Thierno Alassane Sall noie le gouvernement dans le pétrole Total
«Le protocole de l’Elysée : confidences d’un ancien ministre du Pétrole sénégalais ». Tel est le titre provocateur de l’ouvrage de Thierno Alassane Sall parvenu à « L’As », hier. Dans ce brûlot qui traite de plusieurs thèmes dont son passage dans le gouvernement en tant que ministre du Pétrole, il revient en détail sur bien des questions qui ont défrayé la chronique autour de la gestion du pétrole et du gaz sénégalais. Un sujet à la fois passionnant et détonant en ce sens qu’il révèle les rôles joués par les acteurs dans le bradage des ressources en faveur des intérêts français. Bref, le titre lui-même est évocateur, puisqu’il renseigne sur la manière pour le moins scélérate dont le géant français Total a fait son entrée imprévue dans la gestion du pétrole sénégalais. C’est un document plein d’anecdotes, notamment sur les fourberies du ministre Farba Senghor à Libreville, et des révélations croustillantes mettant en scène des ministres importants dans le dispositif, décrivant ainsi l’actuel régime comme une constellation de leaders plus affairistes que patriotes à la solde de la France. Sur près de 500 pages, l’ancien ministre des Infrastructures parle du pétrole, du gaz, de la vérité, des valeurs, de Mahammad Dionne, des explications non convaincantes d’Aly Ngouille Ndiaye, des excès de colère de Macky Sall, de l’implication inacceptable de l’Elysée etc..
Les Eaux usées inondent Buntu Pikine
Buntu Pikine renoue avec la saleté et les mauvaises odeurs en cette période d’hivernage. Ce, à cause des eaux usées mélangées aux eaux pluviales stagnantes près de l’Eglise, plus précisément près de la route d’entrée qui mène à Chavanel et jusqu’à Tally Bou Mack. Ces eaux usées constituent une menace pour la santé et la sécurité publique des élèves qui sont à l’Ecole Notre Dame du Cap-Vert de Pikine, et un danger pour les vieillards qui parfois glissent et tombent. Et pourtant, l’Office national de l’assainissement du Sénégal (Onas) refuse de réagir, selon les riverains de ce quartier qui crient au secours et demandent au ministre en charge de ce secteur, Serigne Mbaye Thiam, de réagir avant qu’il ne soit trop tard.
La Police traque les bandits à Ziguinchor
Dans le cadre de sa traditionnelle mission de sécurité publique et de maintien de l’ordre et de lutte contre le trafic de stupéfiants, le Commissariat central de Ziguinchor, selon nos sources, a procédé, du 1er janvier 2020 à nos jours, au déferrement de 71 personnes dont 24 pour trafic de chanvre indien avec la saisine de 23 kilogrammes de l’herbe maudite, et de 47 autres personnes pour détention et usage de chanvre indien avec une saisine de cornets de cette drogue. Ainsi, les hommes du Commissaire central de Ziguinchor Adramé Sarr, qui de jour comme de nuit font des patrouilles régulières et permanentes, ont encore, selon nos sources, interpellé toutes ces personnes au niveau du périmètre communal de cette localité.
Des ivoiriens se font entendre à Dakar
La section locale du Front populaire ivoirien (Fpi) établie au Sénégal demande au Président Alassane Ouattara de renoncer à sa candidature pour un troisième mandat. Ces proches de l’ancien président déchu Laurent Gbagbo, qui jugent sa candidature illégale et anticonstitutionnelle, ont demandé à l’actuel locataire du Palais de Yamoussoukro de se retirer pour éviter de faire sombrer leur pays dans la violence et de passer par la fenêtre pour partir.
Youssou Touré Adama Fall, le clash
Rebondissement dans le malaise existentiel du réseau des enseignants de l’Apr. D’après Adama Fall lui-même, il est convoqué samedi prochain à Diourbel sur plainte du coordonnateur du Réseau, l’ancien ministre Youssou Touré dont il fut d’ailleurs un collaborateur. Mais pourquoi samedi et pourquoi Diourbel ? Adama Fall croit savoir qu’on doit le faire taire en l’envoyant en prison pour qu’il ne dénonce pas les agissements du coordonnateur national de la structure, notamment sa gestion des fonds à lui alloués lors de la tabaski. Où va se terminer cette histoire si l’on sait qu’Adama Fall a un enfant qu’il a baptisé Youssou Touré. Comme pour dire qu’en politique, le mot jamais n’existe pas car les amis d’aujourd’hui peuvent être des adversaires demain.
Saisie de 110 kilogrammes de chanvre indien à Sédhiou
Dans la nuit du 17 au 18 août 2020, des policiers ont saisi 110 kilogrammes de cannabis de la variété verte dans le village de Moyafara, dans le département de Goudomp. Il s’agit d’éléments de la Brigade Régionale de Stupéfiants (BRS) de Sédhiou de l’Office Central de Répression du Trafic Illicite des Stupéfiants (OCRTIS), qui dans le cadre de leurs missions régaliennes de lutte contre la drogue et le crime organisé, ont opéré cette importante saisie de chanvre indien. En effet, Cette quantité de drogue était convoyée par quatre individus à bord de deux motocyclettes. L’un d’eux, de nationalité étrangère, a été interpellé, les autres, abandonnant la cargaison sur place, ont pris la fuite. La personne interpellée a été placée en garde à vue pour trafic internationale de drogue, les motocyclettes et la drogue consignées aux fins de scellés.
Les jeunes de Ballou risquent gros
Les 19 jeunes de Ballou qui s’en étaient pris aux forces de l’ordre qui avaient interrompu leur match de football ont comparu ce mercredi, à la barre du tribunal des flagrants délits de Tambacounda. Placés sous mandat de dépôt depuis samedi dernier, ils sont accusés d’avoir saccagé les locaux de la brigade de gendarmerie de la localité avant de blesser deux gendarmes. Si le juge suit le maître des poursuites, les 19 jeunes ne sortiront pas de sitôt de prison. Le ministère public a requis contre eux une peine d’un an de prison dont 3 mois ferme. L’affaire est mise en délibéré pour jugement qui sera rendu le 2 septembre prochain.
La santé secouée
Ça bouge au ministère de la Santé dans ce contexte de covid19. Le chef de l’Etat a nommé hier Docteur Babacar GUEYE, Médecin spécialiste en Santé publique, au poste de Directeur de la Lutte contre la Maladie, en remplacement de Docteur Amadou DOUCOURE qui devient Directeur de la Santé de la Mère et de l’Enfant, en remplacement de Docteur Omar SARR, appelé à d’autres fonctions.
La Police a un nouveau Dsp ; Wahab Sall Drh
La Police également a connu un léger réaménagement. Abdoul Wahabou SALL, Commissaire de Police divisionnaire de Classe exceptionnelle, matricule de solde n° 600 866/B, qui gérait de main de maître la sécurité du pays, devient le Directeur des Ressources Humaines au ministère de l’Intérieur, en remplacement du Commissaire de Police divisionnaire de Classe Exceptionnelle Doudou NDIAYE, admis à faire valoir ses droits à une pension de retraite. A la Dsp, il sera remplacé par un autre flic aussi compétent et rigoureux : Modou DIAGNE qui a fait la Centif, puis Touba et d’autres commissariats, était jusque-là le Chef du Service régional de Sécurité publique et Commissaire central de Thiès où il avait remplacé Idrissa Cissé le Directeur de la Police judiciaire. Après Ndiarré Sène, Idrissa Cissé qui ont été promus alors qu’ils occupaient le poste de patron de la sécurité publique à Thiès, Modou Diagne devient Directeur à son tour. C’est comme qui dirait que Thés demeure la dernière marche pour devenir Directeur.
