Le ressenti du confinement (Table-ronde virtuelle sur Zoom) D’une manière inédite, le cours de la vie personnelle, professionnelle et sociale de chacun d’entre nous est encore profondément bouleversé. Le Sénégal sous état d’urgence, le temps semble ralenti, le monde à l’arrêt. Des peurs, des craintes mais aussi des rêves et des espoirs germent dans les esprits et apparaissent dans quelques œuvres éparses. Le désir de partage titille visiblement les consciences. Partageons donc !
- 12 intellectuels et grands leaders d’opinion sénégalais sur Zoom.
- Tous répondent à une question et une seule : « Au plan personnel, au plan humain quel est l’impact de cette crise mondiale sanitaire qui pourrait alimenter de manière significative votre réflexion sur les prochaines années ? »
- Liste des participants : o Didier Awadi o Souleymane Bachir Diagne o Babacar Buuba Diop o Ousmane Blondin Diop o Elgas o Penda Mbow o Fatoumata Sissi Ngom o Alioune Sall Paloma o Pierre Sané o Mbougar Sarr o Marie-Angelique Savané o Rama Yade
- Facilitation de la discussion : René Lake
DES CHAUFFEURS SE RÉVOLTENT À NDIASSANE
Ils sont à bout, après près de trois mois d’arrêt, suite aux restrictions prises par le président de la République, pour freiner la propagation du Covid-19
Après près de trois mois sans travail, suite aux mesures restrictives prises par le gouvernement pour freiner la propagation du coronavirus, les chauffeurs sont descendus hier dans la rue à Ndiakhaté Ndiassane. C’était pour exprimer leur colère et demander la reprise du transport interurbain. Pour mieux se faire entendre, ils ont brûlé des pneus sur la nationale. Ce qui a nécessité l’intervention d’un grand renfort des forces de l’ordre.
Ndiakhaté Ndiassane, dans la commune de Chérif Lô, département de Tivaouane, a été hier le théâtre d’une violente manifestation organisée par des chauffeurs qui réclamaient la reprise du transport interurbain. Ils sont à bout, après près de trois mois d’arrêt, suite aux restrictions prises par le président de la République, pour freiner la propagation du COVID-19.
Et Ndiakhaté Ndiassane est une localité où pratiquement tous les jeunes sont des chauffeurs de transport en commun, et chaque famille compte au moins 4 à 5 véhicules de transport. C’est pourquoi, le village est fortement impacté par les effets socio-économiques de la pandémie. N’en pouvant plus, les chauffeurs ont sonné hier la révolte. Tôt le matin, ils ont investi la route nationale pour bloquer la circulation pendant près de deux tours d’horloge. Les femmes, les jeunes, bref les populations sont massivement sorties pour prêter main forte aux chauffeurs manifestants, en décrivant les détails du malvivre engendré par l’interdiction du transport interurbain. Des pneus ont ensuite été brûlés et les forces de l’ordre venues dans un premier temps en nombre insuffisant ont dû avoir recours à des renforts, pour maîtriser la situation, non sans un échange de jets de pierres et de grenades lacrymogènes. Ce face-à-face a occasionné plusieurs arrestations. Les forces de l’ordre ont ensuite installé des cordons jusqu’à l’intérieur du village, ce qui a permis de libérer la circulation. Les épouses des manifestants entonnent en chœur : « Nous sommes fatigués, nous avons faim et soif, parce que nos maris sont privés de travail parce qu’ils sont des chauffeurs. Nous avons marre d’une telle situation ; que les autorités laissent tranquillement nos chauffeurs travailler et gagner leur vie à la sueur de leur front d’autant plus que personne n’aperçoit encore la couleur de l’aide tant annoncée ! » Elou Diakhaté laisse éclater sa colère et déclare : « La situation est devenue insoutenable et nous implorons le pardon du président de la République si les chauffeurs lui ont fait quelque part un tort sans le savoir, au point de justifier cet abandon dont ils sont victimes. La plus grande erreur qu’un gouvernant puisse commettre, c’est de confier un secteur d’activités économiques à quelqu’un qui ne s’y connaît rien. A notre humble avis, c’est le cas du ministre Oumar Youm qui est à l’origine de tous les échecs dans le secteur du transport.» Selon lui, aucune industrie, quelles que soient sa taille et sa dimension, ne peut générer le nombre d’emplois que créent les différentes gares routières du pays ; c’est pourquoi l’option manifeste prise par le pouvoir d’affaiblir le transport public est totalement incompréhensible. « L’heure est grave car les familles des chauffeurs de transport en commun risquent d’éclater du moment où ces derniers sont obligés de recourir à la mendicité pour donner un strict minimum à leur progéniture », affirment les protestataires.
Les différents responsables des gares routières du département de Tivaouane avaient récemment sonné l’alerte, lors d’un point de presse, en affirmant que la situation que vivent actuellement les chauffeurs est pire que le coronavirus. « Trop, c’est trop et ventre affamé n’a plus d’oreille » ! avaient-ils alerté. Et ils avaient demandé une organisation du transport public comme le sont les autres secteurs, ne serait-ce que pour sauver des acteurs économiques qui risquent de périr avec leurs familles.
DES ENTREPRISES DU SECTEUR DES RESSOURCES NATURELLES MENACÉES DE DISPARITION
Les activités minières, pétrolières et gazières sont rudement éprouvées à cause des mesures de restrictions prises dans le but de freiner la propagation du Coronavirus
A travers un webinaire organisé hier par l’Ong Oxfam, des panélistes ont débattu pendant plus de deux tours d’horloge sur les impacts de la pandémie de Covid-19 sur la gestion des ressources naturelles au Sénégal. Il ressort de leurs analyses que les activités minières, pétrolières et gazières sont rudement éprouvées à cause des mesures de restrictions prises dans le but de freiner la propagation du Coronavirus. Par ailleurs, ils prédisent que des entreprises vont disparaître.
