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27 juin 2025
par Siré Sy
YORO DIA, CONDÉ A AMENÉ LA GUINÉE EN AVANT
Qualifier Condé de mégalomane et de paranoïaque, c’est oublier qu'en étant un héros avant d’accéder au pouvoir, il est devenu un ‘’résistant au pouvoir’’ à l’instar d’un certain Abdoulaye Wade devenu ‘’un opposant au pouvoir’’
Cher Yoro Dia, vous écrivez que ‘’En septembre 1958, en disant «Non» au Général de Gaulle, Sékou Touré fit entrer la Guinée dans l’histoire. Ses successeurs, des hommes médiocres, l’ont fait sortir de l’histoire et le troisième mandat d’Alpha Condé est le parachèvement de la sortie de la Guinée de l'Histoire. Non seulement la Guinée est sortie de l’histoire, mais elle-même sortie du présent et de l’actualité’’.
Il est indéniable qu’en septembre 1958, en disant ‘’Non’’ au général De Gaulle, Sékou Touré fit entrer la Guinée dans l’Histoire. Ses successeurs ne sont pas des hommes médiocres comme vous le prétendez et le président Alpha Condé a, non seulement consolidé la place de la Guinée en Afrique et dans l’Histoire, mais aussi et surtout, le président Alpha Condé a décloisonné la Guinée, en l’ouvrant à l’Afrique et au monde, tout en mettant la Guinée sur des rails nouveaux. Juste vous rappeler que l’arrivée d’Alpha Condé à la magistrature suprême en Guinée, équivaut en intensité politique et dans la symbolique démocratique, l’arrivée au pouvoir d’un certain Nelson Mandela en Afrique du Sud en 1994 et l’arrivée au pouvoir d’un certain Abdoulaye Wade au Sénégal en 2000 : des panafricanistes, des démocrates et des combattants de la liberté qui en ont payés le prix fort. De 1958 jusqu’en 2010, ce fut la première fois que la Guinée élit librement, démocratiquement et par la voie des urnes, un président de la République. Après être entrée dans l’Histoire en 1958, la Guinée s’est rappelé encore à l’Histoire en 2010. En 2020, la Guinée a encore inscrit sa présence et son actualité au cœur de l’agenda africain et mondial.
Cher Yoro, vous dites ‘’autant les élections et les tensions au Mali, en Côte d’Ivoire ou au Sénégal intéressent l’Afrique et le monde, autant les agitations politiques en Guinée relèvent d’un huis clos national. C’est pourquoi les Guinéens de Dakar, de Paris ou de Washington, qui manifestent dans ces capitales pour attirer l’attention de ce qu’on appelle l’opinion internationale, se trompent de stratégie et de combat en voulant braquer l’opinion internationale sur un pays qui a disparu des radars et qui n’intéresse personne."
Jamais une élection présidentielle en Guinée n’aura mobilisé autant la communauté africaine et la communauté internationale, en termes d’observateurs et de missions d’observation. D’abord, avant la présidentielle du 18 octobre 2020, c’est l’Union africaine et l’Union européenne qui ont financé une bonne partie du budget du processus électoral dont la révision du fichier, l’inscription sur les listes électorales et l’organisation du scrutin. Ensuite, le jour de la présidentielle du 18 octobre 2020 en Guinée, la mission de la Cedeao (dirigée par l’ex-Premier ministre cap-verdien, José Maria Neves), celle de l’Union africaine (dirigée par l'ancien Premier ministre congolais, Augustin Matata Ponyo) et l'ONG panafricaine Stand for Life and Liberty, ont dépêché des observateurs. Maintenant que le déroulement du scrutin de l'élection présidentielle du 18 octobre 2020 en Guinée, connaisse quelques dysfonctionnements, relève de l’imperfection même de la nature humaine à fortiori de ses institutions et mécanismes. Car, aucune élection au monde n’est parfaite. La preuve, la dernière élection présidentielle aux USA. Aujourd’hui plus que jamais, la Guinée est on ne peut plus visible sur les radars de la géo-économie mondiale et de la géo-politique africaine.
Cher Yoro, vous dites ‘’le «Dadis show» avait sa place dans l’actualité parce qu’il nous faisait rigoler. C’était une tragi-comédie, alors que la mégalomanie et la paranoïa de Condé sont tragiques. Comme le dit bien le livre de Senen Andriamirado, Le héros et le tyran, Sékou Touré a été d’abord un héros africain avant de sombrer dans la tyrannie à cause des complots imaginaires. Condé aussi a été un héros pour sa constance dans l’opposition à tous les régimes, de Sékou Touré à Dadis, avant de devenir mégalomane et paranoïaque en ressuscitant l’imaginaire complot peul. L’alibi du complot peul est le seul dénominateur qu’il partage avec Sékou Touré."
Sous ce chapitre, vous avez raison en disant qu’Alpha a été un héros pour sa constance dans l’opposition à tous les régimes, de Sékou Touré à Dadis Camara. Par contre, qualifier le président Alpha Condé de mégalomane et de paranoïaque, c’est oublier qu’Alpha, en étant un héros avant d’accéder au pouvoir, est devenu un ‘’résistant au pouvoir’’ à l’instar d’un certain Abdoulaye Wade devenu ‘’un opposant au pouvoir’’, selon les termes d’Abdou Latif Coulibaly. ‘’Alpha, un résistant au pouvoir’’, un résistant contre l’armée et les multinationales. Parler du complot peul, c’est bien méconnaitre la sociologie politico-électorale en Guinée, d’une part et d’autre part, passer sous cape la survivance des pouvoirs coutumiers, traditionnels, religieux et des communautés en Guinée. Et la survivance de ces pouvoirs-là, est omniprésente en Guinée, même dans ses aspects les plus modernes. Et très démocratiques à leur façon.
