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3 octobre 2025
par Madiambal Diagne
UMS, ATTENTION À LA SURENCHÈRE !
Pourquoi Souleymane Teliko ne devrait-il pas comparaître devant le Conseil de discipline comme le font régulièrement des magistrats contre lesquels des fautes auraient été retenues ?
Le juge Souleymane Teliko a fait l’objet d’une enquête diligentée par l’Inspection générale de l’Administration de la Justice (Igaj), qui a conclu à sa traduction devant le Conseil de discipline des magistrats. L’enquête a été conduite par des magistrats qui ont conclu avoir relevé de faits susceptibles de constituer des fautes et en conséquence ont-ils préconisé la saisine du Conseil de discipline des magistrats. Cette instance qui sera, elle aussi, constituée exclusivement de magistrats, devra connaître de cette affaire et appréciera les faits retenus contre le Juge Teliko par le rapport d’enquête de l’Igaj. On ne saurait préjuger du verdict que les magistrats rendront à l’issue de l’examen du dossier de leur pair. On peut néanmoins présumer que tous les droits de la défense et les conditions d’un traitement ou procès équitable seront de rigueur. Déjà, Souleymane Teliko a exigé et a pu obtenir, au nom du principe que «tout ce qui n’est pas interdit est autorisé», ce qu’aucun magistrat n’avait eu avant sa dernière comparution, le 18 septembre 2020, devant l’Igaj, c’est-à-dire d’avoir la faculté de se faire assister par des avocats.
Teliko insulte Aliou Niane
Les avis sont partagés quant à la traduction de Souleymane Teliko devant le Conseil supérieur de la Magistrature. D’aucuns estiment que cela participerait à l’intimidation et au musellement de la Justice. Seulement, personne parmi les souteneurs du juge Teliko ne peut encore dire, à la face du monde, que le mis en cause n’a pas violé son serment de magistrat ou n’a pas outrepassé les autres limites fixées par la loi organisant le Statut de la magistrature. C’est comme si, pour l’intérêt que présenteraient ses déclarations pour la démocratie, l’Etat de droit ou on ne sait quelle autre cause, Souleymane Teliko pourrait continuer de violer allègrement la loi en toute impunité ! Pourtant, tout autre citoyen, en porte-à-faux avec la loi, subit la rigueur de cette loi devant les juridictions. Pourquoi Souleymane Teliko ne devrait-il pas comparaître devant le Conseil de discipline comme le font régulièrement des magistrats contre lesquels des fautes auraient été retenues? Pourquoi dans les autres corps de la Fonction publique, des agents violant les règles de leur profession peuvent-ils être traduits devant les instances régulières de discipline et qu’il faudrait une exception pour le juge Teliko ? Il y a quelques années de cela, le capitaine Mamadou Dièye, militaire soumis à l’obligation de réserve fixée par son statut professionnel, a été radié des corps de l’Armée nationale pour avoir manqué à ses devoirs. Mieux, Aliou Niane, alors président de l’Ums, avait été traduit, en 2008, devant le Conseil de discipline des magistrats pour des prises de position publiques portant sur des revendications pour améliorer la situation des magistrats et de la Justice. La session du Conseil de discipline avait fini par ne retenir aucune faute ou sanction contre Aliou Niane. En avril 2017, Souleymane Teliko avait déjà fait l’objet d’une traduction devant le Conseil de discipline des magistrats, mais la procédure avait été abandonnée. On se rappelle qu’à l’époque, Aliou Niane avait mis le bleu de chauffe pour défendre, bec et ongles et partout, Souleymane Teliko, estimant qu’il était du rôle du président de l’Ums de dénoncer des mutations de magistrats, suite à une procédure imparfaite de consultation à domicile des membres du Conseil supérieur de la Magistrature. Je peux témoigner que Aliou Niane m’avait personnellement sollicité, avec insistance, pour intercéder afin d’éviter que la procédure disciplinaire ouverte contre le juge Teliko arrivât à terme. Cette fois-ci, Aliou Niane, connu pour son inflexibilité et sa franchise, a estimé devoir, au sein des instances de l’Ums, mettre en garde ses collègues contre certaines dérives de Souleymane Teliko et de ses collègues qui voudraient apporter un soutien aveugle et irréfléchi au président de l’Ums. Aliou Niane écrit à ses collègues les mots suivants : «(…) Je regrette que la Chancellerie n’ait pas cru devoir engager une discussion avec l’Ums pour résoudre ce problème qui pourrait constituer une source de différend et d’incompréhension avec l’Ums. Je salue également toute la mobilisation développée au niveau des comités de ressort (Dakar, Thiès, Kaolack, Saint-Louis). Autant je salue cette mobilisation, autant je m’inscris en faux contre les objectifs visés. Pour ma part, je considère que le fait de commenter une décision de justice est une faute. Sur cette question, notre serment de magistrat ci-après est suffisamment explicite : «Je jure de bien et loyalement remplir mes fonctions de magistrat, de les exercer en toute impartialité dans le respect de la Constitution et des lois de la République, de garder scrupuleusement le secret des délibérations et des votes, de ne prendre aucune position publique, de ne donner aucune consultation à titre privé sur les questions relevant de la compétence des juridictions et d’observer, en tout, la réserve, l’honneur et la dignité que ces fonctions imposent.»
