Après cinq matchs nuls d’affilée, Pikine a remporté le choc des promus contre Gorée (1- 0). Un succès qui permet aux hommes de Djiby de reprendre la première place à Teungueth FC, accroché par Génération Foot (2-2), dans un derby à rebondissements.
Bonne nouvelle pour les amateurs de lutte. Après la victoire de Balla Gaye 2 sur Modou Lô, le promoteur Dièye est sur le point de finaliser un autre combat populaire, passionnant et décisif. Ama Baldé / Siteu est presque dans sa poche, sauf revirement de situation.
PAR MAMADOU MAO WANE
LE SILENCE FACE AU DRAME DES ENFANTS MENDIANTS
EXCLUSIF SENEPLUS #Enjeux2019 - Mettre définitivement fin à cette forme esclavagiste d’exploitation d’enfants devient un impératif de société, une exigence politique prioritaire
#Enjeux2019 - Au Sénégal, l’élection présidentielle constitue le processus majeur de renouvellement des offres politiques sous forme de programmes ou de propositions de gouvernance institutionnelle, économique et sociale.
Pour l’élection présidentielle de février 2019, ce processus a débuté avec une première phase de campagne de collecte de parrainages pour la validation des candidatures.
Durant cette phase, les offres de gouvernance pour les cinq (5) ans à venir ont été déclinées par tous les prétendants à la magistrature suprême de notre pays. C’est ainsi que le candidat sortant, le président de la République, et la quasi-totalité des compétiteurs de la sphère de l’opposition ont abordé différentes problématiques de préoccupation publique, esquissé des solutions et pris des engagements.
La grande absente dans l’agenda de ces prétendants à la charge suprême de gouvernance de notre pays est la question de la mendicité et la maltraitance des enfants.
Pourtant, ces enfants victimes d’un système esclavagiste se comptent par dizaines de milliers, voire des centaines de milliers, dont la grande majorité provient de l’intérieur du pays et de la sous-région. C’est un phénomène récurrent de traite d’enfants à des fins d’exploitation de leur mendicité qui se développe continuellement et se manifeste par une présence massive de ces enfants dans les rues de la quasi-totalité des villes du Sénégal.
Le principal traceur de l’origine de ce phénomène réside dans les pratiques de confiage d’enfants talibés (apprenants dans les daaras ou écoles coraniques traditionnelles) à des maîtres coraniques (serigne daara) pour leur éducation religieuse.
La migration de ces enfants et de leurs maîtres coraniques vers les centres urbains où existe un véritable marché d’offres d’aumônes et d’offrandes mystiques constitue le second traceur.
Pour mesurer l’ampleur de ce phénomène et mieux comprendre ses causes et principaux déterminants, diverses études ont été conduites par des institutions internationales, Organisations Non Gouvernementales (ONG) et institutions publiques. A titre de références, nous pouvons citer :
L’étude sur les enfants mendiants dans la région de Dakar, réalisée en 2007 par l’UNICEF, la Banque Mondiale et le Bureau International du Travail (BIT). Cette étude indiquait que le phénomène toucherait environ 7 600 enfants. La grande majorité de ces enfants (90%) serait constituée de talibés et 95% proviendraient d’autres régions du Sénégal ou des pays limitrophes (Guinée-Bissau : 30%). Le non-talibé (30% des 7 600 enfants) serait plutôt originaire du Mali ;
L’étude, réalisée en 2008 par l’ONG Enda, renseignait sur l’existence au Sénégal de plus de 100 000 enfants impliqués dans l’industrie de la mendicité et cela correspondrait à un chiffre d’affaires dépassant les 2,5 milliards de FCFA par an, dont plus des 2/3 sont reversés aux supposés marabouts ou autres ;
L’étude, réalisée en 2010, à la fois au Sénégal et en Guinée Bissau par Human Rights Watch (HRW), sur la problématique de la mendicité des enfants talibés, révélait qu’au moins 50 000 enfants, fréquentant des daaras au Sénégal, étaient soumis à des conditions qui s’apparentent à de l’esclavage ;
L’étude de la Banque Mondiale, réalisée en 2010, sur la mobilité des familles et la vulnérabilité des enfants dénombrait 70 000 enfants migrants en compagnie de leurs maîtres coraniques ;
La cartographie des écoles coraniques de la région de Dakar, réalisée en 2013 par la Cellule Nationale de Lutte contre la Traite des Personnes en particulier des femmes et des enfants (CNLTP/Ministère de la Justice), renseignait sur l’existence, dans la région de Dakar, de 30 160 talibés mendiants sur un effectif global de 54 837 pensionnaires des 1 006 daaras recensés. Sur ce nombre, 91% font entre 1 heure et 5 heures de mendicité par jour dans la rue : 51% des apports de la mendicité des enfants se font en argent.
