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17 juillet 2025
PAR Alassane KITANE
MADICKE TOUJOURS PRISONNIER DE L’UNIVERS FÉÉRIQUE DE SES FÂBLES POLITIQUES
Si on suit la logique de Madické Niang, les rois d’Arabie Saoudite également seraient « couronnés » par le prophète Muhammad ? Si tel est le cas, ne devrions-nous pas seulement laisser les gouvernants gouverner, puisque c’est Dieu qui les a institués ?
Moustafa Atatürk, fondateur de la Turquie moderne, dans une de ses nombreuses sentences susceptibles d’inspirer la philosophie politique a dit que « l’homme politique qui a besoin des secours de la religion pour gouverner n'est qu'un lâche ! [... ] Or, jamais un lâche ne devrait être investi des fonctions de chef de l’État ». Cette thèse re reflète pas seulement une préférence pour la laïcité de la république, elle nous incite surtout à réfléchir sur la fonction hautement mystificatrice de la religion lorsqu’elle est utilisée comme simple instrument dans l’action politique. On ne comprend pas comment des croyants qui ont librement consenti de vivre dans un État laïc, peuvent, lorsque les enjeux du moment tournent d’une façon qui les dépassent, évoquer la religion comme solution ou comme clé de compréhension de leurs propres turpitudes. Pourquoi n’évoquer la religion que pour des cas particuliers alors qu’elle a une approche holistique de l’existence humaine ?
Les actes et choix politiques dans une république laïque ne peuvent avoir leur fondement que dans une sphère commune à tous les citoyens, à savoir la raison. Si même la compréhension du discours religieux requiert l’usage de la raison, c’est la preuve que les membres d’une communauté humaine se trahiraient eux-mêmes s’ils abdiquaient de cette faculté sous prétexte d’un quelconque décret divin. Même dans un pays réputé théocratique comme l’Iran, le jeu démocratique donne aux citoyens la liberté de choisir leur président. Pourquoi les Iraniens n’économiseraient-ils pas de l’argent en se référant seulement à la sentence de l’imam Khamenei ?
C’est à se demander même si les propos de Madické ne constituent pas une forme de blasphème : dire que Serigne Touba a « élu » tous les présidents Sénégalais, c’est assurément prétendre que pour les dernières élections, la ville sainte de Touba est entrée en contradiction avec la volonté du saint… Si on suit la logique de Madické Niang, les rois d’Arabie saoudite également seraient « couronnés » par le prophète Muhammad ? Si tel est le cas, ne devrions-nous pas seulement laisser les gouvernants gouverner, puisque c’est Dieu qui les a institués ? Rousseau a toujours rétorqué à ceux qui défendent la thèse de l’origine céleste du pouvoir que c’est certes Dieu qui donne le pouvoir, mais c’est lui aussi qui donne la maladie : est-ce une raison pour le croyant de ne pas se soigner en cas de maladie ?
Dans l’Aventure ambiguë de Cheikh Hamidou Kane, il y a une phrase dont la portée humaniste est rarement exploitée : « la liberté d’aimer ou de haïr Dieu est l’ultime don de Dieu que nul ne peut enlever à l’homme ». Ce propos inspire la tolérance et la foi en l’homme. Si Dieu n’a voulu faire de nous ni des anges ni des automates ou des animaux, Lui seul en connaît la raison, mais cela doit inciter à la méditation sur notre mission sur terre. L’on devrait donc se demander quelle est, en fin de compte, l’utilité de la raison si pour faire les choses les plus rationnelles et les plus humaines nous devrions attendre le décret divin ? Dieu nous aurait-il donné la raison pour nous la reprendre par on ne sait quelle jalousie ?
En écoutant certains hommes politiques sénégalais parler, on ne peut pas ne pas se demander s’ils sont toujours conscients de la nature du lien qui garantit notre vie en communauté. La communauté nationale est faite de différences qui se subsument dans une unité toujours construite, mais jamais achevée : d’où sa constante et invincible fragilité. Les chapelles religieuses ou confrériques ne peuvent pas, du moins dans un pays dit laïc, avoir un ascendant sur la nation et sur la république. Voilà pourquoi nous devrions être très circonspects dans nos références à ces choses en ce qui concerne la vie politique. Les blessures engendrées par le sentiment d’intolérance ou de mépris de la foi d’autrui sont difficiles à cicatriser et elles se gangrènent très vite.
Heureusement que Madické Niang n’a fait qu’interpréter les propos de son guide religieux, et comme ce n’est qu’une interprétation, d’autres pourraient lui être opposées à condition qu’il ne se sente pas offensé par ces dernières. Mais qui pourrait nous le garantir ? Il faut éviter de chercher à fonder les bases de la compétition démocratique sur les contingences religieuses : ça peut mener à tout sauf à la paix et à la concorde.
GANA GUÈYE, UN LION À PARIS
L’international sénégalais va s’engager la semaine prochaine au PSG. À 29 ans, le milieu d’Everton va amener ses qualités à la récupération et un état d’esprit irréprochable
Thiago Motta a enfin un successeur. C'est du moins ce qu'espère le PSG après avoir très longtemps cherché la perle rare et s'être trompé plusieurs fois à ce poste (Stambouli, Diarra, Paredes…). Le club de la capitale va accueillir Idrissa Gueye, milieu défensif sénégalais de 29 ans. Everton et le PSG s'étaient entendus mardi dernier sur les grandes lignes d'un transfert pour un montant estimé à 32 millions d'euros (M€), comme nous l'avons dévoilé . Il a été concrétisé ce jeudi, comme l'a confirmé L'Équipe.
Il reste encore quelques étapes à régler avant que le Lion de la Téranga s'affiche avec la tunique parisienne, qu'il aimerait faire floquer « Gana », son deuxième prénom, comme à Everton et au Sénégal. Des points administratifs sont encore en discussion, notamment sur la durée du contrat, qui devrait être de quatre années et une supplémentaire en option, voire cinq directement comme le souhaiterait le récent finaliste de la Coupe d'Afrique des nations .
Le joueur devra aussi faire un aller-retour à Paris pour passer sa visite médicale. La date n'a pas encore été fixée, les choses se débloqueront logiquement la semaine prochaine pour permettre à Everton de se retourner, alors que le mercato anglais s'achève le 8 août. Le club de Liverpool avance sur des pistes françaises : Adrien Tamèze (Nice), Lucas Tousart (Lyon) et Jean-Philippe Gbamin (Mayence).
Sa date de reprise n'est pas connue
Idrissa Gueye, qui a terminé la CAN par une défaite en finale contre l'Algérie (0-1) le 19 juillet, est actuellement en vacances à Dakar. S'il est très motivé par le projet parisien, il attend aussi avec impatience sa signature dans un club qu'il pensait rejoindre l'hiver dernier. Dans les dernières heures du mercato, Antero Henrique n'avait pas accéléré sur ce dossier que Thomas Tuchel souhaitait absolument boucler. Le nouveau directeur sportif Leonardo va cette fois donner satisfaction à son entraîneur allemand.
La dernière CAN et l'annonce de ce transfert imminent suscitent une très forte attention dans la capitale sénégalaise. Certaines sorties du milieu de terrain avec ses proches ont donné lieu à des attroupements de plusieurs dizaines de supporters. La date d'arrivée au camp des Loges de Gueye n'est pas encore connue. Elle devrait se situer au plus tard le 12 ou le 13 août, après trois semaines de congé. En Premier League la saison dernière, Gueye a terminé 6e joueur en termes d'interceptions (74) et deuxième meilleur tacleur (142 tacles réussis), selon les données du site spécialisé WhoScored. Le genre de qualités que recherchait le PSG pour stabiliser son milieu de terrain. Le joueur va redécouvrir la Ligue des champions qu'il n'a plus disputée depuis 2012, avec Lille.