Le statut précise, en outre, que le magistrat «ne peut, en aucun cas, être relevé de ce serment». Cependant, même si je pense, très sincèrement, que le président de l’Ums a commis un lapsus qui demeure une faute, il est nécessaire de développer des actions de solidarité afin qu’il ne soit pas l’agneau du sacrifice. Mais, il faut savoir, en tout, raison garder. Dans cette perspective, la déclaration du comité de ressort de Dakar exagère sur les perspectives d’actions envisagées. Chers collègues, ne nous laissons pas divertir par ce qui constitue, à mes yeux, un épiphénomène. Personnellement j’ai été frappé par une mesure identique. En effet, dans le cadre strict de la défense des intérêts des magistrats, j’ai été traduit devant le Conseil de discipline. Mais le Garde des sceaux, partie demanderesse, a été débouté de ses prétentions. Rien n’a été fait pour venir à mon «secours» alors que c’était lors des négociations Ums/Gouvernement. Oui à la solidarité avec le président de l’Ums qui est mon ami et mon frère. Mais Non à toute forme de surenchère. Pour ma part et de mon point de vue, aucune action d’envergure ne doit être engagée dans ce cadre. Il faudrait revenir à nos revendications fondamentales (…)
Toute autre voie serait suicidaire et insensée. Soyons réalistes et mettons le cap sur la lutte autour de l’indépendance de la Magistrature.» Pour cette position, Aliou Niane a essuyé des invectives de Souleymane Teliko qui lui a répondu vertement : «Mon cher, drôle de fraternité que celle qui te fait jouer un rôle aussi dégueulasse. Ton raisonnement est faux et tes intentions malveillantes. Mais je te laisse entre les mains de Dieu.»
L’Ums avait flétri le procureur de Dakar pour avoir critiqué une décision de justice
La réaction virulente de Souleymane Teliko a ému de nombreux magistrats, car elle traduit une intolérance et un caractère réfractaire à toute contradiction au sein des instances internes de l’Ums. Pourtant, des positions et des mises en garde pareilles avaient déjà été portées publiquement par des magistrats. A la dernière Assemblée générale de l’Ums, le juge Mamadou Ndoye par exemple, a été conspué par quelques jeunes magistrats pour avoir déclaré qu’il ne «reconnaît plus la magistrature avec la propension de juges à investir les plateaux des radios et des télévisions, en violation de leur serment et de leur statut». Il faut dire que les magistrats sénégalais avaient été assez interpellés par ce nouveau phénomène de médiatisation dangereuse des juges. D’ailleurs, l’Ums elle-même s’en était offusquée quand le procureur de Dakar, Serigne Bassirou Guèye, avait tenu une conférence de presse pour évoquer des dossiers judiciaires. Mieux, l’Ums avait flétri l’attitude du procureur de Dakar qui s’était autorisé, à l’occasion, à commenter et critiquer des décisions prises par des juges dans l’affaire Aïda Ndiongue. Le procureur était pourtant une partie au procès. Question à mille balles, pourquoi ce que l’Ums interdirait à Serigne Bassirou Guèye, elle le permettrait à Souleymane Teliko ? Dans ces colonnes, nous avons déjà relevé, le 4 septembre 2020, que pour bien moins que ce qui est reproché à Souleymane Teliko, Ousmane Sonko, alors Secrétaire général du syndicat des travailleurs des impôts et domaines, avait été radié du corps de la Fonction publique sénégalaise. Le phénomène qui a entraîné des magistrats dans une dérive de vedettariat à travers les médias avait été constaté au niveau du Barreau du Sénégal, au point que le Conseil de l’Ordre des avocats a été obligé d’y mettre le holà. Désormais, tout avocat demande l’autorisation du Bâtonnier avant de déblatérer dans les médias sur des dossiers judiciaires. Les conseils de Souleymane Teliko ont donc demandé une autorisation expresse au bâtonnier, en vue de tenir une conférence de presse sur cette affaire. Comment comprendre alors que les magistrats puissent continuer à se croire libres de communiquer à tous vents et sur n’importe quelle question ?
Le combat perdu d’avance
Des magistrats sont vent debout pour empêcher la comparution de Souleymane Teliko devant le Conseil de discipline. Ce sera peine perdue. Le ministre de la Justice, Me Malick Sall, n’a pas tort quand il affirme que «cette affaire est l’affaire des magistrats». En effet, c’est la hiérarchie judiciaire qui, de guerre lasse, a poussé le ministre à se résigner à enclencher la procédure de saisine de l’Igaj. Les plus hautes autorités judiciaires ont toujours voulu éviter d’en arriver à cette extrémité, en appelant Souleymane Teliko à la raison. Le ministre de la Justice lui-même a eu des tête-à-tête avec Souleymane Teliko, pour l’appeler à cesser ses provocations. Mais Souleymane Teliko semblait être habité par on ne sait quelle mission prophétique. La situation semble être arrivée à un point de non-retour. On verra ce qu’il adviendra de ce bras de fer. Il reste que pour servir de boucliers à Souleymane Teliko, des magistrats empruntent un chemin gros de dangers. Ils ont appelé, dans des communiqués rendus publics, les juges à bloquer le fonctionnement des juridictions avec des décisions de renvois de toutes les audiences. Une telle démarche est illégale, car violant l’article 14 du Statut de la magistrature, qui précise notamment que «les magistrats, même en position de détachement, n’ont pas le droit d’adhérer à un parti politique et toute manifestation politique leur est interdite. Toute manifestation d’hostilité au principe ou à la forme du gouvernement, de même que toute démonstration politique incompatible avec la réserve que leur imposent leurs fonctions, leur sont également interdites. (…) Ils ne peuvent ni se constituer en syndicat ni exercer le droit de grève. Il leur est également interdit d’entreprendre toute action concertée de nature à arrêter ou entraver le fonctionnement des juridictions ou d’y participer». Les magistrats qui déclarent urbi et orbi se préparer à bloquer le fonctionnement des juridictions ne peuvent ignorer les risques auxquels ils s’exposent. Le 2 mai 2011, des actions de cette nature avaient été entreprises pour bloquer le fonctionnement des juridictions du pays, pendant quatre longues journées. La réaction des autorités de l’Etat avait été ferme. Le gouvernement de Abdoulaye Wade avait adressé des demandes d’explications collectives aux magistrats, afin de tirer toutes les conséquences de leur attitude. Dans le même temps, un recensement de tous les fonctionnaires, employés comme juristes et titulaires au moins de la maitrise en sciences juridiques (plus de 200 agents), avait été effectué pour éventuellement aménager leur reversement dans les corps de la Magistrature. Cette fermeté a eu raison de ce mouvement d’humeur et le Premier président de la Cour suprême, Pape Ousmane Sakho, n’avait pas eu trop de peine pour faire reprendre les audiences dans les cours et tribunaux. De toute façon, on ne saurait combattre l’illégalité ou l’injustice en usant de procédés ou moyens illégaux, a fortiori pour des magistrats ! En cas de paralysie des services judiciaires, l’Etat du Sénégal devrait être fondé à prononcer la dissolution de l’Ums qui reste une association au regard de la loi et non un syndicat professionnel.
