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28 août 2025
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L'ESSAI QUI DÉBOULONNE LES IDOLES AFRICAINES
Chiffres à l'appui, Joël Té-Léssia Assoko ose l'impensable dans "Enterrer Sankara" en déconstruisant l'héritage du héros burkinabè. Tandis que l'AES et le régime sénégalais revendiquent cet héritage, le journaliste signe un plaidoyer pragmatique
(SenePlus) - Dans un essai aussi incisif qu'érudit, le journaliste économique Joël Té-Léssia Assoko s'attaque à l'héritage de Thomas Sankara et aux penseurs africains contemporains qui perpétuent, selon lui, des mythes économiques préjudiciables au développement du continent. Intitulé « Enterrer Sankara, essai sur les économies africaines », ce premier titre de la collection « Pépites jaunes » des éditions Riveneuve fait déjà polémique, rapporte Jeune Afrique.
« Ceci n'est pas un brûlot », prévient la quatrième de couverture. Pourtant, l'ancien rédacteur en chef adjoint de Jeune Afrique n'hésite pas à remettre en question l'héritage du révolutionnaire burkinabè, figure intouchable pour de nombreux Africains. Chiffres à l'appui, il déconstruit les politiques économiques mises en œuvre et les choix, parfois contradictoires, du capitaine qui n'est resté que quatre ans au pouvoir.
Selon l'auteur, Thomas Sankara représente un mythe « d'hérésies économiques », bien qu'il lui concède des idées novatrices en matière de santé et d'éducation. Ce que regrette particulièrement le journaliste franco-ivoirien, c'est que Sankara ait réussi à installer l'idée que la « révolution » soit la voie à suivre, une perspective qui mènerait à une impasse selon lui.
« Enterrer Sankara, c'est métaphorique », confie l'auteur à Jeune Afrique. « L'objectif, c'est de dépasser cet héritage. On ne peut pas résoudre les problèmes contemporains de l'Afrique avec ce référentiel des années 1980. D'autant qu'à l'époque, déjà, les politiques économiques de Sankara étaient vouées à l'échec ».
Le livre ne s'arrête pas à Sankara. Joël Té-Léssia Assoko élargit sa critique à plusieurs intellectuels africains influents comme Kako Nubukpo, Felwine Sarr, Achille Mbembe ou encore Célestin Monga. Tous sont accusés de perpétuer des idées utopistes et une tendance à « l'apitoiement sur soi ».
« Lorsque l'on met en avant de nouvelles façons de penser l'humain, de penser l'économie, c'est mentir à l'Afrique et se mentir à soi-même », écrit-il sans concession, selon Jeune Afrique. L'ouvrage s'inscrit néanmoins dans une réflexion plus large sur les modèles de développement du continent, avec une volonté affichée de pragmatisme.
La publication de cet essai intervient à un moment où la figure de Sankara connaît un regain d'influence. Comme le rappelle Jeune Afrique, le président sénégalais Bassirou Diomaye Faye et son Premier ministre Ousmane Sonko prônent, à l'instar du capitaine burkinabè, la fin de la dépendance à l'Occident et placent le souverainisme économique au cœur de leur programme. De même, les juntes militaires au pouvoir dans plusieurs pays du Sahel revendiquent l'héritage sankariste.
Face à cette tendance, l'auteur regrette que ces régimes aient « l'émancipation politique comme seul programme » et délaissent les questions « technico-économiques » au profit d'envolées lyriques sur l'asservissement par l'aide au développement, la dette illégitime ou la prédation néocoloniale.
Pour le co-fondateur du think tank L'Afrique des idées, « la première loi de la pauvreté est l'économie ». Sa conclusion est sans appel : l'émergence du continent ne se fera qu'à condition d'une hausse significative et continue de la productivité.
À travers cet ouvrage de 151 pages, Joël Té-Léssia Assoko lance un pavé dans la mare des idées reçues sur le développement économique africain. Reste à voir comment les héritiers intellectuels de Sankara répondront à cette provocation assumée.
SOULEYMANE BACHIR DIAGNE, LE PHILOSOPHE QUI A CONQUIS L'AMÉRIQUE
L'université Columbia a organisé un hommage à la hauteur de la carrière du natif de Saint-Louis. Après 15 ans sur ce campus d'élite, ce penseur qui a révolutionné les études françaises en y intégrant une dimension africaine ferme un chapitre de sa vie
(SenePlus) - L'université de Columbia à New York a rendu un hommage exceptionnel au philosophe sénégalais Souleymane Bachir Diagne, qui termine sa carrière d'enseignant-chercheur après plus de quinze ans sur ce prestigieux campus américain. Pendant trois jours, ce penseur majeur originaire de Saint-Louis a été célébré lors d'une série de conférences et d'échanges intellectuels qui ont réuni plus de trente intervenants de renom, rapporte RFI.
"Cet hommage est tout naturel pour un grand professeur, un grand intellectuel qui apporte énormément dans plusieurs champs, et on voulait respecter cette tradition pour Souleymane, qui laisse un héritage immense à Columbia", a expliqué Emmanuelle Saada, responsable du département de français de l'université, citée par RFI.
