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25 août 2025
LA CONTRE-ATTAQUE SALEE DES LIBERAUX DE THIES
Les responsables du Parti démocratique sénégalais (Pds) de Thiès ont apporté, hier, une réplique salée à leur ex-frère, Mouhamadou Lamine Massaly, à qui ils reprochent d’avoir tenu des propos discourtois envers l’ancien président de la République Me WADE
Les responsables du Parti démocratique sénégalais (Pds) de Thiès ont apporté, hier, une réplique salée à leur ex-frère, Mouhamadou Lamine Massaly, à qui ils reprochent d’avoir tenu des propos discourtois envers l’ancien président de la République Me Abdoulaye Wade
Entre Me Abdoulaye Wade et Mouhamadou Lamine Massaly, c’est une longue histoire qui se termine de façon chaotique. Le deuxième nommé, qui pourtant ne jurait que par son désormais ex-mentor Me Abdoulaye Wade, a déclenché avant-hier le processus du divorce, après tant d’années de compagnonnage. Massaly a fait une sortie dans la presse pour s’en prendre à l’ancien président Abdoulaye Wade.
Pire, il informe l’opinion de la publication très prochaine de son ouvrage dans lequel il va faire beaucoup de révélations concernant “Wade père’’. Mais l’ex-libéral risque de se heurter ou de marcher sur les libéraux de la ville de Thiès. Ces derniers ont organisé, hier, un point de presse pour apporter à leur ancien frère de parti une réponse salée. Ils demandent à Massaly d’assumer son départ du Pds et d’arrêter de s’acharner sur leur secrétaire général national. “Les gens peuvent choisir de partir avec respect. Massaly, qui dit avoir démissionné du Pds, est parti depuis qu’il a décidé de soutenir Me Madické Niang, lors de la présidentielle du 24 février 2019. Son départ est un ouf de soulagement et n’affecte personne, bien au contraire. Il a choisi de partir. Nous lui demandons de ne jamais faire des sorties incendiaires à l’endroit d’Abdoulaye Wade qui l’a créé et fabriqué. Wade a tout fait pour Massaly. Mais, comme il n’y a plus de décrets, ce même Massaly, qui a bénéficié du soutien et de tous les privilèges de Me Wade, s’en prend vertement à lui. C’est inadmissible et impensable’’, fulmine Ndèye Amy Diouf, responsable du Pds à Thiès et membre du Comité directeur du parti de l’ancien chef de l’État.
De son côté, le responsable des jeunes libéraux estime que le départ de Massaly du Pds va permettre au parti de mieux se structurer dans le département et la ville de Thiès. “Massaly a été, pendant longtemps, la source de division du Pds à Thiès. Il veut se réfugier chez Idrissa Seck pour espérer obtenir un poste de maire aux prochaines locales ou chez Macky Sall, pour un poste dans le gouvernement. Et pourtant Me Wade lui a permis d’obtenir une maison. Aujourd’hui, c’est lui qui dit du mal de celui qui lui a permis de devenir millionnaire.
C’est inhumain’’, s’offusque Ndiaga Diaw. Pour ce qui est du livre “Un vieillard qui a trahi ses compagnons’’ que Massaly veut publier, Ndiaga Diaw précise que la réponse à ce bouquin ne va pas tarder. Puisque lui et ses frères de parti vont également mettre sur le marché un livre intitulé “L’enfant maudit de Thiès’’. Celui-ci, dit-il, va permettre de découvrir la face cachée de Mouhamadou Lamine Massaly. “Le jour qu’il va publier son livre, le lendemain, ça sera nous. Nous dirons tout ce qu’on sait sur ce monsieur. Il n’est pas encore trop tard pour se taire. Alors qu’il se taise’’, prévient Ndiaga Diaw, ajoutant que tous les militants peuvent être contre le président Wade, sauf Massaly.
GENERATION FOOT OUVRE LA SUCCESSION DU STADE DE MBOUR
Génération Foota décroché sa qualification en quarts de finale, hier, grâce àson victoire (2-0) sur le Stade de Mbour, en huitièmes de finale
Le tenant du titre, Stade de Mbour, s’est arrêté en huitièmes de finale, cette saison. Les Stadistes ont perdu hier (2-0) sur le terrain de Génération Foot, après les prolongations. Les protégés du coach Youssouph Dabo, auteurs d’un match nul (0-0) au stade Djiby Diagne de Déni Birame Ndao, lors de la 4e journée, ont réédité la même performance pendant les 90 minutes. Ils ont tenu en échec Khadim Diaw et ses camarades, à l’issue du temps réglementaire, avant d’abdiquer pendant les prolongations. Ce succès, le premier en Coupe de la Ligue, donne aux Grenats l’opportunité de garder leur invincibilité depuis le début de la saison. Il leur permet également d’ouvrir la succession du Stade de Mbour, vainqueur de l’édition 2017. Génération Foot se qualifie donc en quarts de finale du trophée dédié aux équipes de première et de deuxième division de la Ligue sénégalaise de football professionnel. Le Ndiambour de Louga s’est aussi qualifié (1-0), grâce aux prolongations, aux dépens de Teungueth Fc.
Les Rufisquois ont perdu à domicile au stade Ngalandou Diouf. L’Us Gorée a sorti le Casa Sport (1-0) dans la première rencontre qui s’est jouée au stade Alassane Djigo de Pikine. La seconde confrontation s’est soldée par la victoire du Jaraaf sur Niary Tally. Les champions du Sénégal en titre ont battu (1-0) les Galactiques.
L’As Pikine, Africa Promo Foot et Mbour Pc ont décroché leurs tickets qualificatifs aux quarts de finale, avant-hier. Le club de la banlieue a battu (3-0) Dakar Sacré-Cœur. Mbour Pc a dominé sur le même score le Cneps Excellence. Africa Promo Foot s’est imposé (1-0) contre Cneps Excellence. Les huitièmes de finale de la Coupe de Ligue seront clôturés ce jeudi avec la dernière rencontre Sonacos de Diourbel-Diambars de Saly
RÉSULTATS
Mardi
AmitiéFc- Africa Promo Foot 0-1
Cneps Excellence- Mbour Pc 0-3
Dakar Sacré-Cœur - Pikine 0-3
Mercredi
Génération Foot - Stade de Mbour 2-0
Teungueth Fc- Ndiambour 0-1
Us Gorée- Casa 1-0
NiaryTally - Jaraaf 0-1
Aujourd’hui
Stade Lamine Guèye
17h Sonacos- Diambars
PAR ABDOU KARIM DIARRA
ON ATTEND DE VOIR
On peine à croire en la sincérité de l’homme puisque les sept années d’exercice ont démontré que Macky clignote à droite pour tourner à gauche
On attendait quelque part que le chef de l’Etat, en tant que gagnant de l’élection présidentielle, décrispe la situation. La libération de huit membres de la coalition de Idy 2019 et la mise sous contrôle judiciaire du Colonel Kébé donnent alors à l’exercice auquel Macky Sall s’est plié ce mardi une autre tonalité. L’exercice du chef de l’Etat nouvellement réélu hier quelques heures après la confirmation de sa victoire définitive par le Conseil constitutionnel par 58,26 % participe à rassurer un peuple qui s’est remarquablement exprimé lors de la présidentielle du 24 février. Mais qui donnait l’impression d’être groggy après la déclaration des résultats provisoires par le président de la Commission nationale de recensement des votes Demba Kandji. La victoire de Macky Sall se voyait comme une surprise tant les leaders de l’opposition comme Idrissa Seck, Sonko, Pr Issa Sall avaient drainé des foules immenses pendant les 21 jours de campagne. Des foules qui indiquaient des projections d’un second tour incontournable. Le réveil a été brutal. Le système fut piégé puisqu’autant les acquis obtenus en 2000, puis en 2007 et en 2012 de tendances claires proclamées par la presse quelques heures après la fermeture des bureaux de vote ont montré que Macky Sall a gagné, mais aussi il a perdu puisque près de 41,74% de Sénégalais ne lui ont pas renouvelé sa confiance. C’est quand très important un tel niveau de rejet surtout qu’il frise presque la moitié de ceux qui se sont rendus aux urnes. Le signal est important. Il est à décrypter dans toute sa rigueur, mais surtout par une approche sincère prenant en compte autant ceux qui ont voté pour que ceux qui ont voté contre. A partir de ce mardi 05 mars, Macky Sall est redevenu le président des Sénégalais. De tous les Sénégalais. Le comprendre ainsi participe à refonder une nouvelle espérance d’un peuple qui fait, quoi que l’on puisse dire, figure d’un leadership sur le continent et dans le monde du difficile exercice démocratique. Le Sénégal était épié. Nous n’avions pas le droit de décevoir ceux qui prenaient notre pays comme une vitrine.
