DANS L’HISTOIRE DE 86.6 !
Le projet de loi de finances 2025 a été adopté, samedi, sans débat, par l’Assemblée nationale sur la base de l’article 86.6 de la Constitution invoqué par l’Exécutif, qui a évoqué le temps court pour tenir les plénières.

Le projet de loi de finances 2025 a été adopté, samedi, sans débat, par l’Assemblée nationale sur la base de l’article 86.6 de la Constitution invoqué par l’Exécutif, qui a évoqué le temps court pour tenir les plénières. Mais du côté de l’opposition, des parlementaires dont Abdou Mbow, membre du groupe parlementaire Takku Wallu et TAS, dénoncent «une violation grave de notre Constitution» et un dilatoire qui a abouti à cette situation.
L’Assemblée nationale a adopté sans débat le projet de loi de finances 2025. Cela, conformément à la volonté du Premier ministre Ousmane Sonko qui s’est appuyé sur l’article 86 alinéa 6 de la Constitution pour engager la responsabilité de son gouvernement. «Nous avons reçu une lettre du Premier ministre qui a saisi l’Assemblée nationale, conformément à l’article 86 alinéa 6 de la Constitution, en soulignant l’engagement de la responsabilité du gouvernement. En l’absence d’une motion censure qui devait être déposée 24 heures avant, l’Assemblée adopte la loi de finances 2025», a déclaré Malick Ndiaye, président de l’Assemblée nationale. Qui a lu la lettre du Premier ministre indiquant l’adoption de la loi de finances du budget de l’année 2025.
Sonko absent !
Mais, cette volonté des députés de la majorité n’a pas du tout rencontré l’adhésion des parlementaires de l’opposition. Abdou Mbow, député membre de la coalition Takku Wallu, trouve ainsi «inacceptables» les conditions dans lesquelles le budget a été voté. Pour étayer son propos, il invoque le même article 86 alinéa 6 de la Constitution qui stipule : «Le Premier ministre peut engager la responsabilité du gouvernement devant l’Assemblée nationale pour faire adopter une loi des finances, sauf s’il y a une motion de censure dans les vingt-quatre heures.» Selon l’ancien président du Groupe Benno bokk yaakaar, «c’est le Premier ministre qui devait se présenter devant les députés pour engager la responsabilité du gouvernement. Car, le ministre des Finances et du budget, membre du gouvernement, ne peut pas engager le gouvernement. La Constitution parle du Premier ministre, et non de son représentant». Abdou Mbow voit à travers ce geste des députés de la majorité «une violation grave de notre Constitution».
Abdou Mbow dénonce «une violation de la Constitution»
Le député non inscrit, Thierno Alassane Sall, ne cache pas lui aussi sa surprise. «C’est la première fois dans l’histoire politique du Sénégal qu’une loi de finances est votée sans débat», a-t-il martelé, en accusant le régime en place d’être à l’origine d’une telle situation. «Le gouvernement a fait du dilatoire pour retarder l’examen de la loi de finances initiale. Ils ont fait du dilatoire sur la suppression du Hautconseil des collectivités territoriales (Hcct), du Conseil économique, social et environnemental (Cese) en reportant la Loi des finances rectificative (Lfr) jusqu’à ce qu’on arrive au 27 décembre sans avoir les séances, alors que le gouvernement avait tout le temps pour faire voter la loi avec des débats», se désole-t-il, en rappelant dans le même sillage l’importance des débats. «Les séances plénières sont les plus essentielles, car elles permettent d’étudier en profondeur les problèmes du Sénégal», assure TAS.
Mais, Abass Fall, ministre du Travail en charge des relations avec les institutions, n’est pas du même avis que les députés de l’opposition. D’après lui, le vote sans débat s’explique par les conditions extrêmement difficiles dans lesquelles le projet de loi de finances initiale a atterri à l’Hémicycle. «Le projet de budget est venu en Commission technique dans des conditions extrêmement difficiles et on a dû accélérer son examen pour être à jour. Au préalable, on avait même établi un calendrier qui pouvait nous permettre de passer en commission et de revenir en plénière», s’est-il dédouané. Le ministre du Travail en charge des relations avec les institutions trouve qu’ils n’ont pas failli à la loi.
PREVISION DE CROISSANCE DE 8, 8%
Dans le budget 2025 de l’Etat, les recettes sont arrêtées à 5014, 3 milliards de francs Cfa, contre 4915, 2 milliards pour la Lfi 2024. Quant aux dépenses, elles sont évaluées à 6614, 8 milliards, contre 5755, 4 milliards en 2024, indique le rapport de la Commission des finances de l’Assemblée nationale.
