EXCLUSIF SENEPLUS #Enjeux2019 - Si au Sénégal il faut se féliciter de la promotion prodigieuse des arts plastiques, il convient dans le même temps de s’inquiéter de l’espace dévolu aux arts vivants qui se rétrécit comme peau de chagrin
#Enjeux2019 - Cette contribution a pour seule objectif de poser en termes généraux des axes de réflexion à partir d'un constat : la persistance des déséquilibres imputables à la marginalisation de la culture à une époque où l’on va répétant que le développement durable est le nouveau paradigme auquel il faut accorder toute chose.
L’idée est d’inviter tous les acteurs à une réflexion sur la question urgente, voire vitale suivante : comment, dans un monde "globalisé" relancer la culture avec le concours d'un Etat stratège mais non interventionniste ; par le biais de la revivification des initiatives et entreprises locales ; et grâce à des politiques culturelles élaborées de manière participative et inclusive pour placer la culture au cœur du développement ?
Les politiques culturelles des indépendances à nos jours sont passées d'une sorte d'âge d'or (sous Senghor) à un contexte de crise qui a dégradé sérieusement les possibilités de politiques de promotion de la culture du fait de mesures d'ajustement dont les effets demeurent encore en dépit de la fin officiellement prescrite à ces politiques par les institutions dites "d'aide au développement".
Les sociétés africaines ont toujours été des sociétés créatives, à toutes les périodes de leur histoire mouvementée, y compris à l’époque coloniale et aujourd’hui encore malgré les conséquences durables de politiques d’ajustement internes et externes. Hier comme aujourd’hui ce n’est pas vers ceux qui la vivent et l’alimentent à la base que vont les supports et les subsides nécessaires à la préservation et à la promotion des cultures et des patrimoines. Les structures et les élites (souvent urbaines) qui reçoivent massivement et prioritairement ces moyens ne manquent certes pas de mérite mais elles ne constituent pas une masse critique susceptible de faire prendre sérieusement en compte la culture comme pilier du développement durable. Il suffit pour s’en rendre compte de se poser une question : quelle part de ressources dédiées à la culture revient aux collectivités, surtout celles du monde rural, dans le cadre de la décentralisation et du transfert des compétences ?
- Culture et civilisation -
La vie culturelle dans notre pays se manifeste à travers quatre sphères qui n'ont ni le même âge, ni les mêmes moyens, ni la même efficacité ; sphères parfois hétérogènes, parfois imbriquées : traditions/coutumes ; spiritualité et pratiques religieuses ; programmes gouvernementaux ; créativité et production d'acteurs et d'entreprises (du secteur public et du privé) exploitant les opportunités, favorisées par l’existence de technologies révolutionnaires et d'un cyberespace aux offres prodigieuses. Un premier sujet de réflexion découle de ce constat pour notre époque, pour l’Afrique et notamment pour le Sénégal : la nécessité d’évaluer les rapports entre culture et civilisation.
La culture renvoie au sol, au sang, à la patrie, aux traditions, à la langue, aux legs divers venus des générations successives. Cette définition de la culture peut dans son interprétation donner lieu à la conception de types de conservatismes que tout oppose : conservatisme rétrograde et conservatisme de nécessité. Le premier, - évidence, étriqué et sectaire - est passéiste et producteur de ce qu’Amine Malouf a appelé si justement des " identités meurtrières". Le deuxième, dont le seul souci est de donner la place qui lui revient à l’image et à l'estime de soi, s'avère compatible avec la construction d'une société ouverte et la mise en perspective de ce que l'Afrique et les Africains apportent à la réalisation de l'universel et d’une mondialisation non unilatérale.
La civilisation concerne les progrès accomplis et qui propulsent l’humanité vers plus de savoirs partagés, plus de pouvoir sur la nature, plus d’harmonie dans les cadres sociaux ainsi qu’une grande, mais relative maitrise du temps et de l’espace. Sous ce rapport des déséquilibres anciens et persistants montrent que la crise durable que connaissent nos pays est liée pour une part non négligeable à l’infantilisation et à la marginalisation de la question culturelle, entendue au sens indiqué plus haut, en dépit de toute la rhétorique déployée pour dire le contraire.
