KEEMTAAN GI - COMME AU THEATRE
La particularité au sein de l’armée mexicaine et ses mercenaires, c’est qu’on y parle beaucoup plus de celui qui perturbe leur sommeil que de leurs problèmes à eux. Conséquence, leurs augustes rassemblements se transforment en une logorrhée verbale à indisposer les morts. Point besoin d’un dessin pour comprendre leur envie de meurtre. Il leur faut écrire tous les scénarii inimaginables pour mettre hors d’état de nuire celui qui pourrait freiner leur funeste ambition. Preuve de leur maladresse, ils mettent au-devant le griot du roi et un sinistre transhumant pour porter leur parole. Le Père Léo ne reconnaitrait pas son pays s’il ressuscitait. La conception que leur Chef se fait de la politique nous parait aux antipodes de la bonne gouvernance. En tout cas, depuis 2012, on nous chante une émergence que l’on tarde à voir. D’un homme qui est né après les indépendances de nos pays, on attendait qu’il ait une vision de la politique autre que de demander à ses ministres et directeurs généraux de mouiller le maillot…sur le terrain politique au lieu de s’atteler à la résolution des problèmes auxquels les citoyens sont confrontés ! Autrement dit, ils sont payés par les deniers des citoyens pour s’occuper de leurs problèmes et non pour aller battre campagne au profit d’une association privée qu’est le parti au pouvoir. Mais voilà, telle est la conception que le président de la République se fait du travail de ses ministres et de ses directeurs généraux ! Désespérante conception de la gestion des finances publiques du pays. Un gâteau onctueux à se partager et tant pis si, ce faisant, on fait saliver les misérables. Pour en revenir au Président, si tout le monde faisait ce pourquoi il a été nommé, il ne serait pas là à inviter ses hommes à mouiller le maillot pour la pérennisation de son pouvoir. Le pays s’en serait porté mieux depuis longtemps. Et quoi encore ? Pour le moment, il est le seul à gouverner. Un monarque quoi ! Toujours dans son exercice favori de politique politicienne et de manœuvres partisanes, plutôt que de nommer un Premier ministre et remettre le pays bien vite au travail, il dit attendre d’abord l’installation de ses députés dont certains pourraient lui jouer un coup fourré et brouiller toutes ses cartes. Autant dire qu’il est devenu un otage de son parti. Lui dont on disait qu’il était le maître du jeu ! Et vous allez nous dire après que ça ne sent pas une ambiance de fin de règne ? KACCOOR BI
CONSEIL MUNICIPAL DAKAR-PLATEAU TARAF SAMIR, LE DERNIER DES MOHICANS LIBANAIS, NON INVESTI
Depuis la création de la commune d’arrondissement de Dakar-Plateau en 1996, les Sénégalo-libanais ou Sénégalais d’origine libanaise étaient toujours investis en bonne place sur les listes du parti au pouvoir à l’occasion des élections municipales. Depuis le départ des commerçants et négociants bordelais (France) à la fin du 19e siècle, les libanais de Dakar symbolisent le brassage entre les populations autochtones et les hôtes « étrangers » qui vivent parmi nous. Un brassage matérialisé par la présence de « Libanais » comme conseillers municipaux à la mairie de Dakar-Plateau successivement dirigée par Abdoulaye Makhtar Diop, Fadel Gaye et Alioune Ndoye. Hélas, cette belle tradition a pris fin lors des dernières élections locales, celles de janvier 2022, où aucun « Libanais » n’a élu ou réélu conseiller municipal de Dakar-Plateau dirigé par le maire Alioune Ndoye. Devenu jusque-là le doyen des conseillers municipaux de Dakar-Plateau, Hajj Taraf Samir, âgé de 89 ans, n’a pas été réinvesti. Considéré comme la « mascotte » municipale de Dakar-Plateau par « Le Témoin » quotidien, doyen Hajj Taraf Samir est le dernier des mohicans Libanais du centre-ville de Dakar. Se sentant sans doute « indésirables » ou « rejetés », nombreux sont les sénégalo-libanais qui se sont abstenus de voter lors des législatives 2022 remportées par le maire Barthélémy Dias de l’intercoalition Yaw-Wallu. Inutile de dire que leur abstention a été largement défavorable au maire Alioune Ndoye quand on sait que cette communauté vote généralement pour le parti au pouvoir. En tout cas, que ce soit pour la mairie de Dakar-Plateau ou à celle de la ville de Dakar, les Sénégalais d’origine libanaise y ont toujours été bien représentés à travers d’illustres conseillers municipaux comme Issam Omaïs, qui est d’ailleurs un Haut conseiller des collectivités territoriales sortant, ou encore Fayez Bourgi, qui fut un grand militant du Parti socialiste. En plus d’avoir été un colonel de réserve de l’Armée nationale. Sans compter Farès Attyé, l’un des rares sinon le seul « Libanais » à s’être aventuré dans la presse et qui, sans avoir été élu conseiller, n’en a pas moins animé un comité du Parti socialiste. Toute cette belle période a pris fin, hélas, et ce bel acquis remis en question avec l’éjection des conseillers municipaux « libanais » du conseil municipal de Dakar-Plateau et aussi de celui de la Ville ! Il faut dire quand même que l’ancien footballeur Abdallah Sahli, investi sur la liste de Benno à la 42ème place, n’a pas été élu du fait de l’ouragan Yaw qui a soufflé sur Dakar-Plateau comme sur la majorité des grandes villes du Sénégal !
