France", a écrit sur Facebook Jérémie Lissouba, fils de l'ancien chef d'État et député congolais.
Né le 15 novembre 1931 à Tsinguidi, dans le district de Mayoko (sud-ouest du Congo), Pascal Lissouba était ingénieur agronome, titulaire d'un doctorat en sciences naturelles obtenu en France en 1958.
Il a occupé les fonctions de ministre de l'Agriculture sous le premier président du Congo indépendant, Fulbert Youlou (1963-1965), avant de devenir Premier ministre d'Alphonse Massamba Débat en 1965-1966.
Condamné pour "haute trahison"
Fondateur de l'UPADS en 1991, Pascal Lissouba est élu président de la République en 1992 lors du premier scrutin pluraliste dans ce petit pays d'Afrique centrale.
un récit de boubacar boris diop
BONNE NUIT, PRINCE KOROMA (3/4)
EXCLUSIF SENEPLUS - À Djinkoré, nous ne nous mêlons pas des affaires des grands du royaume, nous leur obéissons sans même prétendre savoir qui ils sont, où ils vivent et comment ils s’appellent
Au moment de payer, Bithege lui a remis un billet de cinq mille francs. Casimir Olé-Olé a essayé de le rouler en faisant semblant de ne plus avoir de menue monnaie. En une fraction de seconde, le fonctionnaire est entré dans une colère froide, terrifiante mais quasi imperceptible. Il a tout fait pour le cacher, mais j’ai décelé chez lui une violence subite et incontrôlée ; j’ai bien vu qu’il était prêt à faire du scandale et peut-être même à frapper Casimir Olé-Olé. La main tendue, il a insisté d’un air buté pour recevoir son dû. J’ai levé la tête vers le vieux marchand et quand nos yeux se sont rencontrés, j’ai compris que nous venions de communier dans une haine silencieuse à l’égard du nouveau venu. Il m’a semblé que Bithege s’en était rendu compte, mais qu’il s’en moquait bien. Lorsque nous nous sommes éloignés, il a observé :
– C’est un numéro, ce Casimir Olé-Olé.
Le marchand de fruits l’avait intrigué et il comptait sur moi pour mieux le cerner. J’ai éprouvé une mesquine satisfaction à ne pas lui rendre ce service. J’ignorais alors que l’étranger avait mis en place, avant même de venir à Djinkoré, son petit réseau d’informateurs. Il avait dû distribuer de gros billets de banque, car il s’était fait des amis jusqu’au Palais royal où, soit dit en passant, je n’avais jamais osé mettre les pieds. L’expression ‘’palais royal’’ fera peut-être sourire, mais je n’en connais pas d’autre pour désigner la maison du Roi, même si le souverain en question, alcoolique et extravagant, n’a d’autre souci que de faire voter ses sujets à toutes les élections nationales pour le candidat le plus généreux en tonnes de riz et billets de banque.
S’il est un jour que je n’oublierai jamais, c’est celui où j’ai entendu Christian Bithege prononcer pour la première fois le nom du Prince Koroma. Ce n’était pas un crime de prononcer le nom du Prince, mais ce n’était pas non plus très prudent. À Djinkoré, nous ne nous mêlons pas des affaires des grands du royaume, nous leur obéissons sans même prétendre savoir qui ils sont, où ils vivent et comment ils s’appellent. J’ai donc conseillé à Bithege de faire attention. Au lieu de se taire, il a voulu que je lui donne mon avis sur les chances du Prince Koroma de devenir Roi de Djinkoré.
– Les Deux Ancêtres n’ont pas encore parlé, ai-je répondu prudemment.
Il a déclaré, de l’air de celui qui n’était pas dupe :
– Allons ! Allons ! On sait toujours ces choses-là à l’avance.
– Eh bien, moi, je n’en sais rien, Monsieur Bithege.
J’étais de plus en plus excédé par ses manières arrogantes et je tenais à le lui faire savoir. Ça ne l’a pas empêché d’insister :
– Vous êtes ici depuis quinze ans, vous connaissez bien le Prince Koroma.
– Je vous l’ai déjà dit, votre comportement nous met en danger.
– Je dois tout savoir, vous comprenez ça ?
Il avait élevé la voix sans paraître particulièrement fâché.
– Je ne sais rien du Prince Koroma, ai-je dit sur un ton ferme. Parlons d’autre chose s’il vous plaît.
Mon mensonge a paru l’amuser.
– Eh bien, je vais vous le présenter, a-t-il lancé avec une désinvolture étudiée.
– Me présenter qui…?
– Le Prince Koroma.
– Ah oui ?
J’aurais bien voulu pouvoir me montrer d’une mordante ironie, mais mon cœur battait très fort. Il fallait que ce type fût complètement cinglé pour se comporter avec une telle légèreté.
– J’ai eu plusieurs discussions avec le Prince, a-t-il dit. Il a promis de venir me rendre visite ici.
Je me suis fait presque menaçant :
– Je n’aime pas qu’on se moque de moi, Monsieur.
Nous étions ensemble depuis quelques jours et c’était la deuxième fois que je l’appelais «monsieur ». Il m’a alors parlé avec gravité, presque comme à un ami :
– Je ne me moque pas de vous. J’ai rencontré le Prince à deux reprises. Parler avec les gens importants fait partie de mon travail. Il faut que vous le sachiez, je ne suis pas comme ceux qui venaient à Djinkoré avant moi.
Le message était sans ambiguïté : Christian Bithege me demandait de choisir mon camp. Après tout, j’étais au service de l’État, moi aussi. Peut-être touché par mon désarroi, il m’a confié sur le même ton bienveillant :
– Je vais avoir une troisième rencontre avec le Prince Koroma et il est important que personne ne nous voie ensemble cette fois-ci. Il viendra discrètement chez vous, mais il faut que cela reste entre nous…
À partir de cet instant, je me suis senti à la merci de l’étranger. Nous avons causé de tout et de rien pendant deux ou trois heures et, sans le vouloir tout à fait et sans avoir non plus la force de m’arrêter, je lui ai dit tout ce qu’il voulait savoir sur le Prince Koroma. Il m’a posé des questions très précises et j’ai bien vu à plusieurs reprises que nous étions en train de franchir la frontière qui sépare une conversation normale d’un interrogatoire en bonne et due forme. Au fil des minutes, il m’est apparu très nettement que ce qui se jouait, c’était le destin politique du Prince Koroma. Christian Bithege voulait que le Prince remplace son père quasi centenaire, mais l’apparente instabilité mentale de Koroma le faisait hésiter.
– Ce Prince Koroma, est-il vraiment… capable ?
Cette question était revenue plusieurs fois dans la conversation, de façon ouverte ou insidieuse. Elle signifiait : il saura certes ce qu’il nous doit, mais sera-t-il assez fort pour faire face aux intrigues de ses ennemis ? J’aimais le Prince Koroma et, pour plaider sa cause, je me suis décidé à révéler à Bithege une petite anecdote personnelle. Je lui ai dit que le Prince était déjà venu me voir à la maison. Il s’est aussitôt animé :
– Ah oui… ? Comment cela ?
Je ne l’avais pas encore vu aussi peu maître de lui.
– Voici comment c’est arrivé, ai-je répondu. Une nuit, on a frappé à ma porte vers trois heures du matin. J’ai ouvert. C’était le Prince Koroma. Il m’amenait le fils d’un des gardiens du Palais. Le gamin de cinq ou six ans avait eu une violente attaque de palu…
– Un gamin de cinq ou six ans… a-t-il répété sans me quitter des yeux. Ensuite ?
