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12 septembre 2025
PAR GILBERT COUMAKH FAYE
LETTRE OUVERTE A L’ÉLECTEUR SÉNÉGALAIS
En votant sur la base des mérites, le 24 février prochain, seul devant le secret de ta conscience, tu sauras avec raison si tu as voté dans le bon ou le mauvais sens
Prévue le dimanche 24 février 2019, l’élection présidentielle du Sénégal suscite un intérêt national et une attention particulière sur la scène internationale. En effet, pas un seul jour que les médias nationaux et internationaux ne consacrent leur une à cette course. Jusque là, la campagne électorale tant bien que mal évolue. Comme à l’accoutumé, les promesses électorales se multiplient, certaines plus irréalisables que d’autres. Le citoyen sénégalais, électeur tributaire du choix du président de la République doit rester vigilent et opérer un choix idoine pour ne pas contribuer à la démagogie. Obligation morale au même titre que faire le bien, d’attirer l’attention du peuple sénégalais sur le choix de la personne qui doit présider à la destiné de notre pays durant les cinq prochaines années.
Très cher électeur, tu n’es plus un enfant
Depuis plusieurs années, tu es convoqué démocratiquement pour user de ton droit et de confier la gestion de ton pays à des représentants. Parfois tu exerces ce droit constitutionnel avec beaucoup de confusion et de maladresse. Cela est une chose normale puisque tu peux être trompé par les allégations des uns et des autres. « L’erreur est humaine mais persévérer dans l’erreur est diabolique », disaient les romains. Si donc tu as voté hier sur la base de considérations ethniques, religieuses, linguistiques, tribales etc., l’histoire te donne aujourd’hui l’occasion de corriger tes erreurs afin de ne pas hypothéquer l’avenir de la République du Sénégal. « Ne jamais trahir le Sénégal » j’insiste avec force. En votant sur la base des mérites, le 24 février prochain, seul devant le secret de ta conscience, tu sauras avec raison si tu as voté dans le bon ou le mauvais sens. Tu peux répéter les mêmes erreurs en arrivant à des résultats différents, c’est ce qu’Albert Einstein a qualifié de « folie ».
Très cher électeur, tu es très fort, défends donc ton indépendance
A cette période de campagne électorale, ils seront très nombreux à venir te séduire tels des renards pour arracher ton suffrage. Te promettant monts et merveilles, ils viendront sans doute munis de quelques grains de riz, de quelques millilitres d’huile, de quelques billets de banque, de t-shirts à leur effigie. Face à ces biens qui ne peuvent durer le temps d’un mandat électif, tu as le choix d’être du coté de la dignité. Car « sans dignité, il n’y a pas de liberté, sans justice, il n’y pas de dignité, et sans indépendance, il n’y a pas d’homme libre », écrivait et insistait avec force Lumumba avant de mourir. Il ajoutait encore « je sais que mon pays qui souffre tant saura défendre son indépendance et sa liberté ». Par la voie des urnes, l’occasion t’es donnée une fois de plus de défendre l’indépendance et la liberté du Sénégal.
J’en appelle donc à la conscience collective pour que la gestion des institutions de notre pays soit confiée à des personnes qui le méritent et veulent le bien du Sénégal. Le peuple gagne toujours et c’est en étant ensemble. Le peuple, patron du président attend de lui des actions fortes afin de lui garantir cette dignité.
Au prochain président de la République, le peuple s’opposera à la dictature, la gestion gabégique, aux népotismes. Le peuple pouvant dans ces conditions user de moyens extra constitutionnelles pour imposer sa volonté et nul de peut se faire juge de la validité des agissements du peuple, il n’as pas de juge. Dans une République, le souverain n’a pas de juge, or le peuple est souverain.
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NOUS MANQUONS DE VÉRITABLE MÉDIATEUR SOCIAL
EXCLUSIF SENEPLUS #Enjeux2019 - Nous devons veiller à ce que cette présidentielle soit la meilleure jamais organisée - On ne peut pas construire un pays avec des populations analphabètes - L'opposition est faible - SANS DÉTOUR AVEC MOUSTAPHA DIAKHATE
#Enjeux2019 - Les organes en charge de la présidentielle doivent rassurer l'opinion jusqu'au bout. Selon Moustapha Diakhaté, le Sénégal ne peut pas se permettre une mauvaise organisation du scrutin après avoir connu deux alternances et surtout après l'expérience chaotique des législatives de 2017. À en croire l'invité de Sans Détour, tous les détenteurs d'une carte d'électeur doivent pouvoir voter le 24 février. "C'est un défi que nous nous devons de relever", insiste-t-il, regrettant l'absence de dialogue entre les différents acteurs politiques. Des acteurs qu'il invite néanmoins "à jouer le jeu" pour une présidentielle sans heurts. Il interpelle à ce propos Abdoulaye Wade qu'il accuse de mettre le feu au poudre par ses différentes sorties.
Au nombre des enjeux prioritaires de cette échéance électorale, figure selon le député de BBY, la question de l'éducation. "On ne peut pas construire une démocratie avec des populations analphabètes", objecte Moustapha Diakhate qui relève par ailleurs, le manque de prospective des gouvernants.
