‘’Les dissolutions de partis appartiennent au passé. On ne combat pas’’ un adversaire politique en le ‘’supprimant’’, mais ‘’par la confrontation des idées et l’occupation du terrain’’, estime le professeur de Droit et ancien recteur de l’UCAD
Le professeur de droit Abdel Kader Boye déplore la ‘’juridisation des différends politiques’’ au Sénégal et propose qu’une loi d’amnistie soit votée pour ‘’réconcilier la société avec elle-même’’ et permettre à tous les citoyens privés de leurs droits de voter et d’être éligibles.
Dans une interview accordée à l’Agence de presse sénégalaise et au mensuel Vitrine, le Mag de l’APS, M. Boye suggère qu’‘’une grande loi d’amnistie’’ soit votée par l’Assemblée nationale, ‘’comme cela fut fait après Mai-68 […] à l’effet de réconcilier la société avec elle-même’’.
Cette mesure permettrait ‘’à tous les exclus judiciairement ou par simple effet mécanique […] de jouir du droit électoral’’, a ajouté l’ancien recteur de l’université Cheikh-Anta-Diop (UCAD) de Dakar.
Abdel Kader Boye déplore par ailleurs les nombreuses modifications dont certaines lois sont l’objet au Sénégal depuis l’alternance politique de 2000. ‘’On constate depuis l’alternance de 2000 un charcutage des règles, avec des interprétations fantaisistes, motivées uniquement par des considérations politiques’’, a fustigé l’ancien doyen de la faculté des sciences juridiques et politiques de l’UCAD.
La Constitution sénégalaise est sujette à ces nombreux changements, fait-il remarquer, estimant que ‘’rédiger un texte limitant le nombre de mandats présidentiels que quelqu’un peut exercer’’, par exemple, ‘’est à la portée de n’importe quel juriste’’, malgré les diverses interprétations à ce sujet, au Sénégal.
‘’Les systèmes de limitation [du nombre de mandats présidentiels] fonctionnent sans problème dans les pays où ils sont de règle : Mauritanie, Cap-Vert, Niger, Nigeria, Afrique du Sud, Kenya…’’ a fait valoir M. Boye. ‘’Il y a une rupture de confiance profonde entre la justice et les populations.’’
Il estime qu’‘’il faut réformer le Conseil supérieur de la magistrature, réformer profondément le Code pénal et le Code de procédure pénale’’, en vue d’‘’une plus grande effectivité de la protection des droits individuels et collectifs’’.
‘’Enfin, réformer le système de formation des magistrats’’, a proposé l’ancien recteur de l’UCAD.
‘’La question du nombre de mandats est réglée depuis 2011, comme je vous l’ai dit. Il faut […] aborder franchement les problèmes de la démocratie sénégalaise, pas sous l’angle ‘comment je dois faire pour conserver le pouvoir’, mais ‘comment repenser le système des partis politiques, leur fonctionnement, leur financement, leurs droits fondamentaux et leurs obligations’’’, a-t-il poursuivi.
Abdel Kader Boye suggère aux pouvoirs publics sénégalais d’‘’envisager un statut ou une charte des partis politiques, afin de liquider tous les petits partis qui n’ont aucune vie démocratique’’.
‘’Les dissolutions de partis politiques appartiennent au passé. On ne combat pas’’ un adversaire politique en le ‘’supprimant’’, mais ‘’par la confrontation des idées et l’occupation du terrain politique’’, a soutenu M. Boye.
LE NIGER FERME SON ESPACE AÉRIEN
"Face à la menace d'intervention qui se précise à partir des pays voisins, l'espace aérien nigérien est fermé ce dimanche (...) jusqu'à nouvel ordre", indique un communiqué qui précise que "toute violation de la mesure" entraînera une riposte instantanée
"Face à la menace d'intervention qui se précise à partir des pays voisins, l'espace aérien nigérien est fermé à compter de ce jour dimanche (...) jusqu'à nouvel ordre", indique un communiqué qui précise que "toute tentative de violation de l'espace aérien" entraînera "une riposte énergique et instantanée".
Dans un autre communiqué, le Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP, qui a pris le pouvoir) affirme qu'un "prédéploiement pour la préparation de l'intervention a été faite dans deux pays d'Afrique centrale", sans préciser lesquels. "Tout État impliqué sera considéré comme cobelligérant", ajoute-t-il.