ENQUÊTE SUR UNE DISGRÂCE DE LA JUSTICE
Gracié par le Chef de l’Etat alors que son dossier était frappé d’appel, le cas Amadou Woury Diallo a suscité un tollé. Suffisant pour que L’Obs s’intéresse au sujet afin de situer les responsabilités
Il a fallu une trentaine de minutes pour lire le jugement. Le président Souleymane Teliko, à haute et intelligible voix, partage les motivations du jugement qu’il a rendu, ce lundi 22 juillet sur l’affaire du trafic de médicaments de Touba Belel. Confirmant la décision du premier juge, le magistrat a condamné Amadou Woury Diallo et Barra Sylla à respectivement 5 ans et 7 ans de prison ferme. Les dommages et intérêts, passant de 400 millions Francs Cfa à 50 millions, il a lancé un mandat d’arrêt contre Amadou Woury Diallo qui avait bénéficié d’une grâce présidentielle le 03 avril 2019.
Le papi, qui avait défié Dame Justice est aujourd’hui sous le coup d’un mandat d’arrêt. A 78 ans, vivre ses vieux jours derrière les barreaux était une équation à régler avant qu’il ne soit trop tard. Déjà, ses prières et incantations pour ne pas écoper d’une condamnation avaient laissé le bon Dieu de marbre. Dès lors, il lui fallait manœuvrer avec les moyens que lui offre le système judiciaire Sénégalais, pour sortir de prison. Un deal qui a marché. Sans que personne ne s’en rende compte, Diallo s’est superbement arraché des quatre (4) murs de la maison d’arrêt de Diourbel. Fouetté par le vent frais de la liberté, l’homme a tout droit filé en direction de sa «cachette».
Sa sortie de prison, au goût d’évasion pour la daronne du temple de Thémis, est une pilule qu’elle a du mal à avaler. Elle l’a toujours en travers la gorge. La teigneuse, qui avait déroulé le tapis noir à Amadou Woury Diallo, ne le verra pas y marcher. Prête à réécouter sa version des faits dans cette affaire de trafic de médicaments d’une valeur d’1 milliard 350 millions Francs Cfa, Dame Justice s’est fait planter. C’était le 13 mai 2019. Ce jour-là, la Cour d’Appel de Thiès avait enrôlé le dossier du septuagénaire et de ses co-prévenus. A la surprise générale, seul Bara Sylla avait comparu. Un fait anormal qui pousse le président d’audience à renvoyer le dossier afin de vérifier la situation carcérale de Diallo. A la deuxième audience, le scénario reste le même. Pas de traces de l’homme. Seulement, un changement est noté. Un décret de grâce renforce le dossier de A.W Diallo. Un élément nouveau, aux relents de scandale, qui a provoqué une vague de protestations et de critiques. Constatant l’irrégularité de la situation, le président a renvoyé le dossier au 24 juin pour la citation d’Amadou Woury Diallo. Mais, il ne s’est jamais présenté. La grâce de Macky Sall a pesé de tout son poids. Le système judiciaire sénégalais, montrant ses limites, acteurs judiciaires, toutes couches confondues, se sont demandé comment un prévenu dont toutes les voies de recours ne sont pas épuisées a pu obtenir une grâce.
Condamné à 5 ans de prison ferme par le tribunal de grande instance de Diourbel pour trafic illicite de médicaments, contrebande, exercice illégale de la profession de pharmacien, A.W. Diallo avait interjeté appel de la décision du juge Pape Diabel Ndir. Avec Bara Sylla qui avait écopé de 7 ans de prison, il avait attaqué le jugement. Donc, aucun des prévenus n’était éligible à la grâce. Alors par quelle alchimie, Diallo a-t-il pu bénéficier de cette faveur du chef de l’Etat ? Me Abdoulaye Babou essaie de démêler l’écheveau. Chargé de défendre les intérêts de l’ordre des pharmaciens, il a dès le début de cette révélation crié au scandale. Aujourd’hui, la position de la robe noire n’a pas changé. Il crache ses vérités : «Déjà, dans le jugement, Mamadou Woury Diallo avait déclaré que son co-prévenu Bara Sylla lui a dit : Il faut tout assumer et on fera tout pour te faire sortir de prison. Ça figure dans le jugement. Et effectivement, il est sorti de prison dans des conditions irrégulières.» Une confidence qui renseigne sur la personnalité de l’homme, rendu tristement célèbre par ce scandale.
Un Sénégalais, amoureux de la Guinée
De lui, les sénégalais ne savaient pas grand-chose. Né le 13 février 1941 à Kaolack, sa vie a pris racine à 189 km au Sud-est de Dakar, dans la capitale arachidière, au centre-ouest du Sénégal. Fils de Thierno Tano et de Fatoumata Binta Bâ, Woury est un enfant du peuple, marié à deux épouses et père de huit (8) enfants. Guinéen pour certains, son avocat Me Mor Sambou dira : «C’est un sénégalais comme vous et moi.» Pour l’avocat, le dossier de son client n’est pas un sujet à débattre. Dans un langage diplomatique, la robe noire informe, sans virevolter, qu’il ne parlera pas de l’affaire. Et la raison est simple : «Sa famille m’a supplié de ne plus parler de cette affaire parce qu’il est actuellement malade.»
Cette instruction, freinant toute envolée du plaideur, ne lui empêche tout de même pas de faire certaines précisions face aux relances qui lui sont envoyées : « Qui vous dit que mon client est en Guinée ? Il est bien au Sénégal (Au début de la procédure d’appel)». La directive de ne pas parler à la presse, venant de la famille, la tentative avec la fille d’Amadou Woury Diallo sera aussi vaine. Derrière le combiné, elle peste, un chouia agacée : «Je ne sais rien de cette affaire et je n’ai rien à dire là-dessus. Que les gens pensent ce qu’ils veulent de lui. Moi, je n’en parlerai pas.»
«Pa Thiéré», ses courriers de grâce et son esprit solidaire
Il faudra se taper 134 kilomètres pour espérer percer le mystère Woury Diallo. Là, posée à l’Ouest du pays, Diourbel dégouline déjà de chaleur en cette matinée de mercredi 26 juin 2019. Témoin de la vie carcérale du septuagénaire, le professeur Malick Diop parle avec affection du vieil homme. «J’ai passé deux semaines avec le vieux. C’était en septembre 2018. On était à la chambre 11, occupée par 16 à 17 personnes. C’est un vieux très propre, très soigneux qui aime prendre soin de lui. Rien ne le salissait. C’est pourquoi il passait tout son temps à faire la lessive. C’est aussi quelqu’un de très pieux qui ne ratait aucune heure de prière. Il se réveillait toujours à l’aube pour prendre son bain, effectuer la prière et entamer sa lecture du coran» se souvient le sportif à la taille de basketteur.
En prison, Amadou Woury Diallo a marqué les esprits par son sens de la solidarité. Témoignage de Malick Diop : «Il était solidaire et partageait toujours les repas que lui apportaient ses parents. Et sachez qu’il raffole de «ceeré ak meew (couscous, mélangé au lait)». Et j’avais même l’habitude l’appeler «Pa Tiéré (couscous)» car il ne cessait de nous fatiguer avec ‘Kossam (Lait)’ ou ‘Ndiorni (Couscous)’. Mais, à chaque fois qu’il en recevait, il en donnait à tout le monde. Même du cola, il le partageait.» Ce n’est pas seulement ses aliments qu’il partageait. Son savoir et son expérience étaient aussi à la portée de ses codétenus.
«Il parlait de son travail et expliquait pourquoi il a été arrêté. C’est un chauffeur de profession et il nous disait que s’il était un jeune, il aurait pu s’enfuir comme l’on fait les autres, escalader des murs pour ne pas être arrêtés mais il ne l’a pas fait.» Malick qui se souvient des moments difficiles du vieux père plisse les yeux : «Vous savez, la prison est un endroit inconfortable. Surtout pour un homme de son âge. Il n’était plus si jeune. Parfois, il marchait en s’agrippant, en ralentissant le pas ou bien, il se courbait en posant les mains à ses genoux pour reprendre son souffle.» Une occasion pour Diop de le charrier. Avec un rire, il s’en rappelle : « Père, faisons une partie de lutte, avais-je l’habitude de le taquiner. D’un rire amusé, il rétorquait : «Tu sais que si j’avais encore 25 ans, je t’aurai terrassé’. Juste pour son âge, je pense qu’il méritait cette grâce. C’est pourquoi, quand j’ai appris sa grâce d’un gardien de prison, je me suis dit que c’est une bonne chose. Mais, le tollé qu’elle a provoqué m’a surpris. C’est comme si les gens ne voulait pas qu’il sorte alors qu’il avait un comportement exemplaire en prison. Il passait son temps à taquiner les gens surtout les sérères. Et je ne l’ai jamais entendu se disputer ou se fâcher contre quelqu’un.» Ainsi parle Malick Diop de Diallo, «le modérateur», qui «n’a jamais craqué».