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RIEN NE JUSTIFIE UNE TELLE HORREUR
EXCLUSIF SENEPLUS - Des journalistes choqués par le passage à tabac de leurs confrères à Tambacounda, dénoncent la dérive et exigent des sanctions
Madeleine Diallo et Rokhaya Bassène |
Publication 11/02/2019
Ce sont des journalistes sous le choc, marqués par passage à tabac de leurs confrères à Tambacounda qui se sont exprimés ce lundi à www.seneplus.com. Ils dénoncent cette atteinte au droit à l'information que rien ne justifie, selon eux.
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CHERS CONFRÈRES, RESTEZ EN VIE
EXCLUSIF SENEPLUS - Un bon journaliste est un journaliste vivant - Bocar Alpha Kane invite les journalistes à la prudence
‘’Il y a déjà huit morts et aucune poursuite n’a été enregistrée’’ regrette Bocar Alpha Kane journaliste à E-média, qui en plus de dénoncer l’impunité qui règne en maitre pendant les campagnes électorales demande aux journalistes de ne pas prendre de risques inutiles. Il invite ses confrères à ne pas s’exposer ‘’ Un bon journaliste c’est un journaliste vivant donc je les invite à la prudence et à la vigilance’’
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PAR NDAMBAW KAMA
OÙ EN EST LA LUTTE CONTRE LES VIOLENCES SEXUELLES ?
EXCLUSIF SENEPLUS #Enjeux2019 - Il incombe aux candidats de s’approprier notre lutte pour interpeller les consciences et faire advenir un Sénégal où être une femme ne signifie pas être une victime potentielle face aux porcs qui se baladent dans nos rues
#Enjeux2019 - #TontonSaïSaï, #Nopiwouma, #MeToo, et plus récemment #Doyna sont des hashtags qui représentent des mouvements nés pour libérer la parole des femmes face aux violences sexuelles. Cette prise de conscience, d’abord chez les femmes, puis les intellectuels et les militants de la société civile dit quelque chose de la profondeur du combat pour les droits des femmes dans notre pays, notamment chez les jeunes.
L’émergence de cette parole symptomatique du ras-le-bol des femmes sur les violences sexuelles récurrentes a connu un déclic avec #MeToo, qui faut-il le rappeler, est né en 2007. Même si les multiples accusations d’agression et de harcèlement sexuels envers le producteur américain, Harvey Weinstein, ont fait renaitre le mouvement en 2017. En effet, plus de 80 femmes l’ont accusé publiquement de viol ou de tentative de viol. La vague Weinstein a emporté plusieurs autres personnalités aux Etats-Unis et a donné naissance à d’autres mouvements comme #balancetonporc en France.
Mais face au tollé qui a suscité une vague de ras-le-bol mondial, le succès de ces initiatives semble dépendre du statut de développement économique et culturel du pays. Par conséquent qu’en est-il des mouvements africains, notamment du Sénégal ?
Le trio magique sénégalais (maslaa, mougn, soutoureu) est le plus grand ennemi de la prise de conscience ou de la dénonciation des maux qui gangrènent notre société, notamment les agressions sexuelles. Économiquement, les femmes subissent des situations de séquestrations dues à la dépendance financière.
Culturellement, elles sont tenues de garder le silence sur plusieurs points, sinon le poids du jugement de la société leur sera retenu. Quand elles osent parler, elles reviennent rapidement sur leurs mots souvent parce que les personnes qui sont censées les soutenir et les accompagner sont les premières à leur jeter la pierre : la manière dont elles sont accueillies chez elles (« tu vas briser la famille ! »), au niveau des autorités (« tu étais habillée comment ? Qu’est ce que tu faisais là ?») et même dans les centres médicaux où le personnel médical peut tenir des discours déplacés envers les jeunes femmes afin de savoir si elles étaient vierges ou pas.
Même s’il reste un long chemin à parcourir, nous nous devons de célébrer les petites victoires. Nous sommes passés d’une acclamation du journaliste Cheikh Yérim Seck pourtant accusé de viol, à la démission du professeur Songué Diouf de l’émission Jakaarlo pour apologie du viol. Le progrès est relatif mais ce qui est sûr, c’est que les mentalités évoluent. Les langues se délient et les populations font plus attention à ce qu’elles disent et à ce qu’elles partagent, notamment sur les réseaux sociaux. C’est déjà une première victoire symbolique avant d’aller plus loin dans le combat.
Nous n’en sommes pas encore à balancer nos porcs mais #Nopiwouma a montré au Sénégal qu’il y avait une faim de partage d’émotions. La plupart des témoignages ont en commun que les victimes parlaient de manière anonyme de leurs agressions pour la première fois. Les traumatismes ne sont pas faits pour être enterrés dans les têtes mais pour être traités à travers un suivi psychologique qui au final permet à la victime de guérir et éventuellement de poursuivre une vie normale. Les sentiments réprimés resurgissent tout le temps d’une manière ou d’une autre.
La résistance s’organise chez les femmes. Des barrières tombent et d’autres vont tomber dans le sens d’une avancée des luttes pour les droits des femmes. Mais des réticences existent. Car pendant que le mouvement s’amplifie, les médias traditionnels ne communiquent que très peu, faisant ainsi preuve d’un désintérêt coupable sur un fait social important.
C’est là qu’internet joue un rôle important dans la structuration d’une campagne nationale sur les violences sexuelles. En effet, la moitié de la population sénégalaise a accès à Internet et plusieurs se sont engouffrés sur le succès des campagnes digitales, surtout dans un monde où la toile va bientôt remplacer la télévision.