Cher Yoro, vous dites ‘’.....la paranoïa de Condé sur le complot peul dépasse largement celle de Sékou Touré qui limitait ce complot à la Guinée, alors que Condé le transpose en Afrique de l’Ouest ; d’où son hostilité envers les présidents Macky Sall et Embalo. Ce qui constitue un grand handicap pour la diplomatie du bon voisinage et la théorie senghorienne de l’Unité africaine par cercles concentriques. Organiser une cérémonie d’investiture en l’absence de ses principaux voisins est la meilleure preuve de l’isolement de la Guinée dans la sous-région et sa disparition des grands enjeux du continent, comme la lutte contre le terrorisme."
D’abord, une précision de taille. Que le président Macky Sall n’ait pas assisté à la cérémonie d’investiture du président Alpha Condé, ne saurait être imputable à ce dernier. Car le président Macky Sall himself a été bien invité à la cérémonie d’investiture. Mais finalement, il s’est fait représenter par une forte délégation. Quant au président bissau-guinéen Umaro Sissoco Embaló, entre lui et Alpha, c’est une autre histoire… Quant au président gambien, Adama Barro, la conjoncture politique en Gambie est telle que la meilleure manière d'assurer ses arrières et de terminer son mandat, c’est peut-être de rester chez lui, au pays, en Gambie.
Ensuite, le Sénégal et la Guinée Bissau ne sont pas les seuls voisins de la Guinée. Le Sénégal et la Guinée Bissau sont des voisins parmi tant d’autres de la Guinée. Parce que la Guinée a comme autres voisins, le Mali, frontalier avec la Guinée sur 858 km ; la Sierra Leone, frontalière avec la Guinée sur 652 km ; la Côte d'Ivoire, frontalière avec la Guinée sur 610 km; le Liberia, frontalier avec la Guinée sur 563 km; la Guinée-Bissau, frontalière avec la Guinée sur….386 km et le Sénégal, frontalier avec la Guinée sur ….330 km. Et étaient présents à la cérémonie d’investiture du président Alpha Condé, ces autres proches voisins que sont les présidents du Mali, de la Sierra Leone, de la Côte d’Ivoire et du Libéria. Sans compter la présence de ces lointains voisins que sont les présidents du Tchad, du Ghana, du Togo, du Congo Brazzaville et du Burkina Faso. Que le président Macky Sall himself n’ait pas pu assister à la cérémonie d’investiture du président Alpha Condé n’enlève en rien aux relations fraternelles entre les Guinéen.ne.s et les Sénégalais.es et à l’entente mutuelle entre Macky et Alpha. Demandez à Ablaye (Abdoulaye Wade).
Yoro, vous dites que ‘’la Guinée de Sékou Touré qui était à l’avant-garde politique en 1958 est devenue une «illusion de l’arrière» avec Condé et son 3e mandat, et qui sera naturellement tenté par un 4e, car il ne lui sera pas difficile de trouver un constitutionaliste pour dire que le 3e mandat est en fait un 1er mandat avec la nouvelle Constitution. C’est une hypothèse très sérieuse, car Condé peut difficilement concevoir un autre Guinéen occuper le haut du pavé. Avec cette mentalité, la seule solution est la présidence à vie, entrecoupée d’élections qui ne sont que de simples formalités pour relégitimer et donner un emballage légal à un pouvoir personnel."
La Guinée est une République et Alpha est dans la légalité constitutionnelle, dans le fait constitutionnel, mais pas dans la morale constitutionnelle. Car dans la légalité constitutionnelle et dans le fait constitutionnel, c’est le domaine de la loi en ce qu’elle permet et ce qu’elle ne permet pas, alors que faire dans la morale constitutionnelle, c’est faire de l'interprétation et de l'exégèse. Et dans ce domaine de l’interprétation et de l’exégèse, tout le monde peut avoir raison comme tout le monde peut avoir tort. Tout dépend des angles d’approche et de son parti pris…. Dire qu’Alpha fera un 4eme mandat alors qu’il vient à peine d’être réélu relève vraiment ‘’d'une illusion en arrière’’. Faisons cap sur ‘’une illusion du future’’ avec la présidentielle sénégalaise en 2024.
Siré Sy est fondateur du Think Tank Africa WorldWide Group
LES PAYSANS SE DÉSOLENT DU RETRAIT DES CHINOIS
Les paysans du bassin arachidier sont dans une situation inconfortable. Pour cause, les Chinois ont arrêté leurs exportations.
Les paysans du bassin arachidier sont dans une situation inconfortable. Pour cause, les Chinois ont arrêté leurs exportations. Un dysfonctionnement que ces paysans n’attendaient pas dans le processus de commercialisation de l’arachide d’autant plus que, selon ces paysans, la Sonacos refuse de payer un bon prix.
« Nous constatons le désarroi des paysans. Présentement, nous n’avons pas vu d’acheteurs sur le marché. Le pire est que nous n’avons pas d’interlocuteur. Avec l’arrêt des Chinois, qui disent qu’ils ne parviennent plus à évacuer leur produit, nous n’avons plus de clients. Ce qui fait que la production reste entre les mains des paysans », a déploré le Secrétaire général des producteurs, Cheikh Tidiane Cissé. Ce dernier invite l’État à réguler le marché de campagne.
