La patiente de Covid-19, victime de viol dans un centre de traitement des épidémies, brise le silence. La victime âgée de 20 ans, accable le volontaire de la Croix-rouge, B. Niang.
La patiente de Covid-19, victime de viol dans un centre de traitement des épidémies, brise le silence. La victime âgée de 20 ans, accable le volontaire de la Croix-rouge, B. Niang.
"Le 23 juin 2020, diagnostiquée positive à la Covid-19, j’étais internée au centre de traitement des épidémies à l’hôtel Novotel. Au troisième jour, j’étais tellement angoissée que, même le médecin consultant, s’en est rendu compte au moment où il passait dans ma chambre pour les consultations quotidiennes. Au sixième jour, un individu que je n’arrivais pas à identifier à cause de sa tenue de protection est venu dans ma chambre pour m’apporter le petit déjeuner", narre-t-elle, dans son témoignage repris par Libération.
Avant de poursuivre : "Ainsi, lorsque je lui ai ouvert la porte, il m’a dit je suis timide et qu’à chaque fois qu’il m’apporte le petit déjeuner, je ne daigne pas le regarder dans les yeux. Avant même que je ne lui réponde, il s’est introduit dans ma chambre, ce qu’ils ne sont pas autorisés à faire. Je lui ai dit que je suis angoissée parce que j’ai peur que je veux rentrer chez moi. De suite, il m’a réconfortée en me disant que cette maladie n’était pas du tout grave, que je guérirais bientôt et rentrerais chez moi. Il m’a laissé un numéro de téléphone pour que je l’appelle si le besoin se faisait sentir. Ensuite, il est sorti de la chambre pour m’y laisser seule. Quelques minutes après, la même personne est revenue dans ma chambre avec six bouteilles d’eau qu’il a déposées sur l’armoire. Au même moment, je l’ai senti me toucher par derrière pressant très fort mes seins. J’étais prise de peur mais personne ne pouvait m’entendre à cause des portes blindées. De même chaque malade a sa chambre et personne n’était dans les couloirs. Je lui ai demandé de me laisser tranquille mais il ne voulait rien entendre. Il a continué à palper mon corps. Ensuite, il m’a soulevé et m’a demandé de l’embrasser. J’ai refusé. J’ai réussi à me libérer avant de me réfugier dans un coin près du lit. Il est parti fermer à clé la porte ainsi que la fenêtre. Lorsqu’il est revenu vers moi, il m’a bousculé sur le lit."
La victime ajoute : "Il a commencé à caresser tout mon corps et à m’embrasser. J’ai résisté, et c’est ainsi que je me suis mise sur le ventre. Je lui ai dit que ce qu’il faisait c’est du viol. Il m’a bluffé en me faisant croire qu’il allait partir et me laisser tranquille. Je le croyais et je me suis levée pour fermer la porte. C’est là qu’il m’a encore bousculé sur le lit en recommençant de plus belle sa sale besogne. Il a réussi à me pénétrer alors qu’un bout de ma robe était collé à son sexe... C’était horrible. »
LA COVID-19 ET LES CONTAMINATIONS DITES COMMUNAUTAIRES EN EXERGUE
Dakar, 10 août (APS) - Les craintes relatives à une possible explosion des contaminations à la COVID-19 est un des sujets les plus en vue dans la livraison de lundi des quotidiens dont plusieurs s’intéressent également à la commémoration de la Journée nationale de l’arbre.
Les autorités sanitaires et politiques avaient prévenu quant à un possible regain des contaminations à la COVID-19 avec l’intensification des déplacements de populations en lien avec la Tabaski, la grande fête musulmane commémorée le 31 juillet dernier.
"Dégâts d’une Tabaski communautaire", note à ce sujet le quotidien Tribune, lequel accrédite ces craintes en rappelant que 266 contaminations dites communautaires ont été enregistrées au Sénégal en 4 jours pour 14 décès.
Moins de dix jours après la célébration de la grande fête musulmane, "le Sénégal connaît une explosion des contaminations. Entre autres raisons qui avaient poussé les autorités à remettre les mesures restrictives en place pour contrer le virus", souligne le journal.
"La Tabaski fait exploser la COVID-19", constate L’As. "Depuis la Tabaski, signale ce journal, on a noté une explosion des cas communautaires qui touche la quasi-totalité des régions avec comme point d’orgue près de 200 cas communautaires seulement en 48 heures".
La conséquence, c’est que la propagation du coronavirus "a atteint une vitesse de croisière" au Sénégal, où la transmission communautaire de la maladie "constitue une grande menace", "même si le taux de létalité reste encore faible".
"Plus de 10 régions infectées", note le journal Le Quotidien, lequel évoque en particulier "un dimanche noir’’ ce week-end "avec 113 cas communautaires recensés" à travers le territoire sénégalais.
"Ce record de personnes touchées via cette transmission montre une nouvelle fois la gravité de la situation qui risque d’échapper à tout contrôle si la chaîne de contamination n’est pas rompue dans les prochaines semaines", prévient le même journal.
L’Eglise, en ce qui la concerne, "demande aux fidèles de rester chez eux", rapporte Vox Populi, qui annonce qu’il n’y aura, par exemple, "pas de grand rassemblement pour la fête de l’Assomption du 15 août".
Le journal reprend en première page les extraits des termes d’un communiqué de la Conférence épiscopale du Sénégal : "Ce qui prime, c’est la vie et la santé des personnes qu’il ne faut pas mettre en danger".
Ce que retient L’Observateur au sujet de la situation actuelle de la pandémie, n’est pas pour rassurer, le journal estimant la bataille de la communication perdue par le président Macky Sall.
"De l’assouplissement à la levée des mesures de l’état d’urgence aux polémiques sur la fiabilité des tests ou des vrais chiffres de la propagation, la stratégie incohérente contre la COVID-19 n’a jamais aidé les populations à prendre la maladie au sérieux".
Surtout que "maintenant les propos du président de la République se trouvent "en totale contradiction avec ses adresses passées", selon L’Observateur.
Dans la rubrique divers de cette actualité liée à la COVID-19, Libération revient sur le viol présumé d’une malade par un volontaire de la Croix-Rouge, à l’hôtel Novotel de Dakar, où étaient suivis certains cas dits asymptomatiques.
Le journal parle d’une "déposition explosive" de la victime présumée dont elle cite des extraits des déclarations : "J’avais peur, personne ne pouvait m’entendre à cause des portes blindées. Je résistais mais…"
Dans ce contexte lourd d’inquiétudes, la Journée nationale de l’arbre est la bienvenue pour changer de l’actualité de la COVID-19 et apporte fraîcheur et espoir dans un contexte de chaleur hivernale.
"Macky en mode écolo", lors de la Journée nationale de l’arbre commémorée dimanche à Diamniadio, avec comme enjeu selon Kritik’ : "rehausser le niveau de couverture végétale du Sénégal qui, après de longues années de sécheresse, fait face à une déforestation inouïe".
"On ne parle presque plus de feux de brousse car dans une grande partie du pays, il n’y a plus de savane, encore moins de forêts", relève le même journal.
"Virage écologique", annonce Sud Quotidien, en allusion à une réforme du code de l’urbanisme et du code de construire annoncée par le chef de l’Etat à l’occasion de cette journée de commémoration de l’arbre.
Le Soleil précise qu’à la faveur de cette réforme, le permis de construire "sera assujetti à l’obligation de planter des arbres". "Plaidoyer de Macky pour des villes vertes", affiche le quotidien l’Info. Grand Place renchérit également à sa Une : "Le plan de Macky pour un Sénégal vert".
"Pour redonner un visage vert aux villes sénégalaises colonisées par le bâti, le président de la République, Macky Sall, prévoit d’inscrire dans les codes de la construction et de l’urbanisme une obligation de planter des arbres", indique le quotidien Enquête.
DES EXPERTS TIRENT LA SONNETTE D'ALARME
La propagation inquiétante du coronavirus au Sénégal continue de soulever des vagues. À côté des services sanitaires publiques, la réflexion est également menée pour cerner le problème et trouver une solution efficace face à la montée de la transmission.
La propagation inquiétante du coronavirus au Sénégal continue de soulever des vagues. À côté des services sanitaires publiques, la réflexion est également menée pour cerner le problème et trouver une solution efficace face à la montée de la transmission de la Covid 19. C’est ainsi qu’une « initiative multisectorielle et interdisciplinaire a été prise pour apporter une contribution sur les stratégies de prévention et de prise en charge de la crise sanitaire au Sénégal. » Il s’agit d’un groupe de réflexion, composé « de responsables de près d’une vingtaine de sociétés savantes et organisations de travailleurs de la santé, de praticiens hospitaliers ayant constaté un début de saturation et de désorganisation des structures de soins, des praticiens du secteur privé, des universitaires de différentes disciplines, des épidémiologistes, des socio-anthropologues, virologues et diverses personnes ressources. » Au bout de leurs recherches, ces experts ont produit un document de synthèse réalisé sur la base d’un certain nombre de constats, avant de formuler des propositions d’amélioration de la stratégie en cours au Sénégal. Problème : le document, dont nous avons obtenu copie, semble avoir été royalement ignoré par le ministre de la Santé et de l’action sociale, qui n’a pas daigné rencontrer ses auteurs. Emedia vous en propose quelques extraits.