Les enfants soumis à la servitude de mendicité forcée subissent toutes formes de maltraitance et d’abus : obligation de rapporter chaque jour une certaine somme d’argent fixée d’avance par le maître coranique (en moyenne 500 FCFA par enfant), absence de soins parentaux, châtiments corporels et parfois risques d’être enchaînés aux pieds avec un mécanisme de cadenas, sévices sexuels, fréquentes intoxications alimentaires, conditions de séjour extrêmement précaires dans des baraques délabrées ou maisons abandonnées, environnement permanent d’insécurité occasionnant des morts de talibés brûlés vifs (incendie en mars 2013 d’un daara de fortune à la rue 19X6 à la médina avec neuf jeunes talibés morts brûlés vifs et calcinés).
La mendicité forcée et la maltraitance des enfants est à la base de graves violations cumulées des droits de l’enfant au Sénégal et l’ensemble de la société sénégalaise est interpellée face à ce drame qui se perpétue depuis plusieurs générations d’enfants victimes. Mettre définitivement fin à cette forme esclavagiste d’exploitation d’enfants devient un impératif de société, une exigence politique prioritaire.
Ce défi est bien possible à relever, d’autant plus que le Sénégal a ratifié la quasi-totalité des conventions et chartes internationales de protection et promotion des droits de l’enfant. En plus, le pays dispose d’une législation nationale renforcée avec l’adoption de la loi n°2005-06 du 10 mai 2005 relative à la lutte contre la traite des personnes et pratiques assimilées et à la protection des victimes.
Dans le processus de réponse nationale, je rappellerai pour mémoire :
la tenue, en juillet 1977, du premier conseil interministériel consacré à la lutte contre la mendicité des enfants ;
l’organisation, dans la foulée de ce conseil interministériel, par l’Institut Islamique de Dakar d’un séminaire national sur la mendicité des enfants de certains daaras, avec la participation de diverses associations islamiques, de maîtres coraniques de daaras de grande renommée et des représentants de certaines associations laïques ;
l’Instruction d’octobre 1978 du Premier ministre demandant au ministre de l’Action Sociale de prendre toutes dispositions utiles pour lutter contre la mendicité des talibés avec le concours de la police et de la justice, d’ouvrir des centres d’accueil pour les talibés mendiants et d’appuyer les daaras sur les plans alimentaire et sanitaire ;
les tenues en octobre 2006 du premier conseil présidentiel sur les enfants de la rue, des conseils interministériels du 24 août 2010 et du 13 mars 2013 ;
l’instruction du président de la République, lors du conseil des ministres du 22 juin 2016, de procéder au retrait intégral des enfants de la rue.
Malgré tous ces processus et initiatives publics, développés depuis le régime de Senghor et soutenus par la société civile et des partenaires techniques et financiers, la présence des enfants dans les rues à des fins d’exploitation de leur mendicité ne cesse de croître.
Le portage politique de la solution durable s’impose. C’est pourquoi, saisissant l’opportunité que constitue l’élection présidentielle de février 2019, je lance un appel à chaque candidat pour qu’il s’engage à mettre fin à la mendicité et la maltraitance des enfants dans notre pays.
Nous ne pouvons plus attendre et chaque jour qui passe est un jour de trop.
Mamadou Mao Wane est Sociologue. Editorialiste à SenePlus, il est l'ancien directeur du Daara de Malika et ancien expert, spécialiste de la protection de l'enfant à l'UNICEF.
VIDEO
LES COMBATS DE LUTTE, REPAIRE DE SUPPORTEURS VIOLENTS
Des agressions, des bagarres ont régulièrement lieu aux abords des stades où sont organisés les combats de lutte - À l’origine de ces violences : des jeunes appartenant souvent à des fan-clubs - Un Dakarois tire la sonnette d’alarme
L'Observateur de France 24 |
Chloé Lauvergnier |
Publication 27/01/2019
Plusieurs vidéos ont été publiées sur les réseaux sociaux entre le 13 et le 15 janvier. Elles ont été prises le 13 janvier aux abords du stade Léopold Sédar Senghor, à Dakar, en marge d’un combat entre les lutteurs Modou Lô et Balla Gaye 2.
Dans la vidéo ci-dessous, on voit ainsi de nombreux jeunes qui courent dans la rue, certains armés de bâtons. Puis certains s’en prennent à un homme tombé au sol, qu’ils frappent à coups de bâton et de pied (0'20).
Abdoulahi Ndour habite dans le quartier Parcelles, situé au nord du stade Léopold Sédar Senghor.