Je dois finir par rappeler en revanche, que le succès des luttes pour les droits des femmes ne sera pas effectif sans l’aide des hommes. Et c’est rassurant de voir que beaucoup commencent à s’approprier la bataille. Il incombe ainsi aux cinq hommes candidats à la présidentielle du 24 février de s’approprier notre lutte pour interpeller les consciences, changer les mentalités et faire advenir un Sénégal où être une femme ne signifie pas une victime potentielle face aux porcs qui se baladent dans nos rues et habitent nos maisons.
La graine est plantée mais elle nécessitera un dur labeur et beaucoup de patience pour éclore. Prenons la parole car la première thérapie est orale. C’est là aussi que nous attendons nos femmes et hommes politiques pour la tenue d’un débat responsable sur les violences sexuelles durant cette campagne électorale.
Ndambaw Kama est titulaire d’un master en Economie aux USA et d’un MBA International au Sénégal. Chroniqueuse, elle tient depuis plusieurs années le blog de critique sociale www.worldofnk.com. Elle a lancé le mouvement #Nopiwouma contre les violences au Sénégal.
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CONTRE LE CULTE DE L’IMPUNITÉ ÉLECTORALE
EXCLUSIF SENEPLUS - Des enfants sont tués par des caravanes et il n’y a jamais eu d’enquête - Des journalistes sont agressés et personne n’est inquiétée – Alassane Samba Diop n'exclut pas le boycott de la campagne en cas de menace sur la vie des confrères
Alassane Samba Diop condamne l’agression subie par des journalistes à Tambacounda ce lundi. Très choqué, le journaliste de e-media n'exclut pas de boycotter la campagne si la sécurité des journalistes n’est pas garantie. ‘’Si la vie de nos confrères est en jeu, je ne vois pas pourquoi ils vont continuer à couvrir la campagne présidentielle pour des gens qui ne sont même pas capables d’assurer leur sécurité’’, s'insurge-t-il.
Alassane Samba Diop rappelle que ce n’est pas la première fois que des journalistes sont agressés impunément. ‘’Souvent il n'y a pas de suite par rapport à ces dérives. On a l’impression qu’au Sénégal pendant les périodes électorales, il y a une sorte d’impunité pour les hommes politiques de tous bords confondus. Les caravanes écrasent les enfants à travers le pays, il n’y a jamais d’enquête. Les chauffeurs qui tuent ces jeunes ne sont jamais inquiétés’’, a t-il déploré.
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PAR GNAMBI SONKO
DE QUOI LE SYSTÈME EST-IL LE NOM
EXCLUSIF SENEPLUS - Les responsables de l’opposition, quel que soit leur passé, ne peuvent être considérés comme des exclus de l’action d’Ousmane Sonko dès lors qu’ils décident de s’allier à lui de leur propre chef
Il apparait très clairement que l’engagement politique de PASTEF et de son leader Ousmane Sonko reste centré sur le combat contre le système, j’allais dire le système vicieux qui préside à nos destinées depuis l’accession de notre pays à la souveraineté internationale.
Mais, depuis un certain temps, certaines voix s’élèvent pour reprocher à PASTEF et à son leader Ousmane Sonko de manquer de cohérence dès lors que le parti s’est allié à et/ou a démarché des candidats recalés par le parrainage, ayant, dans le passé, appartenus au système ou ayant eu quelques accointances avec celui-ci.
Cette petite contribution cherche à éclairer plus d’un sur le fait que le combat de PASTEF et de son leader reste cohérent, malgré les allégations de certains adversaires ou pourfendeurs argumentées à partir des alliances entre PASTEF et de supposés anciens dignitaires ou associés des précédents régimes qui se sont succédés à la tête de notre pays.
Il convient de noter tout d’abord que l’analyse du système est assez complexe pour être exposé avec suffisamment de détail et être compris de tous dans un discours de meeting même si le porteur est une personne aussi éclairée que Ousmane Sonko. Dès lors, les lecteurs comprendront que ma modeste personne soit loin d’avoir la prétention de faire mieux et plus dans la présente petite note. Toutefois, mon adhésion totale à l’orientation et à l’engagement politique de PASTEF, quand bien même, je n’en suis qu’un adhérent récent, m’autorise à partager quelques éléments de réflexions dans un objectif de contribuer à aider les sénégalaises et les sénégalais à avoir une meilleure compréhension du système et partant disposer d’éléments pertinents pour faire un jugement éclairé de notre action auprès du président Ousmane Sonko.
Dans un premier temps, nous exposons quelques éléments de définition, avant de partager une réflexion sur les implications du système, puis poursuivre avec la nature du combat de PASTEF et d’Ousmane Sonko contre le système et de terminer par un avis sur les alliances.
Quelques éléments de définition d’un système
Le système est un ensemble plus ou moins organisé fonctionnant sur la base de règles qui sont régies par des convenances validées et acceptées par tous ses membres. C’est sous ce rapport que la République est un système auquel nous appartenons tous parce qu’ayant voté notre constitution et des lois par l’entremise de nos représentants que nous avons élus au parlement. Toutefois, la République est composée de plusieurs entités officielles dont chacune constitue un sous-système. De même, au sein de la République, les populations se regroupent ou s’associent sous différentes formes d’organisations autour de buts sociaux, économiques ou socioéconomiques. Ces formes d’organisation des populations sont formelles lorsqu’elles s’inscrivent dans le cadre légal ou informel, en dehors de celui-ci. Cependant, il arrive que des organisations, inscrites dans le cadre légal, développent volontairement des activités informelles. Dans tous les cas, ces différentes organisations constituent également des sous-systèmes.