Même s’ils jugent prématuré de mesurer l’impact du Coronavirus sur les activités des industries extractives, les panélistes sont pessimistes. Ils estiment en effet que faute de moyens financiers, des entreprises du secteur des ressources naturelles sont en train d’être exterminées par le Coronavirus. Selon le directeur de la communication et relations publiques de la Société des Pétroles du Sénégal (Petrosen), Ibrahima Bachir Dramé, l’impact de la Covid-19 peut être caractérisé en trois cas de figure. Dans le premier cas de figure, indique le sieur Dramé, certaines entreprises ne survivront pas à la crise faute de moyens financiers conséquents pour redémarrer les activités. Car, poursuit-il, des entreprises ne suivent plus et sont obligées de fermer comme ce qui se passe en Afrique du Sud, au Ghana, et dans d’autres pays où des mines ont tous été fermées définitivement en attendant d’y voir plus clair. Le deuxième cas de figure concerne des entreprises qui seront dans l’obligation de nouer des partenariats de fusions, de rachats ou de cessions des activités parce qu’elles n’ont pas d’orientation stratégique dans le long terme. Ce qui signifie, explique-t-il, que toutes les entreprises, qui ne s’étaient pas inscrites dans des hypothèses et des simulations d’activités stratégiques avant l’apparition de la pandémie du Coronavirus, vont se retrouver dans l’obligation, à défaut de faire disparaître l’activité, de fusionner ou de se faire racheter par des entreprises qui profitent de la situation pour s’agrandir.
Enfin pour le troisième cas de figure, renseigne monsieur Dramé, les entreprises seront repositionnées avec une vision de long terme en ayant profité de toutes les opportunités du moment. Au niveau des activités minières, explique Aminata Ndao Seck, juriste de formation et agent de l’Etat, l’impact de la pandémie pourrait se mesurer par rapport au déroulement des activités. «Parce que les titulaires de titres miniers de recherches ou d’exploitations, pour l’instant, peuvent rencontrer des difficultés venant des mesures qui ont été prises pour contrecarrer la pandémie», souligne-t-elle.
A cet effet, elle estime que le premier impact est lié à la réduction de la mobilité des travailleurs sur les sites miniers. «Ce qui contribue au ralentissement des activités». Donc pour Mme Ndao, les restrictions ont causé un énorme ralentissement dans le déroulement des activités. Et d’ajouter dans la même veine que des sociétés devaient démarrer leurs activités, mais elles ne pourront pas le faire, parce que leurs travailleurs ne sont pas sur place. «Cela va entraîner des retards dans l’exécution de certains travaux.
Par ailleurs, il y a des obligations légales et conventionnelles auxquelles les sociétés minières sont tenues et des délais leur sont accordés pour entériner ou exécuter certains travaux», indique Aminata Seck Ndao qui précise à ce propos que la convention minière ne régit que celles qui sont en phase de recherche mais également d’exploration à grande échelle. Sous ce rapport, elle renseigne également que la pandémie peut causer une rupture ou une renégociation de certains contrats. Pour ce qui est des autorisations de carrières, dit-elle, la problématique qui pourrait se poser c’est qu’elles soient limitées dans le temps. «Si par exemple, un titulaire d’autorisation ou de carrières temporaire reste six à sept mois sans travailler, les délais continuent à courir. Donc, cela pourrait déboucher sur une suspension temporaire de cette autorisation», souligne Aminata Seck Ndao.
Concernant les impacts sur le déroulement des activités d’exploitation minière artisanale, elle minimise. «Ce ne sont pas des projets miniers au véritable sens du mot», informe-telle. Par ailleurs, elle considère que d’autres impacts pourraient se mesurer par rapport à la productivité et au rendement des sociétés minières. Et si la situation perdure, cela risque d’entraîner une baisse de la production.
par Ousmane Ngom
FAIRE REPARTIR NOTRE ÉCONOMIE AU PLUS VITE
Rompre avec la peur et acquérir les gestes appropriés pour vivre avec le virus. La lutte se gagnera au niveau communautaire par une bonne sensibilisation et la promotion des comportements adéquats
« Il nous faut apprendre à vivre en présence du virus… « Cette phrase du président Macky Sall a suscité et continue de susciter beaucoup de réactions. Comme la mesure de suspension de la rentrée scolaire qu’il vient de prendre en urgence. La Covid-19, qui frappe le monde, n’est assurément pas une épidémie comme celles déjà connues et combattues. La preuve, le comportement du virus sur notre continent amène beaucoup d’interrogations. Pourquoi l’Afrique n’a pas connu ces taux de létalité importants comme dans les continents européen ou américain ?
Le futur nous le dira certainement. Pour l’heure, soyons simplement heureux que les prévisions les plus pessimistes ne se soient pas réalisées et qu’elles ne réalisent pas. Avec 3 mois de recul, des évidences peuvent quand même être notées. Il en est de l’utilité du port du masque, comme de la distanciation physique. Le virus se transmet d’homme à homme. Cela explique que les zones de forte densité de population soient les plus touchées. Il est donc tout à fait naturel que les régions abritant les capitales comme Dakar qui polarise plus de 70% des cas positifs et c’est le cas dans différents pays, surtout en Afrique, soient les épicentres du phénomène, parce que aussi les premières touchées avant que le virus ne soit porté par des hommes dans les régions à l’intérieur des pays. Une autre évidence, est que la circulation du virus continuera de longues semaines, voire des mois, dans tous les pays. Il ne faut pas s’attendre à ce qu’à tel jour J, on arrivera à avoir 0 cas sur un nombre plus ou moins significatif d’échantillons testés.