Si au niveau du bassin arachidier, les paysans ont du mal a évacué leur produit, tel n’est pas le cas à Diourbel. Dans le Baol, l’on salue la décision du chef de l’État à libéraliser le marché. Selon le président du Conseil national de coopération et des ruraux (Cncr), Bara Bousso, cette mesure favorise l’autonomisation des paysans.
« Le président de la République a fixé le prix du kilogramme d’arachide à 250 FCFA. Ce qui résulte que le paysan peut vendre à un prix supérieur à celui initialement fixé. Donc, le chef de l’État a bien pensé à l’intérêt du monde rural », a déclaré M. Bousso qui a, toutefois, invité les autorités étatiques à accompagner les huiliers à améliorer leur secteur.
LE CICES LANCE DES OPÉRATIONS DE NETTOIEMENT DE SON CENTRE INTERNATIONAL D’ÉCHANGES
Le Centre international du commerce extérieur du Sénégal (CICES), en partenariat avec la société vidange, assainissement du Sahel (VICAS), a mobilisé ce samedi, 350 techniciens de surface pour le nettoiement et le désencombrement de son centre d’échanges
Dakar, 19 dec (APS) - Le Centre international du commerce extérieur du Sénégal (CICES), en partenariat avec la société vidange, assainissement du Sahel (VICAS), a mobilisé ce samedi, 350 techniciens de surface pour le nettoiement et le désencombrement de son centre d’échanges, a indiqué Saliou Keita, son directeur général.
‘’’Nous avons mobilisé 350 techniciens de surface pour nettoyer et désencombrer le centre international d’échanges grâce à notre collaboration avec la Société de vidange, assainissement du Sahel (VICAS)’’, a-t-il dit lors de la journée consacrée à cette activité.
En présence du directeur général de la Société VICAS, Ibra Sow, Keita a expliqué que cette initiative s’inscrit dans sa volonté d’organiser une remise à niveau du site et de rendre le CICES agréable, accueillant et convivial.
Il a ainsi souligné deux défis à relever en termes de propreté du site et de la diversification des offres pour booster le taux d’occupation et de fréquentation du CICES.
Il a par ailleurs insisté sur ‘’le maintien de la date de la Foire internationale de Dakar (FIDAK) qui se tiendra entre le 25 mars et 8 avril prochain en raison de la pandémie du coronavirus’’.
Le directeur général de la Société de vidange, assainissement du Sahel (VICAS), Ibra Sow a, de son côté, déclaré que ‘’le CICES est une vitrine du Sénégal indiquant qu’elle peut servir de baromètre pour les étrangers sur le niveau de propreté du pays.
‘’C’était une opportunité à saisir pour faire quelque chose pour mon pays lorsque j’ai entendu le directeur général du CICES à travers les médias décliner sa feuille de route et accorder une attention particulière à la propreté du site’’, a-t-il fait valoir.
’’Nous avons eu à lui expliquer ce que nous avons comme logistique en termes de camions hydro-cureurs, de bennes crapauds, de deux balayeuses et 350 technciens de surface’’, a ajouté M. Sow.
LA PANDÉMIE À FAIT PERDRE 800 MILLIONS DE FRANCS AU CICES
Sans donner de précisions supplémentaires, Keïta a rappelé que le CICES était la seule structure de l’Etat s’activant dans l’évènementiel qui draine du monde, alors que les rassemblements sont encore interdits
La pandémie du nouveau coronavirus a fait perdre 800 millions de francs au Centre international du commerce extérieur du Sénégal (CICES), a révélé samedi Salihou Keïta, son directeur général.
‘’Le CICES a perdu 800 millions de francs CFA en raison de la pandémie du nouveau coronavirus’’, a-t-il notamment déclaré à la journée de nettoiement et de désencombrement du centre d’échanges de la structure.
Sans donner de précisions supplémentaires, Keïta a rappelé que le CICES était la seule structure de l’Etat s’activant dans l’évènementiel qui draine du monde, alors que les rassemblements sont encore interdits.
‘’Mais nous devons apprendre à vivre avec le coronavirus et prendre toutes les dispositions sanitaires nécessaires pour mettre les gens dans de meilleures conditions d’organisation de nos activités’’, a-t-il souligné.
Il a réaffirmé le maintien de la date de tenue de la prochaine Foire internationale de Dakar (FIDAK) prévue du 25 mars au 8 avril 2021.
‘’Il faut aller vers une foire plus professionnelle tout en tenant compte du secteur informel qui porte l’économie du pays à hauteur de 97% ‘’, a fait savoir Keita non sans exprimer la volonté du CICES d’organiser chaque année une foire dédiée au secteur informer qu’il faut accompagner et aider à se formaliser.
’’Les acteurs du secteur informel sont des régulateurs sociaux que nous allons organiser et accompagner parce que nous voulons cette année organiser une foire professionnelle afin de rendre le CICES son lustre d’antan’’, a-t-il fait valoir.
EXPLOSION D'UN PUITS DE GAZ A NOTO
Réveil brutal pour les populations du village de Ngadiaga dans la commune de Notto Gouye Diama. En effet, tout est parti d’une exposition d’une conduite de gaz dans l’usine Fortesa selon nos sources.
Réveil brutal pour les populations du village de Ngadiaga dans la commune de Notto Gouye Diama. En effet, tout est parti d’une exposition d’une conduite de gaz dans l’usine Fortesa selon nos sources.