CONSTATS ALARMANTS
1°) Depuis la notification du premier cas le 02 mars 2020, l’épidémie est en pleine progression au Sénégal avec un nombre croissant de cas et une mortalité qui augmente. On dénombrait au 21 juin 2020 (date de l’édition du document de proposition) 5888 cas et 84 décès au Sénégal. Rapporté à la population, le Sénégal fait partie des pays africains qui dénombrent le plus de cas confirmés, occupant le 7ème rang en Afrique au 20 juin 2020.
2°) Cette pandémie vient s’ajouter à un contexte de précarité des structures de soins insuffisantes en nombre, mal réparties sur l’ensemble du territoire et dont les plateaux techniques restent inadéquats, pour la plupart d’entre elles. Ceci a pour corollaire une capacité limitée à pouvoir prendre en charge des formes graves de patients atteints de COVID mais aussi des autres urgences. De plus, l’orientation préférentielle des ressources (personnel, moyens de protection…) vers les centres COVID peut contribuer à fragiliser davantage l’offre de soin des patients non COVID. Fort heureusement, la décision de prise en charge extra-hospitalière des cas asymptomatiques, dans le but de soulager les hôpitaux pourrait atténuer cette situation.
3°) Un plan de contingence multisectoriel pour le Sénégal avait été élaboré le 19 mars 2020. Ce plan est certes intéressant et a guidé la lutte contre la pandémie au Sénégal, permettant d’engranger des acquis. Mais il demeure plusieurs insuffisances, notamment dans la mise en œuvre et l’implication réelle des acteurs communautaires, des sociétés savantes et d’autres personnes ressources. On peut citer ainsi :
Les insuffisances dans la prise en charge des personnes dites prioritaires et/ou à risque
La nécessité de redéfinir les cas suspects après plusieurs mois (on note de plus en plus de patients très symptomatiques ayant des atteintes pulmonaires sévères dont le test PCR est négatif et qui ont des lésions scannographiques très évocatrices de SARSCoV-2, sans qu’un parcours de soin et une stratégie de prise en charge ne soient clairement identifiés
La nécessité de revoir les prévisions en ce qui concerne le nombre de cas attendus, nos capacités réelles de prise en charge des formes sévères afin de les adapter : sur l’hypothèse la plus basse d’un taux d’attaque de 15%, il est attendu 2 505 840 sujets infectés, 250 584 patients hospitalisés, 37 588 admis en unités de soins intensifs, 2 819 malades sous respirateurs ; les capacités de prise en charge du Sénégal notamment en terme de lits chauds et de réanimation sont totalement en-deçà.
La nécessité d’explorer d’autres méthodes de recherche de cas en lieu et place de la méthode adoptée jusqu’ici (suivi des cas contacts et des cas communautaires suspects dont la sensibilité tourne autour de 5 à 10%, nombre de tests ne dépassant que rarement 1200 par jour alors que l’objectif annoncé en cas de scénario 4 caractérisé par la multiplication des foyers épidémiques avec transmission communautaire est la réalisation d’au moins 1500 tests par jour voire 4000 tests par jour. L’annonce récente de la limitation des tests aux seuls malades symptomatiques et personnes à risque constitue un véritable recul et laisse dans la nature des porteurs de virus qui vont les disséminer partout. Dans ces conditions, un rebond plus important de la maladie n’est pas à exclure.
L’insuffisance des équipements des CTE (centres de traitement) notamment dans la prise en charge des cas graves : dans un document officiel il était recommandé de « mettre en place des CTE équipés et adaptés aux normes pour la prise en charge des cas y compris des cas graves (oxygène…) au niveau de chaque région en vue de disposer d’une capacité d’accueil suffisante », ce qui est loin d’être le cas.
Les limites de la communication et de l’implication des communautés et des « champions » comme en témoigne le relâchement noté vis-à-vis des gestes barrières, la peur et la multiplication des violences communautaires et encore la reprise différée des cours, différée au dernier moment.
STRATÉGIES PROPOSÉES
1°) Stratégie globale d’orientation et de prise en charge des patients atteints de COVID : cette stratégie concerne les populations en général, les cas asymptomatiques et les cas symptomatiques selon le niveau de gravité ainsi que la présence ou non de co morbidités. Ces co morbidités sont classées, par les différentes sociétés savantes, selon le niveau de risque et la stabilité. Ainsi, une co morbidité stable et non compliquée a un risque qui se rapproche de celui de la population générale et peut ne pas nécessiter une prise en charge plus agressive. L’approche de prise en charge doit suivre une structuration pyramidale, impliquant les établissements publics et privés et les différents acteurs (action sociale, services d’hygiène) permettant de soulager les hôpitaux et les autres structures de soin qui ne devraient plus recevoir que des formes symptomatiques avec pneumonie ou des formes sévères et graves. Un tableau présente l’orientation des patients atteints de COVID selon le niveau de sévérité.
2°) Stratégie de prise en charge à l’hôpital et dans les autres structures sanitaires publiques et privées de référence. Il apparaît important de réduire le nombre de patients atteints de COVID admis dans les structures sanitaires en particulier de référence qui doivent être réservées en priorité aux patients atteints des formes sévères, ce qui leur permet de reprendre toutes les activités essentielles à la prise en charge des autres patients (consultations, aides au diagnostic, hospitalisations, prise en charge des urgences et réanimation, chirurgie, actes interventionnels). L’identification de sites dédiés à la prise en charge en dehors des structures sanitaires doit être faite dans les différents départements et régions. Ce travail doit se faire en urgence en impliquant toutes les parties concernées (praticiens hospitaliers et du secteur privé en tenant compte des différentes spécialités, médecins et paramédicaux des centres et postes de santé, administrateurs de structures de soin).
3°) Stratégie de confinement à domicile : Le confinement à domicile repose sur le principe de la responsabilisation de la personne et de son entourage. Il doit se faire si les besoins suivants peuvent être assurés : besoins fonctionnels (argent, dépense quotidienne), besoins émotionnels (discussion, accompagnement individuel), besoins sociaux et relationnels (éviter la stigmatisation, permettre de renouer un lien social apaisé avec la famille, le quartier et les groupes sociaux d’appartenance).
A cet égard, une meilleure implication et un renforcement des compétences des infirmiers et des acteurs communautaires de base au niveau des postes de santé pourraient jouer un rôle essentiel. Des supports de formation, des plateformes en ligne ou encore des webinaires seront développés pour la formation continue des différents acteurs.
L’auto-mesure sera encouragée et reposera sur une bonne éducation et un renforcement des capacités des sujets et de leur entourage. On pourrait prévoir avec le Service National de l’Education et de l’Information pour la Santé (SNEIPS) des spots sur l’hospitalisation à domicile dans ses différentes formes : famille nucléaire, famille élargie …
Sous ces conditions, la prise une charge à domicile ciblée et encadrée peut être plus acceptable socialement et plus efficiente que les coûteux confinements dans des hôtels pouvant d’ailleurs être associés à un risque de transmission accru (absence de distanciation physique, fréquentations dans les chambres, partages de biens ou de nourriture).
Les ressources financières mobilisées pour payer le séjour dans les hôtels et autres sites pourraient ainsi servir au renforcement du système de santé.
4°) Approche communautaire : La lutte contre la COVID et la préservation du fonctionnement correct des structures de soin suppose une prévention primaire qui passe par une sensibilisation de la communauté et un changement de comportement permettant d’endiguer l’épidémie. Or, la pandémie progresse au Sénégal, en même temps que plusieurs signaux suggèrent que la prévalence réelle des sujets infectés au Coronavirus est sous-estimée : cas communautaires sans lien épidémiologique clair, décès à domicile ou à l’arrivée dans les structures de soin, limite des modalités de réalisation des tests (nombre relativement faible d’environ un millier par jour, non aléatoire, reposant jusqu’à récemment sur le suivi des cas contacts et des suspects communautaires, avec une faible positivité de l’ordre de 5 à 10%).
La tendance actuelle révèle les insuffisances de la communication et de la riposte communautaire se traduisant notamment par un déni de la maladie, une stigmatisation et des violences exacerbées (refus d’installation de CTE dans certaines localités, violences vis-à-vis de personnes supposées propager le virus, opposition à l’inhumation de morts de la COVID-19. Il semble donc important de passer de l’approche sécuritaire et son discours impératif à une implication des acteurs de la communauté, capables d’identifier les problèmes et de leur trouver des solutions adaptées.