27 personnes arrêtées pour défaut de port de masques
Dans certaines zones, les autorités ne badinent pas du tout avec le port de masque. La brigade de gendarmerie de Ourossogui (nord-est) déclare avoir interpellé 27 personnes pour défaut de port de masque, a appris le correspondant permanent de l’APS de source sécuritaire. Ces 27 personnes ont été interpellées au cours d’une opération de sécurisation qui s’est déroulée entre les 18 et 19 août. Cette opération a aussi permis de contrôler 29 motos dont 6 ont été mobilisées pour défaut de papiers. Les amendes infligées aux contrevenants s’élèvent à plus de 80.000 frans CFA. Les contrôles vont se poursuivre jusqu’à vendredi prochain.
Guy Marius et cie à Tobène
Le plus célèbre des activistes sénégalais Guy Marius Sagna et ses amis volent au secours des populations victimes de spoliations foncières. «Pour exprimer notre solidarité aux habitants de Tobène, Kër Maguèye, Maka Dieng qui luttent contre l’accaparement de leurs terres par les ICS avec la complicité de l’État néocolonial du Sénégal, je suis depuis 30 minutes à Tobène», informe Guy Marius Sagna.
Macky veut recenser les Sénégalais de l’extérieur
En conseil des ministres hier, le président de la République, revenant sur le suivi et la gestion des Sénégalais de l’Extérieur, a demandé au ministre des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’Extérieur de procéder, d’ici fin décembre 2020, au recensement de nos compatriotes de la Diaspora. Une excellente idée qui risque d’être un vœu pieux quant on sait que beaucoup de Sénégalais ont dû utiliser des papiers d’autres pays généralement en conflit pour se faire régulariser dans les pays d’accueil comme refugiés. Il s’y ajoute que les représentations consulaires ne sont pas souvent bien appréciées des compatriotes de la diaspora, d’où les limites objectives de ce recensement.
Le nombre de morts flambe en Gambie
La Gambie s’enlise. 14 nouveaux décès officiels liés à la COVID-19 ont été enregistrés hier. Le nombre de décès depuis mars 2020 est maintenant de 77 ; avec 172 nouveaux cas positifs sur un total de 2 288, alors qu’il y a eu 20 nouveaux cas de guérison. Au total, depuis mars, 435 patients ont recouvré la santé, 1 776 patients sont en traitement, et 302 personnes sont en quarantaine.
Babacar Diop inaugure le siège national de son parti
Le parti de Dr Babacar Diop dispose désormais d’un siège national. Fds inaugure son local samedi prochain. Il sera aux Parcelles Assainies. Avec ce siège, Babacar Diop devenu un peu moins loquace depuis sa sortie de prison, est en train de donner lentement sûrement une envergure que beaucoup de partis plus anciens n’ont pas.
par Ousseynou Nar Gueye
COUP D'ÉTAT TRÈS CIVILISÉ AU MALI
Les militaires qui ont fait mordre la poussière à IBK, refusent de procéder à la captation du pouvoir d'Etat, se posant plutôt en arbitre qui aura tranché entre un président impuissant car contesté et la rue malienne
Dans leur coup de force commencé dans la matinée du mardi 18 août, les militaires maliens de la garnison de Kati ont tenu à mettre les formes républicaines jusqu'au bout : emmenés l'après-midi au camp militaire de Kati avec son Premier ministre Boubou Cissé, c'est à minuit heure locale que l'alors toujours président du Mali IBK prononcera la déclaration par laquelle les militaires le démissionnent de la charge suprême du pays. Le gouvernement malien et l'Assemblée nationale étant automatiquement dissous dans la foulée, selon les paroles d'IBK, dont ce sont les derniers décrets présidentiels. Ceci devant les caméras du média audiviosuel gouvernemental, l'ORTM. ORTM qui avait été momentanément déserté par les journalistes quelques heures plus tôt, certains qu'ils étaient que ces militaires viendraient y faire des déclarations intempestives et martiales.
Mais ces militaires maliens ont opté pour un coup d'Etat civilisé, qui aura respecté les formes de la légalité. S'ils ont mis sur pied un Comité national de Salut du Peuple (CNSP) ce mercredi 19 août au matin, c'est vers "le peuple" justement que les regards se tournent désormais, "peuple" incarné par les contestataires du M5-RFP, pour former le gouvernement de transition politique civile qui conduira à des élections politiques générales, comme le souhaitent ces putschistes d'un (bon) genre particulier. IBK perd donc le troisième tour de l'élection présidentielle malienne de 2018. Et les militaires qui lui ont fait mordre la poussière refusent de procéder à la captation du pouvoir d'Etat, se posant plutôt en arbitre qui aura tranché entre un président impuissant car contesté, contesté car impuissant, IBK, et la rue malienne. "Nous, forces patriotiques regroupées au sein du Comité national pour le salut du peuple (CNSP), avons décidé de prendre nos responsabilités devant le peuple et devant l’histoire", a déclaré sur la télévision publique ORTM le porte-parole des militaires, le colonel-major Ismaël Wagué, chef d’état-major adjoint de l’armée de l’air.
Les militaires appellent donc à une transition politique civile conduisant à des élections "dans un délai raisonnable". Quel délai ? Il faudra en tout cas que celui-ci inclue le temps de libérer le chef de file de l'opposition Soumaila Cissé des mains des djihadistes qui le détiennent depuis cinq mois. Les militaires au pouvoir affirment que tous les accords internationaux seront respectés. C'est une deuxième perche de légalisme qu'ils tendent à la communauté internationale pour se faire repêcher par celle-ci "à l'oral", après les condamnations unanimes qui avaient fusé de partout avant l'arrestation d'IBK et de son Premier ministre, la CEDEAO en tête qui avait aussitôt décrété une batterie de sanctions.
Contesté dans la rue depuis plusieurs semaines, le président malien Ibrahim Boubacar Keïta est donc formellement renversé dans la nuit de mardi à mercredi par un coup d’Etat militaire après une mutinerie acclamée par des manifestants. Une nouvelle crise dans un pays plongé dans la tourmente djihadiste ? Rien n'est moins sûr, car les militaires se sont donné les moyens de faire en sorte que leur intervention décisive dans le jeu politique malien ne soit pas une pantalonnade qui rajoute à la confusion qui régnait dans la rue malienne et au palais présidentiel de Koulouba depuis trois mois. En effet, une fois formé le gouvernement civil de transition qui est annoncé et une fois connue, la date à laquelle de nouvelles élections générales (législatives et présidentielle) seront organisée, la CEDEAO devrait rapidement lâcher du lest. Entraînant du même coup une acceptation de fait ou en tout cas une tolérance diplomatique de ce putsch légaliste, par l'Union Africaine et les puissances étrangères, notamment la France de Macron qui détient 5 100 militaires armés stationnés au Mali (la force Barkhane). Ironiquement, c'est peu-être Macron qui aura déclenché ce coup d'Etat très civilisé : en laissant son Quai d'Orsay (ministère français des Affaires étrangères) classer le Mali en zone rouge ("destination formellement déconseillée") ce lundi 17 août, il a envoyé le dernier signal qui manquait à l'armée malienne comme à la communauté internationale pour acter que le pays n'était plus officiellement gouverné au sommet.