En outre, les magistrats souteneurs de Souleymane Teliko ont commis la bourde d’exiger le départ du ministre de la Justice, Me Malick Sall. Au-delà du fait que ce serait le meilleur moyen pour garder le ministre à son poste, les magistrats qui brandissent une telle revendication apparaissent on ne peut plus incohérents. Comment peut-on prôner la séparation des pouvoirs et faire une immixtion aussi flagrante dans les prérogatives de l’Exécutif en exigeant le limogeage d’un ministre ? Est-il besoin de rappeler, à titre d’exemple, qu’en France, en dépit de l’adversité ouverte entre les syndicats de magistrats et le nouveau ministre de la Justice, Me Eric Dupont Moretti, jamais un syndicat de magistrats n’a commis le sacrilège de demander le limogeage du ministre ! Mieux, même les greffiers, malgré une grève de plus de deux mois, ont eu du scrupule pour demander le départ du ministre de la Justice, Me Malick Sall.
On a vu des organisations de la Société civile se coaliser pour apporter un soutien à Souleymane Teliko. Qui pourra m’expliquer pourquoi l’Ofnac a le droit de s’occuper du cas d’un ministre alors que le Conseil de discipline des magistrats n’a pas à convoquer un magistrat ? Il y a à se demander s’il n’y aurait pas un tout petit peu de géométrie variable dans la mise en œuvre de certains principes. On peut avoir l’impression que les uns sont forcément présumés innocents et les autres inexorablement présupposés coupables.
IMMERSION DANS LA FERVENTE COMMUNAUTÉ MOURIDE DE FRANCE
Les Baye Fall, derrière Serigne Cheikh Fall Khady Guèye, une des personnalités les plus actives dans cette communauté de foi, ne dérogeront pas à la règle de la célébration du Magal malgré la Covid-19
Cette année, c’est dans un contexte particulier de crise sanitaire due à la Covid-19 que le grand Magal se prépare. Immersion dans les lieux de ralliement des fidèles mourides en Ile-de-France.
À Paris où vit une forte communauté sénégalaise, la question est sur toutes les lèvres. Où et comment sera organisée cette 126ème édition du Magal ? Beaucoup ne pourront pas se rendre au Sénégal et les départs ont nettement diminué à cause de la crise économique et de la hausse du prix du billet d’avion. Dans la communauté mouride, on s’organise pour une célébration de l’événement adaptée aux circonstances inhabituelles marquées par la pandémie de la Covid-19. Une célébration dans le respect des mesures en vigueur.
«Berndé» des Baye Fall dans le 13ème
Les Baye Fall, derrière Serigne Cheikh Fall Khady Guèye, une des personnalités les plus actives dans cette communauté de foi, ne dérogeront pas à la règle de la célébration du Magal malgré la Covid-19. Pendant trois jours (la veille, le jour et le lendemain du Magal), ils seront en parfaite communion. Dans le 13ème arrondissement de Paris, sur l’avenue de Choisy, le guide Baye Fall, qui est par ailleurs président de l’association «Lamp pour le développement humain» en dit davantage : «nous préparerons des mets à partager avec les gens, nous leur offrirons l’hospitalité comme il est de coutume chez les Baye Fall et les Mourides. Dans tout le 13ème, comme cela se faisait les années passées, nous distribuerons de la nourriture et du café Touba dans les foyers, dans les rues aux sans-abri et à bien d’autres personnes pour marquer ce jour important. C’est aussi dans le souci de mieux faire passer le message de paix et de partage de Serigne Touba. Mais nous sommes obligés de nous conformer à l’interdiction de se rassembler. Le Magal de cette année ne peut être célébré ailleurs qu’à Keur Serigne Touba, sis à Taverny». Les rassemblements de plus de mille personnes sont, en effet, interdits. Chacun va devoir le faire chez lui, à l’exception de quelques «dahiras» tels que «Jawartoulah, Dahira Conflans», Touba Aulnay Keur Cheikh Mourtada. L’événement sera tout de même célébré mais dans une moindre envergure, au plus tard jusqu’à 22 heures.
Keur Serigne Touba porte le flambeau
Située à 20 kilomètres au nord-ouest de Paris, dans la commune de Taverny, Keur Serigne Touba tiendra le flambeau. Dans ce quartier calme, la maison (271 rue de Paris) s’étale sur une surface de plus de mille mètres carrés avec une grande cour à l’extérieur. Elle est sur deux niveaux avec 22 pièces dont une grande bibliothèque, des salles de classe. Elle a la particularité d’abriter la mosquée de Taverny. Depuis 2002, la célébration s’y tient. Les responsables ont déjà pris les devants pour les préparatifs de l’événement qui survient dans une période de crise sanitaire avec une ribambelle de recommandations formulées par l’administration française.