Loin de la moiteur de l’extérieur, un bureau climatisé du tribunal de Diourbel rafraichit cette canicule. Juge au tribunal de grande instance de Diourbel, Papa Diabel Ndir ne subit pas le climat du dehors. Courtois derrière son bureau, il s’accorde à dire quelques mots sur Diallo qu’il avait condamné Diallo en première instance à 5 ans de prison ferme. Diallo était, selon lui un prévenu « très correct à la barre». Mais aussi : « Très âgé et malade.» Une maladie qui n’est rien d’autre qu’un vilain cancer de la prostate ! Une maladie qui l’affaiblit et l’alite.
De la Guinée au Sénégal, le papi trompe 7 postes frontaliers
De la vie du bel homme chétif au teint caramel, on ne saura pas autre chose. Cette vie, blottie dans l’ombre depuis 78 ans, a été extirpée de sa quiétude une matinée de 11 novembre 2017 lorsque le commandant de la gendarmerie a été informé de la présence de deux (2) camions à Touba Belel. Ce jour-là, cette localité a été l’attraction de la ville sainte. C’est un acteur de l’enquête, présent au début et à la fin de cette enquête qui a fait emprisonner A.W Diallo et Bara Sylla, qui le dit.
Encore ahuri par cette saisine, il préfère se prononcer sous le couvert de l’anonymat. Il dit : «Les deux camions contenaient, selon les convoyeurs, du son et du blé destiné, au khalife général des mourides à qui il voulait les offrir en adiya. La vérification a permis de découvrir que les deux camions d’une valeur de 15 millions chacune contenant 300 colis de 21types de médicaments estimés à 1. 335. 160.000 FCFA. L’enquête ouverte révélait que pour l’achat et le transport des médicaments, Sylla a envoyé à Diallo 20 millions Francs Cfa et Diallo a, lui aussi, mis 20 millions Francs Cfa.»
Des médicaments, achetés à l’autre bout du monde, avant d’être livré dans la ville sainte de Touba. «Ces médicaments qui viennent de la Chine passent par le marché noir où ils se vendent à des prix dérisoires. Par exemple, des médicaments qui, normalement coûtent 35 mille Francs Cfa sont vendus à 500 Fcfa.» Mais la question que se pose notre interlocuteur est comment le papi, sous ses 78 ans, a pu traverser sept postes frontaliers sans être interpellé. Agitant une quelconque complicité, il énumère les postes frontaliers sur cet axe : « Guinée, Diawbé, Gouloumbou, Koumpentoune Koungueul, Kaffrine, Gossas. De Gossas, ils sont passés par Mbacké avant d’arriver à leur point de chute : Touba Belel.» Cette facilité à traverser les frontières sans se faire arrêter pousse notre source à se poser des questions. Interrogé, un officier de la Douane Sénégalaise précise : «Sur toute cette trajectoire, il n’y a pas de laser. Et tant qu’il n’y en aura pas, on aura toujours des problèmes sur cet axe.»
Diallo à un garde : «Tiow ley beuri rek mais dagnmay bayi ma dem»
A l’enquête, poursuit notre interlocuteur, Diallo avait avoué être le convoyeur des médicaments et qu’il avait eu à le faire durant longtemps dans le passé. D’ailleurs, il confiait avoir prêté à Sylla une partie de l’argent et que ce dernier devait la lui rendre après avoir écoulé le stock. A un garde pénitentiaire, il avait dit : «Tiow ley beuri rek mais dagnmay bayi ma dem (Tôt ou tard, on va me libérer).» Cette affaire de médicaments, qui a stimulé des fibres à un niveau insoupçonné de l’Etat avait fait intervenir l’autorité. «Le procureur de Diourbel avait l’autorisation de l’autorité pour aller jusqu’au bout de cette affaire et débusquer toutes les personnes impliquées.» Mais, au début, seul Diallo a été arrêté. Bara Sylla, qui était dans la foule lors de l’arrestation de Diallo a, expliqué notre interlocuteur, suivi la scène en silence. Sans intervenir. «Ensuite, il est allé se réfugier chez son marabout. Je vais taire son nom. C’est par la suite que conseil lui a été donné de se rendre. Arrêté, Sylla n’a pas voulu collaborer et a préféré endosser l’entière responsabilité.»
Ce rapport du procureur de Diourbel au garde des sceaux
Aussitôt après leur inculpation, un compte rendu a été fait par le procureur de Diourbel, transmis au procureur général de Thiès qui l’a envoyé au garde des sceaux Ismaila Madior Fall» se souvient, dans les moindres détails notre interlocuteur. D’ailleurs, après leur arrestation, révèle notre source : «Le juge d’instruction et le procureur, accompagné du médecin chef régional et du représentant de l’ordre des médecins est parti évaluer la quantité des médicaments saisie, leur nature et l’impact qu’ils peuvent engendrer sur la population. Il y avait aussi le chef de subdivision national des Douanes de Diourbel. A l’issu de cette vérification, le représentant de l’ordre des pharmaciens a signalé que les médicaments sont propres à la consommation. Mais, des médicaments chers comme le viagra, les médicaments pour diabétique et insuffisants rénaux. A l’issu de cette visite, le chef de la subdivision des Douanes de Diourbel a été désigné, jusqu’au prononcé du jugement, gardien des médicaments par le juge.»
La chaine de grâce : Prison, grief, Irap, Dap, Dacg, présidence
Cette affaire, qui a connu son premier battement de cœur avec un trafic de médicaments, a viré en une grâce qui n’a pas suivi le circuit normal. Un circuit qui n’est pas figé et qui peut connaître des détours. L’article 47 de la constitution Sénégalaise qui le définit n’est pas bavard. Il dit simplement que : Le Président de la République a le droit de faire grâce. Cadre de l’administration pénitentiaire, notre interlocuteur, sous le couvert de l’anonymat, estime que cette grâce accordée à Amadou Woury Diallo ne pouvait échapper à la vigilance des techniciens, chargés d’étudier les dossiers.
Moussa Guèye* en a la certitude : «Vous savez, la grâce obéit à des conditions. C’est une prérogative constitutionnelle du président qui peut gracier qui il veut. Demain, s’il le voulait, il peut gracier tous les détenus condamnés définitivement, quelque soit, le quantum, la gravité de l’infraction. A la direction de l’administration pénitentiaire, leur responsabilité est la transmission des propositions de grâce. La Dap n’est pas la direction qui fait le dernier tri. Le processus part des prisons qui font des propositions, par rapport aux instructions, selon la politique actuelle. En ce moment, on a pour instruction de ne pas gracier des détenus condamnés pour des faits comme le crime de sang, le vol de bétail, le viol…. Maintenant, quand les prisons font leurs propositions, elles les envoient au niveau des Inspections régionales de l’administration Pénitentiaire (Irap) qui rassemblent toutes les propositions venant des prisons pour enfin les transférer à la Dap qui effectue un premier tri pour faire les extraits de contrôle. Après, ils envoient les documents au niveau de la Direction des Affaires Criminelles et des Grâces (Dacg). Là bas, même la Dap est invitée à assister aux travaux. Elle a un représentant. S’il identifie quelqu’un qui ne doit pas bénéficier de grâce, il le signale.»
Donc théorise-t-il : « Quelqu’un qui est condamné définitivement peut écrire une demande de grâce, adressée au président. De la prison, on peut envoyer à la direction des grâces automatiquement ou bien, on peut sachant que des grâces seront octroyées à la tabaski ou durant les autres fêtes, attendre pour envoyer en groupe. A chaque fête Républicaine, nous recevons l’instruction de faire des propositions de grâces. Pour le cas d’Amadou Woury, s’il était passé par ce circuit, il ne peut pas échapper à notre vigilance. On ne connait pas Diallo. Et tous ceux qui sont dans ces structures sont des professionnels. Après le travail de la Dacg, les dossiers sont transférés à la présidence.»