« SARGAL » MBOKKA YI
L’information est passée inaperçue mais notre compatriote Birane Sakho, président de l’Association des ressortissants sénégalais en Gambie, a été élu député lors des législatives du 31 juillet dernier. Ce au titre de la diaspora. Il faisait d’ailleurs partie de la délégation reçue samedi dernier au Palais par le président de la République. Il n’a d’ailleurs pas traîné à Dakar puisque, dès hier, il est retourné à Banjul pour coordonner les préparatifs du grand meeting qu’il organise dès ce samedi 27 août. Un meeting destiné à remercier tous ses électeurs d’avoir voté en faveur des listes de Benno Bokk Yaakar pour donner la majorité au président Macky Sall. Le meeting se tiendra à l’hôtel Paradise de Banjul. Il faut signaler en outre que Birane Sakho est originaire de Aéré Lao, dans le département de Podor. Si on ne se trompe pas, Aéré tient à travers lui son premier député !
REVALORISATION SALARIALE : DES AGENTS MUNICIPAUX DE SAINT-LOUIS EN SIT-IN
Comme « Le Témoin » aime beaucoup la municipalité, restons-y ! Pour ce coup-ci, il est question de revalorisation du traitement salarial que réclament les agents municipaux qui ont organisé, hier, un sitin devant l’hôtel de ville de Saint-Louis. Après les fonctionnaires, les municipaux disent qu’il ne doit pas y avoir de discrimination dans le traitement des agents de l’Etat et ceux des collectivités territoriales. En s’adressant à la presse, Talam Fall président de l’Intersyndicale des travailleurs des collectivités locales de Saint-Louis déclare « Nous ne pouvons plus supporter le fait que les travailleurs des collectivités locales soient marginalisés et laissés en rade, dans le cadre de l’amélioration des conditions de vie et de travail des agents de l’Etat, c’est une injustice et une pratique discriminatoire manifestes » dénonce le syndicaliste en chef avant d’inviter le ministre des Collectivités territoriales de tout mettre en œuvre en vue de permettre aux agents municipaux de bénéficier dans les plus brefs délais des augmentations de salaires au même titre que les fonctionnaires. Et Talam Fall jure que si rien n’est fait d’ici à deux semaines, ils passeront à la vitesse, pardon à la « municipalité » supérieure !
TÉLÉPHONIE MOBILE EXPRESSO RENONCE AU LICENCIEMENT DES 50 AGENTS
Finalement, la direction générale de l’opérateur de téléphonie mobile Expresso a renoncé au licenciement de 50 employés sénégalais. L’annonce a été faite par le ministre de l’Economie numérique et des Télécommunications, M Yankhoba Diattara. Pour rappel, les travailleurs ont manifesté ce lundi pour dénoncer ce licenciement « abusif » par la société Expresso, filiale de l’opérateur soudanais Sudatel. Ce lundi, à l’appel du syndicat Unsas et des délégués du personnel, un sit-in avait été organisé devant le siège de la société à Sacré-Cœur III, en face de la VDN. La direction de l’opérateur avait pris prétexte de difficultés économiques pour annoncer un plan social prévoyant le licenciement de 50 travailleurs. Mais ce qui avait mis le feu aux poudres, c’est l’intrusion d’une partie des employés dans le bureau du directeur général qui avait été conspué et quelque peu malmené. Au lendemain de cette action, Expresso avait fait servir à 36 employés, par le biais d’un huissier de justice, des lettres de licenciement. C’est dont cette mesure qui vient d’être rapportée suite à l’implication du ministre des Télécommunications et de l’Economie numérique et aussi intermédiation de l’ARTP. Tout est bien qui finit bien donc et le réseau est rétabli entre direction générale et employés d’Expresso. Allô, le 70 ?