Seulement pendant 7 ans, il faut l’avouer, le régime de Macky Sall s’est illustré dans une remise en cause dangereuse de nos acquis démocratiques qui ne remontent pas à l’indépendance. Ils ont un profond ancrage puisque remontant à notre participation aux Etats généraux de la France de 1789 convoqués par le roi français Louis XVI. Du processus électoral, de la mise en place du parrainage, de la neutralité du ministre de l’Intérieur Aly Ngouille Ndiaye remise en cause, de la liquidation de deux ténors de l’espace politique Karim Wade – dont on reste à apprécier son poids politique mais qui devait représenter le plus grand parti politique de l’opposition le PDS —, et la mise sous silence de l’ex-maire de Dakar Khalifa Sall, des faits qui ont entaché la sincérité de la victoire du président sortant. Et d’ailleurs, aussi bête qu’il soit, il a quand même la manie de dire des vérités crues, Moustapha Cissé Lo a reconnu que si Karim Wade et Khalifa Sall avaient participé à l’élection, son candidat risquait le second tour. Un aveu de taille, mais surtout grave puisqu’il jette un discrédit sur la victoire de son mentor Macky Sall. Bref. Le vin est tiré. Il faut le boire.
Ce mardi, le chef de l’Etat élu s’est adressé à la Nation. Un discours lors duquel il a appelé les forces vives de la Nation au dialogue, des conciliabules auxquels il a aussi invité ses prédécesseurs les ex-présidents Abdoulaye Wade et Abdou Diouf « À mes yeux, il n’y a eu ni vainqueur ni vaincu, à présent que la campagne est terminée, il n’y a plus de camp démarqué par des lignes partisanes, je vois celui du Sénégal.... Je serai le Président de tous les Sénégalais et de tous les Sénégalaises, parce que c’est la charge qui m’incombe », a d’abord dit le Chef de l’État. Macky Sall d’ajouter que la Nation sénégalaise est forte parce que des liens indéfectibles de bon voisinage nous unissent pour former une nation indivisible... Pour conclure, il a lancé cet appel : « je tends la main à toutes et à tous pour engager un dialogue constructif et je ferai des propositions dans ce sens après ma prestation. Je convie à ce dialogue toutes les forces vives de la Nation et auquel mes prédécesseurs Abdou Diouf et Abdoulaye Wade pourront apporter leur contribution ». Alors, on ne saurait faire sacrilège en remettant en cause la parole du 1er des Sénégalais. Mais on peine à croire à la bonne volonté et à la sincérité de l’homme puisque les 7 années d’exercice ont démontré que Macky Sall clignote à droite pour tourner à gauche. Le temps est le meilleur des juges. On attend pour voir.
LA BCEAO PRONE LE RESPECT DE LA NORME COMMUNAUTAIRE
Concernant le déficit budgétaire, la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Bceao) encourage les pays de l’Umoa à poursuivre les efforts dans la mise en œuvre des mesures visant le respect de la norme communautaire qui est de 3,0 %
Concernant le déficit budgétaire, la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Bceao) encourage les pays de l’Umoa à poursuivre les efforts dans la mise en œuvre des mesures visant le respect de la norme communautaire qui est de 3,0 % à l'horizon 2019.
Le Comité de politique monétaire (Cpm) de la Banque centrale des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Bceao) a tenu hier, à Dakar, sa première réunion ordinaire au titre de l'année 2019.Ila passé en revue les principales évolutions qui ont marqué la conjoncture économique internationale. Mais également celle régionale au cours de la période récente, ainsi que les facteurs de risque pouvant peser sur les perspectives à moyen terme d'inflation et de croissance économique de l'Union monétaire ouest-africaine (Umoa). “Au titre des finances publiques, le comité a relevé une atténuation du déficit budgétaire, base engagements, dons compris,estiméen2018à3,9%duproduit intérieur brut (Pib), selon les données des services officiels, contre 4,3 % en 2017. Dans ces conditions, le Cpm encourage les Etats à poursuivre les efforts dans la mise en œuvre des mesures visant le respect de la norme communautaire de 3,0 % à l'horizon 2019’’, lit-on dans le communiqué de l’institution financière publié à l’issue de la réunion.
En dehors des finances publiques, la note informe que la situation monétaire de l'Union à fin décembre 2018 a été marquée par une hausse de la masse monétaire de 12,4 %, en glissement annuel. Une augmentation soutenue par le net accroissement de 28,8 % des actifs extérieurs nets, ainsi que par la progression de 9,4 % des créances intérieures. “Sur le marché monétaire, le taux d'intérêt moyen trimestriel s'est situé à 3,45%contre 2,50%le trimestre précédent. Un an auparavant, ce taux se situait à 4,10 %’’, souligne la même source. Au fait, cette hausse a été également notée au quatrième trimestre 2018 sur les prix en rythme annuel. “Le taux d'inflation s'est situé à 0,9 %, après 0,4 % un trimestre plus tôt, en liaison essentiellement avec l'augmentation des prix dans les secteurs ‘Transport’, ‘Logement’ et ‘Communication’. A l'horizon de 24 mois, le taux d'inflation, en glissement annuel, est projeté à 1,5%,en ligne avec l'objectif de stabilité des prix poursuivi par la Banque centrale’’, renseigne le document. Sur la base de ces analyses, le Comité de politique monétaire a décidé de “maintenir inchangé’’ le taux d'intérêt minimum de soumission aux opérations d'appels d'offres d'injection de liquidité à 2,50 % et le taux d'intérêt du guichet de prêt marginal à 4,50 %. Le coefficient de réserves obligatoires applicable aux banques de l'Union demeure fixé à 3,0 %.
La croissance économique de l’Union attendue à 6,8 % en 2019
Le Comité de politique monétaire de la Bceao a aussi relevé, lors de sa réunion, que sur le plan international, l'activité économique mondiale a poursuivi, au quatrième trimestre 2018, sa progression à un rythme modéré. Ceci dans un contexte “d'aggravation des incertitudes ’’liées principalement aux tensions commerciales et géopolitiques. “Selon les dernières données publiées en janvier 2019parleFondsmonétaireinternational, la croissance de l'économie mondiale est estimée à 3,7 % en 2018 et se situerait à 3,5 % en 2019’’, rappelle le comité. En effet, sur les marchés internationaux des principales matières premières, les cours des produits exportés par les pays de l'Union se sont repliés, à l'exception de ceux du café et de l'or. Les baisses les plus importantes ont concerné le coton (-6,4 %) et le cacao (-3,1 %). “Au niveau interne, la croissance de l'activité économique est demeurée robusteauquatrièmetrimestre2018,en se situant à 6,8 %,en glissement annuel, après 6,6 % un trimestre plus tôt. La demande intérieure reste le principal moteur de la croissance dans l'Union. Pour l'ensemble de l'année 2019, la croissance économique est attendue à 6,8%aprèsunniveaude6,6%en2018’’, prévient la Banque centrale.
LES SYNDICALISTES DENONCENT UN DETOURNEMENT DE 49 MILLIONS
Le feu couve à l’hôpital Youssou Mbargane Diop de Rufisque. Pour cause, travailleurs et administration sont dans un bras de fer sur le point de plomber le bon fonctionnement de la structure sanitaire.
PAPE MOUSSA GUÈYE (RUFISQUE) |
Publication 07/03/2019
La tension est montée d’un cran, à l’hôpital Youssou Mbargane Diop de Rufisque. Après une période d’accalmie, le bras de fer entre travailleurs et administration reprend de plus belle. L’agent comptable est accusé d’avoir détourné la somme de 49millions de francs Cfa.