"Ces vidéos ont été prises dans mon quartier : ce genre d’agressions se produit très régulièrement aux abords du stade, avant ou après les grands combats de lutte, en plein jour. J’ai déjà été témoin de scènes similaires : une fois, j’ai vu un groupe de personnes, en bloc, qui criaient, puis certaines se sont détachées pour aller arracher des téléphones portables, avec des couteaux.
La plupart des personnes qui commettent ces agressions sont des jeunes ayant entre 13 et 20 ans. Certains sont de simples délinquants, mais d’autres sont aussi des supporteurs. Parfois, il y a même des bagarres entre groupes de supporteurs.
Au Sénégal, beaucoup de jeunes sont au chômage, ce qui peut expliquer pourquoi certains sombrent dans la délinquance. Lorsqu’il y a des combats de lutte, cela draine beaucoup de monde, donc c’est une opportunité pour eux… Du coup, les gens qui habitent près du stade évitent de sortir lorsqu’un combat de lutte est organisé : il y a une certaine psychose.
Ce problème n’est pas nouveau, mais il n’a jamais été éradiqué, ce qu’on déplore. Même si la police est présente aux abords du stade, elle a des moyens limités. J’aimerais que le gouvernement apporte une solution."
"Le public qui vient assister aux combats de lutte a évolué"
"Contacté par la rédaction des Observateurs de France 24, Thierno Kâ, vice-président du Comité national de gestion de la lutte (l’équivalent d’une fédération), reconnaît l’existence de ces problèmes, notamment aux abords du stade Léopold Sédar Senghor ou encore de l’Arène nationale (où sont organisés les principaux combats de lutte) :
Cela fait une petite dizaine d’années que l’on constate ces violences. Selon moi, c’est lié au fait que le public qui vient assister aux combats de lutte a évolué. Avant, il y avait seulement de vrais amateurs de lutte, qui venaient au stade toute l’après-midi, pour assister à tous les combats.
Mais désormais, il y a aussi les fan-clubs : ce sont des structures rassemblant des gens qui apportent leur soutien à tel ou tel lutteur. [Parfois, les fan-clubs regroupent les habitants d’un même quartier, NDLR.] Parmi eux, certains ne sont pas de véritables amateurs de lutte : par exemple, ils sortent du stade dès que leur champion a terminé son combat. Ou alors ils n’entrent même pas à l’intérieur du stade lorsque des combats ont lieu. Certains sont tout simplement de petits crétins, qui profitent des mouvements de foule pour commettre des agressions ou des vols.
À l’intérieur des stades, il n’y a quasiment plus de violences, mais c’est à l’extérieur que ça se passe. Après, c’est un problème de sécurité publique, qui relève de la police : il faudrait que le dispositif policier soit revu pour empêcher ces débordements."
Pour lutter contre ces débordements, un collectif regroupant des amateurs de lutte, appelé "Groupe Bakh ", a été créé en 2010. "L’objectif est d’apaiser les tensions, en sensibilisant la jeunesse de façon générale, les fan-clubs de lutteurs, les clubs de lutte… Par exemple, on a récemment organisé un tournoi de football inter-quartiers pour créer des liens d’amitié entre les jeunes ", explique son président, Massamba Diéye.
Le vice-président du Comité national de gestion de la lutte souligne toutefois que ces violences ne sont pas l’apanage de son sport, puisque des débordements se produisent également lors des navétanes, un tournoi de football amateur inter-quartiers, qui se déroule chaque année dans tout le Sénégal, comme le reconnaît également notre Observateur Abdoulahi Ndour. Plusieurs habitants de Dakar nous ont cependant confié avoir le sentiment que ces agressions avaient surtout lieu en marge des combats de lutte, puisqu’ils attirent une foule plus importante que les matches de football.
PAR KAKO NUBUKPO
LA ZONE FRANC ET FCFA MÉRITENT UN SÉRIEUX DÉPOUSSIÉRAGE
Les Africains seraient bien naïfs de penser qu’ils trouveront dans l’Italie de la ligue lombarde et du mouvement Cinq Etoiles, d’ardents défenseurs de la prospérité africaine
Le Monde Afrique |
Kako Nubukpo |
Publication 27/01/2019
L’Italie ne s’est visiblement jamais totalement remise de sa défaite lors de la bataille d’Adoua contre l’Ethiopie qui solda pour partie la fin de son aventure coloniale en Afrique et marqua assurément son déclin sur la scène internationale. Elle en a gardé une rancune et une envie tenaces à l’endroit de la France et de la Grande Bretagne qui en l’espèce ont connu des destinées plus prospères. Preuve nous en a été donnée ces jours derniers, par le feu nourri de déclarations de Luigi di Maio et Matteo Salvani, tous deux vice-présidents du Conseil italien, qui tour à tour ont dénoncé la perpétuation de la colonisation française en Afrique, avec à l’appui de leur démonstration, la question du Franc CFA.