Entouré de sa famille venue en grande partie de Dakar et de nombreux collègues universitaires, le philosophe a participé à des discussions embrassant une vaste gamme de disciplines, de l'histoire à la philosophie, en passant par la sociologie, le français et les religions. Une diversité qui reflète parfaitement l'approche intellectuelle de Diagne.
"C'est quelque chose qui est très marqué dans la culture universitaire américaine et je pense que cela amène de nouvelles dimensions au débat, car on demande, on analyse des sujets sur plusieurs angles, par différents types de personnes qui sont spécialistes dans des domaines différents", s'est réjoui le penseur sénégalais lors de l'événement.
L'impact de Souleymane Bachir Diagne sur ses étudiants est profond et durable. Martina, actuellement doctorante en philosophie à UCLA, témoigne avec émotion : "Je suis tout de suite devenue passionnée par ses cours, par son approche, mais aussi par la manière dont il analyse les phénomènes de société. En moins d'un mois, j'ai compris que je voulais emprunter la voie de la recherche en philosophie".
Son influence s'étend bien au-delà des frontières américaines. Mouhamadou El Hady Ba, responsable du département de philosophie à l'université Cheikh Anta Diop de Dakar, raconte comment sa rencontre avec Diagne a changé sa trajectoire : "En 1996, j'ai obtenu le concours général de philosophie au Sénégal, alors que je m'apprêtais à faire de l'économie à la suite d'études en sciences. Bachir m'a rencontré et m'a félicité, et m'a conseillé de poursuivre la voie philosophique plutôt que de faire de l'économie. Je ne l'ai jamais regretté !"
Il décrit Diagne comme "un pionnier africain qui impacte à l'international, dont l'influence sans frontières inspire aussi le continent et sa jeunesse par son parcours formidable et ses réflexions toujours si constructives".
À l'aube de ses 70 ans, Souleymane Bachir Diagne ne considère pas cette étape comme une fin mais comme une transition. "Je ferme la boucle du troisième chapitre de mon parcours philosophique, rempli d'émotions, et avec le sentiment du devoir accompli", a-t-il déclaré avec son sourire caractéristique.
Le philosophe garde une affection particulière pour ses années à Columbia : "J'ai passé de superbes années ici, des années heureuses. Des années décisives pour ma carrière, aussi, car les publications et les travaux que j'ai réalisés ici ont eu un impact sans commune mesure avec les précédents travaux que j'avais réalisés".
Loin de prendre sa retraite, Diagne a déjà planifié ses prochaines activités intellectuelles : "Je ne m'arrête pas ! Je ne vais pas avoir de journées vides, c'est certain. Je travaille sur trois ouvrages, et je suis invité à plusieurs séminaires dans les mois à venir, dont un à Cambridge. Je vais aussi pouvoir passer plus de temps à Dakar, ce qui est toujours un plaisir immense".
Selon RFI, cet hommage marque non seulement la fin d'un chapitre pour le philosophe sénégalais, mais souligne également l'importance de sa contribution aux études françaises et à la pensée philosophique contemporaine, enrichies par sa perspective africaine et son approche résolument interdisciplinaire.
LA MORT D'UN SÉNÉGALAIS ENFLAMME LA RUE AU BRÉSIL
Le ministère sénégalais des Affaires étrangères annonce l'ouverture d'une enquête pour faire la lumière sur ce drame qui aurait impliqué une intervention policière violente durant une opération contre des vendeurs ambulants
Le ministère sénégalais de l’Intégration Africaine et des Affaires Étrangères a confirmé la mort d’un citoyen sénégalais à São Paulo. Une enquête a été ouverte pour déterminer les circonstances du drame qui aurait impliqué une intervention policière violente.
La ministre sénégalaise de l’Intégration Africaine et des Affaires Étrangères, Yassine Fall, a publié un message de condoléances suite au décès d’un ressortissant sénégalais au Brésil.
Dans ce communiqué officiel daté du 12 avril 2025, la ministre exprime «avec tristesse et consternation» avoir été informée du «décès tragique» de Ngagne Mbaye, survenu à São Paulo le vendredi 11 avril 2025.
«En cette douloureuse circonstance, je tiens à exprimer, au nom du Gouvernement du Sénégal, mes condoléances émues à la famille du défunt, à la communauté sénégalaise résidant au Brésil, ainsi qu’à l’ensemble de nos compatriotes de la diaspora», déclare la ministre dans son message.
Le communiqué précise également que «les démarches sont entreprises, via notre représentation diplomatique pour faire la lumière sur les circonstances de ce drame», suggérant qu’une enquête est en cours pour déterminer les causes exactes du décès.
Violence policière présumée et manifestations
Les circonstances du décès, non détaillées dans le communiqué officiel sénégalais, seraient liées à une intervention policière selon des informations locales. Ngagne Mbaye aurait été abattu par un policier lors d’une opération de confiscation de marchandises visant des vendeurs ambulants dans le quartier du Brás à São Paulo.