Dacg en faute ( ?) Me Babou parle de Mafia, les pharmaciens de «manque de sérieux»
Pour le cas d’Amadou Woury Diallo, il a personnellement introduit une demande de grâce. C’est son codétenu qui le dit. Malick se rappelle encore de ces moments, sourire affectueux aux lèvres : « Il avait, plusieurs fois, écrit à l’autorité pour obtenir une grâce. Durant toute ma période, il a fait des demandes et je suis persuadé qu’il a continué à le faire. Il avait aussi interjeté appel» Pour n’avoir pas renoncé à cet appel, son jugement n’était pas définitif. D’où le côté scandaleux de cette affaire car si un tel dossier a été admis d’office, c’est parce que tout une chaine a failli. Ou une fraude ( ?) a été commise.
Me Babou est catégorique. «Quand on brasse des milliards et qu’on fait venir ces faux médicaments d’un pays à un autre, on n’est pas n’importe qui. Il y a quelque chose dans ce dossier et tout n’a pas été révélé (…) Ce n’est même pas un dysfonctionnement ni une erreur mais c’est fait exprès. Des gens ont été, du début à la fin, pour favoriser la libération de Mamadou Woury Diallo. Donc, ce n’est pas un fruit du hasard.» Il enchaîne : « Cette magouille, pour permettre la libération de Mamadou Woury Diallo doit être démasquée. Et c’est un fait du ministère de la justice. Les failles se trouvent au niveau de la chaine qui organise les grâces qui restent essentiellement le milieu judiciaire.»
Amath Niang aussi n’y comprend rien. Président de l’ordre des pharmaciens ne peut comprendre qu’un tel dossier puisse échapper à tout une chaine de contrôle. «Il y a eu rupture, il y a eu manque de sérieux dans ce processus et je pense que c’est l’occasion pour le président de la République de prendre une décision ferme par rapport à des manquements de ce genre.»
Alassane Ndiaye de la Dacg : « Ceux qui parlent de Mafia ne sont pas plus honnêtes que nous»
Il faut dire que ce dossier est comme une libération chez certains parquetiers. Après 20 ans de carrière, ce procureur en a marre de certaine pratique : « Cette demande de grâce ne devait même pas sortir de la prison car le prévenu n’est pas éligible.» Très en colère, il crache : « On en a marre ! Plusieurs fois, on libère des gens dont les peines ne sont pas épuisées, et puis c’est des gens qui viennent nous tancer après libération. La Dacg est en faute. A leur décharge, le faible effectif comparé à la Dacg en France où il y a plus de 100 magistrats.» Au niveau de la Dacg, on se veut le plus intègre possible. Retrouvé dans les locaux, les magistrats Alassane Ndiaye et Mor Ndiaye n’ont pas voulu se prononcer en l’absence de leur directeur. Le juge Alassane Ndiaye de clôturer le débat : « Tous ceux qui parlent de Mafia ne sont pas plus honnêtes que nous. Et vous pouvez écrire que c’est moi qui l’ai dit.» C’est fait !
"IL N'Y A AUCUNE RAISON DE NE PAS CONTINUER AVEC ALIOU CISSÉ"
Le finaliste malheureux de la CAN 2019 avec le Sénégal reste le "patron" des Lions avec un salaire de sélectionneur national qui est désormais porté à 23.000 € par mois (15 millions FCFA)
Le contrat de l'entraineur sénégalais Aliou Cissé été prorogé jusqu'en 2022.
Finaliste malheureux de la CAN 2019 avec les lions du Sénégal, Aliou Cissé faisait l'objet de vives critiques.
Certains supporteurs et analystes sportifs nationaux réclamaient le départ du sélectionneur.
Cette décision qui revient de droit à la Fédération sénégalaise de football (FSF) est enfin tombée.
Aliou Cissé reste le "patron" des lions avec un salaire de sélectionneur national qui est désormais porté à 23.000 € par mois (15 millions FCFA).
"Il n'y a aucune raison de ne pas continuer avec lui. Depuis sa nomination en février 2015, nous avons participé à deux CAN et à la Coupe du monde 2018" fait remarque Me Augustin Senghor le président de la Fédération sénégalaise de football (FSF).
Il précise que l'objectif du Sénégal "est bien sûr de remporter un jour la CAN, mais aussi d'assurer notre présence en phase finale de chaque compétition de manière régulière".
La Fédération sénégalaise de football veut donc miser sur la stabilité d'un coaching qui est déjà connu des joueurs afin de construire une équipe solide au-delà des titres.
"Prenez l'exemple de l'Allemagne : Joachim Low a été nommé en 2006, il est devenu champion du monde huit ans plus tard, et il n'a pas été limogé l'année dernière, après l'élimination de son équipe au premier tour de la Coupe du Monde" justifie Me Augustin Senghor.
Aliou Cissé n'aura pas le temps de dormir sur ses lauriers après cette confirmation à la tête des lions de la Teranga dans la mesure où le Sénégal renoue avec le terrain.
La sélection nationale entame des matchs amicaux en septembre et octobre, avant le début des qualifications de la CAN 2021 en novembre.
PAR Pape Diouf
LES CONSULTANTS ENVAHISSENT LES RADIOS ET LES TÉLÉS
La plupart sont d’anciens joueurs qui sont donc censés savoir de qui ils parlent. Tant pis s’ils ne débitent que des lieux communs ou des approximations ! Ou si la prétention les étouffe et les conduit à dire une chose et son contraire
La 22e édition de la Coupe d’Afrique des nations (CAN), qui vient de baisser rideau et de consacrer fort logiquement l’Algérie, n’a pas échappé à une règle désormais solidement établie. A chaque grande compétition, les consultants envahissent les radios et les télés.
Ils pérorent sur tout, expliquent tout, passent pour d’infaillibles connaisseurs du jeu et du milieu. Ils parlent technique et tactique, condition physique et athlétique. Rien sur le terrain ou dans les vestiaires, laissent-ils croire, ne leur est inconnu ou étranger. Sans doute, si on les interrogeait même sur la couleur des dessous portés par les acteurs, ils nous renseigneraient.
Les plus connus et recherchés d’entre eux sont grassement payés et font l’objet, à chaque été, de surenchères. La plupart des consultants sont d’anciens joueurs qui sont donc censés savoir de qui ils parlent. Tant pis s’ils ne débitent que des lieux communs ou des approximations ! Ou si la prétention les étouffe et les conduit à dire une chose et son contraire.
Comme en 2014, lorsque les mêmes experts tentèrent de nous faire avaler ce soir de Coupe du monde que la victoire de l’Allemagne était inéluctable sur le Brésil (7-1) après nous avoir pourtant persuadés le matin que les Brésiliens, chez eux, seraient imbattables.
Exception qui devient la règle
Avant, à la fin de leur carrière, la mode chez les joueurs était d’ouvrir un magasin d’articles de sport. La télé et la radio servent aujourd’hui de lieux de reconversion. Naguère, on comptait cinq journalistes pour un consultant. De nos jours, la proportion s’est inversée. La consultance n’est plus l’exception mais la règle.
Le temps des Larqué (foot), Eddy (basket), Dominguez (tennis) ou Albaladejo (rugby) est définitivement révolu. Certains consultants oublient ou feignent d’oublier qu’ils reviennent d’expériences malheureuses dans des clubs et n’hésitent pas à se poser en donneurs de leçons.
Certes, ils ne sont pas tous sans compétence ou clairvoyance. Il en est même dont le jugement ou les emportements ne sont pas dénués de fondement (Dugarry en France ou Bell en Cameroun). Mais, outre que cette tendance à faire appel à des gens extérieurs n’est pas en soi une garantie de meilleure analyse, elle a surtout pour effet de déposséder les journalistes de leurs principales prérogatives.
Combien parmi ces derniers deviennent-ils de simples agents de liaison sans réelle mesure avec leur formation ? Ce dont bien sûr, leurs employeurs ne se soucie guère… Jeu de dupes ? Ça y ressemble beaucoup.
Pape Diouf a été président de l’Olympique de Marseille de 2005 à 2009.
QUE RESTE-T-IL DU MYTHE DE COLOBANE ?