« Malheureusement on s’est réveillé avec une catastrophe qui est en train de se passer. Il y a un puits de gaz qui a explosé ce matin vers les coups de 09 h.
Actuellement, tout le village est en danger. Certains ont quitté leurs maisons pour sauver leur peau par peur d’inhaler le gaz», témoigne Mame Samba Ngadiga, membre du collectif pour les intérêts de Ngadiaga.
Les sapeurs-pompiers et la gendarmerie sont sur place, mais les soldats du feu n’arrivent pas à maitriser le feu.
Selon les populations sur place, il y a un employé de l’usine qui s'en est sorti avec des blessures et qui se trouve présentement à l’hôpital. Les dégâts matériels sont énormes aussi. " A Ngadiaga, si l’on vous dit qu’il y a une entreprise qui produit du gaz, vous n’allez pas nous croire. Cela parce que les habitants ne se retrouvent pas dans cette entreprise qui ne fait rien pour les populations autochtones.
Ici, il n’y a même pas d’eau potable ni un poste de santé et pourtant cette usine pouvait prendre tout cela en charge. Cette usine exploite du gaz ici depuis 1976 mais force est de reconnaitre nous sommes en danger", confie-t-on. "
Récemment on a tenu une manifestation pour alerter, aujourd’hui l’histoire nous a donné raison" , conclut Mame Samba Ngadiga qui annonce une grande manifestation après la maitrise des flammes.
LE SÉNÉGALAIS FACE AU COVID
Malgré la flambée des cas positifs, des compatriotes ont baissé la garde face à cette maladie dont certains doutent encore l’existence. Un psychologue et un sociologue tentent de cerner le comportement des populations
Le Sénégal affronte, depuis quelques semaines, une seconde vague de Covid-19 avec des taux de contamination allant jusqu’à 9 à 10% par jour. Mais, malgré la flambée des cas positifs, des compatriotes ont baissé la garde face à cette maladie dont certains doutent encore l’existence. Un psychologue et un sociologue tentent de cerner, pour Lesoleil.sn le comportement des Sénégalais.
Moustapha est un menuisier mécanique de 45 ans établi à la cité Avion de Ouakam. En pleine discussion avec ses collègues de travail dans un restaurant très fréquenté du quartier, il dit douter encore de l’existence de la maladie. Et par conséquent, il ne porte le masque que dans des circonstances très précises. « Je porte très rarement le masque, je le mets lorsque je suis dans le car de transport pour venir au travail ou pour rentrer chez moi », dit-il. Car, d’après cet habitant des Parcelles Assainies, « même si le coronavirus existe, il n’est pas aussi grave comme on le décrit en Occident ».
A l’image de Moustapha, beaucoup de Sénégalais, contrairement à la première vague, refusent de s’approprier les mesures édictées malgré les nombreuses alertes lancées par des autorités sanitaires et étatiques. Qu’est-ce qui explique cette situation ?
Le psychologue-conseiller Abdoulaye Wade a pointé la stratégie de communication mise en avant par les autorités médicales.
Démystification du virus
« Au niveau de la communication, les experts de la santé ont pêché en pensant que seul le discours médical suffisait pour convaincre les communautés alors qu’il fallait partir de la base définir avec les populations une stratégie de riposte validée, intégrée et portée par les communautés elles-mêmes », a-t-il déclaré.
Le chargé de cours à l’université du Sine-Saloum El Hadj Ibrahim Niass de Kaolack est d’avis que « tant que les communautés ne s’approprient pas des mesures édictées par les spécialistes de la santé, toute tentative d’enrayer cette pandémie sera veine. Il faut parvenir à déconstruire réellement les bombes idéologiques qui freinent la sensibilisation dans les communautés ».
A l’en croire, l’abandon, aujourd’hui, des gestes barrières s’explique par le fait que « les perceptions et les représentations que les communautés avaient de la pandémie ont beaucoup évolué suite à la cohabitation avec le virus dans une période relativement longue mais aussi et surtout avec l’avancée de la recherche ». D’après M. Wade, « en vivant avec le virus, les populations ont fini par le démystifier au moment où tous les spécialistes en santé voyaient le chaos partout en Afrique au Sud du Sahara ».
Théorie du complot et fait religieux
Pour sa part, Baidy Diop, chercheur en sociologie, soutient que les doutes émis sur l’existence de la pandémie constituent un fait très intéressant à prendre en compte dans l’analyse du comportement actuel des Sénégalais. « Au début de la pandémie, il a été très difficile de faire croire à une bonne partie de nos compatriotes l’existence de la maladie. Ce qui fait qu’ils ont accepté les gestes barrières non pas par appropriation mais par coercition », avance-t-il, rappelant que l’allègement des mesures a été perçu comme une libération mais aussi une confirmation de la théorie du complot.
Nos deux interlocuteurs sont tous d’avis que le fait religieux reste un facteur explicatif de la situation. Car, disent-ils, des évènements majeurs, annoncés dans le pays comme lieux par excellence de la libération du virus, se sont déroulés sans une réelle incidence sur la recrudescence des cas de Covid-19 à savoir la Tabaski, le Grand Magal de Touba, le Maouloud. Ils ont également fait état de la reprise des enseignements apprentissages dans les établissements scolaires et les différentes élections tenues dans des pays voisins comme la Guinée et la Côte d’Ivoire. « Le fait subséquent est que nombre de Sénégalais pensaient être délivrés considérant le virus comme une simple banalité », tranche le sociologue Baidy Diop qui a, par ailleurs, pointé les limites de la communication gouvernementale.