GRÈVE DES TRAVAILLEURS DES COLLECTIVITÉS LOCALES L’ÉTAT CIVIL PARALYSÉ…
Les augmentations des salaires des enseignants ont ouvert le bal. Depuis un certain temps, tous les secteurs du service public réclament des augmentations pour pouvoir faire face à la cherté de la vie. Hier, les travailleurs des collectivités locales ont manifesté dans toute l’étendue du territoire pour réclamer des augmentations de salaires. Ils ont bloqué le travail dans les municipalités. Hier, il n’y a pas eu de délivrance d’extraits de naissance, de déclaration de nouveaux nés et de réception de permis d’inhumation. La grande galère quoi.
SORTIE D’UN CLIP KEUR-GUI «LACRYMOGÈNE» LA POLICE
Le groupe Keur-Gui de Kaolack est de retour. Les rappeurs activistes et membres fondateurs du mouvement Y en Marre ont sorti un single dans lequel ils évoquent les bavures policières, la manière dont certains citoyens sont traités par la police, les gardes à vue prolongées ou encore les auditions sans la présence d’avocats. Le clip commence par l’interpellation par un policier d’un automobiliste ayant commis une infraction. Ce dernier négocie et finit par poursuivre son chemin après avoir remis un billet de 1000 francs CFA à l’agent chargé de le verbaliser. La corruption, la justice à deux vitesses, la répression policière de manifestations entraînant parfois des morts d’homme ont aussi été dénoncés par Kilifeu et Thiat. Ils n’ont pas oublié les autopsies, selon eux falsifiées, ou encore des procès-verbaux truqués. Pour les deux rappeurs et personnalités fortes de l’opposition, dans la Police, il n’y a que des cons comme le bruit de leurs véhicules, une manière de bien faire la rime en langue wolof. Le clip a été mis en ligne hier vers 22 heures et a déjà enregistré plus de 1000 vues sur Youtube. Mais notre plaisir à nous au « Témoin » a été de voir une de nos unes choisies pour illustrer ce clip sulfureux. Merci à Keur-Gui, plus exactement Kilifeu et Thiat, pour ce formidable coup de publicité à nous offert ! Quel honneur pour « Le Témoin » !
L’écrivain camerounais Eugène Ébodé revient sur la dernière visite du président français à Yaoundé. En ne retenant pas ses critiques sur l’attitude de Paris en Afrique - ENTRETIEN
Jeune Afrique |
Clarisse Juompan-Yakam |
Publication 23/08/2022
L’écrivain et universitaire camerounais Eugène Ebodé est né à Douala il y a soixante ans. À la sortie de son roman Brûlant était le regard de Picasso (Gallimard, en 2021), Eugène Ébodé avait interpellé le président Emmanuel Macron au sujet du portrait de Mado, surnom de Madeleine Petrasch, dont il raconte l’histoire vraie et romanesque.
Née des amours d’une servante camerounaise et d’un expatrié suédois, celle qui était devenue l’amie d’artistes tels que Picasso, Matisse, Chagall ou Dali avait été témoin de l’arrivée des troupes du général Leclerc à Douala, d’où de Gaulle avait débuté sa contre-attaque contre l’Allemagne nazie.
Ébodé voulait raviver cette mémoire positive. Les services de la présidence lui avaient écrit, puis, plus rien… Un regret pour lui. Administrateur depuis quelques mois de la nouvelle chaire des littératures et des arts africains à l’Académie du royaume du Maroc, le jeune sexagénaire publie en octobre prochain Habiller le ciel, un récit autobiographique mettant en lumière une femme qui, ne sachant ni lire ni écrire, a pourtant grandement contribué à faire de lui l’écrivain qu’il est devenu : sa mère, décédée en 2020. Un hommage aussi à toutes les femmes qui passent trop souvent sous les radars de l’actualité.
Jeune Afrique : Le président français Emmanuel Macron vient d’effectuer une tournée en Afrique dont le Cameroun aura été la première étape, controversée. Quel est votre regard sur cette visite ?