Le feu couve à l’hôpital Youssou Mbargane Diop de Rufisque. Pour cause, travailleurs et administration sont dans un bras de fer sur le point de plomber le bon fonctionnement de la structure sanitaire. Le syndicat maison qui, las de la situation, a tenu hier une assemblée générale dans l’enceinte de l’hôpital. Il accuse le docteur Fatou Thiam, agent comptable, de gestion nébuleuse. Ce qui, de l’avis d’Amadou Diop, le président de l’Intersyndicale, n’est pas sans conséquence. En effet, précise-t-il, “le labo ne marche pas, il y a un manque de réactifs. Les fils sont en rupture au niveau de la radiologie. Les prestataires Orl radiologues sont partis, parce qu’ils n’ont pas été payés. L’hôpital fonctionne actuellement au ralenti’’. Le syndicaliste décrit le comportement de l’agent comptable. “Depuis l’arrivée du nouveau directeur, l’agent comptable particulier a filtré son numéro de téléphone. Elle refuse même l’accès de son bureau au directeur. Cela a des conséquences sur le bon fonctionnement de l’hôpital, puisque nous travaillons sur des vies humaines’’
L’audit de la structure sanitaire exigé
Face à ce que les travailleurs appellent une gestion nébuleuse de l’hôpital Youssou Mbargane Diop de Rufisque, les travailleurs ont donné des détails. “Elle avait prétendu avoir reconstitué l’argent donné gracieusement à l’hôpital par la première dame, pour un réaménagement budgétaire. Mais on a constaté que les 20 millions de francs ne se trouvent plus dans les comptes de l’hôpital, ni dans le budget’’, soutient Amadou Diop. Pis, poursuit-il, “au niveau du budget, il y a eu des écritures en faux pour avoir déclaré que les 20 millions proviennent des collectivités locales, alors que tout le monde sait que c’est Marème Faye Sall qui a octroyé ces 20 millions de francs Cfa, le mois de novembre dernier, en guise d’appui à l’hôpital’’. Cette manne financière n’est pas dans le budget, malgré les directives du conseil d’administration’’.
En plus de cela, renseigne-t-il, “les paiements qu’elle a faits aux fournisseurs ne sont pas autorisés par le directeur qui est l’ordonnateur des dépenses’’. Par conséquent, les blouses blanches exigent un audit interne de la structure sanitaire. “Nous demandons un audit interne pour que toute la lumière soit faite sur cette manne financière’’, ont-ils crié en chœur. D’ailleurs, renseigne le président de l’Intersyndicale, “à quatre jours de la passation de service, alors que les comptes étaient arrêtés, elle a dépensé 49 millions de francs Cfa sans autorisation, alors que l’ancien directeur avait opposé son refus’’. Ce qui le pousse à réclamer le départ de l’agent comptable. De son côté, le docteur Fatou Thiam, que nous avons contacté, ne s’est pas épanchée sur l’affaire. Tout en reconnaissant la tension qui prévaut au sein de la structure sanitaire, elle a fait noter : “Mon statut ne me permet pas de divulguer des informations.’’
« LES RESULTATS DU SCRUTIN PRESIDENTIEL INQUIETENT »
Mamadou Ndoye parle. Aphone depuis plusieurs mois, l’ex-secrétaire général de la Ligue démocratique sort de sa réserve. Et c’est pour dénoncer une victoire “légalisée’’ du président de la République Macky Sall
Mamadou Ndoye parle. Aphone depuis plusieurs mois, l’ex-secrétaire général de la Ligue démocratique sort de sa réserve. Et c’est pour dénoncer une victoire “légalisée’’ du président de la République Macky Sall qui, à l’en croire, a préfabriqué les résultats issus des urnes. Mais aussi pour manifester à la face du monde ses inquiétudes à la lecture de ces résultats sortis. Selon “Mendoza’’, au-delà des considérations politiques, les vieilles solidarités ethniques et confrériques convoquées dans le champ politique constituent une bombe terrible pour la société sénégalaise, lorsqu’on les manipule. Entretien.
Le président Macky Sall a été déclaré vainqueur de l’élection présidentielle avec 58,26 % des suffrages, loin devant Idrissa Seck 20,50 %, Ousmane Sonko 15,67 %, Issa Sall 4,07 % et Madické Niang 1,48 %. Quelle analyse faites-vous de ces résultats ?
Pour lire ces résultats, il faut les placer dans un contexte beaucoup plus large que le contexte des élections en tant que tel. Nous avons, depuis longtemps, observé sur la scène politique une préparation systématique du renouvellement du mandat de Macky Sall. Or, ce renouvellement, du point de vue du pouvoir, ne pouvait être acquis qu’avec un passage au premier tour. Parce qu’aller en second tour était trop risqué pour le pouvoir en place. Depuis la discussion sur le fichier électoral, ensuite sur la loi électorale, sur le parrainage et sur l’application du parrainage, il y a eu plusieurs étapes de préparation des résultats actuels. Ces résultats sont donc l’aboutissement de ce que j’appelle le passage en force de Macky Sall qui a connu plusieurs étapes. Il a fabriqué son propre fichier. Tout le monde se souvient du débat, si le fichier actuel était un bon ou non. Macky Sall a décidé que ce n’était pas un bon fichier, parce qu’il y avait un stock mort que personne n’a observé par la suite. Mais il a pu avoir un fichier dont il est le seul, parmi les candidats, à avoir connaissance. Et, pratiquement, jusqu’au bout, ils ont refusé de partager ce fichier électoral. Deuxième étape du forcing, c’est le Code électoral. Il a fait des modifications sur le Code électoral qui lui ont permis d’éliminer des candidats. En ce qui concerne la candidature de Karim Wade, c’est des manipulations qui ont permis de l’éliminer. C’est également dans cette manipulation qu’il y a eu ce qu’on a appelait le système de parrainage. Un système que personne ne pouvait contrôler. Parce que si le fichier, qui sert de référence pour le contrôle, n’est pas connu des candidats, le candidat, lui, s’arrête à la carte électorale que lui présente son parrain. Il ne peut pas aller plus loin pour contrôler si la carte électorale qu’on lui présente est bonne ou mauvaise. Sur cette base, il établit son parrainage, mais ce n’est pas sur cette base que son parrainage va être apprécié, mais sur la base du fichier que seul le pouvoir connait. L’application du parrainage, en tant que tel, a montré que le Conseil constitutionnel n’avait aucune maitrise pour pouvoir apprécier un parrainage. Le fichier dont il dispose, on le lui a donné. Les ordinateurs pour le contrôle, on les lui a donnés, de même que les techniciens qui étaient chargés d’appliquer pour voir ce qui marchait et ce qui ne l’était pas. Par conséquent, le Conseil constitutionnel n’avait aucune maitrise sur le contrôle des parrainages. Vous-mêmes vous fabriquez un système de parrainage où le premier est avantagé et dire tout de suite, moi je suis le premier à déposer. Donc, tout était faussé.
Ensuite, on a eu les transferts d’électeurs. Il y a eu une organisation qui, avant même les élections, avait vérifié ces transferts pour montrer qu’il y a des électeurs, notamment dans le monde rural, qui étaient transférés à 50 km. Comment, à 50 km, le gars peut aller voter ?
Toutes ces manipulations ont abouti à de tels résultats.
Donc, selon vous, on a des résultats préfabriqués ?
Ah mais non, depuis très longtemps ! Sans compter le fait que même, au dernier moment, ils ont dû, eux-mêmes, quand ils ont certainement, vers le milieu du vote, vu un peu les tendances, essayé encore de fabriquer de nouveaux textes pour permettre à de nouveaux électeurs d’aller voter.
Pensez-vous que l’opposition a porté le combat qu’il fallait pour sécuriser et le vote et le processus électoral pour contrer tout ce que vous venez de dénoncer ?
Précisément, c’est l’un des problèmes que nous avons dans ce pays. Parce qu’il n’y a pas que le problème du pouvoir, il y a aussi le problème de l’opposition. Toutes ces étapes dont on a parlé, l’opposition n’a pas pu créer un rapport de force, parce qu’il s’agissait d’un rapport de force capable d’arrêter le pouvoir dans ses dérives.
Selon vous, pourquoi l’opposition n’a pas été capable de ça ?
Pour une raison simple. Dans l’opposition, chaque jour, il peut naitre un candidat qui se dit, moi j’ai un destin national, et au lieu donc de mutualiser leurs forces pour pouvoir créer un rapport favorable, c’est absolument le contraire qui se produit, c’est-à-dire on atomise les forces de l’opposition, chacun se fabrique un territoire individuel et la somme de ces territoires individuels ne constitue pas une force, parce qu’il n’y a pas de synergie. Nous avons essayé d’aider un peu pour dépasser cette situation de l’opposition ; c’était dans le cadre de l’initiative “Fippu’’. Nous sommes allés voir tous les candidats pour leur dire : écoutez, vous ne pouvez pas aller à la bataille comme cela. Si vous voulez aller à la bataille, il faut qu’il y ait un minimum de regroupements de l’opposition. Et pour nous, compte tenu de notre orientation politique, nous avions dit que toutes les forces patriotiques et progressistes, au moins, devraient se retrouver dans un même camp. Les autres qui ne le sont pas, peuvent aller dans leurs propres camps. On a été voir tous les candidats qu’on considérait comme étant des patriotes pour leur demander de mettre ensemble leurs forces, ensuite de se mettre d’accord sur une procédure interne consensuelle pour choisir un candidat. Si on choisit un candidat, le reste suit. Malheureusement, cette initiative n’a pas abouti.