L’accès des lieux de célébration (salle du Palais des Congrès de Montreuil par exemple) n’étant pas autorisé, la maison Keur Serigne Touba, qui est par ailleurs un centre islamique, risque d’accueillir plus de fidèles que d’habitude. Le comité d’organisation se tient prêt et place cette célébration sous le sceau de la responsabilité comme l’a souligné d’emblée Gora Diop, l’un des responsables. «Le monde vit une situation sanitaire difficile qui appelle à la responsabilité de chacun. L’Islam recommande de ne pas poser des actes qui pourraient nuire à une personne. C’est tout le sens de la démarche du Khalife général, Serigne Mountakha Bassirou Mbacké, depuis le début de la pandémie. Il ne faut pas oublier le fait que l’événement aura lieu en début de semaine. Par conséquent, beaucoup iront au travail le lendemain et à l’école. Mais l’affluence pourrait être importante. C’est pourquoi nous parons à toutes les éventualités», explique-t-il.
En intelligence avec les autorités françaises
Taverny accueillera très probablement plus de monde que d’habitude. Mais Gora Diop, titulaire d’une Maîtrise en sociologie, reste serein et confiant. Il assure qu’un protocole en phase avec les recommandations des autorités françaises a été établi. Il s’agira de faire respecter les gestes barrières en imposant le port du masque, l’utilisation du gel hydroalcoolique, le lavage régulier des mains et la distanciation physique. Lieu culturel officiellement déclaré et reconnu par les pouvoirs publics, Keur Serigne Touba est en contact permanent avec les autorités administratives en cette période de pandémie. «Nous sommes en parfaite intelligence avec la préfecture. Nous avons d’ailleurs reçu son représentant pour discuter de l’événement et du protocole mis sur pied par notre comité d’organisation. Et il en a été satisfait. Entre temps, il y a eu de nouvelles mesures qui limitent les regroupements festifs à 30 personnes, mais les lieux de culte et les manifestations religieuses ne rentrent pas dans ce cadre. Quoi qu’il en soit, le Magal aura lieu», assure-t-il.
Dans l’application de ces mesures prises par le comité d’organisation, des équipes sont mises en place pour la gestion de la sécurité, de l’hygiène, de la communication et du «berndé» (le service alimentaire). Rien n’est laissé au hasard, même la météo. «Nous avons travaillé sur différentes hypothèses. Le protocole sera adapté en fonction du lieu de rassemblement et de la pluie. À l’intérieur, nous travaillerons alors en fonction d’une jauge du nombre de personnes, voir comment ventiler et avoir une circulation des fidèles à certaines heures», soutient Gora Diop.
Il reste, toutefois, à évaluer le nombre de personnes attendues le jour du Magal. Les années précédentes, Keur Serigne Touba Taverny accueillait très souvent plus de 300 personnes dans la journée. Mais Gora Diop rassure : «nous ne pouvons certes pas évaluer le nombre de personnes qui viendront, mais en raison de la Covid-19, nous allons être rigoureux et mettre l’accent sur la sécurité et les berndé. Il y en aura vraiment assez pour tout le monde. 150 voire 200 personnes, c’est le minimum attendu». Hormis les mesures restrictives, le changement majeur se trouve dans la programmation. Les causeries qui étaient organisées dans la journée n’auront pas lieu cette année. Cependant, des «récitals» du Coran et des déclamations de panégyriques agrémenteront la matinée.
Un plan B à Aulnay-Sous-Bois
Ailleurs, dans la capitale du pays de Marianne, le comité du 18 Safar s’active aussi pour une organisation exceptionnelle de l’événement. Il regroupe des «dahiras» et «Kourels» de l’Ile-de-France. Depuis trois ans, les responsables ont créé une nouvelle organisation nommée «Kourel» 18 Safar Paris regroupant différents «dahiras» de l’Ile-de-France. Beaucoup d’incertitudes planent sur cette édition du Magal de Touba en France. Abdou Aziz Guèye, s’exprimant au nom du responsable de Keur Serigne Touba à Aulnay-Sous-Bois où est domicilié le Collectif des mourides de France, n’en pense pas moins. Selon lui, ils nourrissaient l’ambition de louer une salle plus grande que celle du Palais des Congrès de Montreuil où, les fois précédentes, le «Kourel» 18 Safar a réussi à mobiliser des milliers de personnes le soir du Magal. Les démarches étaient bien entamées et le lieu presque acquis jusqu’à ce que le Préfet publie les nouvelles mesures restrictives interdisant les rassemblements de plus de mille personnes. «L’épidémie a repris de plus belle et le maire de la ville nous a notifié un refus pour l’organisation de l’événement. Nous attendions au moins 5.000 personnes», affirme-t-il.
Cependant, le Kourel 18 Safar a réfléchi à un plan B qui consiste à célébrer le Magal dans différents endroits. Ainsi, dans le souci de limiter le nombre de personnes, chaque « dahira » organisera l’événement à son siège avec tout le rituel festif. Ils ont prévu de distribuer des « berndé » dans le 18ème, à Trocadéro, à Louvre, à Saint-Denis. Malgré la crise économique provoquée par la Covid-19, le kourel 18 Safar compte envoyer le « hadiya » (contribution financière) au khalife général des Mourides, Serigne Mountakha Bassirou Mbacké, et à Serigne Cheikh Dieumb Fall. Ils visent la somme de 20.000 euros. Dans le souci de collecter plus d’argent, le Kourel a lancé une activité économique en créant une société productrice de café Touba.
Dans le 18ème arrondissement, sur la rue Myrha, à l’angle de la rue Affre, c’est déjà la communion. Des fidèles se retrouvent spontanément tous les après-midis, dès le début du mois de Safar pour marquer l’événement. Café Touba et autres boissons chaudes, beignets, jus de fruits sont gracieusement distribués aux riverains et passants. Comme happés par la nostalgie, ils reconstituent l’ambiance de leur terre d’origine.