5°) D’autres stratégies de dépistage doivent être envisagées en lieu et place du seul dépistage des cas contacts et de certains cas suspects : utilisation des tests de dépistage comme instrument de sélection entre pathologies COVID et non COVID au niveau opérationnel et communautaire, échantillonnage aléatoire au niveau de certains clusters afin de mieux préciser la prévalence réelle que la stratégie actuelle, dépistage ciblé dans certaines situations (sujets âgés, sujets avec des co morbidités), utilisation du scanner thoracique en cas de forte suspicion malgré un test PCR négatif, chez des sujets à risque ou à forte suspicion et chez le personnel soignant.
Toutes ces mesures devraient aller de pair avec des stratégies de confinement renforcées ou de gestes barrières (port obligatoire de masque, limitation des mouvements, fermeture des lieux publics …) si la situation ne s’améliorait pas. Et c’est bien le cas ! Ces mesures seraient assorties de l’indispensable soutien aux couches les plus vulnérables au plan socio-économique. Plusieurs incertitudes demeurent sur l’évolution de l’épidémie et sur l’efficacité des stratégies mises en œuvre jusqu’à présent. C’est pourquoi, toutes les propositions et recommandations formulées devraient être soumises à des outils de monitoring et d’évaluation adaptés afin que les ajustements nécessaires soient entrepris.
Le jeune Babacar Dia tué par balles aux États-Unis
Alors qu’on n’a pas encore fini de parler de l’incendie criminel qui a emporté Djibril Diol et sa famille aux Etats-Unis, un compatriote est encore tué au pays de l’Oncle Sam. Babacar Dia a été abattu par balles vers 17h, à Saint-Louis dans l’Etat de Missouri. La victime y vivait avec sa mère Awa Faye, une militante de première heure de l’Alliance pour la République qui avait accueilli Macky Sall en 2010. Le défunt était réputé sérieux.
Macky offre six millions à la famille Diol et promet de rapatrier les corps
Le président de la République, qui a exprimé sa compassion à la famille Diol dont les membres ont péri dans un incendie criminel à Denver aux EtatsUnis, a dépêché une délégation vendredi à Wakhinane. La délégation conduite par Moïse Sarr, Secrétaire d’Etat des Sénégalais de l’Extérieur, était composée de l’administrateur du FAISE, Nata Samb Mbacke, du député Abdou Diallo etc. D’après nos informations, le Président Macky Sall a offert 06 millions aux trois familles endeuillées par la perte cruelle de 5 de leurs membres. Mieux, en plus d’avoir envoyé le Consul général El hadj Ndao à Denver, a promis de faire rapatrier les corps dès qu’ils seront remis au patriarche de la famille sur place .
Aprosi distribue des masques
Le Directeur de l’Aprosi Momath Bâ reçoit demain à Diamniadio son ministre de tutelle Moustapha Diop, et celui de l’Enseignement Supérieur et ancien Directeur Général de l’Aprosi, Dr Cheikh Oumar Hanne. D’après Aly Fary Ndiaye, le Directeur de la communication et d’exploitation des sites industriels régionaux de l’Aprosi, Dr Cheikh Oumar Hanne, va recevoir des mains du ministre Moustapha Diop un lot important de masques dans les locaux du Pôle industriel en perspective de la réouverture universitaire. Par le passé, il avait octroyé des milliers de masques à d’autres ministères.
Le Président Macky Sall à Médina Baye
Le Président Macky Sall a conduit samedi une forte délégation à Kaolack pour présenter ses condoléances au Khalife de Médina Baye, à la suite du rappel à Dieu de Cheikh Ahmed Tidiane Ibrahima Niass, quatrième Khalife de Baye Niass. Installé à côté du nouveau Khalife, Cheikh Mahi Niass, le Président Macky Sall dira que Médina Baye est un lieu où le drapeau de l’Islam flotte très haut. A l’en croire, le foyer religieux de Médina Baye a une excellente réputation dans le monde et ses fidèles sont disséminés partout. Il a salué la mission de cet ardent foyer où sont formés des milliers de fidèles à l’adoration de leur Créateur. Occasion saisie par le chef de l’Etat pour prier aussi pour le repos de l’âme de Seyda Fatima Niass et Cheikh Mouhamed Moctar Niass rappelés récemment à Dieu. Quant au nouveau Khalife, Cheikh Mahi Niass, le chef de l’Etat prie qu’il marque de son empreinte son Califat. Cheikh Mahi Niass a remercié le Président Macky Sall pour le déplacement et pour tout ce qu’il a fait pour Médina Baye.
L’hôpital Principal suspend les cérémonies de levée de corps
Le directeur général de l’Hôpital Principal de Dakar a mis en exécution le souhait du président de la République de mettre fin aux cérémonies de levée de corps dans les structures sanitaires. Le médecin général Pr Mame Thierno Dieng a annoncé hier la fin des cérémonies de levée de corps à l’hôpital Principal de Dakar jusqu’à nouvel ordre. Intervenant sur la Rts, Pr Dieng souligne que cette mesure s’inscrit dans la stratégie de lutte contre la pandémie à coronavirus. Il s’agit ainsi de limiter la propagation du coronavirus sur l’ensemble du territoire national avec l’explosion des cas issus de la transmission communautaire.
Faussaires autour de l’Office du Bac
Des faussaires se font de l’argent au nom de l’Office du Baccalauréat. Le directeur de l’Office du Bac, Sossé Ndiaye, qui condamne alerte les usagers. A l’en croire, des individus non identifiés rôdent autour du siège de l’Office du Bac ou dans l’enceinte du campus social de l’Université Cheikh Anta Diop (Ucad), et proposent un service payant pour le retrait de diplôme, d’attestation ou de relevés de notes du Bac. Sossé Ndiaye invite les bacheliers et autres usagers à éviter de s’attacher les services de ces faussaires. Il rappelle que l’Office du Bac a mis en place un dispositif pour faciliter le retrait de tout document, notamment depuis l’avènement de la pandémie à coronavirus. Les usagers n’ont plus besoin de se déplacer puisqu’un site web est en ligne. Le Directeur de l’Office du Bac promet de saisir la justice afin qu’on mette fin à cette arnaque.
405 cantines en fer, 488 cantines en dur…rasées à Sandaga
Après le succès du redéploiement des commerçants de Sandaga au Champ de courses, le ministère de l’Urbanisme, du Logement et de l’Hygiène Publique, fait le bilan de l’opération. Les services du ministre Abdou Karim Fofana renseignent que les opérations de désencombrement du marché de Sandaga, les dimanche 02, lundi 03 et jeudi 06 août 2020, ont permis de collecter 120 tonnes d’ordures, 2,25 tonnes de bâches et 2579 m³ de gravats. Les bulldozers ont rasé 405 cantines en fer, 488 cantines en dur, 195 tonnes de fer, 640 tables en bois, 308 bancs en bois, 39 chaises en plastique et un magasin en dur de 42,5 m². Tous ces matériaux étaient installés sur une surface de 5 687 m² qui a été complément raclée.
And Gueusseum en rogne
L’Alliance des Syndicats Autonomes de la Santé (ASAS) And Gueusseum dénonce le comportement de certains membres du cabinet du ministre de la Santé et de l’Action sociale. Pour le président de And Gueusseum, Mballo Dia Thiam, certaines autorités du ministère de la Santé et de l’Action Sociale prennent le cabinet dudit ministère comme un nid d’administration médicale de quelques parvenus, tel que fanfaronné par un clan de syndicalistes en désespoir de cause et dans un populisme vulgaire. Il fustige, en effet, ces actes qu’il assimile à une tentative de caporalisation et de médicalisation dudit ministère. Mballo Dia Thiam et ses camarades rappellent que le Cabinet ne saurait se résoudre à des logiques corporatistes et nombrilistes. Ils précisent à l’endroit du cabinet du ministre Abdoulaye Diouf Sarr qu’il ne s’agit pas de gérer la maladie mais plutôt de s’occuper de la santé des populations. Selon Mballo Dia Thiam, les membres du cabinet qui, paradoxalement, convoquent la gestion démocratique du personnel, devraient plutôt balayer devant leur porte. Le syndicaliste accuse les proches collaborateurs d’Abdoulaye Diouf Sarr d’avoir fait la promotion de tous leurs proches, sans légitimité aucune, dans les sphères les plus élevées et les plus stratégiques du ministère, en snobant les Préfets et Sous-préfets dans des redéploiements sans objet d’agents qui n’ont pas demandé à bouger.
And Gueusseum en rogne (bis)
Restons avec l’Alliance des Syndicats Autonomes de la Santé (ASAS) qui demande au ministère de la Santé et de l’Action Sociale d’arrêter ce cirque qu’ils jugent arbitraire et inacceptable. Les camarades de Mballo Dia Thiam en appellent ainsi à plus de solidarité en lieu et place de procès inutiles, face à cet ennemi mortel commun contre lequel des batailles ont été perdues à cause d’un état-major qui a proposé au ministre de la Santé et de l’Action Sociale toutes les stratégies appliquées avec des fortunes diverses. Par ailleurs, And Gueusseum réitère son soutien au Sytjust. Mballo Dia Thiam répond favorablement à l’appel de l’UNSAS pour la bataille imminente de la centrale syndicale en soutien au Sytjust.