On peut déduire que dans la République, il y a un système-mère, auquel nous appartenons tous et plusieurs sous-systèmes constitués de personnes exerçant au sein ou en dehors de l’appareil étatique. A l’intérieur du système-mère les personnes et les sous-systèmes se retrouvent dans des rôles d’acteurs. Il s’installe une dialectique entre les personnes et les sous-systèmes, entre les personnes et le système-mère et entre les sous-systèmes et le système-mère. Dans cette dialectique se développent des stratégies sous différentes formes pour réaliser des objectifs individuels (le plus courant) ou collectifs (moins courant). Certaines de ces stratégies s’inscrivent dans le respect des principes et objectifs généraux du système-mère qui restent centrés sur la satisfaction des intérêts supérieurs de la Nation et du bien-être des populations. Tandis que d’autres s’orientent délibérément vers la corruption du système-mère pour prendre le contrôle de la République dans une logique de servir des intérêts partisans d’une minorité en brimant ceux collectifs et spécifiques des masses. Ceux qui prennent ainsi le contrôle de la République deviennent le Système Pernicieux que les acteurs engagés dans PASTEF autour du président Sonko ont décidé de combattre.
Le fait est, en effet, que comme le dit si bien Michel Crozier1, lorsqu’un système est en crise ou corrompu, l’ensemble des sous-systèmes qui le composent entrent en crise ou deviennent corrompus. Et le jeu des acteurs se porte ainsi dans la maîtrise des systèmes d’action concrets qu’ils développent stratégiquement au sein du système ou des sous-systèmes.
Des implications du système pernicieux : la théorie des 4 i
Pour illustrer les implications du système pernicieux, je vais emprunter une approche à un respectueux ainé avec lequel j’avais eu l’honneur de partager le plateau d’une émission radio durant laquelle nous nous sommes essayés à une analyse de la société sénégalaise. Il avait alors considéré que dans la société, il y avait quatre (4) i : i) Les Individus ; ii) Les Institutions ; iii) Les Intérêts ; et iv) les Interactions. Pour illustrer les implications du système pernicieux, j’ajoute trois (3) autres i.
Aussi, notre description du système repose-t-elle sur sept (7) i : i) Les Individus ; ii) Les Institutions ; iii) Les Intérêts ; iv) les Interactions ; v) les Influences ; vi) les Insoumis ; et vii) les Insatiables jouisseurs.
Les Individus : ce sont les hommes et les femmes de la nation. Certains occupent des responsabilités au sein des institutions de la République, d’autres exercent, à titre individuel ou collectif, des fonctions dans des entreprises ou organisations privées ou associatives.
Les Institutions : elles sont de deux ordres. Celles qui relèvent de l’organisation de l’Etat (institutions républicaines) et celles qui relèvent de l’organisation des populations (Institutions sociales ou sociétales). Chacune de ces institutions constituent les sous-systèmes du système-mère. Celui-ci et chacun des sous-systèmes doivent leur robustesse et leur justesse ou à l’opposé leur débilité et leur escobarderie à la qualité des individus et à la nature de leur action, relativement à des fonctions qui leurs sont attribuées dans le système. Ces fonctions sont celles d’acteurs.
Cette considération est, on ne peut plus nette, exprimée dans ce qui suit, je cite "L'acteur n'existe pas au-dehors du système qui définit la liberté qui est sienne et la rationalité qu'il peut utiliser dans son action. Mais le système n'existe que par l'acteur qui seul peut le porter et lui donner vie, et qui seul peut le changer"2, fin de citation.
Les Intérêts : ce sont les gains ou dividendes reçus ou attendus à la fois par les individus et par les institutions, consécutifs aux interactions entre individus, entre institutions ou entre individus et institutions. Ces intérêts sont à la fois individuels et collectifs. Les uns n’excluant pas les autres, mais les uns pouvant être détournés par les autres.
Les Interactions : ce sont les interférences, les immixtions d’un ou de plusieurs individus avec un ou plusieurs individus, et avec une ou plusieurs institutions, d’une part et celles d’une ou de plusieurs institution(s) avec un ou plusieurs individu(s) et avec une ou plusieurs institutions, d’autre part. Ces interactions peuvent être négatives ou positives sur le système, le corrompant, dans le premier cas ou l’améliorant, dans le second. Mais, ces interactions peuvent être mutuellement bénéfiques ou maléfiques ou encore bénéfiques pour les uns et maléfiques pour les autres.
Les Influences : ce sont les effets subis par les uns (les influencés : individus et institutions) ou générés par les autres (les influenceurs : individus et institutions). Les influenceurs sont une minorité (certains des dirigeants des institutions républicaines, socioprofessionnelles et socioculturelles). Alors que les influencés constituent la grande majorité, qui englobe 1) les influencés institutionnels (ce sont certains dépositaires d’enjeux au sein des institutions républicaines, socioprofessionnelles et socioculturelles) et 2) les influencés populaires (la grande majorité : une partie du peuple qui obéit aveuglément à des leaders sur la base d’une appartenance commune d’ordre idéologique, socioprofessionnelle ou socioreligieuse et non sur la base des intérêts supérieurs de la Nation). C’est à travers ces influences que le système est manipulé de l’intérieur comme de l’extérieur.