C’est le paradis de la friperie, mais aussi des pickpockets, vols et agressions, racket, recel et autres qui avaient fini de tisser une mauvaise réputation de quartier criminogène
Colobane, c’est le grand marché aux puces de Dakar. Ici, c’est le paradis de la friperie, mais aussi des pickpockets, vols et agressions, racket, recel et autres qui avaient fini de tisser une mauvaise réputation de quartier criminogène. Cette antichambre de la ville, bien dotée d’infrastructures socio-éducatives, souffre toujours de ce phénomène. Même si, aujourd’hui, les choses semblent avoir sensiblement évolué. Dans le bon sens. Reportage.
Baba Diop crache sur le sol. «Colobane n’est plus ce qu’il était. Avant, vous ne pouviez pas rester 5 minutes dans la rue sans vous faire agresser», siffle-t-il. En cet après-midi de jeudi, l’homme, vigile la nuit et éleveur de moutons le jour, s’éjecte paresseusement de son taudis crasseux. A 50 ans, Baba Diop, endurci par la solitude d’une vie de célibataire, vient de se tirer d’un profond sommeil diurne. Bouilloire à la main, visage torturé par un large balafre horizontale, il se saisit d’une bouilloire et se dirige vers la mosquée d’en face. «Permettez-moi de me débarbouiller un peu avant de pouvoir vous recevoir», lance-t-il avant de tourner les talons.
Quelques minutes plus tard, la mine moins tirée, l’homme invite à s’asseoir dans la rue, à quelques centimètres de son enclos de moutons dont l’odeur de pisse suffocante agresse les narines du visiteur. Puis, le regard facétieux, les lèvres retroussées, le corps mou sanglé dans un caftan en malikane noir, Baba confie : «Colobane n’a jamais eu bonne presse. Le quartier était réputé le plus chaud de Dakar.» Un rictus triste barre son visage abîmé par la galère. Pour être né et avoir grandi à Colobane dans les années 70, l’homme connaît Colobane comme sa poche. Il narre, le regard fixant un point invisible de l’horizon, comme pour capturer des clichés du passé.
Avant, il y avait des baraques. La population n’osait pas circuler avec de l’argent, ni vendre ici. Car chaque jour, il y avait des agressions et des délits comme le vol à la tire. Des gens ont été poignardés. On trouvait des gens égorgés ici et cela restait sans suite. C’est comme si le quartier était déclaré zone hors-loi. Les forces de l’ordre intervenaient rarement quand il y avait des rixes. On était abandonnés à nous-même», narre-t-il le souffle saccadé, avant de poursuivre. «Vous voyez ce groupe de personnes assises sur le trottoir d’en face, allez leur parler ! Comme moi, ils sont nés ici. Eux pourront vous parler de Colobane. Moi, je ne peux pas en dire plus. Je n’ai pas envie de m’attirer des ennuis», glisse-t-il, avant de se retirer brusquement.
«Chaque semaine, une personne était poignardée ou tuée»
C’est connu ! Colobane a toujours traîné la réputation de quartier malfamé et criminogène. Situé autour de la Caserne Samba Diéry Diallo, le quartier est logé entre Fass, Médina, Hlm et Gibraltar. Sa notoriété tient d’un des plus grands marchés de Dakar qu’il abrite. Un véritable repaire de bandits et de voleurs à la tire qui occupent illégalement le marché et les alentours. Le nom du quartier, où la pauvreté est visible, a toujours été associé au banditisme, mais aussi au maraudage. «Pourtant, les choses se sont sensiblement arrangées aujourd’hui du fait que, maintenant, les habitants fréquentent les écoles et en sortent avec des diplômes qui les empêchent de sombrer dans la déviance», soutient Mor Dionne.
Ce commerçant tient sa boutique à Colobane depuis 1987. Dans son échoppe bien achalandée, chemises, pantalons, tee-shirts et baskets attirent la clientèle. Mais lui semble plus préoccupé à la surveillance des mains baladeuses. Il s’en excuse presque. «C’est une vieille habitude que je traîne depuis que je suis installé ici. Avant, je faisais tous les jours l’objet de vol. Des clients entraient et des habits disparaissaient sans que je ne m’en rende compte. C’est que le ‘’Market’’ était vraiment un nid de voleurs. Entre 1980 et 1990, Colobane était infréquentable.
Chaque semaine, une personne était poignardée ou tuée par les agresseurs. Les sapeurs-pompiers venaient évacuer les victimes et l’affaire était classée. Il n’y avait aucune poursuite, ni d’enquête. D’autres vous vendaient un produit et alertaient leurs complices voleurs qui le reprenaient en vous agressant. J’ai même vu un gars acheter un portable au ‘’Market’’, quelques mètres après, il essaie de l’allumer sans résultat. En l’ouvrant, il découvre qu’à la place de la batterie, il y avait un morceau de savon. Il y avait toutes les horreurs du monde à Colobane», confie-t-il. La conversation est interrompue par un quidam à l’allure suspecte. Avec sa barbe hirsute, et cette balafre ostentatoire qui strie le côté gauche de sa joue, Dame ne fait pas son âge. Il en paraît 60. Son allure dégingandée et voûtée semble s’affaler sous le poids d’une vie de chien.
De sa bouche qui pue l’enfer, s’échappe l’odeur mesquine du diluant synthétique (guinz) inhalé quotidiennement. « Alors, lep tchill (tout est ok ?)», lance-t-il à Mor. «Sante. Tawfekh rek (tout va à merveille)», répond Mor qui chuchote à notre attention : «C’est un ancien caïd. Aujourd’hui, il est reconverti en boudiouman (homme poubelle).» Piqué par la remarque, Dame se retourne et menace : «Grand, arrêtes ce que tu dis. J’ai toujours été un boudiouman. Je ne sais même pas comment on tue une mouche. Les gens raconte du n’importe quoi.» Se dirigeant vers les visiteurs, il murmure : «Aujourd’hui, Colobane c’est le paradis. Se réveiller un matin sans vivre une agression relevait du miracle. La situation était d’autant plus complexe que les délinquants étaient, pour la plupart, saouls ou shootés au guinz (diluant cellulosique). Ils s’adonnaient aussi au recel et au racket.»
Puis Dame se fond dans la nature. Comme il était venu. A travers les rues étroites du quartier, entre les deux voies qui se croisent pour former un rond-point, sous le pont, Dame et ses copains boudioumen vadrouillent dans ce lieu inhospitalier. Ici, on y accède par une allée sinistre dont la porte n’a jusque-là pas encore été scellée. L’endroit est malfamé et les populations jettent un regard dédaigneux au «No man’s land», comme s’il recelait en lui seul leurs pires hantises.
«Les agressions ne sont plus quotidiennes, mais le mal persiste»
«Ces déchets humains nous pourrissent la vie. A cause d’eux, Colobane ne peut se départir de la mauvaise image qu’il traîne», éructe Samba Lô. A 65 ans, Samba affiche, pour la circonstance, un sourire blafard qui trahit un mal-être profond. Le cheveu rare, disséminé en touffes par endroits sur son crâne, les joues creuses, les pommettes ridées pointent un grand corps malade. Les lèvres rabattues sur une bouche édentée, le sexagénaire plonge dans ses souvenirs : «Avant, dès qu’un ngaka (non initié) entrait dans le marché, il était vite repéré par les guetteurs qui profitaient d’un moment d’inattention de leurs proies pour lui sauter dessus et prendre ses biens. Ces hommes sont passés maîtres dans l’art du vol à la tire et du pickpocket. Ils roulaient aussi dans la farine les malheureux qui s’aventuraient à acheter chez eux. Un jour, une dame a failli en faire les frais devant mon échoppe. Heureusement qu’elle a été avertie à temps. Le marché n’est pas le seul lieu où les vols sont légion, les maisons alentours subissent aussi le diktat des agresseurs. Ces mauvaises pratiques existent toujours ici. Certes les agressions ne sont plus quotidiennes, mais le mal persiste.»
Poursuivant, il souligne les bizarreries du marché : «Parfois, de bonne heure aussi, il nous arrive de tomber sur des gens qui vendent des habits encore mouillés. Cela est suspect et nous renforce dans notre conviction que ses habits ont été sûrement volés. Certains commerçants, loin de se douter qu’ils font du recel, les achètent sans s’intéresser à leur provenance.» A leurs risques et périls.