LE MAGAL, UNE BOUFFÉE D'OXYGÈNE POUR LA RELANCE ÉCONOMIQUE
En 2017, une étude réalisée par des chercheurs de l’Université Alioune Diop de Bambey (Uadb), en collaboration avec le comité d’organisation du Grand Magal de Touba, avait révélé que cet évènement religieux génère, chaque année, en moyenne, 250 milliards
Le Magal 2020 pourrait être le point de départ de la relance économique dans un contexte marqué par la pandémie de la Covid-19, analyse Dr Alioune Badara Dione, chercheur et auteur de beaucoup d’ouvrages sur le Mouridisme.
En 2017, une étude réalisée par des chercheurs de l’Université Alioune Diop de Bambey (Uadb), en collaboration avec le comité d’organisation du Grand Magal de Touba, avait révélé que ce grand évènement religieux génère, chaque année, en moyenne, 250 milliards de FCfa. Cette étude avait pris en compte l’activité commerciale autour de ce rendez-vous annuel, les transferts d’argent, les ruminants achetés et égorgés pendant cette célébration. Cependant, cette année, le grand Magal de Touba est célébré dans un contexte particulier marqué par la pandémie de la Covid-19. Depuis plusieurs mois, les économies des pays sont au ralenti en raison de la crise sanitaire.
Malgré les incertitudes, le grand Magal aura lieu. Touba sera le lieu de ralliement de millions de pèlerins venus du Sénégal et de la diaspora. Un intense moment d’activités économiques, indique le chercheur Dr Alioune Badara Dione, auteur de plusieurs ouvrages sur le Mouridisme. Dans le contexte actuel, a-t-il précisé, l’économie nationale a besoin d’être relancée. D’ailleurs, le Président de la République, Macky Sall, a présidé le 29 septembre 2020, au Centre international de conférences Abdou Diouf (Cicad) de Diamniadio, un Conseil présidentiel spécialement consacré à la relance de l’économie nationale. Le Magal, dit-il, peut être un point de départ de cette relance. Pendant toute la période de cet évènement religieux, Touba, la capitale du Mouridisme, est le centre de production et de consommation. Dr Alioune Badara Dione rappelle que 97% des acteurs économiques au Sénégal s’activent dans l’économie informelle. Parmi ces acteurs, une grande partie appartient à la communauté mouride. «Sans risque de se tromper, on peut dire que plus de la moitié sont des mourides», renchérit-il.
Pendant le Magal, la communauté mouride d’ici et d’ailleurs rallie Touba. Ceux qui ne peuvent pas faire le déplacement envoient de fortes sommes d’argent aux familles restées au Sénégal. Rien que cet apport, explique l’auteur de l’ouvrage «Lecture scientifique de l’action de Khadim Rassoul», permet de faire la relation entre les Mourides et l’économie nationale. «Pendant le Magal, l’activité économique est à son paroxysme. Il y a des unités économiques qui ne fonctionnent que pendant le Magal. Cela existe aussi à la Mecque. L’économie de la Mecque est tirée par le pèlerinage. C’est pareil pour le Magal. Touba, pendant cet évènement, est le centre de production et de consommation de l’économie nationale», explique Dr Alioune Badara Dione.
D’après toujours le chercheur, le Magal qui se tient ce 6 octobre est une occasion pour beaucoup d’acteurs qui ont connu des contreperformances à cause de la pandémie de la Covid-19 de se relancer. Toutefois, il précise que la pandémie de cette année risque d’avoir un impact certain sur l’économie du Magal. Le deuxième plus grand évènement religieux au monde après le pèlerinage à la Mecque, si l’on en croit Dr Alioune Badara Dione, risque d’avoir moins d’impact sur le plan économique à cause de la crise liée à la pandémie de la Covid-19. «Les interactions liées au déplacement, aux capacités d’accueil, tout sera réduit. L’impact sera amoindri mais il sera là», explique Dr Dione.
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YAYE KENE GASSAMA, FEMME DE SCIENCE
EXCLUSIF SENEPLUS - Heritages reçoit la Professeure titulaire à la faculté des Sciences et Techniques de l'Ucad, première femme au Sénégal, à avoir dirigé une chaire scientifique, pour un entretien enrichissant
Pour son troisième numéro, Heritages reçoit Yaye Kène Gassama, Professeure titulaire à la faculté des Sciences et Techniques de l'Universite Cheikh Anta Diop de Dakar. Elle est la première femme, au Sénégal, à avoir dirigé une chaire scientifique.
La chercheure, ancienne ministre de la Recherche scientifique et membre de l’Académie des sciences du Sénégal, parle de sa passion pour la science, de l’éducation des filles, de ses études en France, de ses missions en tant qu’universitaire, de sa rencontre avec le soufisme, de ses projets scientifiques, des enjeux des biotechnologies, de l’intelligence artificielle, etc.
Yaye Kène Gassama répond aux questions de l’éditorialiste de SenePlus, Paap Seen.
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DE QUOI ACCUSE-T-ON OUSMANE SONKO ?
EXCLUSIF SENEPLUS - Pour la première fois, un opposant incite les jeunes de son parti à s'investir dans l'agriculture. Voilà une action du leader de Pastef qui devrait inspirer ses adversaires préoccupés à distraire l'opinion, estime Serigne Saliou Guèye
Serigne Saliou Gueye est formel. Le pouvoir ne dispose d'aucun élément qui pourrait incriminer Ousmane Sonko. Selon lui, le texte récemment publié par des politiciens originaires de la Casamance taxant le leader de Pastef de régionaliste, et la sortie de Mansour Faye corroborent la thèse de l'encnlenchement d'une procédure de liquidation politique de Sonko.