Aussi importe-t-il de tenir compte des nombreuses études portant sur cette problématique et qui pour l'essentiel invitent à redéfinir des liens possibles entre politiques de développement, politiques culturelles et politiques de la diversité culturelle. La nécessité de cette redéfinition est apparue avec les débats sur le concept de durabilité. L’avertissement le plus cinglant et le plus instructif est celui- ci : faire de la culture un pilier réel et crédible du développement durable ou prendre le risque de perpétuer les déséquilibres et par voie de conséquence, tous les facteurs d’extraversion, de dépendance et de fractures sociales en contradiction totale avec le concept de développement durable.
Des indépendances à nos jours des offres de politiques culturelles ont été faites par les régimes successifs, avec leurs mérites et leurs limites. Il ne s’agit pas ici de les comparer ou de les évaluer. Ce papier voudrait se contenter de rappeler qu'en une matière comme celle-là, il est bon de remettre l'ouvrage sur le métier en réitérant certaines questions dont les implications politiques, économiques et sociales peuvent être lourdes de dangers.
- Du rôle de l'Etat -
La marche du temps a rendu nécessaire la redéfinition des moyens et du rôle de l’Etat en matière de politique culturelle. Notamment les conditions d’un passage maitrisé d’une situation d’Etat mécène et interventionniste à une ère de partage des responsabilités et des initiatives avec des acteurs culturels relevant de sphères les plus variées. Aussi importe-t-il de toujours bien identifier la vision et de se demander si elle est bonne. Supposons qu’elle se limite à soutenir la création et la créativité afin de laisser aux acteurs culturels individuels, collectifs ou institutionnels la latitude d’entreprendre et de créer librement. Même réduit à ces deux missions ce rôle de l’Etat n’en demeure pas moins essentiel à condition de ne pas perdre de vue les prérogatives et obligations qui s’y attachent.
Dans un souci d'alerte et de construction d'un espace d'échange il est utile, à ce stade, de noter que certains indices incitent à se demander si les objectifs stratégiques ne sont pas brouillés ou insuffisamment définis. Par exemple, si dans notre pays il faut se féliciter de la promotion prodigieuse des arts plastiques, il convient dans le même temps de s’inquiéter de l’espace dévolu aux arts vivants et qui se rétrécit comme peau de chagrin. Pour ne prendre qu’un exemple symbolique et symptomatique : les sorts respectifs du Théâtre National D. Sorano et du Grand Théâtre. Le premier fut très longtemps le cœur palpitant de la vie culturelle sénégalaise. Il est devenu presque aphone et invisible. Le deuxième n’arrive pas à sortir de son état de salle de spectacles de variétés musicales et politiques. On ne lui connait jusqu' à ce jour aucune création qui justifie son statut de théâtre. Le sort du cinéma, de l'édition, de la danse et de quelques autres disciplines ayant la même dignité que ceux qui occupent le haut du pavé mérite aussi de faire l'objet d'une attention soutenue et d'actions promotrices décisives.
Par ailleurs tous les spécialistes de la culture - et Dieu sait si notre pays en regorge dans le département chargé de conduire cette politique et en dehors – savent qu’entre patrimoine et créativité, il y a un rapport indissoluble de complémentarité et de soutien pour ne pas dire dialectique. Le recensement de notre patrimoine culturel fait partie des initiatives et des actions continues entrepris par les pouvoirs publics bien avant notre accès à la souveraineté internationale. Mais comment accroitre ce patrimoine si des leviers essentiels de la créativité accusent un retard aussi considérable que ceux qu'ont connu la Bibliothèque Nationale, la Maison des Archives, la création d'un musée d'arts plastiques, le mobilier national, le mémorial de Gorée, les Manufactures d'Arts décoratifs : une vingtaine d'années pour certains de ces projets.