«Des scènes de règlements de comptes entre gangs dignes d’un scénario mexicain»
Autre péril, le banditisme. A Colobane, un quartier pas comme les autres, le banditisme hante le sommeil des populations. Malgré ses écoles primaires, ses collèges, lycées et la proximité avec la Gendarmerie, Colobane «est aussi un quartier infesté de bandits de toutes sortes qui squattent les rues et empêchent les gens de dormir du sommeil du juste ou de sortir à certaines heures». La dénonciation émane de quatre femmes vendeuses de friperie et habitantes du quartier. Elles invitent les gens à ne pas s’aventurer dans certaines zones de la localité. Et dénoncent le laxisme de l’Etat et de la municipalité qui, selon elles, n’ont fait aucun effort pour sortir le quartier des ténèbres.
«Une fois la nuit tombée, c’est le noir total dans certaines rues les plus empruntées du quartier», affirment-elles. Une situation dont profitent les bandits qui occupent illégalement le marché et ses alentours immédiats. Ces agresseurs élisent domicile dans le marché et dans certains milieux publics, comme les jardins de la Place de la Nation (ex-Obélisque), en face du Lycée Kennedy. Et ils sont experts dans le vol à la tire. Mais, le plus cocasse, c’est qu’ils sont souvent les voisins immédiats de leurs victimes. Une dame témoigne, sous le sceau de l’anonymat : «Ils habitent le quartier et sont de bonne famille. Nous les connaissons tous, car tous les jours, nous rencontrons leurs parents dans les cérémonies familiales.»
Marchand de primeurs depuis une décennie dans ce marché, Al Ousseynou Diallo confirme : «Si je n’étais pas protégé contre les couteaux (‘’toul’’), je serais mort depuis longtemps. Dès que je me suis installé, ils ont commencé à me fréquenter. Mais, ce sont des gens qui les connaissent très bien qui m’ont averti et j’ai pris mes dispositions en restant sur mes gardes.» Moussa Diop, lui, est catégorique. Pour ce commerçant, le mythe de Colobane est resté intact dans la mémoire collective. Même si, sur le terrain, il a tendance à s’effriter. L’implantation sans cesse renouvelée des commerçants est passée par là. «Les commerçants et vendeurs ont beaucoup participé au recul de la criminalité à Colobane. Même si parfois, on assiste à des scènes de règlements de comptes entre gangs dignes d’un scénario mexicain. Ils en arrivent à s’entretuer devant tout le monde», déplore-t-il.
«Les gens sont maintenant civilisés»
N’empêche, tout Colobane s’accorde sur un point précis. La criminalité a beaucoup reculé. Et les populations ne s’en plaignent plus comme auparavant. Cela, grâce à l’implication des fils du quartier qui ont souhaité lifter le visage de leur quartier balafré par une mauvaise réputation. «Ils aident les jeunes à trouver du travail pour qu’ils ne sombrent pas dans la délinquance», soufflent certains. Aliou Diallo et El Hadj Touré, deux jeunes qui ont eu à bénéficier du coup de pouce de ses fils du quartier mieux servis, acquiescent. Vendeurs de friperie, ils s’érigent en défenseurs du «Market» (terme anglais souvent utilisé pour définir Colobane en argot, ndlr) : «Au marché Colobane, nous nous réveillons entre 5 et 6H du matin pour venir travailler et rentrons aux environs de 22H. Les jeunes qui travaillent ici sont d’honnêtes citoyens. Le marché Colobane d’hier, est différent de celui d’aujourd’hui.
Lorsqu’on en parlait, on pensait automatiquement à la criminalité. Mais de nos jours, les choses ont changé. Tout ça est derrière nous. Moi, je n’ai jamais été victime d’agression ni de vol et je ne me suis jamais battu durant mes 5 ans passés ici. Les gens sont maintenant civilisés.» Mouhamed Diédhiou, habitant du quartier, embouche la même trompette. Il souligne qu’aujourd’hui, ce sont les commerçants qui occupent le marché et, la nuit tombée, ils rentrent tous chez eux. «Aujourd’hui, les choses semblent changées. Beaucoup de ces jeunes qui avaient sombré dans la déviance, ont été ‘’récupérés’’. Ils ont trouvé du travail qui les occupe. Ils sont ainsi tirés de l’oisiveté, mère de tous les vices, pour les empêcher de sombrer dans la déviance. En tant que père de famille, je me réjouis du changement», termine Amadou Diallo. Colobane amorce sa mue. Au grand bonheur de tous.
PAR Lamine Dingass Diédhiou
ÉVACUATIONS SANITAIRES EN AFRIQUE, UNE MÉDECINE AU SERVICE DES RICHES
Beaucoup de gens dénoncent ce système de favoritisme qui est parfois fondé non pas sur un véritable besoin de santé pour les pays africains mais qui favorise un «tourisme médical» qui ne dit pas son nom
Le 15 juin 2017, on se rappelle à Dakar la mort subite, dans un hôpital sénégalais, de Cheikh Khalifa Ababcar Mbengue, directeur de l’Agence de la couverture maladie universelle, CMU-Sénégal. Dès le lendemain de cette tragédie, un membre de la famille de M. Mbengue est monté au créneau pour attribuer la mort de son frère à la négligence de l’État et au fait que M. Mbengue n’a pas été évacué à temps dans un hôpital français à Paris où il aurait pu, selon ses dires, être sauvé. Une plainte a été annoncée par la famille contre l’État du Sénégal pour non-assistance à une personne en danger et, à date, personne ne sait si cette menace de plainte a été suivie d’effets. Le 15 juillet 2019, le décès à Paris d’Ousmane Tanor Dieng, puissant controversé premier secrétaire général de l’ancien puissant Parti socialiste du Sénégal et président du Haut conseil des collectivités territoriales (HCCT), va raviver la controverse sur le coût économique des «évacuations sanitaires» dans l’hexagone. Aujourd’hui encore, l’ancien premier ministre du Sénégal, Mohammed Boun Abdallah Dione que l’on donnait pour mort, ainsi que d’éminentes autres personnalités du régime sénégalais se soignent en ce moment en France et un peu partout à travers le monde avec l’argent du contribuable.
Les évacuations étant, pour la plupart du temps, réservées aux dignitaires du régime, c’est-à-dire aux gens en haut d’en haut et à leurs familles et proches, beaucoup de citoyens se posent maintenant des questions sur la légitimité morale d’une telle pratique par l’État.
À combien sont chiffrées ces évacuations ? Docteur Serigne Falilou Samb de la Polyclinique Pasteur de Rufisque en banlieue dakaroise, indique que les évacuations sanitaires coutent, au bas mots, 24 milliards de francs CFA par année au Trésor public du Sénégal. Il ajoute qu’avec ce montant faramineux, le Sénégal peut, si ses dirigeants le désirent vraiment, relever au standard mondial la qualité technique d’au moins deux de ses plus grands hôpitaux qui pourraient, ainsi, prendre en charge toutes les formes d’hospitalisation de manière à éviter l’évacuation couteuse des pontes du régime à l’étranger.
Selon une autre révélation faite par un journal de la place à Dakar, ce sont entre 40 à 50 bénéficiaires qui sont pris en charge, chaque année, par le Trésor public. L’État du Sénégal dépenserait ainsi, en raison de 3 000 euros par jour (environ 1 950 000 francs CFA) de coût d’évacuations vers Paris, près de 180 millions de francs CFA pour la prise en charge moyenne d’un seul bénéficiaire. Ce qui veut dire que pour à peu près 40 hauts dignitaires qui en bénéficient chaque année, c’est plus de 180 millions de francs CFA que le Sénégal dépense au titre du transport, de l’hospitalisation, de la prise en charge médicale, de la nourriture et de la civière qui accompagne le malade et qui, parfois, ramène le mort, aux frais du contribuable. Cette civière peut, à elle seule, coûter jusqu’à 14 millions de francs CFA, l’équivalent de 6 places dans les avions de la Royal Air Maroc (RAM), l’une des compagnies aériennes les moins chères qui est spécialisée dans le juteux «business» du transfert des malades sur la scène internationale. Et s’il s’agit d’un dignitaire du régime qui souffre d’une maladie plus complexe comme les maladies cardiovasculaires, celles liées aux traumatologies graves ou aux cancers, ce montant peut facilement atteindre 100 millions de francs CFA que casque, pour un seul malade, le Trésor public sénégalais.