L'éditorialiste de SenePlus estime que le camp du pouvoir devrait attaquer le Patriote sur le terrain de la bonne gouvernance. ''Ousmane Sonko a le droit comme tout autre sénégalais de demander à rencontrer le président Macky Sall. Il a aussi le droit de donner son avis, s'il n'est pas du tout satisfait de la politique menée par le gouvernement au Sénégal et particulièrement en Casamance'', selon Serigne Saliou Guèye qui ajoute : '' Macky n'avait-il pas déclaré que le Fouta est son titre foncier ? Pour la première fois dans notre vie politique, un opposant incite les jeunes de son parti à s'investir dans l'agriculture. Voilà une action d'Ousmane Sonko qui devrait inspirer ses adversaires politiciens", relève-t-il.
DÉJÀ 13 MORTS DANS DES ACCIDENTS DE LA ROUTE
Le colonel Cheukh Tine commandant du la brigade des sapeurs pompiers détacher au grand Magal a dréssé un bilan mi-parcours de la couverture sécuritaire.
Le colonel Cheukh Tine commandant du la brigade des sapeurs pompiers détacher au grand Magal a dréssé un bilan mi-parcours de la couvertue sécuritaire. Il fait état de 13 morts causées par les accidents.
«Nous avons pour le moment effectué plus de 80 interventions depuis la mise en place du dispositif de couverture. Malheureusement nous déplorons 13 décès enregistrés suite à des accidents de la route. Il faut également signaler que la plupart de ces accidents implique des motos Jakarta. », a déclaré le colonel Tine.
Il a également souligné que la brigade nationale des sapeurs-pompiers a déployé plus de 360 éléments, 80 véhicules et engins et un nombre important de motos équipées de trousses de secours et d’extincteur pour la couverture sécuritaire de ce Magal.
20 000 VÉHICULES ANNONCÉS POUR UN COÛT DE 900 MILLIARDS F CFA
Sur le segment du transport interurbain, un potentiel d’environ 20 000 véhicules est à renouveler, dont 8 000 ’’7 places’’. L’’assurance est donnée par Me Oumar Youm
Sur le segment du transport interurbain, un potentiel d’environ 20 000 véhicules est à renouveler, dont 8 000 ’’7 places’’. L’’assurance est donnée par Me Oumar Youm, le ministre des Infrastructures, des Transports terrestres et du Désenclavement. Qui ajoute dans un entretien accordé à L’Obs : "pour bénéficier de ces minibus, il faut être transporteur bénéficiant d’un agrément et remplir les critères financiers pour bénéficier d’un crédit bancaire ou acquérir sans financement bancaire mais aussi disposer d’un véhicule dans le transport interurbain avec licence."
La priorité du renouvellement sera accordée aux ’’7 places’’, aux cars-rapides, et aux ’’Ndiaga-Ndiaye’’.
Le minibus devrait coûter 19 millions F CFA (hors taxe)
"Il faut dire que l’État est responsable du service public de transport mais n’achète pas directement. Il garantit les paiements et veille sur l’acceptabilité des conditions financières. Globalement, le renouvellement du parc automobile coûtera environ 900 milliards F CFA, pour un potentiel d’environ 45 000 véhicules à remplacer sur une période de cinq ans, à compter de 2021, qui marquera officiellement la phase intensive du renouvellement. Le minibus devrait coûter moins de 19 millions F CFA HT. Il n’y aura pas de subvention. Toutefois, l’État peut prendre des mesures fiscales pour réduire le prix de revient des véhicules à travers l’exonération fiscale.
A l’en croire, en 2022, tous les véhicules âgés de plus de 25 ans seront interdits de transport public. Et tous les véhicules retirés iront à la casse, à l’exception des échantillons qui serviront de véhicules de collection ou ceux qui seront dans un Musée, retraçant l’histoire des moyens de transport au Sénégal.
En attendant, le premier lot concerne 1000 minicars qui seront importés mais le 1001e minicar sera assemblé au Sénégal. "Cela permettra de créer des emplois, plus de richesse, et de réduire encore les prix. Nous voulons profiter du potentiel de véhicules à renouveler pour jeter les bases d’un embryon d’industrie automobile au Sénégal", conclut la tutelle.
RETOUR EN FORCE DES CAS IMPORTÉS, MOINS DE 2000 PATIENTS SOUS TRAITEMENT
Selon le bilan du jour, présenté par Dr En Hadji Mamadou Ndiaye, avec la tendance baissière maintenue depuis le mois de septembre, il y a aujourd’hui 1939 patients en traitement.
Alors qu’on en comptait jusqu’à près de 5000 après la célébration de la fête de Tabaski, il y a désormais moins de 2000 patients en traitement du coronavirus dans les différents centres de traitement des épidémies du Sénégal.
Selon le bilan du jour, présenté par Dr En Hadji Mamadou Ndiaye, avec la tendance baissière maintenue depuis le mois de septembre, il y a aujourd’hui 1939 patients en traitement.
Toutefois, c’est la flambée des cas importés qui inquiète un peu. Ce lundi, sur les 28 cas déclarés positifs sur un échantillon de 929 tests réalisés, il y a eu 14 cas importés détectés à l’aéroport international Blaise Diagne (AIBD), 3 cas contacts suivis et 11 cas issus de transmission communautaire. Lesquels proviennent de Dakar plateau, Grand Dakar, Dieuppeul, Guédiawaye, Liberté 5, Maristes, Mbour, Sacré cœur 3 et Tambacounda.
Le taux de positivité du jour est monté à 3, 01%. Il y a eu 6 cas graves qui sont pris en charge dans les services de réanimation. Quant aux cas guéris, ils sont au nombre de 65.
Autre bonne nouvelle : il n’y a eu aucun cas de décès enregistré. À ce jour, informe Dr Ndiaye, au total, 15122 patients ont été déclarés positifs contre 12870 guéris pour 312, décès et 1939 patients encore sous traitement.