D’après des témoins cités par des médias brésiliens, la victime tentait de défendre une collègue âgée lorsqu’une altercation a éclaté avec les forces de l’ordre. Il aurait été d’abord frappé avec un bâton par un policier avant de répliquer avec une barre de fer, ce qui aurait conduit à l’usage d’une arme à feu par l’agent de police.
Une manifestation organisée le samedi 12 avril pour protester contre cette mort a dégénéré, la police militaire ayant utilisé des gaz lacrymogènes pour disperser les manifestants.
Le Centre de droits humains et de citoyenneté des immigrés a dénoncé dans un communiqué ce qu’il considère comme une nouvelle manifestation de violence policière ciblant spécifiquement «un homme noir, migrant et travailleur», et réclame une enquête transparente ainsi que des sanctions.
Les autorités brésiliennes ont annoncé que le policier impliqué a été relevé de ses fonctions et que son arme a été saisie dans le cadre de l’enquête en cours.
PAR SALLA GUEYE
INNOCENCE BAFOUÉE
Une vidéo récemment devenue virale a mis en lumière une réalité alarmante: un jeune garçon, identifié, est violemment roué de coups par un homme présenté comme son oncle paternel, sous le regard indifférent des adultes présents...
Une vidéo récemment devenue virale a mis en lumière une réalité alarmante: un jeune garçon, identifié, est violemment roué de coups par un homme présenté comme son oncle paternel, sous le regard indifférent des adultes présents. Cette scène insoutenable a suscité une onde de choc et une vague d’indignation sur la toile. Peu après, une seconde vidéo dévoile les marques laissées par les coups, des blessures profondes, dont des plaies sanglantes sur le dos du garçon. Cet épisode tragique n’est malheureusement pas un cas isolé.
II met en lumière des pratiques fréquentes au Sénégal, où la violence contre les enfants est répandue, bien qu’elle ne soit pas documentée de manière cohérente. Pour trop d’enfants, les endroits où ils devraient se sentir en sécurité à la maison, à l’école, dans leur communauté sont les premiers et les plus fréquents sites de violence, d’abus et d’exploitation. Parmi les plus vulnérables figurent les talibés, ces enfants confiés dès leur plus jeune âge à des maîtres coraniques. Souvent contraints à mendier pour subvenir à leurs propres besoins et rapporter de l’argent à leur maître, ils sont exposés à des conditions de vie précaires et à diverses formes de maltraitance. Une étude de l’Ong Global Solidarity Initiative (GSI) estimait en 2018 qu’il existait plus de 2.000 daaras à Dakar, accueillant près de 200.000 talibés, dont 25% sont forcés à mendier.
Les abus subis par ces enfants sont multiples: violences physiques, abus sexuels, enchaînement, négligence sanitaire et alimentaire. Des cas tragiques ont été rapportés, tels que celui d’un talibé de 10 ans mort en janvier 2022 à Touba après avoir été frappé à la tête par son maître pour ne pas avoir su sa leçon du jour. Face à cette situation, des initiatives ont été lancées pour améliorer les conditions de vie des talibés. Le projet « Un talibé, un métier », lancé à Tivaouane, vise à offrir une formation professionnelle aux élèves coraniques pour faciliter leur insertion socio-économique. De même, l’Ong Save The Children a lancé le projet « Wallu talibé yi » pour réduire la mendicité des enfants talibés et promouvoir l’implication communautaire. Cependant, malgré ces efforts, les défis restent immenses. L’absence d’un cadre juridique clair pour les daaras et la non-application des lois existantes contribuent à la persistance des abus. Amnesty International souligne la nécessité d’adopter le projet de Code de l’enfant et la loi portant statut du « daara » pour renforcer la protection des talibés.
Il est impératif que l’État du Sénégal prenne des mesures concrètes pour protéger les enfants contre la violence, l’exploitation et les abus. Cela passe par une application rigoureuse des lois, une surveillance accrue des daaras, une sensibilisation des communautés et un soutien aux initiatives visant à offrir des alternatives éducatives et professionnelles aux enfants talibés. L’enfance est sacrée. Elle ne peut continuer d’être un territoire de souffrances. Il est temps d’agir pour que chaque enfant sénégalais puisse grandir dans un environnement sûr, respectueux et propice à son épanouissement.
LA CDS DÉNONCE UNE PURGE POLITIQUE DERRIÈRE LES LICENCIEMENTS MASSIFS
Face aux vagues de renvois dans plusieurs structures publiques et parapubliques, la Confédération pour la Démocratie et le Socialisme tire la sonnette d’alarme. Elle fustige une politique de licenciements qu’elle juge arbitraire.
Face à la vague de licenciements qui secoue plusieurs secteurs publics et parapublics au Sénégal, la Confédération pour la Démocratie et le Socialisme (CDS) sort de son silence. Réunie en conférence des leaders ce mercredi 9 avril, la coalition de partis de gauche a publié un communiqué virulent dénonçant ce qu’elle qualifie de « purge politique » opérée sous le régime des Patriotes Africains du Sénégal pour le Travail, l’Éthique et la Fraternité (PASTEF).