L’autre facteur qui pourrait expliquer ce relâchement, constatent les spécialistes, est lié au fait que le sentiment d’unité nationale noté au début de la pandémie s’est effrité entre temps et le confinement et les restrictions des déplacements ont également été une expérience désagréable pour les communautés. « Tous ces éléments, combinés à la théorie du complot largement relayés dans les réseaux sociaux, amènent les communautés à réinterpréter et à réinterroger leur rapport avec la pandémie se traduisant, du coup, par un abandon progressif des mesures barrières », analyse le psychologue-conseiller.
LA FAILLITE DU SYSTÈME
C’est une indignation presque généralisée suscitée par la commercialisation, en cette période de Noël, de la boisson alcoolisée sous forme de gadgets et de jouets. Comment cela a-t-il été possible ?
C’est une indignation presque généralisée suscitée par la commercialisation, en cette période de Noël, de la boisson alcoolisée sous forme de gadgets et de jouets. Comment cela a-t-il été possible ? ‘’EnQuête’’ a essayé d’en savoir plus sur les procédures d’importation de produits alimentaires et les subterfuges utilisés par certains commerçants pour les contourner
Le consommateur sénégalais est-il en sécurité ? Les différents services en charge de contrôler et d’autoriser l’entrée de certains produits dans le pays font-ils convenablement leur tâche ? Les questions font florès, mais ne trouvent pas de réponse dans le communiqué servi par le ministère du Commerce, avant-hier.
En tout cas, si l’on en croit le directeur exécutif de l’Unacois Yessal, Alla Dieng, ceci n’aurait jamais dû arriver. ‘’Certes, les premiers responsables sont les commerçants véreux qui commercialisent ce produit. Mais la responsabilité de l’Etat est aussi entière. J’ai entendu la Direction du commerce intérieur dire qu’ils n’ont pas une maitrise sur les produits qui entrent dans ce pays… Pour moi, c’est honteux pour un Etat, qui dispose de tous les moyens, en termes de renseignements, de sécurité… qui a la police, la gendarmerie, la douane…. C’est vraiment inadmissible’’.
En fait, souligne le commerçant, il n’est pas donné à n’importe qui de faire entrer au Sénégal des produits destinés à la consommation. Comme les personnes, ces produits sont également assujettis à des procédures particulières. ‘’La douane, présente à toutes les frontières : terrestres, maritimes et aériennes, a une responsabilité dans cette affaire. Des produits de ce genre ne doivent pas pouvoir entrer dans le pays. Cela révèle un laxisme quelque part’’.
Mais, à en croire certaines sources douanières, il serait trop hâtif de tirer des conclusions et de situer les responsabilités. ‘’Les choses ne sont pas aussi simples. Il faut savoir qu’en la matière, la douane apporte surtout son concours à certains services. Quand il s’agit de produits alimentaires, la douane va juste vérifier si l’important dispose d’une déclaration d’importation de produits alimentaires. Si la personne a ce document, on procède au dédouanement, sinon, on met le produit en dépôt. Au bout d’une période, si la régularisation n’a pas été faite, on enclenche la procédure de saisie et on va soit vendre le matériel aux enchères, soit la détruire, si c’est impropre à la consommation’’.
Le Libanais avait-il une Dipa ? Sinon, comment a-t-il fait pour passer entre les mailles de la douane ? L’enquête qui suit son cours permettra sans doute d’éclairer la lanterne. Selon nos interlocuteurs, dans le cadre de ce dossier, le problème, c’est que le liquide alcoolisé est commercialisé à travers des jouets. ‘’Il faut savoir que l’alcool étant taxé à plus de 100 %, le gars peut ne pas le déclarer et dire qu’il a un jouet. Ainsi, on dédouane un jouet et non de l’alcool. Pour les jouets, on regarde juste la matière et on procède à la facturation’’. Chez les services du ministère du Commerce, c’est surtout cette version qui a été servie.
Il faut souligner que, contrairement aux produits alimentaires, les boissons alcoolisées obéissent à d’autres procédures spécifiques. En effet, si les produits alimentaires sont assujettis à une simple déclaration, ceux qui peuvent être nocifs pour la santé ou pour l’environnement sont soumis au régime de l’autorisation. La demande d’autorisation doit être adressée à la Division de la consommation et de la sécurité des consommateurs. Pour la commercialisation, également, il y a un régime juridique strict.
Pour l’Unacois, quelles que soient les circonstances, il faudrait au moins veiller à sanctionner sévèrement tous les fautifs. ‘’Ce sont des commerçants véreux, prêts à tout pour se faire de l’argent. Le plus révoltant, c’est qu’ils puissent vendre ça à des enfants. Si c’était des adultes, ils ont une certaine capacité de discernement. Mais pour des enfants, c’est vraiment révoltant. L’Etat doit être ferme. C’est des pratiques délictuelles d’un autre âge. Je n’aurais jamais imaginé que des gens puissent faire ça’’, peste Alla Dieng.
Cela dit, cette affaire doit inciter les différents services compétents à plus de vigilance dans le contrôle des importations et commercialisations de certains produits destinés à la consommation des Sénégalais.