Les Européens ont commencé à retrouver leurs activités à un moment où ils continuent encore à enregistrer plus d’une centaine de décès par jour. Chez nous se pose aujourd’hui la question de la levée rapide de l’état d’urgence et du couvre-feu pour restaurer la sérénité et remettre le pays au travail. Je m’explique. Le virus est là, certes sa pathogénicité peut fortement diminuer pour X raisons, il n’y aura pas de traitement et de vaccin reconnus efficaces dans le court voire moyen terme, alors apprenons à vivre avec. Il nous faut rompre avec la peur, car la peur est injustifiée et capable d’engendrer des réflexes et comportements incompréhensibles et inacceptables, comme ces cas rapportés d’enterrements rejetés par des populations ou de jeunes qui se rebellent contre le couvre-feu ou encore de chauffeurs-transporteurs vandalisant des bus et gares routières. C’est le fruit de l’angoisse. Mais la peur ne nous aidera point à vivre avec le virus. Nous avons besoin davantage de sérénité, à tous les niveaux. C’est dans cette sérénité que se trouve la clé de l’acceptation de vivre et demain de rompre la chaine de transmission du virus.
Ayons des comportements responsables, partout, dans les quartiers, les maisons, les mosquées, les églises, l’espace scolaire et j’en passe. Il nous faut nous habituer aux masques, nous habituer au lavage des mains, à la distanciation physique, pour continuer à mener nos activités quotidiennes. Reconnaissons le professionnalisme et le mérite de notre corps médical que je connais bien, et rendons leur grâce pour tous ces efforts qu’ils continuent de fournir pour le bien des populations. A chaque fois que l’opportunité se présentera, il nous faudra les acclamer. Notre pays n’a pas connu de grosses épidémies depuis le début des années 2000, en dehors des préparatifs, avec succès, de la réponse à la maladie à virus Ebola qui sévissait dans la sous-région.
Les dernières grandes épidémies d’ampleur datent des années 90, épidémies récurrentes de choléra, méningite cérébrospinale, fièvre jaune, auxquelles avaient su faire face avec vélocité et efficacité les Services de Santé d’alors. L’implication et la responsabilisation de chaque Sénégalais, passe aussi par les chefs de quartiers, les ASC des jeunes, les leaders des collectivités locales ainsi que les leaders communautaires en général. Tous devraient être les vecteurs du bon message, afin de promouvoir les bons comportements partout et à tous les niveaux. Voilà venu pour eux le moment de densifier leurs interventions pour une bonne sensibilisation de nos concitoyens.
Rompre avec la peur et acquérir les gestes appropriés pour vivre avec le virus. La lutte se gagnera au niveau communautaire par une bonne sensibilisation et la promotion des comportements adéquats. C’est simplement possible et salutaire. Ce volet communautaire, incluant la surveillance communautaire, dans nos pays africains, est la plus-value qui fait la différence avec les continents européen et américain, dans la réponse à ce type d’épidémie. Nous devons continuer et renforcer la gestion sereine de cette épidémie.
La plupart des cas n’ont pas de symptômes graves, fort heureusement. Il s’agit de les rendre conscients de leur situation de porteur de l’infection et de les surveiller. Les cas graves par contre doivent être absolument référés dans les centres spécialisés pour prise en charge appropriée, car ce sont ces cas qui peuvent conduire à la mort. Ce sont là les deux indicateurs, cas grave et mortalité qui doivent surtout retenir notre attention et non le décompte quotidien du nombre de cas avec la stigmatisation des cas dits communautaires qui installent cette peur et aussi augmente la stigmatisation. Mais nos structures de santé ont aussi besoin de retrouver cette confiance des populations pour venir se traiter contre le paludisme et autres affections aigues ou chroniques.
L’hivernage arrive…il nous faut assurer la continuité des services de santé comme des prestations de services essentiels et aussi de prévention comme la vaccination des enfants et des femmes, dès à présent. C’est aussi cela l’équité. Les structures de santé doivent s’organiser à assurer une circulation efficace des patients à l’intérieur de la structure. Il y a trois jours quand la France dénombrait 54 décès dans son décompte quotidien, le même jour, le décompte des 47 Etats africains faisait état de 42 décès. Comme on le voit les situations sont tout à fait différentes. Ce sera grâce à la mise en œuvre effective des mesures de prévention, port généralisé du masque, distanciation physique, lavage systématique des mains, tests de tous ceux qui présentent des signes évocateurs de la maladie, que nous pourrons ouvrir sereinement nos écoles, que la circulation interurbaine pourra reprendre progressivement selon des modalités à établir.
Devant la souffrance de plus en marquée de nos économies africaines, dans tous ces pays présentant le même profil, il sera aussi temps de songer, à la réouverture concertées des frontières intra africaines selon là aussi des modalités à définir, comme les autres continents le font. Le commerce et les échanges intra africains doivent reprendre. Nos économies ont bien besoin de souffler tant au niveau des pays qu’aux niveaux régional et continental. Notre continent ne doit pas continuer à rester à l’arrêt. Nos économies ont ce besoin très fort de repartir rapidement de l’avant.
