«LES BOUILLONS PREDISPOSENT A UNE EXPOSITION AUX MALADIES CARDIOVASCULAIRES, MAIS...»
Nommé Directeur du commerce intérieur après une décennie à la tête du service régional du commerce, Oumar Diallo aborde sans langue de bois les questions brûlantes de l’heure

Nommé Directeur du commerce intérieur après une décennie à la tête du service régional du commerce, Oumar Diallo aborde sans langue de bois les questions brûlantes de l’heure. Des bonbons à caractère obscène vendus sur le marché sénégalais à l’éternelle question du secteur de la boulangerie, en passant par les tirs groupés contre les grandes surfaces étrangères, le nouveau Dci est d’attaque ...
Quelles sont vos priorités en tant que nouveau Dci ?
Nous avons deux super priorités déclinées par le ministre du Commerce, au-delà de la surveillance du marché et de la protection du consommateur. Aujourd’hui, nous voulons tout faire pour finaliser la réforme des chambres de commerce. L’autre priorité, c’est le chantier de la modernisation du secteur de la boulangerie à travers l’application de la nouvelle réglementation. Sur ce point, il faut dire que les nouvelles dispositions concernant l’assainissement du secteur de la boulangerie ont commencé à être mises en œuvre avec l’application du décret 2077/ du 31 décembre 2019 portant réglementation et organisation du secteur. Cette disposition vise à assurer la pérennisation de l’entreprise de la boulangerie, à assainir le secteur de la distribution et à assurer une sécurité sanitaire du pain. La distribution du pain est le seul moyen par lequel on peut parvenir à générer dans ce secteur des emplois et à les pérenniser. Mine de rien, c’est 8 millions de baguettes de pain par jour, pour un chiffre d’affaires de 30 milliards de francs cfa avec plus 10 mille emplois directs. Donc en modernisant le secteur, nous y gagnons triplement. Créer des emplois, un pain de qualité et pérenniser la boulangerie. En complément de la distribution moderne, nous avons même mis un dispositif appelé « jaay ma mburu ». Parce que le Sénégalais doit avoir son pain à proximité et en toute sécurité. En effet, on le sait tous, le gros problème du pain concernant la boulangerie et les boulangers, c’est un mauvais circuit de distribution, une désorganisation et une anarchie qui régnaient dans ce secteur. Il fallait remettre tout ça sur la table pour avoir un secteur assaini.
Mais les boulangers exigent une révision du prix du pain. Va-t-on vers une hausse du prix de la baguette ?
Pour la restructuration du prix du pain, dès l’instant que nous avons entamé le processus de modernisation du secteur de la boulangerie, une hausse du prix n’est pas à l’ordre du jour. Donc ce qui concerne la révision de la structure du prix devrait intervenir après qu’on a réussi la modernisation du secteur et sa redynamisation.
Vous allez bientôt réformer les chambres de commerce. Est-ce à dire qu’elles ne sont plus efficaces ?
La réforme des chambres de commerce était devenue une nécessité parce qu’il fallait la mettre en cohérence avec les objectifs fondamentaux du Plan Sénégal Émergent (Pse) en ce qui concerne le développement et la consolidation de l’entreprise qui est au cœur du commerce. Donc il était nécessaire qu’on réforme et réadapte les chambres de commerce dans leur mode de fonctionnement, mais aussi et surtout dans le mode de désignation de ses membres. C’est dans ces conditions qu’on a pris la Loi 2015/17 qui crée la chambre nationale de commerce d’industrie et des services, étant entendu que l’agriculture est devenue un segment qui aura sa chambre à part. La réforme, c’est vraiment d’aller vers une seule chambre nationale avec des chambres régionales ou consulaires. La phase ultime de cette réforme consiste à prendre des mesures qui organisent le fonctionnement et qui déterminent les statuts des futures chambres nationales. Le décret a été élaboré et travaillé. Il est sur la table du secrétariat général du gouvernement.
Le marché du sucre pose énormément de problèmes. D’aucuns dénoncent la mainmise de la CSS ?