- Changer de regard et de perspective -
Je voudrais en venir et pour terminer cette brève contribution à ce qui me parait être l’enjeu fondamental et le défi majeur à relever : un changement de regard et de perspective. Impulser la culture non plus par le haut mais à partir des territoires, des collectivités locales et des identités de base bien comprises. Un tel changement de perspective est porteur d’avantages multiples aux plans économique, social et culturel. Il prépare et rend supportable le dialogue ou la confrontation inévitables du local et du global. Il favorise la continuation et l’approfondissement des relations transfrontalières d’échanges et de coopération millénaires entre régions et pays de la sous-région. Il offre au développement durable une assise forte parce qu’assumée et mise en perspectives par les citoyens à la base.
Sous ce rapport il est impératif pour notre pays de prêter une grande attention à la signification et aux possibilités intrinsèques du festival national des arts et de la culture. Faire l’évaluation objective de ses éditions successives en vue de mettre les résultats d’une telle investigation en rapport avec l’esprit qui avait motivé cette initiative en vue de se recentrer sur la stratégie. Les trois piliers retenus pour mettre en œuvre et préserver la dynamique de ce projet novateur et stratégique sont : la diversité, l'initiative locale et la conscience citoyenne d'appartenance à la République et à ses valeurs. C’est la voie royale pour rompre avec la dépendance vis-à-vis de l’extérieur mais aussi en finir avec les aléas de la vie politique qui souvent subordonne la promotion de ce sous-secteur à des priorités et à caprices qui font oublier la construction du bien commun
Etre attentif à l'évolution du monde et y prendre part c'est, par le biais de la créativité et des patrimoines, donner ou restituer à des acteurs libres, confiants en eux- mêmes et fiers de projeter à travers leurs œuvres l'image qu'ils ont d'eux-mêmes, les moyens et la latitude d’entreprendre pour créer des richesses, mais aussi de nouvelles raisons de vivre.
Abdoulaye Elimane Kane est professeur des Universités à la retraite. Membre fondateur du Syndicat Autonome du Supérieur (SAES), il a milité successivement au Rassemblement Démocratique National dirigé alors par le Professeur Cheikh Anta Diop, au Parti pour la Libération du Peuple et au Parti Socialiste. Il a occupé diverses fonctions académiques et administratives : chef du département de philosophie, inspecteur général de philosophie, ministre de la communication et ministre de la culture.
PAR L'ÉDITORIALISTE DE SENEPLUS, SERIGNE SALIOU GUÈYE
L’HYPOCRISIE, NOTRE PREMIÈRE RICHESSE
EXCLUSIF SENEPLUS - Aujourd’hui, tous ces pseudo-guides religieux qui délivrent des messages de paix, maquillant un soutien électoral à Macky, l’ont fait pour Diouf en 2000 et pour Wade en 2012
Serigne Saliou Guèye de SenePlus |
Publication 30/01/2019
Depuis que le Conseil constitutionnel a écarté illégalement 22 des 27 candidatures présentées pour la présidentielle de février 2019, les discours et actes de violence commencent à faire florès. Déjà les scènes de violences ont commencé depuis que les « sages » du Conseil constitutionnel ont éliminé provisoirement Khalifa Sall et Karim Wade le 14 janvier dernier. Les Khalifistes dépités par l’élimination provisoire de leur mentor ont manifesté dans leur fief tout leur mécontentement, la soldatesque d’Ali Ngouille Ndiaye a déversé sa bile sur le siège de Taxawu Dakar en l’arrosant de bombes lacrymogènes. Et cette tension s’est accentuée quand les Juges constitutionnels ont porté l’estocade sur les candidats de Taxawu Dakar et du PDS le 21 janvier dernier. Les Karimistes et Khalifistes ont remis cela. Des bus Dakar Dem Dikk saccagés, des pneus brûlés dans la zone de Grand-Yoff, des affrontements entre policiers et militants de Khalifa et Karim, tel était le triste décor de ce tragique jour où deux citoyens sénégalais jouissant de leurs droits électoraux ont été écartés de la course à la présidentielle, selon le bon vouloir du Prince. Et les violences ont continué le lendemain puisque de jeunes Khalifistes ont été kidnappés dès potron-minet avant d’être embastillés. Et la série des arrestations a continué dans la banlieue de Pikine et de Guédiawaye sous le pseudo-prétexte que des jeunes se réclamant de Karim Wade ont voulu saboter la venue du président Macky Sall à Pikine alors qu’il était dans leurs intentions de lui rappeler que ses promesses faites en banlieue lors des conseils des ministres décentralisés ne se résumaient pas à la construction d’un lieu de culte.
