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25 août 2025
PAR Hamidou Anne
LE SÉNÉGAL VAINCRA À NOUVEAU
Par je ne sais quelle logique, l’Etat du Sénégal a laissé un citoyen -affabulateur, médiocre, manipulateur, violent, séditieux- s’ériger au-dessus du droit pour faire ce qu’il veut
Les violences, qui ont explosé à l’issue du verdict de l’affaire opposant M. Ousmane Sonko à Mme Adji Sarr, sont intolérables en démocratie. Depuis deux ans, les morts s’empilent, des biens publics et privés sont détruits, l’autorité de l’Etat est sans cesse remise en cause et une culture de la jacquerie tend à s’installer. Aucune violence verbale voire physique ne saurait être acceptée dans un Etat de Droit, et les citoyens ne peuvent être pris en otage pardes feux dont ils ne sont nullement à l’initiative. Je ne commente pas les décisions de Justice sur la place publique, par principe et eu égard à ma conception de la République. Mais pour la lecture politique des événements, hélas, rien de ce qui se passe au Sénégal ne me surprend. Les autorités ont laissé s’installer une culture de l’outrance et de la défiance vis-à-vis des institutions républicaines, qui atteint ici son paroxysme avec des citoyens qui prennent des armes contre leur propre pays.
Par je ne sais quelle logique, l’Etat du Sénégal a laissé un citoyen -affabulateur, médiocre, manipulateur, violent, séditieux- s’ériger au-dessus du Droit pour faire ce qu’il veut, au mépris des règles collectivement acceptées et dont l’Etat est censé être le garant. En République, on ne laisse pas un citoyen insulter et menacer magistrats, hauts gradés, hommes de rang, appeler à l’insurrection et au coup d’Etat, appeler au meurtre du chef de l’Etat, diffuser des mensonges et discréditer les institutions sans rien faire. Quelle est la logique d’interpeller un citoyen qui viole la loi sur la voie publique et le convoyer chez lui, au lieu de l’acheminer au Commissariat le plus proche ? En refusant de faire face à l’inéluctable, l’Etat du Sénégal a banalisé l’inacceptable et inséré à dose homéopathique à une catégorie de citoyens, qu’elle pouvait se hisser au-dessus de la règle de Droit et aux jeunes que les institutions n’étaient pas à sacraliser.
Je le rappelle pour ceux que cela pique : M. Sonko est un fasciste. Comme tous ceux de son obédience politique, il ne peut respecter les institutions car il n’est ni démocrate ni républicain. Il vit sur la rente de l’affrontement permanent pour espérer conquérir le pouvoir par la force ou en tout cas provoquer une rupture du fonctionnement normal des institutions. Dès lors, quand on gouverne un pays, de surcroît un grand pays comme le Sénégal, on ne saurait laisser le désordre s’installer et procéder ainsi à la dévitalisation des institutions, car elles sont le garant de notre commun vouloir de vie commune. Sur ce sujet précis, il convient de rappeler qu’on ne combat le fascisme que par le Droit et les principes républicains, et non par la violence sur des civils désarmés, qu’aucune cause ne saurait justifier. Notre arsenal juridique est doté de dispositions pour sanctionner définitivement toute déviance antirépublicaine.
Aussi, il est inacceptable de faire recours à des civils comme supplétifs des Forces de défense et de sécurité. Une démocratie s’honore de toujours demeurer dans le corset du Droit. M. Sonko est un délinquant condamné deux fois en moins d’un mois par un magistrat du siège. Ses opinions sont antirépublicaines, et son parti vient le 2 juin dernier d’appeler officiellement à l’insurrection et au putsch militaire. Ces gens sont des ennemis de la République qu’il faut combattre, de manière ferme, quel qu’en soit le prix, sinon, à terme, c’est la République qui va s’affaisser, nous plongeant tous dans un cycle dangereux et pour une durée indéterminée.
Le parti Pastef et ses satellites appellent les Sénégalais à descendre dans la rue pour en finir avec le régime et nul responsable identifiable n’est aperçu dans les manifestations ? Où sont les représentants de la société civile qui soufflent sur les braises ? En démocratie, on ne permet pas à des individus encagoulés de marcher dans les rues, et ce quelle que soit la cause qu’ils prétendent défendre. Nous avons l’habitude dans les marches de protestation, de voir des visages connus, mais où sont-ils ? Au contraire, des bandes de pillards, des casseurs, des hommes armés paradent dans les rues, tuent des Sénégalais, et aucune voix sérieuse parmi les hommes politiques, intellectuels et membres de la Société civile ne dénonce ces crimes.
Ces pillages, ainsi que cette violence d’un autre âge exercée sur des civils et des policiers et gendarmes ont un objectif précis : faire peur et choquer les citoyens pour les inciter soit à la révolte, soit à rester cloîtrés chez eux pour paralyser le pays.
Le parti Pastef a imposé la tyrannie sur les réseaux sociaux, et sur les intellectuels et les journalistes ; des consciences rampent sur le tapis du reniement pour échapper à la furie des nouveaux censeurs et insulteurs publics. Désormais, c’est dans les quartiers qu’on menace et tue pour asseoir définitivement la terreur. Où sont les consciences qui se disent démocrates et progressistes quand le sac de l’université est opéré, quand les facultés sont incendiées, quand le Cesti qui forme les fabricants de l’information nécessaire à la vie démocratique est attaqué ? Ils ont brûlé la bibliothèque de l’Université de Dakar. Les livres, chemin balisant vers le savoir, sont les ennemis de ces gens qui prospèrent sur le lit de l’ignorance et de l’obscurantisme. J’ai pensé aux fascistes boliviens quand ils ont chassé la Gauche au pouvoir. Leur premier forfait a été d’incendier la bibliothèque de l’intellectuel et homme politique progressiste, Alvaro Garcia Linera, qui était composée de 30 000 livres.
Rien n’est surprenant dans cette terreur, car l’ennemi de ces gens, c’est la lumière qui libère et élève l’humain afin de lui rendre sa dignité d’homme qui pense et agit en liberté et en responsabilité.
Notre pays fait face à une tentative insurrectionnelle incontestable organisée, et dont les prémices sont visibles depuis quelques années à force de discours guerriers, de manipulation des masses par des médias irresponsables, de recours systématique aux infox et d’une volonté d’acquisition du pouvoir par la rue au détriment de la voie démocratique. L’Etat a une responsabilité dans le pourrissement de la situation, à force de légèreté et d’absence d’actes forts visant à défendre la République. Mais l’opposition dite républicaine a aussi joué avec le feu par calcul politicien, par haine d’un homme et par avidité du pouvoir. Elle a vendu son âme pour des sièges. J’ai déjà assez écrit sur la fumisterie d’une Société civile qui se fait un devoir de prendre parti et de miser sur un bon cheval sans reculer devant aucune abjection. Je passe outre les intellectuels, tétanisés à l’idée de prendre leurs responsabilités et dont l’activité favorite est de verser dans la facilité à taper sur le Président Sall, sans jamais dénoncer l’usage du discours violent et antirépublicain de M. Sonko qui leur inspire une peur sidérante et qui promeut tout ce contre quoi ils écrivent et agissent depuis des années.
Cette crise est le fruit d’une irresponsabilité de la classe politique, mais elle est aussi la conséquence d’un délitement de nos institutions depuis 2000. Le temps d’aborder ces questions de fond viendra, mais quand des irrédentistes qui, en quarante ans, n’ont jamais pu régner sur un centimètre carré de territoire sénégalais, paradent à Dakar, il faut faire face et répondre à l’urgence du devoir moral. Par sens de l’Etat, par patriotisme et par conscience républicaine, mon soutien à nos institutions républicaines en ces temps incertains est sans réserve. Il n’y a, de mon point de vue, ni la Gauche, ni la Droite, ni la majorité, ni l’opposition, il y a la République face à des individus qui, contre elle, ont pris les armes.