Eugène Ébodé : Cette visite n’est pas surprenante en soi même si, lors du sommet du Montpellier, Emmanuel Macron a donné l’impression que les chefs d’État étaient devenus infréquentables. Cette tournée africaine du président français intervient cependant dans un contexte particulier de crises mondiales multiformes, l’une d’elles étant la guerre en Ukraine, qui a contribué à démontrer que l’Afrique restait à séduire.
Ainsi, lors du vote de la résolution des Nations unies visant à condamner l’invasion russe, les abstentions africaines ont surpris ceux qui pensaient que « l’Afrique de papa » suivrait le camp occidental. Si vous y ajoutez la contestation des alliances militaires avec la France dans les États francophones jadis considérés comme terrain conquis par l’ancienne puissance coloniale, la situation géopolitique n’est pas en faveur de l’Hexagone.
Cette tournée africaine d’Emmanuel Macron révèle donc le désir de la France de passer à l’offensive face à la progression de la Russie en Afrique, et notamment à ses performances sur le plan militaire (vente d’armes) comme sur les accords strictement liés à une coopération militaire plus politique.
J.A : Êtes-vous de ceux qui considèrent que la diplomatie de Yaoundé a marqué des points?
La France est venue à elle, avalant tous ses chapeaux moralisateurs : droits de l’homme, État de droit, gouvernance, crise anglophone… Emmanuel Macron, qui prétendait donner des leçons à Paul Biya, s’est incliné devant lui.
J.A : Justement, comment analysez-vous la tenue à l’écart de l’opposition camerounaise lors de cette visite?
EE : C’est l’abandon en rase campagne des idéaux proclamés comme critères pour qu’un régime soit fréquentable. La France a toujours défendu les droits humains et la liberté d’opinion. Comment comprendre qu’Emmanuel Macron n’ait pas jugé utile de s’entretenir avec ceux qui se présentent comme les contradicteurs du régime de Yaoundé ? Son refus de les rencontrer est une faute.
Il signe, tactiquement et petitement, la fin de l’outrecuidance française. La France donneuse de leçons sur tout et partout replie son drapeau et devrait tourner cent fois sa langue dans la bouche avant de parler.
Cela étant, le nouvel exercice de sobriété et de profil bas n’est pas encore totalement assimilé par Macron. Cela s’est vu lors de la conférence de presse conjointe qu’ont donnée les deux chefs d’État, à Yaoundé.
J.A : Dans quelle mesure ?
EE : Je parle de la sortie du président français sur « les deux Russie ». Emmanuel Macron s’est cru obligé de critiquer Moscou, donnant ainsi l’impression d’admonester ceux qui « pactisent » avec une « Russie aux deux visages ». L’une, officielle et fréquentable, l’autre, wagnérienne et abjecte.
La présence dans la région, au même moment, de Sergueï Lavrov, ministre russe des Affaires étrangères, est sans doute pour beaucoup dans cette attaque que j’estime inutile.
Le président camerounais a sobrement rappelé les principes de légitimité qui encadrent les rapports étatiques. En creux, il a indiqué que le monde instable, le recul de la superpuissance américaine et l’effacement de l’Europe comme interlocuteur politique fiable, avait redistribué les cartes. Nous sommes à l’ère des coalitions multiples. La Russie le démontre en poussant ses pions en Afrique, en Asie et au Moyen-Orient.
J.A : On peut néanmoins déplorer que le président Paul Biya ait éludé la question sur la succession à la tête de l’État camerounais…
EE : J’aimerais bien qu’il y ait une alternance à la tête de l’État camerounais. Mais mon vœu personnel ne peut se substituer à celui de millions de Camerounais. C’est à eux d’en décider.
J.A : Une annonce importante a été faite au cours de cette conférence de presse : la création prochaine d’un comité d’historiens et l’ouverture des archives pour faire la lumière sur les atrocités liées à la guerre d’indépendance au Cameroun. C’est plutôt positif, non?
EE : On n’a pas besoin d’attendre les résultats des travaux des historiens pour savoir que des crimes ont été commis et des spoliations graves et avérées, accomplies. Tout cela est documenté. C’est l’étendue des ravages qui doit être exposée, pas l’idée de ravage elle-même.
Il faut donc sans attendre agir comme l’a fait le Pape, il y a quelques jours, devant les communautés indiennes violentées au Canada : dire clairement son dégoût et exprimer sa réelle contrition.
