Dakar, 4 jan (APS) - Le Cadre unitaire Syndical des enseignants du moyen-secondaire (CUSEMS) a annoncé vendredi avoir déposé un préavis de grève pour le respect des accords signés avec le gouvernement dans le protocole du 30 avril 2018, a appris l’APS.
En conférence de presse, le syndicat a expliqué qu’il veut ainsi "se donner les moyens légaux d’imposer le respect des accords mais aussi la prise en charge de questions nouvelles qui plombent le fonctionnement du système".
Dans sa déclaration liminaire dont l’APS a reçu copie, le CUSEMS souligne avoir privilégié le dialogue depuis le démarrage de l’année scolaire afin de "donner une chance au mécanisme de monitoring trimestriel des accords convenu avec les autorités en présence de témoins, par ailleurs, acteurs du système éducatif".
"Aujourd’hui, après deux séances de monitoring, nous avons constaté que le niveau d’exécution des engagements est très en deçà de nos attentes", déplore le syndicat. Il ajoute : "malgré le dépôt d’une lettre d’alerte (préavis au préavis) le 13 octobre 2018, les autorités tardent à honorer leurs engagements consignés dans le protocole du 30 avril 2018".
Dans son préavis, le CUSEMS exige "le respect des accords consignés dans le protocole du 30 avril 2018 dont l’apurement de tous les dossiers administratifs des enseignants dans les circuits, l’apurement des conventions (DMC) signés avec tous les agents de l’Etat, la finalisation et l’effectivité du schéma d’externalisation, la création du corps des administrations scolaires".
A cela s’ajoutent "la mise à disposition de parcelles non viabilisées au CUSEMS à Dakar et dans les capitales régionales (accords de 2011), le reversement des MEPS dans le corps des PCEMG, le paiement intégral des indemnités liées aux examens : reliquats du BFEM, omissions au BFEM, Certification (MFPAA)".
Dans ces exigences figurent aussi "l’alignement de l’indemnité de logement des enseignants, l’arrêt de la surimposition des rappels (intégration, Validation, Avancement) payés aux enseignants, l’amélioration de l’environnement scolaire (la résorption des abris provisoires, la rationalisation des effectifs des classes, la restauration des budgets des établissements réduits de manière drastique depuis 2012)".
Il y a également "l’arrêt immédiat des redéploiements abusifs et arbitraires et le recrutement conséquent d’enseignants et l’organisation annuelle d’une cérémonie dédiée de décoration d’enseignants méritants aux différents ordres selon des critères objectifs".
Le CUSEMS annonce qu’il "conviendra avec ses partenaires du G6, des modalités de la riposte appropriée malgré le contexte préélectoral actuel" si à l’expiration du délai légal de 30 jours francs, "les engagements souscrits n’étaient pas respectés".
Il dit attendre de chaque candidat à la présidentielle "la déclinaison claire et précise de sa vision du système éducatif mais aussi de son programme pour le redressement de notre école".
Ses mesures de meilleure gouvernance économique, institutionnelle, sectorielle ne produiront pas de résultats significativement différents de ceux des 60 dernières années et ne pourront pas être patriotiques car non finançables localement
Une vision doit pouvoir se résumer en une seule phrase. Idrissa Seck aura peut-être une autre chance de se rattraper, n’ayant pas lui-même présenté sa vision qu’on nous a annoncée patriotique, mais en 15 versions différentes et pas particulièrement patriotiques. Ses 3 axes stratégiques (gouvernance, économie, et sécurité) qui sont trop généraux devaient naturellement découler de cette vision claire et permettre une compréhension d’ensemble qui a fait défaut lors de la déclinaison de son programme avec le détail de 45 mesures de mise en œuvre. Il avait cependant lui-même annoncé ces 3 trois axes stratégiques sans vision clairement lors de son investiture, ce qui nous pousse à conclure qu’il n’a pas de vision nouvelle. Ces axes stratégiques peuvent néanmoins se résumer en un seul : « une meilleure gouvernance » dans la mise en œuvre de la vision du statu quo, « Yorinwi », selon ses propres termes. S’il ne propose qu’un axe stratégique d’un « Sénégal dans une gouvernance plus efficace, plus juste, et plus solidaire », cela explique la batterie de mesures d’ordre technique qui ont été présentées et qui sonnent comme des contributions à Macky Sall.
En effet, après avoir écouté l’exposé du programme du candidat Idrissa Seck, nous avons retenu des mesures sectorielles dans le style du candidat Bougane Gueye Dani sans fil conducteur, ce qui les place dans le même registre du management et de la gestion (la gouvernance) et moins du leadership. Une meilleure allocation des ressources et une meilleure gouvernance de nos institutions et secteurs seront toujours possibles, mais il est nécessaire de décliner la vision qui justifie la pertinence des choix. De ce point de vue, le candidat Idrissa Seck ne nous a pas présenté un lendemain véritablement nouveau vers lequel il veut nous amener pour justifier une alternance à son profit. Il est comme beaucoup de nos hommes politiques dans une logique de réforme de nos institutions qui fonctionnent relativement bien et du renouvellement de leurs animateurs. Il est également dans une logique d’une meilleure (juste, équitable, efficace, et solidaire) allocation sectorielle du budget de l’Etat et de nos capacités d’endettement et leur déploiement comme moyens nous dit-il, d’impulsion de l’activité économique. C’est cette dernière façon de faire que nous avons caractérisée comme celle d’un Etat socialisant et développementaliste digne de bons socialistes que le Sénégal doit alterner ou maintenir Macky Sall en poste. Malheureusement, bien que se disant libéral, Idrissa Seck n’a pas dérogé au socialisme congénital sénégalais qui voit l’Etat comme solution à nos problèmes économiques sectoriels, ce qui n’a pas changé nos conditions de vie en 60 ans d’indépendance.