Pour rappel, c’est grâce à la réactivité des éléments du commissariat central de Rufisque que le pire a pu être évité. Après avoir reçu un renseignement, les limiers ont vite mis en branle un dispositif pour mettre la bande hors d’état de nuire. Très vite, ils ont mis la main sur les présumés contrebandiers, qui seront déférés aujourd’hui au parquet. Ils sont poursuivis pour contrebande, tromperie sur la qualité de la marchandise, mise en circulation d’un produit impropre à la consommation et mise en danger de la vie d’autrui.
Procédure pour importer des produits alimentaires
L’importation de produits alimentaires au Sénégal est assujettie à des règles strictes. Avant toute opération, le commerçant doit faire, auprès des services du ministère du Commerce, une déclaration d’importation des produits alimentaires (Dipa). Pour disposer du précieux sésame, il faut une facture pro forma ou une facture des produits à importer ; un certificat d'origine, éventuellement, des produits à importer ; tout document attestant de la qualité du produit (certificat sanitaire ou de salubrité, certificats phytosanitaires, certificats d'analyse ; certificats de non-radioactivité ; certificats de non-contamination à la dioxine) ; 4 échantillons des produits aux fins d'analyse. Ces échantillons sont ensuite emmenés au laboratoire à des fins de contrôle de conformité.
MISE EN PLACE DES «CLUBS DES JEUNES FILLES» POUR COMBATTRE LES MARIAGES PRECOCES
Les mariages précoces constituent l’une des plaies que la société n’arrive à guérir malgré la multiplication des programmes pour son éradication. Mais le pacte communautaire «New deal», mis en place, est en train de faire bouger les lignes
Les mariages précoces constituent l’une des plaies que la société n’arrive à guérir malgré la multiplication des programmes pour son éradication. Mais le pacte communautaire «New deal», mis en place, est en train de faire bouger les lignes.
C’est une situation dramatique : Au Sénégal, 16% des adolescentes de 15 à 19 ans sont déjà mères de famille. Un taux qui atteint les 30% dans les régions de Kolda et de Tambacounda, au sud du pays. Dans les régions de Tamba¬counda, il est de 30%. Ces deux régions enregistrent également les taux les plus élevés de filles de moins de 14 ans victimes des Mutilations génitales féminines (Mgf), avec respectivement 44% pour Tambacounda et 35% pour Kolda contre 14% au niveau national.
Alarmants, ces chiffres interpellent la société, surtout les jeunes filles. Le Centre conseil adolescent (Cca) de Tambacounda, sous l’égide du Projet promotion des jeunes (Ppj) du ministère de la Jeu¬nesse, avec l’appui de l’Unfpa, a développé l’initiative des «Clubs des jeunes filles» pour essayer de rompre cette pratique rétrograde.
L’objectif principal est de lutter contre les grossesses précoces et les mariages d’enfants, renforcer le leadership des adolescentes et jeunes filles, promouvoir leur la scolarité et leur employabilité. Ainsi, le Cca de Kolda s’est approprié cette approche novatrice qui a généré le concept du «New deal» ou «Pacte communautaire» qui s’inscrit dans le cadre de la mise en œuvre des trois résultats transformateurs de l’Unfpa visant : «Zéro décès maternel évitable, zéro besoin non satisfait en planification familiale, zéro violence basée sur le genre et pratique néfaste à l’horizon 2035.»
Il faut savoir que le «New deal» est un pacte communautaire qui repose sur un engagement moral entre des jeunes filles et les parents pour un objectif «zéro grossesse» au sein des «Clubs de jeunes filles». Il s’agit de l’engagement des parents à ne plus marier leurs filles avant 18 ans, alors que les jeunes filles à leur tour jurent de ne pas tomber enceinte avant le mariage. Résultat : aucun cas de grossesse n’a été enregistré parmi les 8 125 jeunes filles qui ont signé le pacte du «New deal».
En trois ans d’existence, le pacte a produit des résultats très satisfaisants et salutaires avec la création de 292 Clubs de jeunes filles dans 12 départements du pays, l’enrôlement de 10 mille 525 jeunes filles signataires du «New deal» et reconnues par leur communauté. En plus, aucun cas de grossesse n’a été noté dans les Clubs de jeunes filles, 333 jeunes filles ont bénéficié de formation professionnelle qui leur a offert des activités génératrices de revenus en vue de leur autonomisation. Last but not least, il y a un taux de réussite de 100% au Bfem en 2019 des membres des Clubs de jeunes filles des communes de Dabo et Mampatim, dans la région de Kolda.
En mettant le curseur sur les lourdeurs sociétales qui pouvaient gêner l’épanouissement des jeunes filles, le ministre de la Jeunesse, Néné Fatoumata Tall, rappelle le chemin parcouru avec les partenaires de son département pour arriver à ces résultats probants et salutaires à l’échelle des zones ciblées par le programme. «C’est dans cette dynamique de consolidation des acquis, mais également d’élargissement qu’il faut comprendre les objectifs du document d’orientation pour la mise à l’échelle», explique Néné Fatoumata Tall, ministre de la Jeunesse, qui garantit «la disponibilité de son département dans la poursuite du travail pour une ‘’inclusivité’’ du projet». Elle demande même la modélisation de l’initiative du «New deal» à l’échelle nationale, les orientations stratégiques et les angles d’intervention.
MACKY SALL EST EN TRAIN DE CHERCHER À ÉLARGIR LA RESPONSABILITÉ DE SON ÉCHEC
Abdoul Mbaye a une autre lecture de l’élargissement de la majorité présidentielle avec l’entrée du président du parti Rewmi dans le gouvernement
Abdoul Mbaye a une autre lecture de l’élargissement de la majorité présidentielle avec l’entrée du président du parti Rewmi dans le gouvernement.