Le ministère de la Santé et de l’Action sociale exhorte les sénégalais à respecter les mesures barrières individuelles et collectives.
LES MAITRES-CHANTEURS POLITIQUES NOUS PRENNENT EN OTAGE
Quand le «sunu gaal» chavire sous le poids des contre-valeurs, c’est dramatique
Nicolas Silandibithe BASSENE |
Publication 05/10/2020
Quand le «sunu gaal» chavire sous le poids des contre-valeurs, c’est dramatique. Depuis un certain temps, la race des hommes d’Etat soucieux de la vie des institutions de la République, de la stabilité sociale et de la concorde nationale se meurt cédant place aux maîtres chanteurs politiques qui avouent avec insolence et en la considérant comme naturelle, une conduite contraire aux conventions sociales et aux règles morales et religieuses.
Qu’est-ce qui pourrait expliquer que des personnalités occupant de hautes fonctions au cœur du dispositif de l’Etat se mettent à la pratique d’une «sauvagerie» qui ne les honore ni en qualité de politicien ni en chef de famille devant éduquer leur progéniture. Où va le Sénégal ? Aujourd’hui, au Sénégal être fin politicien est celui qui donne des coups. Ce qui fait penser que faire la politique c’est faire allégeance à satan.
Ainsi, l’esprit du mal diabolique et pervers semble inspirer nos leaders politiques. C’est une méchanceté satanique qui couvre l’atmosphère sociopolitique du pays, nous plongeant dans des nuits désastreuses, nuits effroyables qui retentissent comme un éclat de tonnerre. Sénégal, pays de croyance. Comment pouvons-nous comprendre que des sommités de l’Etat emploient des procédés de persécution malproprement, en s’efforçant de traîner dans la boue et d’accabler sous la calomnie, le mensonge, les insinuations, les accusations, les rumeurs pour éliminer un adversaire politique. Pour conquérir ou s’agripper au pouvoir, certaines autorités politiques sont prêtes à tout. Où est donc leur foi en Dieu ?
En effet, de toutes les armes, ces gredins ont tendance à choisir le chantage politique. Voilà, la lutte politique qui devrait être un haut lieu de débat d’idées, de défense d’idéologies pour convaincre devient un instrument de vengeance politique. Une fois le but politique atteint, l’affaire «X» ou «Y» s’évanouit, démontrant ainsi la laide et malpropre nature, la sordide malhonnêteté du maître-chanteur. Chères populations sénégalaises, ne nous laissons pas influencer par les criailleries des politiciens véreux, gardons-nous de donner satisfaction à ces fripouilles de maîtres-chanteurs. Flétrissons avec fermeté les maîtres-chanteurs.
Abas les maîtres-chanteurs politiques. Vive les Hommes d’Etat. Méprisons-les et boycottons les. Démasquons inlassablement ces misérables. Notre devoir est de suivre fermement le débat technique, utile et fécond pour un Sénégal émergent. La politique autrement pour un autre Sénégal développé avec des hommes et femmes responsables et imbus de valeurs : des Hommes d’Etat.
Par Prof Demba Marie SY
LE KASSACK, POESIE ESOTERIQUE ET CIRCONCISION
Le Ndut chez les Sérères ; le Beukin chez les Diolas ou encore le Koumpo chez les Mandingues, sont autant de manifestations qui ont un dénominateur commun, la circoncision et la formation des futurs leaders communautaires.
L’espace socio-culturel du Sénégal est animé pendant les grandes vacances par des cérémonies de circoncision enrobées de folklore. Le Ndut chez les Sérères ; le Beukin chez les Diolas ou encore le Koumpo chez les Mandingues, sont autant de manifestations qui ont un dénominateur commun, la circoncision et la formation des futurs leaders communautaires.
En effet depuis des temps très anciens, le Sénégal, dans toutes ses composantes, a réalisé une passerelle entre la vie du jeune adolescent et celle de l’adulte, chef de famille et producteur de richesses (les gains acquis à la sueur de son front par le travail) ; mais aussi véhicule des valeurs de la communauté. Ces pratiques d’hier et d’aujourd’hui ont pour but de cimenter une Nation parce que chaque ethnie qui organise son Leul ou le retrait de jeunes garçons de la même classe d’âge dans un endroit loin de toute présence féminine (Senghor, in prières aux masques, parlait de sanctuaire forclos à tout rire de femme), se fait un devoir d’inviter les autres entités sociales.
Le cas le plus patent est celui des Diolas et Sérères dont la légende dit que les ancêtres avaient «signé» à une époque lointaine un pacte de solidarité. Il s’agit donc de regrouper des individus majoritairement de la même génération afin de procéder d’abord à l’acte de circoncision afin d’éprouver leur courage et ensuite de les mettre dans une sorte de camp loin de toute habitation : on parle d’ailleurs de bois sacré, pour les formater en vue de la pérennisation des valeurs du groupe. C’est là qu’intervient le Kassak qui est au cœur de l’éducation traditionnelle. Du reste, selon le chercheur Babacar Sédikh Diouf, le Kassak était une véritable école d’où sortaient des hommes aguerris, solidaires et volontaires, producteurs mais sensibles.
Le Kassak alliait le folklore à l’utile et les Njulis (pensionnaires du Leul ou Mbar, cadre ou se tenait le Kassak) recevaient une formation qualifiante à travers danses et chants (exercices pour se maintenir en bonne santé physique et intellectuelle afin d’apprendre à ramer dans le même sens ; et en intégrant sa voix, par exemple, dans celles des autres membres du groupe on tend à en partager la même vision), mais aussi à travers des devinettes ; des contes et charades en étroite relation avec les us et coutumes ; des résolutions de questions pratiques, pour acquérir des notions de courage et de servitude …
Sous la direction du Koumakh ou Koumak (chef du Leul), les circoncis passaient du jour au lendemain de l’adolescence à l’âge adulte en s’appropriant les us et coutumes par le biais de canaux de transmission du savoir populaire. Il y avait une discipline de fer qui s’appuyait sur l’individuel et le collectif pour s’appliquer à tous.