Ousseynou Nar Gueye est fondateur-éditeur du site d'information Tract.sn
UN COLONEL NOUVEL HOMME FORT À BAMAKO
L'officier supérieur Assimi Goita, président de la junte militaire au Mali, a estimé mercredi face à la presse que son pays se trouvait "dans une situation de crise socio-politique, sécuritaire" et n'avait "plus le droit à l'erreur"
Un colonel de l'armée malienne, Assimi Goita, s'est présenté mercredi comme le nouvel homme fort à Bamako, au lendemain du coup d'Etat ayant renversé le président Ibrahim Boubacar Keïta, un putsch unanimement condamné à l'étranger.
"Je me présente: je suis le colonel Assimi Goita, le président du Comité national pour le salut du peuple (CNSP)", a déclaré à la presse cet officier supérieur qui était apparu dans la nuit de mardi à mercredi à la télévision nationale aux côtés d'autres militaires, sans prendre la parole.
Il a estimé que son pays se trouvait "dans une situation de crise socio-politique, sécuritaire" et n'avait "plus le droit à l'erreur".
Le colonel Goita ne pourra pas compter sur la moindre indulgence de la communauté internationale qui a unanimement condamné le putsch, réclament le retour à l'ordre constitutionnel et la libération du président Keïta arrêté mardi par les militaires.
Les pays membres du Conseil de sécurité de l'ONU ont demandé la libération "immédiate" du président renversé et "souligné la nécessité pressante de rétablir l'Etat de droit et d'aller vers un retour de l'ordre constitutionnel".
Fortement engagée au Sahel où elle combat les groupes jihadistes qui ont contribué à déstabiliser le Mali, la France a, par la voix du président Emmanuel Macron, a estimé que "la lutte contre les groupes terroristes et la défense de la démocratie et de l'Etat de droit sont indissociables".
"En sortir, c'est provoquer l'instabilité et affaiblir notre combat.Ce n'est pas acceptable", a-t-il poursuivi sur Twitter, en appelant à ce que le pouvoir soit "rendu aux civils".
L'UA a de son côté suspendu le Mali "jusqu'au retour de l'ordre constitutionnel" et demandé "la libération du président (...) du Premier ministre et des autres responsables du gouvernement arrêtés par la force par l'armée".
La Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao), qui a tenté sans succès de résoudre la crise qui frappe le Mali depuis juin, a également suspendu ce pays avant une réunion jeudi en visioconférence.
L'UE a réclamé la libération "immédiate" des dirigeants arrêtés et un "retour immédiat de l'état de droit"."La stabilité de la région et du Mali, la lutte contre le terrorisme doivent demeurer des priorités absolues", selon elle.
Washington a aussi "fermement" condamné "la mutinerie" et exigé que la "liberté et la sécurité" des dirigeants maliens et de leurs familles soient "assurées".
L'Algérie, qui partage 1.400 km de frontières avec le Mali et a joué un rôle important dans les pourparlers de paix dans ce pays, "réitère son ferme rejet de tout changement anticonstitutionnel de gouvernement".
Autre pays du Maghreb partenaire du Mali, le Maroc a appelé à une "transition civile pacifique, permettant un retour rapide et encadré à l’ordre constitutionnel".
- Halte au "vandalisme" -
Ces condamnations n'ont pas dissuadé le colonel-major Ismaël Wagué, porte-parole du (CNSP), de demander à ses compatriotes de "vaquer librement à leurs occupations".Il a aussi demandé "d'arrêter immédiatement les actes de vandalisme et de destruction des édifices publics".Des manifestants ont incendié mardi le cabinet d'avocat de l'ex-ministre de la Justice Kassim Tapo.
Ismaël Wagué n'a en revanche rien dit sur le président Keïta, dit IBK, ni le chef du gouvernement, Boubou Cissé, toujours au camp militaire de Kati, le quartier général des auteurs du coup d'Etat près de Bamako.
Le calme a régné mercredi dans la capitale, qui portait encore les stigmates des incidents ayant ponctué ce renversement de pouvoir, en particulier l'incendie du cabinet d'avocats de M. Tapo.
Les habitants de Bamako ont vaqué à leurs occupations, mais les administrations et les banques étaient fermées.
Le président Keïta, élu en 2013 puis réélu en 2018 pour cinq ans, a annoncé à la télévision publique sa démission dans la nuit de mardi à mercredi, puis la dissolution du gouvernement et de l'Assemblée nationale.
Le colonel-major Ismaël Wagué, chef d'état-major adjoint de l'armée de l'air, a ensuite annoncé la création du CNSP, expliquant que les militaires avaient "décidé de prendre (leurs) responsabilités" face au chaos et à l'insécurité.
Les militaires ont dit vouloir "une transition politique civile conduisant à des élections générales crédibles" dans un "délai raisonnable".
Ils ont annoncé la fermeture des frontières et l'instauration d'un couvre-feu.
- Respect des accords passés -
"Tous les accords passés" seront respectés, a affirmé le colonel Wagué.
"La (mission de l'ONU) Minusma, la force (anti-jihadiste française) Barkhane, le G5 Sahel (qui regroupe cinq pays de la région), la force Takuba (un groupement de forces spéciales européennes censées accompagner les Maliens au combat) demeurent nos partenaires", a-t-il assuré, en ajoutant que les militaires étaient "attachés au processus d'Alger", l'accord de paix signé en 2015 entre Bamako et les groupes armés du nord du pays.
Le coup d'Etat prolonge la crise socio-politique à laquelle est confronté le Mali depuis plusieurs mois et que la médiation de la Cédéao n'a pas pu résoudre.
Une coalition hétéroclite d'opposants politiques, de guides religieux et de membres de la société civile a multiplié les manifestations pour réclamer le départ du président Keïta, accusé de mauvaise gestion.
Mercredi soir, ni le M5, ni la figure de proue de la contestation, l'influent imam Mahmoud Dicko, n'avaient encore fait part de leurs intentions après le renversement de leur bête noire.
par Cheikh Omar Diallo
MALI, UN COUP D’ETAT CITOYEN
Le huitième chef d’État malien a eu la faiblesse de croire que la légalité constitutionnelle suffisait. En 2020 et même après, l’urne ne sera plus une garantie contre les accidents démocratiques
Hier le président Ibrahim Boubacar Keïta (2013-2020) était tout ; aujourd’hui, il n’est plus rien. En effet, le huitième chef d’État malien a eu la faiblesse de croire que la légalité constitutionnelle suffisait. Il en savait bien peu, fort peu, trop peu sur la capacité d’indignation de son peuple. Par conséquent, il dormait confortablement dans l’illusion du pouvoir ; or la réalité du pouvoir était entre d’autres mains religieuses et citoyennes à la fois.
Avant ce 18 août 2020, un autre président, Blaise Compaoré avait ouvert l’outre aux vents en octobre 2014. Après 27 ans de pouvoir le « Bismarck du Sahel » était « chassé » du pouvoir, en moins de 48 heures.
Comment en est-on arrivé là ?
Mais parce que, de plus en plus, des millions de jeunes Africains, rongés par une révolte saine, revendiquent bruyamment la démocratie, la vraie, celle qui est basée sur la franche amélioration du quotidien, la stricte égalité des chances, la juste gouvernance et la bonne redistribution des richesses.
Cette profonde mutation commence à faire courir un nouveau frisson démocratique que nous nommerons « le coup d’Etat citoyen ».
Une rapide comptabilité ne sera pas de trop
Au départ était le coup d’Etat militaire : une trentaine en 1970 ; une vingtaine en 1980 ; une quinzaine en 1990, une dizaine en 2010 ; un en 2014, et enfin un dernier en 2020. Encore que l’année n’est pas finie. Suivez notre regard dans l’espace CEDEAO.