Post-scriptum : M. le président de la République, votre gouvernement a annoncé une attaque de notre pays par des bandes armées alliées à des mercenaires étrangers. Je fais le choix de vous croire, ayant mis ma sécurité et une partie de ma souveraineté entre vos mains en tant que représentants légitimes et légaux du Peuple sénégalais. Conformément aux lois de notre pays, je soutiendrai toute mesure que vous et votre gouvernement prendrez pour restaurer l’ordre public ainsi que la quiétude de nos concitoyens, arrêter les bandes armées et les mettre à la disposition de la Justice, même si je suis lucide sur le caractère si infime d’un soutien de ma part.
Le gouvernement ne devra pas reculer face à un ennemi de type militaire dont les revendications ont moins une base politique qu’insurrectionnelle. Tout recul signifiera l’effondrement de la République que vous avez juré de préserver.
Le Sénégal, depuis l’indépendance, n’a jamais été vaincu. Le Sénégal vaincra à nouveau ses agresseurs d’aujourd’hui. M. le président de la République, vous êtes assis sur le fauteuil d’un des plus illustres Africains, Léopold Sédar Senghor ; vous avez l’honneur de diriger une grande Nation dont le rayonnement traverse les âges et les frontières. C’est au nom de cet honneur, le plus grand possible, qui est de conduire aux destinées du Sénégal, le pays de Dieu, que je vous prie de préserver la République laïque, démocratique et sociale, la Nation indivisible et l’Etat fort et prestigieux.
CETTE SITUATION NE FERA QU'EMPIRER SI MACKY ANNONCE SA CANDIDATURE
L'opposant et candidat à la présidentielle Idrissa Seck appelle au calme, et demande au président sénégalais, Macky Sall, de clarifier ses intentions pour la prochaine élection présidentielle, afin d'éviter davantage de violences
Lundi matin, Dakar était revenu à un calme relatif après quatre jours de manifestations et de violences.
Alors que le camp présidentiel accuse les manifestants, l'opposition a dénoncé ce qu'elle qualifie d'"abus de pouvoir".
L'opposant et candidat à la présidentielle Idrissa Seck appelle au calme, et demande au président sénégalais, Macky Sall, de clarifier ses intentions pour la prochaine élection présidentielle, afin d'éviter davantage de violences.
Il a déclaré à RFI que "le problème avec un troisième mandat, c'est que même la perspective de celui-ci provoque des troubles".
Il a ajouté: "Nous assistons à la violence et aux bouleversements dans nos rues habituellement paisibles. Nous avons vu la mort. Ce n'est pas bon pour notre peuple. Ce n'est pas non plus bon pour la portée mondiale du Sénégal. Cette situation ne fera qu'empirer si le président Macky Sall annonce une candidature pour un troisième mandat. Ce serait profondément préjudiciable au Sénégal.
Appel à arrêter la violence
On sait qu'au moins 16 personnes sont mortes dans les affrontements entre manifestants et forces de sécurité dans la capitale, Dakar, et à Ziguinchor dans la région de Casamance, dans le sud du pays.
Des affrontements meurtriers frappent le Sénégal après la condamnation du chef de l'opposition Sonko La Croix-Rouge du Sénégal a affirmé hier que près de 360 personnes avaient été blessées dans les violences.
Les violences ont éclaté jeudi après que le chef de l'opposition Ousmane Sonko, qui est le maire de Zinghinchor, a été condamné à deux ans de prison.
Les partisans de Sonko affirment que sa condamnation pour "corruption" d'une jeune femme est politiquement motivée et conçue pour l'empêcher de se présenter à la présidence.
Ils ont condamné ce qu'ils ont appelé la "répression meurtrière" par les forces de sécurité nationale.
Le parti de Sonko, le Pastef, a également condamné la restriction de l'internet mobile par le gouvernement, pour empêcher le partage de ce qu'il a appelé des "messages subversifs".
Le gouvernement sénégalais coupe l'accès à Internet mobile au milieu d'émeutes meurtrières
Dialogue difficile
Selon Idrissa Seck, qui était à la tête du Conseil économique, social et environnemental du Sénégal jusqu'à fin avril, seule l'indication claire de Sall qu'il ne briguera pas un troisième mandat apaisera le peuple sénégalais, en particulier les jeunes.
"Je prie, je crois et je m'attends à ce que le président Sall ne se présente pas du tout", a-t-il ajouté.
En avril, Seck a annoncé qu'il avait l'intention de se présenter à la présidence lors des prochaines élections sénégalaises, prévues en février 2024.
Il participe au "dialogue national", ouvert par le président Sall jeudi dernier, que la plupart des autres partis d'opposition boycottent, dont Sonko.
Seck a déclaré à RFI que "la priorité doit être de protéger la démocratie", et espère rallier l'opposition autour de lui.
Aujourd'hui âgé de 63 ans, Seck a été Premier ministre du Sénégal de novembre 2002 à juillet 2004 et s'est classé deuxième à l'élection présidentielle de 2019.
"C'est la priorité du gouvernement de maintenir la paix et la stabilité", a conclu Seck. "Donc, j'appelle tous les dirigeants de l'opposition à se concentrer là-dessus aussi."
par El Hadji Omar Youm
CHERS MESSIEURS, BRISEZ VOS PLUMES
Vous êtes, manifestement, dans la compromission, la démission, l’euphémisme dans l’unique dessein, vil et égoïste, de défendre votre image d’intellectuels qui se rangent du « coté du peuple » sans être mue par la volonté de dire la vérité
J’ai lu et relu, plusieurs fois, votre sortie au vitriol sur la situation politique au Sénégal.
Votre analyse m’a aussi profondément troublé que les morts que nous pleurons et déplorons, les énormes dégâts matériels constatés, les bravades de toutes sortes sur des populations sans défense, les saccages de nos universités, de nos bibliothèques incendiées, « le terrorisme digital », les attaques brutales de nos forces de défense et de sécurité vilipendées, violentées et tuées par des manifestants hors la loi …
Si pour vous le seul justificatif à cette sauvagerie devrait être la volonté prêtée au président Macky Sall de briguer un troisième mandat alors chers messieurs, avec tout le respect que je vous voue, briser vos plumes !
Sans vous en rendre compte vous êtes, manifestement, dans la compromission, la démission, l’euphémisme dans l’unique dessein, vil et égoïste, de défendre votre image d’intellectuels qui se rangent du « coté du peuple » sans être mue par la volonté de dire la vérité.
Je voudrais avant tout, regretter votre sarcastique et sournoise « vérité » consistant à affirmer sans raison, dans un jugement de valeur qui n’honore ni votre rang ni votre réputation, et qui, par sa généralisation enlève toute rigueur intellectuelle à votre fumeuse tribune.
En considérant, de façon manichéenne, sans aucune retenue, ni gêne que les tenants du pouvoir constituent une « caste que ni la misère sociale ni sa propre misère morale » ne semble affecter, vous dépassez les bornes de la courtoisie et de la simple civilité en mettant des digues, des barrières funestes à la cohésion et à la justice sociales.
Dans la stigmatisation et les classifications sociétales puériles, beaucoup de prétendus intellectuels ont brulés leur pays sans s’en rendre compte.
Pour ma part, je reste convaincu que dans la classe politique il n’y a pas que des bons d’un côté et des mauvais de l’autre. Une telle assertion est monstrueuse, satanique et constitue, à mon sens, une froide et méchante moquerie qui balafre d’emblée votre petite vérité.
Respectez le peuple qui, en 2019, malgré toutes les affirmations scabreuses contenues dans votre satire, avait réélu le président Macky Sall au premier tour avec plus de 58% du suffrage valablement exprimé des sénégalais.
Respectez vos dirigeants qui se sont engagés en politique pour apporter leur modeste et responsable contribution dans la construction de notre pays, renonçant ainsi à l’intimité d’une paisible vie familiale confortable, se soumettant, avec responsabilité, à la redevabilité, à la critique souvent facile et par endroit envieuse et lâche.
Vous parlez de justice sociale ? De quelle justice sociale ? Notre bilan dans le secteur de la justice sociale est énorme !