LES CITOYENS À BOUT DE SOUFFLE
Le couvre-feu doit s’arrêter ! C’est l’avis de beaucoup de citoyens qui plaident pour l'instauration du port de masque obligatoire à Dakar pour rompre la propagation du virus
Le couvre-feu doit s’arrêter ! C’est l’avis de beaucoup de citoyens interrogés. Lesquels jugent insensé que, bien que le couvre-feu soit en vigueur, la propagation du virus se poursuive. Toutefois pour rompre la chaine de transmission des cas communautaires à Dakar, nos interlocuteurs jugent obligatoire le port du masque dans la capitale.
La récente prolongation de l’état d’urgence pour une durée de 30 jours, décrété par le président de la République Macky Sall, étonne vraiment nos compatriotes. En effet, beaucoup d’entre eux disent qu’ils ne voient plus le sens de prolonger le couvre-feu dans la mesure où il n’a pu empêcher la propagation du virus. « Macky Sall ne sait plus sur quel pied danser. Il est dépassé par la tournure des évènements. La décision rendue publique, hier tard dans la soirée, sur le report de la reprise des cours en constitue une des preuves suffisantes. A quoi sert-il de vouloir maintenir le couvre-feu ? Franchement, je ne vois pas son utilité. Comme disent bon nombre de nos compatriotes, c’est comme si le virus ne circulerait que la nuit. Alors qu’il y a des rassemblements un peu partout pendant le jour. Je pense que même les policiers qui effectuent des descentes sur le terrain, si vous demandez leur avis, ils vous diront que le couvre-feu ne sert absolument à rien contre cette pandémie. Ces policiers ont besoin de retrouver leurs familles comme tout le monde. Franchement, il est encore temps que Macky Sall arrête ce couvre-feu, qui anéantit les espoirs de beaucoup de chefs de ménage qui s’activaient dans le petit commerce » s’offusque un homme rencontré au niveau d’un kiosque de journaux installé près de l’arrêt des bus de Diamaguène. La crise sanitaire qui sévit dans le pays depuis plus de deux mois avec son lot de restrictions des libertés et de réduction des heures de travail préoccupe les chauffeurs et apprentis des cars dits « Ndiaga Ndiaye ». Ces exploitants du secteur du transport routier réclament la levée du couvre-feu pour pouvoir dérouler leurs activités convenablement. « En temps normal, nous travaillons du matin jusqu’au-delà de 22h. Et cela faisait vraiment notre affaire ! Mais depuis que ces mesures ont été prises, nous vivons difficilement ! Nous sommes doublement impactés. D’abord sur la restriction du nombre de passagers, ensuite la réduction des horaires de travail. Je suis pour l’arrêt total du couvre-feu tout en respectant les gestes barrières. Est-ce que le couvre-feu a empêché le virus de se propager dans le pays ? », demande Haguibou Diagne, chauffeur d’un car « Ndiaga Ndiaye » sur l’itinéraire Diamaguène-Colobane
Les citoyens unanimes sur le port obligatoire de masque à Dakar !
Sur le port obligatoire du masque à Dakar, l’épicentre de la maladie, nos compatriotes disent être en phase avec les autorités en attendant l’arrêté du ministre de l’Intérieur Aly Ngouille Ndiaye. « Ce serait une bonne décision si les autorités rendaient obligatoire le port du masque dans la capitale qui demeure l’épicentre de la maladie. Ce, malgré les gros moyens qui y sont déployés. Cependant l’accessibilité ne doit pas causer un problème. Qu’il n’y ait pas de spéculations et que le Gouvernement facilite la tâche afin que chaque citoyen puisse se procurer un masque. Chaque jour, Dakar enregistre des cas communautaires. Donc il devient impératif de rende obligatoire le port du masque ou, à défaut, confiner la capitale » a suggéré Fanta Diallo, gérante d’un multiservices à Colobane. Rendre le port du masque obligatoire à Dakar, c’est également l’avis de Sam Sylla, vendeur de téléphones portables au marché de Colobane « Obliger les Dakarois à porter le masque, est une bonne décision face à l’augmentation des cas communautaires. Seules des sanctions pécuniaires peuvent pousser les citoyens à respecter les mesures. Et si les autorités font respecter dans toute sa rigueur cette décision, je pense qu’on arrivera à rompe la chaine de transmission communautaire dans la capitale », soutient Sam Sylla.
par Mamadou Oumar Ndiaye
ARRÊTEZ D’ABATTRE LES NOIRS AMERICAINS !