Le budget 2025 connaît ainsi une hausse des recettes de 99, 1 milliards, soit 2%, selon ce document élaboré avec des données fournies par le ministère des Finances et du budget. Les dépenses ont augmenté de 859, 4 milliards, l’équivalent de 14, 9%.
prévision de croissance de 8, 8%, contre 6, 7% en 2024, et un déficit budgétaire attendu à 7, 08%, contre 11, 6% en 2024, «avec l’objectif d’aller vers la consolidation budgétaire en 2027 et d’atteindre un déficit de 3% du Produit intérieur brut (Pib), en respect des critères de convergence de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa)».
Les recettes du budget général sont arrêtées en 2025 à 4794, 6 milliards. La pression fiscale est projetée à 19, 3% du Pib pour 2025, contre 19, 4 % au titre de la Lfi 2024.
Les recettes des comptes spéciaux du Trésor sont arrêtées à 219, 7 milliards de francs Cfa pour 2025. Les dépenses du budget général sont programmées à 6395, 1 milliards pour l’année 2025, soit une progression de 861, 2 milliards, soit 15, 6% par rapport à la Lfi de 2024. Les charges financières de la dette publique et la masse salariale devraient progresser respectivement de 13, 1% et 3% pour s’établir à 932, 1 milliards et 1485,5 milliards en 2025.
Les dépenses d’investissement du budget 2025 sont estimées à 2047 milliards, contre 1836, 3 milliards dans la Lfi de 2024. Les dépenses des comptes spéciaux du Trésor sont programmées à 219, 7 milliards pour 2025, contre 221, 5 milliards en 2024
Budget de la Présidence
S’agissant des moyens dévolus aux institutions constitutionnelles, le budget de la présidence de la République est arrêté à 78 milliards 609 millions 617 mille 404 francs Cfa, contre 80 milliards 129 millions 718 mille 244 francs Cfa en 2024. Celui de la Primature est fixé à 25 milliards 6 millions 817 mille 345 francs Cfa, contre 25 milliards 723 millions 322 mille 360 francs en 2024
Le budget de l’Assemblée nationale s’élève à 22 milliards 474 millions 15 millions 137 francs, contre 20 milliards 158 millions 15 mille 137 francs en 2024. Pour le Conseil constitutionnel, le budget est arrêté à 1 milliard 453 millions 826 mille 65 francs pour 2025, contre 1 milliard 755 millions 705 mille francs en 2024, celui de la Cour suprême est fixé à 5 milliards 89 millions 993 mille 426 francs, contre 6 milliards 979 millions 625 mille 379 francs en 2024. Le budget de la Cour des comptes est programmé à 14 milliards 512 millions 706 mille 792 francs, contre 13 milliards 199 millions 273 mille francs en 2024.
Lors des débats en commissions, des commissaires ont, selon le rapport, insisté sur le budget de la présidence de la République, notamment les rubriques de dépenses de personnel ainsi que l’augmentation de la dotation de l’Assemblée nationale de l’ordre de 2 milliards de francs Cfa. Selon eux, ces constatations vont à l’encontre de l’ambition de rationalisation des dépenses largement affichée.
Par ailleurs, jugeant trop important le montant des réserves de précaution, certains commissaires ont souhaité être édifiés sur les raisons sous-jacentes à cette décision. A ce propos, ils ont souligné le fait que le Fonds intergénérationnel soit logé dans le budget de la présidence de la République alors qu’aux termes de l’article 8 alinéa 3 de la loi n° 2022-09 du 19 avril 2022 relative à la répartition et à l’encadrement de la gestion des recettes issues de l’exploitation des hydrocarbures, la gestion de ce fonds incombe plutôt au Fonds souverain d’investissements stratégiques (Fonsis). Ainsi, les ministres ont été interpellés sur les raisons qui sous-tendent une telle décision.
A ce propos, le ministre des Finances et du budget a-t-il précisé que «celui-ci n’est pas géré par la présidence de la République, mais par le Fonsis qui a comme ancrage le Mfb»
Au titre des perspectives pour 2025, mentionne le document, «l’économie nationale devrait bénéficier d’une conjoncture internationale plus favorable, caractérisée par la détente anticipée des cours des produits de base, notamment le pétrole dont les cours mondiaux pourraient baisser de 10, 4%, entraînant un prix de 72, 8 dollars le baril».