Aujourd’hui, nous vivons dans le cycle tumultueux des révolutions démocratiques avec son p’tit manuel du coup d’Etat citoyen qui est, au fond, d’une simplicité bouleversante.
Comme en Tunisie, en Égypte, en Ukraine, au Burkina Faso, le président élu, Ibrahim Boubacar Keïta, (IBK) est « chassé » par des manifestations populaires. Une bonne partie du peuple – les mains nues – investit les places fortes, s’érige en bouclier de la démocratie. Puis l’étau se resserre autour du chef qui est, à la fin, exfiltré.
Avant « les tentations Compaoré et IBK», la plupart des élus étaient dans un état d’ébriété électorale, habitaient au-dessus d’eux-mêmes et couverts d’une légalité factice. Or cette démocratie en trompe-l’œil est faite de tripatouillages et de bidouillages : voilà la tragique erreur démocratique commise par IBK et sa coterie.
En 2020 et même après, l’urne ne sera plus une garantie contre les accidents démocratiques. A la vérité, les dirigeants africains seront condamnés à prévoir… l’imprévu démocratique. La légalité démocratique ne compensera jamais la légitimité démocratique. Et, les condamnations de changements anti-constitutionnels ne seront que de principe.
Dr Cheikh Omar Diallo est Docteur en Sciences Politiques , expert en Communication, Directeur de l’Ecole d’Art Oratoire et de Leadership.
LES NOMINATIONS AU CONSEIL DES MINISTRES DU 19 AOÛT
SenePlus publie ci-dessous, les nominations prononcées au Conseil des ministres du 19 août 2020.
"Au titre des mesures individuelles, le Président de la République a pris les décisions suivantes :
Docteur Babacar GUEYE, Médecin spécialiste en Santé publique, matricule de solde n° 639 594/L, est nommé Directeur de la Lutte contre la Maladie, en remplacement de Docteur Amadou DOUCOURE, appelé à d’autres fonctions ;
Docteur Amadou DOUCOURE, Médecin spécialiste en Santé publique, matricule de solde n° 609 674/L, précédemment Directeur de la Lutte contre la Maladie, est nommé Directeur de la Santé de la Mère et de l’Enfant, en remplacement de Docteur Omar SARR, appelé à d’autres fonctions ;
Monsieur Abdoul Wahabou SALL, Commissaire de Police divisionnaire de Classe exceptionnelle, matricule de solde n° 600 866/B, précédemment Directeur de la Sécurité publique, est nommé Directeur des Ressources Humaines, en remplacement du Commissaire de Police divisionnaire de Classe Exceptionnelle Doudou NDIAYE, admis à faire valoir ses droits à une pension de retraite ;
Monsieur Modou DIAGNE, Commissaire de Police divisionnaire de Classe exceptionnelle, matricule de solde n° 519 321/K, précédemment Chef du Service régional de Sécurité publique et Commissaire central de Thiès, est nommé Directeur de la Sécurité publique, en remplacement du Commissaire de Police divisionnaire de Classe exceptionnelle Abdou Wahabou SALL, appelé à d’autres fonctions."
MACKY DEMANDE LE RECENSEMENT DES SÉNÉGALAIS DE LA DIASPORA
Des instructions ont été données au ministre des Affaires étrangères de procéder à l'opération d'ici la fin de l'année - COMMUNIQUÉ DU CONSEIL DES MINISTRES
SenePlus publie le communiqué du Conseil des ministres du 19 août 2020.
"Le Président de la République, Son Excellence Monsieur Macky SALL, a présidé le Conseil des Ministres, le mercredi 19 août 2020, à 10 heures, au Palais de la République.
Le Chef de l’Etat a, à l’entame de sa communication, adressé ses chaleureuses félicitations à la communauté chrétienne à l’occasion de la célébration de la Fête de l’Assomption, le 15 août 2020.
Le Chef de l’Etat a, au titre de la finalisation du processus d’élaboration et de validation du PAP II/PSE ajusté et accéléré, rappelé les réformes innovantes et mesures sectorielles importantes, arrêtées lors du séminaire gouvernemental, du jeudi 11 août 2020.
Le Président de la République a, dans cette dynamique, exhorté le Gouvernement à poursuivre les efforts d’amélioration de la qualité de la dépense publique, tout en insistant sur la consolidation des accès universels, l’accélération des projets d’infrastructures sectorielles en cours de réalisation. Il a, en outre, insisté sur le renforcement des programmes agricole, horticole et d’élevage pour assurer notre souveraineté alimentaire prioritaire, le lancement immédiat des programmes d’accélération de croissance et de création d’emplois, notamment le Programme des 100.000 logements et la réalisation des Zones économiques spéciales et des Agropoles.
Le Chef de l’Etat a, également, invité les ministres concernés à œuvrer pour l’ancrage national de la politique du « Produire et Consommer local », et à prendre en compte le financement adéquat du « Programme Pays pour le Travail Décent », afin de consolider la modernisation du marché du travail. Il a, enfin, demandé au Ministre du Tourisme et des Transports aériens, en relation avec le Ministre de l’Aménagement du Territoire, le Ministre de la Culture et le Ministre de l’Artisanat, d’actualiser la Stratégie de promotion touristique de la Destination Sénégal.
Le Président de la République, abordant la question de l’intensification des programmes de développement de l’artisanat, a demandé au Ministre des Finances et du Budget et au Ministre de l’Artisanat, de renforcer les initiatives et soutiens aux artisans. Il a, à ce sujet, requis l’accroissement notable du budget alloué au Projet « Mobilier national », l’élaboration, avant fin septembre 2020, d’un programme global de réforme et de modernisation des Chambres des métiers.
Le Chef de l’Etat a, par ailleurs, évoqué l’impératif d’accélérer, de façon significative, la transformation de l’Administration, ainsi que les réformes d’amélioration de l’environnement des affaires, en vue d’asseoir durablement la stabilité et les performances de l’économie nationale. Il s’est, à cet effet, félicité du rang stable du Sénégal, classé 3ème sur 39 pays, dans le rapport 2019 de la Banque mondiale sur l’évaluation des Politiques et des Institutions en Afrique (CPIA). Le Président de la République, sur le climat social, la gestion et le suivi des affaires intérieures, a demandé au Ministre de l’Intérieur, de mettre en œuvre, en rapport avec le Ministre de l’Environnement, un Plan national de recensement, d’audit et de sécurisation des dépôts de produits chimiques dangereux.
Le Chef de l’Etat a, au titre des examens et concours, de l’alphabétisation et de la promotion des langues nationales, rappelé au Gouvernement la nécessité de prendre toutes les dispositions pour une bonne organisation des examens et concours sur toute l’étendue du territoire national. Il a, en outre, demandé au Ministre de l’Education de s’atteler à la préparation, impliquant tous les acteurs concernés, de la Semaine nationale de l’Alphabétisation et de Promotion des Langues nationales.
Le Président de la République, revenant sur le suivi et la gestion des sénégalais de l’Extérieur, a demandé au Ministre des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’Extérieur, de procéder, d’ici fin décembre 2020, au recensement de nos compatriotes de la Diaspora.
Le Chef de l’Etat a clos sa communication sur son agenda international.
Au titre des Communications,
Le Ministre d’Etat, Secrétaire général de la Présidence de la République a fait le point sur la renégociation de la concession de l’autoroute à péage Dakar-AIBD.
Le Garde des sceaux, ministre de la justice a fait une communication sur l’utilisation du bracelet électronique.
Le Ministre, en charge du suivi du Plan Sénégal Emergent a fait le point sur certains projets et réformes prioritaires.