Les batailles pour les libertés enclenchées dans les années 60 et 80 n’ont rien à envier à celle que les Sénégalais mènent aujourd’hui. Pourtant l’alternance de 2012 faisait espérer qu’on n’avancerait plus à reculons pour la conquête de certains droits démocratiques au Sénégal. Et c’est une honte aujourd’hui de voir que la police sénégalaise qui doit être au service des citoyens soit instrumentalisée par une oligarchie dont l’unique objectif est de se maintenir au pouvoir au mépris de tous droits démocratiques. Elle est devenue le bouclier et l’épée du parti au pouvoir imposant une « terreur marron » au lieu d’être au service exclusif des citoyens. La police sénégalaise ne doit pas être un pantin malléable et manipulable par n’importe quel régime en place quand on sait que la République est par essence l’émanation de la volonté de la majorité des citoyens. Son rôle n’est pas de verser dans la surenchère de la répression aveugle et de la violence irrationnelle commanditée, exercée sur des opposants qui ont le droit de jouir des libertés que leur offre la Loi fondamentale. Aujourd’hui, la voie de la répression au détriment du respect des libertés que le ministre Ngouille semble privilégier mène à l’impasse. Il serait peut-être temps, pour la police sénégalaise de relire l’article 12 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen : « La garantie des droits de l'homme et du citoyen nécessite une force publique ; cette force est donc instituée pour l’avantage de tous, et non pour l’utilité particulière de ceux à qui elle est confiée. »
Aujourd’hui, face à l’oppression, la résistance devient un droit, droit consacré d’ailleurs dans la Déclaration universelle des droits de l’homme. Et c’est dans cette optique que s’inscrit la rhétorique guerrière du C-25 le 21 janvier, assimilable à une déclaration de guerre contre les oppresseurs. Dès lors toutes les colombes du pays ont déployé le drapeau blanc pour appeler à la paix et à la sérénité. ONG, société civile, politiciens, ulémas et imams, prêtres et évêques et familles religieuses et autres démocrates pacifistes ont élevé la voix soit pour condamner hypocritement le casus belli C-25, soit pour prier pour une élection calme. Le Sénégal est un pays dont la première richesse est l’hypocrisie. Ainsi la démagogie et la tartufferie ont encore de beaux jours devant elles.
Pourquoi soudain, de pseudo-pontifes se lèvent simultanément pour conjurer la paix alors qu’ils ont leur très grande part de responsabilité dans ce qui trouble ce pays ? Que vaut la parole des imams et ulémas qui ont fait allégeance au souverain Sall et le soutiennent pour sa réélection ? A l’occasion de l’atelier de partage du bilan de la mise en œuvre du PSE tenu le mardi 27 novembre 2018 à Fatick, voilà ce que les imams et ulémas de Bennoo Bokk Yaakaar disaient sans vergogne : « Macky Sall est un homme sociable qui a beaucoup fait pour les foyers religieux. Ses réalisations sont visibles partout. Nous sommes reconnaissants pour tout ce qu’il a fait pour les différents foyers religieux du pays. C’est son devoir, mais il pouvait faire comme ses prédécesseurs. Macky Sall est le président des imams du Sénégal… Le Sénégal ne cesse de progresser. Nous prions pour Macky Sall afin qu’il sorte victorieux de la présidentielle de 2019 et on a bon espoir qu’il gagnera, car il n’a pas d’égal sur la liste des prétendants au fauteuil présidentiel…Macky Sall mérite d’être réélu et il a notre soutien, car le monde rural est bien pris en compte dans sa politique. On n’entend plus parler de bons impayés et, malgré les difficultés, les productions des paysans sont écoulées. En plus, les bourses sociales font énormément de biens aux bénéficiaires ».
