L’AMERIQUE REDEVIENT «NORMALE» ET LE MONDE AVEC ELLE
S’agissant du scrutin du 3 novembre 2020, l’Amérique et le monde avaient hâte de connaitre le résultat du scrutin mais aussi et surtout l’impatience de retrouver une « normalité » dans la marche du monde.

Traditionnellement, l’élection d’un nouveau président des Etats-Unis d’Amérique suscite de très grandes attentes, aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur de ce vaste pays. S’agissant du scrutin du 3 novembre 2020, l’Amérique et le monde avaient hâte de connaitre le résultat du scrutin mais aussi et surtout l’impatience de retrouver une « normalité » dans la marche du monde.
Au mois de novembre 2016, Donald Trump, vendeur de mirages (a good salesman en anglais), nouvellement élu, avait promis de nettoyer Washington de ses politiciens traditionnels. Lui qui s’est fait un nom, dans la production de séries et de programmes de télévision essentiellement basés sur la fiction, savait comment faire rêver et titiller les bas instincts d’une grande partie de l’Amérique rurale blanche, à peine scolarisée, convaincue de la domination de ses hommes sur ceux de couleur et sur les femmes en général.
Pour cette Amérique-là, Trump était, par excellence, l’incarnation du changement. Mais à l’arrivée, le président qui vient d’être défait par les urnes s’est révélé être le continuateur de la politique de la droite extrémiste qui prône une économie de marché sans restrictions, la liberté totale laissée aux marchés financiers d’engendrer de grands profits, le renforcement des pouvoirs de K Street, cette rue, adjacente au siège du Congrès et où la majorité des cabinets lobbyistes sont installés. Donald Trump s’est fait également de chantre de la promotion du retrait du gouvernement fédéral de toutes les initiatives en faveur des couches les moins privilégiées.
Au niveau international, Donald Trump s’est évertué à déstructurer le système de gouvernance mis en place et appliqué par les administrations précédentes, avec plus ou moins de réussite, chahutant ainsi, le rôle de leadership que les Etats-Unis ont joué depuis la fin de la première Guerre mondiale. Aujourd’hui que l’ère Trump est définitivement clôturée, le monde peut passer à la revue des changements majeurs attendus de la nouvelle administration.
Comme indiqué dans l’édition de Sud Quotidien du 17 novembre dernier, avec la victoire du ticket Joe Biden-Kamala Harris, une nouvelle ère va immanquablement voir le jour dans la politique extérieure américaine. Déjà, bien avant le début de la campagne électorale, tous les Démocrates s’étaient engagés à « re-signer » l’Accord de Paris sur les changements climatiques, qui avait quasiment fait l’unanimité au sein de toute la communauté internationale. Biden a promis le retour de son pays dans ledit accord, le jour même de son investiture. Evidemment, les relations privilégiées entre l’Amérique et Israël connaitront très peu de changements. Cependant, le monde entier s’attend à un réchauffement réel dans les rapports avec l’Iran, avec comme point culminant le rétablissement de l’Accord sur le nucléaire. Les conséquences de tels changements dans le Proche et Moyen-Orient seront incalculables.
La Russie de Poutine qui avait la confiance de l’administration Trump au détriment de ses propres services de renseignements, devra se préparer à de nouvelles difficultés avec la victoire de Biden. Les alliés traditionnels occidentaux poussent d’ores et déjà un grand ouf de soulagement. La normalisation du fonctionnement des organismes comme l’OTAN ainsi que les rapports avec l’Union européenne sont devenus des urgences pour ses alliés. Les plus proches parmi les alliés traditionnels tels que le Royaume Uni, le Canada et le Mexique ne regretteront sûrement pas le départ de Donald Trump du pouvoir.
RELATIONS AVEC L’AFRIQUE
Et l’Afrique dans tout ça ? Comme toujours, son sort, sa place et son importance, aux yeux des Etats-Unis, ne varieront pas. Les Etats-Unis, comme presque tous les partenaires de l’Afrique, basent ses relations avec tous les autres pays sur le principe de «What’s in For Me ?» (Qu’est-ce que j’y gagne ?), quel que soit le président qui est à la tête de ce pays. Un continent qui représente moins de 5% du commerce mondial peut difficilement être au centre des préoccupations d’une nouvelle Administration américaine. Le continent n’intéresse réellement l’Amérique que sous l’angle de la sécurité, et ce sujet est toujours laissé entre les mains des militaires et des services de renseignements. Toutefois, si l’élite africaine décidait de bien négocier, dans le sens de bien faire prendre conscience cette position de ventre mou du terrorisme, elle pourrait exiger (le mot n’est pas fort) des Etats-Unis, et du reste du monde occidental, que ses préoccupations de développement ne sauraient être placées en arrière-plan des questions principales de la diplomatie mondiale. Mais une telle attitude de la part de l’Afrique serait difficilement efficace, si les leaders africains continuent à se faire concurrence, chacun cherchant à se positionner comme « le président le mieux adoubé » par Washington, Berlin, Londres, Paris ou les institutions de Breton Woods. Aussi, comme on peut le constater, il suffit que le plus anonyme des magazines ou la plus quelconque des institutions occidentales consacre un dirigeant africain pour que ce dernier ne se sente plus. Par une telle attitude, ils semblent oublier le destin de l’Afrique est entre ses mains et non entre celle des Etats-Unis ou de n’importe quel autre partenaire occidental.