Au titre des textes législatifs et réglementaires, le Conseil a examiné et adopté :
- le projet de décret portant charte de la déconcentration ;
Au titre des mesures individuelles, le Président de la République a pris les décisions suivantes :
Docteur Babacar GUEYE, Médecin spécialiste en Santé publique, matricule de solde n° 639 594/L, est nommé Directeur de la Lutte contre la Maladie, en remplacement de Docteur Amadou DOUCOURE, appelé à d’autres fonctions ;
Docteur Amadou DOUCOURE, Médecin spécialiste en Santé publique, matricule de solde n° 609 674/L, précédemment Directeur de la Lutte contre la Maladie, est nommé Directeur de la Santé de la Mère et de l’Enfant, en remplacement de Docteur Omar SARR, appelé à d’autres fonctions ;
Monsieur Abdoul Wahabou SALL, Commissaire de Police divisionnaire de Classe exceptionnelle, matricule de solde n° 600 866/B, précédemment Directeur de la Sécurité publique, est nommé Directeur des Ressources Humaines, en remplacement du Commissaire de Police divisionnaire de Classe Exceptionnelle Doudou NDIAYE, admis à faire valoir ses droits à une pension de retraite ;
Monsieur Modou DIAGNE, Commissaire de Police divisionnaire de Classe exceptionnelle, matricule de solde n° 519 321/K, précédemment Chef du Service régional de Sécurité publique et Commissaire central de Thiès, est nommé Directeur de la Sécurité publique, en remplacement du Commissaire de Police divisionnaire de Classe exceptionnelle Abdou Wahabou SALL, appelé à d’autres fonctions."
par Nioxor Tine
CONJURER LA MALÉDICTION DE DALAL JAMM
Combien de structures sanitaires ont été inaugurées en grande pompe, sans être entièrement fonctionnelles, comme celles de Fatick, Matam, Ziguinchor, etc. sans parler du scandale de l’hôpital-fantôme de Touba
Parmi les multiples répercussions de la COVID-19, on peut aussi noter l’exacerbation des contradictions au sein du système sanitaire, poussant certains acteurs, parmi les plus respectables, à poser des actions d’éclat héroïques, contrairement à leurs vieilles habitudes de réserve républicaine. Il faut reconnaître que certains actes posés, depuis toujours, par la classe politique, défient parfois le bon sens le plus élémentaire et feraient sortir de ses gonds le plus zen des moines bouddhistes.
Primat de diktats politiciens sur les critères techniques
Comment imaginer, en effet, qu’un bijou comme l’hôpital de Dalal Jamm, d’un coût de 51 milliards financé par l’État du Sénégal, la BADEA, l'OFID, la BID, le FSD, achevé pendant que le président Wade était au pouvoir, ne soit toujours pas entièrement opérationnel ?
Comment comprendre cette pseudo-inauguration du vendredi 22 juillet 2016, alors qu’aucune condition préalable n’était remplie, sur le plan des ressources humaines et de l’équipement ? Qu’a-t-on fait des sommations itératives de l’Association Guédiawaye Priorité Santé, invitant les autorités à respecter leurs engagements de rendre cet hôpital fonctionnel au début de 2017 ?
Le cas de Dalal Jamm ne constitue qu’un exemple, parmi tant d’autres, où, pour des raisons purement politiciennes et électoralistes, on a tordu le cou aux normes techniques. Combien de postes de santé se sont-ils subitement métamorphosés en centres de santé sans le plateau technique requis (service d’hospitalisation, laboratoire... ), attendant pendant de longues années d’être reconstruits et mis aux normes ? Combien de structures sanitaires ont été inaugurées en grande pompe, sans être entièrement fonctionnelles, comme celles de Fatick, Matam, Ziguinchor, etc. sans parler du scandale de l’hôpital-fantôme de Touba, où un détournement de 14 milliards, dans lequel 3 ministres et 3 chefs religieux sont cités, ont empêché la construction de la structure.
Au service d’anesthésie-réanimation de l’hôpital Le Dantec, les prestataires de soins se sont également plaints, dans les réseaux sociaux, au mois de Juillet dernier, de l’impossibilité pour eux, de disposer des examens complémentaires les plus courants et indispensables pour les soins en réanimation, par manque de réactifs ou en raison de pannes de certains appareils. Toujours, selon eux, il arrive même, que pour des examens spécialisés comme la gazométrie artérielle ou la fibroscopie, les parents du patient fassent appel au privé avec des coûts exorbitants. Et d’en appeler aux professionnels de la santé de refuser de travailler dans des conditions aussi déplorables.
Le PCA de Dalal Jamm a donc parfaitement raison de déplorer la non-fonctionnalité des structures essentielles de ce que devrait être le plateau technique d’un hôpital à vocation sous-régionale.
Vers la paralysie du système sanitaire
À mesure que la pandémie progresse, à un rythme certes moins soutenu que dans d’autres parties du monde, les personnes douées de raison se rendent bien compte, que le système sanitaire pourrait s’acheminer lentement mais sûrement vers un dépassement de son seuil de résilience. En effet, si les stratégies actuelles ne sont pas revues et corrigées, notre pays va au-devant de graves difficultés, aussi bien sur le plan sanitaire en termes de morbi-mortalité et d’invalidité que sur le plan économique avec extension de la pauvreté.
Cela pourrait entraîner l’effondrement du système de santé avec paralysie des structures ou une régression, comme c’est le cas actuellement, avec l’impossibilité pour le système de faire face à l’afflux des patients COVID, tout en menant à bien ses autres tâches. Il s’agit d’activités de prévention et de promotion de la santé mais aussi de la prise en charge correcte des autres pathologies comme les maladies non-transmissibles ou transmissibles (tuberculose, paludisme...).
Les capacités de prestations de services de santé vont être limitées du fait de ruptures de stocks ou de pénuries en ressources humaines, entraînant une baisse de la qualité et une détérioration de la continuité des services.
Même le plan d’investissement d’urgence pour un système de santé et d’action sociale résilient et durable 2020-2024, censé atténuer les inextricables problèmes causés par de considérables retards d’investissement difficiles à rattraper en un laps de temps si court, peine à se mettre en place. Quand il ne sert pas de prétexte à des effets d’annonce comme le recrutement sur la période 2020-2021 de cinq cent (500) médecins et mille (1000) agents professionnels de la santé, il donne lieu à des foires d’empoigne où certains spécialistes ou des groupes de pression ne prêchent que pour leurs propres chapelles.
Bizarre, tout de même, qu’au moment où notre système sanitaire risque d’être submergé par des cas graves, au moment où un hôpital de niveau 4 peine à assurer les examens complémentaires les plus basiques pour ses patients, certains plaident pour la construction de centres dédiés à des soins quaternaires comme la greffe de la moelle osseuse ou la procréation médicalement assistée. L’urgence serait plutôt au renforcement de nos capacités en santé communautaire pour stopper la propagation du coronavirus et en anesthésie-réanimation, quitte à faire appel à des médecins chinois ou cubains, en attendant de réorienter de fond en comble notre politique sanitaire.
Pour une nouvelle politique sanitaire
Il faut, d’ores et déjà, dans la perspective de l’après-COVID, initier des réformes audacieuses pour renforcer les systèmes de santé et ce, d’autant plus que cette pandémie nous apprend, que nous devrons de plus en plus nous passer de l’aide au développement.
La paralysie de larges secteurs et la perte drastique de points de croissance dans la région africaine suggèrent de plus en plus fortement que la santé – un peu avant la culture - est bel et bien au début et à la fin du développement socio-économique.