Les frontières terrestres et aériennes du Niger avec cinq pays frontaliers avaient été réouvertes le 2 août, près d'une semaine après leur fermeture lors du coup d'Etat du 26 juillet ayant renversé le président élu Mohamed Bazoum. Ces pays étaient l'Algérie, le Burkina Faso, la Libye, le Mali et le Tchad.
L'ultimatum fixé le 30 juillet par la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cedeao) aux militaires ayant pris le pouvoir pour rétablir dans ses fonctions le président Bazoum, sous peine d'une intervention armée, doit expirer à minuit heure de Niamey (23h00 GMT).
LA FRANCE SUSPEND SON AIDE AU DÉVELOPPEMENT ET SON APPUI BUDGÉTAIRE AU BURKINA FASO
Cette annonce est prise alors que le Burkina Faso et le Mali sont solidaires des militaires ayant pris le pouvoir au Niger
La France a décidé de suspendre "jusqu'à nouvel ordre toutes ses actions d'aide au développement et d'appui budgétaire" au Burkina Faso, a annoncé dimanche soir le ministère français des Affaires étrangères.
Cette annonce est prise alors que le Burkina Faso et le Mali sont solidaires des militaires ayant pris le pouvoir au Niger. La France soutient, elle, les pays de la Cedeao, la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest, dans leurs efforts pour rétablir le président Mohamed Bazoum. Ce dernier est retenu prisonnier depuis la tentative de putsch le 26 juillet. Les Etats de la Cedeao ont menacé d'intervenir militairement et ont donné jusqu'à dimanche soir aux militaires ayant pris le pouvoir pour rétablir l'ordre constitutionnel.
Les projets en cours de l'Aide française au développement en faveur du Burkina Faso représentent 482 millions d'euros tandis que l'aide budgétaire programmée en 2022 s'élève à 13 millions, a indiqué le Quai d'Orsay. Les relations entre la France et le Burkina se sont dégradées depuis l'arrivée au pouvoir par un coup d'Etat en septembre 2022 du capitaine Ibrahim Traoré.
Le 18 janvier, les autorités de Ouagadougou avaient demandé le départ, dans un délai d'un mois, de la force française Sabre au Burkina Faso. La France avait acté ce départ mais n'avait pas suspendu ni son aide au développement, ni son aide budgétaire comme elle l'avait fait pour le Mali.
En revanche, le 29 juillet, trois jours après la tentative de putsch au Niger, Paris a suspendu toutes ses actions d'aide au développement et d'appui budgétaire au Niger.
SONKO HOSPITALISÉ
Le chef de Pastef en grève de la faim depuis son interpellation après deux ans de bras de fer avec le pouvoir, a été admis aux urgences hospitalières dimanche à Dakar, ont indiqué des collaborateurs et un de ses avocats
Le Pastef, le parti de M. Sonko dissous par les autorités lundi dernier, a annoncé son admission aux urgences dans un communiqué. Deux porte-paroles et un des avocats de M. Sonko, Me Ciré Clédor Ly, ont confirmé, sans se prononcer sur son état. Le Pastef a dit tenir les autorités pour "responsables" de sa santé. Les autorités ne se sont pas exprimées sur le sujet.
M. Sonko, 49 ans, a entamé une grève de la faim le 30 juillet, deux jours après son interpellation. Candidat déclaré à la présidentielle de février 2024, il livre un bras de fer acharné au pouvoir depuis 2021 et sa mise en cause par la justice dans une affaire de moeurs qu'il dénonce comme un complot pour l'éliminer politiquement. Après plusieurs épisodes de contestation populaire meurtrière et deux condamnations successives pour diffamation et "corruption de la jeunesse", il a été écroué lundi sous différents chefs d'inculpation, dont appel à l'insurrection, association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste et atteinte à la sûreté de l'Etat. Les autorités ont annoncé la dissolution de son parti le même jour.
La candidature de M. Sonko à la présidentielle paraît dès lors peu réaliste. Ses avocats soutiennent de leur côté qu'il reste éligible. Dans l'affaire de moeurs en particulier, ils assurent que, M. Sonko ayant refusé d'assister au procès et ayant été condamné par contumace, les textes stipulent qu'il doit être rejugé à présent qu'il a été arrêté.
Me Ciré Clédor Ly a confirmé que M. Sonko avait écrit de prison à la justice la semaine écoulée pour signifier qu'il n'acceptait pas sa condamnation, condition nécessaire selon ses avocats pour que le jugement soit annulé et qu'un nouveau procès ait lieu. Le procureur Abdou Karim Diop avait réfuté au lendemain de son interpellation que celle-ci faisait tomber la contumace.