Après la mise en œuvre de l’Acte 3 de la Décentralisation pour plus d’équité et de justice dans l’action territoriale, d’énormes chantiers ont été engagés pour réduire les inégalités sociales, mettre en œuvre la carte d’égalité de chance, protéger les personnes vulnérables, créer et élargir les mutuelles de santé, instaurer la bourse de sécurité familiale, renforcer la protection de l’enfance, augmenter les subventions sur les produits de première nécessité, sur l’électricité, sur l’eau, réduire l’impôt au profit des masses laborieuses à travers une réforme de la fiscalité, augmenter les salaires et les pensions, réduire les disparités sociales en dotant les localités périphériques ou isolées d’infrastructures de désenclavement et d’équipements essentiels, tout en renforçant les accès aux soins de santé, à l’eau, à l’électricité…..
Des efforts importants ont été déployés pour faire bénéficier à nos populations, particulièrement celles vulnérables, du progrès économique et social.
Alors, de quelle justice sociale parlez-vous ?
Chers messieurs, de grâce osez affirmer que depuis 2017, avec l’avènement de ce parti de Sonko, nous assistons à une véritable montée en puissance d’un discours politique haineux, médiocre, violent qui constitue une réelle menace pour la démocratie, à la cohésion sociale et à la concorde nationale.
Nous assistons, à la dictature de la minorité politique, une remise en cause de notre système républicain, à une instrumentalisation d’un nationalisme démodé, irréalisable (impossible, ou inapplicable) et inopérant, un discours démagogique fondé sur une remise en cause systématique de nos valeurs sociales, un mépris d’une rare brutalité des institutions démocratiques.
Il faut le dire, le Sénégal découvre une nouvelle ère d’une « bambinerie » politique qui cherche, par l’intimidation et la menace, à bâillonner le pouvoir judiciaire, à garrotter la liberté de la presse et à hypothéquer le droit à une information équilibrée et juste.
C’est une véritable guerre qui est engagée contre la République et ses valeurs.
C’est notre système républicain qui est menacé !
C’est notre mode de coexistence pacifique qui est soumis à rude épreuve !
C’est notre système démocratique qui est remis en cause !
Face à ces acteurs politiques d’un genre nouveau, incultes, malappris et discourtois, j’attendais de vous, à défaut d’une condamnation de principe, un simple appel à la retenue, à la responsabilité de tous les acteurs politiques, au respect et à la protection des biens publics et privés, ainsi qu’à la restauration de la tranquillité politique, rappelant qu’il ne peut y avoir place, dans l’espace politique, par essence démocratique, ni violence physique ni pillages.
Vous n’avez pas entendu les appels au mortel combat, au « thioki fin » comme dans un film de western.
Vous n’avez point vu les dérobades et mises en scène, de très mauvais goût, sur le chemin de la justice d’un monsieur qui a violé, éhontément, les règles de restriction dans le cadre de la lutte contre la pandémie du Covid-19 pour se rendre, librement et sans aucune contrainte, dans un lugubre salon afin d’assouvir une appétence certainement mal domptée. Quelle déception ! Quel silence coupable !
Dans des sociétés moins pudiques que la nôtre où l’accent du débat démocratique est fortement mis sur la probité morale des hommes politiques, pour moins que ça, à défaut de se retirer de la vie publique, des acteurs de premier ordre ont été contraints de présenter, souvent en toute humilité, leur excuse ou leur démission. Mais pour vous, rien de grave c’est simplement la justice qui est aux ordres…
C’est pourquoi, je comprends mieux, désormais, l’autre qui, affirmait, du reste avec raison, qu’« intellectuel n’est pas forcément synonyme d’intelligent ». Au lieu de nommer avec courage, impartialité et sérénité les maux qui guettent notre société, surtout en politique, vous avez préféré utiliser votre plume servile et inévitablement partiale pour tenter d’humilier une partie de la classe politique ainsi stigmatisée, jeter en pâture les gouvernants et, ainsi, rabaisser nos institutions démocratiques. Et, par-dessus tout, vous osez parler de pacte républicain à défendre….
Sans vous en rendre compte, chers messieurs, vous venez de le déchirer. Ce pacte, je ne sais pas si vous en connaissez le contenu, est constitué de l’ensemble des règles et principes, transcendant vos opinions, les miennes, opinions plurielles, multiples, souvent divergentes et qui facilite notre vie en société, dans la République. L’essence de ce pacte, en principe, hors temps, qui outrepasse nos convictions religieuses, politiques, philosophiques, notre appartenance sociale ou politique est dans le respect de nos institutions notamment celles judiciaires.
L’essence de ce pacte est dans le respect de nos forces de défense et de sécurité qui représentent la force de notre souveraineté nationale qui s’exprime exclusivement à travers la loi.
Si elles sont fragilisées c’est, assurément, tout l’édifice social qui s’affaisse.
Chers messieurs,
Aucun mot de reconnaissance voire de compassion ou de solidarité à ces braves citoyens qui, fidèles à leur serment de défendre en tout lieu et en tout temps notre République, ont acceptés, dans ce contexte d’une rare gravité, de faire preuve de retenue dans l’exercice de leur mission à la fois exaltante, difficile et loin d’être banale dans la consolidation du pacte républicain.
Contrairement à votre proposition consistant à changer le régime présidentiel que vous indexez sans raison, j’ai envie de vous rappeler que le problème du Sénégal n’est pas dans le choix entre un régime présidentiel et un régime parlementaire, choix déjà tranché en 2001 par un référendum ayant validé la Constitution, socle du pacte républicain, à plus de 94% des suffrages exprimés avec un taux de participation de plus de 65% des citoyens sénégalais.
Le problème de ce pays n’est donc pas dans la nature du régime, accepté et plébiscité par le peuple. Il est plutôt, à mon sens, au risque de me tromper, essentiellement dans nos us, dans nos mœurs, dans notre système éducatif, dans nos quartiers, dans nos maisons, dans nos lieux de travail, fortement symbolisé par cette sorte de légèreté morale déconcertante, stupéfiante, narcissique et généralisée qui menace notre commune volonté de vivre-ensemble.
Ne pas le reconnaitre c’est faire preuve d’une cécité dommageable !
Dès lors, il ne fait pas de doute que faire porter, exclusivement, la responsabilité de cette situation au seul président de la République, au régime présidentiel, est un raccourci primaire, dangereux, sans fondement intellectuel (rigoureux), qui affadit davantage votre vérité « en commandite ».
Malheureusement, comme le disait l’autre « c’est souvent comme ça avec le quotient intellectuel : un vrai « i » mais un faux « Q » ! ».
El Hadji Omar You est avocat, député à l’Assemblée nationale du Sénégal.
par Diomaye Ndongo Faye
LA TRAGÉDIE POLITIQUE SÉNÉGALAISE
EXCLUSIF SENEPLUS - Macky et Sonko doivent bien se regarder dans le miroir et se poser la question suivante : souhaiterais-je que les historiens relient mon nom à la déliquescence de la République du Sénégal ?
L’histoire du développement politique des sociétés humaines nous enseigne que des tragédies sont souvent survenues lorsque deux des leaders politiques les plus en vue dans l’entité sociale privilégient leurs intérêts personnels au-dessus de ceux de leurs peuples dans leur lutte pour la préservation et/ou la conquête du pouvoir. Ces protagonistes commencent par identifier les sources de grande peur, d’incertitude et d'inquiétude de leur peuple et décident de les utiliser comme fondement de ralliement à leur camp. Chacun se pose comme étant la seule et unique personne capable de mener le peuple à l’autre rive où les causes qui alimentent ces sentiments vont disparaître grâce à la baguette magique que seul lui est en mesure de manier. Si les institutions de cet espace administratif sont assez solides, cette tragédie peut aboutir à leur renforcement, c’est le cas de la guerre civile des États-Unis de 1861 à 1865. Dans le cas contraire, il est possible d’aboutir à ce qu’est devenu aujourd’hui la Somalie.
Ces deux leaders politiques sont aujourd’hui au Sénégal le président Macky Sall et le chef incontesté de l’opposition sénégalaise actuelle, Ousmane Sonko. Ces deux personnes doivent bien se regarder dans le miroir et se poser la question suivante : souhaiterais-je que les historiens associent mon nom à la déliquescence de la République du Sénégal ?
Le président Macky Sall et celles et ceux qui l’entourent sont animés par une forte intention de conserver le pouvoir. Ils usent de tous les moyens qui sont à leur disposition, et ils sont nombreux, pour empêcher toute candidature crédible de leur opposition à l’élection présidentielle du Sénégal. D’abord ce fut Karim Wade et Khalifa Sall et maintenant c’est Ousmane Sonko.