Pété enregistre son premier cas
Le coronavirus se propage dans le département de Podor. Après le district sanitaire de Podor, celui de Pété vient d’enregistrer son premier cas importé. Il s’agit d’un jeune d’une trentaine d’années, venu de Saint-Louis. Le médecin chef du district, Dr Ndiaye, a confirmé hier les résultats du test du jeune homme. A en croire le médecin, c’est de retour de voyage qu’il a senti les symptômes de la Covid-19 avant de se diriger au centre de santé où des prélèvements ont été effectués. Les tests ont été confirmés par le laboratoire installé à Matam plus proche de Pété. Ses contacts ont été recensés et mis en quarantaine. Le malade est transféré au centre de traitement des épidémies (CTE) de Saint-Louis où il est admis.
Ndioum n’est pas épargné par la pandémie
Jusque-là épargnée, la commune de Ndioum a enregistré ses deux premiers cas de covid-19. La première personne concernée est une dame âgée de 70 ans, malheureusement décédée à l’hôpital de Saint-Louis. Son test post mortem était revenu positif. Une autre proche de la défunte a à son tour chopé le virus. La nouvelle a été confirmée ce dimanche. Il s’agit également d’une femme, habitant le quartier Ndioum Walo. Selon les dernières informations, la patiente a été transférée à Saint Louis pour sa prise en charge. Il faut souligner que le président du Conseil départemental de Podor a remis un lot de matériel sanitaire aux districts sanitaires de Pété, Podor et à l’hôpital de Ndioum. Le matériel est composé de thermo flashs, masques, gels hydro-alcooliques et de lave-mains. Son geste a été magnifié par les autorités de ces structures sanitaires. A les en croire, c’est la troisième fois que le président de l’institution vient au secours des structures sanitaires du département en cette période de pandémie.
Mor Ngom et Cie jouent la carte de la sensibilisation
Examinant la situation nationale, marquée pour l’essentiel par la pandémie de Covid-19 qui affecte le Sénégal depuis le 02 mars 2020, le SEP/BBY a noté la propagation inquiétante de la Covid-19, avec un nombre élevé des patients et des décès. De même, il a relevé pour le déplorer le non-respect des mesures barrières par beaucoup de nos compatriotes. Ainsi, au regard des conséquences économiques et sociales de cette pandémie sur le pays, le SEP/BBY estime qu’il est impératif d’accroître la sensibilisation des populations notamment des jeunes afin d’engager une dynamique communautaire seule susceptible de limiter l’extension de la maladie. Dans ce sens, il invite l’ensemble des parties prenantes de la Coalition BBY à impliquer davantage toutes leurs militantes et tous leurs militants dans la campagne d’information et de sensibilisation partout à travers le territoire national. Constatant qu’à l’heure actuelle, les essais cliniques en cours dans le monde n’ont pas encore produit un traitement efficace contre la Covid-19, le SEP/BBY rappelle le nécessaire respect des mesures préventives pour se protéger et protéger la communauté notamment les personnes âgées. C’est pourquoi le SEP/BBY salue les mesures prises par le chef de l’état et par suite le Ministre de l’intérieur. Ces mesures pertinentes et opportunes au vue de l’évaluation de la pandémie qui a été faite jeudi 6 Aout méritent d’être comprises, acceptées et appliquées par toute la population en vue de mettre un terme à la propagation de la maladie. Dans ce sens, appréciant à sa juste mesure le rôle inestimable de la presse dans la lutte contre la pandémie actuelle, le SEP/BBY réitère ses félicitations à l’ensemble des professionnels des médias et les exhorte à être le relais des mesures prises par les pouvoirs publiques et le personnel de santé.
par Bosse Ndoye
LA COMPLICITÉ DES ÉLITES
Ceux qui appauvrissent le continent – FMI, Banque mondiale, OMC, etc. – peuvent dormir tranquillement : ils peuvent toujours compter sur le soutien de certains fils du continent qui diront que si l’Afrique est en retard, c’est de sa seule faute
"Les blancs s'en vont mais leurs complices sont parmi nous, armés par eux ; la dernière bataille du colonisé contre le colon, ce sera souvent celle des colonisés entre eux.[1]" Frantz Fanon,
Depuis les déclarations des indépendances officielles de nombre de pays africains dans les années 60 jusqu’à nos jours, beaucoup d’événements survenus sur continent n’ont cessé de renforcer la véracité des propos de Fanon et de prouver leur actualité.
Dans l’actuelle République démocratique du Congo, ex-Zaïre, Patrice Lumumba l’a malheureusement très vite appris à ses dépens. En effet, pour maintenir l’exploitation de son pays que d’aucuns qualifient de scandale géologique – tant le sous-sol est riche -, l’ancienne puissance coloniale, la Belgique, poussée entre autres par l’Union minière, fit rapidement allumer des feux fratricides – auxquels elle participa amplement – par le biais de ses laquais Moïse Tshombe et Albert Kalonji. Ces derniers organisèrent respectivement la sécession de Katanga et du Kasaï, les deux régions les plus riches du pays juste quelques semaines après la déclaration d’indépendance. Cet événement allait être l’un des premiers, sinon le premier d’une longue série de confrontations malencontreuses – allant de coups d'État aux rebellions en passant par des liquidations sommaires - mettant aux prises des fils d’un même pays, d’un même continent ; les uns luttant pour le développement et la libération complète de leur peuple ; les autres agissant de connivence avec une ou plusieurs puissances impérialistes étrangères, qui tirent généralement les ficelles en échange de quelques avantages ou soutiens.
Si cette situation n’avait été et n’est encore que l’œuvre d’inconnus désespérés à la recherche de notoriété ou de richesses, elle eût été moins surprenante et choquante. Mais elle a été aussi et demeure l’affaire de certains parmi les fils du continent occupant ou ayant occupé les premiers rôles dans leurs pays et jouissant d’une certaine réputation sur le continent. Les cas de Senghor et d’Houphouët Boigny sur le plan politique parmi tant d’autres en Afrique noire francophone peuvent bien étayer ces propos.
Vu, non sans raison, par Ousmane Sembene – à travers le personnage de Léon Mignane - comme étant, après Faidherbe, le meilleur produit de l'ancienne métropole, et le meilleur préconsul que Paris ait envoyé en Afrique francophone[2]; par une universitaire française[3] comme étant le colonisé introuvable ; par Mongo Béti[4], comme la plus noble conquête de l’homme blanc, l’oncle Tom-Senghor[5]; par Boubacar Boris Diop, comme un homme ondoyant, un être entre deux eaux[6], le premier président sénégalais a souvent servi de relai à l’ancienne métropole dans l’exercice de ses basses besognes sur le continent. Il a participé activement à la mise en quarantaine de Cheikh Anta Diop loin de l’Université de Dakar et du champ politique pendant plusieurs années de peur qu’il n’inoculât le virus de l’éveil dans les jeunes consciences endormies dans le pays afin d’éviter d'y faire vaciller les intérêts de la France. D’après Roland Colin, rapportant les propos de Mamadou Dia, lors de la rencontre de Gonneville-sur-mer entre ce dernier et Senghor, à propos de la position à tenir lors du référendum de 1958, le président-poète avait demandé de laisser le pays rester encore quinze à vingt ans[7] sous domination française avant de penser à l’indépendance. Ce n’est dès lors pas étonnant qu’il ait tenu ces propos : "Le carré français, croyez-moi, nous ne voulons pas le quitter. Nous y avons grandi et il y fait bon vivre. Nous voulons simplement...y bâtir nos propres cases, qui élargissent et fortifieront en même temps le carré familial, ou plutôt l'hexagone France[8]." C’est sous sa présidence que l’Opération Persil et l’Opération Mar Verde – en partie - furent préparées au Sénégal pour faire couler la Guinée de Sékou Touré dont le seul tort était d’avoir osé dire non à la France pour se soustraire à sa domination. C’est la preuve que ceux qui sont contents de leur asservissement trouveront toujours dérangeants ceux qui réclament haut et fort leur liberté. Beaucoup d’autres choses peuvent être dites sur Senghor agissant pour la France au détriment de son peuple et de ses frères africains.