Les Insoumis : ce sont les rebelles du système. Ils peuvent être actifs comme Ousmane Sonko et combattent le système en prenant le risque de perdre leurs intérêts (y compris leur vie) au nom de la patrie, ou être passifs. Comme de nombreux citoyens indociles du système qui ne prennent cependant aucun risque en vue de préserver leurs intérêts tout en ne se mêlant pas à la corruption active entretenue par le système.
Les Insatiables jouisseurs : ce sont les profiteurs. Ils sont le plus souvent les influenceurs (corrupteurs) et les influencés (corrompus). Insatiables parce que si fortement ancrés dans une dépendance au système qu’ils en deviennent des appendices, “ transhumant “ systématiquement d’un régime à un autre comme du “ bétail “ en quête perpétuelle de pâturage. Et ces acteurs sont justement à différencier nettement de ceux qui, sur la base d’une analyse profonde et d’une remise en cause sérieuse de leur posture nuisible ou victime vis-à-vis du système, se décident, à un moment donné, à rompre avec celui-ci, sans aucun calcul intéressé, outre l’intérêt suprême du peuple et de la nation. Ils prennent ainsi une posture de “ reconvertis “ éclairés qui s’allient contrairement aux “ transhumants “ à la cause des opposants et farouches combattants du système pernicieux et de ses acteurs.
Où situer le combat de PASTEF et d’Ousmane Sonko contre le système pernicieux ?
Il se structure autour d’une action de transformation positive de chacune de ces implications du système pernicieux pour en faire de véritables leviers du développement de notre pays.
Il s’agit de développer sept (7) Actions de Grâce pour l’Illumination et la Réinsertion (AGIR) :
Agir sur les Individus : en renforçant leur éducation et leur organisation vers l’obtention des objectifs de développement de la Nation, fondé sur un sentiment de patriotisme bien ancré et, à tous égards, adossé aux valeurs cardinales qui ont toujours fait la fierté et la grandeur des illustres hommes et femmes de référence que notre nation ne cesse de citer et d’honorer ;
Agir sur les Institutions : en les réformant pour les rendre conformes aux préoccupations des populations et au processus de développement de la Nation ;
Agir sur les Intérêts : en les rationnalisant, pour réduire leur asymétrie et renforcer leur interrelation vertueuse et agissante vers l’obtention de changements positifs pour la Nation ;
Agir sur les Interactions : en les équilibrant et en les conformant aux intérêts supérieurs de la Nation ;
Agir sur les influences : en infléchissant celles négatives et en promouvant celles positives, pour amener les premières à se repentir et les secondes à se renforcer et préserver les intérêts supérieurs de la Nation ;
Agir sur les insoumis: en les renforçant pour mieux consolider leur position de serviteurs inconditionnels de la Nation ;
Agir sur les insatiables jouisseurs : en les rééduquant pour leur réinsertion vertueuse dans le processus de construction de la Nation et de préservation de ses intérêts supérieurs, mais aussi en légiférant pour mieux encadrer plus judicieusement la liberté d’association, notamment dans le militantisme politique.
Ces actions de grâce ne sauraient être exclusives des sénégalais ayant appartenus ou eu des accointances avec le système pernicieux. On peut même considérer qu’ils en sont les principales destinataires. Cette action de grâce peut se baser sur deux principes d’ouverture : i) faciliter l’accueil dans PASTEF des repentis du système pernicieux et ii) inciter ceux qui sont encore dans le système à en sortir pour retrouver PASTEF. C’est là tout le sens qu’il faut donner aux actions du président Ousmane Sonko et de la coalition Ousmane Sonko Président.
Quid des alliances dans ce combat ?
Dans la scène politique, il y a deux (2) camps : celui des groupes qui détiennent le pouvoir et celui constitué de ceux qui s’opposent. Dans les deux camps, il peut exister des divergences de points de vue. Mais, celles-ci sont tues, systématiquement chez les détenteurs de pouvoirs ou occasionnellement chez les opposants.
Les alliances ce sont des accords entre des parties d’un même camp. C’est-à-dire entre partis du pouvoir ou entre partis de l’opposition.
Par contre, il arrive que des membres d’un camp quittent leur appartenance initiale pour rejoindre l’autre camp. Quand ce mouvement va dans le sens de l’opposition vers le pouvoir, les concernés sont perçus comme des vicieux, soucieux de leurs seuls intérêts et on parle systématiquement de « Transhumance ». Mais, quand le mouvement est inversé, c’est-à-dire dans le sens du pouvoir vers l’opposition, les concernés sont perçus comme des vertueux dont la seule préoccupation est l’intérêt supérieur de la Nation. Il n’existe pas un attribut systématique, mais, on peut parler de « Reconversion » éclairée.
Dès lors, on ne peut considérer que ceux qui parlent de Transhumance, quand des responsables de partis de l’opposition décident de s’allier à un autre parti du même camp d’appartenance, se trompent d’analyse et d’appréciation.
Par ailleurs, ces responsables de l’opposition, quel que soit leur passé, ne peuvent être considérés comme des exclus de l’action d’Ousmane Sonko dès lors qu’ils décident de s’allier à lui de leur propre chef, d’autant plus qu’ils ont la possibilité de rejoindre le camp du pouvoir comme l’ont fait ceux qui ont nargué l’opinion, des années durant, alors qu’ils sont restés dans leur intime conviction des alliés du système pernicieux (des Insatiables jouisseurs).