En ce qui concerne les deux premières personnes citées, c’était sur une accusation de malversation et d'usage personnel des deniers de l’État. Je ne dispose d’aucune donnée pour infirmer ou confirmer ces accusations. Ce que je sais cependant, comme tout bon Sénégalais qui suit religieusement l’actualité nationale, est qu’il y a plusieurs personnes qui ne sont pas du tout inquiétées par la justice sénégalaise sous la présidence de Macky Sall malgré les rapports accablants sur leur gestion des biens de l’État sénégalais.
Pour le cas d’Ousmane Sonko, il a d'abord été accusé d’être un Salafiste. Certaines personnes qui ignorent en réalité ce qu’est le Salafisme ou sont animées de mauvaises intentions lui attachent ce sobriquet pour le faire apparaître comme un islamiste radical qui va mettre fin à la laïcité de notre République et imposer la charia au peuple sénégalais dès qu’il accédera à la magistrature suprême du pays. Pour ceux et celles qui ne le savent pas, le Salafisme n’était rien d’autre qu’un mouvement pour le retour aux enseignements du Prophète Mohamed (PSL) et des quatre premiers califes Abu Bakr (632-634), Omar (634-644), Ôthman (644-656) et Ali (656-661). En quelque sorte un appel au retour à l’authenticité et un rejet des interprétations divergentes qui divisaient les musulmans.
En se fondant sur les résultats des dernières élections législatives, il est devenu évident aux yeux de Macky Sall et ses compagnons de l’APR et du BBY que cette diabolisation d’Ousmane Sonko et du Pastef n’a pas eu l’effet escompté sur le peuple sénégalais. Le score du Pastef, qui n’a rien à envier à ceux obtenus par toutes les oppositions politiques qui se sont succédé durant les régimes de Senghor, Diouf et Wade, est remarquable. Cette excellente performance du parti d’Ousmane Sonko a certainement démontré avec suffisance que ce dernier peut bel et bien vaincre en 2024 tout candidat ou candidate que l’APR et le BBY proposeront.
Étant donné que la diabolisation n’a pas produit le résultat escompté, Macky Sall et ses compagnons, qui sont déterminés à rester au pouvoir, ont dû se poser la question suivante : Que faire pour freiner l’élan du Pastef et surtout d’Ousmane Sonko dans leur marche qui semble être inébranlable vers la conquête du pouvoir ?
Ils nous ont tout d’abord sorti la plainte de l'un des leaders de l’APR pour diffamation. Ousmane Sonko a alors rapidement été condamné à six mois de prison avec sursis à l’issue de ce procès. Certains pensaient que cela suffirait pour le mettre hors d’état de nuire à l’ambition de conservation du pouvoir par l’APR et le BBY. Mais le manque de clarté des conséquences de ce verdict sur l’éligibilité d’Ousmane Sonko n’a pas rassuré Macky Sall et ses compagnons. Certes, la loi dit clairement que ce verdict empêche Ousmane Sonko de s’inscrire sur les listes électorales du Sénégal. Mais étant donné que ce dernier est déjà inscrit et que la loi ne dit rien sur l’éligibilité, vouloir interdire à Ousmane Sonko de se porter candidat en 2024 sur la base de ce verdict ne sera pas justifiable ni crédible.
L’affaire en cours contre Ousmane Sonko, son accusation de viol et de menace de mort par Adji Sarr, était alors devenue la roue de secours. Pour écarter le danger qu’une éventuelle candidature d’Ousmane Sonko représente pour la préservation du pouvoir par Macky Sall et ses compagnons, il fallait tout faire pour que le verdict de ce procès le mette à l’écart. Mais le non-lieu du procès contre Sitor Ndour et les preuves sans mérite présentées par Adji Sarr et ses avocats ont très rapidement montré au procureur qu’un verdict de culpabilité contre Ousmane Sonko ne sera pas du tout crédible aux yeux de l’opinion publique sénégalaise et mondiale qui surveille ce procès comme du lait sur le feu. C’est ainsi que, sachant qu’il allait perdre, le procureur a demandé au juge qu’à défaut de pouvoir le condamner pour ce dont il a été accusé, il faut l’incriminer pour le délit de « corruption de jeunesse ». Sur la base des témoignages lors du procès, surtout de celui de la jeune fille qui était avec Adji Sarr dans la salle de massage et à qui cette dernière avait demandé de sortir pour la laisser seule avec Ousmane Sonko, aucun juge qui se respecte n’allait mordre à cet hameçon du procureur.
Malgré ces incohérences dans la présentation des évidences pour prouver que Monsieur Sonko mérite une condamnation par la justice sénégalaise, le juge a décidé de suivre le procureur pour des raisons que seul Dieu et lui-même savent. Une chose est certaine, la légèreté des preuves qui lui ont été présentées et la gravité de la situation qui allait être créée par un verdict de culpabilité capable d’empêcher Ousmane Sonko d’être candidat à l’élection présidentielle du Sénégal en 2024, devraient pousser le juge à la prudence. Certes la force doit rester à la loi. Mais cette force devra reposer sur des décisions de la justice qui ne souffrent d’aucune ombre de doute objectif.
L’autre chose que je reproche à Macky Sall et ses compagnons est l’usage excessif de la force sous la forme d’emprisonnements sélectifs sur des bases douteuses qu’un juge qui se respecte n’aurait jamais approuvées. Le cas de Bassirou Diomaye Faye est un exemple type. En matière de justice, la procédure est aussi importante que les preuves présentées pour condamner une personne. Dans le cas de Bassirou Diomaye Faye, les policiers ont au moins violé la procédure. L’heure à laquelle il a été amené au commissariat et l’absence d’un mandat d'amener constituent des vices de procédures que le juge devant lequel il a été présenté n’avait pas le droit d’ignorer. Une relaxion pure et simple aurait dû être sa décision la première fois qu’il a été présenté devant ce dernier. Non seulement Bassirou Diomaye est en train de moisir en prison sans aucune idée sur la date de son procès, mais l’accusation sur la base de laquelle il a été arrêté manquerait de poids devant n’importe quel juge qui se respecte et qui a le moindre désir de prouver que ce que Bassirou Diomaye Faye a dit dans son texte Facebook n’était pas fondé.
Dire qu’une minorité des décideurs au sein du pouvoir judiciaire sénégalais est corrompue est une vérité indéniable. C’est d’ailleurs un mal dont souffrent tous les pouvoirs judiciaires du monde, peu importe l’état d’avancement du développement politique de leurs pays. Aucun magistrat qui se respecte et accepte le règne de la loi comme sève de la République ne songerait à condamner Bassirou Diomaye Faye sous le motif d’offense à la magistrature pour avoir exprimé une telle opinion qui est une vérité mondiale depuis des siècles. Le Pastef a, selon ses leaders, plus de 400 (quatre cents) de ses membres en prison pour des raisons liées à leurs activités politiques. Certes, il est fort probable que parmi les personnes incluses dans ce décompte des membres de Pastef il y a des individus coupables de flagrant délit d’actions ayant causé des dégâts matériels. Il n’est cependant pas exagéré de dire que la grande majorité parmi ces détenus le sont pour ce qu’ils ont dit. Ne pas voir ces personnes comme prisonniers politiques est certainement un comportement plus que bizarre.
Qu’en est-il du côté d’Ousmane Sonko et le Pastef ?
Bien que mon fils, Bassirou Diomaye Faye, soit dans le leadership de ce parti, je dois dire ici que je ne suis pas membre de ce parti. En fait, bien qu’étant un militant de la gauche sénégalaise, j’ai cessé de militer dans un parti politique parce que je me suis rendu compte des limites réelles de leur capacité à sortir mon pays du gouffre néocolonial.
Le programme politique de Pastef est certes louable, mais il y a lieu de rappeler que ce n’est pas une nouveauté au Sénégal. Beaucoup de partis politiques ont vu le jour dans ce pays et avaient proposé d’excellents programmes au peuple sénégalais. Mais pour des raisons multiples, ils n’ont jamais atteint le niveau de popularité de Pastef. Les deux grandes raisons derrière le succès de Pastef sont à mon humble avis :
Le niveau qu’a atteint le manque d’espoir pour trouver du travail chez la jeunesse sénégalaise, ce que les économistes appellent la mauvaise gestion du dividende démographique par l’État sénégalais.