– J’ai fait une piqûre à l’enfant.
Bithege a eu un geste d’impatience. « Il doit penser que nous sommes tous deux de minables amateurs, le Prince Koroma et moi», me suis-je dit. Mon histoire ne l’intéressait pas et peut-être même la trouvait-elle ridicule.
– Il a très bon cœur, le Prince, a-t-il déclaré. Mais n’êtes-vous pas en train de me parler d’un grand rêveur ? N’est-il pas de ces jeunes idéalistes qui s’imaginent qu’on peut changer les hommes ?
Je me suis senti au pied du mur. Au fait, qui était-il, ce haut fonctionnaire venu de Mezzara ? Il ne m’avait pas encore dit en quoi consistait exactement son travail là-bas, dans les bureaux de la capitale, mais je commençais à avoir ma petite idée là-dessus. J’avais sans doute affaire à un haut responsable de la police politique. J’étais en tout cas bien obligé d’admettre qu’il avait percé à jour le Prince Koroma. Ce dernier n’était pas à sa place dans la maison royale de Djinkoré, déchirée par de sanglantes rivalités. Avec son air un peu mélancolique, le Prince, d’une bonté d’âme foncière, était comme un ange perdu dans cet univers impitoyable. Tout cela, Bithege le savait. Il en cherchait simplement la confirmation. J’ai souri intérieurement en songeant que la seule façon d’aider le prince Koroma, c’était de dire à Bithege : «Ce type, tout à fait entre nous, c’est un salaud de la pire espèce, il est prêt à tout pour arriver à ses fins et vous pouvez me croire, sa main ne tremblera pas au moment de s’abattre sur ses ennemis !»
Je n’ai pas pu m’y résoudre.
– À Djinkoré, les gens aiment le prince Koroma, ai-je au contraire martelé en désespoir de cause.
– Pourquoi ?
– Je ne sais pas trop.
C’était une réponse absurde et il me l’a fait remarquer à sa façon sournoise :
– Il y a bien une raison… En quels termes parle-t-on le plus souvent de lui ?
– On dit ici qu’il respecte la religion de ses ancêtres. Voilà pourquoi il est si aimé par les habitants de Djinkoré.
– Il respecte la religion de ses ancêtres…
C’était comme si Bithege prenait mentalement note de cette information.
J’ai renchéri :
– C’est un jeune homme qui ignore le doute. Bien des membres de la famille royale jouent avec… avec…
J’avais du mal à trouver mes mots et il m’a encouragé à continuer :
– Allez-y, je vous suis très bien...
– J’admire sa force.
– Sa force ? Que voulez-vous dire ?
– Vous savez, quand on vous raconte que vos ancêtres morts depuis trente siècles reviennent tous les sept ans sur terre pour un brin de causette nocturne, vous avez beau y croire, il y a quand même des jours où vous vous demandez si tout cela est bien vrai.
– Je vois ce que vous voulez dire, a observé l’étranger avec un sourire ambigu.
– Eh bien, voilà, il faut être fort pour ne jamais douter. Vous avez des petits malins qui pensent que toutes ces histoires au sujet des Deux Ancêtres sont des blagues puériles, mais qui en profitent pour dominer leurs semblables et s’enrichir. Et puis vous avez des milliers de braves gens qui se tiennent, eux, dans la pleine lumière de l’espérance. Le Prince Koroma est de ceux qui n’ont jamais douté. Il est réellement persuadé que les Deux Ancêtres quittent leurs tombeaux pour venir se promener pendant une nuit dans les rues de Djinkoré.
– On peut aussi appeler cela de la naïveté, vous ne croyez pas ?
Son visage est resté impassible et je n’ai pas réussi à savoir s’il se félicitait ou non de la candeur du Prince.
J’ai répondu, après un moment de réflexion :
– C’est possible. Peut-être aussi que cela prouve surtout sa force morale.
Il a hoché lentement la tête, songeur :
– Mais tout de même, à quoi sert la force morale sans la force tout court ?
C’était difficile de savoir quoi répliquer à cela.
Il a ajouté :
– Pour le reste, je suis bien d’accord avec vous, des centaines de millions de gens sur la terre se débrouillent très bien avec des fables complètement délirantes. C’est ce que Casimir Olé-Olé a voulu nous dire hier... Accepter d’être les seuls à ne jamais avoir raison, ça n’a aucun sens, c’est nous résigner à une lente mort spirituelle. Chimères pour chimères, pourquoi ne pas nous fier à celles de nos ancêtres ?
Ce qu’il venait de dire là, c’était un bon point pour le Prince Koroma. J’ai enfoncé le clou :
– Le Prince Koroma fera de bonnes choses pour les habitants de Djinkoré. Le moment est peut-être venu pour ce royaume d’avoir à sa tête un être d’une aussi grande pureté d’âme.
MAURITANIE, ABDEL AZIZ VOIT SON PASSEPORT CONFISQUÉ
L'ancien président mauritanien, soupçonné de mauvaise gestion et de détournements, a retrouvé la liberté dans la nuit de dimanche à lundi, sans être inculpé mais avec l'interdiction de quitter Nouakchott, après une semaine d'interrogatoire par la police
L'ancien chef de l'Etat, au pouvoir de 2008 à 2019 a été remis en liberté vers 01H30 du matin (GMT et locales), a déclaré à l'AFP l'avocat, Taghioullah Aïda, qui était à ses côtés.
"Il n'a pas été inculpé mais son passeport, qui lui a été pris lors de son arrestation ne lui a pas été rendu", a-t-il ajouté.
"Il a l'interdiction de quitter Nouakchott", a également affirmé l'avocat, en précisant qu'il n'y a "pas d'autre condition que celle liée à la restriction de déplacement".
M. Aziz s'était rendu le 17 août au siège de la Direction générale de la sûreté nationale (DGSN), sur convocation de la police, où il a été interrogé jusqu'à sa remise en liberté une semaine plus tard.
M. Aziz doit répondre à de "fortes présomptions de mauvaise gouvernance et de détournements de biens publics", avait indiqué la semaine dernière une source sécuritaire.
Le président Aziz avait pris le pouvoir dans ce pays pauvre d'Afrique de l'Ouest de 4,5 millions d'habitants par un coup d'Etat militaire en 2008, puis remporté la présidentielle en 2009, suivie d'une autre en 2014.
L'actuel président, Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani, qui lui a succédé en août 2019, fut son chef de cabinet et ministre de la Défense.M. Aziz a depuis lors été marginalisé par le nouveau pouvoir.
Une commission parlementaire, chargée en janvier de faire la lumière sur plusieurs dossiers pendant ses années à la tête de l'Etat, a transmis début août son rapport à la justice mauritanienne.
Le nouveau chef de l'Etat a dans la foulée procédé à un remaniement ministériel, écartant quatre ministres, lié à l'ancien pouvoir, dont le chef du gouvernement Ismaïl Ould Bedda Ould Cheikh Sidiya, afin de leur "laisser le temps dont ils auront besoin pour prouver leur innocence", selon le secrétaire général de la présidence, Adama Bocar Soko.
Parmi les dossiers étudiés par la commission parlementaire figurent la gestion des revenus pétroliers, la vente de domaines de l'État à Nouakchott, la liquidation d'une société publique qui assurait l'approvisionnement en denrées alimentaires ou encore les activités d'une société chinoise de pêche, Pully Hong Dong, selon des sources parlementaires.