«Le Président Macky Sall est en train de chercher par tous les moyens à élargir la responsabilité de son échec», a dit hier, à Thiès, le leader de l’Alliance pour la citoyenneté et le travail (Act) qui effectuait la prière du vendredi à la grande mosquée de Moussanté, sous la direction de l’imam ratib Tafsir Babacar Ndiour.
«Nous avons affaire à des personnes qui, lorsqu’elles appellent au dialogue, n’y croient pas un mot. Comment on peut appeler un dialogue, définir les parties au dialogue, à savoir l’opposition, la majorité, la société civile et utiliser ce dialogue pour réduire la force d’une des parties autour de la table à savoir l’opposition ?», s’interroge l’ancien Premier ministre.
Pour lui, la gouvernance d’un pays «ne peut pas reposer sur du ‘’wax waxeet’’, sur de la trahison, sur du débauchage, sur de la transhumance». Face à cette nouvelle recomposition politique, Abdoul Mbaye estime que «l’opposition est condamnée à se réorganiser et à se mobiliser pour faire face».
La suite ressemble à une pique au leader de Rewmi. «Nous attendions que cette recomposition ait lieu. C’est une habitude en Afrique et au Sénégal. Il y a des personnes qui font de la politique pour leur poche et pour leur responsabilité qui ne peuvent pas attendre 5 ans», a-t-il dit.
Par Amadou Lamine Sall
MA DECLARATION D’AMOUR À LA LANGUE FRANÇAISE
Jamais la Francophonie ne sera aride, pierreuse. Jamais la langue française ne vieillira, car l’amour ne vieillit jamais. Qui peut donc enterrer l’ombre d’un arbre ?
Toutes les langues sont belles… mais il en est une, déesse de feu au long corps d’érable, de chêne et de baobab, une langue qui enjambe océans et fleuves, chante sur les avenues, les chemins de brousse, dans des cabarets, des cases et des huttes.
Cette langue est une femme belle aux lèvres de café, aux yeux de sirop, aux mains de henné, à la bouche de vin de palme. Elle porte dans son ventre des enfants de toutes les couleurs. C’est une langue métisse, et le métissage culturel est l’avenir de notre civilisation.
C’est une langue universelle, parce que langue de l’esprit et du cœur, langue de partage, langue de confiture et d’amour, langue de saudade, de voyage et de bivouac.
La langue française est une langue de pétulance au ramage multicolore, une langue de lune de miel et de soupirs, langue d’élégance, langue de cour, langue de frisson et de bravoure, langue de refus, langue de guépard et de gazelle, langue d’épine et de rose, langue de galop, langue de révérence, langue d’arrogance, langue d’extase, langue d’encrier et langue de sceptre, langue des lois et langue des rêves, langue des tombeaux, langue d’éternité, langue d’épée et de fourrure.
Comme telle, se décline également la Francophonie, espace linguistique de l’esprit, espace géographique du cœur. Cet espace est un espace de chair et de sang, ceinture fraternelle au service de la créativité. La langue française est notre maison, la Francophonie est notre famille, notre héritage, passé, présent et avenirs confondus. Il est heureux que la langue française comme l’espace qu’elle symbolise et nourrit portent tous deux la marque du féminin. C’est avant tout l’éloge à la femme, celle par qui le monde naît et renaît, celle par qui il est écrit que l’amour seul a puissance de métamorphose.
Chez nous en Afrique, la femme est le magister de la terre, car les ronces ne donnent pas de raisins. Oui, la Francophonie est un espace où chacune, chacun de nous parle sa propre langue : le français ! Oui, la Francophonie est devenue notre patrie commune ! Oui, en Afrique, nous ne sommes plus locataires de la langue française, mais copropriétaires ! « On ne peut vivre toute une vie avec une langue, l’étirer de gauche à droite, l’explorer et fureter dans ses cheveux et dans son ventre, sans que l’organisme ne fasse sienne cette intimité », disait Neruda. Tel est mon rapport avec la langue française. Voici donc que le Québec nous reçoit, terre de poésie et d’honneur. « Je me souviens… » !
Nous devons tous nous souvenir, car c’est le passé qui porte le présent ; se souvenir veut dire ne pas renoncer, ne pas renoncer à ce que l’on est, ne pas renoncer à ce que l’on doit devenir. C’est ensemble, mais différents et souvent unis à notre insu par la même histoire, que nous continuerons de bâtir une Francophonie de tous les espoirs, un espace de tous les rêves et de tous les dons autour d’une langue que les dieux, les premiers, ont dû parler dès le frémissement de la terre. Oui, la culture, c’est d’abord que chacun de nous sache d’où il vient et qu’ensuite, enracinés, nous puissions nous ouvrir les uns aux autres dans cette torrentielle lumière de l’esprit dont la langue française est le buisson ardent, charriant des alluvions d’or et de diamant. Réunis les tisons flambent, séparés ils s’éteignent.