Le problème est d’autant plus grave que les évacuations sanitaires sont octroyées au sommet de l’État en fonction de critères autour desquels le flou est total. Beaucoup de gens dénoncent ce système de favoritisme qui est parfois fondé non pas sur un véritable besoin de santé pour les pays africains mais qui favorise un «tourisme médical» qui ne dit pas son nom. Ce tourisme est réservé à une élite complexée et souvent victime du «syndrome du décès hexagonal». Ce syndrome, qui frappe particulièrement fort les classes dirigeantes, favorise les soins à l’étranger. Il est en effet bien vu, pour les membres de cette classe, de faire savoir et de dire à leur entourage qu’ils se soignent en Europe et que leurs médecins traitants sont en Europe. Ainsi, même parfois se sachant condamnés à la mort, ils vont préférer aller mourir, aux frais du contribuable, dans un hôpital huppé en Europe pour se faire émettre un acte de décès européen qui symbolise la supériorité de leur rang dans la hiérarchie sociale.
Le journaliste Alain Foka de Radio France internationale (RFI) note que c’est l’équivalent de 7 hôpitaux high-tech que coutent, chaque année, les évacuations sanitaires pour l’ensemble des pays francophones de l’Afrique subsaharienne. Son invité, Dr Roger Moyou-Mogou, souligne que le coût de 3 patients dialysés évacués en Europe peut construire un centre de dialyse avec 4 postes pour desservir 12 patients par jour dans un hôpital africain. Ce qui veut dire que l’argent dépensé pour dialyser 3 patients africains en un an dans un hôpital européen peut faire dialyser 12 patients par jour dans un hôpital situé dans un pays africain.
C’est trop et beaucoup trop d’argent dépensé pour le petit nombre par le Sénégal qui est classé, par le Fonds monétaire mondiale (FMI) et les institutions de Brettons Woods, comme l’un des vingt-cinq pays les plus pauvres au monde en 2019. C’est aussi trop et beaucoup trop d’argent pour l’Afrique subsaharienne dans son ensemble car dans cette sous-région, le phénomène est le même : les rares hôpitaux publics encore fonctionnels sont littéralement pris d’assaut et transformés en mouroirs publics pour le grand nombre qui s’y engouffre, faute de mieux.
C’est la raison pour laquelle la montée soudaine de ce débat au Sénégal et, d’une manière plus générale, en Afrique subsaharienne n’est pas un phénomène sans intérêt. Au contraire, ils veulent déchirer le voile qui entoure les évacuations sanitaires que l’idéologie dominante des classes dominantes présente faussement aux classes dominées comme une fatalité qui résulte des inégalités «naturelles» et/ou de la volonté divine.
Les pays du Maghreb (Maroc, Tunisie, etc.), qui avaient un niveau de formation des compétences et de développement sanitaire presque comparable à celui des pays subsahariens lorsqu’ils accédèrent ensemble à l’indépendance au début de années 60, ont pris conscience de l’importance de la souveraineté sanitaire. Ils sont en train de bâtir des infrastructures de santé qui leur permettent de soigner sur place leurs citoyens malades. Non seulement ils investissent en masse dans l’équipement et le développement de leurs propres systèmes de santé, mais leurs élites font confiance aux compétences de leurs médecins et personnels locaux de santé. En revanche, en Afrique subsaharienne, les évacuations sanitaires au profit des riches se développent à grande vitesse vers l’hexagone mais, paradoxe de l’histoire, de plus en plus vers les pays du Maghreb dont la plupart des premiers médecins ont été formés à la Faculté de médecine de l’université Cheikh Anta Diop de Dakar.
Les évacuations sanitaires sont donc une aberration scientifique et technologique qui jette à terre les institutions de santé des pays qui y recourent. Plus grave encore, elles sont un aveu d’échec des politiques publiques de santé dont les lignes de force et l’état de délabrement avancé ont été aggravées en Afrique subsaharienne par les politiques d’ajustement structurel auxquelles se sont pliés les chefs d’État du sous-continent au début des années 80. Tout compte fait, l’état actuel des hôpitaux et des systèmes de santé dans cette partie du monde est un véritable scandale politique à répétition.
Que faire ?
Le but de ma contribution n’est pas d’enfermer cette question dans un débat de chiffres mais de montrer, par-delà les chiffres, que les évacuations sont non seulement une aberration historique à laquelle il est urgent de mettre un terme mais qu’elles sont aussi, et surtout, un obstacle direct au développement de véritables systèmes publics de santé ouverts et accessibles à tous en Afrique. Plutôt que d’envoyer ses élites se faire soigner à l’étranger aux frais du contribuable, les pays africains doivent résolument opter pour une médecine de qualité avec les équipements, les infrastructures et les ressources humaines de qualité qui assurent la continuité des soins pour le plus grand nombre de leurs concitoyens. Cela suppose, encore une fois, des investissements massifs – la santé n’ayant pas de prix – dans les infrastructures techniques et les technologies de soin. Cela suppose également la formation, en grand nombre, de médecins généralistes, de médecins spécialistes, de médecins sous-spécialistes ainsi que des infirmiers qualifiés qui travaillent de concert avec le personnel spécialisé (travailleurs sociaux, inhalothérapeutes, nutritionnistes, etc.) pour prendre soin des malades et traiter la maladie en elle-même non pas comme un simple phénomène biomédical mais comme un phénomène biopsychosocial qui touche toutes les dimensions de la santé.
Cela suppose également la prise de mesures législatives contraignantes, comme le préconisait récemment le président béninois, Patrice Talon, dans un discours musclé lors de sa rencontre avec les responsables de la communauté musulmane de son pays en février 2018. Pour le président Talon effet, les gouvernants africains doivent interdire les évacuations sanitaires parce que celles-ci ne profitent qu’aux riches et aux privilégiés du régime qui sont capables de payer leurs soins avec leur propre argent.
Les partis politiques de l’opposition, les organisations de la société civile, les députés dits «du peuple» et tous les démocrates soucieux de l’amélioration du plateau technique des institutions hospitalières et des soins de santé doivent interpeler, sur le vif, leurs ministres de la Santé pour que ces derniers fassent un bilan public des évacuations sanitaires et prennent des mesures draconiennes afin de mettre fin aux faveurs ainsi accordées à l’oligarchie riche et fortunée de leur continent.
Rappelons simplement que pour chaque malade évacué par l’Afrique vers l’Europe, l’Afrique sous-traite le développement des systèmes de santé des pays riches et aide ces pays à élever les standards de formation et de compétence de leurs personnels de soin. Ce personnel est grassement rétribué avec l’argent africain qui contribue, ainsi, à améliorer la santé et le niveau de vie général de la population européenne déjà bien nantie.
Pour sortir de ce cercle vicieux où c’est le pauvre qui nourrit le riche de son lait, il est faux de penser que l’Afrique doit faire de sa médecine publique une médecine privée et que celle-ci est le seul moyen pour concurrencer valablement les médecines publique et privée étrangères. L’échec de l’«Initiative de Bamako» qui préconisait, à la fin des années 80, la mise en place d’un paquet minimum de soins primaires payables par le contribuable africain, cet échec nous en dit long sur la capacité des populations africaines de base à payer leurs propres soins de santé. Également, l’échec de la «Déclaration d’Abuja» de 2001 nous renseigne sur le «refus du développement» qui frappe particulièrement nombre de chefs d’État africains du Sud du Sahara. On se rappelle que ces pays s’étaient engagés, chacun en ce qui le concerne, à consacrer au moins 15% de leur budget aux soins de santé. Aujourd’hui, seulement 10% de ces pays ont tenu parole et, à date, plus 35 % d’entre eux consacrent moins de 20$ US (environ 1800 francs CFA) par an et par habitant pour la santé de leur population.