L'ex-président Aziz avait ignoré début juillet une convocation de la commission parlementaire.Les députés ont ensuite voté fin juillet une loi instituant une Haute cour de justice, compétente pour juger le chef de l'Etat et les ministres en cas de "haute trahison".
NDAYANE A UN TRAIN DE RETARD
Le port du futur, censé désengorger le Pad et donner au Sénégal un gros avantage dans la desserte des villes du Mali, continue de prendre du retard malgré les injonctions du chef de l’Etat à son gouvernement
Le port du futur, censé désengorger le Pad et donner au Sénégal un gros avantage dans la desserte des villes du Mali, continue de prendre du retard malgré les injonctions du chef de l’Etat à son gouvernement. Au moment où les autorités sénégalaises rallongent les négociations avec Dp world, les ports de Lomé et de Tema se mettent à niveau pour leur arracher des parts du marché des marchandises maliennes.
Le mercredi 12 août dernier, le chef de l’Etat Macky Sall a demandé, selon les termes du communiqué du Conseil des ministres de ce jour-là, «au gouvernement de finaliser les négociations relatives à la réalisation du nouveau port en eaux profondes de Ndayane». Ce port qui, à l’époque où sa réalisation avait été négociée avec Dubaï port world (Dp world), qui venait de décrocher la concession du terminal à containers du Port autonome de Dakar (Pad), était surnommé «Port du futur», devait coûter l’équivalent de 25 milliards de francs Cfa, et voir le jour trois ans plus tard.
A ce jour, le premier coup de pioche n’a pas encore été donné et les choses en sont encore au niveau des négociations. Ces dernières en sont déjà à leur cinquième round, sans que les positions ne s’accordent, entre les parties sénégalaise et émiratie. On sait déjà que d’avenant à avenant, le montant initial de 25 milliards a été depuis longtemps dépassé, et que l’on parle maintenant d’un coût de 1 000 milliards de francs Cfa. Et l’on n’a pas encore fini de négocier… Il n’est pas vraiment besoin ici de chercher à comprendre pourquoi les choses traînent ainsi et qui est réellement responsable de cette situation. Les enjeux sont bien plus importants que cela. Surtout en ce moment où l’actualité dans la sous-région est captée par la situation au Mali. Or ce port a pour destination première de desservir le Mali dont il devrait être le premier et le plus important débouché maritime.
Le gouvernement du Sénégal n’a pas voulu suivre les dirigeants de Côte d’Ivoire et de Guinée dans leurs positions jusqu’au-boutistes contre le coup d’Etat au Mali, parce qu’il entend également préserver ses intérêts. En cas d’embargo total sur le Mali, le Sénégal souffrirait tout autant que les populations de ce pays frère, car une très grande partie des marchandises qui débarquent au Pad sont redirigées vers Bamako par le train, mais plus essentiellement par la route.
Dp world Sénégal, par exemple, gère 63% des marchandises destinées au Mali. Cela est très important, mais il faut savoir qu’au moment où cette compagnie obtenait la concession du terminal à containers, la part de marché de Dakar sur le Mali était de plus de 80%. Si le Sénégal a vu sa part baisser, c’est justement parce que le pays ne parvient toujours pas à se mettre à niveau. Il y a deux ans, en prenant fonction à la tête du Pad, Boubacar Sadikh Bèye a fait une sortie pour plaider la réhabilitation et la mise en œuvre rapide du chemin de fer Dakar-Bamako qui devait justement, dans son entendement, venir en complément du port de Ndayane, pour desservir le Mali voisin, et surtout soulager fortement les routes sénégalaises, dont beaucoup supportent difficilement la charge des camions de marchandises maliens.
Au cours de sa sortie face à des journalistes, M. Bèye prévoyait également que le chantier de Ndayane devait être terminé 3 ans après. Cet élan d’optimisme a eu du mal à se concrétiser sur le terrain. Or au moment où on ergote à Dakar, les ports de Lomé au Togo, de Tema au Ghana, et même de San Pedro en Côte d’Ivoire se mettent à niveau pour prendre leur part du trafic destiné au Mali. Le port de Lomé, en particulier, a subi des aménagements pour accueillir des porte containers de 16 mille Evp.
Mais Ndayane est prévu pour accueillir des porte-containers beaucoup plus grands, jusqu’à 20 mille Evp, les plus gros du monde à l’heure actuelle. A une période où les pays ainsi que les armateurs cherchent à réduire au possible les charges liées au transport, en embarquant le plus de marchandises possibles, cette capacité serait un gros avantage… si elle était déjà mise en œuvre, ou même si on pouvait l’envisager pour une période donnée.
Mais aujourd’hui, le port de Ndayane, malgré tout le bruit qui se fait autour, commence à ressembler à une Arlésienne. Ainsi d’ailleurs que le chemin de fer cher à M. Bèye. Et les navires destinés au Mali continueront, à ce rythme, de prendre de plus en plus la direction des ports concurrents de Dakar. Et à la fin, malgré ses jolis ports, c’est le Sénégal qui risquera d’être asphyxié
Par Kadialy GASSAMA
EXODE RURAL, BIDONVILLE ET INONDATION DANS LA PRESQU’ILE DU CAP-VERT, UNE MALFORMATION CONGENITALE
La problématique tristement célèbre des inondations récurrentes à Dakar et environs reste intimement liée au phénomène de l’exode rural
La problématique tristement célèbre des inondations récurrentes à Dakar et environs reste intimement liée au phénomène de l’exode rural. En effet, la presqu’île du Cap-Vert a subi au cours des cinquante dernières années (1970) un déplacement massif et une sédentarisation de populations provenant de tous les coins de l’intérieur du pays, en raison d’attaches économiques qui y sont constituées et solidifiées.
A pluviométrie normale à excédentaire, la presqu’île du Cap-Vert ne souffrait pas d’inondations, plus précisément, dans la période durant laquelle existaient la mare naturelle de Thiaroye dont le lit couvrait toute l’étendue de Thiaroye jusqu’aux abords de Mbao, le marécage de la zone des puits (Patte d’Oie, Maristes, Foire, Grand-Yoff, Dalifort jusqu’à l’océan), ainsi que la mangrove des périmètres du technopôle de Dakar qui couvrait une bonne partie de Pikine. Il aura fallu, au cours de ces cinquante dernières années, que les zones naturelles de captage des eaux de pluie soient occupées pour de l’habitat social, qu’il suffit de quelques millimètres d’eau pour que Dakar patauge.
Même en saison sèche, dans nombre d’endroits sur la presqu’île du Cap-Vert (Pikine, Thiaroye, Yeumbeul, Patte d’Oie, Maristes, Foire, Grand-Yoff, Dalifort), les eaux stagnantes et l’humidité ornent en permanence le décor de quartiers populeux, à cause des nappes affleurâtes. C’est dire, en substance, que des raisons économiques furent à la base des déplacements massifs de populations à partir de la sécheresse des années soixante dix, de l’intérieur du pays vers une presqu’île non extensible, dont le relief et le biotope s’accouplent naturellement de mangroves qui sont des milieux aquatiques de captage d’eau de pluie, ces mêmes populations fuyant le calvaire des terres devenues arides du Cayor, du Baol, du Ndiambour ou, à la limite, de certaines parties basses du Sine et du Saloum.