La sujétion coloniale
Le Franc CFA est une monnaie qui pose problème : héritage colonial et post-colonial, sa compatibilité avec le processus d’émergence des 14 économies africaines qui l’utilisent, est une vraie question économique. Sa persistance, presque 80 ans après sa création le 26 décembre 1945, renvoie à la question sensible de la souveraineté politique des Etats africains. Les mouvements sociaux qu’il déclenche depuis quelques années posent à n’en point douter, la question de la demande d’émancipation des jeunes, pris en étau entre le chômage massif dont ils sont les premières victimes et l’absence d’espace d’expressions politique et sociétale.
Sur le premier point, l’économie du Franc CFA est restée celle de la sujétion coloniale : c’est une monnaie qui maintient l’insertion primaire des économies de la zone Franc au sein du commerce international, dans la mesure où son utilisation n’a pas permis d’amorcer la transformation sur place de matières premières et encore moins les échanges entre économies de la zone Franc. Elle obère également la compétitivité-prix à l’export des économies qui l’utilisent. Elle incite enfin à la double répression financière et monétaire, du fait de la primauté de la défense de sa parité fixe avec l’Euro au détriment du financement des économies de la zone Franc. Or ces économies ont un besoin vital de financement à des taux d’intérêt faibles, des activités génératrices de revenus et d’emplois pour leurs populations dont la taille double tous les quarts de siècle.
Sur la question de la souveraineté politique, il paraît étrange que les banques centrales indépendantes de leurs Etats respectifs au sein de la zone Franc que sont la BCEAO (Afrique de l’ouest) et BEAC (Afrique centrale) ne tentent pas de nouer une coopération directe avec leur consœur de Frankfort, la Banque centrale Européenne (BCE), toute aussi indépendante et surtout émettrice de l’Euro, auquel le Franc CFA est rattaché. Au contraire, les banques centrales de la zone Franc passent par le Trésor public français -donc le ministère des Finances d’un Etat membre de la zone Euro- pour obtenir la garantie de la parité fixe entre le Franc CFA et l’Euro, en contrepartie du dépôt auprès du Trésor public français, d’au moins 50 % des réserves de change de la zone Franc. Ce dépôt alimente toutes sortes de fantasmes relatifs à l’exploitation par Paris des Etats africains, brèche dans laquelle les deux vice-présidents du Conseil italien ont eu beau jeu de s’engouffrer. Dans les faits, ce dépôt est rémunéré (au taux de la facilité marginale de la BCE) et son montant (peu ou prou 15 milliards d’euros) ne représente que 0,5 % de la dette publique française. Il peut d’ailleurs en être difficilement autrement car le produit intérieur brut (PIB) de l’ensemble de la zone Franc ne représente que 7 % du PIB français, pour une population deux fois et demi plus importante.
Dans les usines de la Banque de France
Par ailleurs, la fabrication des billets et pièces CFA reste, plus d’un demi-siècle après les indépendances, le monopole de la France et des usines de la Banque de France. Au-delà de la simple relation de sous-traitance technique revendiquée régulièrement par les banquiers centraux de la zone Franc, il est difficile de ne pas lire dans l’inertie de cet arrangement contractuel, une sous-traitance de la souveraineté monétaire des Etats de la zone Franc.
C’est d’ailleurs sur ce dernier point que les mouvements sociaux anti franc CFA prennent régulièrement appui pour dénoncer la mainmise de la France sur les Etats africains anciennement colonisés. Ces mouvements peuvent être regroupés en deux catégories : les premiers, issus de la diaspora africaine en France, sont clairement dans une revendication de souveraineté panafricaine transcendant les situations spécifiques à chacun des Etats de la zone Franc. Leurs revendications sont d’autant plus paradoxales que les membres de ces mouvements n’utilisent pas au quotidien le Franc CFA dans leurs transactions, mais plutôt l’Euro. Leurs revendications peuvent traduire un mal-être identitaire et une volonté de régler des comptes à l’égard d’un passé qui ne passe pas : la colonisation à l’origine des premiers flux migratoires. Les seconds mouvements, installés plutôt sur le continent africain, sont étroitement liés à la lutte pour la démocratisation des régimes politiques africains (Y-en-a-marre, le balai citoyen, etc). Leur critique du Franc CFA est directement reliée à la mauvaise gouvernance économique des dirigeants africains. Leur critique est souvent plutôt plus modérée, due à la peur de l’absence d’une alternative crédible au Franc CFA.