La CDS tire la sonnette d’alarme après la suppression des bourses familiales et le licenciement massif de travailleurs dans des structures clés telles que le Port autonome de Dakar, le FONGIP, la Caisse des Dépôts et de Consignation, la SAPCO, l’AIBD ou encore plusieurs ministères et agences étatiques. Selon le collectif Rassemblement des Travailleurs du Sénégal (RTS), formé par des agents concernés, ce sont plus de 30 000 employés qui auraient déjà été remerciés.
Dans ce contexte tendu, le RTS prévoit une marche pacifique ce vendredi 11 avril pour exiger la réintégration des travailleurs déflatés. Une initiative saluée par la CDS, qui apporte son « soutien militant sans réserve » à la mobilisation.
« La justification de ces licenciements par des difficultés économiques ne tient pas, surtout lorsque ces mêmes structures continuent d’embaucher ou de mener un train de vie dispendieux », fustige la CDS. La confédération déplore une situation « inédite », marquée par une insécurité sociale croissante et des décisions qui rappellent « les vestiges des pratiques dictatoriales les plus sombres ».
Fidèle à son engagement pour la justice sociale, la CDS appelle à un large front regroupant travailleurs et forces démocratiques pour mettre fin à cette spirale de licenciements qu’elle juge « iniques, antirépublicains et anachroniques ».
DIP DOUNDOU GUISS SACRÉ AU WORLD AI FILM FESTIVAL AVEC UN CLIP SUR LES TIRAILLEURS
L’artiste sénégalais a décroché la 3e place avec “Thiaroye 44 (Jambaar Remix)”, seul projet africain en lice. Un hommage vibrant aux Tirailleurs sénégalais, mêlant musique, narration et intelligence artificielle.
L’artiste sénégalais Dip Doundou Guiss a remporté la 3e place au World AI Film Festival à Nice, en France, avec son clip “Thiaroye 44 (Jambaar Remix)”, seul projet africain en compétition parmi plus de 1 500 candidatures de 80 pays.
Le clip, hommage poignant aux Tirailleurs sénégalais, mêle musique, narration et intelligence artificielle pour raviver un pan douloureux de l’histoire coloniale.
Ce prix consacre non seulement une œuvre artistique innovante, mais aussi l’importance de la mémoire collective portée par la nouvelle génération.
« Pour nos Tirailleurs, pour le Sénégal, pour l’Afrique qui gagne », a réagi Dip sur ses réseaux sociaux, remerciant toute son équipe.
DÉMANTÈLEMENT D’UN RÉSEAU DE TRAFIC DE DROGUE DURE À DAKAR
La perquisition a permis la saisie de 72 tablettes de cocaïne, totalisant 80 kg, de dix véhicules, ainsi que d’une somme de 2 590 000 francs CFA.
La Section de Recherches de Dakar a mis fin, ce 11 avril 2025, aux activités d’un vaste réseau de trafiquants de drogue dure opérant entre le Sénégal, la Guinée-Bissau et le Mali.
Cette opération s’inscrit dans le cadre du renforcement des actions menées par le Haut-commandement de la Gendarmerie nationale pour lutter contre la criminalité organisée et assurer la sécurité des populations.
Quatre individus soupçonnés d’être au cœur de ce réseau ont été arrêtés. Ils sont poursuivis pour association de malfaiteurs, trafic international de drogue et blanchiment de capitaux.
La perquisition a permis la saisie de 72 tablettes de cocaïne, totalisant 80 kg, de dix véhicules, ainsi que d’une somme de 2 590 000 francs CFA.
Les investigations se poursuivent pour remonter l’ensemble de la filière.
APRES 5 MOIS DE FORMATION «FILM LAB AFRICA» PRESENTE 4 COURTS METRAGES
Repas Parfait, Marco, Niary Tally et Borom Baax sont tous issus de cette résidence créative initiée par le British Council, d’abord au Nigeria en 2023 puis au Sénégal, en collaboration avec Tangerine Production de Chloé Ortolé et Alarba films de Fama Ndia
Ce jeudi, la vingtaine de jeunes formés dans le cadre de la résidence «Film Lab Africa» ont présenté les 4 courts métrages réalisés durant ces 5 mois. En collaboration avec «Alarba Films» et «Tangerine Production», ce programme initié par le British Council pose les bases d’une initiative prometteuse.