Le développement des médias sociaux et l’extraordinaire habileté des membres de la cellule communication de Pastef de les mettre au service de leur cause.
Qu’est-ce que je reproche au Pastef et son leadership ?
Notre pays, comme d’ailleurs l’écrasante majorité des pays africains, est assis sur une bombe sociale à retardement : mauvaise gestion par leur État, pour des raisons structurelles, du dividende démographique ou en d’autres termes, l’incapacité de l’État/pays de créer les conditions optimales pour l’absorption par le marché du travail de la grande majorité des jeunes qui y accèdent chaque année.
Les leaders d’opinion, qu’ils soient politiciens, religieux, ou de la société civile du pays, devront tout faire pour ne pas être la cause de la production de l’étincelle qui peut faire éclater cette bombe. Les leaders politiques doivent absolument s’interdire, dans leurs efforts pour conquérir ou conserver le pouvoir, de donner à notre jeunesse au paroxysme de sa frustration, une raison quelconque d’exprimer leur courroux contre le gouvernement en faisant recours à la violence. Plutôt que de tout faire pour éviter que cette bombe éclate et embrase le Sénégal avec toutes les conséquences néfastes que cela peut causer, surtout pour un pays du Sahel, Ousmane Sonko et ses partisans semblent profiter du désespoir de la jeunesse sénégalaise pour accéder le plus rapidement possible au pouvoir. Le développement de la culture de l’attitude Gatsa est un danger pour le Sénégal. C’est une tactique qui peut certes servir à mobiliser une jeunesse déboussolée par les effets pervers de la non-viabilité et vulnérabilité de l’écrasante majorité des États africains mais c’est une manière de creuser la tombe du courant politique qui s’en sert pour accéder au pouvoir.
Dans une République, seul l’État a le droit de faire usage de la violence. Il va sans dire que beaucoup de politiciens véreux ont abusé de la confiance de leur peuple et recouru à un usage malsain de la violence, mais la seule réaction à un tel abus qui est offerte aux citoyennes et citoyens d’une République démocratique est le bulletin de vote, pas un gourdin, une machette, un cocktail molotov ou autre.
L’absence d’une condamnation des actes de vandalisme qui ont surgi à chaque fois qu’Ousmane Sonko a été traité d’une manière que les supporters de ce dernier perçoivent comme étant un abus de pouvoir est pour moi troublant. Ousmane Sonko qui aspire à la magistrature suprême de notre pays devrait être le premier à condamner sans réserve cette expression d’un manque total de civisme. Toute autre attitude, silence ou encouragement fait des dirigeants de Pastef les fossoyeurs en chef de toute possibilité de gouverner dans la paix quand le peuple sénégalais leur confiera la lourde tâche de gérer leur État. Ce que ces casseurs ne savent pas est que ce sont eux-mêmes et leurs familles qui vont payer à travers les impôts et les emprunts au nom du Sénégal, les dégâts qu’ils sont en train de causer, surtout les destructions des propriétés de l’État. Un proverbe Pulaar qui a été partagé avec moi par un ami enseignant Pulaar qui vit ici au Nord-Ouest de l’État de New York dit que « So ñiiwa ene habaa e ñiwaako hudo booretee » « quand deux éléphants se battent c’est l’herbe qui va souffrir quel que soit l’issue de la bataille, quel que soit qui a tort ou qui a raison ». Ce sont les baadolo sénégalais qui vont payer le prix des confrontations violentes entre Macky Sall et Ousmane Sonko par des dizaines de morts mais aussi comme indiqué plus haut par les impôts, la réduction des services sociaux de l’État et plusieurs autres manières.
Pour conclure je dirais ceci : il est temps que le duo Macky Sall-Ousmane Sonko revienne à la raison pour l’intérêt supérieur de la nation sénégalaise mais aussi pour les Africains qui utilisent le Sénégal comme exemple pour prouver à leurs compatriotes que la République démocratique est possible en Afrique au Sud du Sahara. Les sages de mes cousins Waalaf disent que « alal du doy, doylu moy alal ». Le président Macky Sall et ses compagnons doivent bien pondérer cet adage Waalaf et réduire de manière significative leur intention de garder le pouvoir pour préserver leurs intérêts matériels. En ce qui concerne Ousmane Sonko et ses partenaires, il est important de faire sienne cette leçon que l’histoire politique mondiale nous a enseignée : tu perdras le pouvoir par la manière dans laquelle tu l’as acquis.
La tragédie finit toujours par la mort d’un des membres du duo qui est coincé dedans. Les dégâts socio-économiques et matériels pour le Sénégal seront incalculables si cette tragédie Macky Sall-Ousmane Sonko connaît l’aboutissement de la grande majorité des tragédies. Il est temps pour vous monsieur le président de la République de vous rappeler qu’en vous confiant à vous seul le droit de l’exercice de la violence, le peuple sénégalais ne voulait pas que vous utilisiez ce droit pour vos gains personnels et/ou ceux de vos compagnons. À vous Ousmane Sonko, je conseille de tout faire pour éviter d’hypothéquer la gouvernabilité du Sénégal par les personnes élues.
Nous n’en sommes qu’au début de cette pièce de théâtre déjà très douloureuse pour les familles qui ont perdu un des leurs dans les manifestations liées à elle. Vous deux pouvez éviter au Sénégal une fin plus tragique en faisant la paix des braves. Président Sall, faites comprendre à vos compagnons qui craignent de perdre les privilèges qui viennent avec le maintien au pouvoir de l’APR/BBY que rien n’est éternel surtout les avantages liés à l’accession au pouvoir dans une République démocratique. Ousmane Sonko, dites aux membres de Pastef et à vos sympathisants que sans une culture du respect de la chose publique et le rejet d’un recours quelconque à la violence, quels que puisse être les injustices commises par les tenants du pouvoir, aucun parti ou coalition qui accédera au sommet de la pyramide politique de notre pays ne pourra bénéficier du climat de paix social sans lequel la prospérité économique est impossible.
À mes frères et sœurs qui brandissent l’argument selon lequel Ousmane Sonko et le Pastef vont détruire notre République s’ils accèdent au pouvoir, je dirais ceci : vous pensez cela parce que vous avez soit une attitude subjective négative à l’égard d’Ousmane Sonko et/ou Pastef ou une connaissance limitée de l’histoire de la démocratie. Premièrement vous n’avez aucune preuve des intentions que vous prêtez à Ousmane Sonko et son parti. Deuxièmement, même si Ousmane Sonko avait ces intentions, il appartient au peuple sénégalais de décider si oui ou non il a confiance en lui pour occuper la magistrature suprême de leur pays. Toute intention de prendre cette décision à la place du peuple sénégalais, quel que soit le moyen utilisé pour le faire, constitue un danger pour le développement politique apaisé de la République sénégalaise et doit par conséquent être condamnée vigoureusement. Se substituer au peuple sénégalais dans le processus du choix de la personne qu’il va remettre la présidence de la République en 2024 n’est ni moins ni plus qu’un coup d’État et donc un crime constitutionnel contre notre République.
Diomaye Ndongo Faye est Consultant en Stratégie développement politique
Princeton, New Jersey, Etats-Unis.
LA CONNEXION PAR DONNÉES MOBILE RÉTABLIE
La connexion Internet par données mobiles est rétablie sans distinction de plages horaires, a déclaré mardi le ministère de la Communication, des Télécommunications et de l’Economie numérique
Dans un communiqué, le ministère précise que ‘’les opérateurs de téléphonie ont été requis aux fins de mettre en œuvre la mesure’’.
L’Etat avait entrepris une suspension de la connexion Internet par données mobiles, pendant plusieurs heures de la journée depuis dimanche, en raison de la diffusion de ‘’messages haineux et subversifs’’ par certains usagers.
Il avait pris cette mesure deux jours après l’éclatement des émeutes à l’origine de la mort de 16 personnes, de plusieurs blessés et d’importants dégâts matériels.