De ce fait, Idrissa Seck est passé à côté de ce qui pour nous est l’enjeu véritable de l’élection présidentielle de 2019 et que nous avons exposé dans une récente contribution (Libéralisme Patriotique ou Socialisme) et par rapport auquel le président Macky Sall joue sur deux tableaux. Il s’agit de soit, libérer et responsabiliser les nationaux avec l’appui de l’Etat dans leur propre développement avec un environnement économique nouveau d’accompagnement ou dans notre environnement économique actuel diriger le développement et socialiser les décisions en mettant l’Etat au cœur du processus avec l’appui du capital étranger et sous leadership d’Etats (Chine, Turquie, etc..). Macky Sall dit être à la fois pour l’un et pour l’autre mais ses choix le placent résolument dans la deuxième option. Nous l’avons expliqué dans une contribution intitulée (Macky Sall a Choisi : Socialisme et Capital Etranger). Il dit que le secteur privé national doit prendre le relais de la croissance mais crée les conditions du leadership du secteur privé international dans le cadre de la CEDEAO ou de l’UEMOA avec une monnaie unique dont le taux de change sera nécessairement fixe sans une politique monétaire propre, ce qui favorisera le capital étranger. En effet, notre environnement économique actuel est principalement notre appartenance à ces ensembles sous-régionaux qui limitent notre souveraineté économique comme moyen devant nous permettre de mener des politiques économiques libérales au profit du secteur privé national.
Par ailleurs, Idrissa Seck promet une décentralisation plus approfondie avec des transferts de ressources aux collectivités locales. Macky Sall est également pour la responsabilisation des élus locaux (décentralisation) mais tous ses programmes sont mis en œuvre dans une logique de relais locaux de l’Etat (déconcentration). Dans un prochain mandat, il a promis aux quelques 500 maires qui le soutiennent qu’il va abandonner cette façon de faire dans le cadre de pôles régionaux qu’il avait annoncés il y a 7 ans et qui sont promis par presque tous les candidats à la présidence de la République. Les pôles régionaux ne peuvent cependant pas être responsabilisés sans un système monétaire et financier d’accompagnement étant donnés les moyens limités de l’Etat central et la faible inclusion financière des collectivités locales et des populations.
De ce fait, en proposant de garder le FCFA en l’état et d’œuvrer pour une monnaie unique CEDEAO à moyen et long terme, et de renégocier les APE dans ces contraintes, Idrissa Seck ne se différencie pas de Macky Sall et des autres candidats. Nous pouvons donc conclure que ses mesures de meilleure gouvernance économique, institutionnelle, et sectorielle ne produiront pas de résultats significativement différents de ceux des 60 dernières années et ne pourront pas être patriotiques car non localement finançables. L’emploi sous le leadership du secteur privé national ne pourra pas non plus être réalisable et ne sera donc pas patriotique pour garantir un pouvoir d’achat local. Les propositions de meilleure gouvernance quoi que potentiellement valables ne justifient donc pas une alternance dans un contexte où le choix le plus important est celui de notre modèle économique. En effet, des mesures telles qu’une justice plus indépendante, une décentralisation plus autonomisante, une meilleure santé et une meilleure éducation, et un audit juridique des contrats d’exploitation de nos ressources naturelles, etc. peuvent faire l’objet de consensus de toute la classe politique. Le candidat Idrissa Seck prépare-t-il un deuxième tour dans une position défavorable ? L’avenir nous le dira.
Nous affirmons à l’endroit de tous les candidats à la présidence de la République que tout programme qui n’a pas en son sein le décrochage de notre monnaie et sa flexibilisation pour accompagner une politique économique libérale au profit du secteur privé national ne peut être que le statu quo. Ce statu quo sera une croissance impulsée par l’Etat et le capital étranger pour, à travers le budget, améliorer les conditions sociales des populations plutôt que de les autonomiser vis-à-vis de l’Etat et du capital étranger. C’est l’option du président Macky Sall et il n’y a qu’une alternative à cet état de fait : le libéralisme patriotique qui est impossible sans un système monétaire et financier national et souverain d’accompagnement ou tout au moins au niveau de l’UEMOA pour éviter un abus de l’instrument monétaire et de change.
PAR ABABACAR GAYE
KHALIFA SALL ET DE KARIM WADE, LE MOINDRE MAL POUR BENNO
L’élimination de Khalifa Sall et de Karim Wade dans la course à la présidence, si elle se confirme, entraînera une redistribution des rôles. La sphère politique sera totalement reconfigurée avec des blocs, des coalitions qui seront suffisamment fortes ...