Le premier président ivoirien - que Frantz Fanon désignait comme un ennemi de l’indépendance de l’Afrique ; un homme de paille du colonialisme pour avoir affirmé que l’Algérie doit demeurer dans le cadre français, pour être allé défendre les thèses françaises aux Nations Unies[9] - a été avec Senghor l’autre béquille sur laquelle la France s’est longuement appuyée pour mener sa marche tranquille visant à asseoir sa domination en Afrique francophone. En agissant de connivence avec l’ancienne métropole, il a joué un grand rôle dans la dissuasion du Dahomey (actuel Bénin) et de la Haute-Volta (actuel Burkina Faso) de participer à la Fédération du Mali, qui devait les unir avec le Soudan français (actuel Mali) et le Sénégal. C’est sous son instigation que le Conseil de l’entente regroupant à l’époque de sa création le Bénin, le Niger, le Burkina Faso fut mis sur pied pour contrecarrer la Fédération du Mali. L’ancien président ivoirien avait tout fait pour éviter à son pays de s’unir avec ceux qu’il appelait les "affamés du Sahel", selon les propos de Roland Colin. Il a soutenu Kasa-Vubu, adoubé par Paris, contre Lumumba à l’ONU, a participé à la déstabilisation de la Guinée nouvellement indépendante et au renversement de Kwamé Nkrumah en 1966 : "Houphouët Boigny a permis aux conspirateurs d’utiliser la Côte d’Ivoire pour coordonner l’arrivée et le départ de leur mission[10]". Toujours pour son soutien indéfectible à la France - dont le rôle est bien connu dans la guerre du Biafra - il a été parmi les premiers à reconnaître le gouvernement sécessionniste de Biafra. C’est même en Côte d’Ivoire que le Colonel Ojukwu trouva refuge après sa tentative avortée de sécession. Jacques Foccart souligne que : "Le général de Gaulle lui donna carte blanche pour aider la Côte d’Ivoire à aider le Biafra."[11] Comme dans le cas de Senghor, beaucoup de choses peuvent être dites sur Houphouët agissant en faveur de la France au détriment de son peuple et de nombre de ses frères africains.
Alassane Ouattara, dont il était très proche, ne fait que marcher sur ses pas. Comme son homologue sénégalais Macky Sall - en bons successeurs du couple Houphouët-Senghor - il n’a pas hésité à louer les bienfaits du franc CFA, à expulser de son pays ceux qui ont osé le critiquer comme Kemi Séba et Nathalie Yamb - dans son cas. Tous les deux préservent jalousement les intérêts français dans leurs pays au grand dam des populations locales. La décision hâtive et suspecte de remplacer le franc CFA par l’Eco ne constitue pas seulement un coup de Trafalgar de la part de Ouattara, mais elle est aussi un court-circuitage de la CEDEAO dans son projet de monnaie sous régionale décidé depuis plusieurs décennies et un mépris de l’opinion de nombreux Africains qui veulent couper le cordon ombilical monétaire avec la France.
La guerre fratricide que se livrent les anciens colonisés pour le compte des anciens colonisateurs sur le continent n’est pas seulement physique et armée, elle aussi intellectuelle. La particularité pour celle-ci est que l’ancien maître n'a pas toujours besoin de tirer quelque ficelle que ce soit. Car d’autres peuvent agir à sa place. Ayant largement réussi sa colonisation - qui en plus d’avoir été une entreprise de domination, d’exploitation économique a été aussi une entreprise d'aliénation, de décérébration pour employer les mots de Fanon -, elle peut compter sur une certaine élite formée dans ses écoles, dans ses universités qui est prête à la défendre bec et ongle intellectuellement. Ce sont les personnes composant cette élite que Sartre, dans sa préface des Damnés de la terre, qualifie d’êtres truqués, des mensonges vivants, tant le décalage est grand qui les sépare de leurs peuples. Si bien qu’ils ne peuvent même plus communiquer. En outre, comme le rappelle Odile Tobner : "Les intellectuels noirs sont étroitement surveillés. Toute une génération de diplômés est embrigadée. La docilité est le prix à payer pour accéder aux rôles de figuration, assortis de prébendes, qui vont faire des dirigeants africains les vampires de leurs peuples. Il s'agit aussi de déconsidérer autant que faire se peut les rares voix capables de galvaniser les esprits colonisés.[12]"
Il n’y a souvent que sur le continent africain que l’on trouve certaines divergences sur la défense d’intérêts nationaux face à d’autres pays étrangers. Là où l’unité nationale, l’union sacrée est facilement obtenue dans d’autres pays, même parfois pour des causes dépourvues de noblesse ou tout simplement iniques. Dès lors, les anciens pays esclavagistes n’ont pas besoin de s’excuser ou de réparer leurs méfaits, il y aura toujours des fils du continent, des intellectuels – parfois stipendiés ou affublés de titres pompeux ou lauréats de certains prix…en Occident - pour dire que si les Blancs ont osé réduire certains fils du continent en esclavage, c’est parce qu’ils étaient aidés par d’autres Africains. Peut-être ignorent-ils que chaque domination crée des collaborateurs dans la population soumise. L’exemple de la France sous l’Occupation est patent. Ceux qui appauvrissent le continent noir – le FMI, la Banque mondiale, l’OMC, les néocolonialistes, etc. – peuvent dormir tranquillement : ils peuvent toujours compter sur le soutien de certains fils du continent qui diront que si l’Afrique est en retard, c’est de sa seule faute. Certes, face à la gabegie, aux dirigeants qui s’accrochent manu militari au pouvoir en toute illégalité constitutionnelle, au népotisme, au pillage, aux détournements de deniers publics, à l’absence de patriotisme de nombre de dirigeants, l’attitude, les discours et la frustration de ces personnes, qui disent qu’il est trop facile de vouloir toujours se décharger sur l’Occident, sont très compréhensibles. Mais ce serait une erreur que d’ignorer l’impact négatif de la dette odieuse, la détérioration des termes de l’échange, les chantages des institutions financières internationales, les rapports de force défavorables à la plupart des pays africains et surtout leur absence d’indépendance véritable...Notamment les anciennes colonies françaises de l’Afrique subsaharienne. De plus, l’Occident n’hésite pas à réviser l’histoire, à trouver des descendants d’esclaves et de colonisés pour défendre ses positions ; bref à tout tenter pour faire porter aux Africains "le chapeau du sous-développement" qui sévit sur une bonne partie du continent tout en occultant sa part de responsabilité dans les conséquences néfastes de la traite négrière, de la colonisation et actuellement du néocolonialisme qui y plombent le décollage économique de beaucoup de pays. On ne sort pas culturellement, économiquement, psychologiquement indemne de 5 siècles de domination. Cette situation fait souvent penser au complexe de Néron dont parlait Albert Memmi[13]. Pour légitimer leurs pillages des pays « asservis » et défendre leur rôle d'usurpateurs, les colonisateurs, par le passé, et les néocolonisateurs, de nos jours, ont échafaudé toutes sortes d'arguments et de théories pour « rendre licites » leurs agissements afin de se donner bonne conscience. Autrefois, les premiers nommés se cachaient derrière le manteau de la supériorité raciale et de la mission civilisatrice qui en était un corollaire pour conquérir des pays. Mais vu que tout le monde sait maintenant que leurs arguments sont scientifiquement faux et fallacieux, politiquement incorrectes et anachroniques, leurs successeurs ont changé de stratégies. Ils dénigrent les pays « soumis » ou à « soumettre » en dénonçant certaines de leurs pratiques qualifiées de "barbares", leur inaptitude à exploiter et à utiliser convenablement leurs propres richesses et leur propension à la dictature et à la corruption. Et en même temps, ils louent le développement technologique et économique et la « démocratie » dans leur pays et n’hésitent pas à falsifier ou à réécrire l'histoire pour servir de vils desseins. Du racisme biologique, ils sont passés au racisme culturel et culturaliste. Les périodes changent, mais les pratiques demeurent sous d'autres formes. Rien de nouveau sous le soleil. Donc, nombre de problèmes sur le continent doivent être considérés au minimum sous un angle double quand on veut les analyser. Sinon le résultat risquerait d’être hémiplégique.
Pour ce qui concerne le déboulonnage de la statue de Faidherbe, la situation n’avait même pas besoin de tous ces débats houleux, de toute cette dissertation tant ce qui est à faire est évident puisque c’est juste une question de dignité. Imaginez une statue de Bugeaud à Alger, celle d’Hitler à Tel-Aviv. C’est impensable !
Le problème des dirigeants qui collaborent avec des puissances étrangères au détriment de leurs peuples renvoie encore et toujours à la question de la souveraineté véritable, et partant à la question de puissance. Tant que l’on n’aura pas la liberté d’élire les dirigeants que l’on veut et de se séparer d’eux démocratiquement lorsque ne font plus l’affaire, la capacité de nous défendre, de nous nourrir, de nous soigner tout seuls, on aura toujours au sommet de nos États des présidents fantoches, soutenus de l’extérieur et plus préoccupés à avoir le satisfécit des grandes puissances, des institutions financières internationales que par le bien-être et la tranquillité de leurs peuples. De petits pays faibles et divisés ne pourront pas changer cet état de fait. Seul un ensemble fort en sera capable. D’où la nécessité de s’unir, comme l’avaient souhaité de tous leurs vœux Cheikh Anta Diop et Kwamé NKrumah.