L’exode rural est le cancer du Sénégal, au sens où il anéantit la valorisation locale des potentialités agricoles et industrielles des régions intérieures. Cette migration a induit la formation d’une économie informelle hypertrophiée dans la région de Dakar, s’appuyant essentiellement sur le commerce de produits importés ou recyclés ou de petits emplois, non pourvoyeurs de valeur ajoutée, cette masse critique de travailleurs constituant l’armée des marchands ambulants et de commerçants occupant la voie publique. Le secteur informel commercial devient un handicap majeur pour la qualité de la vie. Non seulement l’existence des petits marchés presqu’à travers toutes les rues de la capitale entrave la circulation, mais cette situation contribue aussi à rendre la capitale plus insalubre qu’elle ne l‘a été avant.
D’un côté, l’on retrouve les mécaniciens qui envahissent certaines rues de la capitale pour mener leurs activités de garage ou du commerce de démolissage des voitures. A chaque jour nouveau, de nouveaux marchés naissent dans les différentes artères au niveau de tous les coins et recoins de la capitale, causant des embouteillages montres.
A ces déséquilibres dans la division territoriale du travail s’ajoutent d’autres déséquilibres au niveau de la répartition géographique des populations. La démultiplication de fortes concentrations humaines à Dakar et environs a conduit à l’érection de quartiers spontanés, anarchiques et irréguliers, générant la récurrence du phénomène des inondations, l’insécurité galopante, les difficultés de transport, le coût exorbitant des loyers, la spéculation foncière, etc. Le constat amer est que 80% des activités économiques du Sénégal et 50% de la population sont concentrés dans 0,25% du territoire national. Une telle disproportion constitue un obstacle dirimant pour un pays qui se voudrait émergent. Bien entendu, à problème structurel solution structurelle. Il s’agira naturellement de prendre le taureau par les cornes en inversant les tendances défavorables de manière à faire retrouver les équilibres nécessaires entre l’occupation des sols et la démographie et, par-là même, réduire les écarts de développement entre la presqu’île du Cap-Vert et les régions intérieures.
La réduction des écarts de développement entre la région de Dakar et l’hinterland est non seulement une question d’équité territoriale et de justice sociale, mais aussi constitue le facteur essentiel d’entraînement pour le progrès économique véritable, durable et harmonieux. Pour la stratégie de demain déclinée à travers le Pse, cette donnée est bien prise en compte dans les objectifs de transformation économique du Sénégal. Cependant, il y a lieu d’admettre que l’exode rural qui s’est durablement installé dans la presqu’île du Cap-Vert ne peut être atténué sensiblement par un coup de baguette magique, loin s’en faut ; il faudrait plusieurs années pour réaliser l’inversion des tendances défavorables en s’attelant dès maintenant à la création de pôles économiques dans les régions intérieures, afin de constituer des offres valables pour attirer les populations résidentes de Dakar et environs et de sédentariser les autochtones restés sur place dans les terroirs.
Les migrations consécutives au sous-emploi des populations locales sont allées jusqu’à dépasser le cadre de nos frontières pour s’internationaliser, aggravant davantage le dépeuplement des régions intérieures, au point que la diaspora soit devenue la mamelle financière des régions intérieures du Sénégal. Le développement des régions intérieures du Sénégal permettra ainsi de lutter efficacement contre l’émigration clandestine et ses lots quotidiens de tragédies humaines. Si nous sommes d’accord qu’il s’impose d’organiser des déplacements massifs de populations vers l’intérieur du pays, il ne faudrait surtout pas reprendre les mêmes erreurs du passé qui con sistaient à recaser des populations dans d’autres sites inondables comme Jaakhaye dans la presqu’île du Cap-Vert, une manière de différer les problématiques. L’inversion de la tendance à l’exode rural est une question fondamentale liée aux options stratégiques du Sénégal pour un développement harmonieux et équilibré par la création de pôles économiques régionaux, au moyen du développement agricole et les industries de transformation alimentaire.
La hantise des inondations et la peur de la vindicte populaire ne doivent pas nous faire sortir de l’orientation générale en gardant bien le cap au milieu des tempêtes, de ne pas nous précipiter vers des solutions hâtives et non viables comme Jaakhaye ou le relogement dans d’autres endroits inondables de la presqu’île du Cap-Vert dans des zones à vocation agro-pastorale, forestière ou touristique, dans les départements de Rufisque, de Thiès ou de Mbour. Le faire, c’est déplacer la problématique des inondations de Dakar vers d’autres endroits qui, non seulement ne répondent pas aux conditions préalables requises pour l’installation de colonies de peuplement, les mêmes que Dakar connaît actuellement avec l’exode rural, mais également détruit la vocation naturelle de ces terroirs en tuant les activités économiques à forte valeur ajoutée qui s’y déroulaient antérieurement. Déplacer les populations à proximité de Dakar en tuant des activités économiques, telles que le maraîchage, l’horticulture, la sylviculture, le pastoralisme revient à procéder à la formation d’habitat non viable, à étendre la banlieue de Dakar dans la zone rurale du département de Rufisque (qui malheureusement disparaît sous la poussée de l’habitat) ainsi que les zones forestières, touristiques et agro-pastorales des départements de Thiès et de Mbour.
En effet, les zones agro-écologiques des Niayes, à partir de Rufisque en passant par Diam - niadio, Sangalkam, Ba yakh, Cayar, Niaga, Sébikotane et Pout, vont bientôt disparaître, anéantissant du coup notre potentiel agro-pastoral et touristique, ainsi que les formations forestières de Thiès jusqu’au abords de la Petite-Côte.
A ce titre, un code d’utilisation des terres suivant les zones agro-écologiques, devant le changement climatique et la menace du péril alimentaire mondial et des maladies infectieuses, devient une urgence afin de préserver les équilibres nécessaires à la biodiversité et de permettre le développement agricole, forestier et touristique de nos terroirs. Si des mouvements massifs de populations devraient avoir lieu, ils ne devraient surtout pas s’effectuer vers des zones situées dans la presqu’île du Cap-Vert, notamment dans les départements de Rufisque ou vers les proximités des départements de Thiès et de Mbour.
Des villes comme Rufisque, ancienne capitale économique du Sénégal, Thiès et Mbour sont bien configurées et la partie rurale et forestière de ces villes génératrices d’activités agro-pastorales créatrices de revenus, sont en train de disparaître sous la poussée d’un habitat in contrôlé, comme le fut la disparition des mangroves à Dakar, générant le triste spectacle de la bidonvilisation et des inondations récurrentes dans notre capitale.
Au demeurant, la commune de ville de Rufisque est en train d’étouffer sous la pression de l’habitat dans l’arrière-ville, provoquant l’amenuisement et l’insuffisance d’espaces publics et d’équipements collectifs, en plus de l’agression marine particulièrement vivace sur le littoral. Si nous ne faisons pas attention, l’installation de colonies de peuplement dans la zone rurale du département de Rufisque, de Thiès et de Mbour sera synonyme de rupture des équilibres dans l’aménagement de l’espace et de la biodiversité et de cessation d’activités créatrices de revenus, allant du maraîchage, de l’aviculture, de l’horticulture, du pastoralisme, du conditionnement, de la conservation et de la transformation industrielle, au point que si nous y prenons garde, le Sénégal va être un importateur net de produits maraîchers, horticoles, avicoles et laitiers, en plus de l’importation d’importantes quantités de bétail, contribuant ainsi au creusement du déficit de notre balance commerciale.