La Francophonie est notre grand feu de bois et la langue française ce soleil qui jamais ne se couche de Kinshasa à Port-au-Prince, de Rabat à Varsovie, de Ndjamena à Beyrouth, de Tunis à Paris, du Caire à Abidjan. Aussi loin que l’on puisse regarder, notre belle langue ne disparaîtra pas du paysage linguistique mondial. La langue anglaise n’est pas une langue ennemie, elle nous enrichit plutôt et nous pousse à devoir être les meilleurs. Ne dit-on pas finalement que les bons Britanniques et les bons Américains, quand ils meurent, demandent à aller à Paris ? Ce n’est pas parce que le monde était triste que Dieu nous envoya la France et sa langue. C’est parce qu’autour d’une langue trempée, aguerrie, riche de toutes les saisons et venue du fond des âges, nous avions besoin de nous découvrir, de nous parler, de nous connaître, de nous aimer, de nous respecter, de reproposer au monde une fraternité nouvelle, de bâtir ensemble un avenir pour nos enfants. Voilà pourquoi nous avons choisi le français, pour en faire notre maison commune et un grand pont jeté sur le monde. Jamais la Francophonie ne sera aride, pierreuse. Jamais la langue française ne vieillira, car l’amour ne vieillit jamais. Qui peut donc enterrer l’ombre d’un arbre ?
Telle restera la force invincible de la langue française ; telle restera la Francophonie, toujours visible, toujours élégante, toujours souriante, désirée, désirante, conquérante, triomphante, toujours brûlante, toujours poreuse. La Francophonie est le lieu de refondation de notre volonté de vivre ensemble, différents. Oui, nous devons éviter pour certains d’entre nous que le souvenir difficile de la colonisation ne soit toujours la mauvaise conscience qui hante le regard sur l’autre. Se tromper de chemin, c’est apprendre à connaître son chemin. Le soleil et la lune brillent désormais dans un même ciel. Voilà le miracle de la Francophonie. Nous nous sommes rencontrés et il est trop tard pour se quitter, trop tard pour ne pas rester ensemble, car la femme est trop belle et nous avons déjà fait tellement d’enfants ensemble. Notre Francophonie n’est ni un voisinage ni une mitoyenneté. Elle est un jardin commun. Nous cultivons le même champ. Nous logeons sous le même toit. Nous habitons ensemble une ville entière qui n’a qu’une seule rue et une seule maison, une seule adresse. Nous sommes un même continent, un continent de l’esprit grâce à cette langue française, cette femme que nous aimons tous éperdument : il ne pouvait y avoir que notre amour d’une femme pour nous retrouver tous à sa porte, en sérénade. La Francophonie, c’est le métro parisien à 18 h, c’est-à-dire un lumineux panier de fruits exotiques, un mélange de cauris, de jasmin, de perles, de coquillages, de noix de coco, de jujubes, de magnolias, de bougainvilliers, de pain de singe, d’oseille, de roses et de bambou !
Pour dire notre parfum unique, pour chanter notre pluralité, notre diversité qui sont un trésor à défendre ! Mettre en Francophonie les Français d’un côté et les Maliens de l’autre, les Québécois d’un côté et les Vietnamiens de l’autre, la langue française d’un côté et les langues africaines de l’autre, c’est mettre “les voitures d’un côté et les chauffeurs de l’autre “! En Francophonie, le lait a beau se vanter d’être blanc, le café le fera toujours déchanter, et le café aura beau se vanter d’être noir, le lait le fera toujours déchanter ! C’est cela également notre chance.
La Francophonie est ce couple d’oiseaux dont parlait le poète, un couple où chacun a une seule aile et qui vole ensemble. Qui pourrait égaler notre abondance de lumière et de force avec cette langue française qui a puisé aux origines des civilisations grecque et latine dont elle est l’enfant, a résisté à l’occupation allemande, et est allée à la rencontre de la grandeur des Tsars, la fascination des civilisations indiennes, et la magie des cultures africaines ?
La puissance d’une langue dépend moins du travail des grammairiens que de la capacité de cette langue à aller à la rencontre des autres. Les véritables fleuves de la Francophonie sont ses poètes, ses écrivains, ses paroliers, ses musiciens. Oui, voilà les premiers jardiniers de notre langue. Ils en sont les saisons et les arrosoirs. La langue du Québec a toujours été et restera toujours pour moi le soleil du cœur.
À une langue française habillée de tous les dons, le Québec a greffé un ton, un rythme et des mots dont on aura du mal à égaler le goût et le parfum jusqu’aux lointains fruits bleus du paradis. C’est ici au Québec que la langue française regagne la lumière chaque fois qu’elle prend le temps de s’attarder sur sa grandeur. Voyez-vous, la différence entre un jardin et un désert, ce n’est pas l’eau, mais l’homme. Telle est la langue française et la Francophonie pour nous. Elles sont ce qui lève, ce qui fait grandir, ce qui façonne, ce qui rassemble, ce qui nous permet de réaliser ce que séparément nous ne pourrions jamais réussir. Que fleurisse et rayonne notre langue française ! Puisse la Francophonie reculer encore l’horizon ! Que vive le Québec qui nous reçoit avec ce cœur plus grand qu’une cathédrale, en ce mois de juillet, juillet la saison des flamboyants et des manguiers en Afrique, saison que savait si bien chanter Senghor, le maître de langue, Senghor qui donna Abdou Diouf à la Francophonie et Abdou Diouf mettant à sa droite un fils du Québec, Clément Duhaime, afin qu’abondent les greniers et que le chant général de la langue française se perpétue d’écho en écho, loin dans le temps, comme un printemps jamais fini !
Une langue qui n’aura plus besoin ni du soleil ni de la lune pour l’éclairer, parce que sa gloire l’éclaire désormais pour toujours, comme parleraient les Écritures.
Amadou Lamine Sall est poète, lauréat des Grands Prix de l’Académie française