Par ailleurs, évoquer les atrocités de la guerre d’indépendance au Cameroun est forcément appréciable. Mais il s’agissait d’un système colonial et c’est ce système qu’il convient de condamner en bloc et sans ambages. Il faut donc veiller à une déclassification de toutes les archives de l’empire colonial. La Guinée des années 1958 à 1984 mériterait aussi une déclassification des dossiers afin de comprendre ce qui s’est passé après le « Non » au référendum gaulliste.
J.A : Comme lors du sommet de Montpellier – que vous aviez fustigé –, Emmanuel Macron s’est entretenu avec la société civile. Diriez-vous encore qu’il s’évertue à disqualifier le politique?
EE : Les nations sont des blocs, et toute approche qui consiste à diviser les acteurs procède de la logique coloniale. La France adore ce mécanisme qu’elle a toujours pratiqué car il lui réussit à merveille. Les jeunes Africains sont choyés, car on veut surtout les maintenir chez eux. On fait mine de s’intéresser à eux alors qu’on s’en sert comme variables d’ajustement dans de petits jeux politiciens.
Et les vieux ? On s’en fiche. On crée ainsi, à l’intérieur même de pays souverains, une ségrégation inique selon l’âge et possiblement le sexe. Que Monsieur Mbembe s’en contente pour une Maison de l’Afrique à Paris est un problème. Il met en œuvre une démarche opportuniste qui favorisera une mendicité déguisée et une certaine forme de clientélisme.
J’ai dénoncé cette démarche lors du sommet de Montpellier. Je dénonce aussi cette approche individualiste dans laquelle se vautre l’intellectuel africain dans mon roman Brûlant était le regard de Picasso (Gallimard, 2021). Je l’assimile à l’une des maladies infantiles de l’intelligentsia africaine.
J.A : Où la verriez-vous, cette Maison de l’Afrique ?
EE : La véritable Maison de l’Afrique doit se trouver en Afrique, dans chaque État. Elle célèbrerait ainsi le prodigieux multiculturalisme africain, la vitalité et la diversité des langues et des cultures africaines, la richesse absolument bouleversante de son histoire, de son legs historique et de ses paysages. C’est par ce multiculturalisme pris comme atout et exposé que les Africains cesseront les jérémiades. Ils souffrent de la grande méconnaissance qu’ils ont d’eux-mêmes, du Nord au Sud du continent.
L’Union africaine devrait se saisir de cette affaire et, avec les industriels africains, réaliser la mutualisation des efforts pour créer ces lieux. Les populations africaines aspirent à un modèle de représentation autre que celui validé par l’extérieur.
C’est la raison pour laquelle il faut apprécier la démarche macronienne de restituer le patrimoine volé, mais il faut restituer tout le patrimoine, pas le faire au compte-gouttes.
J.A : Selon vous, ce patrimoine restitué doit être rechargé et spirituellement revitalisé. Comment?
EE : Par des rites labellisés et convenablement pensés. Une commission panafricaine doit y réfléchir avec des conservateurs, des historiens, des écrivains et des anthropologues de tous horizons pour une humanité réconciliée.
À Rabat, la création par l’Académie du royaume du Maroc d’une chaire des littératures et des arts africains, en mars dernier, est un pas prodigieux vers le dépassement de la fracture et des tristes héritages coloniaux et linguistiques. Unir l’Afrique, c’est la détacher de toute idée qu’elle est vouée à la mésalliance et à l’incapacité de conduire elle-même ses propres affaires.
Monsieur Macron conduit les affaires de la France. Aux Africains de conduire eux-mêmes les leurs ! Ils en sont capables, n’en déplaisent aux nihilistes qui hier citaient Frantz Fanon pour mieux le trahir aujourd’hui.
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PANORAMA DE LA DÉPIGMENTATION VOLONTAIRE DE LA PEAU
Les méthodes utilisées sont dangereuses mais le matraquage publicitaire et le diktat de l'esthétique l'emportent sur la peur des conséquences. Hannelore Ver-Ndoye revient sur le phénomène du blanchiment de la peau dans son nouvel ouvrage, "Décolorés"
Les méthodes utilisées sont dangereuses mais le matraquage publicitaire et le diktat de l'esthétique l'emportent sur la peur des conséquences. Hannelore Ver-Ndoye revient sur le phénomène du blanchiment de la peau dans son nouvel ouvrage, "Décolorés".