Discours ne peut être plus faux que celui des imams de Macky. Dire que le monde rural, qui peine à écouler ses stocks d’arachides, est pris en compte par le président dans sa politique relève simplement de l’ignorance ou de la pure démagogie. Dire qu’il n’y a plus de bons impayés prouve que ces imams qui roulent carrosse et se calfeutrent dans des mosquées ou centres islamiques douillettement climatisés, sont loin de la chaude réalité du monde rural. Allez demander aux paysans du Saloum et du Ndoucoumane qui disent que ce sont plus des bons mais des carnets entiers de bons qui sont impayés. Certes ces imams peuvent jouer de la cithare pour plaire au Prince mais il est de leur devoir de dire la vérité en méditant sur la sourate 9 « le Repentir », verset 119 qui dit : « Ô vous qui croyez ! Craignez Dieu et soyez avec les véridiques. » Mais la plaie du Sénégal, c’est de consacrer la flagornerie mensongère plutôt que de dire la vérité nue à sa Majesté.
Où étaient ces imams quand le régime actuel zigouillait les étudiants Bassirou Faye et Fallou Sène ? Où étaient ces imams tartuffes quand le rythme endiablé des tams-tams accompagné de « Mbarass » noyait la « salat » lors de l’inauguration de la mosquée de Guédiawaye ? Satan devait être ravi ce jour-là pour avoir ravi la vedette aux hommes de Dieu. N’est-ce pas ces mêmes imams, ulémas et familles religieuses qui ont été reçus un vendredi 19 aout 2011 au palais de la République par l’alors président Abdoulaye Wade pour partager un « Ndogou » sucré de 50 Millions FCFA ? Où était ces soi-disant hommes de Dieu quand le pouvoir qu’ils soutiennent aujourd’hui exerçait toute une violence politico-juridique sur Khalifa Sall et Karim Wade au point de leur priver de libertés de mouvement et d’exercice d’un droit civique et politique fondamental qui est celui de se présenter à une compétition électorale démocratique ? Ont-ils une seule fois dénoncé la série des arrestations dont le PDS est victime depuis 2012 ? Ces religieux combattent-ils le « bon combat » comme le disait saint Paul ? Que nenni ! Ils ont opté pour le mauvais qui est celui de tourner toujours le dos à la masse populaire en souffrance, laquelle n’a pas le privilège de bénéficier des libéralités présidentielles. « La paix est œuvre de justice », dit le prophète Isaïe, et il est normal, quand on refuse ce combat pour la justice, que cette paix factice nous saute en pleine figure. Il est avéré qu’au Sénégal, on ne veut pas la paix qu’on fait, qu’on construit, mais celle qu’on nous fiche. Peu importe au prix de quelles dévastations, de dégâts collatéraux et de conséquences désastreuses. La « nuée qui porte l’orage » dont parle Jean Jaurès plane au-dessus du Sénégal en dépit de la politique de l’autruche que mènent Ismaïla Madior Fall et Oumar Youm.
C’est ici le lieu de saluer l’Abbé Thiaw qui disait dans l’émission Jarkarlo du 25 janvier que « l’Eglise préfère toujours se mettre du côté du peuple ». Il en a toujours été ainsi de l’Eglise catholique. Le cardinal Hyacinthe Thiandoum s’est battu contre le président Léopold Sédar Senghor quand il a arbitrairement incarcéré le président du Conseil gouvernemental Mamadou Dia. Il a été aussi un acteur central dans l’alternance de 2000 puisqu’il a exhorté Moustapha Niasse à créé ce parti AFP qui atrophia le PS d’Abdou Diouf. Lors du vote de la loi sur le parrainage, seul le chef de l’Eglise sénégalaise Benjamin Ndiaye avait remis en cause une telle initiative liberticide au moment où les guides religieux musulmans le cautionnaient par leur lâche mutisme. En 2011, lors de la manifestation du 23 juin, seuls les guides des familles de Léona Niassène et de Serigne Abass Sall avaient osé manifestement demander au président de la République de surseoir à sa candidature, laquelle était à l’origine de toute la flambée de violence mortifère. Tous les autres marabouts avaient demandé en vain à leurs talibés de ne pas participer au rassemblement des forces citoyennes et démocratiques qui combattaient la dévolution monarchique. Mais ce n’était pas une affaire de talibés mais de citoyens épris de justice et de démocratie.