Les multiples tentatives de remembrement des zones protégées pour de l’habitat provoquent non seulement une aggravation de la pauvreté et des inégalités par l’élimination de facteurs de production, mais vont à l’encontre des préoccupations relatives à la protection de l’environnement, du développement de l’agriculture et de l’emploi dans des secteurs à travail intensif. La production de lait et de viande est devenue presque nulle dans cette zone anciennement consacrée au pastoralisme, à l’agriculture et la transformation industrielle des produits alimentaires qui faisaient naguère la fierté des producteurs et des consommateurs.
La question de l’aménagement du territoire national en parfaite symbiose avec la stratégie pour demain de développement économique et social contenu dans le Pse doit s’appuyer principalement sur la création de pôles régionaux pour la transformation économique dans la quête du mieux être des Sénégalais
Kadialy GASSAMA
Economiste
Rue Faidherbe X Pierre Verger Rufisque
LA REUNION DE LA CRBS DISPERSEE PAR LA POLICE
Après Dakar, le conflit entre la Fédération de basket et la Convergence pour la renaissance du basket sénégalais se décentralise. Samedi, la Crbs était à Louga pour une réunion qui a été interdite par le préfet, sur demande du président de la Ligue région
Après Dakar, le conflit entre la Fédération de basket et la Convergence pour la renaissance du basket sénégalais se décentralise. Samedi, la Crbs était à Louga pour une réunion qui a été interdite par le préfet, sur demande du président de la Ligue régionale.
La réunion de la Convergence pour la renaissance du basketball sénégalais (Crbs), prévue samedi à Louga, n’a finalement pas eu lieu. Elle a été interdite par la Ligue de basket de Louga. La Crbs, récemment mise sur pied, est composée de présidents de club ou encore d’anciens basketteurs. Elle se définit comme «une structure de contribution, de veille et d’alerte face aux dérives et manquements répétés de la Fédération sénégalaise de basket».
Joint par téléphone, le président de la Ligue de Louga donne les raisons de l’interdiction. «Je les avais personnellement avertis, mais ils n’ont pas voulu comprendre et ont tenu à se réunir à Louga. Ce qu’en tant président de la Ligue régionale je ne pouvais cautionner», a confié le président Allé Fall. Avant de préciser que «la réunion a été interdite la veille par le préfet de Louga. Et quand on a constaté qu’ils étaient en train de se réunir dans la rue, devant la maison du président d’Excellence basket club, j’ai saisi la police qui est finalement intervenue pour interrompre la réunion».
Mieux encore, ajoute t-il, «je leur avais dit que la Ligue de Louga se démarque de cette réunion et prendra les dispositions en cas de rassemblement au sein de la ville». Confirmant avoir pu noter la présence de certains présidents de club, mais aussi d’anciens basketteurs, le président de la Ligue de Louga n’écarte pas de saisir la Fédération pour prendre les dispositions idoines. «Il faut comprendre qu’ils ont enfreint l’article 71 du règlement puisque la Fédération avait sorti une circulaire pour interdire toute organisation de nature à saper son honorabilité. On va se réunir et le dossier sera confié à la Com mission juridique qui tranchera sur la question, avant d’être transmis à la Fédération», a informé M. Fall. Pathé Keïta : «Tout s’est déroulé normalement, c’est un mensonge»
Du côté de la Crbs, on dément une intervention de la police. Selon Mamadou Pathé Keïta, président de Guédiawaye basket académie, «tout s’est déroulé normalement. C’est un mensonge. On s’est bel et bien réuni chez le président (Excellence basket club)». Au contraire, poursuit Pathé Keïta, «cela a été une réussite. C’est au-delà même de nos attentes. On a pu faire des ateliers, un diagnostic des problèmes du basket et on va sortir un communiqué en ce sens». Avant d’ajouter : «On savait qu’ils allaient tout faire pour qu’on ne puisse pas se réunir. C’est pour cette raison qu’on a demandé à beaucoup de nos membres de ne pas se déplacer.»
DAROU KHOUDOSS ASPHYXIEE
L’exploitation des carrières de silex à Darou Khoudoss a un impact environnemental réel sur les activités agricoles des populations de cette commune, asphyxiée par les activités minières
L’exploitation des carrières de silex à Darou Khoudoss a un impact environnemental réel sur les activités agricoles des populations de cette commune, asphyxiée par les activités minières.
La région de Thiès est une grosse mine où la concurrence est rude. «Nous assistons présentement à une prolifération de carrières. Et il y a encore 5 ou 6 personnes qui détiennent des licences, mais qui ont des problèmes de site. Parce que déjà la concession minière des Industries chimiques du Sénégal (Ics) est pleine. Il va falloir donc délocaliser, c’est-à-dire sortir de la concession minière et entrer dans le domaine national. Ce qui constitue un danger que les populations riveraines n’accepteront pas.»
L’alerte est du président de la Commission environnement de la commune de Darou Khoudoss, Arona Thioune. Il s’exprimait lors de l’atelier de recherche-action sur les indicateurs pertinents du développement durable dans le département de Tivaouane. Le conseiller municipal explique : «Avec la diminution des réserves du basalte, l’alternative aujourd’hui semble être le silex. Et ce sont les Industries chimiques du Sénégal (Ics) qui octroient les sites d’exploitation de ce silex parce qu’ils se trouvent dans leur concession minière.
Les Ics exploitent le phosphate qui se trouve dans le sous-sol. Et quand on exploite ce minerai brut, il est accompagné de grosses pierres que l’on appelle silex. La roche est donc un déchet qui appartient aux Ics. C’est pourquoi dans leur exploitation ils ont des redevances de 1 500 francs Cfa sur le m3 brut transporté. Ce qui équivaut à près de 30 millions de francs Cfa par mois». Et donc, poursuit M. Thioune, «si une entreprise est intéressée pour avoir une carrière, elle va voir les Ics pour avoir un contrat d’exploitation de concassage de béton.
Après ce contrat, elle va au niveau de la direction des Mines et de la géologie, un démembrement du ministère des Mines, pour avoir un arrêté d’exploitation. Le ministre approuve le contrat et leur fait un arrêté ministériel pour l’exploitation des carrières que l’on appelle petite mine dans le Code minier. Quand l’exploitant retourne sur le site, les Ics lui trouvent de l’espace où s’installer».
Une situation qui a installé la peur dans la commune de Darou Khoudoss, selon l’élu qui s’alarme : «C’est un danger qui nous guette parce que le peu de carrières qu’il y a, une quinzaine, il y a déjà une forte pollution, car qui dit exploitation de silex dit poussière à cause des machines à concasser la pierre. Et les carrières jouxtent les périmètres maraichers.» Et les conséquences sont déjà visibles : «Il y a une forte dégradation du sol cultivable.» Il explique : «Cette année la production de mangues de même que celle maraîchère ont fortement diminué. Certains paysans disent que c’est à cause des carrières parce que la poussière freine le développement des cultures.» Une situation qui, selon le président de la Commission environnement de la commune de Darou Khoudoss, a poussé certains paysans à vendre leurs champs. «Il y a d’autres paysans qui m’ont dit qu’ils vont hypothéquer leur vie si éventuellement les Ics décident de mettre des carrières au-dessus de leur installation.»
Un tableau sombre noircit encore par la navette des camions. «Plus de 200 camions ravitaillent Dakar, Diamniadio, Touba, Saint-Louis, Louga…partout au Sénégal. Et même dans la sous-région on cherche du béton à Darou Khoudoss parce qu’il y a plus d’une dizaine de carrières qui y sont exploitées par des Turcs, des Indiens, mais surtout des Chinois qui y disposent trois carrières… Alors que la commune a un réel problème d’accès et Mboro n’a qu’une seule dorsale.» Ce qui, à ses yeux, «est extrêmement grave». Il évoque aussi «l’absence de retombées financières pour la collectivité territoriale qui abrite les carrières.