LE CONSEILLER DE SADIO MANÉ FAIT DE GRAVES ACCUSATIONS CONTRE LE BAYERN MUNICH
Bacary Cissé a saisi l’occasion de l’émission After Foot pour revisiter le parcours mouvementé de la star sénégalaise en Bavière, en mettant en évidence l’altercation avec Leroy Sané
Lors d’une récente apparition à l’émission After Foot sur la chaîne française RMC, Bacary Cissé, le conseiller de Sadio Mané, a éclairé l’histoire tumultueuse du joueur sénégalais au Bayern Munich la saison dernière, notamment marquée par une altercation avec son coéquipier Leroy Sané.
Le départ de Sadio Mané vers Al-Nassr en Arabie saoudite a déclenché des révélations franches. Bacary Cissé a saisi l’occasion de l’émission After Foot pour revisiter le parcours mouvementé de la star sénégalaise en Bavière, en mettant en évidence l’altercation avec Leroy Sané.
L’incident en question s’est produit en avril après le quart de finale aller de la Ligue des champions contre Manchester City. Selon les informations, les joueurs en sont venus aux mains dans le vestiaire, et Mané aurait adressé un coup au visage de Sané. Cet incident a finalement conduit à la séparation entre le nominé au Ballon d’Or et le club bavarois quelques mois plus tard. Cependant, Bacary Cissé affirme que la vérité sur l’altercation n’a pas été entièrement révélée et il a livré sa version des faits.
Cissé qualifie Leroy Sané de personne très condescendante, tout en louant Sadio Mané pour n’avoir jamais causé de problèmes où qu’il ait joué. Il a déclaré que Sané avait franchi une limite pendant l’altercation, mais qu’il s’était ensuite excusé auprès de Mané, qui a accepté les excuses avec l’espoir que de tels incidents ne se reproduiraient pas, exprimant ainsi sa fierté pour ce qu’il est.
Cependant, la situation prend une tournure plus sombre car Cissé sous-entend la présence de racisme. Bacary Cissé a confirmé que, lorsque confronté aux dirigeants du Bayern Munich, Leroy Sané a nié avoir proféré des insultes racistes pendant l’altercation. Certaines informations avaient suggéré que des insultes racistes de Sané envers Mané avaient déclenché la confrontation.
Cissé exprime sa frustration envers le club du Bayern Munich, estimant qu’il y a de l’ingratitude de leur part. Il affirme que Sané a nié ses actions, mais que le club n’a sanctionné que Mané pour un match, malgré la gravité de la situation. Cissé évoque l’idée que si Mané avait été en tort, il aurait dû faire face à des conséquences plus sévères.
Concernant l’amende présumée de 350 000 euros à l’encontre de Sadio Mané, Cissé nie ce montant et affirme qu’il s’agissait en réalité de 50 000 euros. Interrogé sur la raison pour laquelle ces problèmes n’ont pas été abordés plus tôt, il explique qu’à un moment donné, cela aurait été une question de parole de Sadio contre celle de Leroy Sané, les poussant ainsi à gérer la situation discrètement jusqu’à la fin de la saison.
Cissé exprime également sa déception envers Thomas Tuchel, l’entraîneur du Bayern Munich, affirmant qu’il avait promis à Mané une place dans le onze de départ mais qu’il avait été contraint de suivre les directives de la direction du club. Cela a conduit à placer Mané derrière Gnabry dans la hiérarchie pour le poste d’ailier gauche.
PRÈS DE 30 000 PARTISANS DU COUP D'ÉTAT MILITAIRE DANS UN STADE DE NIAMEY
Le général Mohamed Toumba, un des dirigeants du CNSP, a pris la parole devant la foule pour dénoncer ceux "qui sont tapis dans l'ombre" et qui "sont en train de manigancer la subversion" contre "la marche en avant du Niger"
Près de 30.000 partisans du coup d'Etat militaire au Niger se sont rassemblés dans un stade de Niamey dimanche, jour de l'expiration de l'ultimatum fixé par la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest pour une éventuelle intervention armée, ont constaté des journalistes de l'AFP.
Une délégation de membres du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP, qui a pris le pouvoir) est arrivée dans le stade de 30.000 places sous les acclamations de ses soutiens, dont plusieurs arboraient des drapeaux russes et des portraits de dirigeants du CNSP. Ce stade, le plus grand du Niger et qui porte le nom de Seini Kountché, auteur du premier coup d'Etat au Niger en 1974, était presque rempli et l'atmosphère y était festive, a-t-on constaté.