Pensez-vous que les résultats publiés reflètent le rapport de force véritable qu’il devait y avoir entre le pouvoir et son opposition ?
Ces résultats, il faut juste les mesurer à l’aune des élections législatives de 2017. J’avais toujours dit et répété que, strictement parlant, si une élection régulière présidentielle se passe, Macky est nécessairement au second tour. Pour une raison très simple, c’est que pendant les élections législatives, Bby a pratiquement mobilisé tout son potentiel possible et affaibli au maximum l’opposition, notamment à Dakar, à Thiès et à Touba. A Dakar, ils ont fait même ce qui est exceptionnel au Sénégal, aller convoquer un ministre des Finances pour lui dire : va gagner les élections, alors que les ministres des Finances ont toujours été préservés de la politique, au Sénégal. Mais après avoir fait tout ça, ils n’ont pas eu 50 %, ils ont eu 49 % et quelques. Cela veut dire que le potentiel électoral que Macky Sall était capable de mobiliser s’arrêtait à ça. Aujourd’hui que ça passe de 49 à 58 %, cela montre qu’il y a ce qui a été fait pour arriver entre 2017 et 2019 à un tel résultat.
Est-ce que les élections sont de même nature ?
La nature des élections favorisait l’inverse. Parce les élections des députés, au niveau local, chaque personnalité se bat pour sa propre survie politique. Dès lors que c’est sa propre survie qui est en jeu, on fait tout pour gagner. A la présidentielle, c’est la survie du président de la République qui est en jeu. Ce n’est pas celle de chaque personnalité locale. Donc, en réalité, on devrait faire plus au niveau des législatives qu’au niveau de la présidentielle.
Dans cette élection, on a vu l’ancien président de la République, Abdoulaye Wade, observer une neutralité, à la grande surprise des populations. Quelle appréciation faites-vous de sa posture ?
Je crois qu’Abdoulaye Wade est conséquent avec lui-même. Les seuls gens qui peuvent être surpris avec Abdoulaye Wade, ce sont ceux qui attendent de lui un comportement qui soit à la mesure de leurs propres attentes. Alors qu’Abdoulaye Wade a été toujours conséquent avec lui-même. Il agit en fonction de ce qu’il considère comme étant ses intérêts. Ses intérêts en ce qui concerne l’élection présidentielle, il les a exprimés depuis très longtemps : c’est Karim ou personne d’autre. Par conséquent, Abdoulaye Wade n’était ni pour l’opposition ni pour Macky Sall, il était pour Karim.
Est-ce que sa posture n’a plus aidé à baliser le chemin à Macky Sall qu’à favoriser le triomphe de l’opposition ?
Non ! Sa posture pour Karim ne favorisait personne. Ce qui a favorisé Macky Sall, c’est le fait qu’il n’ait pas appelé à voter pour l’opposition. Si tous ceux qui écoutent Abdoulaye Wade s’étaient massivement mobilisés pour soutenir l’opposition, peut être que ça aurait fait la balance. Mais il ne l’a pas fait. De ce point de vue, oui, son attitude a été favorable à Macky.
Ne pensez-vous pas que Wade a plus intérêt à ce que Macky Sall rempile qu’à voir quelqu’un d’autre accéder au pouvoir ?
Les gens font ce calcul, moi je ne sais pas pour quelle raison, mais ce que je dis, c’est qu’objectivement, son attitude a été favorable à Macky Sall.
L’opposition dénonce un hold-up électoral, mais se garde tout de même d’introduire un recours auprès du juge des élections. Comment voyez-vous cette attitude ?
L’opposition a parfaitement raison. De manière unanime, et ça il faut d’abord le noter, lorsque tous les candidats de l’opposition, sans aucune exception, rejettent les résultats de l’élection, ça a une signification. Parce que dans ce cadre-là, on a eu plusieurs étapes où l’opposition, y compris certains candidats actuels, avaient pris des attitudes qu’on appelait des attitudes de sagesse par rapport au pouvoir, notamment quand le pouvoir a appelé au dialogue. Cette fois-ci, c’est unanime, tous les candidats de l’opposition ont rejeté les résultats des élections. Mais, en même temps, ils ont décidé de ne pas déposer de recours. Pourquoi ? Parce que du point de vue de la lutte électorale et de la mobilisation de la population sénégalaise, ils ont voulu lutter jusqu’au bout. Ce qui restait, c’est maintenant la confiance aux institutions qui étaient chargées de valider les résultats des élections. Quel est le Sénégalais sérieux qui accorde un minimum de crédit à de telles institutions ?
Mais est-ce que ce n’est pas une manière de reconnaitre indirectement les résultats ?
Pas du tout. Ça n’a absolument rien à voir. Les gens se sont battus dans les batailles électorales pour mobiliser les populations et leur expliquer ce qui se passe, déroulé leur projet de société et leur programme politique. Ça, ils devaient le faire. Après, le pouvoir a publié les résultats. Si vous voulez faire un recours, c’est que vous faites confiance à ces institutions de recours. Moi, en tout cas, je ne fais aucune confiance à ces institutions de recours, pas par présomption, mais par expérience. Combien de fois l’opposition a déposé des recours au niveau du Conseil constitutionnel qui s’est déclaré incompétent, alors que toutes les demandes du pouvoir ont été validées par cette même juridiction ? Donc, c’est clair que, par expérience, il n’y a rien à attendre de cette Cour constitutionnelle. Il n’y a aucune crédibilité à accorder à cette juridiction.
Rien que pour le symbole, est-ce qu’il ne fallait pas introduire un recours ?
Non, pas du tout pour le symbole. Justement, qu’est-ce qui gêne aujourd’hui le pouvoir et ses affidés, le fait d’avoir déposé ou le fait de n’avoir pas déposé de recours ? Aujourd’hui, ils ont des problèmes parce que les gens n’ont pas déposé de recours et dans la lutte politique, c’était important de le faire.
Indépendamment de tout ce que vous dénoncez, est-ce que l’opposition n’a pas failli dans son organisation et dans la mobilisation de l’électorat ?
On ne peut pas dire que l’opposition a failli. En réalité, sauf le Fouta et le Sine-Saloum, Macky n’a de majorité nulle part. Je parle de majorité absolue, c’est-à-dire plus de 50 % par rapport à l’opposition. Contrairement à ce qu’il déclare en disant qu’il est élu dans 40 départements, il n’a pas la majorité dans 40 départements. C’est totalement faux. Il a la majorité simple, mais pas la majorité absolue. C’est cela la réalité du pays et cette réalité doit inquiéter tout un chacun, y compris euxmêmes d’abord. Ceux qui sont intelligents parmi eux commencent à dire : lisons le verdict populaire pour savoir quel message nous donne le peuple sénégalais. Mais moi, du point de vue de l’analyse politique, je suis plutôt inquiet de ces résultats. Ils montrent d’abord qu’on a convoqué les vieilles solidarités mécaniques dans le champ politique.
Qu’entendez-vous par “solidarités mécaniques’’ ?
Ce sont des solidarités ethniques au Sénégal. Elles ont été convoquées sur le champ de la citoyenneté. Elles viennent chasser la citoyenneté, les projets politiques et les coefficients individuels pour y ramener des réflexes identitaires qui sont de nature à fracturer et la société et la nation sénégalaise. Ça, c’est le plus grave dans ces élections. On a convoqué aussi des solidarités religieuses. Autant on peut parler de solidarité régionale qui, à la limite, sont des solidarités ethniques, autant on a convoqué des solidarités religieuses qui, à la limite, sont des solidarités confrériques. Les deux, ensemble, constituent une bombe terrible pour la société sénégalaise, lorsqu’on les manipule. Or, on est en train de les instrumentaliser au service d’ambitions politiques personnelles et on sait ce que ça a produit dans d’autres pays. Cela expose aujourd’hui le Sénégal à des dangers réels, dès lors que c’est des dérives extrêmement dangereuses. Parce que, si on entre dans ça, la société se fracture. Si les luttes politiques deviennent des luttes ethniques ou des luttes religieuses, on entre dans le cercle vicieux des conflits qu’on entend ailleurs en Afrique. Le Sénégal entre dans ce cycle et quand on entre une fois dans ce cycle, on ne sait pas quand est-ce qu’on va en sortir. On voit aujourd’hui comment, dans certains pays, les communautés sont en train de se déchirer. Des violences intercommunautaires extrêmement graves qui sont en train de se produire. Ça, c’est plus grave que le reste, parce que ça vient du tréfonds des sociétés traditionnelles et après personne ne maitrise plus quelque chose. De ce point de vue, les résultats m’inquiètent.