[1]Cité par Odile Tobner, Du racisme français, quatre siècles de négrophobie, p.225
[2] Ousmane Sembene, Le dernier de l’empire, p.344
[3] Boubacar Boris Diop, L’Afrique au-delà du miroir, p.104-105
[4]Mongo Béti, Les Deux mères de Guillaume Ismaël Dzewatama, p. 158
[12] Odile Tobner, Du racisme français, quatre siècles de négrophobie, p. 228-229
[13] Albert Memmi, Portrait du colonisateur, portrait du colonisé, p.72
par François Giovalucchi
AFRIQUE-FRANCE, LES MIROIRS GROSSISANTS
La fable de l’émergence ne convainc pas plus l’homme de la rue africaine que le discours de la start-up nation ne convainc les Gilets jaune. Elle apporte en revanche de l’eau au moulin de ceux qui sont prompts à dénoncer les objectifs cachés de Paris
esprit.presse.fr |
François Giovalucchi |
Publication 09/08/2020
Alors que la France perd son influence en Afrique, l’opinion africaine continue de prendre Paris comme bouc émissaire de ses désillusions. La France et l’Afrique francophone sont ainsi entrées dans un jeu de miroirs grossissants, où chacun amplifie l’importance de l’autre pour son destin.
La période récente est marquée par un paradoxe apparent : la France, après avoir empêché la chute de Bamako en 2013 et y avoir été acclamée, s’efforce de contenir la poussée djihadiste au Sahel au prix de pertes qui s’alourdissent, mais elle est confrontée en retour à une extension du sentiment antifrançais. En parallèle, la montée de la condamnation du franc Cfa a conduit à son remplacement par l’éco en Afrique de l’Ouest fin 2019. La récente pandémie a exacerbé le ressentiment. Une note de prospective du Quai d’Orsay, présentant un scénario catastrophe pour les régimes les plus usés d’Afrique, a suscité un flot de critiques outragées, venant souvent de ceux-là mêmes qui accusent, souvent à juste titre, la France de soutenir ces régimes. Les réseaux sociaux se sont enflammés d’accusations de recours aux Africains comme cobayes[1], et même de manœuvres volontaires de contamination par la France. Les racines du sentiment antifrançais sont anciennes, mais il revêt aujourd’hui une acuité particulière qui mérite un essai d’interprétation. L’Afrique est le dernier endroit où la France peut se rêver en grande puissance. Cette dernière tente d’enrayer sa perte d’influence, affecte bruyamment de parier sur l’avenir du continent et invoque une responsabilité particulière pour répondre aux demandes d’appui militaire au Sahel. Elle met en avant des enjeux surévalués ou qui, à tout le moins, ne sont pas plus importants que pour d’autres pays européens. Une large partie de l’opinion subsaharienne francophone cherche, quant à elle, une explication extérieure simpliste à ses désillusions économiques et politiques, trop souvent sur un mode complotiste : Paris s’offre en parfait bouc émissaire. La France et l’Afrique francophone sont ainsi entrées dans un jeu de miroirs grossissants, où chacun amplifie l’importance de l’autre pour son destin.
Le sentiment antifrançais
La question du legs colonial dans les consciences est complexe : halo de violences et d’humiliations, mais aussi adhésion aux valeurs de la République retournées contre le colonisateur, et utilisation des positions et savoirs acquis par les élites colonisées pour leur reproduction après les indépendances. Plus que la colonisation elle-même, c’est la politique dite du « pré carré », conduite au lendemain des indépendances et assortie d’un soutien sans faille aux dictateurs « amis », qui a donné corps et validité à ce sentiment.
A contrario, là où l’ex-puissance coloniale s’est effacée ou s’est faite discrète, la détestation de l’ancien maître n’a pas prospéré. Le sentiment antifrançais a disparu au Vietnam. Sans parler d’une guerre de dix ans, rappelons que les menées communistes y avaient pourtant suscité un encadrement policier et une répression au quotidien autrement plus violents que dans la plupart des colonies françaises d’Afrique subsaharienne. De même, les sentiments anti-italien et antibritannique apparaissent peu marqués, malgré la brutalité de la « pacification » de la Libye et de la conquête de l’Éthiopie pendant la période fasciste, et la violence de la répression de la révolte Mau Mau au Kenya.
En Afrique francophone, le sentiment antifrançais, par nature difficile à mesurer, a varié selon les conjonctures politiques et l’intensité de l’interventionnisme français. Il est d’une acuité inégale selon les classes d’âge et les groupes sociaux. Il a connu une flambée en Côte d’Ivoire pendant la crise de 2002-2011, qui a débouché sur une intervention militaire française permettant l’arrestation de Laurent Gbagbo. Le Togo de Gnassingbé Eyadema (1967-2005), dont le coup d’État avait été appuyé par la France, a été également le siège d’un fort sentiment antifrançais, renforcé par le soutien affiché de Jacques Chirac au vieux président, puis à la prise du pouvoir par son fils Faure. Enfin, il est de longue date particulièrement aigu au Cameroun : l’indépendance y a été précédée par la seule guerre de libération d’ampleur de l’Afrique francophone et suivie par un appui français au jeune pouvoir dans sa lutte contre les héritiers du maquis, puis d’un soutien à Paul Biya, président depuis 1982. Si, dans les cas précités, ce sentiment a été ou est toujours d’une intensité singulière, il n’en a pas moins été latent dans toute l’Afrique francophone.
Aujourd’hui, les discours francophobes prospèrent sur un mode complotiste, des conversations de bar ou d’amphithéâtre aux débats télévisés et aux articles de presse, et sur les réseaux sociaux, qui leur assurent un grand succès chez les jeunes. L’essayiste camerounais Yann Gwet, reprenant la distinction de David Goodhart entre les «somewhere» et les «anywhere», pointe que la popularité de ce discours est plus forte chez les premiers, les élites internationalisées considérant la souveraineté comme accessoire[2]. Des dirigeants peuvent toutefois l’alimenter, avec d’évidentes arrière-pensées. Une France surpuissante et à la perversité sans limites est désignée comme responsable de tous les maux. La volonté de prédation serait à la base de toute sa politique. Sont dorénavant particulièrement stigmatisés le franc Cfa entravant le développement, les entreprises françaises qui suscitent un fort ressentiment quand elles participent aux privatisations et/ou ont, comme Bolloré, une stratégie monopolistique, ainsi que les interventions militaires. Ces dernières sont supposées motivées par une volonté d’accaparement des ressources naturelles qui conduirait Paris à fabriquer ou soutenir le djihadisme. Ce sentiment n’est pas dépourvu de contradictions : souvent, la France se voit accusée de ne pas pratiquer l’ingérence démocratique pour contribuer au départ de présidents depuis trop longtemps au pouvoir.
Le discours antifrançais prend parfois des formes ridicules. Ainsi, des « bio-kamikazes » français seraient arrivés par Air France à Douala en mars 2020 pour contaminer la population. Non moins absurde est la rumeur selon laquelle les pays de la zone franc auraient payé un « impôt colonial » en déposant jusqu’en décembre 2019 la moitié de leurs devises sur un compte au Trésor français : c’est confondre un dépôt en banque avec un cadeau à la banque.
En contrepoint, tout concurrent ou ennemi supposé de la France est perçu avec sympathie, nonobstant ses visées hégémoniques ou son caractère dictatorial. En témoignent l’accueil, au départ favorable, de la pénétration chinoise, l’admiration pour Kadhafi très répandue parmi les jeunes qui le perçoivent comme un martyr de la cause africaine et, plus récemment, la perception positive du retour russe.
Surestimation des enjeux et manque de moyens
La surévaluation des enjeux concerne surtout les domaines politique et économique, et moins nettement celui des migrations.
Dans le domaine politique, pendant la guerre froide, le rôle de gendarme délégué en Afrique contribuait à consolider la place de la France dans le camp occidental. Aujourd’hui, la politique africaine de la France lui donne certes une visibilité internationale, mais simultanément la met en position de quémandeuse d’appuis américain et européen.
Les intérêts économiques français en Afrique, francophone notamment, sont faibles et exposés à une concurrence croissante. Les exportations françaises à destination de l’Afrique subsaharienne ne représentent que 2 % du total des ventes mondiales françaises. Les exportations françaises vers les pays de la zone franc représentaient 5,1 milliards de dollars en 2019, soit un montant inférieur aux exportations vers la République tchèque. Les parts de marché à l’exportation de la France en Afrique ont été divisées par deux depuis 2000, passant de 11 % à 5,5 % en 2017. L’Afrique francophone ne joue un rôle significatif que pour la rentabilité d’une poignée d’entreprises (Air France, Ags, Bouygues, Bolloré, Castel, Orange, Total). Les banques françaises, Société générale mise à part, se retirent. L’Afrique est à l’origine de près du tiers de la production de pétrole et de gaz de Total, mais les principaux gisements, hormis Moho Nord au Congo-Brazzaville, sont en Angola et au Nigeria. Au Niger, les deux mines d’uranium encore exploitées d’Orano (ex-Areva) sont en fin de vie et le nouveau gisement d’Imouraren n’a pas été mis en production, faute de rentabilité. Les réserves de change des pays de la zone franc qui étaient placées sur un compte du Trésor représentaient environ 1 % de la dette française.