Nous sommes ici au cœur du débat : le Franc CFA apparaît comme une concession faite par les Etats de la zone Franc à Paris, du fait de l’incapacité perçue ou réelle des dirigeants de cette zone à piloter une monnaie commune. Plus grave, sa perpétuation peut également être perçue comme une servitude volontaire des dirigeants africains trouvant dans les caractéristiques de cet arrangement institutionnel (fixité de la parité, totale garantie de la convertibilité entre Franc CFA et Euro, libre circulation des capitaux entre les zones Franc et Euro), un moyen commode de ne pas être proactif dans la gouvernance monétaire de leurs Etats, et un véhicule permettant d’accumuler des richesses hors du continent africain.
En contrepartie, à travers ce « paternalisme monétaire », la France gagnerait en prestige, une illustration à la face du monde du maintien de l’empire, un pré carré au sein duquel son influence et son rayonnement resteraient entiers, à l’heure où la concurrence des pays émergents (Chine, Inde, Russie, Brésil) se fait plus vive que jamais. N’oublions pas la stabilité offerte par cette zone aux entreprises de la zone Euro et les facilités de rapatriement des bénéfices permises par le fonctionnement même de ladite zone.
La zone Franc et le Franc CFA méritent un sérieux dépoussiérage, eu égard à la dynamique démographique de l’Afrique qui rend plus urgente que jamais la nécessité de créer des emplois massifs sur le continent. En outre, la perpétuation du modèle de prédation minière qu’ils encouragent, du fait de l’impératif pour les Etats d’extraire et d’exporter des matières premières pourvoyeuses de réserves de change permettant de garantir la parité fixe entre le Franc CFA et l’Euro, engendre un défi écologique majeur dans les pays de la zone. Enfin, les arrangements institutionnels qui les portent minorent les aspects symboliques de la monnaie, de toute monnaie.
Les migrants pas tous de la zone franc
On est donc loin des raccourcis faciles effectués par les dirigeants italiens entre le Franc CFA et les migrants africains qui tentent de rejoindre l’Europe. En outre, les migrants ne sont pas tous originaires de la zone franc, c’est là un raccourci qui occulte les enjeux du débat. Le démographe français François Héran a déjà eu à de nombreuses reprises, l’occasion de mettre en évidence l’inanité du discours millénariste du politiste Stephen Smith qui a intitulé en sous-titre de son ouvrage « la ruée vers l’Europe », « la jeune Afrique à l’assaut de la vieille Europe ».
Force est cependant de reconnaître que les promoteurs du « cercle de la raison », les chercheurs et citoyens « réformateurs » en Afrique comme en France, butent depuis de nombreuses années sur le mur du silence des dirigeants africains et français sur la question du Franc CFA. Face au déni d’un problème réel, les populistes italiens ont beau jeu d’emprunter le boulevard qui leur a été ouvert, engendrant en retour des protestations aussi vives qu’impuissantes des autorités françaises. L’Italie, troisième économie de la zone Euro, est copropriétaire de l’Euro et donc pleinement légitime à s’inscrire dans le débat relatif à une monnaie qui est rattachée à l’Euro. On peut juste regretter la manière d’entrer dans ce débat. Cependant les Africains seraient bien naïfs de penser qu’ils trouveront dans l’Italie de la ligue lombarde et du mouvement Cinq Etoiles, d’ardents défenseurs de la prospérité africaine. L’Afrique est ici juste instrumentalisée dans le conflit médiatique larvé entre l’Italie et la France autour de la question des migrants et de l’application idoine des accords de Dublin.
Un proverbe africain dit : « quand deux éléphants se battent, c’est l’herbe qui souffre ». Espérons que l’herbe Afrique ne souffrira pas trop, avec ou sans Franc CFA.
Kako Nubukpo est professeur Titulaire de Sciences Economiques à l’université de Lomé (Togo), directeur de l’observatoire de l’Afrique Subsaharienne à la Fondation Jean Jaurès (France). Ex de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF), il en avait été remercié pour ses positions sur le franc CFA.
PAR JEAN MEÏSSA DIOP
UNE MANIÈRE NON-ÉTHIQUE DE SE COUPER D'UNE SOURCE
Un journaliste a-t-il le droit – et aussi le devoir – de publier des informations qui lui ont été données « off the record » ? AVIS D'INEXPERT
Un journaliste a-t-il le droit – et aussi le devoir – de publier des informations qui lui ont été données « off the record » ? Ce terme anglais est une consigne donnée par une source de ne pas publier une ou des informations qu’elle a données au journaliste.
La question est souvent évoquée lors des rencontres réunissant des journalistes. Et une autre, sous-jacente, s’y ajoute, à savoir l’intérêt général peut-il être une raison pour le journaliste de violer l’engagement de ne pas rendre publiques des déclarations faites hors enregistrement et donc non destinées à la diffusion à destination du public ?