En réalité il était fondamental d’amener les Njulis à se fondre dans une responsabilité assumée et effective dans une solidarité communautaire. Alors les fautes étaient sévèrement sanctionnées par l’encadrement, mais aussi par la sanction des pairs, qui cependant, ne faisaient pas que tancer le contrevenant, mais cherchaient à le perfectionner. De nos jours avec la «modernité», le Kassak s’est éloigné de sa voie originelle pour revêtir des habits plus folkloriques que formatives. Or et peut être de par cette nouvelle configuration, il attire beaucoup plus de monde. Le cas le plus patent est le Koumpo qui chaque année, fait de la Ville touristique de Mbour (Petite-Côte près de Dakar) un lieu de rencontres pendant un à deux mois, autour du carnaval des Njulis sous la direction de selbés à l’accoutrement assez particulier (fait de feuillages), qui assurent la protection et l’assistance mystique des participants.
La ripaille et les actions d’éclat des encadreurs, pour marquer leur présence, ont pris le dessus sur l’aspect originel moins voyant et plus efficient. Mais on remarque que c’est cela qui fait courir les gens vers Mbour. Pour pallier cet état de fait, le chercheur Babacar Sédikh Diouf avait préconisé la récupération par le ministère de la Jeunesse du Kassak comme centre de vacances citoyennes pour la formation du caractère du jeune sénégalais en se fondant sur l’éducation civique et morale ; sur l’initiation aux travaux pratiques et manuels et sur la création de distractions saines.
Dans cette orientation, la commune de Dioffor, dans la région centre- Fatick, a organisé, il y a quelques années, des journées culturelles autour de la pédagogie du Ndut en relation avec la symbolique du pagne sérère et la mise en exergue de ses trois couleurs : le pagne noir, le pagne blanc et le pagne à rayures noires et blanches… Selon Muhamed Mory Mbathie, chercheur traditionnel : «Chez les Diolas on observe, trois ans avant la date prévue pour l’initiation, un baobab préchoisi pour savoir s’il ne porte pas le fruit «du palmier», si c’est le cas, on confirme la date d’entrée des jeunes dans le bois sacré. A partir de ce moment on commence à rassembler les éléments nécessaires à l’organisation du Leul. Chacun des villages concernés envoie au point focal qui du mil ou du riz ; qui des chèvres ou des moutons ou encore des bœufs. Cette mise en œuvre des préparatifs de la période préinitiation est accompagnée d’activités folkloriques ponctuées par des tirs de fusils.
La tradition exige que tous les jeunes de la même classe d’âge, au moment choisi, se fassent initiés afin de recevoir le savoir ésotérique, les us et coutumes de la société pour la pérennisation de l’activité humaine. Cependant comme le surnaturel n’est jamais loin, il est recommandé de faire pour chaque candidat une offrande spécifique pour éloigner les esprits malfaisants. Il s’agit généralement du sacrifice d’un grand coq dont on retire d’emblée le foie pour certaines catégories de voyance. Ensuite on prépare avec la viande un plat de riz sans sel ni huile : on mange une partie et l’on enterre l’autre partie.
A l’entame de l’initiation, juste avant la circoncision, les jeunes sont mis dans un cours d’eau naturel pour des épreuves mystico-religieuses et le premier qui réussit à sortir de ce marigot, intégré dans le camp, est considéré comme chef de groupe puisqu’il semble avoir plus de savoir surnaturel que les autres. Après la circoncision, ils vont veiller toute la nuit durant à chanter et à danser sous un rythme musical particulier obtenu par le claquement de baguettes. Par la suite, ils vont subir le test de bravoure, c’est-à-dire répondre sans crainte à un appel terrifiant et invisible : il les reçoit et les installe pour la nuit dans des buissons.
A l’aube le Kankourang et le responsable du camp ou Leul viennent les récupérer. Trois mois après leur entrée dans le bois sacré, les initiés prennent un grand bain dans le marigot pour se nettoyer complètement car durant les mois de dur apprentissage ils n’avaient pas souvent l’occasion de prendre une douche. Puis c’est la sortie en grande pompe avec des cérémonies festives, des cadeaux des parents et des alliés de la famille.
En règle générale, l’Initiation et le Kassak résument la pratique des us et coutumes de plusieurs peuples d’Afrique noire comme les Diolas, les Wolofs, les Sérères, les Dogons, les Mandingues … C’est pourquoi il est du reste remarquable de constater la convergence des différentes pratiques autour de la circoncision. L’interprétation de la circoncision trouve dans tous ces peuples la même signification.
En effet, selon Marcel Griaule (in Dieu d’eau/page 187), elle a pour objectif de retirer à l’homme ce qu’il a de femelle. Son pendant étant l’excision qui a elle pour but de retirer de la femme ce qu’elle a de mâle. Sur un autre plan, la partie visible du Kassak est mis en exergue par le volet folklorique d’activités extra-camp à travers la déclamation de poésies- ésotériques, accompagnée de danses et de jeux à la limite de l’érotique. Mais il est bon de rappeler en phase avec le Professeur Momar Cissé in son ouvrage, «paroles chantées et communication chez les Wolof du Sénégal» que «le Ngomar, chanson d’encouragement et de préparation psychologique précédait la circoncision proprement dite». Cette chanson avait pour fonction d’amener les futurs circoncis ou àat à ne pas pleurer durant l’épreuve ; chacun d’eux en profitait aussi pour exalter sa lignée et promettre d’affronter ce moment crucial avec courage et dignité.