Cette note aurait pu être plus développée, mais l’objectif étant de donner un tout petit éclairage, nous nous en arrêtons là, espérant qu’elle permettra à certains de mieux analyser, avec recul et sérénité, le processus en cours dans notre pays et de faire des choix éclairés dans le seul but de protéger les intérêts supérieurs du Sénégal, des Sénégalaises et des Sénégalais.
1 Michel Croizier est un Sociologue français auteur de plusieurs ouvrages dont l’un des plus célèbres est l’acteur et le Système 2 CROZIER M. & FRIEDBERG E., 1977, L'acteur et le système, Editions du Seuil, Paris (Page 11).
Gnambi Sonko est est spécialiste des filières agricoles et de l’Appui organisationnel et institutionnel. Depuis 2004, il travaille comme consultant indépendant en Planification et Évaluation des politiques publiques, et a dirigé à ce titre, plusieurs missions au Sénégal et en Afrique.
À travers un communiqué signé du directoire de campagne de son candidat, le Parti de l'unité et du rassemblement (Pur) a réagi sur le violent accrochage entre leur caravane et des militants de Benno Bokk Yaakaar. Accrochage qui a coûté la vie à un militant de la coalition présidentielle. Dans un communiqué de presse, la formation politique du Pr. Issa Sall a tenu à donner sa version des faits. Seneweb a aussi appris que le Pur a décidé de suspendre sa campagne, pour l'instant.
"Depuis l'étape de Kolda, dans le cadre de la campagne pour l'élection présidentielle, le candidat du Pur subit des sabotages qui entravent le déroulement normal de ses activités. Après avoir été empêché de continuer sa caravane à Kolda, avec l'arrivée de Macky Sall, cette tentative de provocation a continué depuis lors".
"Nous déplorons cette perte en vie humaine"
"C'est ainsi que ce matin du 11 février, nous avons subi des attaques de la part des militants de Bby à Tambacounda, occasionnant la mort d'une personne et plusieurs blessés, et la destruction de nos voitures. Nous déplorons cette perte en vie humaine et appelons la justice à faire son travail.
"La responsabilité d’Ali Ngouille est engagée"
Nous prenons comme témoin l'opinion nationale et internationale que le ministre de l'Intérieur Ali Ngouille Ndiaye sabote le processus électoral en minimisant la sécurité des candidats de l'opposition. Sa responsabilité est engagée dans ces événements malheureux, mais aussi à tout ce qui arrivera plus tard".
PAR ACHILLE MBEMBE
LES AFRICAINS DOIVENT SE PURGER DU DÉSIR D'EUROPE
Afin que les Africains ne soient point transformés en rebuts d’une planète parsemée de miradors, elle doit devenir son centre propre, sa puissance propre, un vaste espace de circulation, un continent-monde
Le Monde Afrique |
Achille Mbembe |
Publication 11/02/2019
De tous les grands défis auxquels l’Afrique fait face en ce début de siècle, aucun n’est aussi urgent et aussi lourd de conséquences que la mobilité de sa population. Dans une large mesure, son avenir immédiat dépendra de sa capacité à faire en sorte que ses gens puissent se déplacer sur l’ensemble du continent aussi souvent que possible, le plus loin possible, le plus vite possible et, dans l’idéal, sans entrave aucune. Du reste, tout y pousse, aussi bien la croissance démographique, l’intensification de la prédation économique que les dynamiques du changement climatique.
D’ailleurs, les grandes luttes sociales en Afrique au cours de ce siècle porteront autant sur la transformation des systèmes politiques, l’extraction des ressources naturelles et la répartition des richesses que sur le droit à la mobilité. Il n’y a pas jusqu’à la création numérique qui ne s’articulera aux processus circulatoires. La révolution de la mobilité suscitera de profondes tensions et pèsera tant sur les équilibres futurs du continent que sur ceux d’autres régions du monde, ainsi que l’atteste d’ores et déjà la crise dite des migrations, et c’est à réfléchir à ces basculements que nous sommes conviés.
Afin de bien en appréhender les incidences, encore faut-il tourner le dos aux discours néomalthusiens souvent nourris à la fantasmagorie raciste et qui ne cessent de se propager.
Violence aux frontières
La « ruée vers l’Europe » est, à cet égard, un gros mythe. Qu’un habitant de la planète sur quatre soit bientôt un Africain ne représente aucun danger pour quiconque. Après tout, à l’heure actuelle, des 420 millions d’habitants de l’Europe occidentale, à peine 1 % est composé d’Africains subsahariens. Sur les près de 1,3 milliard d’Africains, seulement 29,3 millions vivent à l’étranger. Parmi ces 29,3 millions, 70 % n’ont pris ni le chemin de l’Europe, ni d’aucune autre région du monde. Ils se sont installés dans d’autres pays d’Afrique.
En réalité, en plus d’être relativement peu peuplée au vu de ses 30 millions de km2, l’Afrique émigre peu. Comparée à d’autres ensembles continentaux, la circulation des biens et des personnes y souffre de quantité d’entraves, et c’est à démanteler ces obstacles qu’appellent les temps.
Il est vrai, entre-temps, le coût humain des politiques européennes de contrôle des frontières ne cesse de s’alourdir, accentuant au passage les risques qu’encourent d’éventuels migrants. On ne compte plus le nombre de ceux qui sont morts pendant la traversée. Chaque semaine apporte son lot de récits aussi scabreux les uns que les autres. Il s’agit souvent d’histoires d’hommes, de femmes et d’enfants noyés, déshydratés, intoxiqués ou asphyxiés sur les côtes de la Méditerranée, de l’Egée, de l’Atlantique ou, de plus en plus, dans le désert du Sahara.