Le général Mohamed Toumba, un des dirigeants du CNSP, a pris la parole devant la foule pour dénoncer ceux "qui sont tapis dans l'ombre" et qui "sont en train de manigancer la subversion" contre "la marche en avant du Niger". "Nous sommes au courant de leur plan machiavélique", a-t-il dit.
Cette démonstration de force survient le jour de l'expiration de l'ultimatum fixé le 30 juillet par la Cedeao aux militaires ayant pris le pouvoir pour rétablir dans ses fonctions le président renversé Mohamed Bazoum, sous peine d'utiliser la force pour se faire. L'ultimatum arrive à échéance dimanche soir et pour l'heure, les généraux qui ont pris le pouvoir le 26 juillet à Niamey n'ont montré aucune volonté de céder la place.
Les contours de la force pour une possible intervention militaire ont été "définis" vendredi par les chefs d'Etat-major de la Cedeao et certaines armées comme le Sénégal et la Côte d'Ivoire se sont dites prêtes à y participer. Le coup d'Etat a été condamné par l'ensemble des partenaires occidentaux et africains du Niger, mais les militaires nigériens ont reçu le soutien de leurs homologues du Mali et du Burkina Faso - également arrivés au pouvoir par des putschs en 2020 et 2022 - qui affirment qu'une intervention au Niger serait une "déclaration de guerre" à leurs deux pays.
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TOUS LES DOMAINES DÉFLORÉS PAR LES FEMMES
Elle est l'une des deux rectrices à la tête d'une université. Microbiologiste de formation, elle a conscience que la contribution des femmes en sciences est très peu mis en avant, sa nomination à la tête de l'USSEIN est peu ou prou un pas en avant
Le 11 juillet 2023, le Pr Ndeye Coumba Kane a été la modératrice de la table ronde organise à l’Institut Cervantes de Dakar par la Fondation espagnole Mujeres por Africa, en collaboration avec l’ambassade d’Espagne au Sénégal et l’université El Hadj Ibrahima Niass du Sine Saloum qu’elle dirige d’ailleurs.
Elle avait à ses côtés cinq autres scientifiques sénégalaises pour discuter de leur contribution aux objectifs (ODD) definis par les Nations Unies en 2015 pour l’ensemble des pays de la planete dont le cap est fixe en 2030.
En marge de cette rencontre le Pr. Kane Toure a répondu aux questions d’AfricaGlobe Tv sur les objectifs de la table rondes et d’autres questions en rapport avec la place des femmes au Sénégal.
Microbiologiste de formation, le Professeur Ndeye Kane Toure est depuis 2020, la deuxième femme à la tête d'une université au Sénégal en dehors de Ramatoulaye Diagne Mbengue qui dirige l'unversité Iba Der Thiam de Thiès.
Première femme à la tête d'une université thématique, El Hadj Ibrahima Niass du Sine Saloum, au plus fort de la pandémie de Covid-19, elle était aussi l’une des rares femmes à apparaitre dans les médias pour analyser cette crise et donner des conseils pratiques.
ENTRE LIBYE ET TUNISIE, LE DESTIN DU MIGRANT PATO A BASCULÉ EN DEUX PHOTOS
Pato a survécu grâce à deux Soudanais qui lui ont donné de l'eau, mais Fati et Marie, perdues dans l'immensité désertique, sont mortes de soif. Leur histoire donne un visage aux 24 corps découverts dans le désert libyen depuis début juillet
"C'était la dernière fois que nous étions heureux tous les trois", dit Pato, d'une voix terne, les yeux sur son téléphone portable où on le voit avec sa femme et sa fille, sourires insouciants aux lèvres.
Quelques mois plus tard, une autre photo a fait voler en éclats la vie de Mbengue Nyimbilo Crepin, un migrant camerounais en Libye, surnommé Pato.
Un ami lui montre sur Internet un terrible cliché de sa femme ivoirienne, Fati Dosso, 30 ans, et de leur fille, Marie, 6 ans, dont il a été séparé lors d'un périple à travers le désert entre Tunisie et Libye, leurs corps gisant dans le sable, blotties l'une contre l'autre.C'était le 19 juillet.
Après sept ans en Libye, Pato qui gagnait sa vie comme peintre, avait décidé de quitter Zouara, à 120 km à l'ouest de Tripoli, pour se rendre en Tunisie avec Fati et Marie.Faute de papiers en règle, ils ne pouvaient pas se présenter au poste-frontière.