On a vu qu’Idrissa Seck avait une grande coalition, mais qui n’a pu récolter que 20,50 % de l’électorat. Qu’est-ce qui, selon vous, peut expliquer cette contre-performance ?
Je le dis souvent, au Sénégal, les appareils ne font pas les élections. Vous avez beau regrouper beaucoup d’appareils - Macky Sall, c’est le champion aujourd’hui du regroupement des appareils ; il a dix ou vingt fois plus d’appareils qu’Idrissa Seck. Ce sont des cadres qui sont là et où il y a des militants et des sympathisants. Or, les militants sont très peu nombreux. Les sympathisants et les électeurs sont le plus grand nombre, mais ils ne sont pas contrôlés par l’appareil. Ça, c’est la réalité politique au Sénégal. On peut, dans une circonstance donnée, les mobiliser pour soi, mais les mobiliser pour autrui est loin d’être évident, parce que ces gens-là, ils ne te doivent rien.
Globalement, comment appréciez vous l’organisation du scrutin présidentiel du dimanche 24 février par rapport aux législatives de 2017 ?
La désorganisation organisée qu’on a connue en 2017 ne s’est pas reflétée en 2019. Il faut dire qu’en 2017, il y avait une sorte d’impréparation par rapport à ce qu’ils avaient prévu. Cette fois-ci, il n’y a pas eu d’impréparation. Ce qu’ils ont prévu, ils l’ont déroulé de la meilleure manière possible pour eux. De ce point de vue, l’organisation des élections, les observateurs extérieurs n’y ont vu que du feu. Eux-mêmes, ils l’ont presque souligné en disant qu’il ne suffit pas de voir ce qui s’est passé le jour du scrutin, il faut savoir tout le processus qui a conduit à ça. Ils ont raison, de ce point de vue.
Il est agité l’idée d’une dissolution de l’Assemblée nationale et d’un couplage des locales de décembre prochain avec les législatives qui doivent normalement se tenir en 2022. Qu’en pensez-vous ?
Il y a d’abord l’apparition de l’idée et l’idée elle-même. Du point de vue de l’apparition, ce que j’observe, c’est que les néo-transhumants viennent toujours avec des idées comme ça. Quand Djibo Ka venait de rejoindre la coalition Bby, c’était à peu près une idée identique. C’est la même chose qu’on est en train de revivre, c’est-à-dire aller au-devant en disant publiquement ce qu’on veut que le président entende. Certainement, Macky Sall, qui a de ce point de vue commis une grave erreur de calendrier électoral en allongeant son mandat, se trouve depuis, dans le même problème, c’est-à-dire faire coïncider le mandat présidentiel et le mandat législatif. Il a aujourd’hui ce problème.
Est-ce que à ce niveau, l’idée n’est pas bonne ?
Oui, mais pourquoi ce problème s’est posé ? Il ne s’était pas posé jusqu’ici. C’est ça le débat. Quand tu dis je veux rectifier, il faut dire pourquoi tu veux rectifier et pourquoi tu veux le faire. C’est Macky Sall qui a créé ce problème. De mon point de vue, c’est son problème à lui, mais non celui du peuple sénégalais. Parce qu’à chaque fois, son pouvoir va rencontrer ce problème qu’il a créé.
Est-ce que ce n’est pas le moment de rectifier pour éviter au pays d’être en perpétuelle campagne électorale ?
C’est le moment pour lui de rectifier et pas le moment pour moi. Il faut, en politique, que nous puissions assumer nos actes. Macky Sall, on lui avait toujours dit de ne pas prolonger son mandat. Il a décidé contre tout le monde de le faire. Il a créé ce problème, il n’a qu’à trouver la solution. Il ne doit pas demander aux gens de le faire.
Au vu des résultats, comment entrevoyez-vous les perspectives au niveau de l’opposition sénégalaise ?
Il y a deux choses. Dans l’immédiat, les deux grands vainqueurs de cette élection, c’est Idrissa Seck et Ousmane Sonko. Idrissa Seck, aujourd’hui, connait une renaissance, parce qu’il était presque mort politiquement. Aujourd’hui, il connait une renaissance et, de ce point de vue, il est un vainqueur de l’élection présidentielle. Ousmane Sonko qui, aux élections législatives, est passé par le plus fort reste et qui se retrouve aujourd’hui non seulement comme troisième, mais encore avec son score de plus de 15 %, est aussi un vainqueur de l’élection présidentielle. Pour moi, politiquement, ce sont les deux vainqueurs de l’élection présidentielle. Macky Sall a une victoire légalisée, mais celle-ci va plus peser sur lui que lui faciliter l’exercice de son mandat. Déjà, on le sent à travers le malaise qui a marqué ce scrutin. Il y a un tel malaise que lui-même est en train de fêter sa victoire par des arrestations et des procès. A l’heure où on parle (Ndlr : l’entretien est réalisé mardi), il y a un procès qui se déroule, pour les gens qui ont été arrêtés. Voilà comment il est en train de fêter son mandat. Quand on fête sa victoire de cette façon, c’est une catastrophe politique. Maintenant, du point de vue des perspectives, il faut prendre ce qui est essentiel pour le pays. Nous avons une démocratie verrouillée et dévoyée. La toute première mission de toutes les forces patriotiques et démocratiques, c’est comment sortir de cette démocratie verrouillée et dévoyée. Il faut prendre les entrées principales. La première entrée principale, c’est les pouvoirs exorbitants du président de la République. Nous sommes dans un pays où le président de la République règle tous les problèmes du pays, les petits, les moyens comme les grands problèmes. Nous sommes dans un système politique où 40 % du Pib est entre les mains du président de la République. Non seulement il a les plus de 25 % qui sont ramassés comme imposition sur le Pib, mais il en décide comme il veut. Il décide de l’allocation et de l’utilisation des ressources publiques comme il veut. En plus de cela, il y a toute la corruption et les entreprises privées, ce que ça rapporte, tout ça entre les mains d’un seul homme. Le pouvoir Judiciaire est entre les mains du président de la République, du point de vue institutionnel, mais aussi des privilèges qu’on peut leur accorder pour pouvoir les domestiquer. L’Assemblée nationale, je n’en parle même pas, parce que comme tout le monde a pu l’observer, la liste des députés de la majorité présidentielle, c’est le président lui-même qui la confectionne. C’est-à-dire c’est lui qui décide de qui sera député ou pas. Voilà la situation de notre pays. La grande entrée, ce sera donc ça. La deuxième entrée, si le pouvoir appartient au peuple, il faut remettre la citoyenneté en place. La citoyenneté, ça signifie que le pouvoir politique appartient avant tout au citoyen. Cela peut se concrétiser de deux manières. Dans une démocratie représentative, ça signifie que c’est le peuple qui choisit librement ses dirigeants. Pour que le peuple puisse choisir librement ses dirigeants, ce qui se passe au Sénégal ne peut pas se passer. Lorsque c’est un compétiteur qui décide des règles de la compétition, qui décide qui doit compétir et qui ne doit pas compétir, qui décide de l’organisation de la compétition, qui décide des résultats qui sont proclamés, il n’y a pas de compétition. Ça, c’est le deuxième grand problème qu’on doit régler. Il faut une autorité indépendante chargée de la compétition électorale pour que le citoyen puisse exprimer librement son choix. C’est cela la démocratie représentative. Nous avons ces deux grands problèmes à régler.
Macky Sall est réélu. Comment entrevoyez-vous son second mandat et, après lui, que va-t-il se passer, selon vous ?
Le mandat est mal parti. Je ne sais pas ce qu’il va faire et ce qu’il va prendre comme initiative pour prendre un autre départ que celui-là. Parce que les hommes politiques qui sont visionnaires sont capables, dans des situations comme ça, de prendre de grandes initiatives et de pouvoir remettre les choses à leur place. Je ne sais pas si Macky est capable de le faire. La deuxième des choses, c’est que le problème principal qui se passe au Sénégal, c’est que les forces de progrès et les forces démocratiques, tant qu’elles ne sont pas capables de pouvoir mutualiser les énergies, afin de créer un rapport de force favorable, nous allons tourner en rond. Parce qu’il n’y aura pas de rupture. Nous avons un système qui marche comme il est en train de marcher avec un président omnipotent, pas de justice, pas d’Assemblée nationale, une gouvernance catastrophique qui enrichit les amis et les parents. Ce système là, pour qu’on en sorte, il faut une rupture. Une simple alternance ne suffit pas. On a vu l’alternance avec Wade et l’alternance avec Macky. Il va falloir une rupture que seules les forces démocratiques et patriotiques sont capables d’accomplir. Or, aujourd’hui, leur faiblesse ne leur permet pas d’assumer un tel rôle. Si elles n’arrivent pas à jouer leur rôle, nous aurons encore une alternance et quelle que soit la forme, nous continuerons encore dans notre système. C’est comme ça que ça va se passer. La grande question, aujourd’hui, c’est donc cette rupture.