Il se confirme, de plus en plus, que le plaidoyer en faveur d’un financement conséquent du système sanitaire doit aider à faire face aux menaces connues mais aussi anticiper sur les chocs éventuels, de plus en plus vraisemblables, tant le niveau actuel de la globalisation atteint a accentué les risques de pandémie.
C’est dire qu’il est temps de rompre avec le pilotage à vue observé depuis plusieurs décennies et d’adopter une approche proactive, en adaptant les besoins de santé aux contextes socio-économiques et environnemental. Une approche sanitaire large et inclusive doit, de plus en plus, évincer celle prônant une médicalisation outrancière, qui nous a valu bien des déboires dans notre lutte laborieuse contre la COVID-19.
La pandémie repose, avec acuité, la nécessité maintes fois réaffirmée par la Coalition pour la Santé et l’Action sociale (COSAS) de doter notre pays d’une politique de santé, avec une vision novatrice, sur le long terme. Il y a, en effet, une nécessité urgente de réactualiser la politique nationale de santé du Sénégal, dont la dernière version a été élaborée en 1989.
Le cadre de gouvernance doit également être rénové pour maximiser l’efficacité de notre système de santé en établissant des normes et standards à respecter et faire respecter par tous les intervenants. Il faudra garantir le suivi, l’évaluation et la mise à jour périodique de la politique de santé et des différents plans élaborés à cet effet.
La résolution de la crise sanitaire dépendra, pour une grande part de l’existence d’un système sanitaire résilient et pérenne. La pandémie de COVID-19 nous confirme le fait, que pour y arriver, les approches sectaires et corporatistes doivent céder le pas à de larges concertations inclusives entre les diverses parties prenantes (prestataires, syndicalistes, usagers ou consommateurs, décideurs, organisations communautaires de base ou de la société civile, leaders communautaires ou autres personnes-ressources...).
MAME ANDALLA PAUL SORY CISSÉ, SAUVEUR DE LA GAMBIE AU PÉRIL DE SA VIE
L’officier subalterne, parrain de la base aérienne de Ouakam, est un militaire tombé au champ d’honneur
Il était un pilote de l’armée de l’air, né en 1948. Il était le responsable de la formation des hélicoptères de manœuvre, de liaison et d’observation de l’Opération Fodé Kaba 2, en 1981. En effet, cette opération d’une grande envergure s’est matérialisée par l’implication de l’armée sénégalaise afin de débarrasser la Gambie des putschistes. En fait, Kukoi Samba Sanyang avait perpétré un coup d’Etat contre Dawda Jawara et retenu en otage la famille du Président gambien pendant que celui-ci était à Londres où il assistait au mariage du prince Charles.
Plus d’une centaine de parachutistes sénégalais ont été largués en Gambie durant cette opération dont les péripéties sont relatées dans le livre du colonel Mbaye Cissé, « Opération Fodé Kaba II, Des diambars dans le vent ».
Fodé Kaba 2 a permis le rétablissement constitutionnel en Gambie
C’est au cours de cette mission lancée le 1er août 1981 que le capitaine Mame Andalla Paul Sory Cissé a perdu la vie, dans un accident d’hélicoptère. Il n’aura vécu que 33 ans, mais a laissé une belle image dans l’aviation militaire sénégalaise. Il est souvent cité en exemple pour son esprit de sacrifice. Ainsi, c’est en 1993 que la base de l’armée de l’Air de Ouakam a pris le nom du capitaine.
AMADOU FALL, LE RACCORDEUR DES CIVILISATIONS
A 65 ans, cet ancien instituteur est un connaisseur de l’histoire et de la culture casamançaises. Après avoir « rampé » jusqu’au doctorat, il a soutenu, en 2011, une thèse sur les baïnouks
Idrissa Sané et Seydou Ka et Moussa Sow |
Publication 19/08/2020
A 65 ans, cet ancien instituteur est un connaisseur de l’histoire et de la culture casamançaises. Après avoir « rampé » jusqu’au doctorat, il a soutenu, en 2011, une thèse sur le thème « La conception de l’être et de l’au-delà dans l’Égypte pharaonique et chez les peuples des rivières du Sud : exemple les baïnouks, les balantes, les diolas, les mankagnes », sous la direction de l’égyptologue Aboubacry Moussa Lam (Ucad).
Ses yeux semblent fatigués. Mais, l’homme dégage plutôt bonne mine dans son élégante chemise rouge-noire assortie d’un chapeau et d’une écharpe blanche que lui avait offert son ami Lamine Kéba Sonko, ancien champion de javelot, à l’occasion d’une fête organisée par l’Association mondiale des couples quarantenaires. Lui, n’a pas réussi à franchir ce cap symbolique en couple. Après trente ans de mariage, sa première épouse, originaire de Kaguitte, a brutalement demandé le divorce. Un épisode amer qu’il a encore du mal à digérer. On le sent dans sa voix. De cette première union sont nés trois enfants, dont une fille mariée et vivant actuellement à Atlanta, aux Etats-Unis.
Depuis, il s’est remarié. « C’est (donc) mon épouse (actuelle) qui m’a conseillé de m’habiller ainsi », explique-t-il, en réponse à notre compliment sur son look. En pays animiste, Amadou Fall ne serait jamais habillé en rouge-noir, couleurs réservées au roi. En effet, le rouge est le symbole de la puissance, de la royauté. « Les adeptes de la religion traditionnelle, comme on en trouve encore en Casamance, ne s’habillent jamais en rouge, parce que cela diminue la puissance du roi, c’est source de calamités », explique Amadou Fall. L’homme est un connaisseur de l’histoire et de la culture casamançaises. Une connaissance nourrie par la passion pour cette belle région. « Quand on aime quelqu’un ou quelque chose parce… c’est qu’on n’aime pas assez. Moi, j’aime la Casamance sans savoir pourquoi », justifie-t-il. Il a consacré toute sa vie à scruter ce « miroir paléo-ancestral » qu’est la Casamance. « Depuis 1990, j’enquête sur les peuples et l’histoire de cette région », dit-il. Une persévérance dont le couronnement a été la soutenance, en 2011, d’une thèse de doctorat sur le thème « La conception de l’être et de l’au-delà dans l’Égypte pharaonique et chez les peuples des rivières du Sud (Casamance) », sous la direction de l’égyptologue Aboubacry Moussa Lam (Ucad). Un travail de raccordement des civilisations qu’il poursuit à travers divers chantiers.
Cependant, Amadou Fall estime que rien n’est encore fait en matière de recherche dans cette région, notamment sur le paléolithique, une période encore peu connue en Afrique de l’Ouest. « La Casamance est un trésor anthropologique », résume-t-il. C’est pourquoi l’historien est en colère contre les gouvernements qui se sont succédé à la tête du Sénégal depuis l’indépendance, parce qu’ils n’ont « pas mis assez de ressources pour connaître notre histoire, notre culture ». Il juge anormal qu’il n’y ait pas un musée digne de ce nom en Casamance. Idem pour les autres régions.