Vous savez, nous avons une unité industrielle locale qui assure la production locale de sucre et qui nous assure la couverture de nos besoins sur pratiquement huit mois de l’année. Mais nos besoins en consommation étant très importants et la compagnie sucrière ne pouvant pas tout couvrir, il arrive une période où le stock de la CSS est épuisé, il faut combler ce gap, il faut qu’on importe du sucre. C’est ce gap que nous cherchons à combler en ouvrant les importations de sucre. Il est reparti d’un commun accord entre la CSS et les industriels sénégalais. L’objectif, c’est d’aller vers l’autosuffisance et tendre vers la souveraineté en la matière. La CSS y travaille. Mais tout est fait en toute transparence.
Mais le fait que la Css importe du sucre ne fausse-t-il pas les règles du jeu ?
La CSS est une industrie, mais elle est en même temps une entreprise commerciale qui a aussi pour vocation d’acheter et de vendre. Dans ces conditions, rien ne l’empêche d’importer un produit. Les grandes surfaces ont secoué l’actualité.
Avec le recul, quelle lecture en faites-vous?
Ce sont des enseignes qui sont là. Il y a eu beaucoup de bruit. Mais le Sénégal a besoin d’un système de distribution de produits alimentaires très moderne. Et cette forme de distribution contribue à améliorer le secteur et notre urbanisation commerciale. Cette dernière est devenue une nécessité. L’implantation de ces grandes surfaces a permis donc aux Sénégalais de découvrir de nouvelles formes d’achats qui cohabitent avec l’ancien modèle que nous avons tant bien que mal cherché à préserver en encadrant l’implantation des grandes surfaces notamment. Nous estimons que nos opérateurs économiques locaux sont en phase avec cette forme de distribution et déterminés à pouvoir relever le défi. Parce qu’à côté de ces grandes enseignes qui sont là, nous avons des Sénégalais qui ont relevé des défis en la matière. C’est des initiatives que nous encourageons.
Les professionnels de la santé sont unanimes à reconnaître les effets néfastes des bouillons sur la santé cardiovasculaire. Est-ce qu’il y a un contrôle sérieux de ces produits ?
De par leur composition, ces bouillons prédisposent à une exposition aux maladies cardiovasculaires si l’utilisation qui doit en être faite n’est pas bien surveillée. Ça, c’est la vérité. Parce que le sel constitue un danger s’il est consommé de manière excessive. De ce point de vue, le contrôle de ces bouillons se fait de manière stricte. Il y a une norme de fabrication des bouillons, c’est la norme 013- 146 de 2016 qui est rendue obligatoire par un arrêté ministériel. C’est une mesure préventive qui prévoit un contrôle a priori, c’est-à-dire avant que le produit ne soit mis à la disposition du consommateur. C’est une norme internationale. Le bouillon étant un produit alimentaire, il répond aux conditions qui sont prévues par la loi qui détermine les conditions dans lesquelles les produits doivent être mis sur le marché, notamment en ce qui concerne l’analyse microbiologique, chimique du produit pour savoir s’il est de consommation légale. C’est à partir de là que nous délivrons l’autorisation FRA qui donne le feu vert pour la commercialisation du produit. C’est un produit qui est normé et très bien contrôlé.
Récemment, une affaire de bonbons mettant en scène des objets obscènes a secoué la toile .Qu’est-ce qui s’est réellement passé ?
Ce sont des bonbons qui mettent des images perverses en avant, des enfants de surcroît. Quand nous avons été informés de leur présence sur le marché, nous avons déployé nos équipes pour aller sur le terrain vérifier la présence de ce produit pour le retirer et savoir par quels moyens il a pu se retrouver sur le marché. C’est tout le sens de la circulaire que nous avons prise mardi pour demander à tous nos chefs de service régionaux, départementaux et chefs de division de veiller à ce que le produit soit retiré. Depuis mardi, nos équipes ont visité tous les marchés du Sénégal. Toutes nos équipes ont contrôlé tous les dépôts détenus par les importateurs de ces produits, nous sommes allés dans les boutiques de quartier pour vérifier l’existence du produit. Mais nous n’avons pas trouvé un seul spécimen de ce bonbon. Nous avons même demandé l’appui des associations de consommateurs, elles aussi n’ont rien trouvé, même les forces de sécurité ont été mises à contribution. Nous sommes en mesure d’affirmer que ce produit-là n’est pas sur le marché sénégalais. Nous ne savons pas par quels moyens cette vidéo a été prise et mise sur la toile. Mais nous, au niveau du commerce, ce qui nous intéresse, c’est que la santé et la sécurité du consommateur ne soit pas remises en cause et c’est ce que nous avons fait.