L’élimination de Khalifa Sall et de Karim Wade dans la course à la présidence, si elle se confirme, entraînera une redistribution des rôles. La sphère politique sera totalement reconfigurée avec des blocs, des coalitions qui seront suffisamment fortes pour envoyer la majorité au second tour.
A quelque chose malheur est bon ! La mise à l’écart des deux « K », en l’occurrence Khalifa et Karim, facilitera la tâche au reste des prétendants au pouvoir. Même s’ils continuent de hausser le ton contre la volonté de la majorité de les éliminer, les rescapés du parrainage tireront un maximum de profit de l’absence de ces deux leaders de renom. Plus qu’ils ne l’auraient fait si Wade fils et l’ancien maire de Dakar jouissaient de leurs droits civiques et de leur liberté de mouvement. Si leurs candidatures sont acceptées, Khalifa Sall et Karim Wade engrangeront des voix à leurs propres comptes ; ce qui réduira évidemment le nombre de voix d’Idrissa Seck, du PASTEF et du PUR. Mais la réalité qui semble se dessiner sous nos yeux est l’implacabilité de leur non-participation à ces joutes de février 2019.
A y regarder de près, l’électorat de Khalifa Sall se confondrait avec celui d’Ousmane Sonko, du PUR et de REWMI pour des raisons diverses. Depuis son incarcération, les partis de l’opposition n’ont cessé de lui apporter leur soutien en s’attaquant vertement au régime et à la justice. Dans un pays où le vote est plus affectif que programmatique, il n’y a point de doute que le soutien apporté aux « prisonniers politiques » peut se révéler hautement stratégique et bénéfique. La base électorale des prévenus sait rendre le bien par le bien et les politiciens, conscients du sentiment de sympathie que cela peut leur apporter, jouent parfaitement bien le jeu.
En cas d’exclusion de Khalifa, le report des voix se ferait ainsi facilement en faveur d’Ousmane Sonko parce que l’homme est jeune et plaide pour le rétablissement de l’Etat de droit. Dans sa soif de remettre le pays sur les sentiers d’un Etat ouù règne l’équité et la justice, le leader du PASTEF va même jusqu’à promettre la CREI (cour de répression de l’enrichissement illicite) et la prison aux tenants actuels du pouvoir. Il militera également en sa faveur le soutien inlassablement exprimé à Khalifa à qui il a même rendu visite à Reubeuss le 13 août 2018. A la suite du verdict de a Cour Suprême de ce 3 janvier, confirmant la condamnation définitive de l’ex maire, Ousmane Sonko écrit sur sa page Facebook en guise de soutien : « en Pastef Les Patriotes, le candidat Khalifa Sall et ses parrtisans peuvent compter sur un soutien sincère et désintéressé afin que sa participation à l’élection présidentielle du 24 février soit effective ».
Pour le Parti de l’Unité et du Rassemblement (PUR), le report des voix sera dû en grande partie au fait que Khalifa Sall et le guide des partisans du PUR, Serigne Moustapha Sy, ont des relations particulières. La présence du président du PUR à côté de l’ancien maire lors de la conférence de presse en Mars 2017en disait long sur la nature privilégiée des rapports entre les deux hommes. Même s’il y a des raisons confessionnelles, le PUR et les « khalifistes » défendent le même idéal et partagent les mêmes valeurs. Le soutien indéfectible du professeur Issa Sall au maire lors de la levée de son immunité parlementaire pourrait aussi jouer en faveur d’une alliance, ou du moins d’un report de voix, entre le PUR et les hommes de Khalifa Sall.
Le même transfert de votes pourrait avoir lieu au cas où le Parti Démocratique Sénégalais (PDS) ne présenterait pas de candidat. La non candidature de Karim Wade, plus que probable si l’on en croit les déclarations des tenants du pouvoir, profitera à coup sûr à l’opposition notamment à Idrissa Seck. Les libéraux qui n’ont pas rejoint Macky Sall dans la vaste opération de transhumance pourraient en effet rejoindre le candidat de la « Coalition Idy 2019 » au nom de l’intérêt de l’idéologie libérale. Tout comme Issa Sall et Ousmane Sonko, Idrissa Seck pourra aussi bénéficier du soutien d’une partie de l’électorat de Khalifa Sall avec qui il avait partagé la Coalition Mankoo Taxawu Sanagaal lors des législatives de 2017.
Ainsi donc l’émiettement de l’opposition sera évité et les risques de la dispersion des voix de l’opposition amoindri. S’il n’y a que de blocs forts autour du PUR, du PASTEF et de REWMI, la coalition Bennoo Bokk Yaakaar jouera un pari très risqué puisque le « diviser pour régner » très cher aux tenants du pouvoir, n’aura pas fonctionné. L’absence de Karim et de Khalifa, loin d’être une aubaine pour le pouvoir, s’avèrera être un problème de plus et pourra produire un effet boomerang contre le candidat Macky Sall au soir du 24 février.