Il faut donc dénoncer - sur toutes les tribunes du monde - le manque de volonté politique des dirigeants africains à respecter leurs promesses en matière de santé. Ces dirigeants refusent délibérément, pourrait-on dire, de prendre leurs responsabilités historiques devant les histoires tragiques de santé qui se déroulent sur leur continent. Tant qu’ils peuvent aller librement se soigner à l’étranger aux frais du contribuable, comment peut-il en être autrement ? Alors, puisqu’ils ne connaissent qu’une seule défaite – celle de la contrainte de l’action collective des masses – les masses doivent les pousser à investir massivement dans les soins de santé de manière à permettre au personnel de santé de soigner leurs malades en toute sécurité. Car, c’est la volonté politique qui maque réellement en Afrique pour pouvoir améliorer les soins de santé et contrôler les endémies qui frappent de tous les côtés les populations dont l’avenir est souvent hypothéqué par le piètre état de santé dans lequel elles vivent.
Les pays privilégiés où les dirigeants africains envoient leurs élites se faire soigner ont réussi, à un moment ou à un autre de leur histoire, à rendre public et disponible à tous leurs citoyens des systèmes publics de santé bien efficaces. La plupart l’ont fait, avec plus ou moins de succès, sans jamais renier les fondements du système capitaliste inégalitaire sur lequel ils sont assis. Pour les chefs d’États de l’Afrique subsaharienne qui considèrent le rejet de ce système comme le problème politique fondamental, il suffit juste de «copier-coller» ce qui a été fait dans ces pays pour améliorer leurs systèmes de santé et rendre ces derniers accessibles à tous leurs concitoyens. Le capital financier et les ressources humaines existent pour ce faire et, surtout, pour mettre fin à plus d’un demi-siècle de gaspillage de ressources au profit de l'extérieur.
Les journalistes des médias d’État et de tous les médias doivent s’impliquer dans cette bataille en réalisant des documentaires poignants et des reportages éclairés sur les évacuations sanitaires. Ces documentaires et reportages doivent viser à éclairer l’opinion publique sur le caractère budgétivore de ce phénomène et la nécessité, pour le développement des soins de santé dans les pays africains, de mettre un terme final à cette pratique inéquitable, exsangue et contreproductive.
Les médecins, les syndicalistes, les organisations de la société civile et les employés du milieu de la santé ainsi que les acteurs des associations communautaires doivent dénoncer - à l’ONU, à l’OMS, à l’UNICEF et sur les tribunes de toutes les instances internationales - ce scandale au profit des oligarques des régimes africains. Ils doivent faire savoir au reste du monde, qui ferme les yeux sur ce scandale inédit, que les évacuations sanitaires sont un crime contre l’humanité et que ce crime est un manque totalement d’empathie, de compassion et d’équité pour le sort des pauvres et des indigents, les grands oubliés des politiques publiques de santé en Afrique.
Lamine Dingass Diédhiou est Professeur-chercheur en sociologie, Collège de Limoilou, Québec, Canada.
UN SERPENT FAIT FUIR LES PARLEMENTAIRES AU NIGERIA
"Nous étions sur le point d'entrer en séance plénière quand un gros serpent est sorti de la chambre. Cela a perturbé notre réunion et nous avons dû quitter les lieux en toute hâte"
Un serpent est tombé du toit sur des membres d'un Parlement régional du sud-ouest du Nigeria.
Les députés, qui ont quitté précipitamment les lieux à la suite de l'incident, ne veulent plus y remettre les pieds avant une sécurisation des locaux.
"Nous étions sur le point d'entrer en séance plénière quand un gros serpent est sorti de la chambre. Cela a perturbé notre réunion et nous avons dû quitter les lieux en toute hâte", a déclaré le porte-parole du Parlement de l'Etat d'Ondo, Olugbenga Omole.
Selon lui, le reptile tombé jeudi du toit à l'intérieur de la chambre n'avait blessé personne avant d'être tué.
Selon le porte-parole, l'incident trouve son origine dans la décrépitude des locaux et le manque d'argent pour leur entretien.
"Cette chambre n'offre plus la sécurité nécessaire au travail législatif, et c'est pourquoi nous avons décidé d'ajourner nos réunions à une autre date", a-t-il affirmé.
La chambre ne se réunira pas tant que les locaux n'auront pas été l'objet d'une fumigation complète, selon son porte-parole.
MULTIPLE PHOTOS
AU REVOIR, CAPITAINE AMAR !
Parents, amis, collègues et sympathisants ont pris d’assaut, très tôt dans la matinée, la mosquée du Point E pour assister à la levée du corps du défunt patron de NMA Sanders, décédé mardi dernier, en France
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BABACAR FALL & PAPE DOUDOU DIALLO |
Publication 26/07/2019
L’émotion était forte ! Parents, amis, collègues et sympathisants de Ameth Amar avaient pris d’assaut, très tôt dans la matinée, la mosquée du Point E pour assister à la levée du corps du défunt patron de NMA Sanders, décédé mardi dernier, en France. Dans l’enceinte de la mosquée, les témoignages étaient unanimes : « Ameth était un homme bien. Un vrai travailleur »
En ces circonstances douloureuses où tous les esprits pensent au décret divin, il était utile de rappeler quelques préceptes de l’islam et faire les derniers témoignages sur l’homme. Un exercice auquel s’est soumis le dignitaire mouride, Serigne Khadim Awa Ba. Le religieux n’a pas manqué de rappeler aux croyants leur mission sur terre. « Récemment nous avons perdu Ousmane Tanor Dieng. Aujourd’hui, nous avons perdu Ameth Amar. Si l’argent pouvait les retenir sur terre, ils n’allaient jamais quitter ce bas monde », a prêché Serigne Khadim Awa Ba.
Le ministre de l’Intérieur et de la Sécurité publique, Aly Ngouille Ndiaye, à la tête d’une forte délégation, composée des ministres, Mamouth Saleh, Mbaye Ndiaye et Youssou Ndour, a représenté le chef de l’Etat absent du territoire. Le patriotisme du défunt a été mis en exergue par le ministre. Dans son allocation, Aly Ngouille Ndiaye a relaté une confidence de Ameth Amar. « Il était venu me voir pour un projet d’hôpital de dimension internationale. Pour lui, il était anormal que des autorités quittent à chaque fois le pays pour aller se soigner à l’étranger faute de plateau technique adéquat », rapporte Aly Ngouille Ndiaye. Il ajoute : « Tous les Sénégalais sont fiers de Ameth Amar. C’est le Sénégal qui a perdu ».
Le voeux de Ameth Amar à construire un hôpital e haut standing est appuyé par son collaborateur, Dethie Fall. « En partenariat avec des spécialistes sénégalais, Ameth voulait mettre en place un établissement sanitaire dénommé : hôpital international de Dakar. C’est dire que l’homme est d’une générosité et d’un patriotisme incommensurable », a noté le Vice-président du parti, Rewmi.
Youssou Ndour s’est joint à ce lots de témoignages. N’ayant presque pas les mots, la star se dit très surpris de la disparition de son ami. « Nous avons perdu un grand Sénégalais. Quelqu’un qui a été très passionné du travail et du développement de son pays. La présence de ces nombreuses personnalités en témoigne », a déclaré le chanteur. Qui souligne : « C’est une perte à laquelle je ne m’attendais pas du tout ».
À signaler que la prière mortuaire et l’enterrement du défunt capitaine de l’industrie sénégalaise sont prévus cet après midi dans la cité religieuse de Darou Salam, dans le département de Mbacke.
par Mamoudou Ibra Kane
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SAUVER NOTRE AGRICULTURE OU PÉRIR AVEC ELLE
L'équation de l'eau appelle de l'État, une prise en charge sérieuse - On ne peut pas continuer à compter sur le "bawu nan" face à la rareté des pluies
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Mamoudou Ibra Kane |
Publication 26/07/2019
Dans sa chronique de ce vendredi, 26 juillet 2019, Mamoudou Ibra Kane fait un clin d’oeil au ciel, qui a enfin exaucé les prières des Sénégalais en ouvrant ses vannes. Le sort des paysans, donc du pays, dépend grandement de cette pluie qui tombe. L’équation de l’eau appelle, de la part de l’Etat, une prise en charge sérieuse, plaide le journaliste. La problématique du changement climatique et son impact sur la pluviométrie ne donne pas le choix aux pouvoirs publics et autres acteurs agricoles. Le fait de l’homme dans un pays qui a abattu tous ses arbres ne saurait être occulté dans la chaine de responsabilités, nous dit-il.