PAR SERIGNE SALIOU GUÈYE
WADE JOUE ET PERD
Ses menaces d’empêcher la tenue du scrutin n’était en réalité qu’une tactique de chloroformisation de l’opinion - En dépit des dénégations des deux entourages de Wade et de Macky, des négociations en catimini ont eu lieu
Sans surprise, la Commission na- tionale de recensement des votes présidée par le juge Demba Kandj — confirmée en cela à de légères nuances près par le Conseil constitu- tionnel — a déclaré Macky Sall vain- queur de l’élection présidentielle du 24 février dernier. Le candidat de Bennoo Bokk Yaakaar réalise un score certes confortable de 58,26 %, mais qui a un goût de défaite. Eton- namment, en effet, du côté de la mouvance présidentielle, on note cette absence de liesse jubilatoire qui accompagne les lendemains de victoire. Cette atmosphère mélancolique nous renvoie à l’élection prési- dentielle de 2007 lorsque, devant Idrissa Seck, Ousmane Tanor Dieng et Moustapha Niasse, la victoire à 55 % du président Abdoulaye Wade au premier tour avait plongé le pays dans une torpeur surprenante. Un Abdoulaye Wade qui s’est singula- risé lors de la présidentielle du 24 fé- vrier dernier par sa posture neutre. En définitive, le Pape du Sopi a joué et a perdu.
Tous les Sénégalais avaient cru que lorsque Gorgui foulait le tarmac de l’Aéroport international Blaise Diagne (AIBD) le 7 février dernier, il venait participer à l’alternance qui pointait à l’horizon du 24 février 2019. Mais hélas, trois fois hélas ! Abdoulaye Wade, après avoir appelé les Sénégalais à se comporter en pyromanes ou vandales dans les bureaux de vote, avait fini par enjoindre ses militants de ne pas se rendre aux urnes parce que les résultats étaient déjà préfabriqués par Macky Sall. Clairement, l’ancien président de la République était dans la dynamique de saboter l’élection à laquelle n’était pas autorisé à participer son fils chéri Karim Wade. Hélas pour lui, le taux de participation qui a dépassé les 66 % montre en réalité que son appel au boycott n’a pas été suivi par nos compatriotes. D’ailleurs, certaines fédéra- tions du PDS avaient décidé de soutenir Idrissa Seck ou, dans une moindre mesure, Ousmane Sonko.
D’autres encore avaient préféré appe- ler à voter pour Madické Niang. A côté de cette élection pour laquelle son fils Karim avait été disqualifié conjointement par le ministre de l’Intérieur et le Conseil constitutionnel, Wade jouait la sienne. Celle ayant consisté à appeler à l’abstention. Laquelle, tout le monde le savait, était favorable au président sortant. Un tel appel dans un contexte où le non- choix était un choix était en effet, incontestablement, l’expression d’un soutien larvé au président Macky Sall.
Une neutralité très partiale
En politique, l’attitude de neutralité entre différents candidats est en réa- lité l’expression d’un soutien déguisé au candidat sortant qui bénéficie d’une certaine longueur d’avance. C’est un gentlemen’s agreement conclu tacitement ou confidentielle- ment avec le président sortant. L’appel au boycott de Wade a poussé plusieurs de ses militants à jeter leur dévolu sur Macky parce que, dans leurs calculs, permettre au président sortant de faire seulement cinq ans est plus bénéfique pour eux que d’élire un Idrissa Seck ou un Ousmane Sonko pouvant effectuer deux mandats de cinq ans. Macky Sall élu, pour les Karimistes, 2024 est à leur portée. Abdoulaye Wade est sur la même longueur d’onde que certains partisans de son fils favorables à la réélection de son tombeur de 2012. No- nobstant toutes les conférences publiques organisées pour vitrifier Macky Sall qu’il a traité de « voleur », de « corrompu », de « détourneur de deniers publics » et autres accusations infamantes, Abdoulaye Wade n’est pas en bisbilles avec lui. Il a montré à travers l’élection présidentielle, où il a refusé de soutenir publiquement un candidat en compétition avec le candidat de Bennoo, que seul son fils compte pour lui. Par machiavélisme, il a voulu même s’acoquiner publiquement avec Ousmane Sonko aux fins de le délester de plusieurs de ses partisans qui croient en l’anti-sys- tème que théorise et développe le leader des Patriotes. Wade n’aime point Ousmane Sonko même s’il fait croire urbi et orbi qu’il a de l’affection pour lui. A la moindre occasion, il n’hésitera pas à exécuter politique- ment ce nouvel empêcheur à Karim Wade de décoller. En réalité, le jeune leader de Pastef constitue au- jourd’hui le principal obstacle à l’as- cension politique du capitaine invisible Karim Wade dont le navire- fantôme (le PDS) tangue dans une mer politique houleuse qui risque de le couler à tout moment.
Ses menaces d’empêcher la tenue du vote le jour du scrutin n’était en réalité qu’une tactique de chlorofor- misation de l’opinion. En dépit des dénégations des deux entourages de
Wade et de Macky, des négociations en catimini ont eu lieu. Surtout quoi ont-elles porté ? Aucun mystère ! Une chose est évidente : en sus de l’apparente neutralité de Wade et sa bataille, les tractations portaient sur le devenir politique de Karim Wade dont le sort se trouve entre les mains de celui qui l’a embastillé, gracié et exilé. La seule chose qui importe pour le pontife libéral, c’est l’avenir politique de son fils. Jusqu’à maintenant, Abdoulaye Wade cultive et entretient son image de mythe politique. L’infatigable opposant, bien que vieillissant et malade, n’a jamais cessé de consi- dérer qu’ils sont les seuls, lui et son fils déporté à Doha, à être légitimes pour diriger le Sénégal.
Une icône de la résistance contre l’oppression mackyste
Bien que défait en 2012, il était devenu une icône de la résistance contre l’oppression mackyste et l’in- carnation de l’espoir d’une alternance politique en 2019. On se rappelle qu’en 2017, il a fallu qu’Abdoulaye Wade rentre au Sénégal et organise une randonnée informelle pour exiger la fin de la rétention des cartes d’électeurs pour que l’Etat paniquât et procédât à l’installation de commissions de distribution.
Sa récente venue au Sénégal, dans un contexte où l’opposition avait montré sa faiblesse pour lutter contre Macky Sall, avait redonné de l’espoir aux Sénégalais s’opposant au régime actuel. Mais l’espoir a vite viré au dés- enchantement puisque l’appel de Wade au saccage des bureaux de vote, à l’incinération des bulletins de vote et PV afférents n’était pas une solution pour mettre fin au règne du président sortant. Et en sus, il allait à contre-courant de la conviction de nombreux Sénégalais qui croient aux vertus « alternancielles » du vote. Aujourd’hui, comme les pleutres politiciens Aïda Mbodj et Bamba Fall qui ont publiquement affiché une fausse équidistance entre les différents can- didats mais qui, ont, dans les coulisses, donné des mots d’ordre en
faveur de Macky Sall, Wade a volon- tairement et consciemment contri- bué à la réélection de Macky Sall en 2019. Pour les intérêts de son fils dont l’amnistie prochaine ne tardera pas, Wade aura fait abstraction de toutes les vertus et principes qui gui- dent l’action politique. L’Histoire retiendra que l’ex-président aura raté d’inscrire son nom en lettres d’or dans les annales de la République en refusant de prendre part au rendez-vous démocratique de ce 24 février 2019. Ainsi Wade est venu, a joué mais finalement a perdu son pari qui était de boycotter une élection présidentielle aussi importante dans la marche démocratique de notre nation. Combien de fois a-t-on voté au Sénégal sans moyen d’identification de l’électeur, sans isoloir, sans la présence d’une presse libre avant-gardiste, sans aucune garantie de transparence ? Abdoulaye Wade s’est auto-trahi et a trahi la confiance et l’espoir de centaines de milliers de Sé- négalais puisque dans sa trajectoire politique sinusoïdale, depuis 1978 (à part l’entracte pagailleuse des locales de 1990), il n’a jamais adopté la politique de la chaise vide pour laisser les coudées franches à ses adversaires que furent Léopold Sédar Senghor et Abdou Diouf. Il s’est d’ailleurs battu farouchement et tenacement pour qu’un code transparent puisse être voté en 1992 et permettre l’alter- nance en 2000.