Le présent texte publié en mars 2016, reste d'une dramatique actualité, au lendemain du meurtre sordide de Georges Floyd, Afro-Américain de 46 ans, par un policier blanc de l’Etat du Minnesota
Le texte ci-dessous a été publié dans notre journal en mars 2016. Quatre ans plus tard, au lendemain du meurtre scandaleux et sordide de Georges Floyd, un Afro-Américain de 46 ans, par un policier blanc de l’Etat du Minnesota, on se rend compte qu’il est d’une dramatique actualité, hélas. Le meurtre de Floyd a provoqué une onde de choc à travers le monde entier notamment des émeutes aux Etats-Unis, des manifestations aux quatre coins de la planète, un formidable élan de solidarité des sportifs, des artistes, etc. Nous reproduisons in extenso cet édito juste pour rafraîchir la mémoire de nos chers lecteurs…
« Il ne fait assurément pas bon être afro-américain aux Etats-Unis d’Amérique où la vie d’un jeune Noir ne vaut décidément pas tripette. Du moins aux yeux de la Police, un corps majoritairement composé de Blancs et dans lequel le racisme affleure sans qu’il soit besoin de gratter outre-mesure pour le découvrir. Pour ces policiers blancs, c’est comme si tous les jeunes Noirs étaient des délinquants en puissance et pire, des sous-êtres ayant moins de valeur que, par exemple, leurs chiens domestiques. Ouvrir le feu sur un jeune Noir c’est donc, chez la plupart de ces policiers, comme tirer un lapin. Ils y sont d’autant plus enclins que, dans l’écrasante majorité des cas, leurs actes restent impunis, la Justice, si d’aventure elle est saisie, s’empressant de blanchir les rares policiers blancs inculpés pour meurtre. Cela est particulièrement valable lorsque les jurys sont exclusivement blancs comme ceux qui avaient jugé les policiers coupables du meurtre du conducteur noir Rodney King en 1992. Une scandaleuse décision de relaxe qui avait entraîné de violentes émeutes à Los Angeles, lesquelles avaient fait plus de 50 morts, des milliers de blessés et un milliard de dollars de dégâts. Rejugés par un jury mixte, les policiers blancs s’en étaient tirés avec des condamnations légères…
En 2015, 123 Noirs, la plupart du temps non armés, ont été tués par des policiers pourtant chargés en principe de les protéger ! Selon le journal « Usa Today », plus important tirage des Etats-Unis, en moyenne, ces dix dernières années, 96 Noirs ont été tués chaque année dans la première puissance du monde par des policiers. Blancs évidemment. Selon les statistiques, un jeune Noir a 21 fois plus de chances d’être victime d’une bavure policière qu’un jeune Blanc. Des chiffres qui se passent de commentaires ! Bien évidemment, ce n’est pas avec les jeunes Noirs seulement que la police américaine a la gâchette facile puisque, en réalité, elle tue plus de Blancs que de Noirs. Du moins arithmétiquement. Car, proportionnellement au pourcentage de Noirs dans la société américaine — 13 % —, il y a eu rien qu’en 2015 deux fois plus de tués chez les Noirs que chez les Blancs. Lire à ce propos l’article de notre collaborateur Serigne Saliou Guèye à l’intérieur de ce journal. A ce rythme, d’ailleurs, il est permis de se demander si on n’assiste pas à un génocide silencieux dont feraient l’objet les AfroAméricains dans la seule superpuissance mondiale actuelle. S’agissant de la violation des droits de l’homme à travers le monde, et notamment en Afrique où ceux-ci seraient particulièrement malmenés, le gouvernement américain est particulièrement sourcilleux et fait preuve d’une vigilance jamais prise en défaut. A longueur d’année, des pouvoirs africains sont menacés, avertis, admonestés, sanctionnés économiquement et financièrement, sommés de respecter les droits de leurs citoyens. Toute violation des droits de l’homme est sévèrement sanctionnée par l’intransigeante Amérique qui se veut la conscience morale du Monde et la gardienne vigilante du respect des droits des citoyens de la Terre. D’ailleurs, chaque année, le département d’Etat publie un épais rapport sur la question, étrillant tous les gouvernements coupables de manquements en matière de « Human rights ».
Par exemple, il y a deux semaines, le chef de la police de Kinshasa a vu ses avoirs aux Etats-Unis gelés à cause des mauvais comportements supposés de ses hommes envers les habitants de la capitale de la République démocratique du Congo (RDC). Mieux, les ONG américaines de défense des droits de l’homme sont aujourd’hui les nouveaux missionnaires chargés de sauver les âmes pécheresses des gouvernements africains dont elles sont également chargées de noter les comportements. Pour toutes ces raisons, et bien d’autres, évidemment, les dirigeants américains auraient dû être irréprochables eux-mêmes dans le domaine des droits de l’homme. Il se trouve qu’ils ne le sont pas, hélas, puisqu’ils laissent se développer chez eux un scandaleux apartheid que l’on pensait révolu depuis les grandes luttes pour les droits civiques des Martin Luther King et sa célèbre marche sur le Capitole, les actions des Black Panthers et autres luttes du révérend Jesse Jackson, tout cela intervenant après le geste héroïque de Mme Rosa Parks refusant de céder son siège dans un bus à un Blanc. Hélas, l’Amérique est toujours aussi raciste, même si elle est dirigée aujourd’hui par un Noir dont le pouvoir de décision est à vrai dire anecdotique.
Officiellement, le « Ku Klux Klan » n’existe plus mais en réalité son idéologie est bien représentée dans la Police de ce pays qui donne des leçons au monde entier mais qui, en vérité, gagnerait à balayer devant sa propre porte. Plus grave, le même racisme anti-Noirs dont fait preuve la classe dirigeante américaine est également celui-là même qui est mis en œuvre au niveau de la « justice internationale » à travers un tribunal comme la Cour pénale internationale (CPI) qui, depuis qu’il existe, n’a encore inculpé et jugé que des Noirs Africains. Avec le soutien agissant des Etats-Unis d’Amérique qui en constituent l’un des principaux bailleurs de fonds mais dont les ressortissants ne sont pas soumis à l’autorité de cette Cour parce que tout simplement leur pays n’est pas signataire du traité de Rome instituant la CPI ! Un tribunal pour Nègres, en somme. Pendant que pour des peccadilles, le plus souvent, des dirigeants africains sont transférés à la Haye, emprisonnés, jugés et condamnés sévèrement, l’Amérique, elle, dont la police massacre pourtant une partie de sa population qui a le tort d’avoir la peau noire, continue en toute bonne conscience de seriner des leçons de droits de l’homme et de bonne gouvernance au reste du monde. Ne rêvez pas : jamais un policier blanc américain ne sera inquiété un jour par la « justice internationale » qui ne s’exerce que sur les damnés de la terre, les Africains noirs en l’occurrence. Alors pourtant que ce massacre peut être assimilé à un génocide ! Les flics blancs d’Amérique pourront donc, en toute impunité, continuer à tirer comme des lapins les jeunes Noirs américains…
par Serigne Saliou Guèye
L'INCOMPÉTENCE GOUVERNEMENTALE MISE À NU
Les enseignants sont entre le marteau de la reprise des cours dans un climat anxiogène exacerbé par l’hostilité de certains parents d’élèves inconscients et l’enclume de l’irresponsabilité des autorités étatiques
Au moment où la pandémie de coronavirus est dans sa phase ascendante, le président de la République tient à rouvrir les écoles fermées depuis la première décade du mois de mars. En dépit des alertes des enseignants, des élèves et des parents d’élèves et aussi des mises en garde du Comité national de gestion des épidémies (CNGE), Macky Sall tient à sa marotte : rouvrir les écoles sans se soucier des dangers sanitaires afférents à cette entreprise. Et voilà que la veille de la réouverture, la décision d’ajourner la reprise des cours a été prise parce que des enseignants auraient voyagé de Dakar à Ziguinchor avec l’indésirable Sars-Cov2.