De l’audace, de la créativité et des thématiques incisives. Les quatre courts métrages issus de la première session du «Film Lab Africa» sont le reflet d’une jeune génération de cinéastes décomplexés. Repas Parfait, Marco, Niary Tally et Borom Baax sont tous issus de cette résidence créative initiée par le British Council, d’abord au Nigeria en 2023 puis au Sénégal, en collaboration avec Tangerine Production de Chloé Ortolé et Alarba films de Fama Ndiaye. Conçu comme un tremplin vers l’insertion professionnelle, «Film Lab Africa» a accompagné 4 scénaristes, 3 réalisateurs, 3 directeur-rice-s de la photographie, 4 ingénieure-s du son et 2 producteur-rices pendant 5 mois. Selon le British Council Senegal, ces sessions ont permis à ces jeunes de renforcer leurs compétences en scénarisation, réalisation, production, cinématographie et son. ««Film Lab Africa» s’inscrit dans l’engagement du British Council à soutenir les Industries culturelles créatives (Icc) comme vecteurs de croissance inclusive, de création d’emplois, mais aussi expression puissante de récits uniques et divers sur la scène internationale. Dans ce cadre, nous plaçons les talents au cœur de toutes nos initiatives et, ensemble, nous avons conçu ce programme de 6 mois, véritable tremplin professionnel, en apportant une formation et un programme de mentorat complet dans différents domaines : développement artistique, compétences techniques, mise en œuvre pratique, connaissances en entreprenariat et renforcement du réseau professionnel», résume la directrice pays du British Council, Morgane Quemener. Au-delà de la formation, la résidence a eu pour objectif la production de courts métrages. Et les quatre films présentés ce jeudi sont autant d’aventures cinématographiques. Quand Georges Diodji Ndour explore le cinéma d’horreur dans Borom Baax, Ismaël Mahamadou Laouali nous amène dans un road movie intitulé Niary Tali, tandis que Ciré Ndiaye nous entraîne, avec Marco, dans l’univers d’une enfant autiste et Penda Seck nous invite dans les méandres de la folie lors d’un Repas Parfait.
Programme intensif, «Film Lab Africa» vient confirmer des vocations et éclairer des démarches artistiques déjà perceptibles dans les productions. Autour de ces jeunes, des structures comme Héritage for Africa, l’Association des techniciens du cinéma du Sénégal (Atacs) ou encore des mentors comme la réalisatrice Awa Moctar Guèye, le photographe Djibril Dramé ont participé à faire éclore ces talents. «Cette approche holistique permet aux participant·e·s d’acquérir non seulement des compétences techniques, mais aussi une compréhension globale des industries cinématographiques et télévisuelles», expliquent les organisateurs. Sur 140 candidatures, seuls 16 participants ont été sélectionnés par un jury de professionnels. Et pour beaucoup, cette expérience est une première. C’est le cas de Adji Sène Mbaye, productrice de Borom Baax de Georges Diodji Ndour. «Pour moi, c’est une première expérience de management d’une équipe de professionnels. Et j’ai su transformer les difficultés en opportunités», se réjouit la jeune apprenante. Scénariste de Niari Tali, JeanJacques Pascal Assoumou a fait l’apprentissage du lâcher-prise et de la déresponsabilisation durant cette expérience. Des leçons, des expériences partagées et des sensations artistiques qui vont accompagner ces jeunes tout au long de leur carrière.
LE COMBAT INVISIBLE DES ALBINOS AU SENEGAL
Depuis longtemps, le combat des albinos tourne autour de points vitaux : discrimination, pauvreté et oubli institutionnel. Malgré l’engagement de l’Association nationale des albinos du Sénégal, l’indifférence est leur quotidien
Depuis longtemps, le combat des albinos tourne autour de points vitaux : discrimination, pauvreté et oubli institutionnel. Malgré l’engagement de l’Association nationale des albinos du Sénégal, l’indifférence est leur quotidien.
Les personnes vivant avec l’albinisme au Sénégal continuent de faire face à une marginalisation persistante, marquée par l’inaccessibilité à l’éducation, aux soins de santé, aux protections solaires, et surtout par l’indifférence politique. Malgré les textes internationaux et nationaux censés les protéger, leur quotidien reste un combat permanent. Mouhamadou Bamba Diop, président de l’Association nationale des albinos du Sénégal (Anas) et de la Fondation des personnes vivant avec l’albinisme au Sénégal et en Afrique, tire la sonnette d’alarme. «Depuis 1960, nous courons après une loi d’orientation sociale qui tarde à être appliquée», déplore-t-il. Pour lui, le constat est amer : les albinos sont laissés-pour-compte, oubliés par les politiques publiques, exclus des recensements, marginalisés dans l’emploi et abandonnés face à des pathologies spécifiques qui affectent leur quotidien.
Chaque année, sa fondation organise, pendant le Ramadan, une journée de solidarité pour venir en aide aux albinos. «La plupart doivent aller vendre sur la route ou travailler aux champs pour simplement pouvoir manger. Certains sont diplômés, très intelligents, mais restent sans emploi, condamnés à l’errance ou à la mendicité», regrette M. Diop.
L’absence de volonté politique est, selon lui, le principal frein à l’amélioration de la condition des albinos. «Il y a une volonté politique qui n’est pas inclusive. Elle oublie les minorités, et particulièrement les albinos, à tous les niveaux», dit-il. La loi d’orientation sociale, bien qu’adoptée, reste inopérante, et les institutions peinent à intégrer cette communauté dans leurs programmes. «Quand le nombre exact d’une population n’est pas connu, on ne peut pas élaborer des projets conséquents. Les agences de recensement nous ignorent. Nous ne sommes nulle part, ni dans les chiffres ni dans les politiques», ajoute M. Bamba Diop.