La violence aux frontières et par les frontières est devenue l’un des traits marquants de la condition contemporaine. Petit à petit, la lutte contre les migrations dites illégales prend la forme d’une guerre sociale désormais menée à une échelle planétaire. Dirigée davantage contre des classes de populations que contre des individus en particulier, elle combine désormais techniques militaires, policières et sécuritaires et techniques bureaucratico-administratives, libérant au passage des flux d’une violence froide et, de temps à autre, non moins sanglante.
Il suffit, à cet égard, d’observer la vaste machine administrative qui permet chaque année de plonger dans l’illégalité des milliers de gens pourtant légalement établis, le chapelet des expulsions et déportations dans des conditions proprement ahurissantes, l’abolition progressive du droit d’asile et la criminalisation de l’hospitalité.
Que dire, par ailleurs, du déploiement des technologies coloniales de régulation des mouvements migratoires à l’ère électronique, avec leur cortège de violences au quotidien, à l’exemple des interminables contrôles au faciès, des incessantes chasses aux sans-papiers, de maintes humiliations dans les centres de rétention, des yeux hagards et des corps menottés de jeunes Noirs que l’on traîne dans les corridors des commissariats de police, d’où ils sortent avec, qui un œil poché, qui une dent cassée, la mâchoire brisée, le visage défiguré, la foule de migrants auxquels l’on arrache les derniers habits et les dernières couvertures en plein hiver, à qui l’on empêche de s’asseoir sur les bancs publics, à l’approche desquels l’on ferme les robinets d’eau potable ?
Vers de nouveaux exodes
Le siècle ne sera cependant pas seulement celui des entraves aux mobilités, sur fond de crise écologique et d’accélération des vitesses. Il sera aussi caractérisé par une reconfiguration planétaire de l’espace, l’accélération constante du temps et une profonde fracture démographique.
En effet, à l’horizon 2050, deux continents rassembleront près des deux tiers de l’humanité. L’Afrique subsaharienne comptera 2,2 milliards d’habitants, soit 22 % de la population mondiale. A partir de 2060, elle figurera parmi les régions les plus peuplées au monde. Le basculement démographique de l’humanité au profit du monde afro-asiatique sera un fait accompli. La planète sera divisée en un monde de vieillards (Europe, Etats-Unis, Japon et des parties de l’Amérique latine) et un monde émergent, qui abritera les populations les plus jeunes et les plus nombreuses de la planète. Le déclin démographique de l’Europe et de l’Amérique du Nord se poursuivra inexorablement. Les migrations ne s’arrêteront point. Au contraire, la Terre est à la veille de nouveaux exodes.
Le vieillissement accéléré des riches nations du monde représente un événement d’une portée considérable. Il est l’inverse des grands ébranlements provoqués par les excédents démographiques du XIXe siècle, qui débouchèrent sur la colonisation européenne de pans entiers de la Terre. Plus que par le passé, le gouvernement des mobilités humaines sera le moyen par lequel une nouvelle partition du globe se mettra en place.
Une ligne de fracture d’un genre nouveau et d’allure planétaire départagera l’humanité. Elle opposera ceux qui jouiront du droit inconditionnel de circulation et de son corollaire, le droit à la vitesse, et ceux qui, typés pour l’essentiel racialement, seront exclus de la jouissance de ces privilèges. Ceux qui auront fait main basse sur les moyens de production de la vitesse et sur les technologies de la circulation deviendront les nouveaux maîtres du monde. Ceux-là, seuls, pourront décider de qui peut circuler, qui devrait être condamné à l’immobilité et qui ne devrait se déplacer qu’à des conditions de plus en plus draconiennes.
Un immense Bantoustan
Si, dans ce nouvel ordre global de la mobilité, l’Afrique ne prend pas en charge le réaménagement de son économie spatiale, elle sera doublement pénalisée, de l’intérieur et de l’extérieur. Car l’Europe a décidé non seulement de militariser ses frontières, mais de les étendre au loin. Celles-ci ne s’arrêtent plus en Méditerranée. Elles se situent désormais le long des routes fuyantes et des parcours sinueux qu’empruntent les candidats à la migration. Elles se déplacent au fur et à mesure des trajectoires qu’ils suivent. En réalité, c’est le corps de l’Africain, de tout Africain pris individuellement, et de tous les Africains en tant que classe raciale qui constitue désormais la frontière de l’Europe.
Ce nouveau type de corps humain n’est pas seulement le corps-peau et le corps abject du racisme épidermique, celui de la ségrégation. C’est aussi le corps-prison doublé du corps-frontière, celui-là dont la simple apparition dans le champ phénoménal suscite, d’emblée, méfiance, hostilité et agression. L’imaginaire géoracial et géocarcéral qu’avait peaufiné, il n’y a guère longtemps, l’Afrique du Sud à l’époque de l’apartheid ne cesse de s’universaliser.