Mais, contrairement aux milliers de migrants qui cherchent à émigrer clandestinement, traverser la Méditerranée à partir du littoral tunisien pour rejoindre l'Italie n'était pas l'objectif de Pato et les siens.
Leur priorité était de scolariser Marie dans une école "où l'on parle français" parce que la petite, "depuis qu'elle est née, n'a jamais été à l'école", raconte son papa à l'AFP quelque part dans la banlieue de Tripoli, soulignant que d'autres Africains disaient que c'était possible en Tunisie.
Ils sont interceptés une première fois le 13 juillet dans la ville tunisienne de Ben Guerdane, et renvoyés vers le désert libyen, sous un soleil de plomb.Ils repartent dans la nuit vers la Tunisie.
Au petit matin, Pato, Fati et Marie, qui n'ont pas bu depuis 24 heures, croisent une femme et lui demandent de l'eau.Elle les envoie à la mosquée, mais cinq minutes plus tard, la police tunisienne débarque.
- "Frappés et fouillés" -
La petite famille est emmenée à un poste de police où se trouvent "une dizaine d'autres Subsahariens interceptés par la police", selon Pato.
"Ils nous ont frappés et fouillés, nous étions assis sur le sable au soleil", avant d'être transportés vers un autre poste "où ils nous ont battus en disant qu'ils allaient nous renvoyer en Libye", dit-il, indiquant qu'il y avait un autre groupe d'"une trentaine de Subsahariens".
"On nous a pris nos téléphones qu'ils ont cassés devant nous et nos pièces d'identité", dit-il.Ensuite, Pato, sa famille et d'autres Africains sont conduits en camion à la frontière.
"Ils nous ont abandonnés à côté d'une tranchée, en disant de traverser et d'aller tout droit vers la Libye.Ils nous ont menacés avec des armes", dit-il.
Dans le désert, ajoute Pato, "j'étais à bout de forces.Ça faisait quatre jours que nous marchions, sans manger ni boire.Je me suis écroulé.Nous pleurions tous les trois.Ma femme m'a demandé d'essayer de me lever et de continuer".
Pato parvient à convaincre Fati de poursuivre sa route pour "essayer de sauver au moins l'enfant"."Je sentais que c'était fini pour moi.J'ai demandé à ma femme de partir et me laisser".
Plus de deux semaines ont passé mais la douleur reste insupportable pour Pato.
La terrible photo des corps de Fati et Marie a fait le tour du monde, au moment où des organisations humanitaires et l'ONU dénonçaient "l'expulsion de migrants" aux frontières avec la Libye et l'Algérie, malgré de vives dénégations des autorités tunisiennes.
L'histoire de Pato est en réalité distincte: il ne fait pas partie des centaines d'Africains présents en Tunisie, chassés de la ville portuaire Sfax -- épicentre de l'émigration vers l'Italie -- après une rixe ayant causé la mort d'un Tunisien le 3 juillet.
Plusieurs ONG ont documenté ensuite l'abandon par les forces tunisiennes de centaines d'Africains (au moins 1.200, selon HRW) dans des zones inhospitalières aux frontières libyenne et algérienne.Des médias dont l'AFP ont recueilli de nombreux témoignages côté libyen.
Un porte-parole de l'ONU a dénoncé mardi "l'expulsion de migrants (...) de Tunisie vers les frontières avec la Libye et l'Algérie".
La famille de Pato s'est retrouvée en fait au mauvais endroit au mauvais moment.
- "Plus envie de rien" -
Pato a survécu grâce à deux Soudanais qui lui ont donné de l'eau, mais Fati et Marie, perdues dans l'immensité désertique, sont mortes de soif.
Leur histoire donne un visage aux 24 corps découverts, selon un bilan de sources humanitaires, dans le désert libyen depuis début juillet.
"J'ai pensé à me suicider à plusieurs reprises", lâche-t-il, sans émotion.
Aujourd'hui, Pato qui n'a plus de famille au Cameroun, est en contact avec le HCR et Médecins sans frontières pour obtenir le statut de demandeur d'asile et un soutien psychologique.
Pour aller de l'avant, il puise dans les souvenirs des jours heureux avant le drame.Il se rappelle notamment comment Fati, sa "source de motivation", lui disait: "ne te décourage pas, nous allons atteindre nos objectifs".