Des décès évitables et une santé négligée
La santé constitue un autre front de bataille. Le cancer de la peau tue en silence, faute de crèmes solaires abordables et de prévention. «En 2023, on a enregistré 27 décès d’enfants albinos. Certains sont morts de malnutrition, d’autres de cancer ou de pauvreté», souligne le président de l’Anas.
Les crèmes solaires, essentielles pour leur survie, coûtent entre 40 et 60 mille F Cfa. Une somme inaccessible pour la majorité, malgré les maigres aides publiques. «Comment vivre avec 25 000 F Cfa de bourse familiale quand une crème coûte le double et ne dure qu’une semaine ? C’est une forme de génocide déguisé», accuse-t-il.
Le manque de mélanine affecte aussi la vision des albinos. Beaucoup naissent avec une déficience visuelle sévère. Les lunettes adaptées coûtent jusqu’à 400 mille F Cfa, des montants prohibitifs pour cette population souvent sans ressources. «Nous manquons d’optométriste et les lunettes spéciales sont rares. On dépend de bonnes volontés étrangères qui viennent avec leur matériel pour nous aider», note M. Diop.
Le président de l’Anas dénonce une absence totale d’outils adaptés. «Il est inadmissible, à l’ère du numérique, qu’un albinos n’ait pas accès à des lunettes qui lui permettent de voir, d’apprendre, de travailler», condamne le président de l’Anas.
Au-delà des obstacles matériels, le rejet social reste l’un des pires fléaux. «Des enfants ne sont même pas enregistrés à l’état civil. Certains pères refusent de reconnaître leur enfant albinos. Il y a des préjugés qui font croire que rencontrer un albinos porte malheur, et cela bloque même nos audiences avec les autorités», déclare Mouhamadou Bamba Diop. Cette stigmatisation empêche les albinos d’exister socialement.
«Aujourd’hui, beaucoup vivent de mendicité. Pas par choix, mais par nécessité. Parce que le système les rejette, l’école ne les accueille pas, l’Etat ne les recense pas», précise M. Diop.
Malgré tout, la communauté ne baisse pas les bras. Une entreprise américaine a promis de soutenir la mise en place d’une fabrique de crèmes solaires au Sénégal. «C’est un rêve qu’on porte depuis longtemps.
Mais sans l’appui de l’Etat, ce projet ne pourra pas aboutir», annonce-t-il.
Pour Mouhamadou Bamba Diop, le changement ne peut venir que d’une vraie compréhension des réalités. «Il faut que les autorités lisent et comprennent les textes de la loi d’orientation sociale. Qu’ils connaissent nos pathologies, nos besoins. Ce n’est qu’à partir de là qu’on pourra avoir des politiques inclusives», conseille le président de l’Anas
Le militant conclut sur un appel fort à la Communauté internationale.
«Il faut rompre avec la volonté politique classique et aller vers l’approche droit. Nous avons élu ces autorités, elles doivent nous servir et non nous ignorer. Les albinos ne demandent pas la charité, ils demandent le respect de leurs droits», note M. Diop. Tant que la société sénégalaise continuera de détourner le regard, les albinos continueront de mourir, victimes silencieuses d’un système qui refuse de les intégrer dans sa politique d’inclusion.
Par Bachir FOFANA
CI-GIT L’ETAT DE DROIT
Mamadou Badio Camara quitte ce monde au moment où Pastef semble dire «l e parti avant la patrie ».
Mamadou Badio Camara, figure éminente de la Justice sénégalaise, nous a quittés. Né en 1952 à Dakar, il a gravi les échelons de la Magistrature, débutant comme substitut du procureur avant de devenir président de la Cour suprême en 2015. En 2022, il a été nommé président du Conseil constitutionnel, où il a joué un rôle-clé dans des décisions historiques, notamment en s’opposant au report de l’élection présidentielle de 2024. Son courage face aux pressions politiques et son respect des principes constitutionnels ont marqué son mandat. En effet, si le Sénégal a connu une alternance démocratique en 2024, nous le devons en partie au Conseil constitutionnel qui a su dire «Non» à l’Exécutif et au Parlement dans leur volonté de repousser la date des élections au 15 décembre 2024. L’on peut aisément dire que le Conseil constitutionnel de 2024 a été plus courageux que celui de 1993, et a su prendre ses responsabilités face à l’Histoire. L’on se rappelle que le Juge Kéba Mbaye avait rendu le tablier face à l’imbroglio de la Présidentielle de 1993.