En plus de sa casquette d’universitaire – il est vacataire à l’Université Assane Seck de Ziguinchor dans trois départements : histoire, sociologie et tourisme –, Amadou Fall est un grand passionné de la radio. Depuis 1995, il est une voix familière des ondes (Dunya, Walf Fm, Rsi) et a animé plusieurs conférences sur la crise casamançaise. Par ailleurs, il est le président du comité scientifique du Bureau organisation pour la revalorisation du patrimoine baïnouk (Borepab). A ce titre, il contribue modestement à documenter l’histoire de ce peuple. « De la Falémé à Diogué, toute la région naturelle de Casamance est imbibée de culture baïnouk », soutient-il. C’est d’ailleurs, ajoute-t-il, l’extrême humanité des baïnouks, les premiers à s’installer dans la région, qui a fait de la Casamance un « kaléidoscope humain ». Lui-même en est une belle illustration. Il est baïnouk du côté de sa mère (une Coly de Niamone) et diola du côté de son père (un Badji de Thionk Essyl), et compte une grand-mère peule (de la famille El Hadji Omar Foutiyou Tall). Son nom de famille actuel, Fall, remonte à la conversion de sa famille à l’islam. « À l’époque, quand quelqu’un se convertissait à l’islam, on lui faisait croire qu’il devait également abandonner, en plus de son prénom, son nom de famille pour celui de son convertisseur », explique-t-il. Il donne ainsi la clé pour comprendre ce qui paraît une anomalie, ou en tout cas une curiosité, en Casamance : des diolas qui se nomment Ndiaye, Fall, Diop, Guèye, Sarr, Diouf ou Diallo…
Au-delà d’être une synthèse du Sénégalais – sur le plan ethnique –, Amadou Fall est aussi un citoyen de l’Afrique tout court. Il est né en 1955 à Abidjan, en Côte d’Ivoire, où son père, douanier, était affecté. Le papa décédé très tôt, il a grandi à Dakar auprès de sa maman infirmière. Une trajectoire personnelle qui a sans doute forgé son caractère et a fait de lui « un panafricaniste convaincu ». Militant de longue date du Rassemblement national démocratique (Rnd) de Cheikh Anta Diop, il avait voté pour le libéral Abdoulaye Wade en 2000. « Le jour de l’élection, j’étais hospitalisé, mais j’ai demandé à sortir pour aller voter, parce que j’étais convaincu qu’Abdou Diouf devait tomber », se souvient-il. Il sera vite déçu par son successeur lorsqu’il entend Wade se prononcer, à la conférence de Durban (Afrique du Sud), en 2001, contre le rapatriement du patrimoine africain sous le prétexte que nous n’avons pas de musées où conserver ces objets. Comme quoi, le détail fait la révolte !
PAR Mamadu Sokrate Joob
DJIBRIL DIOP MAMBETY, LE CLASSIQUE QUI N’EN ÉTAIT PAS UN
EXCLUSIF SENEPLUS - Rien ne prédestinait son cinéma à faire école. A la sortie de Touki Bouki, les professionnels crièrent au scandale. Mais rien n’y fit : vingt ans plus tard, le cinéaste a la reconnaissance qu’il mérite
“Le cinéma c’est de la magie. Si tu veux savoir, tu casses la magie”.
Rien ne prédestinait le cinéma de Mambéty à faire école. Acculé de tout bord par la critique à la sortie de Touki Bouki, un film avec une entité narrative au style baroque, faisant un pied de nez à l’esthétique du cinéma africain. Les professionnels crient au scandale à l’époque. Mais rien n’y fit : vingt ans plus tard, le cinéaste a la reconnaissance qu’il mérite. Djibril, malgré lui devient alors un grand classique du Cinéma africain. Il acquiert une aura internationale qui surprend plus d’un. Pour celui qu’on surnommait à tort ou à raison “l’enfant terrible du Cinéma”, la réhabilitation du son œuvre par Martin Scorsese et la récente illustration de la tournée en Afrique du couple de Stars Beyoncé et Jay-Z par l’affiche de Touki bouki en sont la preuve d’un Cinéaste qui aura marqué à jamais le Cinéma.
Né à Dakar en 1945 à Colobane dans la banlieue dakaroise, Djibril Diop Mambéty est considéré comme l'un des réalisateurs les plus originaux, visionnaires et expérimentaux du cinéma africain. Certains vont jusqu’à le surnommer “Le poète de l’image.” Fils d’un religieux et frère du grand musicien Wasis Diop, il débute sa carrière artistique dans le théâtre pour travailler plus tard en tant qu'acteur au Théâtre National Daniel Sorano à Dakar. Pour comportement outrancier, il est expulsé. Dira-t-il plus tard “On m’a montré la porte, et cette porte est devenue pour moi celle du cinéma. Et comme Marigot dans le Franc, je ne me suis jamais séparé de cette porte”. En 1969, à 24 ans seulement, sans avoir reçu une formation dans une école de cinéma, il produit et réalise son premier court-métrage, Contras City. L'année suivante Mambety réalise un autre court, Badou Boy un Western Urbain, qui remporte le Tanit d'Argent au Festival de Carthages en 1970 en Tunisie. Son premier long métrage, Touki Bouki, réalisé en 1973, décrié par la critique au départ reçoit le Prix de la Critique internationale au Festival de Cannes et le Prix Spécial du Jury au Festival de Moscou. Malgré le succès du film, il faudra attendre vingt ans plus tard pour revoir Djibril sur les plateaux de tournage. En 1992, il réalise son deuxième long métrage Hyènes, une adaptation de l’ouvrage de Friedrich Dürrenmatt “La visite de la vieille dame” qui lui vaut une sélection en compétition officielle à Cannes. Durant cette longue pause, il fait en 1989 Parlons Grand-Mère, un documentaire sur la réalisation du film Yaaba d’Idrissa Ouédraogo. Au cours des dernières années de sa vie, le réalisateur travaille sur une trilogie de courts métrages, intitulé Contes des Petites Gens. Il réussit à remplir seulement le premier volet, Le Franc en 1994, alors que La Petite Vendeuse de Soleil, presque terminé est interrompu par la mort du réalisateur, et sort à titre posthume en 1999, un an après sa mort.
Une vision nouvelle du Cinéma
« Ma mission est de réinventer la façon de faire du cinéma », déclarait Djibril Diop Mambety dans un entretien lors du Festival Panafricain du Cinéma à Ouagadougou (FESPACO) en 1987. Djibril confirme encore la vieille chansonnette des grands artistes : La création née de la frustration. Il en a fait l'expérience lorsqu'il évoque les raisons qui l’ont amené à réaliser Touki Bouki “Je n’en pouvais plus de la physionomie du cinéma africain qui m’exaspérait, qui était trop superficiel. Non pas sur le plan idéologique, mais sur le plan de la forme. On ne va jamais au-delà, rien ne vacille. Cette petite colère a donné naissance à Touki Bouki”. Le Cinéma Africain venait de recevoir sa plus grosse claque. Djibril sonne le glas au prosaïsme classique et à la vieille rengaine révolutionnaire d’une génération d’auteurs. En effet, au moment où en Afrique subsaharienne francophone, le cinéma arrive sous les tropiques, entre 1950 et 1960, une génération de cinéastes émergent. Les pionniers de ce jeune cinéma s’appellent Paulin Soumanou Vieyra, Jacques Melo Kane, Sembène Ousmane au Sénégal, Sébastien Kamba au Congo, Oumarou Ganda, Moustapha Alassane au Niger. La création des débuts s’inscrit dans une improvisation, sans lignes directrices. Certains comme Oumarou Ganda illustrent par l’image et travaillent les points d’accroche simples pour le spectateur, d’autres comme Sembène Ousmane structurent l’espace pour raconter dès 1966 dans La Noire de…, premier long-métrage de ce cinéma, une histoire de grande force illocutoire. Ce Cinéma est qualifié de “nationaliste” pour beaucoup de spécialistes en raison du combat identitaire qu’il entend mener, de la dénonciation des pratiques coloniales et de la recherche d’une Africaine traditionnelle perdue. Ce cinéma était marqué par un réalisme social sans fard. Il est dit « Politiques » suivant la définition que lui donnait un des pionniers « tout film social et même culturel est politique », affirmait Paulin Vieyra, dans le film Cinema of Senegal (Kardish et Vieyra, 1978). Ils traitaient des conflits sociaux, des problèmes que rencontraient les jeunes nations nouvellement indépendantes et des difficultés résultant de la confrontation entre la culture africaine et la civilisation occidentale. Les thèmes explorés comprenaient la critique de la nouvelle bourgeoisie corrompue, des traditions rétrogrades, la dichotomie ville/village, l’exode rural... La forme de ces films était fondée sur la priorité accordée au contenu plutôt qu’à la forme artistique. Mais, il faut le dire, ce cinéma manquait peu ou prou d’esthétisme, de poésie, de style séduisant. Le discours politique y était puissant, le beau, la poésie absent ou du moins relégué au second plan. N’en déplaise à certains puristes nostalgiques ! Mais quand Djibril sort des landes, il creuse un trou béant à l'intérieur des sentiers battus.