Dans un communiqué, le ministère de la Communication, des Télécommunications et de l’Economie numérique a annoncé dimanche une suspension temporaire de la connexion Internet ‘’dans certaines localités du pays et sur certaines plages horaires’’.
De violentes manifestations ont eu lieu à Dakar et dans d’autres villes du Sénégal, dont Ziguinchor (sud), à la suite de la condamnation de l’opposant Ousmane Sonko à deux ans de prison ferme pour ‘’corruption de la jeunesse’’.
Il était jugé pour viol et menaces de mort sur la personne d’Adji Sarr, une ex-masseuse, employée d’un salon de beauté à Dakar.
Le tribunal a disqualifié en corruption de la jeunesse les faits de viol et de menaces de mort pour lesquels il était poursuivi.
La peine de prison est susceptible d’empêcher M. Sonko de se présenter à l’élection présidentielle de 2024, pour laquelle il s’est déclaré candidat, affirment ses avocats, se basant sur le Code électoral du pays.
APRÈS LES VIOLENCES, LES SÉNÉGALAIS DOIVENT VIVRE AVEC UN INTERNET RÉDUIT
La mesure du gouvernement a impacté l'économie, déjà malmenée par les troubles qui ont agité le pays pendant trois jours, mais aussi le quotidien des Sénégalais, rappelant combien, même avec de faibles revenus, l'internet a pénétré leur vie
Le gouvernement sénégalais a décidé de suspendre l'internet des données mobiles dans un contexte de vives tensions suite à la condamnation de l'opposant Ousmane Sonko. Une décision qui rappelle aux Sénégalais combien, même avec de faibles revenus, l'internet a pénétré leur vie.
Soxna Fall a vidé ses portefeuilles numériques dès qu'elle a pu. Les temps sont incertains au Sénégal après les violences de la semaine passée, y compris pour internet, et cette mère de famille ne sait pas à quel moment elle pourra à nouveau disposer de son argent. Il sont nombreux à avoir fait de même à la première heure lundi après que le gouvernement a annoncé la veille dans un communiqué de cinq lignes suspendre l'internet des données mobiles dans un contexte de vives tensions.
Cette mesure a impacté l'économie, déjà malmenée par les troubles qui ont agité le pays pendant trois jours, mais aussi le quotidien des Sénégalais, rappelant combien, même avec de faibles revenus, l'internet a pénétré leur vie.
En suspendant l'accès aux données à partir des téléphones portables après avoir restreint l'accès à des plateformes aussi populaires que WhatsApp, Facebook ou TikTok, le gouvernement a aussi conforté les accusations portées contre lui d'atteinte aux libertés au nom du maintien de l'ordre.
Dans le quartier des Maristes à Dakar, Soxna Fall est moins préoccupée pour le moment par ces grandes considérations que par la nécessité de disposer de liquide pour régler ses frais. Comme de nombreux compatriotes, en temps normal elle recourt constamment sur son portable à l'un des principaux services de paiement et de transfert d'argent, Orange Money ou Wave, pour les opérations de tous les jours, jusque chez le boulanger.
Avec la coupure des données mobiles, cette facilité est remise en cause. Alors elle a "retiré tout son argent" de ses portefeuilles numériques Orange Money et Wave dans un des points de transfert d'argent qui abondent dans la capitale. "Rien n'est sûr désormais, elles (les autorités) peuvent de nouveau couper l'internet à tout moment", sourit-elle, soulagée de tenir son argent dans ses mains.
Les coupures sont intermittentes. Il faut donc trouver le bon moment où le point de transfert est lui-même connecté. Juste avant elle, Maïmouna Sall, 28 ans, a fait comme elle, retirant 37.000 francs CFA (56 euros) d'un compte et 63.000 (96 euros) d'un autre, dans la même minuscule échoppe multiservices décorée d'affiches Orange Money, Wave, MoneyGram et Western Union.
Si les plateformes servent à bien des transactions, beaucoup d'autres se font encore en billets de la main à la main. Pape Malick Diagne, le gérant de la boutique des Maristes, raconte avoir reçu entre la matinée et la mi-journée une trentaine de clients, tous venus procéder à des retraits. D'habitude, en début de mois, les clients viennent plutôt déposer leurs salaires. "Mais là, c'est tout le contraire. Depuis la coupure d'internet, les gens sont paniqués, et ils se précipitent pour retirer leur argent", explique-t-il.
Inquiétude pour le Hajj
Le Sénégal a connu entre le 1er et le 3 juin ses pires troubles depuis des années après la condamnation à deux ans de prison ferme de l'opposant Ousmane Sonko dans une affaire de mœurs qui paraît le rendre inéligible pour la présidentielle de 2024. Il y a eu au moins 16 morts et des dégâts considérables. Le gouvernement a employé de gros moyens pour réprimer des heurts visant selon lui à déstabiliser l'Etat, et a indiqué avoir procédé à des centaines d'arrestations.
Comme les restrictions d'accès à internet, il a justifié la suspension des données mobiles par "la diffusion de messages haineux et subversifs". De nombreuses ONG comme Amnesty International ou Human Rights Watch ont réclamé le rétablissement de l'accès à internet, en plus de l'arrêt de la "répression" exercée selon elles par les autorités.
Les restrictions imposées à internet touchent les Sénégalais au plus près. Les transferts d'argent de Sénégalais de l'étranger vers le pays jouent un rôle économique et social considérable. Des experts soulignent la dépendance de bien des entreprises non seulement à internet mais aux réseaux sociaux.
A quelques jours du premier vol pour le pèlerinage de la Mecque (vers le 26 juin), des voyageurs peinent à finaliser les dernières démarches. Hawa Ly, 50 ans, a raconté ne plus avoir de nouvelles de son agence de voyage. "Nous ne savons toujours pas pour quel jour est programmé pour notre vol", confit-elle, inquiète. Imam Mbodj, lui, n'est même plus sûr de partir. "On est dans l'incertitude totale", dit-il.
Le Restic, un réseau d'entreprises des technologies de l'information et de communication, a pressé le gouvernement de lever toutes les restrictions. Les plateformes de messagerie instantanée (comme WhatsApp) sont des "leviers de travail pour des milliers d’entrepreneurs individuels à la recherche de revenus pour leur survie", a-t-il écrit.
par Mamadou Bamba Ndiaye
ILS N’ONT PAS PLEURÉ LA BU
La véritable « vérité qu’on ne saurait cacher », c’est cette attaque terroriste d’envergure qui a voulu mettre le Sénégal à genoux. La Justice a mis en danger un projet de confiscation de nos richesses dans lequel certains ont déjà investi
Trois plumes infames. Un texte certainement trop vite écrit sous une commande pressante de travestir une « vérité qu’on ne saurait cacher ». Mille vérités pourtant qu’on ne saurait cacher. Telle est, me semble-t-il, la lecture raisonnable d’une tardive louchée de gasoil jetée sur un brasier d’hier. C’est la lecture des silences indécents d’un texte particulièrement perfide.
D’abord, des écrivains devraient éprouver un peu plus de compassion pour les bibliothèques. Et donc dénoncer, ne serait-ce que par allusion, la tentative de destruction par le feu de notre système d’enseignement supérieur. Aucune de nos institutions universitaires n’a échappé à la furie d’incendiaires professionnels équipés d’armes de guerre. Ni le Cesti Mame Less Camara. Ni la Bibliothèque universitaire, cette Bu que les luttes de générations successives d’étudiants ont fini de transformer en bijou. Là réside l’infamie : même pas une larme de crocodile pour la science et la littérature blessées par les vandales.
Quand on n’a pas de sentiment pour les bibliothèques, on ne pleure pas bien sûr pour les casernes, centrales électriques, usines d’eau, réseaux de transport, … systématiquement ciblés et attaqués jeudi et vendredi derniers. De terribles actions de guerre. Oui, la véritable « vérité qu’on ne saurait cacher », c’est cette attaque terroriste d’envergure qui a voulu mettre le Sénégal à genoux. Elle est d’un modèle assez inhabituel en Afrique où on subit davantage des attentats et des tentatives d’occupation de territoires. Mais plusieurs villes pakistanaises l’ont expérimenté ces derniers mois. Sans la sagesse et l’adresse de nos FDS, les plumes infames seraient, ce jour, certainement, en train de danser sur notre tombe.