En matière migratoire, on notera que, si la France reste la première destination des Africains dans les pays de l’Ocde, sa part dans les migrants installés est passée de 38 % en 2000 à 30 % en 2015. Il est toutefois clair que, compte tenu de l’importance de la communauté malienne installée en France, celle-ci serait concernée en premier chef par un mouvement migratoire provoqué par une victoire djihadiste au Sahel.
Les versements d’aide publique au développement de la France vers l’Afrique subsaharienne ont été réduits de moitié, passant de 3,3 milliards de dollars en 2010 à 1,6 milliard en 2016, avant de connaître un début de remontée à partir de 2017. Il est toutefois à noter qu’il a été décidé d’augmenter fortement (un milliard d’euros) la part en subvention de l’aide à compter de 2019.
La diplomatie culturelle a, quant à elle, servi de variable d’ajustement au budget d’un ministère dont la priorité est de maintenir l’universalité de son réseau d’ambassades et le nombre d’emplois de « vrais diplomates ». Victime d’une baisse de moyens financiers et humains, le réseau culturel français en Afrique tient de plus en plus difficilement son rôle de vitrine.
La France s’aligne sur les positions de l’Union européenne et des institutions de Bretton Woods, quand bien même les mesures proposées ont un effet politique délétère pour un enjeu économique médiocre, comme la signature des accords de partenariat économique destinés à lever les obstacles aux exportations européennes, et rejetés par la majorité des populations. C’est également le cas quand des orientations de l’aide au développement pénalisent à terme l’usage de la langue française et font le succès des médersas, comme les programmes de l’initiative internationale « Éducation pour tous » revenant à gonfler les taux de scolarisation, en parquant des enfants dans des classes de cinquante élèves pour recevoir l’enseignement d’un contractuel mal formé et mal payé.
La France n’a pas de grande vision à partager avec l’Afrique. La francophonie ne tient pas ce rôle : elle se dilue dans l’adhésion de nouveaux pays où le français n’est pas la langue du peuple et s’incarne dans une institution, l’Organisation internationale de la francophonie, utilisée de façon souvent politicienne. C’est en France que le panégyrique présentant l’Afrique comme la nouvelle frontière économique du monde a ses hérauts les plus zélés. En l’absence d’industrialisation, l’Afrique connaît une croissance largement liée au cours des matières premières, et reposant sur un endettement public non soutenable[3]. Cette croissance ne profite guère à la majorité des citoyens : la fable de l’émergence, où la foi dans la révolution technologique et le marché voudrait tenir lieu d’espérance commune avec l’ancienne métropole, ne convainc pas plus l’homme de la rue africaine que le discours de la start-up nation ne convainc les Gilets jaunes[4]. Elle apporte en revanche de l’eau au moulin de ceux qui sont prompts à dénoncer les objectifs économiques cachés de la France.
Les discours annonçant la fin de la Françafrique ne persuadent guère, même si ses aspects affairistes les plus douteux sont clairement en résorption depuis François Hollande. Enfin, l’arrivée de puissances de premier plan dans l’ancien pré carré (Chine surtout, mais aussi Inde, Turquie, Émirats arabes unis, Allemagne et désormais Russie) permet une mise en concurrence de la France, dont les chefs d’État africains jouent au mieux, si bien que le rapport de force avec Paris s’inverse ou, du moins, se rééquilibre[5]. Ces nouveaux intervenants sont conscients de leur pouvoir : imagine-t-on un chef d’État africain appeler Pékin ou Moscou pour demander le rappel d’un ambassadeur ?
S’y ajoutent aujourd’hui les effets du renouvellement de notre personnel politique, désormais peu au fait des réalités africaines. Il est confronté à des praticiens madrés de la relation avec la France, et dotés d’une connaissance fine et ancienne du jeu politique hexagonal.
Entre complaisance et puissance
La complaisance se manifeste au quotidien devant les tracas divers dont sont victimes ses ressortissants, et le racket fiscal de ses entreprises ou les décisions de justice souvent iniques dont elles pâtissent. La lutte contre ces abus mobilise au jour le jour les ambassades, qui reçoivent un soutien inégal de Paris. Que d’avanies entre deux visites présidentielles ou ministérielles débouchant sur des « succès commerciaux » ou des arrangements fiscaux ! En matière d’aide au développement, l’attitude française ne diffère pas de celle des autres bailleurs de fonds qui, les yeux rivés sur leurs objectifs de décaissement, sont prêts à avaler bien des couleuvres. Mais la France étant souvent le premier bailleur de fonds bilatéral, elle est particulièrement exposée.
Les dirigeants français s’abstiennent le plus souvent de condamner publiquement le non-respect des droits de l’homme ou les pratiques antidémocratiques d’un dirigeant étranger. Paris se limite alors à des appels discrets à la modération et à la recherche de solutions « inclusives ». Compte tenu de sa relation ancienne avec eux, la France chuchote à l’oreille des dictateurs. Quand sa parole se fait forte, Paris suscite un tollé. La toute récente condamnation publique par Emmanuel Macron de la répression des indépendantistes anglophones par le régime Biya a été vivement critiquée au Cameroun, au-delà des cercles du pouvoir.
COVID-19, QUAND UNE MINORITÉ D’IRRESPONSABLES NOUS MENACE TOUS
EXCLUSIF SENEPLUS - Les rassemblements familiaux pour les fêtes et les décès se multiplient et rares sont ceux qui se sont entourés de précautions pour barrer la route à la contamination
Il y a de nombreux exemples dans le monde de pays dont la cohésion sociale et le civisme sont venus au secours de la crise du Covid 19. Prenons le cas de la Grèce. Bien que réputés indisciplinés, les Grecs se sont très vite pliés aux consignes gouvernementales. Après dix ans d’austérité, ils savent que leur système de santé n’est pas en mesure de faire face à l’épidémie et ainsi ils se sont mis au service du pays, pour se sauver eux-mêmes et pour sauver leur saison touristique.
Prenons le cas des Suédois. La relation de confiance entre la population et le gouvernement a été déterminante. Sans aucune obligation, en se limitant à des recommandations et à des incitations à limiter les déplacements et à respecter les mesures préventives. La Suède a résisté face à l'épidémie Covid-19, sans avoir à mettre en place des mesures drastiques et contraignantes.
Mais ne rêvons pas, ici nous sommes au Sénégal et face au comportement jugé irresponsable des Sénégalais et au non-respect des instructions contre le coronavirus, le président Macky Sall a dû prendre de nouvelles mesures et des sanctions administratives.
C’est typiquement sénégalais, c’est même à cela qu’on reconnait les sénégalais, parfois irresponsables, souvent indisciplinés, récalcitrants, désobéissants et en perpétuelle opposition politique… Or, si cet esprit frondeur peut s’avérer une qualité quand il s’agit d’exercer sa liberté de penser, il est un fléau dès lors qu’il convient d’adopter une ligne de conduite protectrice et solidaire.
Partout dans le monde les consignes de port du masque, de lavages fréquents des mains et de distanciation sociale recommandées et rappelées inlassablement par les praticiens de santé sont respectées et appliquées pour combattre l’épidémie. Les rassemblements et les attroupements sont limités même si parfois les plus jeunes sont récalcitrants à cela.
Chez nous non, le comportement de nos concitoyens est irréfléchi et toujours en opposition. Les rassemblements familiaux pour les fêtes et les décès se multiplient et rares sont ceux qui se sont entourés de précautions pour barrer la route à la contamination.
Ici en réponse aux mesures de riposte contre le coronavirus, nous assistons à des mouvements de révolte avec des attaques contre les forces de l’ordre. Quand l’État a demandé la fermeture des lieux de prière, les populations se sont levées pour exiger leur ouverture. Cette semaine encore, pendant la Tabaski, des religieux se sont opposés à cette décision faisant valoir leur foi en Dieu.
Résultat, alors que le président Macky Sall et son gouvernement avaient réussi à déjouer les scénarios les plus alarmistes face à l’épidémie, aujourd’hui la menace grandit dans notre pays et des innocents meurent à cause d’une minorité d’inconscients.
Cent soixante-dix-sept nouveaux cas de contamination ont encore été notés ce jeudi 6 août 2020, en plus de cinq nouveaux décès. Face au relâchement des Sénégalais, la pandémie accélère sa propagation sur le territoire national. De plus, les cas communautaires, donc non traçables, continuent d’augmenter. Sur les 177 nouveaux cas confirmés, 82 sont issus de la transmission communautaire.
Il y a bien là de quoi être inquiet et le chef de l’État Macky Sall est dans son rôle quand il menace de ramener l’état d’urgence pour casser le rythme des contaminations. Une partition difficile à jouer tant la situation est ingérable, entre l’ignorance des uns, l’indifférence des autres, l’influence des confréries, la désinformation des réseaux, une économie fragilisée et un virus meurtrier.
En plus d’inciter son peuple à revenir à la raison afin de réduire le taux de propagation de la pandémie, le chef de l’Etat a condamné la recrudescence des actes de délinquance et de vandalisme qui se multiplient dans le pays et promis à leurs auteurs des sanctions exemplaires.