« Il a été appelé à mon attention des cas de personnels enseignants testés positifs dans la région de Ziguinchor. C’est pourquoi sur instruction du président de la République, il a été retenu de reporter la reprise des cours initialement prévue le 02 juin 2020 jusqu’à une date ultérieure, en vue d’éliminer tout risque de propagation du virus dans l’espace scolaire. Le président de la République engage les ministres chargés de l’éducation nationale, de la formation professionnelle et de la santé en relation avec les autorités administratives, à poursuivre les efforts déjà entamés en vue de se préparer à une éventuelle réouverture des classes.» C’est le communiqué laconique sur fond de stigmatisation que la RTS a livré avant-hier à 23h 20 et ce, au moment où la majorité des apprenants et des enseignants étaient déjà dans les bras de Morphée. C’est ce qui a fait que plusieurs élèves ont pris le chemin de l’école ce 2 juin avant de retourner sur leurs pas. La raison invoquée pour expliquer le report, c’est l’apparition de nouveaux cas positifs de Covid-19 chez les enseignants. Il est établi lors de la rédaction de cet article que 10 enseignants en Casamance (3 à Ziguinchor et 7 à Bignona) venant de Dakar sont atteints par le Sars-Cov2. Si 10 enseignants sont porteurs du virus, il est certain que plusieurs autres sont des cas positifs même s’ils ne développent pas pour l’instant des symptômes. Et on peut déduire qu’il en est de même pour l’ensemble des autres régions du Sénégal qui ont accueilli des vagues d’enseignants ces jours-ci en provenance de Dakar. Dès lors, l’on comprend la réticence sur fond de crainte de contamination des parents d’élèves d’envoyer leurs enfants à l’école si la reprise était effective ce 2 juin parce que les enseignants peuvent être des sujets transmetteurs du virus à leurs enfants. La capitale de notre pays étant un cluster, il était alors suicidaire de vouloir disséminer à travers le territoire national des milliers d’enseignants venant d’un foyer de contamination comme Dakar qui polarise plus de 70% de l’ensemble des cas enregistrés à ce jour dans le pays.
A l’origine, le capharnaüm humain constaté au Terminus Liberté V
Mais ce qui a probablement favorisé la chaine de transmission du virus chez les enseignants qui devaient rejoindre leurs lieux de service, c’est le capharnaüm humain constaté au Terminus Liberté V lors du départ des bus Dakar Dem Dikk qui devaient convoyer les soldats de la craie vers les autres régions du Sénégal. Tous les syndicats, parents d’élèves, élèves, médias et société civile avaient dénoncé ce regroupement humain qui détonnait avec l’observance stricte des mesures barrières. Même si presque tout le monde présent ce jour-là portait le masque, cela n’était pas un gage sûr de protection contre le virus d’autant que plusieurs masques ne respectent pas les normes anti-projection. Et vu la promiscuité et la bousculade pour se procurer des places dans les bus affrétés, il était probable que plusieurs enseignants contracteraient la maladie ce jour-là. Les enseignants eux-mêmes étaient conscients du danger qu’ils couraient le jour du départ. Mais contre mauvaise fortune, il leur a fallu faire bon cœur. Au prix même d’attraper la maladie du Covid-19. Si le ministre de l’Intérieur a sorti un arrêté pour interdire les déplacements interrégionaux, c’est pour éviter le risque de propagation rapide de la maladie surtout des hommes et femmes venant des foyers de contamination comme Dakar et Touba. Si Aly Ngouille Ndiaye s’est rétracté à propos des autorisations de Korité, c’est parce que, sur avis du CNGE, les dangers de dissémination du coronavirus SARS-Cov-2 au sein des localités de l’intérieur étaient réels. Alors pourquoi, trois jours après la Korité, a-t-on autorisé le voyage de masse des enseignants ? Un voyage interdit aux fidèles qui voulaient célébrer la fête de l’Aïd hors de Dakar. Voilà l’incohérence des décisions émanant des différents ministères ! Pourtant le leader du Cusems, Abdoulaye Ndoye, avait proposé au ministre de l’Education d’établir des points de ramassage sectoriels des enseignants compte tenu de leurs lieux d’habitation non seulement pour éviter les regroupements, sources rapides de contamination, mais aussi pour leur alléger la souffrance de se déplacer avec bagages et familles éventuellement. Hélas, rien n’y a fait et le ministre a tenu vaille que vaille à entasser les milliers d’enseignants dans un endroit qui contiendrait difficilement 200 enseignants sans respect de la distanciation sociale. Et il a fallu le premier jour du départ dans une cohue indescriptible pour que le ministre de l’Education Mamadou Talla, présent sur les lieux toute honte bue, constatât le manque d’organisation de ses services et de ceux du ministre des Transports, Oumar Youm. D’ailleurs, le directeur de la société de transports DDD, Moussa Diop, pour masquer les carences et le manque de professionnalisme de sa structure, qui devait planifier les départs en collaboration avec l’Education nationale, s’est défaussé sur les pauvres enseignants exténués par la situation de désordre qui régnait au terminus Liberté V. Et si le départ a été chaotique, le trajet l’aura été beaucoup plus pour la plupart des enseignants. C’était le calvaire. Durant des jours, les enseignants ont porté leur croix pour être au rendez-vous du devoir le 2 juin. Combien sont-ils à avoir été abandonnés dans des villages par un bus DDD sous prétexte que sa feuille de route ne lui permet pas de rajouter un kilomètre supplémentaire à la distance déjà parcourue ? Combien sont-ils ces Jambaar de la craie, à passer stoïquement la nuit à la belle étoile dans ces conditions d’abandon parce que stigmatisés par les villageois qui refusent de leur offrir un espace de repos provisoire ? Combien sont-ils ces enseignants qui, une fois arrivés au village de service, ont été l’objet de propos, de comportements et d’actions stigmatisants et discriminants des populations locales ?