Les exploitants payent leurs impôts à Thiès et Dakar, alors qu’ils font des chiffres d’affaires de 10 à 15 millions de francs Cfa de vente par jour». Il regrette par contre qu’«il n’y ait pas de jeunes qui travaillent dans les carrières». Une source proche des Ics indique que les bénéficiaires de contrats de silex sont majoritairement des Sénégalais. «Ce sont des compatriotes qui font des affaires à travers le silex et qui méritent d’être soutenus. Ils créent des emplois et procurent des revenus à des Sénégalais», annonce-t-elle.
MODE D’EMPLOI DE L'IGAJ
L’Inspection générale de l’administration de la justice (Igaj) est un instrument fondamental pour contrôler le travail des magistrats
L’Inspection générale de l’administration de la justice (Igaj) est un instrument fondamental pour contrôler le travail des magistrats. Dirigée par Cheikh Tidiane Lam, nommé par décret, l’Igaj va mener l’enquête sur ce qui est convenu d’appeler l’affaire Yaya Amadou DiaOusmane Kane dont le conflit les opposant est devenu public.
Dans le cadre de leurs missions, l’Inspecteur général, son adjoint et les inspecteurs de l’Administration de la justice «peuvent convoquer et entendre toute personne, y compris tout magistrat, tout officier ministériel, tout auxiliaire de justice et tout agent du personnel de justice, et se faire communiquer tout document», selon l’article 7 de la loi 98-23 du 26 mars 1998 instituant l’Inspection générale de l’administration de la justice.
L’Inspecteur général peut ainsi entreprendre toute investigation portant sur le fonctionnement des juridictions, organismes ou services dépendant du ministère de la Justice. Et son pouvoir de contrôle porte sur l’organisation des services, les méthodes et la manière de servir des personnels, la qualité et le rendement des services, le respect des prescriptions légales et réglementaires, le rythme de l’Administration de la justice, la conduite et la tenue des magistrats et du personnel de justice. Son adjoint ainsi que les autres inspecteurs jouissent des mêmes prérogatives.
Bref, l’Ins ecteur général de l’administration de la justice est investi d’un pouvoir général d’investigation, de vérification et de contrôle très large
par Madiambal Diagne
CES JUGES QUI SE MOQUENT DE LA JUSTICE
Si nos juges, du fait de rivalités personnelles, de luttes d’influence ou de conflits d’une toute autre nature ne cessent de s’empoigner et de se fusiller, c’est la crédibilité d’un pan majeur de notre République qui perd au change
Ces derniers jours, il nous a été donné d’assister à un spectacle ahurissant. La Magistrature est sur la sellette. Les colonnes des journaux et les éditions des radios et télévisions ont servi de chambre d’exposition des secrets des délibérations judiciaires. Cela avait commencé avec l’affectation d’un juge en poste à Podor, Ngor Diop. Une affectation qui n’aurait pas suivi les procédures régulières, de l’avis du président de l’Union des magistrats sénégalais (Ums), Souleymane Téliko. Dans ses différentes sorties médiatiques, le président de l’Ums n’avait pas manqué d’égratigner ses collègues membres du Conseil supérieur de la magistrature qui n’auraient pas assez protégé le principe de l’indépendance de la Magistrature. L’Ums décida de soutenir son membre lésé et de porter l’affaire devant la Cour suprême pour contester la mesure d’affectation. C’est dans ce contexte que Ousmane Kane, Premier président de la Cour d’appel de Kaolack, rendit publique sa lettre de démission de l’Union des magistrats sénégalais (Ums). Ousmane Kane déplorait le fonctionnement de cette organisation et le comportement irrévérencieux de magistrats à l’encontre de leurs aînés et formateurs, et surtout les attaques de magistrats contre la hiérarchie judiciaire. Les instances de l’Ums se sont montrées circonspectes devant la démission du président Kane, mais comme pour lui faire payer on ne sait quelle outrecuidance, un de ses collègues de la Cour d’appel de Kaolack, Yaya Amadou Dia, s’arrangea pour faire sortir dans la presse une lettre incendiaire qu’il avait adressée le 14 avril 2020 à son chef de juridiction, le président Ousmane Kane, en réponse à une demande d’explications. Dans sa lettre, le juge Dia étalera toute son irrévérence à l’endroit de son supérieur hiérarchique qu’il accusera de tous les péchés qui font le déshonneur d’un juge. La lettre a ému plus d’un lecteur. Ousmane Kane a cru devoir répondre en convoquant une conférence de presse le vendredi 21 août 2020 et en publiant une note-réponse aux accusations de son collègue Dia. Le tollé est énorme et le ministre de la Justice, Me Malick Sall, a décidé de saisir de cette affaire, on ne peut plus scandaleuse, l’Inspection générale de l’Administration de la justice (Igaj).
Pour bien moins que de tels actes, Ousmane Sonko avait été radié de la fonction publique
Le juge Ousmane Kane pourrait peut-être se révéler être une belle crapule, mais on ne peut pas ne pas relever que le juge Kane a au moins l’excuse de provocation. Yaya Amadou Dia n’avait aucune raison ou qualité pour traîner dans la boue son chef de juridiction qui venait de démissionner d’une organisation corporatiste des magistrats. Plus grave, les propos contenus dans la lettre du juge Dia le déshonorent lui-même et révèlent qu’il n’a pas sa place dans cette institution prestigieuse et respectable qu’est l’institution judiciaire, et surtout d’y exercer des hautes fonctions de magistrat. Dire que le juge Dia est un magistrat hors-hiérarchie, donc qualifié pour occuper tous les hauts emplois judiciaires dans l’Administration de la justice sénégalaise ! On ne peut que regretter qu’un tel personnage ait pu arriver à ce niveau de la hiérarchie judiciaire, car tout au long de sa carrière, Yaya Amadou Dia a eu à poser des actes qui devraient lui interdire depuis longtemps de continuer à exercer au sein de la Magistrature.