Mamadou Badio Camara quitte ce monde au moment où Pastef semble dire «le parti avant la Patrie». En effet, lors d’un entretien le 4 avril dernier, le président de la République avait affirmé qu’il revenait au Peuple sénégalais de mettre la pression sur la Justice pour accélérer le traitement de certains dossiers. «Il appartiendra aux Sénégalais de mettre la pression qu’il faut sur la Justice pour que mu def ligéeyam (fasse son travail)», dit-il. Des propos graves, inquiétants et dangereux qui remettent en cause la prérogative présidentielle de garant du bon fonctionnement des institutions et le principe fondamental d’indépendance de la Justice. La Constitution du Sénégal, en son article 88, est très claire sur le statut du pouvoir judiciaire. Elle dispose : «Le Pouvoir judiciaire est indépendant du Pouvoir législatif et du Pouvoir exécutif.» Cette indépendance est la garantie fondamentale d’une Justice impartiale, équitable et à l’abri de toute pression, qu’elle soit politique, économique, religieuse ou même populaire. La justice est certes rendue au nom du Peuple, mais elle n’est pas rendue par le Peuple. De plus, elle n’est pas censée être influencée par lui, encore moins par des pressions externes. Parler ainsi, c’est admettre une fuite en avant du pouvoir et une façon pour ce dernier de dessaisir la Justice de ses prérogatives, pour faire eux-mêmes, avec leurs militants, la justice «populaire», en lieu et place de la Justice républicaine. C’est en quelque sorte vouloir légitimer le règlement de comptes à la place d’une administration sereine de la Justice. Demander à l’opinion de faire pression sur la Justice pour procéder à une vendetta politique, c’est exactement le contraire de la Justice.
Appel à l’insurrection judiciaire
C’est une démarche anticonstitutionnelle, dictatoriale et hors la loi. En effet, tout comme la démarche de reddition de comptes est acceptée par l’opinion, il est nécessaire de faire en sorte que les lois et règlements soient respectés. Il est légitime que le Peuple, attaché à la transparence et à la lutte contre l’impunité, manifeste un vif intérêt pour le fonctionnement de la Justice. Mais il est tout aussi important de comprendre que la pression populaire, même de bonne foi, peut avoir des effets contre-productifs si elle est perçue comme une tentative d’influencer les décisions des magistrats. Ces derniers, investis d’une mission délicate et noble, doivent pouvoir travailler dans la sérénité, le respect et la dignité que leur fonction exige.
Le citoyen sénégalais, à travers les Assises nationales, les Concertations de la Commission nationale sur les réformes institutionnelles (Cnri), les Assises de l’Union des magistrats du Sénégal (Ums)…, a clairement exprimé son souhait d’avoir une Justice indépendante de toutes pressions. C’est d’ailleurs dans ce sens que la promesse du chef de l’Etat de sortir du Conseil supérieur de la Magistrature est très bien accueillie ; même si le Président semble désormais s’inscrire dans le reniement et veut rester dans ledit conseil.
Ces propos du président de la République, à la limite un appel à l’insurrection judiciaire, n’ont rien d’innocent. Ils flattent les passions, attisent les frustrations légitimes et détournent l’attention des véritables enjeux. Diomaye transforme l’Exécutif embourbé dans l’inaction et l’indécision en spectateur et la Justice en fusible politique, en bouc émissaire. C’est une façon subtile, pour ne pas dire habile, mais dangereuse, de soumettre l’autorité judiciaire à la vindicte populaire, au risque de compromettre son indépendance déjà fragile. «Les fausses opinions ressemblent à la fausse monnaie qui est frappée d’abord par de grands coupables et dépensée ensuite par d’honnêtes gens qui perpétuent le crime sans savoir ce qu’ils font», disait Joseph de Maistre.
Le supplice de Mansour Faye, Lat Diop otage politique
Sommes-nous toujours dans un Etat de Droit ? Un partisan du pouvoir dirait certainement «Oui». Cependant, nous assistons à des dérives qui semblent se banaliser. Mansour Faye, ancien ministre, est encore victime du banditisme d’Etat consistant à l’empêcher de circuler librement, sans qu’aucune notification d’interdiction de sortie du territoire ne lui soit servie. «Ils ont osé ! Oui, ils ont osé franchir le Rubicon ! Je voudrais informer l’opinion nationale et internationale que j’ai été une nouvelle fois interdit d’embarquer dans le vol HF 0701 de ce jour jeudi 10-04-25, malgré la mise à disposition de la notification de l’ordonnance de la Cour suprême numéro 12/2025 me rétablissant dans mes droits ! Dans quel Etat sommes-nous ? Qui peut nier, aujourd’hui, que la dictature s’est installée au Sénégal ? Mais, grande et intacte, demeure ma détermination à jouir de tous mes droits de citoyen libre !», peste-t-il sur sa page Facebook, ce jeudi 10 avril 2025.
Pourtant, le Juge des référés de la Cour suprême s’est voulu très clair dans sa décision le concernant. En effet, il était fait exigence au ministre de l’Intérieur de deux choses : soit donner à Mansour Faye les motifs de l’interdiction qui le frappe, soit le laisser circuler librement. L’Etat pastéfien dont nous prévenait Alioune Tine, refuse d’exécuter cette ordonnance de la Justice.
Le journaliste Simon Faye du groupe DMédia est la énième victime de l’auto-saisine très sélective du procureur de la République. Il est actuellement placé en garde à vue pour un article publié sur le site du groupe. Il est le seul convoqué alors qu’il n’est pas le seul à avoir repris l’article d’Afrique Confidentielle. Les atteintes à la liberté de la presse et à la liberté d’opinion se banalisent.