Et le sort des autres enseignants…
Les enseignants sont entre le marteau de la reprise des cours dans un climat anxiogène exacerbé par l’hostilité de certains parents d’élèves inconscients et l’enclume de l’irresponsabilité des autorités étatiques. Lesquelles ne soucient point de la santé des serviteurs de la nation qu’ils sont. C’est la fracture maintenant entre les éléments d’un même en-soi éducatif, d’un même horizon socioculturel pourtant condamnés à vivifier une collaboration fusionnelle quelle que soit la dureté des épreuves. Aujourd’hui que des cas sont déclarés chez des enseignants en Casamance, quel est le sort qui sera réservé aux autres en attendant l’improbable reprise des cours ? Va-t-on faire des prélèvements sur ceux et celles qui ne présentent aucun signe de la maladie si l’on sait que certains parmi eux regimbent à toute idée de dépistage ? Ou bien va-t-on leur permettre de retourner sur Dakar puisque leur existence dans leur lieu d’exercice est compromise par le sentiment d’hostilité des populations hôtes ? Sans être cynique, il convient de dire que la découverte des cas positifs a été du pain béni pour les autorités leur permettant d’ajourner la reprise des cours parce que beaucoup d’éléments essentiels du protocole sanitaire n’allaient pas être au point le jour du 2 juin. Ils sont nombreux ces établissements scolaires qui n’ont pas encore de toilettes fonctionnelles, qui sont dépourvus d’eau, qui n’ont pas assez de solutions hydro-alcoolisées, de masques ou de thermoflashs. D’ailleurs les écoles privées catholiques plus prévenantes, plus responsables et plus précautionneuses ont préféré différer la date de reprise de leurs cours. Un vrai désaveu qui invalide la décision du président et de ministre de l’Education incompétent. Alors que l’épidémie de Covid-19 semble encore loin d’une décrue générale, sans désemparer, Mamadou Talla tient obsessionnellement à organiser les examens de l’entrée en 6è, du Bfem et du Bac et non à reprendre les cours et sauver les enseignements. Il faut sauver les milliards dépensés en termes de salaires, d’indemnités et de fonctionnement et tant pis pour la vie « non » précieuse des apprenants et des enseignants. Si demain, le nombre de cas positifs se multiplie chez les enseignants, la reprise risque d’être un serpent de mer. Et les enseignants attendront toujours Godot Talla pour reprendre vaillamment la craie.
"IL Y A UN DISCRÉDIT DES INSTITUTIONS DE L'ÉTAT"
Enseignant-chercheur en sciences de la communication au Cesti, Dr Sahite Gaye relève un «talonnement» flagrant dans la gestion de la crise liée au Covid-19
Enseignant-chercheur en sciences de la communication au Cesti, Dr Sahite Gaye relève un «talonnement» flagrant dans la gestion de la crise liée au Covid-19. L’expert en communication de crise suggère au président de la République des «mesures fortes» pour reprendre la main. Comme se séparer de certains ministres par exemple.
Comment analysez-vous les actions du gouvernement après le report de la reprise des cours ?
On assiste à une crise de la gestion de la crise. Elle est le fruit de l’accumulation de plusieurs erreurs et fautes. Les ministres envoyés sur le front n’ont pas su relever le défi. Ils ont été dépassés, tétanisés et avec des dérapages dans l’exercice de leurs fonctions. Diouf Sarr ne rassure plus la population. Aly Ngouille, avec ses nombreux arrêtés et communiqués confus, a rendu floue la situation pour la population. Le ministre des Transports idem. Et le comble, c’est cette cacophonie liée à la reprise des cours avec le ministre de l’Education, sans oublier la question de l’aide à la presse avec le ministre de la Culture. Le gouvernement a montré ses limites par rapport à la gestion du coronavirus. Le discours du Président du 11 mai a sonné le divorce et l’éclatement du consensus autour du Covid-19. Sa décision a manqué de cohérence et il n’a pas pris le temps d’expliquer aux Sénégalais pourquoi ce choix. Contrairement à son premier discours, les Sénégalais n’ont pas eu une bonne perception des raisons avancées.
Quelles seront les conséquences de ces fautes du Président et de ses ministres ?