Qui ne se rappelle pas l’attitude du juge Yaya Amadou Dia, qui s’était donné en spectacle au cours d’une audience de la Cour de répression de l’enrichissement illicite (Crei) ? Ce jour-là, il avait estimé que le président de l’audience, le juge Henri Grégoire Diop, aurait cherché à l’empêcher de poser des questions à un témoin. Yaya Amadou Dia était fautif sur toute la ligne. D’abord, la pratique la plus courante dans les juridictions est que l’assesseur qui souhaite poser une question le fait par le truchement du président qui dirige la police de l’audience. Henri Grégoire Diop avait été permissif pour autoriser ses assesseurs à poser directement des questions aux personnes comparantes. Mais l’histoire jamais racontée des péripéties de cette bouderie fracassante mérite d’être connue. En effet, dans l’organisation de la conduite des débats dans le cadre du procès de Karim Wade et compagnie devant la Crei, Henri Grégoire Drop avait tenu avec ses assesseurs et les différentes parties au procès (Parquet spécial et avocats des différentes parties) une séance de réglage, au cours de laquelle il avait été retenu, de manière consensuelle, un modus operandi pour la conduite des débats. C’était que le dossier devait être examiné par «thèmes», en raison de la diversité des questions pour lesquelles les prévenus étaient poursuivis. Tout le monde avait souscrit à la démarche et les débats étaient conduits au gré d’un ordre du jour. Par exemple, on devrait examiner les questions liées aux affaires immobilières un jour déterminé, les questions relatives aux affaires aéroportuaires un autre jour et ainsi de suite. Au cours de l’audience du jeudi 22 janvier 2015, traitant des questions immobilières, le juge Yaya Amadou Dia avait voulu faire une digression pour évoquer des questions portant sur l’actionnariat de la société Ahs qui devrait être à l’ordre du jour d’une audience prévue pour le lundi 26 janvier 2015. Le président Henri Grégoire Diop n’avait pas voulu perdre le fil de son audience et aussi tenait à scrupuleusement respecter l’agenda retenu par le collège des juges de la Crei avec toutes les parties. Ainsi avait-il imposé de circonscrire les débats du jour sur les questions immobilières au menu de l’audience du jour. Le juge assesseur Dia en prendra prétexte pour bouder et quitter l’audience de manière bruyante, et déclara aux médias se dessaisir de cette affaire du fait que le président Diop cherchait à l’empêcher de faire son travail. Il multipliera les sorties médiatiques pour jeter l’opprobre sur la Crei et discréditer l’institution judiciaire. Pour cet acte, il méritait d’être traduit devant un Conseil de discipline. Pour bien moins que cela, Ousmane Sonko, leader du parti politique Pastef, avait été radié du corps des inspecteurs des Impôts et des domaines. Pourtant, Yaya Amadou Dia n’en était pas à son premier coup d’éclat du genre. Il avait boudé une audience dans les mêmes conditions au niveau de la Cour d’appel de Dakar quelques années auparavant.
Le juge, «avocat» de Karim Wade
Le fin mot de cette histoire est que Yaya Amadou Dia, par son geste, travaillait à donner des arguments de défense au prévenu Karim Wade. Les avocats de Karim Wade et consorts ont cherché, à tous les échelons de la procédure judiciaire, à utiliser cet esclandre pour asseoir que le collège de la Crei qui avait rendu le verdict final n’avait pas assisté à tous les débats. Manque de pot pour eux, il se trouvait que le jour de cet incident bien calculé, le juge remplaçant de la Crei, Tahirou Kâ, se trouvait dans la salle et avait pris immédiatement la place de Yaya Amadou Dia pour la suite du procès. Yaya Amadou Dia confortera ses détracteurs qui pensaient qu’il travaillait dans une officine secrète avec des conseils de Karim Wade pour préparer le mémoire de contestation de la non-inscription de Karim Wade sur les listes électorales. Le juge Yaya Amadou Dia n’avait pas hésité à prendre sa plume pour défendre dans les médias la recevabilité de la candidature de Karim Wade à l’élection présidentielle de 2019. Un tel comportement est aux antipodes des règles organisant le statut des magistrats. Pour cet autre manquement, il n’avait plus sa place au sein de la Magistrature.
Yaya Amadou Dia a craché sur l’institution judiciaire
Si tant est que le juge Dia avait voulu arrêter des dérives et des travers de son chef de juridiction Ousmane Kane, il avait bien des moyens d’y parvenir plutôt que de chercher à le jeter en pâture devant l’opinion publique, car en salissant un aussi haut magistrat, Yaya Amadou Dia insulte toute l’institution judiciaire. Mais Yaya Amadou Dia a procédé d’un vulgaire règlement de comptes. Pourquoi attendre le 20 août 2020 pour sortir une lettre datée du 14 avril 2020 ? Pourquoi «porter presse» alors qu’il avait toute la latitude de saisir, des griefs qu’il invoque, le ministre de la Justice ou l’Inspection générale de l’Administration de la justice ? Si tant est qu’il avait du scrupule à mêler l’Administration centrale du ministère de la Justice à des questions de délibérations judiciaires, qu’est-ce qui empêchait le juge Dia de saisir le Premier président de la Cour suprême ou le Procureur général près la Cour suprême, car ces autorités judiciaires ont désormais chacune la qualité d’Inspecteur général de l’Administration de la justice ? Même s’il peut exciper d’avoir fait ampliation de sa lettre-réponse à la demande d’explications, il n’a pour autant jamais demandé officiellement l’ouverture d’une enquête sur les faits allégués à son supérieur Ousmane Kane.
Nous n’avons eu de cesse de déplorer, à travers ces colonnes, les nombreuses dérives outrancières de magistrats contre l’institution judiciaire et en violation flagrante de leur serment et des règles statutaires.
L’honneur perdu de la justice sénégalaise
Les dernières sorties dans la presse relatives à la démission du juge Ousmane Kane de l’Union des magistrats sénégalais et la série d’accusations qui s’en est suivie sont très regrettables. Ce sont des coups portés contre l’un des fondements de notre République, que tout Sénégalais se plaît à insulter au gré de ses humeurs, à caricaturer et remettre sans cesse en cause.
Dans un jeu d’attaques dont les politiciens ont été au premier plan, une entreprise de jeter le discrédit sur la justice sénégalaise se fait depuis des années. Nous nous indignions, dans une chronique en date du 16 juillet 2018, intitulé «S’il faut en arriver à huer les juges». La remise en cause de l’indépendance des magistrats pour tapisser du voile du complot toutes les décisions rendues et la violation du contenu de toutes les délibérations sont devenues des activités favorites dans notre débat public. Il y a eu un terrorisme médiatique sur les magistrats, au point que certains chefs de juridiction éprouvent de la peine à composer des Chambres pour juger certaines affaires. Ce qui est à regretter dans cela reste que les magistrats soient tombés dans ce jeu de duel sur la place publique, d’une quête de vedettariat et que la fonction soit de nos jours marquée au fer d’une rivalité infondée entre des magistrats d’une vieille garde qu’on accuse de tous les péchés possibles et de jeunes magistrats à la probité de dieux.
Nous tenions à avertir sur la question de la violation du contenu des délibérations, suite à certaines sorties de membres de l’Ums. Au micro du «Jury du Dimanche» de Mamadou Ibra Kane sur Iradio, nous affirmions : «Un magistrat qui se permet de dévoiler le contenu des délibérations auxquelles il a pris part ? C’est aux antipodes des statuts de la Magistrature. On n’a jamais entendu un secrétaire général de syndicat de la Magistrature en France parler de corruption ou de compromission de ses collègues magistrats. Cela n’existe nulle part d’ailleurs.» Certains magistrats ont pu, à travers différentes sorties, porter atteinte à l’image de leur corps en accablant leurs collègues, en abordant sans retenue le contenu de délibérations, en exposant sur la place publique toutes les procédures. Le seul bénéfice de toute cette entreprise : se faire un nom ou se positionner comme chevaliers d’un bon droit dans un pays où la logique manichéenne de détenteur d’un bien contre les porteurs d’un mal a gagné toutes les sphères. Ils sont nombreux, les juges qui n’ont cessé d’avertir leurs collègues sur le risque que les sorties à tout-va et la logique effrénée de déballage auraient sur l’image de la justice de façon générale et sur la force de cette institution sur le long terme. Quand on choisit un sacerdoce, celui d’être un magistrat, mais aussi avec ses honneurs, ses avantages et les protections liées à la fonction, on accepte de s’astreindre à ses règles.
Au demeurant, le Directeur de publication du journal Le Quotidien disait à juste titre que débattre de l’indépendance de la justice sénégalaise équivalait à débattre sur le sexe des anges. Au gré des verdicts, les juges sont applaudis ou ont fait siffler leurs oreilles si ce qu’ils rendent ne nous agrée pas. Si nos juges, du fait de rivalités personnelles, de luttes d’influence ou de conflits d’une toute autre nature ne cessent de s’empoigner et de se fusiller, c’est la crédibilité d’un pan majeur de notre République qui perd au change. Le Sénégal ne mérite pas cela, encore moins toutes les générations de très grands magistrats qui ont eu à servir ce pays.