Car oui, en plus de la bêtise qui sévit, c’est la violence aveugle et gratuite qui se répand aussi vite que le coronavirus au Sénégal. Comment peut-on entendre dans un pays civilisé que des partisans d’un chef religieux, vandalisent et saccagent le siège d’un journal, Les Echos en l’occurrence, ceci parce qu’ils reprochaient à la rédaction du journal d’avoir affirmé que le dirigeant de leur confrérie était hospitalisé, atteint par le Covid-19. C’est tout simplement honteux.
Pour se relancer et reprendre son développement, le pays doit se ressaisir et pour cela, les sénégalais, qui restent civiques et responsables dans leur grande majorité, doivent retrouver leur confiance et veiller à l’application des consignes sanitaires tout en se rangeant derrière l’autorité de leur président.
Car si une chose ne manque pas à Macky Sall, c’est l’autorité. Son autorité et sa manière de gérer cette crise sanitaire sont décisives. Discordes, scandales imaginaires et polémiques stériles doivent cesser. Le président de la République doit remettre de l’ordre dans tout ça. L’opinion attend ces changements et cette fermeté. Le pays doit se remettre en ordre de marche, avec à sa tête un chef, élu par la majorité du peuple, toujours derrière lui !
LA CHRONIQUE HEBDO DE PAAP SEEN
LES PETITES TYRANNIES
EXCLUSIF SENEPLUS - Pour fabriquer un citoyen honnête, impliqué et généreux, en capacité de bâtir de grandes choses, il faut le situer dans un espace pacifique. Comment nous débarrasser de nos instincts agressifs ? NOTES DE TERRAIN
Vendredi 07 août 2020. Je ne retrouve plus ma carte d’identité. Je la cherche partout, en vain. J’ai fouillé les armoires et les commodes, chez moi. Au bureau, tout a été retourné. À Rufisque, aussi, j’ai vérifié. Toujours rien. Ces dernières semaines, j’ai circulé avec une photocopie légalisée de la carte d’identité. Mon passeport est expiré depuis longtemps. Je ne suis, donc, pas en règle. Il y a urgence à refaire une autre carte d’identité. Pour parer à toutes mauvaises surprises. Je me suis décidé, ce matin. J’irai me faire établir une déclaration de perte, préalable à la confection d’une nouvelle carte d’identité. Comme la gendarmerie de Ouakam se trouve sur mon chemin, je vais y passer avant d’aller au bureau.
Des fûts et des seaux sont placés à l’entrée. Visiblement, pour que les visiteurs se désinfectent les mains. Je n’ai pas jugé nécessaire de m’en servir. Je me déplace, en permanence, avec un flacon de gel hydroalcoolique. Je m’en sers, dès mon arrivée. Je constate qu’il n’y a pas trop de monde contrairement aux autres fois où je suis venu ici. À gauche de la porte, quelques personnes se tiennent contre le mur, et attendent. Un bureau de fortune est installé près d’eux. Deux personnes sont assises. Je les reconnais. Un vieux et un gars plus jeune. Ce dernier rédige les plaintes pour ceux qui ne peuvent pas le faire eux-mêmes. Je rentre dans l’office central. L’affluence, ici aussi, est faible par rapport à mes visites précédentes.
Deux gendarmes sont postés à l’accueil. Un homme debout, qui signe et délivre les documents aux visiteurs. Une femme affalée sur sa chaise. Je n’ai pas trop remarqué ce qu’elle faisait. Il y a un petit brouhaha. Des gendarmes, certains en tenue civile, circulent à l’intérieur, comme dans un labyrinthe. La majorité des visiteurs attendent, bien campée dans les chaises dévolues au public. Tout le monde, ici, porte un masque. J’explique ma situation au gendarme qui gère les tâches administratives. Il me dit gentiment d’attendre à côté. J’en profite pour demander à l’autre gendarme de vérifier s’il n’y a pas une pièce d’identité à mon nom. J’étais venu légaliser des papiers, ici, il y a quelques temps. Peut-être que j’avais égaré ma carte d’identité, ce jour-là. Elle regarde. Non, il n’y a aucun document correspondant à mes indications.
Je me tiens à l’écart, près du passage qui mène vers les bureaux. En attendant qu’on me fasse signe. Une scène captive mon attention, à ce moment-là. Un gendarme débarque dans la salle, avec une jeune fille. Cette dernière porte une robe large et un voile. Elle pleure. Son beau visage est mouillé. Des gouttes de larmes s’écrasent sur le sol. Elle semble terrifiée. Elle essaie d’essuyer ses yeux avec son épaule gauche. Sa démarche est maladroite, désordonnée. Elle suit le gendarme, à l’intérieur. Ils se dirigent vers l’un des bureaux. Quelques minutes plus tard, ils reviennent. Il lui demande de s'arrêter. Elle est sommée de se mettre debout devant les visiteurs. Le gendarme insiste. Elle tremble. Tourne ses yeux attendrissants tout autour de la pièce. Elle est submergée. De honte ? De regrets ? De faiblesse ? Le gendarme lui crie dessus et lui demande de cesser ses pleurs. Elle n’y arrive pas. Elle gémit, et gronde de chagrin, de plus en plus fort. S’assied sur le sol. Une autre gendarme lui demande de se taire. Elle sanglote, dit des mots, imperceptibles.
Je ne sais pas ce que cette fille a bien pu faire. Il y a bien des raisons, si elle s’est retrouvée dans cette situation. Au fond, j’ai un peu pitié d’elle. Un fort sentiment me secoue. De peine et de bienveillance. Il y avait quelque chose de choquant. Comme une tentative d’humiliation, dans la posture qu’on lui demandait de tenir. Quelques fois, j’ai moi-même subi cette sorte d’autoritarisme surjoué. Ma foi, je l’ai senti comme une vraie injustice. Je me rappelle ce policier, en service dans un commissariat, qui m’a parlé comme si j'etais un chien. Alors que je demandais juste des renseignements. Je lui avais alors dit qu’il s'adressait à un citoyen sénégalais. Je lui ai promis de lui rendre tout mot déplacé ou inapproprié. Il m’a illico intimé l’ordre de sortir du poste de police. Comme un malpropre. J’ai eu deux ou trois autres altercations avec des forces de l’ordre. À chaque fois, par manque d’élégance et de courtoisie de leur part.
La jeune fille, quelle que soit sa faute, était déjà bien mal en point. Elle ne méritait pas les réprimandes publiques. Il y a une justice pour cela. Elle était enchaînée. Complètement dévastée. Elle ne protestait pas. Pourquoi vouloir l’humilier devant tout le monde ? Elle est humaine et elle a des droits inaliénables. Comme tout le monde, la préservation de sa dignité doit toujours rester son bénéfice. L’autorité d’un gendarme ou d’un policier, sacralisée par la loi, a des limites. Les relations entre les forces de l’ordre et les citoyens peuvent ne pas être, mécaniquement, brutales. La fermeté ne doit pas empêcher le respect de l’altérité, et de l'intégrité morale de chaque personne. Personnellement, je me sens constamment fragile. En insécurité. Dès que je rentre dans une gendarmerie ou un commissariat.
Au-delà, des forces de l'ordre, partout dans notre société, où il y a autorité, il y a aussi demande d’obéissance et de flatterie. Dans notre pays, l’usage du pouvoir, aussi petit soit-il, est toujours vicié par l’autoritarisme et l’abus. On pourrait le voir comme un profond désir d’absolutisme. Depuis l’échelle sociale embryonnaire, jusqu’aux plus hautes sphères d’administration communautaire. Partout, chez celui qui détient une parcelle de pouvoir, on remarque un besoin de piétiner, de soumettre, de régenter. Dans les familles, dans les espaces publics et privés. Ainsi, c'est une violence diffuse, qui gouverne nos rapports sociaux. La société sénégalaise a cette faiblesse, de favoriser un despotisme sourd. Un art de la tyrannie, mesuré. Mais réel et endémique. Ces petites violences s’accumulent dans notre conscience collective. Elles écrasent les petites gens. Sur le corps social, elles agissent comme des exercices d’injustices, et de peurs. Et augmentent les névroses. Elles deviennent de petites graines, qui aliènent les esprits. Or, pour fabriquer un citoyen honnête, impliqué et généreux, en capacité de bâtir de grandes choses, il faut le situer dans un espace pacifique. Comment nous débarrasser de nos instincts agressifs ?
Alors que le sort de la jeune fille me forçait à réfléchir, le gendarme à l'accueil m’a demandé de venir. Il a sorti une fiche à renseigner et m'a posé succinctement plusieurs questions. Il n’y avait pas, dans sa voix, cet accent d’autorité et de virulence. Que j’attendais.
- Prénom ?
- Abdoulaye.
- Nom ?
- Sène.
- Date de naissance ?
- ….
- Lieu de naissance ?
- Rufisque.
- Prénom du père ?
- D. Sène
- Prénom et nom de la mère ?
- O. A. Diallo.
- Profession ?
- Journaliste.
- Adresse ?
- Ouakam.
- Tenez, c’est bon.
- Merci monsieur.
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