« C’est juste pour votre information », « gardez l’information pour vous » sont une des expressions qu’adresse au journaliste une source qui ne veut pas du tout, pour sa sécurité et ses intérêts propres, ceux du pays, d’une institution, d’une entreprise ou organisation, et divers d’autres raisons, voir rendues publiques les informations qu’elle communique. « Off the record », c’est-à-dire à ne pas enregistrer, à ne pas noter, à oublier, pour ainsi dire.
Engagement sur l’honneur
Et le journaliste s’engage toujours à respecter ce qui peut être une demande, une supplication, une exhortation, voire une menace… Le respect du « off the record » est un engagement sur l’honneur que prend le journaliste. Et, d’autres termes, cette loyauté à la source qui est un point de l’éthique et de la déontologie journalistique.
La pratique du « off » relève d’un « consensus » entre une source et un journaliste d’une relation de confiance entre un informateur et sa source. Le problème est qu’il « n’obéit à aucune règle précise de déontologie », précise le journal parisien La Croix, citant les journalistes Gérard Davet et Fabrice Lhomme auteurs de « Un président ne devrait pas dire ça ».
Ne pas respecter un off the record, c’est se couper définitivement d’une source. C’est aussi avoir mal à son éthique non pas seulement professionnelle, mais aussi personnelle, humaine, c’est-à-dire un manquement à la parole donnée. Et si le off ne tient plus en raison de l’intérêt général de l’information, l’information provenant de l’engagement non tenu devra être vérifiée et recoupée.
Question embarrassante
Mais, il faut que cet engagement pris par le journaliste soit respecté. D’aucuns plaident l’intérêt général pour ne pas se sentir tenu par un « off the record ». La disposition d’une arme secrète par l’armée d’un pays peut avoir un aspect intérêt général, mais les besoins de la défense nationale tolèreraient-ils qu’une information donnée off the record à un journaliste soit portée à la connaissance non plus du seul public national, mais du monde entier ?
La question est très difficile, très embarrassante même. Les informations off the record sont de la catégorie de celles obtenues dans le cadre de la collecte de l’information ; lesquelles relèvent de ce secret professionnel que le journaliste ne doit rompre en aucun cas au sens des chartes de déontologie de Paris (1918) et Munich (1971).
Dès lors, il appartiendra au journaliste d’apprécier selon son éthique professionnelle et, éventuellement, en concertation avec un responsable de la rédaction.
"ON NE VA PAS PERMETTRE À SONKO DE SE VICTIMISER JUSTE POUR ATTIRER LA SYMPATHIE DES ÉLECTEURS"
Invitée de l’émission « Jury du Dimanche » sur iRadio, l’ancien Premier ministre et par ailleurs Envoyée spéciale du président de la République, Aminata Touré est revenue sur "le dossier des 94 milliards" qui défraie la chronique
S’adressant à Ousmane Sonko, qui a soulevé cette affaire, Mimi Touré estime qu’il est facile d’accuser sans preuve. « Il n’y a aucun détournement de 94 milliards de francs Cfa. Les explications du directeur des Domaines, Mamour Diallo et celles du ministre des Finances, Amadou Ba, sont claires sur cette affaire. Une commission d’enquête sera ouverte dès ce lundi et j’espère que Sonko ira répondre à ses collègues député (hier, le député et candidat à la Présidentielle a écarté cette idée, ndlr). S’il refuse de le faire c’est parce que les faits qu’il développait ne tiennent pas. Ce n’est pas sérieux », a déclaré l’ancien Premier ministre. Avant d’ajouter : « Il faut que ce monsieur, qui a déclaré urbi et orbi, qu’il connait la banque qui a payé et les numéros de comptes, aille s’expliquer. Ce n’est pas par les fake-news qu’on va gagner la sympathie des Sénégalais. Tout ce qu’il disait n’est que du film. C’est du vent et on ne construit rien de solide avec du vent ».
A la question de savoir si le procureur de la République pourrait s’auto-saisir pour faire la lumière sur cette affaire, Aminata Touré rétorque : « S’il considère qu’il y a eu atteinte sur les intérêts de l’Etat, le maitre des poursuites peut s’auto-saisir. Mais, je pense que tel n’est pas le cas en l’espèce. Dans cette affaire, il n’y a pas eu atteinte aux intérêts de l’Etat. On ne va pas lui (Sonko) permettre de se victimiser avant les élections juste pour s’attirer la sympathie des électeurs. » Toutefois, l’Envoyée spéciale du président de la République indique qu’Ousmane Sonko ira répondre devant le pProcureur si le directeur des Domaines, Mamour Diallo dépose une plainte contre lui. Dans ce cas, dit-elle, ce sera une affaire entre privée.