Les dizaines de milliers de ses militants, partisans et sympathisants qui l’avaient accueilli à l’AIBD comme le Messie et l’avaient accompagné jusqu’au sanctuaire du PDS, étaient convaincus que le retour du vieux politicien allait considérablement contribuer à la fin de règne du président sortant le 24 février dernier. Hélas, encore une fois, Gorgui s’est finalement emberlificoté dans son propre jeu d’entourloupe et d’intérêts crypto-familiaux. Et Macky Sall trône toujours au sommet de la pyramide du pouvoir. Grâce à un certain... Abdoulaye Wade, père de Karim du même nom !
PAR SERIGNE SALIOU GUÈYE
UN APPEL QUI SONNE FAUX
Quand, pendant sept ans, on n’a jamais songé à rencontrer son opposition, ce n’est pas en 2019 qu’on devient subitement un homme de dialogue pour prendre langue avec elle
On avait annoncé un face-à-face avec la presse mais, finalement, la rencontre aura été un monologue du pré- sident de la République dont la réélection venait d’être confirmée par le Conseil constitutionnel. Dans un dis- cours faussement empreint de sérénité, de sagesse, d’apaisement et d’ouverture, le président tout nouvel- lement réélu a s’est exprimé en ces termes : « A mes yeux, il n’y a eu ni vainqueur ni vaincu. A présent que la campagne est terminée, il n’y a plus de camp démarqué par des lignes partisanes, je vois celui du Sénégal... Je serai le président de tous les Sénégalais et de tous les Sé- négalaises, parce que c’est la charge qui m’incombe. Je tends la main à toutes et à tous pour engager un dia- logue constructif et je ferai des propositions dans ce sens après ma prestation. Je convie à ce dialogue toutes les forces vives de la Nation et auquel mes prédécesseurs Abdou Diouf et Abdoulaye Wade pourront apporter leur contribution ».
Immédiatement, les commentaires post-déclaratoires se sont focalisés sur l’esprit d’ouverture du « Sage » Macky. On lui taille déjà les habits d’un homme de paix, d’un rassembleur, d’un réconciliateur. Mais une telle dé- claration laisse transparaitre que Macky Sall n’est pas un homme de dialogue puisque son premier mandat a été caractérisé que par la violence d’Etat dont il use et abuse au gré de ses intérêts politiques. Aujourd’hui qu’il a obtenu un second mandat dans des conditions qui nous laissent encore dubitatifs, il peut parler de dialogue inclusif. La blessure du premier mandat saigne encore. Pendant sept ans, les libéraux du PDS mais aussi Khalifa Sall et ses partisans ont souffert le martyre seulement pour avoir refusé de faire acte d’allégeance au Prince comme l’ont fait les fossiles Moustapha Niasse et Ous- mane Tanor Dieng. Illégalement, Karim Wade a été em- prisonné, condamné puis exilé. Khalifa Sall a été conduit à l’échafaud pour avoir voulu être Calife à la place du Ca- life. Abdoulaye Wade a été humilié par Macky Sall qui n’a pas hésité à saisir sa maison légendaire du Point E,
sanctuaire de conception des grandes batailles démocra- tiques de ce pays. Batailles qui ont permis à Macky Sall de diriger le Sénégal depuis 2012. Cet appel au dialogue n’est point sincère car les conditions préalables ne sont pas réunies. Or, si elles ne le sont pas, il n’est pas inclusif. Comment peut-il appeler au dialogue quand, avant même la proclamation des résultats provisoires, les par- tisans de son principal challenger Idrissa Seck sont tra- qués, arrêtés pour avoir alerté ou exprimé leur mécontentement contre les résultats qui donnaient vic- torieux l’adversaire de leur mentor ? On ne peut pas ap- peler à un dialogue si l’on ne permet pas à une frange de la population qui s’oppose de jouir du droit constitu- tionnel de manifester. Comment tendre la main à des millions de Sénégalais dont les leaders politiques en qui ils croient sont arbitrairement embastillés ou injuste- ment déportés ? Comment ose-t-il appeler Abdoulaye Wade à un dialogue ou lui demander des conseils quand il l’a privé de demeure au point qu’il est obligé de vivre dans un hôtel de la place ? Il était impensable que l’an- cien président, qui a permis à Macky Sall de disposer de plusieurs maisons ici et à l’étranger, vivrait aujourd’hui dans son propre pays comme un SDF (sans domicile fixe). Macky Sall qui pourra toujours se faire conseiller par Abdou Diouf qui l’a beaucoup encouragé à tenir éloigné Khalifa Sall du champ politique et à réprimer son oppo- sition.
Autant de choses qui font que cet appel au dialogue n’est qu’une rouerie machiavélique pour endormir par des formules apaisantes une opposition encore sonnée par la défaite électorale. Et cela renvoie à l’image de la fable de l’hyène qui appelle le fils de la girafe avec un poignard dissimilé dans son dos. Macky, c’est le loup dé- guisé en colombe qui veut rencontrer les brebis de l’op- position. Quand, pendant sept ans, on n’a jamais songé à rencontrer son opposition, ce n’est pas en 2019 qu’on devient subitement un homme de dialogue pour prendre langue avec elle. Le seul discours que Macky Sall connait,
c’est celui de la violence. N’est-ce pas lui disait au début de son magistère qu’il démantèlerait l’opposition au point de la réduire à sa plus simple expression? Tout le tape-à-l’œil d’hier participe d’une opération de tétani- sation voire d’une chloroformisation des opposants co- riaces qui tiennent encore la dragée haute au président de la République Macky Sall.
La véritable raison de ce rendez-vous manqué du pré- sident avec la presse sénégalaise et sa valetaille de Ben- noo, c’est de s’auto-donner une légitimité à l’issue d’une élection qu’une bonne partie de la population sénéga- laise dit entachée de fraudes, de manquements et d’ir- régularités. En remerciant dans son laïus les agents du ministère de l’Intérieur notamment la Daf, la Céna, le CNRA d’avoir bien organisé cette élections et les obser- vateurs nationaux et internationaux d’avoir délivré l’éternel quitus EBO (élections bien organisées), Macky Sall lustre sa reconduction à la tête de l’Etat. Il ne veut pas être obsédé par un mandat maculé par les taches de la fraude électorale. Donner un brevet de légitimité et de transparence à sa réélection, tel était l’objet de ce «super ndajé» organisé au palais par les services de la communication présidentielle. Mais les blanchisseries institutionnelles n’y peuvent rien. Cette victoire est en- tachée par l’élimination systémique de Karim Wade et de Khalifa Sall. Sans ces deux mis hors-jeu par des juges soumis, la réélection de Macky serait impossible au pre- mier tour. D’ailleurs le fou du Roi, Moustapha Cissé Lo, a déclaré publiquement que si le fils de Wade et l’ex-maire de Dakar avaient participé à la présidentielle, Macky se- rait en train de préparer sa campagne du second tour. C’est donc dire combien cet appel d’hier du président Sall est insincère. Par conséquent, l’opposition ne doit pas tomber dans ces messages-traquenards sous-tendus par des motifs inavoués si l’on sait que leur émetteur est allergique voire rétif au dialogue auquel il appelle faus- sement tout le monde.
PAR IBRAHIMA SILLA
HALTE À LA TYRANNIE DU DIALOGUE !
L’emploi du temps du président devrait être consacré à la gestion de sa vision plutôt qu’à divertir la République par le dialogue - Les intentions actuelles sont discréditées par les actions d’hier
On ne dialogue pas avec la loi. Ce serait trop facile et très permissif d’en envisager l’éventualité. On ne dialogue pas avec le Conseil Constitutionnel, encore moins avec les juges, la police ou la gendarmerie. On devrait étendre cette vérité à la politique et dire à ceux qui invitent l’opposition au dialogue, sans trop y croire, qu’on ne dialogue ni avec le président de la République, ni avec la légitimité, surtout si l’on croît qu’on en dispose d’une bien solide, octroyée confortablement et massivement par le peuple. Le droit ce n’est certes pas la politique. Ce qui semble autoriser la promotion présidentielle de la politique du dialogue, après l’exercice ferme et non négociable de son pouvoir discrétionnaire pendant 7 ans. Ses partisans diront que dialoguer ce n’est pas négocier. Qu’à cela ne tienne.
La légitimité acquise au nom de la volonté souveraine du peuple lève toutes les entraves pour présider sans sentiment de culpabilité. Cette légitimité donne le droit de gouverner, de mener les politiques publiques attendues d’un gouvernement et d’appliquer la vision proposée au peuple, en tenant compte de la minorité pour éviter notamment de tomber dans la tyrannie de la majorité. La politique politicienne est finie avec la fin de la campagne électorale. Place à la politique présidentielle qui peut bien se passer d’un tel exercice à rapatrier au parlement.