"Elles sont parties avec mon âme. Je n'ai plus envie de rien."
NIGER : INCERTITUDES SUR UNE INTERVENTION MILITAIRE À QUELQUES HEURES DE LA FIN DE L'ULTIMATUM
imanche matin, les rues de la capitale Niamey étaient calmes, mais de nombreux résidents de la capitale - fief de l'opposition au président déchu - espèrent éviter une intervention militaire
L'incertitude demeure dimanche au sujet d'une éventuelle intervention militaire du bloc ouest-africain au Niger, après des critiques émises dans deux pays voisins, au Nigeria et en Algérie, à quelques heures de l'expiration de l'ultimatum de la Cedeao.
Dimanche dernier, la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'ouest avait donné sept jours aux putschistes pour rétablir le président élu Mohamed Bazoum dans ses fonctions, sous peine d'utiliser "la force".
L'ultimatum arrivera à échéance en fin de journée et pour l'heure, la junte qui a pris le pouvoir le 26 juillet à Niamey n'a montré aucune volonté de céder la place.
Mais la perspective d'une intervention militaire des pays ouest-africains est encore loin d'être acquise.
Si ses contours ont été "définis" vendredi par les chefs d'Etat-major de la Cedeao et certaines armées comme le Sénégal se disent prêtes à participer d'autres voix, critiques, s'élèvent.
Samedi les sénateurs du Nigeria, poids lourd de la Cedeao avec ses 215 millions d'habitants et qui partage une frontière de 1.500 km avec le Niger, ont appelé le président Bola Tinubu à "renforcer l'option politique et diplomatique".
- "Menace directe" -
Selon la presse nigériane, une majorité de sénateurs ont exprimé leur opposition à une opération militaire, lors d'une réunion à huis-clos.
Or selon la Constitution du pays, les forces de sécurité ne peuvent combattre à l'étranger sans l'aval préalable du Sénat, sauf exception en cas de "risque imminent ou danger" pour la sécurité nationale.
Samedi soir l'Algérie, qui n'est pas membre de la Cedeao mais partage près de 1.000 km frontière avec le Niger, a également émis des réserves.
Le président Abdelmadjid Tebboune a estimé à la télévision publique qu'une intervention serait "une menace directe" pour son pays. "Il n'y aura aucune solution sans nous (l'Algérie)", a-t-il ajouté, craignant que "tout le Sahel (ne) s'embrase" en cas d'intervention.
Les putschistes de Niamey ont de leur côté promis cette semaine une "riposte immédiate" à "toute agression".
Et ils pourraient compter sur le soutien de deux voisins: le Burkina Faso et le Mali qui ont prévenu qu'ils seraient solidaires du Niger et que toute intervention armée serait considérée comme une "déclaration de guerre" à leur encontre.
Ces pays dirigés par des juntes militaires sont toutefois confrontés, comme le Niger, à des violences jihadistes récurrentes qui mobilisent leurs troupes.
"Il faut empêcher le scénario catastrophique d'une guerre", a alerté de son côté un collectif de chercheurs, spécialistes du Sahel, dans une tribune publiée samedi soir dans le quotidien français Libération.
"Une guerre de plus au Sahel n’aura qu’un vainqueur : les mouvements jihadistes qui depuis des années construisent leur expansion territoriale sur la faillite des Etats", écrivent-ils.
- "Aggraver la situation" -
Dimanche matin, les rues de la capitale Niamey étaient calmes, mais de nombreux résidents de la capitale - fief de l'opposition au président déchu - espèrent éviter une intervention militaire.
"Si la Cedeao intervient, ça va encore aggraver la situation.Mais les gens sont prêts et la population va soutenir les nouveaux dirigeants, parce que nous voulons du changement", assure Jackou, commerçant dans le textile, à l'intérieur de sa boutique.
La Cedeao et les pays occidentaux réclament un retour à l'ordre constitutionnel et la libération du président Bazoum, retenu prisonnier des putschistes depuis le coup d'Etat.
La France a notamment indiqué samedi appuyer "avec fermeté et détermination" les efforts de la Cedeao pour faire échouer la tentative de putsch, estimant qu'il en allait "de l'avenir du Niger et de la stabilité de toute la région".
Les relations entre la junte et l'ancienne puissance coloniale se sont dégradées ces derniers jours.
Les putschistes ont dénoncé jeudi soir des accords de coopération militaire et sécuritaire avec Paris, qui déploie au Niger 1.500 soldats pour la lutte antiterroriste.