PAR DENIS NDOUR
A QUAND LA RÉCONCILIATION ENTRE JUSTICE ET JUSTICIABLES ?
Le Sénégal ne peut pas être membre du conseil des Nations-Unies pour les droits de l’homme et permettre à certains juges de ternir notre image et notre crédibilité sur le plan sous régional et international
La justice définie, comme norme distinguant le Bien du Mal, désigne à la fois trois choses :
- l'organe ou l’autorité chargé en société de faire respecter les lois, alliant l'institution judiciaire à la répression (elle condamne les coupables et innocente les accusés, récompense les bons et punit les mauvais)
- l'ensemble des mécanismes institutionnels permettant un ordre juste ou plus juste
- l'institution étatique qui se réclame de la justice comme d'une valeur universelle, chargée d'appliquer le droit positif.
Partant de cette définition, nous pouvons en déduire comme en démocratie, que la justice est faite pour le peuple, par le peuple et devrait venir du peuple (par son pouvoir judicaire qui le représente).
Pourquoi toutes les décisions de notre Conseil constitutionnel restent impopulaires ? Les décisions sont-elles rendues au profit de l’exécutif ou pour le peuple ? Une décision rendue pour le peuple et contestée par ce dernier est-elle toujours juste ? Ou le peuple refuse-t-il d’accepter la vérité ou encore la mascarade d’une décision dictée par l’exécutif ?
A cause de ces décisions de justice considérées comme injustes par la plupart des citoyens depuis un certain temps, nous pouvons dire que la justice sénégalaise est malad,e non du fait des lois et normes établi,s mais plutôt du fait de son indépendance et de sa mission dévoyée dans la pratique.
La plupart des citoyens disent haut et fort qu’ils ne font plus confiance à la justice car la plupart des décisions majeures dans certains cas, sont planifiées et connues avant même les jugements.
Cela nous pousse à se poser la question suivante : Peut-on avoir du respect pour une justice « injuste » ?
Devenue injuste, la justice n'est en effet plus une protection mais une arme d'oppression des individus. La justice est donc possiblement injuste, si on entend par là qu'elle est parfois injuste légitimement. Le paradoxe de départ est levé quand on distingue dans l'injustice une valeur morale absente dans la simple justice légale. Ce qui caractérise une telle injustice, ce n'est pas seulement une défaillance humaine ou l'irrespect des lois du droit positif mais une action rationnelle et réfléchie qui s'inscrit en faux contre les valeurs communautaires partagées par tous les sénégalais.
Il faut le reconnaitre notre justice a connu bien des malaises au Sénégal ces derniers temps et nous avons plusieurs exemples pour illustrer cela :
- le débat stérile sur le caractère suspensif ou non du rabat d’arrêt avec le cas Khalifa Sall, qui a fait couler beaucoup d’encre;
- un magistrat qui démissionne pour cause de disfonctionnement du pouvoir judiciaire ;
- un magistrat démit de ses fonctions en pleine audience pour ses convictions ;
- un magistrat qui s’est dédit par rapport au même fait jugé il y a quelques années ;
- un manque d’indépendance institutionnelle de la justice avec le non-respect de l’inamovibilité des magistrats du siège et de la durée de l’intérim ; avec un Conseil constitutionnel, en tant qu’organe majeure de la justice qui se déclare le plus souvent incompétent pour trancher des litiges qu’il est le seul à pouvoir gérer au nom du peuple et pour le peuple ;
- quand des ministres de la république donnent la décision avant même que le Conseil constitutionnel n’examine la question…
Alors nous assistons là à une justice qui est loin d’être au-dessus de la mêlée et cela ne peut garantir la démocratie, les libertés et la paix que nous voulons tous. Il faut le dire la justice, gardienne de l'ordre et de la paix, a aussi un sens social et moral (social : du fait d'un idéal égalitaire pour contrer les inégalités manifestes et moral : du fait d'être conforme à ce que la raison prescrit). C'est d'ailleurs la base de la justice que de retranscrire dans la loi le respect de la loi morale (le respect de l’esprit de la loi est plus important que le respect de la loi à la lettre). Mais la double signification morale/politique de la justice rend en définitive l'interprétation de cette notion ambiguë. Car tout sépare une justice théorique, prise comme idéal moral indépendant des valeurs d'une société donnée et une justice légale dont l'application relève de jugements humains par définition perfectibles (et qui donc peuvent être injustes). Il faut donc distinguer la justice religieuse, pragmatique (les lois socio-politiques) et la justice morale (visant conformité au bien). Dans tous les cas, la justice vise un ordre juste, à réduire les injustices ou inégalités sociales. Si chaque sénégalais en tant que conscience morale, éprouve un sentiment de justice, la norme de ce jugement en quête d'idéal renvoie à une subjectivité qu'il faut interroger. Si les limites de la justice la font tendre vers ce mal qu'est l'injustice, comment penser une justice strictement juste ? La justice est-elle faillible ? Dans quelle mesure la justice peut-elle échapper, dans son application, à l'injustice qui menace son idéal abstrait et utopique de justice absolue, indépendante ?