Par Etienne DIENE
NE BRISONS PAS NOTRE PATRIMOINE ARCHITECTURAL
La ville est « mémoire » et certaines portions du Plateau de Dakar doivent garder toute leur intégrité en préservant leur authenticité
La ville est « mémoire » et certaines portions du Plateau de Dakar doivent garder toute leur intégrité en préservant leur authenticité. L’architecture a cette magie de transcrire dans la pierre pour des générations entières tout un pan de l’histoire, du savoir et du savoir-faire d’un peuple. Nous devons préserver au moins quelques témoins du passé pour les transmettre aux générations futures car, comme le disait Fijalkow, un féru de la sociologie urbaine, « les villes ne sont rien d’autres, en tant que forme urbaine, que l’expression des peuples qui les ont produites». Aujourd’hui, force est de constater que Dakar est en train de sombrer lentement mais sûrement dans une certaine forme de ville générique, une ville sans originalité, un patchwork, un mélimélo qui n’est rien d’autre que le reflet des nécessités du moment et des capacités ou incapacités de l’heure.
D’ailleurs, les mutations actuelles sont des révélateurs. Elles montrent clairement que nous allons vers une ville sans histoire et sans âme, une ville qui se transforme progressivement en jungle urbaine, comme si c’est la nature, et non la culture, qui tirait les ficelles. Il y a comme une certaine forme de régression de la culture vers le néant, de l’humanité vers l’animalité, de la justice vers la loi du plus fort, de l’ordre vers le chaos… Il va sans dire que démolir un monument historique, c’est lui ôter de facto toute son Authenticité et surtout sa valeur patrimoniale mondiale. En réalité le statut de « monument historique» est une reconnaissance par la Nation de la valeur patrimoniale d'un bien. Cette protection implique une responsabilité collective eu égard au devoir qu’a chaque génération de conserver et de transmettre ce « patrimoine historique » à la génération qui la suit.
Le projet de démolition du marché Sandaga a défrayé la chronique, suscité des réactions tous azimuts et fait couler beaucoup d’encre et de salive de la part des Sénégalais de tout bord. Avec un grand sentiment d’indignation pour la plupart des hommes de l’art, d’acteur culturel ou autres. Cette contribution tente de clarifier les enjeux du patrimoine face aux dynamiques de démolition en cours depuis quelques temps à Dakar et surtout réaffirmer notre devoir en tant qu’acteur du cadre bâti de protéger par tous les moyens tout trésor architectural et culturel. Quand on parle du marché Sandaga, il faut faire la différence entre le bâtiment principal d’une part et les cantines d’autre part. Bien qu’elles constituent l’un des poumons de l’économie informelle de la ville de Dakar, les cantines, installées de façon anarchique, posent un véritable problème d’esthétique, d’insalubrité, d’encombrement urbain, de détournement d’espace et enfin d’occupation illégale de l’espace public... Leur démolition serait un « mal nécessaire ». Elle permet aujourd’hui une meilleure visibilité et une plus grande lisibilité de l’alphabet architectural du marché qui est en réalité un véritable chef-d’œuvre d’antan.
Au Sénégal, depuis 1971 il existe une loi sur les sites et monuments historiques classés, avec une commission supérieure des monuments historiques présidée par le Ministre de la Culture. Ces monuments historiques sont inscrits sur une liste établie, tenue à jour et publiée au Journal Officiel par l’autorité administrative compétente. Aujourd’hui, plusieurs sites sont classés tels que Gorée, Saint Louis, etc. Seulement, il est important de noter que le patrimoine matériel architectural ne se limite pas seulement au patrimoine colonial. Il y a d’autres lieux de mémoire tels que les maisons royales de Diakhao qui ont accueilli les 43 rois du SINE, les mosquées Omariennes dont celle d’Alwaar, les lieux de bataille de DEKHELE où est tombé Lat DIOR, la maison de Yang Yang, les cases à impluvium en Casamance, les constructions en terroir Bassari, la case Bedik, les maisons en terre à Matam… En somme, nous disposons d’un patrimoine très riche et diversifié mais très méconnu pour la plupart des Sénégalais et rien n’est fait pour sa vulgarisation dans le sens d’un tourisme culturel…
Le marché Sandaga fait appel à l'idée d'un héritage légué par les générations qui nous ont précédés, et que nous devons transmettre intact aux générations futures, ainsi qu'à la nécessité de constituer un patrimoine culturel pour demain. On dépasse donc largement la simple propriété personnelle (droit d'user « et d'abuser » selon le droit). Il relève du bien public et du bien commun. Aujourd’hui rien ne peut justifier la démolition de ce patrimoine classé, ce n’est pas pour rien que la gare ferroviaire a été restaurée malgré sa vétusté évidente.
Le marché Sandaga est un édifice hautement symbolique de l’architecture soudano-sahélienne fait de parallélisme asymétrique en référence à Tombouctou ... Comme d’autres bâtiments historiques, le marché Sandaga date de l’époque coloniale, mais n’est guère un patrimoine colonial, car construit, à la sueur de leur front, par les Sénégalais et autres Africains. Et le fait qu’il ait été financé par les deniers publics de la ville de Dakar en fait un véritable patrimoine dakarois.
Sandaga fait partie de l’imaginaire collectif, de l’iconographie urbaine, et son esplanade actuelle bien dégagée à la suite de la démolition des cantines révèle toute son insertion naturelle dans le tissu urbain du Plateau d’antan. Aujourd’hui, suite de la création d’un collectif de sauvegarde de Sandaga composé d’architectes, d’artistes, de spécialistes du cadre urbain, de citoyens compétents dans divers domaines, l’autorité administrative dans une démarche participative et transparente ne peut en aucuns cas se cacher derrière des faux-fuyants. La concertation s’impose dans l’intérêt des Sénégalais afin d’en savoir davantage sur les preuves de l’état de ruines pouvant justifier la démolition du marché Sandaga. La question coule de source : Pourquoi vouloir détruire le marché alors qu’on peut le restaurer à l’identique tout en requalifiant sa vocation actuelle?
Afin de clarifier les choses ne faudrait il pas partager le contenu du rapport de la protection civile, celui du bureau d’étude ayant fait l’expertise du diagnostic ? Face à toutes ces interrogations nous faisons appel à plus de partage et d’échange avec l’autorité avant toute décision, sinon on peut penser qu’on est purement et simplement dans le schéma d’un montage immobilier politico-foncier à coût de milliards qui cache souvent d’autres surprises. Nous ne pouvons plus démolir ce qui ne nous appartient pas, car le patrimoine est l’héritage de tous les Sénégalais et de l’humanité toute entière par extension. En vérité toute destruction de patrimoine met douloureusement en exergue le fait que les monuments sont des biens collectifs chargés de valeurs symboliques. C’est pourquoi Dakar doit demeurer un espace ouvert avec des expressions culturelles plurielles fécondées au cours de l’histoire par de multiples apports internes et externes. Ceci passera par la mise en cohérence de l’espace public etla protection des lieux de mémoire pour une réappropriation des sénégalais de leur environnement. Rappelons-nous toujours qu’« un peuple sans mémoire est un peuple sans avenir » (Aimé Césaire).