Il y a un discrédit des institutions de l’Etat, une fragilisation davantage de la parole publique, sans oublier un relâchement et une possibilité d’augmentation des manifestions par rapport aux mesures restrictives liées au coronavirus. Tout pilotage à vue fragilise les actions et rend la compréhension impossible. On est passé d’une gestion de crise à une crise de la gestion du coronavirus. Ils ont manqué de produire des perspectives qui permettent aux Sénégalais de produire du sens. Il y a un tâtonnement flagrant. Dans cette démarche, le résultat de chaque action qui n’est pas conforme aux conditions est rejeté. Cette approche est utilisée par les novices en résolution de problèmes. Elle exige beaucoup de temps et d’énergie. Et à la longue, ça lasse, fatigue et pousse au rejet.
Macky Sall peut-il inverser la tendance ?
Il lui faut des mesures très fortes et sans politisation pour espérer renverser la tendance, en n’oubliant pas que les deux mamelles de la gestion d’une crise sont l’humilité dans la transparence et la pédagogie dans l’action. Dégommer et sanctionner certains responsables permettrait d’avoir un peu de répit, mais pas d’effacer les bévues. En guise d’exemple, pourquoi pas se séparer de certains ministres et redistribuer les responsabilités à d’autres plus consensuels ? Les mesures doivent être à la hauteur des aberrations commises au bon moment aussi.
LES GRANDS RATÉS DE LA GESTION DU CORONAVIRUS
Par une série de mesures prises on non, Macky Sall, qui avait réussi à instaurer un consensus national fort autour de la question, nage dans une mer agitée devant la persistance des cas
Le report de la reprise des cours a sonné le glas des errements dans la gestion de la pandémie. Par une série de mesures prises on non, Macky Sall, qui avait réussi à instaurer un consensus national fort autour de la question, nage dans une mer agitée devant la persistance des cas.
C’est une succession de décisions qui a réussi à faire voler en éclats l’unanimité qui a entouré la gestion initiale de la crise liée à la pandémie du Covid-19. Au lendemain du report de la reprise des cours, le pouvoir semble donner l’impression qu’il gouverne en pilotant à vue. En recevant la classe politique, la Société civile, les religieux, bref les forces vives de la Nation, le chef l’Etat s’était bâti une solide alliance nationale contre le virus. C’était sans compter avec les errements et/ou la non-prise des décisions qui auraient permis de circonscrire la pandémie dans les zones initiales. La fermeture tardive des frontières aériennes dont la conséquence est l’arrivée en masse de cas importés, le non-confinement qui a favorisé la circulation du virus et les mesures restrictives instaurées dès le début de la bataille n’ont pas freiné l’avancée de la maladie.
Quid de leur assouplissement ? Le tableau clinique révèle que la fièvre continue de monter, notamment dans la capitale. En autorisant la réouverture des mosquées dans son discours du 11 mai, Macky Sall a pour certains fléchi face à la pression. Et même sa décision n’est pas suivie. L’idée d’un président qui expose ses concitoyens lorsque la situation devient intenable a germé dans l’opinion. D’autres voient un général qui avait déclaré que «nous sommes en guerre» et qui, en pleine bataille, rend les armes. Aujourd’hui, nombre de Sénégalais prennent leurs responsabilités pour se prémunir du virus face au relâchement qui a gagné certains pans de la société dont la plupart font fi du respect des mesures barrières.
Même dans la majorité présidentielle, certaines voix s’élèvent pour critiquer sa gestion. Au moment où l’opposition (à part Ousmane Sonko) est emmurée dans un silence depuis. Député maire socialiste, Abdoulaye Wilane dénonce une «sorte de pilotage à vue» dans la gestion du gouvernement. Le Grand Serigne de Dakar, Abdoulaye Makhtar Diop, a critiqué l’assouplissement des mesures restrictives dans la capitale.
Face à une situation qui commence à échapper au contrôle, le Président Sall doit cogiter sur une nouvelle méthode pour reprendre la main afin de restaurer la puissance de l’Etat.
PAR 12 INTELLECTUELS ET LEADERS D'OPINION SÉNÉGALAIS
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LE SILENCE DU TEMPS
EXCLUSIF SENENPLUS - D’une manière inédite, le cours de la vie personnelle, professionnelle et sociale de chacun d’entre nous est encore profondément bouleversé - Des peurs, des craintes mais aussi des rêves et des espoirs germent dans les esprits
Le ressenti du confinement est exprimée dans cette table-ronde virtuelle organisée par SenePlus. D’une manière inédite, le cours de la vie personnelle, professionnelle et sociale de chacun d’entre nous est encore profondément bouleversé. Le Sénégal sous état d’urgence, le temps semble ralenti, le monde à l’arrêt. Des peurs, des craintes mais aussi des rêves et des espoirs germent dans les esprits et apparaissent dans quelques œuvres éparses. Le désir de partage titille visiblement les consciences. Partageons donc !
12 grands leaders d’opinion sénégalais se sont retrouvés sur Zoom. Et tous, répondent à une question et une seule : « Au plan personnel, au plan humain quel est l’impact de cette crise mondiale sanitaire qui pourrait alimenter de manière significative votre réflexion sur les prochaines années ?
Les participants pour cette première, l'artiste musicien Didier Awadi, le philosophe et chercheur Souleymane Bachir Diagne, l'historien Babacar Buuba Diop, le politologue Ousmane Blondin Diop, l'écrivan et journaliste Elgas, l'historienne Penda Mbow, écrivaine et analyste politique Fatoumata Sissi Ngom, l'expert en prospective Alioune Sall Paloma, l'analyste et ancien patron d'Amnestie internationale Pierre Sané, l'écrivain Mbougar Sarr, l'experte en développement Marie-Angelique Savané, et enfin, la politologue et ancienne ministre de France Rama Yade. La facilitation de la discussion est assurée par l'analyste René Lake.