Samuel Sarr, ancien ministre et non moins promoteur principal de la centrale électrique West Africa Energy, serait, selon ses avocats, dans un état de santé préoccupant. Pourtant, une contre-expertise demandée par le juge d’instruction semble lui être favorable. En effet, accusé d’abus de biens sociaux à la suite d’un rapport d’audit, la contre-expertise ordonnée par le juge d’instruction l’a, d’après la presse, blanchi. Mieux, la plainte qu’il a déposée contre son accusateur est bizarrement restée dans les tiroirs de Ibrahima Ndoye.
Cette semaine également, le quotidien «Les Echos» a rapporté l’arrêt de la Chambre d’accusation de la Cour d’appel financier, saisi d’un recours par les avocats de l’ancien Directeur général de la Lonase. Cet arrêt indique en filigrane que Lat Diop, dans le cadre des accusations portées contre lui, est en réalité un otage politique. D’abord, là où l’accusation portait sur 8 milliards de francs Cfa de fonds présumés détournés et extorqués, les juges ont estimé que cela ne résulte que des seules déclarations de Mouhamed Dieng, son accusateur ; «que les échanges par messagerie WhatsApp que ce dernier a produits ne font ressortir qu’un montant de 15 millions F Cfa qui, au regard des sommes colossales déclarées, apparaît très dérisoire, voire insignifiant». Ensuite, aucun document émanant de la Lonase ou d’un quelconque corps de contrôle ne vient corroborer les accusations de détournement de fonds ; surtout que la Lonase n’a jamais porté plainte, ni ne s’est constituée partie civile. Selon toujours les magistrats, rapportés par la presse, la double qualification (extorsion de fonds et détournement de deniers publics) retenue apparaît difficilement soutenable en l’espèce parce qu’il s’agit soit de fonds privés, soit de deniers publics. «Considérant qu’après environ sept mois d’enquêtes d’instruction, l’accusation n’a toujours pas réussi à mettre sur la balance des éléments de preuve tangibles et solides pour battre en brèche les dénégations constantes et invariables de l’inculpé», la Chambre a prononcé la mainlevée du mandat de dépôt et ordonné l’assignation à résidence sous surveillance électronique à Lat Diop, qui reste toujours en prison parce que le Procureur financier (donc l’Exécutif) s’y oppose.
Pulsion vengeresse et fascination pour Mamadou Dia
Ce même Pool financier, à travers le Collège des juges d’instruction, refuse à Farba Ngom et à Tahirou Sarr leurs cautionnements. Et pendant ce temps, la caution versée par le promoteur et homme d’affaires Aziz Ndiaye est acceptée. Les pressions du Peuple dont parlait le président de la République sont-elles passées par là ? Voudrait-on nous dire que Aziz Ndiaye est plus Sénégalais que l’honorable député et maire des Agnam Farba Ngom et l’homme d’affaires Tahirou Sarr ?
Il est clair que l’Etat de Droit est sous l’emprise de l’influence de l’Etat-parti Pastef. Les nouvelles autorités semblent être prises en otage par cette pulsion vengeresse qui conduit inexorablement le Sénégal à renier la République et l’Etat de Droit sous le regard complice de la Société civile, des magistrats insultés et calomniés, et surtout des universitaires qui, sous Macky Sall, étaient prompts à produire des pétitions pour dénoncer les régressions et atteintes aux libertés. «Sur les actes empreints de légèreté et d’abus divers, je suis en revanche préoccupé par la disparition des intellectuels pétitionnaires qui ont animé le débat public entre 2021 et 2024. Devenus subitement aphones, ces ligues spontanées de grands penseurs de la démocratie, de l’Etat de Droit et des libertés ont préféré regarder ailleurs quand journalistes et hommes politiques sont convoqués et condamnés, pour certains, pour des délits d’opinion. Même les deux laquais du parti Pastef, Alioune Tine et Seydi Gassama, et les activistes du mouvement «Y’en a marre» ont émis du bout des lèvres quelques timides réserves», disait l’essayiste Hamidou Anne en octobre dernier. Que dirait-il aujourd’hui ?
Tout le monde devrait commencer à s’inquiéter et alerter l’opinion nationale et internationale, avant de se réveiller un jour et de se retrouver dans une situation regrettable. L’Etat de Droit se meurt à petit feu. Aujourd’hui, le sentiment le plus partagé est que nous sommes en train de vivre la justice des vainqueurs, les règlements de comptes et la judiciarisation des conflits politiques. Ce qui est sûr, c’est qu’il n’y a plus d’Etat de Droit et que Ousmane Sonko est en train de mettre en œuvre sa promesse de dictature. Et l’on comprend alors la fascination de Pastef pour Mamadou Dia, l’homme qui a théorisé la primauté du parti sur l’Etat. Celui-là même qui a voulu empêcher les députés d’exercer une prérogative constitutionnelle en faisant envahir l’Assemblée nationale par les Forces de l’ordre. Le même Dia qui a dissous le Pai de Majmouth Diop et le parti de Cheikh Anta Diop. Qui a également sévèrement réprimé les syndicalistes au début des années 60, avec sa fameuse phrase : «Kou fi mbaam mbaam lou, niou laobé laobé lou sa kaw» (littéralement : qui fait l’âne, se verra administrer une sévère correction).