Rien n’est donc compliqué. Tout est institutionnalisé. L’institutionnalisation du pouvoir est née de la volonté de le dépersonnaliser de sorte que les citoyens n’aient pas le sentiment d’obéir à un homme. La continuité et la stabilité des institutions reposent donc, moins sur une quelconque magie ou phobie du dialogue entre personnes, que sur le respect des institutions fortes de leur légitimité. Il faut le rappeler à ce conseiller zélé du président de la République, aveuglé par l’exhalaison des dorures du palais qui voit dans le refus de participer à la comédie du dialogue, la manifestation d’une haine, d’un remords ou d’une jalousie, comme si personne n’était censé ignorer le dialogue. Le dialogue n’est pas une loi. Le droit au dialogue n’est pas un dispositif inscrit dans la Constitution. C’est une invitation que tout opposant ou dirigeant est libre de décliner ou d’accepter.
Il n’est donc pas besoin de dialoguer pour être à la hauteur du peuple, de ses attentes et de ses préoccupations. La compétence et la rigueur doivent être préférées au dialogue. Il est préférable de voir et d’avoir un président de la République dont on dira de lui demain qu’il était un homme de parole, plutôt qu’avoir à faire avec quelqu’un dont on rappellera qu’il était un homme de dialogue. Savoir dialoguer n’est pas le critère le plus déterminant pour devenir un bon président. Dialoguer ne transforme pas un politicien de métier en homme d’Etat. L’Etat n’est pas un conte de fée, ni une scène théâtrale et encore moins un refuge sous l’arbre à palabre avec des discussions de comptoirs de bar.
Les véritables hommes de dialogue ne le disent pas, ils le pratiquent sans en faire la publicité, modestement, concrètement, discrètement, silencieusement et sincèrement. Ils dialoguent d’abord autour d’eux. Leur passé et leurs promesses témoignent pour ou contre eux sur leur disponibilité au dialogue. Il y a donc une grande différence entre la théorie mise en scène du dialogue et la pratique effective du dialogue très économe en mots et forte en actes positifs performatifs. Et le pire pour un homme de conviction et de principes, c’est d’être convié au banquet d’un homme qui n’est ni un homme de parole, ni un homme de dialogue.
Si la vision et les projets envisagés sont clairs, ceux-ci ne méritent pas d’être soumis au tamis du dialogue. Si la sincérité, l’honnêteté, l’intégrité et la moralité inspirent les actes présidentiels et gouvernementaux, rien ne justifie le dialogue. Il suffit de dérouler sa feuille de route en respectant ses engagements pour le bien-être du peuple fatigué d’être fatigué. Vouloir dialoguer, c’est supposer qu’il y a un dérèglement de la société. Si tel est le cas, l’artisan du dérèglement doit en tirer toutes les leçons éthiques et républicaines. Et si le dialogue se présentait aujourd’hui comme la demande d’un temps mort, comme au basket, parce qu’on est dans une phase de faiblesse, voire d’une mauvaise passe ? Bizarre pour quelqu’un qui, semble-t-il, vient de recueillir 58,26% des suffrages à l’issue de l’élection présidentielle.
Il n’y a pas une magie du dialogue, au terme duquel tout s’arrangerait. Rien n’est compliqué au point de mériter la thérapie illusoire du dialogue. Il n’y a pas de crise politique grave. L’Assemblée nationale est encore bien là en tant qu’institution par excellence où doit se tenir le débat politique. Débattre c’est une manière de dialoguer, à moins de considérer le dialogue comme un moyen de négociation politicienne ouvrant la voie à toutes sortes de manigances politiciennes et marchandages partisans ; un moyen d’institutionnaliser la complaisance politicienne. Nul ne peut contester la philosophie et la pédagogie du dialogue sincère et respectueux en démocratie. Posé avec sincérité en amont, le dialogue peut être un puissant moyen d’organiser la coexistence pacifique et vertueuse entre les concurrents politiques dans l’exercice ou la conquête du pouvoir.
L’emploi du temps du président de la République devrait être consacré à la gestion de sa vision plutôt qu’à divertir la République par le dialogue. Le rôle de l’exécutif ce n’est pas de dialoguer, mais bien d’appliquer les lois votées par le Parlement et d’exécuter les politiques publiques. Le parlement est là pour organiser méthodiquement le débat démocratique. Autrement, le dialogue peut légitimement être vu comme un moyen de déguiser la démarche cavalière et l’exercice solitaire et autoritaire du pouvoir. Les intentions actuelles sont discréditées par les actions d’hier ; elles-mêmes malmenées par les intentions d’hier à l’égard de l’opposition d’abord traitée de tous les noms d’oiseaux, puis invitée, méprisée et snobée, enfin réinvitée au dialogue. C’est quoi ce jeu ? Il faut être un opposant pervers narcissique, voire sadomasochiste pour accepter cette main tendue qui pourrait bien ressembler à un nouveau guet-apens. Et si dialoguer c’était du « blaguer-dealer » ?
Le dialogue n’est pas une garantie de la performance politique et de l’émergence sociétale. Il n’y a aucun lien entre ces variables lourdes. C’est même un frein. L’ancienneté de la pratique du dialogue ne témoigne en rien de sa légitimité, de sa légalité, de son opportunité ou de sa conformité avec la morale républicaine. Le dialogue ne doit pas devenir une sorte d’imposture politique, trahissant l’impressionnante contradiction de la volonté de réduire celle qu’on convie au dialogue à sa plus simple expression. Semer le dialogue pour récolter le silence et l’indifférence ? Peut-être.
Il convient en vérité de présider, dans la justice et avec justesse, au lieu de dialoguer. En démocratie, il y a une utilité de la différence sur des choix de politiques publiques, de postures républicaines et partisanes. D’une part il y a le discours du pouvoir (le lexique de l’optimisme officiel pour endormir le peuple) et de l’autre le discours de l’opposition (la rhétorique réactionnaire et contestataire pour réveiller le peuple). Le dialogue est comme une ruse du pouvoir, destinée à conjurer les paroles discordantes concurrentes.
Le dialogue se présente malgré tout comme une astuce de l’opposition opportuniste qui saisit cette occasion de dialoguer pour espérer peser, compter sans pouvoir imposer sa parole. Des individus sortis de nulle part ou habitués à toute sorte de magouille politicienne, sans aucune envergure, se croient ainsi importants parce qu’invités au dialogue ; pardon à la divagation. Et ils papotent pour que rien ne change. On parle même de forces vives de la nation pour parler d’eux ; ce qui ne veut rien dire. Peut-être que cette expression renvoie aux individualités ou aux collectivités qui s’agitent et agitent vivement. Pour le pouvoir, le dialogue n’est qu’un moyen de dissuader de manière préventive les dissidences et les ambitions ; d’endormir les plus récalcitrants ; d’assurer ses arrières le jour d’après la chute qui adviendra un jour ou l’autre avec tout ce que celle-ci suppose comme conséquences.
En dépit des charmes du dialogue sans cesse vantés, il y a incontestablement une impossibilité de réaliser actuellement l’alchimie entre l’ambition de conservation du pouvoir et l’ambition de contestation du pouvoir qui justifie la radicalisation de l’opposition crédible. Le gouvernement et l’opposition sont nécessairement contraints de ne pas avoir le même discours. Tant mieux pour la démocratie, parce qu’il y a eu de fâcheux précédents qui participent plus à démotiver, qu’à encourager un quelconque dialogue avec l’actuel président, seul artisan du dialogue de sourds engagé avec l’opposition crédible et sincère depuis 2012.
Pourquoi dialoguer sur des questions qui avaient été considérées comme closes par le président de la République ? Si la vision politique est réglée, les légitimités consacrées, le choix économique élaboré, le dispositif institutionnel et constitutionnel fixé, pourquoi dialoguer ? La tradition de consensus forts dans ce pays relève du mythe. Tant mieux. La démocratie c’est tout sauf la tyrannie du consensus. Halte à la tyrannie du dialogue.
Ibrahima Silla est Enseignant-chercheur en science politique, UGB Saint-Louis
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JE FÉLICITE MACKY
Aissata Tall Sall se réjouit de l'appel au dialogue du chef de l'Etat et invite toute la classe politique à s'y associer
Aissata Tall Sall félicite le président nouvellement réélu Macky Sall pour son appel au dialogue juste après la proclamation officielle des résultats du scrutin du 24 février par le Conseil constitutionnel. ‘’L’entendre dire qu’il associe ses deux prédécesseurs, manifeste d’une volonté résolue d’asseoir un dialogue sincère et approfondie. Je le félicite tout en souhaitant que toutes les forces vives y prennent part", a t-elle déclaré.