Ainsi le grand penseur Pascal dénonce en ce sens dans « Les Pensées » l'origine mystifiante de la justice qui dérive d'un fait transformé en droit et lui fait dire ceci : « La justice sans la force est impuissante, la force sans justice est tyrannique ». Ce n'est donc pas la décision de justice qui est injuste mais sa conséquence dans la sphère individuelle et collective.
Mais en réalité si cela ne va pas au niveau de la justice, ce sont les citoyens qui en souffrent le plus. C’est devenu un cri du cœur pour l’UMS (Union des Magistrats du Sénégal) comme pour les justiciables : la justice sénégalaise a besoin « d’indépendance ». La transparence d’une élection quelconque est aussi importante mais encore plus dans le cadre de la magistrature suprême. C’est pourquoi il est vraiment salutaire de constater qu’une coalition de plusieurs organisations de la société civile qui s’activent pour la plupart dans le domaine des droits de l’homme, puissent demander aux candidats officiels à la présidentielle de décliner leur programme en ce qui concerne les réformes du pouvoir judiciaire ; mais encore plus de les engager à signer sans réserve, une charte juridique qui garantisse l’application de ces réformes une fois au pouvoir. A mon avis cette charte devrait prendre en considération les réformes suivantes :
la réorganisation des institutions judiciaires avec une Cour Constitutionnelle, un Conseil d´Etat, une Cour de Cassation, une Cour des Comptes et des Cours et Tribunaux ;
en lieu et place du Conseil Constitutionnel, la création d’une Cour Constitutionnelle, gardienne de la Constitution. Ses compétences, sa composition et le mode de désignation de ses membres seront révisés ; elle est chargée de veiller au respect de tous les droits constitutionnels et son Président est élu par ses pairs ;
la réforme du Conseil Supérieur de la Magistrature, affranchie de la tutelle ou de l’influence du Pouvoir exécutif, avec une composition élargie et une augmentation du nombre de membres élus à côté des représentants du Président de la République, du Gouvernement et de l’Assemblée nationale. Il est présidé par le Président de la Cour Constitutionnelle et chargé de la gestion des carrières des magistrats du Siège comme du Parquet ;
la réforme du Parquet pour le soustraire de la tutelle du ministère chargé de la justice afin de garantir son indépendance et lui permettre de mener sa mission en dehors de toute injonction du Pouvoir exécutif ;
Un juge des libertés pour éviter les abus de détentions arbitraires ou à soubassement politiques ;
Permettre aux citoyens d’avoir désormais le droit d’initier un référendum après pétition, hors révision constitutionnelle, sur les questions d’intérêt national (sur l’indépendance de la justice, sur la gestion du pétrole et autres ressources naturelles…).
Le Sénégal ne peut pas être membre du conseil des Nations-Unies pour les droits de l’homme et permettre à certains juges de ternir notre image et notre crédibilité sur le plan sous régional et international à cause du clientélisme, du laxisme, du non-respect de la parole donnée, de la trahison, du mensonge et du népotisme au détriment de l’éthique, de la dignité, de l’honneur, de la probité morale et du professionnalisme.
A mon avis une grande occasion s’offre à notre justice avec cette élection présidentielle pour enfin se réconcilier à jamais avec ses justiciables. A l’image de la justice kenyane, nos magistrats et sages devraient s’inspirer aussi des vaillants patriotes de notre histoire judicaire :
Keba Mbaye, Isaac Foster, Basile Senghor, Bassirou Diouf, Babacar Seye, etc. en disant la vérité rien que la vérité lors de la proclamation des résultats de la présidentielle du 24 Février 2019.
Oui le combat de l’indépendance de la justice est loin d’être le combat d’une corporation ou de l’UMS (Union des Magistrats du Sénégal) mais plutôt le combat des justiciables que nous sommes. Par ailleurs, au-delà de la justice, nous devons tous veiller sur le respect de la neutralité, de l’apolitisme et de l’impartialité de l’administration placée à la disposition des trois pouvoirs, et qui devrait également contribuer à la transparence des prochaines élections.
AUDIO
DIANO BI AVEC BOUBACAR CAMARA
L'ex patron des Douanes, leader de la coalition Fippu à la présidentielle, fait le tour de l'actualité au micro de Maodo Faye, dans l'émission dominicale en Wolof