Discutons du procès en responsabilité. Nous sommes tous responsables, chacun pour ce qu’il a dit et ce qu’il a tu, ce qu’il a fait et ce qu’il aurait dû faire. C’est vrai : sans la perception d’une faiblesse voire d’un laxisme à certains niveaux, les tueurs ne se seraient pas enhardis à ce point. C’est la peur de l’autorité qui entretient la paix et la cohésion sociale, et non l’autorité de la peur.
Ce qui n’est pas vrai par contre, c’est l’explication des événements par nos trois plumes : la fumeuse controverse du « troisième mandat », ce canular érigé en but de guerre tout comme l’avait été le fameux charnier roumain de Timisoara qui n’a jamais existé ; ou les armes atomiques de Saddam Hussein. Le président Macky Sall a bel et bien accepté d’inscrire cette controverse à l’ordre du jour du dialogue national le mercredi. Le jeudi, les vandales sont entrés en action.
Après le canular, le non-dit. Pas un mot sur la condamnation judiciaire du jeudi matin, qui est pourtant le prétexte et le déclencheur de cette entreprise de saccage d’un pays. Par son verdict susceptible d’empêcher une candidature, la Justice a mis en danger un projet de confiscation de nos richesses gazières et pétrolières dans lequel certains ont, de toute évidence, déjà investi de nombreux milliards. Dans d’autres pays africains, ces « investisseurs » du genre macabre ont, alors, mobilisé milliards, armes, combattants et plumes de service, pour protéger leur projet d’enrichissement. C’est le tour du Sénégal, alerte-t-on depuis lors. C’est tellement vrai que l’infamie ose le taire.
Ici, un lien obscène s’établit entre le canular et le non-dit. Le Sénégal est attaqué dans le but de faire triompher un projet de conquête du pouvoir par l’autorisation d’un candidat empêché et l’empêchement d’un candidat suspecté. Moom day bokk, yaw doo bokk.
Où va le Sénégal ? Dieu seul le sait. Mon pari demeure cependant que jamais les plumes infames n’écriront le livre des ossements du Sénégal. La patrie de Cheikh Anta Diop et son Université restent et resteront debout. Inchallah.
Mamadou Bamba Ndiaye est un ancien député.
par Yoro Dia
CETTE VÉRITÉ QU’ON CHERCHE À ENFOUIR DANS LA PLUS SECRÈTE MÉMOIRE DES HOMMES
Le texte de Boris, Felwine et Mbougar est éminemment politique pour ne pas dire fondamentalement partisan. Il est étonnant que votre mémoire ait ignoré le fagot de l’indignation face aux saccages des universités, aux appels à l'insurrection
« Quand la mémoire va chercher du bois mort, elle ramène le fagot qui lui plait », disait Birago Diop dans sa grande sagesse. La mémoire de Boubacar Boris Diop, Felwine Sarr et de Mbougar Sarr est partie chercher du bois mort et elle a apporté le fagot qui lui plait.
Cette volonté de choisir le fagot qui plait est la plus grande faiblesse intellectuelle de leur texte commun malgré l’immense qualité intellectuelle des auteurs. Mais pris individuellement, ils confirment ainsi Max Weber qui disait : « Les associations de savants dès qu’elles discutent de la paix et de guerre, sont des associations politiques non scientifiques » parce que « prenant une position politique, on cesse d’être savant » car on n’est plus dans la « neutralité axiologique » qui faut-il le rappeler doit être consubstantielle à la démarche de l’intellectuel ou du savant. Cette neutralité axiologique qui est le meilleur rempart contre le manichéisme.
Sur les questions humaines, les questions sociales, la nuance et le relativisme sont des principes fondamentaux. On ne le trouve nulle part dans le texte. Ce texte contrairement au « J’accuse » de Zola qui a été comme un « craquement d’une allumette dans une nuit noire » pour parler comme Mbougar, sera comme les traces d’un chameau dans une tempête de sable.
Un texte écrit rapidement pour être dans l’air du temps est par nature éphémère comme le buzz. C’est pourquoi le texte de Boris, Felwine et Mbougar est un texte éminemment politique pour ne pas dire fondamentalement partisan. Tellement partisan que la mémoire choisit le fagot des conséquences (situation actuelle) et refoule le fagot des causes (un projet insurrectionnel). Il est étonnant qu’on cherche à enfouir dans « la plus secrète mémoire des hommes » les appels permanents à l’insurrection de Sonko qui menace le président de la République de mort, appelle les jeunes à aller le déloger au Palais sans oublier les menaces et les insultes contre les magistrats et les généraux. Celui qui « sème les graines de la discorde et de la violence », comme vous dites, est celui qui appelle au meurtre du chef de l’Etat, demande aux jeunes d’aller le déloger, terrorise les magistrats et qui corrompt les jeunes et les adolescents en les fanatisant pour en faire des boucliers humains pour se soustraire à la justice dans des affaires strictement privées et qui traite son accusatrice de guenon atteinte d’AVC. Et c’est ce monsieur qui a « la violence et la peur comme méthode ». Vous faites un transfert purement freudien en écrivant « la première des compromissions consiste à ne pas nommer ce qui est, à l’esquiver, à l’euphémiser, à le diluer par des tours de passe-passe sémantiques ou tout bonnement à travestir la réalité ». C’est exactement ce que vous faites quand votre mémoire choisit le fagot qui lui plait et esthétise la violence prônée ouvertement par Pastef au lieu de la condamner. Avec votre tribune, vous vouliez être dans le rôle de l’intellectuel tapageur comme Zola dans l’affaire Dreyfus. Il y a, cependant, une grande différence éthique entre Zola et vous. Zola avait choisi le camp du plus faible et vous, celui du fort, du puissant qui a profité de la double fragilité psychologique et sociale d’une orpheline. Elle, aussi, fait partie des « populations déjà précaires et laissées à elles-mêmes aux prises avec les problèmes élémentaires du quotidien le plus rude » que vous décrivez. Ce quotidien rude qui a dû l’amener à Sweet beauty, ce qui n’est pas le cas de son bourreau. C’est là où se trouve la grande différence éthique entre Zola et vous. Zola a été avocat d’une belle et grande cause. On ne saurait dire la même chose pour un homme politique accusé de viol dans un endroit sordide. Vous n’oseriez jamais défendre un tel homme aux Etats-Unis ou en France. La situation actuelle exige que chacun prenne ses responsabilités, dites-vous.
L’Etat a pris les siennes pour que justice soit rendue en toute sérénité malgré les menaces et la terreur qui a fait désister certains juges. La justice, le seul service de l’Etat qui porte le nom d’une vertu, a tenu son rang en allant courageusement jusqu’au bout. Comme j’ai commencé avec Birago, terminons avec lui. Il est étonnant que votre mémoire ait ignoré le fagot de l’indignation face aux saccages des universités qui est par essence le lieu de la pensée et de la tolérance. Nommons les choses, les fagots de la mémoire de l’Humanité nous rappellent qu’en 1258, quand les Monghols sont entrés à Bagdad, la capitale de l’empire musulman, ils ont fait deux choses : l’incendie de la bibliothèque et une montagne de cranes. Les nazis feront la même chose avec les bibliothèques en jetant les livres au feu. On a une idée du projet quand on commence par saccager des universités et brûler des bibliothèques.
Tout de même surprenant qu’un Goncourt, qu’un prix Neustadt ne s’en émeuvent pas. Comme je disais dans ma réponse aux 114, les intellectuels sont libres de faire la même erreur que Martin Heidegger face aux Nazis mais l’Etat du Sénégal n’a pas le droit de faire la même erreur que la République de Weimar pour la bonne et simple raison que quand un intellectuel se trompe c’est juste une hypothèse qui n’a pas fonctionné mais pour un Etat, c’est une catastrophe incommensurable comme l’arrivée des nazis au pouvoir. On connait la suite.