Davantage encore, l’Europe veut s’arroger le droit de déterminer unilatéralement quel Africain pourra se mouvoir et à quelles conditions, y compris à l’intérieur du continent lui-même. Après l’avoir dépecé en 1884-1885, elle cherche, en ce début du XXIe siècle, à en faire un immense Bantoustan et à en accentuer l’inclusion différentielle dans les circuits de la guerre et du capital, tout en en intensifiant la prédation. C’est donc l’avènement d’un régime inédit de ségrégation planétaire que vise la politique européenne de lutte contre l’immigration. Celle-ci est, à plusieurs égards, l’équivalent de la « politique des races » d’hier. L’Afrique est sa cible principale.
Le gouvernement des mobilités à l’échelle mondiale constitue, au même titre que la crise écologique, l’un des défis majeurs du XXIe siècle. La réactivation des frontières est l’une des réponses de court terme au processus en temps long de repeuplement de la planète. Les frontières, cependant, ne résolvent strictement rien. Elles ne font qu’aggraver les contradictions résultant de la contraction de la planète.
En effet, notre monde est devenu très petit. En cela, il se distingue du monde de la période des « grandes découvertes », du monde colonial des explorations, des conquêtes et des implantations. Il n’est plus extensible à l’infini. C’est un monde fini, traversé de part en part par toutes sortes de flux incontrôlés, voire incontrôlables, des mouvements migratoires, des mouvements de capitaux liés à la financiarisation extrême de nos économies et aux forces d’extraction qui dominent la plupart d’entre elles, notamment au Sud. Il faut ajouter, à tout cela, les flux immatériels portés par l’avènement de la raison électronique et numérique, l’accélération des vitesses, le bouleversement des régimes du temps.
Débalkaniser le continent
Comment, dans ce contexte, penser l’Afrique qui vient ? Si, fuyant leurs pays d’origine, de nombreux Africains se précipitent vers des lieux ou nul ne les attend ni ne veut d’eux, tel est le cas de ressortissants d’autres régions du monde qui, aussi curieux que cela paraisse, espèrent refaire leurs vies en Afrique. Mine de rien, le continent est lui aussi en passe de devenir le centre de gravité d’un cycle nouveau de migrations planétaires. Les Chinois s’installent au cœur de ses grandes métropoles et jusque dans ses bourgades les plus reculées, tandis que des colonies commerçantes africaines s’établissent dans plusieurs mégalopoles d’Asie.
Dubaï, Hongkong, Istanbul, Guangdong et Shanghai prennent le relais des grandes destinations euro-américaines. Des dizaines de milliers d’étudiants s’en vont en Chine, tandis que le Brésil, l’Inde, la Turquie et d’autres puissances émergentes frappent à la porte. Une extraordinaire vernacularisation des formes et des styles est en cours, et elle est en train de transformer les grandes villes africaines en capitales mondiales d’une imagination à la fois baroque, créole et métisse.
Mais afin que les Africains ne soient point transformés en rebuts d’une planète parsemée de miradors, elle doit devenir son centre propre, sa puissance propre, un vaste espace de circulation, un continent-monde. Elle doit parachever le projet de la décolonisation en forgeant, pour elle-même, une nouvelle politique africaine de la mobilité.
Celle-ci n’ira point sans une décolonisation culturelle. Les Africains doivent se purger eux-mêmes du désir d’Europe et apprendre à garder chez eux le meilleur d’eux-mêmes et de leurs gens. Le désir d’Europe ne saurait en effet être ni leur horizon existentiel, ni le dernier mot de leur condition.
Ensuite, la décolonisation territoriale. Rien, historiquement, ne justifie la coupure du continent entre le nord et le sud du désert du Sahara. Davantage encore, aucun Africain ou personne d’origine africaine ne saurait être traité comme un étranger nulle part sur le continent africain. Débalkaniser le continent apparaît donc, de plus en plus, comme l’une des conditions de protection des vies africaines harcelées à travers le monde.
Pour y parvenir, il est urgent de repenser de fond en comble le principe de la glaciation des frontières coloniales adopté par l’Organisation de l’unité africaine [OUA, ancêtre de l’Union africaine] en 1963. En consacrant leur intangibilité, l’on a fait des frontières héritées de la colonisation la pierre juridique qu’exploite l’Europe pour accélérer la « bantoustanisation » du continent.
Des barrières à supprimer
La décolonisation ne sera guère parachevée tant que chaque Africain ne disposera du droit de circuler librement sur l’ensemble du continent. Un premier pas dans cette direction consisterait à généraliser l’octroi de visas à l’arrivée à tout voyageur détenteur d’un passeport africain. Sur le long terme, la libéralisation du droit de résidence doit compléter le droit de libre circulation des personnes.
Le plus grand défi auquel fait face l’Afrique n’est pas d’ordre démographique. Il n’est pas, comme à l’époque coloniale, de fixer les frontières, de restreindre les passages, de contraindre les populations à l’immobilité et à la sédentarité et d’intensifier les attaches locales. Il est d’aménager les circulations et de permettre une intensification des mobilités à l’intérieur du continent.
C’est en intensifiant les mobilités et en développant les interconnexions entre les lieux que seront démantelés les vieux schémas spatiaux et infrastructurels datant de la colonisation. Aujourd’hui, il ne s’agit plus de construire la souveraineté étatique sur la base d’une différence nette entre l’intérieur et l’extérieur. Il s’agit de lever les entraves à la mobilité en abolissant la multitude des postes-frontières, en supprimant les barrières tant physiques que politiques à la fluidification des flux et en débureaucratisant le mouvement. C’est ainsi que l’Afrique fera des gains en vitesse et que les Africains pourront se déplacer à l’intérieur de leur continent au moindre coût.