Aujourd’hui, tous ces pseudo-guides religieux qui délivrent des messages de paix, maquillant un soutien électoral à Macky l’ont fait pour Abdou Diouf en 2000 et pour Abdoulaye Wade en 2012. Leurs prières, incantations et divinations sont inopérantes devant la volonté de changement du peuple.
Si l’on fouille dans les sorties faites par Moustapha Cissé sur les tournées pastefiennes aux USA, en Europe, dans le nord et le centre du Sénégal, nous ne buttons sur une seule déclaration qui fasse un rapprochement entre Sonko et "les rebelles"
Mes parents avaient été au meeting de Ousmane SONKO en Casamance. Et, ne serait-ce que pour cet acte, ils sont « rebelles». Quiconque traite mes parents de la sorte est un écervelé congénital.
Depuis presque 6 mois, les sénégalais assistent à un déchaînement anti-SONKO qui prend une allure d’hallali. Haro sur «ce boy arrogant, ce ‘domikharam’, ce nullard spécialiste du plagiat, ce menteur, ce terroriste membre de Daesh, ce salafiste dangereux financé par Yaya Jammeh». Même des personnalités exagérément qualifiées de «guide religieux» se sont mêlés à cette scène puérile en se joignant au peloton des soldats frais émoulus de la piètre école des attaques «ad personam». En stage hier 28/01, un de ces élèves, Moustapha Cissé l’appelle-t-on, très fidèle à sa dégueulasse tradition qui consiste à réagir instantanément et avec insolence au moindre fait divers, s’est illustré en beuglant ceci : «SONKO est allé en Casamance et n’a rassemblé que des rebelles…». Figurez-vous que mon père, mes oncles et tantes étaient parmi les rassemblés.
Éclaboussant tout casamançais et, par extension, tout sénégalais honnête et responsable, ces puantes vomissures d’un sexagénaire qui semble radoter avant l’âge surviennent dans un contexte politique assez tendu entre l’opposition et la mouvance présidentielle, et où le nom SONKO est démesurément employé et prononcé tel l’opus d’un nouveau morceau à la mode.
Drôle aux yeux de certains et méchant pour d’autres, cette cascade de calomnies assorties d’un jeu de tenis «am Sonko andil Sonko», est provoquée par la montée fulgurante de ce «boy», laquelle trouve son explication dans la suivante série d’actions exécutées avec élégance et doigté : le 16 septembre il présente, à la place de la nation, son livre vision intitulé «Solution». Ce qui a créé un tollé chez ses thuriféraires, tant l’évènement a connu un succès sans pareil. Du 8 au 15 novembre, il se rend en Amérique du nord où il a eu à faire un tabac. Du 20 novembre au 2 décembre il se rend en Europe précisément en Espagne, France, Belgique, Suisse et Italie où il a été accueilli comme un Empereur. Le 19 janvier il fait un remake à la place de la nation et obtient de nouveau un franc succès. Enfin, le 26 janvier il se rend en Casamance et fait exploser la capitale du sud au grand dam de ses adversaires / ennemis las de serrer les fesses.
Si l’on fouille dans les sorties faites par Moustapha Cissé sur les tournées pastefiennes aux USA, en Europe, dans le nord et le centre du Sénégal, nous ne buttons sur une seule déclaration qui fasse un rapprochement entre le leader de Pastef et «les rebelles». Ce n’est que quand SONKO s’est rendu en Casamance, que Moustapha a éprouvé un malin plaisir d’établir un tel rapprochement. En embouchant cette trompette de provocation malsaine, cet individu né, aux dires de Serigne Modou Bousso Dieng, d’un «père soûlard et d’une femme…(j’ai du respect pour les femmes)», avait sans doute un point de mire bien choisi : assimiler les casamançais à des «rebelles», et par ricochet, théâtraliser la fâcheuse et tumultueuse parenthèse de l’histoire vécue/subie par les populations de Casamance durant les quatre dernières décennies.