Un peu de fiction-un peu de réalisme : le réalisme magique
Si Sembène s’est inspirée de la littérature (ce qui justifie peut-être le rythme lent de ses plans), Djibril s’est inspiré du style Western. Il dira dans le bonimental de Parlons Grand-mère qu’un film comme High Noon de Fred Zinnemann (1938) n’a pas de secret pour lui “Plan après plan depuis l’âge de 15 ans”. Alors, au réalisme froid des anciens, “l’enfant terrible du cinéma Africain” impose un style nouveau : Le réalisme magique. Ses créations sont marquées par l’humour, la fantaisie et le fantastique, avec leur structure fragmentée et déconstruit. Dans les films de Djibril, le héros est un personnage solitaire larcin (Badou Boy), espiègle (Mory), jugé par un système hypocrite (Draman Dramé) balloté entre chance malchance (Marigo), finalement abattu par ce même système mesquin (Silly Lam). Tout semble désarticulé mais Mambéty maîtrise parfaitement son sujet. C’est un réalisateur qui laisse son héros bouffer l’espace. La gageure de son Cinéma est puissante dans l’utilisation à merveille du burlesque, de l’humour dans une esthétique purement carnavalesque et loufoque. Le cadrage et le montage sont difficilement séparables. Il y a du pressenti, du pré-montage dans l’approche filmique de Djibril. La post-prod commence dès le tournage. L’écart entre le scénario et le rendu final est minime. Le sujet filmique chez Djibril entremêle souvent dans le montage de ses films, soit en « syntagmes alternés », selon l’expression de Christian Metz, où l’alternance des signifiants correspond à la simultanéité des signifiés, soit en « syntagmes alternants du genre parallèle » entre lesquels il n’existe pas, au niveau du signifié, de rapports temporels pertinents, du moins au plan de la dénotation. Avec une grande originalité, Mambety utilise le montage et le filmage comme éléments créatifs déterminants. Il a su tirer des effets frappants qui s’embrigadent dans ses récits, à la fois art du raccord (montage parallèle) et art de la rupture (montage cut). C’est une douce brutalité ! N’est-ce pas aussi pour lui de laisser place aux êtres du monde parallèle qui envahissent ses films. Le religieux et le laïque coexistent dans le parallélisme de Djibril. Dans Le franc, les sons profanes d’Issa Cissoko au saxophone, en même temps que la récitation mélodique et rythmique des versets du Coran diffusée sur tout le quartier, depuis la mosquée sourdent ensemble. Il ne privilégie ni les premiers ni la seconde. Comme il le déclare dans le film de Laurence Gavron “Ninki Nanka, le prince de Colobane”, on peut aussi prier Dieu en jouant du saxophone. La forme des films de Djibril est donc le fruit de ces êtres qui pullulent son imaginaire. Touki Bouki en est la preuve. Ce taureau puissant ligoté, cette corne accrochée sur la mobylette de Mory, cette scène d’amour au bord de la plage (entre Mory et Anta) ne sont que le reflet d’un Djibril enchaîné par ses fantasmes et ses délires propres.
L’exaltation de “l’amateurisme”
Djibril savait dénicher la perle rare pour ses films. Le casting sauvage est un point fort de sa direction artistique. Il tirait toujours le meilleur de ses personnages rencontrés occasionnellement dans les crasses impitoyables des bidonvilles. Djibril était conscient qu’il lui fallait farfouiller dans les égouts pour trouver son héros. Les personnages loufoques ne surjouaient pas dans ses films. « La différence entre un professionnel et un non-professionnel est qu’un professionnel apprend son rôle et le joue, tandis qu’un non-professionnel joue sa propre personne avec toute son âme. C’est pourquoi il est plus authentique que le professionnel », déclare-t-il à June Givanni en 1995. En 1994, quand Adatte le questionne à ce sujet pour Pardo News, il répond : “C’est mon choix : les acteurs non-professionnels ne jouent pas, c’est comme si on les avait lancés du haut de la colline avec l’obligation de tomber. Ils ne savent pas que la cascade existe, donc ils tombent réellement. Et c’est ça que je sens le plus. Moi-même, ayant été formé sans être formé, au jeu du théâtre, je fais le précieux du fait de ne pas savoir.” Baba Diop grand critique de Cinéma affirme que Mambety arrivait à faire de ceux qu’il avait « croisés dans les bouges de la capitale » et qu’il avait choisis, « des comédiens performants ». Dans un entretien accordé au Journal le Soleil le 22 Mars 1990, Djibril déclare « analysé le visage, le cou, les mains, les pieds, pour ne choisir que ceux arqués et en chiasme.” Cette technique est fortement inspirée de la scène. C’est celle qu’utilisent de grandes figures du théâtre comme Samuel Beckett, dont l’exigence veut que le corps ne soit saisi que morcelé, et Constantin Stanislavski, pour qui le corps sur scène doit rester souvent invisible. Djibril amplifie souvent l’objet filmé à travers de simples reliefs. Le trégrosplanisme (c’est nous qui l’appelons comme ça) donne un effet de théâtralisation de ses plans. L’autre technique de Djibril et non moins visible est celle du Scénario au “texte troué”. Cette méthode est efficace et fait de l’acteur un élément central du récit narratif. Il participe à la réécriture du scénario dans son jeu. Les acteurs de Djibril parviennent avant tout par eux-mêmes à transmettre quelque chose corporellement. Il les libère de l’emprise du texte pour les orienter vers la performance. Ainsi deviennent-ils tour à tour peintres, danseurs, musiciens, acrobates, nageurs, jongleurs. Si le corps de l’espiègle Mory est encore dynamique pour se mouvoir de façon vertigineuse, ceux suppliciés, handicapés et meurtris de la Linguère Ramatou et Sili ne reposent que sur des béquilles. Dans Hyènes et La Petite Vendeuse de soleil, l’une et l’autre reviennent pour se venger. La Linguère Ramatou fait penser à Anta qui revient plus vieille pour mettre à mort Mory qui l’a lâchée le jour du voyage.
Djibril est donc un rêveur et il a fait rêver ses acteurs, les a consacré professionnels dans le tas. La chanteuse Aminata Fall dira de Djibril “S’il m’avait demandé d’égorger quelqu’un, je l’aurais fait les yeux fermés”. Djibril a tordu le cou de LA “Grammaire” du Cinéma, lui a cassé la “gueule”, réinventé son “discours” pour sa propre “pérennité”. Et si le train n’avait pas sifflé trois fois...