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MIMI TOURÉ LANCE UN APPEL À MARIÈME FAYE SALL
Aminata Touré a pris la parole lors du point de presse du mouvement F24 pour s’adresser directement au président Macky Sall. « Quand on était avec vous on n’avait jamais imaginé que ça allait se terminer ainsi
Aminata Touré a pris la parole lors du point de presse du mouvement F24 pour s’adresser directement au président Macky Sall. « Quand on était avec vous on n’avait jamais imaginé que ça allait se terminer ainsi. À la place de la nation, vous avez combattu le 3e mandat et ce jour-là Mamadou Diop y a été tué. L’heure est très grave et je vous demande de ne pas suivre cette voie sans issue. Le Sénégal fait la une de toute la presse internationale alors qu’on nous appelle l’exception africaine. On arrête des journalistes et ce n’est pas normal. On tue des jeunes. 16 morts c’est beaucoup et nous vous demandons de vous ressaisir », a-t-elle dit.
Avant de poursuivre : « Il n’y a pas de terroristes mais une jeunesse consciente qui est contre votre posture. Ce procès de Sonko on doit prononcer un non-lieu. Vous avez les moyens pour demander aux juges de prononcer un non-lieu. Vous devez également dire non au 3e mandat. Voilà ce que vous devez faire pour que la situation revienne à la normale. Il faut sauver le peu qui reste à sauver. Je lance un appel à Mme la première Dame, Marième Faye Sall. Vous êtes une mère. Il faut parler avec le président de la République. Cependant, nous n’allons pas se taire face aux 16 morts. Il faut que justice se fasse ».
Dans son sillage, Bougane Gueye et d’autres membres du F24 ont demandé au président Macky Sall de se prononcer publiquement pour dire qu’il renonce au troisième mandat et qu’il libère Ousmane Sonko.
INCERTITUDES SUR LE MARCHE DU MOUTON
La situation tendue à Dakar et dans d’autres localités ne permet pas aux éleveurs de rejoindre les points de vente. Cela constitue une sérieuse menace sur l’approvisionnement du marché en moutons à trois semaines de la Tabaski.
La situation tendue à Dakar et dans d’autres localités ne permet pas aux éleveurs de rejoindre les points de vente. Cela constitue une sérieuse menace sur l’approvisionnement du marché en moutons à trois semaines de la Tabaski. Du côté des éleveurs, la peur est, sans doute, le sentiment le mieux partagé.
Des sacs de foin soigneusement rangés, des piquets en fer de l’autre côté, non loin d’une dizaine de sacs d’aliment de bétail. Chez Pape Malé, tout est en place. Sauf l’essentiel : les moutons. Habitué des opérations Tabaski depuis près d’une décennie, il recevait les moutons à un mois de l’événement, le temps de les acclimater et de les remettre en forme, avant de les écouler. Depuis quelques jours, c’est la panique chez celui qui habite non loin du stade Léopold Sédar Senghor. « On n’a pas le choix. On ne peut pas prendre le risque de convoyer nos moutons dans ce contexte de crise. Le danger, c’est que nous sommes à un peu plus de trois semaines de la Tabaski. Si dans une semaine la situation ne s’améliore pas, je pense que je serai obligé de renoncer », estime l’ancien joueur de navétane. Si sa peur est aussi grande, c’est qu’il est convaincu qu’en période de chaleur, il est non seulement difficile d’engraisser les moutons, mais il faut plus de temps pour que les sujets reprennent leur forme.
Cheikh Samb, lui, est dépassé par les événements. Il vient de consacrer deux semaines à faire le tour des marchés hebdomadaires de moutons dans les régions pour se ravitailler. Il ne restait qu’à les convoyer à Dakar. « Je n’ai reçu que la première vague. Mais, quand j’ai vu des manifestants attaquer des vendeurs de moutons à Keur Massar, j’ai décidé de patienter. C’est très risqué. Aujourd’hui, tout est cher. Si on doit encore perdre plus de temps pour remettre les moutons en forme, ça risque gros », alerte-t-il.
Menaces sur la qualité et la quantité
Coïncidant avec la période de chaleur, la Tabaski de cette année ne se présente pas sous les meilleurs auspices. En cette matinée de dimanche, Mame Mor et ses amis éleveurs n’ont qu’un sujet à l’ordre du jour : la Tabaski. Ici, si certains ont tout simplement décidé de renoncer, d’autres prédisent le chaos. « Les moutons élevés dans des zones chaudes ont besoin de plusieurs jours pour se remettre en forme, pour ensuite commencer à changer de régime alimentaire pour l’engraissement. Les délais sont courts. Les Sénégalais risquent de voir des moutons chétifs et très mal nourris », dit-il. Pour Papis, son voisin, au risque d’approvisionnement, il faudra ajouter la cherté des moutons maintenant. « Nous sommes en période pré-hivernale. Le foin est inaccessible. Le concentré, communément appelé « ripass », qui se vendait entre 8000 et 9000 FCfa le sac est désormais cédé à 12 000 FCfa à Dakar », souligne-t-il. Pire, poursuit-il, même dans les villages les plus reculés, où les éleveurs avaient l’habitude de se ravitailler, les moutons sont devenus inaccessibles. « Il y a de sérieux risques aussi bien sur la qualité que sur la quantité de moutons, à moins que les autorités prennent des mesures d’urgence. Et même cela risque d’être compliqué avec les délais », alerte-t-il.
INSÉCURITÉ, PRÊT BANCAIRE
La peur s’installe à la maison des éleveurs
Des agressions et des scènes de pillage sont constatées depuis jeudi dans plusieurs localités. Dakar et Ziguinchor restent les zones les plus touchées par les manifestations qui ont suivi la condamnation du leader de Pastef, Ousmane Sonko, à deux ans de prison ferme. L’ambiance morose et chaotique inquiète les éleveurs à moins d’un mois de la célébration de la Tabaski. De sérieuses menaces pèsent sur la fête du mouton, selon le président de la Maison des éleveurs du Sénégal, Ismaïla Sow. À l’en croire, la peur est en train de gagner les acteurs majeurs. « Le business n’est possible que dans une ambiance de paix. Et ce n’est pas le cas actuellement. Les jeunes détruisent et ramassent tout sur leur passage. Et si la situation reste tendue à Dakar et dans les autres capitales régionales, les gens hésiteront à venir », considère M. Sow. L’impact immédiat sera, selon lui, l’absence de marchés, car les zones jadis aménagées pour l’opération Tabaski sont des cibles particulières des manifestants. « Quand les jeunes manifestent, ils ne restent pas sur place. La foule avance et essaie de faire le tour de la ville. Cette situation ne rime pas avec la vente de moutons », ajoute-t-il. La plus grande difficulté, à ses yeux, est que les vendeurs ne pourront pas fuir avec le bétail. « Si les éleveurs sont pris au dépourvu, c’est fini. On peut fuir avec certains produits, mais pas avec une centaine de moutons. C’est impossible. Donc, tout ce que nous voulons, c’est que le calme revienne, afin qu’on puisse travailler correctement », estime le président de l’Association des éleveurs du Sénégal. À l’en croire, ses membres sont entre le marteau et l’enclume puisque ne pouvant pas riposter en cas d’attaque. « L’unique option pour nous est la légitime défense. Et ça peut nous conduire en prison. Donc, la situation est compliquée pour nous. Cette campagne est pleine d’incertitudes », explique Ismaïla Sow. Pour lui, à défaut d’un climat calme et apaisé, des milliards d’investissements peuvent être perdus. « La plupart des éleveurs, impliqués dans l’opération Tabaski, ont bénéficié de crédits bancaires. Aujourd’hui, s’ils font l’objet d’attaques, ils seront ruinés et auront des ennuis tout le reste de leur vie », souligne M. Sow. La situation, affirme-t-il, ne restera pas sans conséquence pour les ménages, car si les éleveurs n’arrivent pas à s’installer dans les capitales régionales, les prix vont exploser. « Les produits vont forcément renchérir si la situation perdure. Ainsi, beaucoup de pères de famille vont peiner à avoir un mouton », alerte le président de la Maison des éleveurs. Pour éviter pareille situation, l’Association des éleveurs du Sénégal interpelle l’État. « Nos messages vont à l’endroit des gouvernants. Nous leur demandons d’user de tous les moyens légaux pour mettre fin à cette situation. Saccager les magasins, voler des biens appartenant à autrui ; ce n’est pas une manifestation politique, c’est du banditisme », soutient Ismaïla Sow.