Nous le savons tous, cette attitude symptomatique de décrépitude mentale n’est pas une nouveauté dans ce pays. Elle est, en effet, l’apanage d’un certain nombre d’imbéciles patentés avec qui, malheureusement, il nous est échu de partager la nation. Et, c’est justement pour cette nation, son équilibre, que je ne peux m’abstenir de rappeler à mes concitoyens que le sécessionnisme de la Casamance sur lequel nous échangeons tous les jours et dont le manque de sérieux dans le traitement a foncièrement ralenti de développement de ce pays, trouve ses racines dans une concaténation de pantalonnades à la MoustaphaCisséLo.
Ces irresponsabilités, disons-le, avaient complètement fini d’envenimer, il y a deux décennies et au grand malheur de sénégalais, les relations entre les populations de notre nation qui, d’un côté, sont appelées «nordistes» et, de l’autre, «sudistes» ; ces deux appellations ayant de part et d’autre une très forte connotation négative au-delà du sens géographique des termes. Nombreux, très nombreux ont été les sénégalais à avoir payé les frais de ce désastre. Nombreux sont les sénégalais qui, jusqu’à aujourd’hui, continuent de pleurer leurs parents innocents emportés par cette rage. Nombreux sont les sénégalais qui, jusqu’à présent, continuent de panser leurs plaies tout en contenant, au plus profond de leur cœur, le barbotage de l’esprit de la loi du talion.
Dans un pays aux antécédents si sensibles, englobant une région aussi meurtrie que la Casamance longtemps isolée du reste du pays par la fumisterie des frontières héritées du colon, allons-nous permettre, par notre silence, que des écervelés congénitaux nous ramènent aux affres de la haine et de la violence ?
En parlant de silence, j’en viens à l’attitude honteuse et incompréhensible de certains politiciens de Casamance, surtout ceux de la mouvance présidentielle. Vous avez tous des parents victimes de notre triste histoire précédemment rappelée ! Vous savez très bien que la pestilence des propos tenus par Moustapha asphyxie tous les casamançais, en particulier, et les sénégalais en général ! Vous aimez bien les discours de victimisation dans vos campagnes au niveau local ou lorsque vous avez des déboires avec le pouvoir central ! Vous êtes victime du deux poids deux mesures : c’est-à-dire, «tu es un ange si tu es de mon côté ; mais un «rebelle» voir un démon si tu t’opposes à moi». Certains parmi vous, les férus de la poésie infantile, aiment bien s’autoproclamer «propriétaire de Casamance» ! Je vous le concède, sans peine. Mais, de quoi votre casamancité tient-elle si lorsque vos populations sont insultées vous rasez les murs? En quoi êtes-vous nos représentants ? Réfléchissez-y et ressaisissez-vous pour mettre un terme à cette dissonance cognitive qui n’a fait que trop durer. Si vous persistez dans cette léthargie, alors vous serez en train de nous confirmer que vous avez des préoccupations autres que les nôtres. Et là, nous nous verrons dans l’obligation de faire usage de l’immense pouvoir que nous avons sur vous : nos cartes d’électeurs.
Aux politiques d’autres contrées du pays, j’exhorte à être plus responsables dans vos déclarations sur la Casamance. Dites tout ce que vous voulez sur la personne de SONKO. C’est un candidat comme tous les autres. Insultez sa personne si le débat qu’il impose vous dépasse où vous donne des vertiges et que vous ne pouvez pas vous taire. Par contre, si vous êtes de bonne foi, critiquez sa politique, ses idéaux : il en va de votre aura et étoffe politiques. Mais, évitez de faire forniquer la politique avec votre mauvaise foi. Mettez la Casamance hors de vos sottises et fantasmes. Ça suffit la pollution de nos cœurs. Arrêtez dès maintenant les écarts de langage qui, sans jouer au Cassandres, portent tous les signaux avant-coureurs de trouble sociale.
Vive Ziguinchor !
Vive la Casamance dans un Sénégal fort et uni !
PS.
Coup de chapeau au Dr. Ibrahima MENDY, un lieutenant du Président de m’APR à Ziguinchor, qui lui a au moins réagi à la grossièreté de Moustapha Lo.
Coup de chapeau à Binta GOUDIABY, toujours présente auprès des ses populations.